Chronique de 1831 à 1862, Tome 4 (de 4)
NOTES:
[1] La Commission pour rédiger l'Adresse en réponse au Discours du Trône venait d'être nommée par la Chambre, lorsque M. de Manteuffel monta à la tribune et donna lecture du décret royal de prorogation de la Chambre au 3 janvier 1851. Ce jour-là, le Bureau de la Chambre venant d'être de nouveau nommé, l'extrême droite, unie au Ministère, déclara qu'il n'y avait plus lieu de discuter une Adresse, la situation politique étant changée.
[2] Ce successeur fut M. Armand Lefebvre, qui arriva à Berlin le 20 novembre 1850 et y demeura jusqu'en février 1852.
[3] Les sourdes menées bonapartistes amenaient à tout instant des conflits, des dissentiments qui entretenaient l'agitation publique; à une revue à Satory, Edgar Ney ayant engagé plusieurs régiments à crier: «Vive l'Empereur!», le général Changarnier avait répondu par un ordre du jour où il défendait à ses troupes de faire entendre aucun cri politique. Le général Changarnier fut bientôt destitué et, le 3 janvier, le Ministère, ne rencontrant ni sympathie ni respect dans la Chambre, donna sa démission.
[4] Frédéric Ier s'était fait couronner Roi de Prusse le 17 janvier 1701 et avait institué, le lendemain, l'Ordre de l'Aigle noir. Il ordonna que, pour perpétuer le souvenir de son couronnement et de la fondation de cet Ordre, cette fête fût célébrée chaque année. Cette tradition est pieusement conservée à la Cour de Berlin sous le nom de fête des Ordres.
[5] L'Assemblée nationale de Francfort ayant complètement échoué dans son œuvre, Gagern, qui n'avait pas renoncé à régler les affaires de l'Allemagne, invita les députés à se réunir à Gotha pour y délibérer sur l'ébauche d'une Constitution, ayant pour point de départ la réunion de l'Allemagne sous la prépondérance de la Prusse, à l'exclusion de l'Autriche. Cent trente députés environ se rendirent à cet appel. Les disputes furent tris vives au sein de cette Assemblée, qui fut promptement l'objet des attaques et des moqueries du pays. On appelait ses membres die Gothaer ou le parti Gotha.
[6] La première exposition universelle. C'est le Prince Albert, mari de la Reine d'Angleterre, qui en était l'instigateur.
[7] Le 22 février 1851, le Cabinet de lord John Russell, dont lord Palmerston faisait partie, se sentant faible et prévoyant de grandes difficultés financières, avait déposé sa démission entre les mains de la Reine, au sujet de la discussion du budget. La Reine voulut alors confier le Ministère à lord Stanley, mais sur les instances du duc de Wellington, elle décida lord J. Russell à garder ses fonctions. Le 3 mars suivant, lord J. Russell annonça donc, à la Chambre des Communes, que le Ministère whig conservait le pouvoir.
[8] A la suite de la réunion de Wiesbaden, il fut publié, au nom du Prince prétendant, un manifeste, signé par M. de Barthélémy, où le système de l'appel au consentement de la nation était absolument rejeté comme étant la négation du principe de l'hérédité monarchique. C'est à cette lettre que l'Indépendance belge répondit, le 13 mars 1851, par un article non signé, des plus injurieux pour la Royauté.
[9] La proposition Creton, relative au rappel des lois d'exil contre les Bourbons et les d'Orléans, avait été amenée le 1er mars à la Chambre. Ce rappel n'aurait pu être obtenu que par l'accord des deux branches qui n'avait pas encore été rendu possible. Les légitimistes acceptaient ces lois d'exil, car ils étaient désireux de les maintenir pour le compte des orléanistes; M. Berryer, au nom de leur parti, proposa d'ajourner la proposition Creton au 1er septembre. Toute la Montagne vota avec les orléanistes et M. Berryer, avec les légitimistes, continua de faire campagne pour le triomphe de l'idée monarchique, sans favoriser les menées de l'Élysée.
[10] Le Cabinet français du 14 avril était ainsi composé: M. Baroche aux Affaires étrangères; M. de Chasseloup-Laubat à la Marine; M. Léon Faucher à l'Intérieur; M. Rouher à la Justice; M. Buffet à l'Agriculture et au Commerce; M. de Crouseilhes à l'Instruction publique; M. Fould aux Finances; le maréchal Randon à la Guerre.
