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Chronique de 1831 à 1862, Tome 4 (de 4)

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1858

Nice, 2 janvier 1858.—J'étais préoccupée de l'état de Pauline quand, hier, une dépêche télégraphique arrivée le soir m'a fait voir que l'état était grave. Je pars donc ce matin; j'irai le plus vite possible.

Paris, 4 janvier 1858.—Je me suis embarquée avant-hier à Nice sur un assez mauvais bateau, mais il me faisait gagner douze heures; j'ai fait le trajet en trente-six heures et je ne regrette pas cette hâte; car, si j'ai un regret, c'est de ne pas être venue plus tôt, et d'avoir écouté les dires des médecins et les conseils de mes correspondants, au lieu de suivre mes instincts. Je trouve Pauline très mal; les médecins disent que le cas n'est pas désespéré; mais il me paraît, à moi, qu'il est bien près de l'être et que, peut-être, dans quelques jours, cette âme séraphique aura pris son vol vers la céleste patrie. Elle a toute sa tête et paraît fort aise de me voir [224].

Paris, 9 janvier 1858.—Je viens de passer de bien mauvais jours. Mes anxiétés pour Pauline sont aggravées par neuf à douze degrés de froid! Mais il faut louer Dieu de tout et le remercier à genoux du mieux notable qui, depuis vingt-quatre heures, s'est manifesté dans l'état de Pauline, lorsqu'il s'agissait de rien moins que de l'extrême-onction qu'elle demandait.

Paris, 16 janvier 1858.—L'attentat d'avant-hier a ému tout Paris et aura un retentissement en Europe [225]. Elle est bien malade partout, cette pauvre Europe. Je vis si uniquement à l'hôtel d'Albuféra, qu'en dehors de là, tout est ignorance pour moi [226].

Paris, 25 janvier 1858.—On dit, répète, raconte et croit tout dans la seule maison où je suis en communication avec le monde extérieur; mais on y dit tant de choses contradictoires que le vrai est difficile à en extraire; cependant, avec ce que mes fils me rapportent de leurs clubs, et ce que le duc de Noailles me dit dans les visites qu'il me fait une demi-heure avant mon dîner, j'apprends quelques bruits. Je n'en suis pas plus habile. Chacun voit par sa propre lunette, dont les verres me paraissent assez obscurs; la passion, la rancune, la poltronnerie, la bassesse ou un stupide dédain, ou bien encore l'âcreté des ambitions déçues: tout cela fait un vilain ou du moins un stupide ensemble, dans lequel la raison, la modération, le vrai ne trouvent guère leur place. Il en résulte pour moi un tableau sombre et alarmant, quoique les dernières découvertes aient le mérite de mettre beaucoup de choses à nu, et de valoir peut-être à l'Europe un sursis dans le crime.

Paris, 29 janvier 1858.—Je ne dirai rien du Paris social, puisque je n'y participe pas, rien du Paris politique, puisque j'en suis plus loin encore; reste le Paris académique, qui pourrait bien être assez épineux et délicat à toucher; car tous les sujets vont devenir de plus en plus scabreux.

M. de Hatzfeldt est revenu hier de Berlin; il va avoir trois Princes prussiens à recevoir; c'est beaucoup à la fois [227]. Il paraît que la grande affection de la Famille Royale d'Angleterre pour l'Empereur et l'Impératrice des Français a fait beaucoup d'impression sur les Princes prussiens, et qu'ils arrivent déjà fort modifiés de ce qu'ils étaient en quittant leurs propres foyers.

Paris, 27 février 1858.—Les Anglais qui sont ici s'accordent à dire que le Cabinet Derby traversera la session, mais n'ira pas au delà. Lady Westmorland me mande qu'elle trouve lord Palmerston très baissé, très brisé et que sa chute était moins étonnante que ne l'avait été la durée de ses victoires parlementaires [228]. La mort du Père de Ravignan est généralement reconnue, par le bon public, comme une perte sensible; Pauline en est attristée profondément. Le bon Père lui avait fait dire par leur médecin commun de bien touchantes paroles.

Le procès d'Orsini, la condamnation, les discours, les plaidoiries, de nombreuses arrestations, le meeting à Londres et surtout le discours fort inattendu du général Mac-Mahon au Sénat, qui pourrait bien briser le bâton de maréchal qu'il entrevoyait; voilà ce qui défraie le parlage des salons. L'inquiétude morale se mêle à tout: on entend des bruits sourds, on marche et on sent la terre trembler sous ses pieds. On s'émeut de tout, on ne se rassure sur rien. Le doute, ce grand tourment de l'âme, s'empare des masses comme des individus; ce qui formait le charme de la société, la sûreté confiante, s'envole à tire-d'aile; l'on se heurte, d'autant plus aisément et plus rudement, qu'on est plus près les uns des autres.

