Au bord de la Bièvre: impressions et souvenirs
ENVOI A L'ONCLE TOBIE
Vous êtes le héros de prédilection de mon esprit—et surtout de mon cœur.
Vous avez une bienveillance et une affectuosité qui m'attendrissent toujours, et me font pleurer parfois.
Je ne me demande pas,—comme votre gouailleur neveu,—d'où vous viennent cette bonté et cette mansuétude que vous témoignez à tout ce qui vit et souffre. Je ne songe pas au siége de Namur—votre califourchon favori,—ni à votre blessure dans l'aine qui en fut la conséquence.
Je ne songe qu'à votre bonhomie et à votre bon cœur. Je me rappelle sans cesse ce jour où un frelon entra pendant que vous dîniez et sembla prendre plaisir à vous importuner par ses bourdonnements. Vous cherchiez à l'attraper—et il vous échappait toujours. A la fin vous l'attrapez! Vous vous levez aussitôt de table et vous allez ouvrir la fenêtre. Puis lâchant le frelon:
«—Va... va... pauvre diable!—lui dites-vous doucement.—Je ne te ferai point de mal... Le monde est assez grand pour nous contenir, toi et moi...»
Ah! cher et bon oncle Tobie! je vous vénère et je vous aime.
Recevez donc cet humble témoignage de mon respect et de mon amitié pour vous,—et ne m'oubliez pas auprès du caporal Trim!
Alfred DELVAU.
Paris, avril 1854.
Paris.—Imp. A. Wittersheim et Ce, 31, quai Voltaire.