[11] Marie de Castellane.
[12] Le prince de Talleyrand à Valençay.
[13] De l'anglais: ni avec entrain, ni en bonne humeur: je me sentirai seule et délaissée.
[14] Le comte de La Marck ayant légué sa correspondance avec Mirabeau à M. de Bacourt, celui-ci la publia en 1851, en la faisant précéder d'une préface historique qui fut assez remarquée.
[15] Le 17 mai, le Roi de Prusse se rendit à Varsovie, où il se rencontra avec l'Empereur et l'Impératrice de Russie. Le 26, les deux souverains partirent ensemble jusqu'à Oderberg; le Roi se dirigea alors sur Breslau, tandis que l'Empereur Nicolas allait à Olmütz, où il conféra avec l'Empereur d'Autriche. C'est là que M. de Manteuffel, qui venait de remplacer M. de Radowitz comme premier ministre, se rendit pour déclarer au prince Schwarzenberg que la Prusse accordait à l'Autriche la présidence de la Diète germanique de Francfort, humiliation qui amena Sadowa quinze ans plus tard.
[16] Les Majestés russes n'assistèrent pas à cette inauguration.
[17] Mgr Dupanloup.
[18] Les évêques d'Orléans possèdent, à quelques kilomètres de la ville épiscopale, une jolie maison de campagne au bord de la Loire et près du petit bourg de la Chapelle Saint-Mesmin. Ils y ont établi un petit séminaire. L'abbé Dupanloup, quand il prit possession de l'évêché d'Orléans, s'occupa beaucoup de cet établissement d'éducation, et réussit à y élever les études à un point remarquable.
[19] A Meillan, dans le Cher.
[20] Marie de Castellane fit sa première Communion le 22 juin 1851 dans le couvent des Dames du Sacré-Cœur, établi à deux kilomètres de Tours, dans l'ancienne abbaye des Bénédictins, fondée en 371 par saint Martin, évêque de Tours.
[21] Extrait de lettre. La correspondance Mirabeau-La Marcq venait d'être livrée au public par M. de Bacourt.
[22] Mme de Lieven, qui souffrait des yeux, avait adopté pour écrire un papier vert qui frappait plus dans un temps où ce genre était à peu près inconnu.
[23] A Paris, la Princesse recevait tous les dimanches soirs.
[24] Mlle Pauline de Castellane, fille du Maréchal, avait épousé le comte de Hatzfeldt, ministre de Prusse à Paris. Devenue veuve, elle épousa en secondes noces, en 1851, le duc de Valençay, fils aîné de l'auteur de la Chronique.
[25] La duchesse de Courlande et la princesse de Hohenzollern.
[26] Le Roi et la Reine de Prusse étaient arrivés à Ischl le 31 août et s'y étaient rencontrés avec l'Empereur d'Autriche. Le prince Schwarzenberg et M. de Manteuffel assistèrent à cette entrevue.
[27] La duchesse d'Angoulême était morte à Frohsdorf le 19 octobre 1851.
[28] Il n'y eut ni régence ni tutelle en Hanovre, Georges V succéda à son père malgré sa cécité, le Roi Ernest-Auguste ayant, dès 1843, tranché la question, en établissant que les actes présentés à la signature du futur monarque seraient lus en présence de douze témoins et contresignés par le secrétaire de ce comité.
[29] On appelait du nom de Burgraves quelques politiques rétrogrades, membres de la Commission de l'Assemblée législative chargée de préparer la loi du suffrage restreint, dite loi du 31 mai. La plupart étaient des chefs d'anciens partis monarchiques comme Thiers, Molé, Broglie. Les républicains les regardaient comme des politiques usés et impuissants.
[30] Extrait de lettre.
[31] Intéressé par le caractère si complexe de M. de Talleyrand, qu'il avait pu suivre de près, l'abbé Dupanloup, devenu évêque d'Orléans, avait passé de longues années à recueillir une série d'actes publics ou privés, concernant les diverses périodes de la vie du Prince. Cette collection de lettres et de documents forme quatorze volumes: Mgr Dupanloup y a joint un récit des derniers moments du Prince de Talleyrand dont il a été déjà question dans le deuxième volume de la Chronique. Tous ces papiers et manuscrits se trouvent à l'heure actuelle dans la possession de M. Bernard de Lacombe, Mgr Dupanloup les ayant légués à son père, M. Hilaire de Lacombe.