Paris, 3 mars 1858.—La lettre d'Orsini, dont la publication a été permise par celui à qui elle était adressée (ce qui ne laisse pas que d'étonner le Corps diplomatique); ce qui s'est passé au meeting de Londres [229], le discours de Félix Pyat, l'autorisation accordée aux généraux Changarnier et Bedeau de rentrer en France [230] (autorisation destinée à rassurer, dit-on, tout ce qui n'est pas rouge, ou à tenir ces messieurs plus sous la main); puis des arrestations nombreuses, ne portant, du reste, que sur des écarlates; voilà, avec les funérailles de M. de Ravignan, ce qui occupe Paris depuis plusieurs jours!

Paris, 12 mars 1858.—La brochure parue hier, intitulée: Napoléon III et l'Angleterre, qu'on croit être tracée de la main du maître, est l'événement du jour, et les paris sont ouverts pour savoir si elle fera un bon ou un mauvais effet de l'autre côté du détroit [231]. On dit qu'à Vienne, l'autorisation donnée à la publication de la lettre d'Orsini a fait un mauvais effet.

Paris, 10 avril 1858.—L'infâme article signé Rigault qu'a donné, il y a quelques jours, le voltairien Journal des Débats sur les sermons du carême, est faux dans les faits, lourd dans son ironie de mauvais goût. Il est mal pensé, mal senti, mal dit [232]. Celui d'Albert de Broglie, sur le Père de Ravignan, a ses parties charmantes quoiqu'il témoigne de la gêne que lui cause le souvenir de ce séjour à Rome, pendant lequel il avait été chargé de jouer de mauvais tours aux Pères Jésuites. Ah! si le présent n'était pas encadré entre le passé et l'avenir, comme ce serait plus commode de parler et d'écrire!

Paris, 14 avril 1858.—Voilà les pouvoirs du Prince de Prusse prolongés [233]; mais cet indéfini est bien fâcheux. Aussi, comme le parti ultra-libéral relève la tête en Prusse! On achèvera, sous ce pauvre Prince (et cela sous forme semi-légale), le peu qui survivait de 1848. Tout va mal en Prusse, comme ici, comme partout. C'est ennuyeux d'assister à la fin du monde; j'en trouve le spectacle fort laid!

Paris, 22 avril 1858.—M. Guizot est venu hier chez moi et m'a forcée à avoir une explication sur certain passage du premier volume de ses Mémoires qu'il vient de publier [234]. Alors je la lui ai accordée, et il a passé condamnation avec une humilité qui ne lui est pas habituelle. Il m'a, de lui-même, promis de rayer, dans la seconde édition, certains mots malsonnants; il a convenu des mauvaises interprétations dont plusieurs paroles étaient susceptibles. Enfin, il m'a dit qu'en parlant de l'ambassade de M. de Talleyrand à Londres, il le replacerait dans sa vraie lumière. Il m'a priée d'observer que, de tous les écrivains qui ont parlé de M. de Talleyrand depuis sa mort, il était celui qui l'avait le plus ménagé; mais il a aussi ajouté qu'il regrettait et qu'il me demandait pardon de ne pas m'avoir montré ce passage manuscrit, mais que comme j'avais décliné toute communication avec lui au sujet de M. de Talleyrand, il n'aurait pas cru qu'il serait bien venu à m'en occuper. Bref, il a voulu être singulièrement doux.

Paris, 17 mai 1858.—C'est aujourd'hui un anniversaire qui me reporte vivement vers un temps de ma vie dont il ne me reste plus rien que ce qui a survécu dans mon cœur et qui s'éteindra avec cette petite flamme de l'existence qui jette encore une faible lueur sur le court sentier qui me reste à parcourir. Je le vois sans regret s'abréger: «Je m'ennuie des choses de la terre», comme dit l'Imitation, sans avoir, malheureusement, une ardeur égale des choses du ciel!

J'ai eu une intéressante lettre d'Angleterre. Le maréchal Pélissier s'y ennuie et demande à n'y pas rester longtemps [235]. La situation actuelle de l'Angleterre me paraît assez pauvre, sans grand danger. Le parti Tory est bien déchu. On fait ce que l'on peut pour réconcilier lord Palmerston et lord John Russel, et réorganiser ainsi le parti libéral [236]; mais il est douteux qu'on y parvienne. On dit que Macaulay se meurt et qu'il est devenu méconnaissable.

Paris, 19 mai 1858.—La nouvelle de la mort de Mme la Duchesse d'Orléans s'est répandue bien rapidement dans Paris [237]. On peut imaginer la diversité des impressions qu'une semblable nouvelle fait éprouver. L'intrigue protestante, très vive et très soutenue par la défunte, est atterrée, bien des ambitions expectantes sont déroutées. Les fusionnistes disent: «Pourquoi pas une année plus tôt?» Des catholiques fervents sont en actions de grâces. J'ignore l'impression du monde officiel. On se demande, de partout, sous quel toit, sous quelle direction les orphelins, qui ne sont plus des enfants, vont se trouver, se placer et s'abriter. Il mondo va da se [238]. L'hostilité, l'intrigue pâlissent devant le terrible imprévu qui, parti de haut, broie, pulvérise tout ce qui se croit capable de l'éviter ou de le diriger.

Paris, 21 mai 1858.—Mme la Duchesse d'Orléans a laissé un testament; il était déposé ici, chez un notaire, qui est parti hier pour le porter à Claremont. On suppose qu'il est plus politique que privé et qu'il est le commentaire de celui de son mari. Les gens de bon sens s'en alarment. Il y a foule pour aller assister aux obsèques qui auront lieu demain. Dans cette foule, toutes les nuances orléanistes, même celles entachées de républicanisme, s'y trouvent. Il n'y a que les fusionnistes qui s'abstiennent, comme Guizot, Duchâtel, Broglie, le duc de Montmorency. Les orléanistes pointus sont désolés; l'intrigue du prosélytisme protestant fort déconcertée; les catholiques pur sang en actions de grâces.

Le Gouvernement a fait mettre, dans la Patrie d'avant-hier au soir, un article convenable dans la forme, habile à son point de vue dans le fond. Dans le monde officiel, les uns sont satisfaits qu'une personne, qui, dit-on, se trouvait plus ou moins compromise dans la plupart des complots, qui, en tout cas, était le principe vital, agissant, persévérant d'un des prétendants, n'existe plus. Les autres croient, qu'elle de moins, il y a plus de chances pour que la fusion se reprenne, et y voient un danger. Tout ceci le démontre clairement.

M. Thiers est dans les partants, et cela contre le gré de sa femme et de sa belle-mère, quoique Mme la Duchesse d'Orléans écrivît toutes les semaines à Mme Dosne! Il va, dit-on, pour s'emparer du comte de Paris, si toutefois il y parvient. Voici aussi trois cent mille livres de rente, payées jusqu'ici par la France, qui vont faire défaut. On me dit, de bonne source, que la Reine Marie-Amélie, quoique souffrante et alitée, a pris cette mort subite avec un grand calme. Son cœur ni sa conscience n'ont jamais été en sympathie avec cette belle-fille ambitieuse, intrigante et protestante. On ajoute que les beaux-frères seront soulagés, car elle pesait sur eux de sa volonté, de son activité et de sa persévérance obstinée dans de certaines routes. Il n'y a que ses fils qui soient, dit-on, désespérés. Voilà ce que je recueille de divers côtés. Je m'abstiens de toute opinion, de toute prévision. Je suis un simple écho.

Paris, 25 mai 1858.—La mort de Mme la Duchesse d'Orléans est encore le sujet de toutes les conversations. Que de déceptions dans la vie de cette Princesse, où l'ambition a tenu une si grande place! Quel brusque dénouement à tant de vaines aspirations! Je ne sais rien de plus triste que de mourir ainsi, sans avoir pu se recueillir en face de l'éternité. Je ne cherche pas à démêler quelles seront les conséquences de cette disparition imprévue; elles pourraient être immenses; mais, dans les temps où nous vivons, les événements tournent le plus souvent de manière à confondre toute prévoyance humaine.

La Reine malade, au lit, n'a reçu aucune des personnes qui s'étaient rendues aux obsèques. Le comte de Paris et le duc de Chartres sont pour le moment à Claremont; ils iront ensuite en Allemagne pour voir leur grand'mère de Mecklembourg; puis ils reviendront se fixer en Angleterre, chez eux, voulant témoigner de leur indépendance à tous leurs oncles. Il reste à chacun des deux orphelins cent quatre-vingt mille livres de rentes, qui proviennent de l'héritage de Madame Adélaïde, et d'économies faites, depuis longtemps, au profit de celui des deux frères qui n'avait pas la chance du trône.

On m'a raconté que les trois Princes, oncles, tous vêtus de noir et d'une pâleur mate, ressemblaient aux Princes de France du temps de la Ligue; le duc de Nemours surtout était la reproduction de Henri IV. Le testament ne contient que des dispositions pécuniaires; mais il y a un écrit en forme de lettre qui, pour le moment, ne sera pas publié, mais qui ne rendra pas les chances pacifiques. La Reine a été plus saisie qu'affligée. Elle ira à St Léonard's dans peu de jours; on espère que l'air de la mer rendra des forces à cette pauvre Niobé. Sa faiblesse est grande et ne laisse pas que d'inquiéter.

A l'audience que M. le comte de Paris a donnée aux différentes personnes venues de Paris, il a dit: «J'ai beaucoup perdu; mais l'esprit, les conseils de ma mère me guideront toujours; c'est en ce sens qu'elle n'est pas morte.» M. de Montguyon, présent, a eu l'inconvenance de prendre la parole et de dire comme corollaire: «Messieurs, est-ce assez clair?». Sur quoi, le comte de Paris a repris: «Oui, messieurs, ce que je viens de vous dire, vous pouvez le répéter à tous.» C'est un de ceux présents qui m'a raconté cette scène.