[32] Dans la nuit du 1er au 2 décembre, le Prince Louis Bonaparte, ayant fait garder à vue le président de l'Assemblée, avait fait arrêter les principaux chefs des partis républicain et monarchistes, puis, par deux proclamations, déclaré l'Assemblée dissoute et le suffrage universel rétabli. Il procéda ensuite à un plébiscite qui lui donna la Présidence pour dix ans. La force armée et les commissions mixtes ayant fait justice des récalcitrants, ce coup d'État, préparé avec l'énergique concours de M. de Morny, du général de Saint-Arnaud et du préfet de police, M. de Maupas, triompha de toutes les résistances.
[33] M. Thiers, qui croyait la branche aînée des Bourbons frappée d'une impopularité irrémédiable, avait approuvé et appuyé avec énergie l'opposition faite par la Duchesse d'Orléans à un accord entre la branche aînée et la branche cadette. Regardée comme le principal obstacle d'une si désirable réconciliation, les partisans de la fusion accusaient la Princesse d'avoir, par ses fautes, contribué plus que toute autre chose à ramener l'Empire au pouvoir. Ils avaient aussi trop mis leurs espérances dans le général Changarnier qui, loyal mais présomptueux, jouait serré les légitimistes et les orléanistes les uns contre les autres, ne donnant aucun signe de ses intentions réelles, mais ne voulant, dans le fond de sa pensée, que poser la couronne sur la tête qui devait la porter, en tenant à la poser lui-même. Son attitude énigmatique l'avait rendu suspect aux yeux de plusieurs.
[34] A cause de l'arrestation de M. Thiers.
[35] Les généraux Le Flô, Changarnier, Lamoricière et Bedeau.
[36] M. de Falloux, ainsi que le duc de Luynes, le comte de Rességuier et bien d'autres, avait été emprisonné au Mont-Valérien, lors du coup d'État du 2 décembre.
[37] Le 22 janvier, le Prince-Président avait fait publier le fameux décret qui confisquait les biens de la famille d'Orléans. Ce décret, appelé le premier vol de l'aigle, ne fut pas sans rencontrer quelque désapprobation dans l'entourage même du chef de l'État. M. de Morny et M. Fould refusèrent de le signer et, après deux jours de discussion, donnèrent leur démission. M. de Persigny remplaça alors M. de Morny à l'Intérieur.
[38] Le 2 février, six semaines après la naissance de sa fille aînée, la Reine Isabelle se rendait, pour la cérémonie de ses relevailles, à l'église d'Antocha, quand un prêtre du nom de Martin Merimo se précipita sur elle, lui porta vivement un coup de couteau dans le côté droit, au-dessous de la hanche, et avec tant de force que la lame coupa une baleine de son corset, et fit une blessure d'à peu près dix pouces de profondeur. L'assassin était un ancien moine connu pour son exaltation démagogique. Il avait autrefois déjà menacé les jours de Ferdinand VII. Frappé alors d'exil, il avait passé plusieurs années en France et en Belgique et, depuis huit ans, il avait été autorisé à rentrer en Espagne. Condamné cinq jours après sa tentative d'assassinat sur la Reine, il dut subir la peine du garote et fut exécuté le 7 février.
[39] Après le coup d'État du 2 décembre, lord Palmerston, alors ministre des Affaires étrangères, avait envoyé à lord Normanby, représentant de l'Angleterre à Paris, une dépêche officielle où il lui prescrivait de continuer comme par le passé les relations avec le Gouvernement français, la Reine ne voulant point paraître intervenir en rien dans les affaires intérieures de la France. Mais, sans consulter ses collègues, et dans une conversation avec l'ambassadeur de France à Londres, le comte Walewski (qui la rapporta immédiatement à Paris), lord Palmerston exprima sa satisfaction du coup d'État. Cette contradiction entre les instructions officielles et le langage de son ministre direct mit lord Normanby dans une situation embarrassante. Il écrivit à lord John Russell, président du Conseil, pour s'en plaindre. Lord John Russell demanda des explications à lord Palmerston, qui garda d'abord le silence et donna ensuite une réponse qui ne parut pas suffisante. Le Président du Conseil demanda alors à lord Palmerston sa démission et le remplaça au portefeuille de l'Extérieur par lord Granville.