Paris, 29 mai 1858.—On n'a pas fait part de Claremont à Frohsdorff, tandis que le Comte de Chambord a écrit spontanément à la vénérable tante, ce qui impatiente les orléanistes pointus et les républicains à l'eau de rose, qui se donnent le triste plaisir d'inventer les plus grandes stupidités, des impossibilités évidentes pour irriter et exciter la crédulité merveilleuse des partis.

Hélas! il y a des gens mal intentionnés pour tout inventer, il y a aussi des imbéciles pour tout croire.

On a ouvert le testament de la Duchesse d'Orléans; le grand écrit politique avait été retiré et détruit, parce qu'il devait être refait à Eisenach, dans le courant de l'été, avec l'aide de M. Thiers, qui devait s'y rendre à cet effet.

On me mande d'Angleterre ce qui suit: «Quel singulier choix que le maréchal Pélissier comme ambassadeur! Ses goûts, ses manières dépassent tout ce qu'on peut imaginer; tout ici l'ennuie, ce qui n'est pas étonnant, vu qu'il paraît avoir en haine la vie de la société et la vie politique. La politique, les femmes, la conversation lui sont totalement antipathiques; il lui reste le jeu et la table, mais, des personnes qui lui ont adressé la parole, aucune n'a envie de recommencer. Il n'a pas même voulu se faire présenter aux dames du Corps diplomatique». On a de l'humeur dans Albion, le high-life anglais est peu propre à comprendre un soldat africain; les défauts le choquent, les qualités lui échappent.

Nouvelle réunion à Bade des deux correspondants.

Sagan, 27 juillet 1858.—On m'écrit de Tegernsee que la santé du Roi de Prusse se fortifie, sans apporter de changement dans l'état de l'intelligence.

Voici ce que je trouve dans une lettre de Londres: «On n'est préoccupé ici que de Cherbourg et de la visite que la Reine Victoria doit y faire [239]. Elle devait d'abord y aller avec six vaisseaux, les gens d'esprit ont dit: «Non, cinquante ou un seul.» Elle ira avec deux frégates; la mer sera couverte de yachts et de steamers particuliers; les deux Chambres du Parlement sont aussi invitées et auront leur vaisseau. Lord Palmerston voulait y aller; mais, quand il a vu le sentiment public, il y a renoncé.»

Berlin, 14 août 1858.—Il n'y a, pour ainsi dire, personne à Berlin; chacun a pris le large ou est à Potsdam pour satisfaire sa badauderie. En général, on n'approuve pas la visite actuelle de la Reine Victoria; on ne la trouve pas suffisamment motivée au point de vue maternel et peu délicate en regard du Roi.

L'arrivée de la Reine à Potsdam a été tardive; les illuminations étaient éteintes; il ne restait que tout juste assez de luminaire pour éclairer l'immuable paletot du Prince consort [240] et la tenue, plus que négligée, de la Mission britannique à Berlin, qui a mêlé ses redingotes et ses cravates noires à la tenue de grand gala de la Famille Royale, des autorités supérieures, réunies au débarcadère de Potsdam. Voilà pour le début.

Ici, à Berlin, on ne parle que du shocking anglais et de la pose du câble électrique entre l'Angleterre et l'Amérique. Ceci me frappe plus que les cravates noires et les pantalons écrus. Nous avons beau être accoutumés aux miracles électriques, ce nouvel effort reste étourdissant; la terre deviendra trop petite pour la science et la puissance de l'homme.

Sir James Graham voulait aller à Hambourg; sur quoi lord John Russel lui a écrit: «How can you go to such a national humiliation [241]?» Il paraît que c'est là, en effet, le sentiment public. Pour la France, la visite de la Reine Victoria à Cherbourg est une démonstration pacifique; pour l'Angleterre, il me semble que c'est un principe d'humeur et d'hostilité qu'on pourra bien ne pas oublier de sitôt.

Les médecins ont souhaité que le Roi de Prusse allât passer les mois de septembre et d'octobre à Côme; il y avait d'abord consenti; puis il s'y est refusé avec obstination et a résolu de revenir le plus vite possible à Sans-Souci; il voulait même y arriver avant que la visite britannique ne fût achevée, et la Reine a eu beaucoup de peine à l'en empêcher. Il paraît que ce pauvre Roi, et cette malheureuse et royale garde-malade, reviendront à Sans-Souci dans les premiers jours de septembre. Le Roi n'est mieux que physiquement.