[40] Allusion au discours que M. Guizot prononça le 5 février 1852, jour où le comte de Montalembert fut reçu à l'Académie française.
[41] Le palais habité par le général-gouverneur de Varsovie fut, par suite d'un accident, la proie des flammes dans la nuit du 22 février/6 mars 1852. A force d'efforts on put, pourtant, en sauver une partie, ainsi que les archives. Cet ancien palais de la famille Radziwill avait été vendu en 1821 au gouvernement du Royaume de Pologne.
[42] Cette entrevue des deux souverains n'avait d'autre but, pour l'Empereur Nicolas, que de rendre à l'Empereur d'Autriche, dans sa capitale, les deux visites que le Monarque lui avait faites à Varsovie.
[43] La Princesse Royale de Saxe.
[44] Mgr Diepenbrock, Prince-évêque de Breslau, mourut le 19 janvier 1853. Deux années auparavant, Son Éminence avait été poursuivie et attaquée, dans la montagne du Johannisberg, par une vache furieuse, excitée par la vue de la soutane rouge du Cardinal, qui ne se remit jamais de cet accident.
[45] Cortège accompagné de torches enflammées.
[46] Victor Cousin, le père de l'éclectisme, après avoir erré plus de quarante ans sur tous les grands chemins de la pensée, sans dresser sa tente nulle part, finit par renoncer à la philosophie pour se donner à la littérature et à l'érudition, disant qu'après tout, la philosophie se réduisait à la morale. Or, d'après lui, la morale ne différait pas de la religion, et la religion, c'était le christianisme. Le voltairien s'était ainsi créé une religion intellectuelle, qui explique l'esprit de ses derniers ouvrages sur le dix-septième siècle.
[47] La comtesse de Hahn-Hahn prit en effet le voile en novembre 1852.
[48] La Princesse de Salerne. Elle était fille de François II, Empereur d'Autriche.
[49] L'Empereur François-Joseph était rentré solennellement dans sa bonne ville de Vienne le 14 août 1852, après avoir fait en Hongrie une grande tournée, qui avait achevé la pacification de son Empire, dont les Madgyars avaient été sur le point de se détacher par la révolution de 1849.
[50] Quelque temps après la session législative, le Prince-Président se mit à visiter une partie de la France. Le 20 septembre, il inaugurait à Lyon une statue de Napoléon Ier, se rendait ensuite à Marseille, à Bordeaux où il prononçait dans un discours ces paroles célèbres: l'Empire, c'est la paix. A son retour à Paris, il fut accueilli aux cris de Vive l'Empereur; des députations se rendirent auprès de lui, lui demandant de céder aux vœux du peuple, en reprenant la couronne du fondateur de sa dynastie. Cédant à cette pression de l'opinion publique, il consulta le Sénat qui s'empressa de répondre à cet appel en proclamant l'Empire, par quatre-vingt-six voix sur quatre-vingt-sept votants, le 7 novembre 1852, et son sénatus-consulte fut soumis à la ratification du peuple. Un an après le coup d'État, Louis Bonaparte était proclamé Empereur sous le nom de Napoléon III, à Saint-Cloud, en présence du Sénat et du Corps législatif.
[51] Cosnac, nommé évêque de Valence par le cardinal Mazarin et appelé plus tard à l'archevêché d'Aix, fut aumônier de Monsieur, frère de Louis XIV. Il joua un rôle actif lors de l'Assemblée du Clergé en 1682, et il laissa des Mémoires qui ne furent publiés qu'en 1852, par le comte Jules de Cosnac, pour la Société de l'Histoire de France.
[52] Le duc de Dino.
[53] M. de Beauchesne, ancien gentilhomme de la Chambre du Roi sous la Restauration, avait publié en 1852, le fruit de longues études et de patientes recherches sur le malheureux fils de Louis XVI, sous le titre: Louis XVII, sa vie, son agonie, sa mort. Cet ouvrage fut couronné par l'Académie française.
[54] Le duc de Valençay.
[55] Au mois de janvier 1853, le bureau du Sénat, celui du Corps législatif et le Conseil d'État tout entier furent convoqués au Palais des Tuileries, dans la salle du Trône; Napoléon III, en uniforme de général, monta les degrés de ce trône, et, par un discours qui fut affiché dans toute la France, annonça aux grands Corps de l'État sa résolution d'épouser Mlle de Montijo et de la faire Impératrice. Le mariage fut célébré quelques jours plus tard, le 31 janvier.
[56] La nouvelle Impératrice se nommait Eugénie.
[57] Les Clary étaient une famille de petits négociants à Marseille. Dans sa jeunesse, et avant les grandeurs de sa famille, Joseph Bonaparte avait épousé Julie Clary, et leur fille Désirée épousa Bernadotte qui devint Roi de Suède. Le fils aîné de Berthier, prince de Neufchâtel, duc de Wagram, avait épousé Françoise Clary, et c'est leur fille qu'il était question de marier au prince Jérôme-Napoléon.
[58] Allusion à Mgr de Quélen.
[59] Par un décret du 26 janvier 1853, l'Empereur Napoléon III nommait, dans la maison de l'Impératrice, la princesse d'Essling, Grande-Maîtresse; la duchesse de Bassano, Dame d'honneur; la comtesse de Montebello, Mme Feray, la vicomtesse Lezay-Marnesia, la baronne de Pierres, la baronne de Malaret et la marquise de Las Marimas, Dames du palais; le comte Tascher de la Pagerie (sénateur), Grand-Maître; le comte Charles Tascher de la Pagerie, premier Chambellan; le vicomte Lezay-Marnesia, Chambellan; le baron de Pierres, Écuyer.
[60] Présage.
[61] Une sanglante échauffourée avait eu lieu à Milan le 6 février, mais le mouvement eut peu d'importance; les émeutiers ne tinrent nulle part devant la troupe. La véritable gravité de cette affaire fut dans ses conséquences, dans le redoublement des rigueurs de la police autrichienne, et les malheurs qui en résultèrent pour un grand nombre de familles, surtout après la proclamation de Mazzini au peuple italien, et celle de Kossuth au peuple hongrois, dont l'apparition simultanée et la ressemblance semblaient indiquer une entente entre ces deux chefs de la démagogie européenne.
[62] L'Histoire du Pontificat de Clément XIV, écrite d'après des documents inédits des Archives secrètes du Vatican, par A. Theiner, prêtre de l'Oratoire et garde-adjoint de ces Archives, venait d'être traduite de l'allemand par Paul Geslin, et publiée chez Firmin-Didot. C'était une réhabilitation de la mémoire de Clément XIV pour le venger des attaques des Jésuites, et comme une réponse à M. Crétineau-Joly, qui, partisan de l'autorité absolue, en religion comme en politique, avait écrit une Histoire de la Compagnie de Jésus et de Clément XIV, où il se montrait très sévère pour ce Pape.
[63] Le 7 février, le général vicomte de Saint-Priest, MM. René de Rovigo, de la Pierre, le comte de Mirabeau, de Coëtlogon et quarante autres personnes, parmi lesquelles plusieurs Allemands et Italiens, furent arrêtés à Paris, dans leurs domiciles respectifs, et après une perquisition faite dans leurs papiers, ils furent tous conduits à la prison de Mazas. Ils étaient prévenus d'avoir fait partie d'agences secrètes, ayant pour but d'adresser aux journaux étrangers de fausses nouvelles sur l'état de la France et de déconsidérer le Gouvernement de Napoléon III aux yeux de l'Europe. Parmi les personnes arrêtées se trouvait M. Joseph Tański, réfugié polonais, naturalisé français et attaché depuis plusieurs années à la rédaction du Journal des Débats. Le général de Saint-Priest fut remis en liberté le soir même de son arrestation, tandis que M. Tański n'obtint sa mise en liberté sous caution que le 24 février.
[64] En 1853, M. Victor Cousin publia son livre sur Mme de Longueville, qui ouvrait la série de ses études sur les Femmes et la Société du dix-septième siècle, et esquissait tous les personnages de la Fronde.
[65] A propos d'articles que l'abbé Gaduel, vicaire général d'Orléans, avait fait paraître dans l'Ami de la religion, et qui critiquaient philosophiquement et théologiquement un livre recommandé par Louis Veuillot, dans son journal l'Univers, Mgr Sibour, archevêque de Paris, avait condamné ce journal et en avait interdit la lecture au clergé de son diocèse. M. Veuillot, au lieu de discuter ces critiques, attaqua M. Gaduel dans sa personne et se livra à de sarcastiques déclamations contre la science et l'enseignement de la théologie.