Berlin, 17 août 1858.—La Cour est venue, hier, à Berlin, pour montrer les différents palais à la Reine Victoria; le lunch a eu lieu chez la Princesse Frédéric-Guillaume; personne d'autre n'y était invité que l'Olympe, les Radziwill et moi. La Reine a été des plus gracieuses, se souvenant de moi et de Pauline à Kensington-Palace, causante, rieuse, animée, l'air gaie, tout à fait en bonne veine. Sa fille, plus grande que sa mère, a pourtant l'air moins royal; elle plaît à son mari et paraît en train de faire des enfants; elle remplit ainsi les deux grandes conditions; en outre, elle a l'air ouvert et naturel.

Berlin, 24 août 1858.—Voici une lettre d'Angleterre qui dit ceci: «Nous sommes inquiets ici, même des libéraux quand ils sont modérés, lord Grey, par exemple. On ne sait comment lutter contre le mal qui nous trouble. Les hommes sérieux conviennent eux-mêmes que ce qui leur manque le plus, c'est le courage de dire tout haut ce qu'ils pensent. Ils disent que le premier qui ferait hardiment appel au bon sens national contre l'esprit radical trouverait beaucoup d'appui; mais cet homme ne se trouve pas.»

On me disait hier que le Roi Léopold a eu un gros échec par le rejet de sa loi sur les fortifications d'Anvers; c'était sa propre idée et il y tenait fortement. Il en avait parlé à Londres, dans son dernier voyage, comme de sa meilleure garantie contre les ambitions et les révolutions françaises. On ne sait pas encore comment il a pris ce coup, et s'il fera quelque chose pour revenir sur cette question [242]. Quand il est battu, il devient encore plus silencieux que de coutume.

On m'écrit de Paris de bonne source: «Lord Palmerston se propose, non pas de quitter les affaires, comme le disent niaisement les gazettes, mais de venir très prochainement ici faire une visite à l'Empereur Napoléon. Il se flatte de reprendre bientôt son poste, voudrait se concerter sur sa politique future avec l'Empereur, et se faire absoudre de quelques incartades; il croit qu'un tel certificat lui serait utile pour remonter au pouvoir.

«Dans les dernières conférences de Paris, il s'est établi une singulière entente cordiale entre la France et l'Angleterre; par suite, sans doute, de l'entrevue de Cherbourg [243], M. de Hübner, étonné, a vivement interpellé lord Cowley qui a répondu qu'il se conformait aux instructions de son Gouvernement: «En ce cas, a dit M. de Hübner, il est de mon devoir d'instruire le mien de ce qui se passe.» Le lendemain, Walewski a dit, à l'ouverture de la séance, que lord Cowley, étant à Chantilly, l'avait prié de le représenter en lui donnant ses pleins pouvoirs. Dans le cours des entretiens que l'Empereur a eus à Plombières avec M. de Cavour [244], l'Empereur a dit, au milieu de beaucoup d'autres choses: «Dans peu de temps, on sera bien surpris en Europe de mes nouveaux rapports avec le Gouvernement anglais; on verra que l'alliance s'est fortifiée au lieu de s'affaiblir.»

D'autre part, on me mande que la Bretagne est conquise à l'Empire, que les légitimistes sont totalement découragés et les orléanistes furieux.

Berlin, 31 août 1858.—Le Roi arrive après-demain à Sans-Souci. La Reine demande, d'une façon expresse, qu'il n'y ait personne au débarcadère de Potsdam, ni au perron de Sans-Souci. Il est même douteux que le Prince de Prusse s'y trouve au premier moment. M. de Manteuffel a dit, à un membre important du Corps diplomatique qui me l'a répété en confidence, que l'on n'attendrait assurément pas la réunion des Chambres pour procéder à un état de choses moins provisoire que ce qui a lieu depuis un an. M. de Manteuffel et M. von der Heydt, s'étant bien insinués dans l'esprit du Prince de Prusse, se croient certains de conserver leur poste sous la Régence, ce qui fait qu'ils y poussent, tandis que Westphalen, Raümer et Waldersee, sentant qu'ils seraient expulsés, s'y opposent. Personne ne croit à l'abdication, que ni Roi, ni Reine n'admettent; mais le mot de Régence se prononce de plus en plus dans les cercles élevés et dans le public.

On dit que la Reine Victoria, en échange de la complaisance qu'elle a eue d'aller à Cherbourg, a obtenu l'abandon de toute insistance pour le canal de Suez. Ce qui est plus sérieux, c'est que l'Empereur Napoléon, qui a beaucoup causé avec M. de Cavour à Plombières, lui a fait de fort belles promesses pour l'affranchissement de l'Italie. C'est l'Empereur qui a voulu voir M. de Cavour et lui a fait dire de venir à Plombières. Il voulait, d'abord, que la visite fût secrète. Cavour s'y est refusé et a demandé la publicité qui lui a été accordée. Le Comte de Chambord, pendant sa visite à Bruxelles, a dit au Roi Léopold: «Je ne sais pas ce qui arrivera en France, ni quand il y arrivera quelque chose; mais il n'y arrivera rien sans que je n'y sois et que j'en sois.» Le Roi Léopold n'a pas manqué d'écrire ces paroles au duc d'Aumale.

Voici deux bons mots du duc de Malakoff, un peu risqués, mais n'importe. L'Impératrice Eugénie voulait que le mariage, avec Mlle de la Paniega, se fît le 8 septembre [245], anniversaire de la prise de Malakoff. «Non, a répondu le Maréchal, je l'ai pris le 8, mais je n'y suis entré que le 9.» La comtesse Walewska, qui fait la corbeille, trouve le futur un peu avare. Elle voulait qu'il donnât deux rivières de diamants; sur quoi il lui a dit: «Non, une est suffisante pour s'y noyer.»

Berlin, 5 septembre 1858.—J'ai été en communication avec des revenants de Potsdam bien informés: il n'y a ni aggravation, ni amélioration dans l'état du Roi, statu quo complet. On croit qu'une sorte d'intuition, à moitié voilée, préoccupe, agite et a fait tenir à revenir à Sans-Souci pour y prendre un grand parti. Seulement, la faculté d'exprimer, de formuler sa pensée, la laisse incertaine pour les entours les plus intimes; on suppose plus qu'on ne sait.

Dès les premières heures du retour, la Reine a été circonvenue de plusieurs faiseurs prêchant dans un sens, tiraillant dans l'autre, sans laisser à cette pauvre martyre le temps de respirer. Cependant, elle ne s'est rendue ni aux uns, ni aux autres, et il me semble qu'on atteindra ainsi la fin du mois. Mais deux choses me paraissent résolues: un nouveau départ pour Méran, peut-être pour Gênes après; ce départ aurait lieu dans les premiers jours d'octobre. Avant, il y aurait une résolution définitive de prise, en ce sens que l'état actuel se modifierait, non par une abdication, mais par une Régence.

On a remis au Prince de Prusse un mémoire sur les différentes formes à donner au définitif relatif; une de ces formes s'appelle Co-Régence. Le Prince a rendu ce mémoire après avoir mis en marge: «Jamais», ce qui est fort sage.

M. de Manteuffel est tout à la politique française; l'influence anglaise est plus particulièrement dans une partie de la Famille Royale, tandis que l'autre tourne ses regrets vers la Russie. Personne ne me semble assez pénétré que le plus sage et le plus prévoyant serait de tendre honnêtement la main à l'Autriche. Du reste, il faut en convenir, l'étoile napoléonienne est, pour l'instant, resplendissante. Tout lui sourit, depuis la Bretagne jusqu'à la Chine. Le berceau de la fidélité monarchique a passé à d'autres amours!

Le mariage Malakoff est fixé au 2 octobre. L'Impératrice donne, non pas la corbeille, mais le trousseau; elle veut attacher le Maréchal à sa fortune en le faisant son allié... Mais lui, quel vieux fou! S'affubler, à soixante-trois ans, d'une Espagnole, belle à miracle, et qui, dit-on, a bien de la peine à se résigner à une pareille union!

Berlin, 8 septembre 1858.—On m'écrit que la duchesse Mathieu de Montmorency a laissé douze cent mille livres de rente. En conscience, il devrait en revenir une part à M. Cousin; les grandes dames du passé lui doivent quelque chose. Que lui auraient-elles donné s'il avait dit, de leur vivant, tout ce qu'il en dit aujourd'hui? La duchesse Mathieu descend en ligne droite de la duchesse de Chevreuse (connétable de Luynes en premières noces), qui a inspiré un des jolis articles de M. Cousin.

M. de Falloux me mande des confins de la Bretagne: «Les ovations napoléoniennes de la Bretagne n'ont pas ébranlé le parti légitimiste. Tant que l'Empereur Napoléon vivra et régnera, il pourra avoir de semblables satisfactions; mais elles ne le feront pas vivre ni régner un jour de plus. Ce sont des succès plus bruyants et plus brillants que sérieux; pour quelque temps, l'apparence vaut la réalité, sans que ce soit pourtant la même chose. Il y a dans la situation de l'Empereur Napoléon des faiblesses que ni les rencontres royales ni les applaudissements populaires ne peuvent guérir, et sa destinée dépend de plus grandes causes.»

Berlin, 11 septembre 1858.—Avant-hier, M. de Manteuffel a eu la première conversation sérieuse avec la Reine, qui en est sortie extrêmement agitée. Les médecins se taisent et haussent en silence les épaules; les courtisans l'effrayent en lui disant que si elle prononce le mot Régence au Roi, elle peut l'exposer à une attaque subite et mortelle. Les ministres, c'est-à-dire deux ministres, disent que la Régence est indispensable, que tous les équivalents, sans le nom, ne suffiront pas au public, pas aux Chambres, qui tiendront d'autant plus au nom de Régence que le serment de la Constitution s'y rattache.

Le Prince de Prusse s'enfuit aux manœuvres de Silésie, de Hanovre, de Varsovie, pour n'avoir pas à s'expliquer. Il y a des personnes qui disent qu'on pourrait éviter l'action des Chambres par un Conseil de famille qui déférerait la Régence au Prince, sans que le Roi en ait, pour ainsi dire, la connaissance et le déplaisir; mais, avec une famille si désunie, cela n'est pas possible. La Reine, et ce qu'on commence déjà à appeler la vieille Cour, voudraient une simple délégation illimitée, comme durée et comme pouvoir; mais cela ne convient pas aux hommes proprement dits politiques, ni au public qui veut du définitif. Puis vient la question du voyage. La Reine est persuadée qu'il est urgent qu'il ait lieu au début d'octobre. Mais où aller? Le Roi redoute l'Italie; Méran, en Tyrol, n'est bon qu'en automne, horriblement triste en hiver, et dénué de toutes ressources; Venise est trop pauvre en promenades pédestres, qui remplissent les deux tiers des journées royales; Gênes, trop exposé à l'air irritant de la mer et au soleil trop vif; Rome, impossible pour la Reine [246]. Il y a des voix qui s'élèvent pour Pau; enfin, d'autres indiquent l'île de Wight, mais il y aurait pour le Roi l'agitation d'être près de la Reine Victoria, sans la voir; car le Roi est plus séquestré que jamais, d'après la volonté expresse des médecins. On ne permet pas à Humboldt de le voir, ce qui est pour celui-ci un chagrin profond et une véritable blessure. Quelqu'un, qui voit de près, me disait que, dans son opinion, il n'y aura jamais guérison, et que probablement il y aura déchéance, lentement progressive, qui finira par conduire à un état d'enfance.

Sagan, 16 septembre 1858.—Avant-hier, je suis allée à Sans-Souci, où j'ai vu le Roi sur la terrasse, et la Reine seule dans son cabinet, si confiante, si causante, si différente de ce qu'elle est habituellement que j'en ai été frappée et émue. Pauvre femme! Quelle tâche, et comme elle est noblement et simplement accomplie! Elle a abordé bien des difficultés de sa position, et j'ai clairement vu que, si le Roi n'est pas assez lucide pour juger par lui-même, il l'est cependant assez pour opposer sa volonté à celle des autres, pour être méfiant, en un mot pour rendre les responsabilités de toutes choses, grandes et petites, bien difficiles. C'est ainsi qu'avant-hier tout était doute: partira-t-on? restera-t-on? où ira-t-on? Toutes questions irrésolues encore. La Reine désire vivement le départ et une absence prolongée; elle se résignerait même à Rome, ce qui cependant, pour elle, ne saurait être que pénible. Le Roi a horreur de l'idée de l'Italie. Que c'est bizarre!

La question politique devient tellement brûlante dans le pays qu'il faudra qu'elle soit bientôt décidée, et je crois, pour ma part, à la Régence, la chose appelée par son nom. Mais cette Régence, sera-t-elle octroyée? Par qui? Dans quelle forme? Les plus intéressés n'en savaient rien, il y a deux jours.

Sagan, 27 septembre 1858.—J'ai eu une lettre de Sans-Souci, du 24, dans laquelle on me dit que, jusqu'à ce jour, on avait inutilement guetté un joint qui permît de porter la pensée du Roi sur l'acte devenu si urgent. Il semblait éviter de laisser tomber un seul mot qui facilitât une proposition à lui faire accepter; aussi était-on décidé à tout faire d'emblée, proposition et acte à signer, le tout en un quart d'heure. Comment cela réussira-t-il? On est dans une grande angoisse sur l'effet moral et physique.

J'apprends à l'instant que le voyage est décidé: d'abord pour Méran, d'où on s'enfoncera en Italie. On doit quitter Sans-Souci le 10 ou 11 octobre. La Reine a désiré aller passer une demi-journée à Dresde, pour consoler sa pauvre sœur jumelle, désolée de la mort de la jeune et florissante Archiduchesse Marguerite [247]; mais le tyrannique docteur Bœger l'a positivement interdit. La Reine s'est soumise, mais on voit par là à quel point tout est redouté pour le Roi.

La presse prussienne prend des allures si vives, et sur la Régence et sur les élections, qu'on saisit une gazette après l'autre.

Sagan, 9 octobre 1858.—Je suppose qu'aujourd'hui ou demain nous aurons la Régence; car il paraît que le Prince de Prusse a tenu bon et décidément qu'il emporte, non seulement le pouvoir, mais le titre.

Sagan, 14 octobre 1858.—J'ai reçu une lettre de la Princesse Charles de Prusse, écrite le lendemain du départ du Roi de Berlin. En voici le résumé: «Le Roi, en partant, était mieux que la semaine précédente, qui avait été très fâcheuse; à tout prendre, moins bien qu'avant Tegernsee. On n'a pas voulu que la famille lui fît ses adieux à Potsdam; il a été lui-même avec la Reine recevoir ces adieux, à Glienicke et à Babelsberg; il était cassé et voûté; les regrets ont été très douloureux en quittant Sans-Souci. On croit, dans la famille, qu'il sera plus facile d'empêcher le Roi de quitter Méran que de le décider pour l'Italie. On suppose qu'il passera tout l'hiver dans le Tyrol.

Sagan, 4 novembre 1858.—Je pense que l'élaboration ministérielle à Berlin est maintenant chose faite. MM. de Budberg et de Moustiers seront de moins belle humeur; car c'est contre leur alliance qu'on élèverait un drapeau anglo-austro-prussien, que le Prince de Hohenzollern-Sigmaringen serait chargé de tenir haut et ferme. Il y a, au-dessus et au-dessous de toutes ces combinaisons ministérielles, la question des élections. Les démocrates s'agitent et ils ont singulièrement haussé le ton depuis la Régence.

Les nouvelles du Roi, depuis qu'il est à Méran, sont tellement meilleures que la Reine se reprend à l'espérance d'un rétablissement qui, après les changements que le Régent est en train d'opérer, ne laisserait pas que de rendre la confusion suprême.

Sagan, 11 novembre 1858.—Avant de rien préjuger sur le nouveau Cabinet prussien, il faut le voir à l'œuvre, et quelles Chambres il aura à gouverner [248]. Les élections se font ces jours-ci et agitent tout le pays. On dit que le prince de Hohenzollern ne donne que son nom au Cabinet, que M. d'Auerswald en sera l'âme et le leader. On s'étonne seulement qu'on l'ait nommé ministre du Trésor, vu qu'il a mangé sa propre fortune et celle de sa femme.

Sagan, 16 novembre 1858.—Je ne parlerai pas politique prussienne; les élections répondent aux craintes des conservatifs comme aux espérances des démocrates. Il y aurait présomption à vouloir tirer maintenant les horoscopes; je m'en abstiens, malgré le peu de goût que j'ai pour la résurrection de certains noms malsonnants qui se présentent avec bonne chance aux élections, et pour la licence des gazettes. Tout cela rappelle 1848; mais il faut croire que le Ministère actuel saura être libéral, sans danger pour l'État, modéré sans faiblesse, triomphant sans entraînement. Je lui souhaite bonne chance, car je lui crois d'excellentes intentions, mais l'enfer n'est-il pas pavé de bonnes intentions?

Sagan, 20 novembre 1858.—Je ne sais trop que penser de l'état des choses qui a subi un si rapide changement. S'il fallait classer les partis, je dirais que les conservatifs sont en défiance, les libéraux en confiance, les démocrates en espérance; ils voient, dans la porte qu'on a entr'ouverte, un arc de triomphe par lequel ils espèrent entrer, pour faucher ce que 1848 a épargné. Les Ministres semblent déjà s'effrayer un peu de leur premier début, puisque le ministre de l'intérieur a publié une seconde circulaire pour expliquer la première, et dire que celle-ci avait été mal comprise par le public [249]; mais ceci est un coup d'épée dans l'eau, car l'impulsion imprudente a été donnée. Il est bien à craindre que les élections ne s'en ressentent, et cette reculade du Ministère l'affaiblit sans faire revenir les esprits.

Sagan, 25 novembre 1858.—Voici les élections accomplies. Ici, on a nommé deux députés centre droit, et le troisième centre gauche; il serait à désirer qu'on n'eût pas fait de plus mauvais choix dans les autres collèges électoraux du Royaume; mais les gazettes nous apportent bien des noms malsonnants. Je ne crains pas grand'chose pour la session. Le gouvernement n'y présentera rien qui permette la discussion; rien que l'urgent. La gauche voudra jouer la modération, et les pointus de droite seront évidemment plutôt découragés. La grande bataille ne se livrera qu'à une seconde session; même la première Chambre sera, je crois, dans la prochaine, assez mesurée et prudente. Gouvernement, Chambres, pays, tutti quanti, sont encore pour l'instant plus ébouriffés que clairvoyants et assurés.

Sagan, 7 décembre 1858.—Je ne crois pas que la panique financière soit terminée pour de bon. L'atmosphère est bien lourde, bien chargée. Les propos à Compiègne ont été fort guerriers, les dénégations entortillées, insuffisantes. A Vienne, on est fort averti. Bref, je ne pense pas que je puisse prudemment me prolonger en France, où je compte me rendre dans un mois, au delà du début printanier, si toutefois j'y puis rester jusque-là. Si lord Palmerston ne rentre pas au Ministère, il y aura chance pacifique; s'il y rentre, je vois le feu aux étoupes. Les amis du Régent l'ont mal servi en publiant son programme [250], sujet actuel d'une controverse vive et d'une argumentation au moins inutile. Les Rois, ou du moins les Régents, ne devraient jamais se livrer nominativement au public.

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