[66] Le 18 février, l'Empereur d'Autriche se promenait sur les remparts de Vienne, lorsqu'il fut tout à coup arrête par un garçon tailleur hongrois, ancien hussard. L'assassin avait dirigé son coup de poignard vers la gorge, mais François-Joseph, ayant aperçu l'arme levée contre lui, fit avec le bras un mouvement qui la repoussa en arrière, au bas de la nuque. L'aide de camp de Sa Majesté, comte O'Donnell, dégaina aussitôt et porta à l'assassin un coup de sabre qui l'abattit à ses pieds.
[67] Le comte Schulenbourg.
[68] En 1848, la publication de la Case de l'oncle Tom, où Mme Becker-Stowe peignait avec autant de vivacité que de couleur les souffrances des esclaves noirs en Amérique, provoqua en Angleterre un mouvement d'opinion très accentué en faveur de l'abolition de l'esclavage. Plusieurs grandes dames, réunies à Stafford-House, sous la présidence de la duchesse de Sutherland, rédigèrent une lettre ouverte aux dames américaines, les engageant à faire œuvre de propagande pour l'abolition de l'esclavage dans leur pays. Cette lettre provoqua une verte réponse de Mme Tyler, où, en parlant de la misère et des abus de toutes sortes qui règnent en Angleterre, elle invitait les dames anglaises à vouloir bien s'occuper de réformer leur nation, avant de penser à réformer les institutions américaines, qui avaient leur raison d'être dans les conditions spéciales de cette contrée.
[69] Voir cet article du Times aux pièces justificatives de ce volume.
[70] Le Prince Royal de Saxe avait épousé, le 18 juin 1852, la Princesse Carola Wasa, fille du Prince de Holstein-Gottorp, Prince Wasa.
[71] A l'occasion de son mariage, et par un décret daté du 31 janvier 1853, Napoléon signa une amnistie dont profitèrent plus de trois mille individus qui avaient été l'objet de mesures rigoureuses après les troubles de décembre 1851.
[72] De l'anglais: aspirants de marine.
[73] La paix ayant été signée après la guerre de 1848-1849, l'Autriche, croyant rendre plus solide sa souveraineté sur ses possessions italiennes en les frappant de terreur, leur fit lourdement sentir le poids de son joug. Les populations de ces provinces, de plus en plus irritées, recoururent, malheureusement, pour le secouer, au moyen des conspirations. Mazzini, réfugié à Londres et à l'abri de tout danger, y avait fondé un Comité national d'où partait le mot d'ordre, et qui centralisait les efforts des sociétés secrètes répandues en Lombardie et en Vénétie, dans le seul but de chasser les Autrichiens d'Italie. Pour agir plus efficacement, un Comité révolutionnaire se constitua à Mantoue, sous la présidence d'un prêtre fort estimé: Enrico Tazzoli. La police autrichienne fut mise sur sa piste par l'imprudence d'un des membres du Comité qui, pour en augmenter le nombre, admit dans son sein des personnes appartenant aux classes les plus basses de la population. Dès lors, le secret devint impossible à garder et les procès commencèrent. Plusieurs exécutions en furent la suite et enfin celle du prêtre Crioli, fusillé à Mantoue pour avoir conseillé à des soldats autrichiens de déserter, fut le prélude de cette Conspiration de Mantoue qui eut son épilogue sur les glacis de Belfiore. Une poésie révolutionnaire ayant été trouvée sur une des victimes qui, sous le bâton, avoua qu'il la tenait du prêtre Tazzoli, ce dernier fut arrêté. On trouva dans ses papiers la liste chiffrée des noms de tous les membres du Comité révolutionnaire, dont un traître livra la clef, ce qui permit de les saisir et de les arrêter tous. Un long procès en fut la suite: procès qui dura depuis janvier 1852 jusqu'au 19 mars 1853. Les accusés étaient au nombre de cent cinquante; tous appartenaient aux meilleures classes de la population: neuf d'entre eux furent pendus à Belfiore à la suite de la sentence qui en condamnait presque la moitié à mort. Les autres virent leur peine commuée et furent envoyés aux galères.
[74] Avec douceur.
[75] Par ordre de M. le Comte de Chambord, les légitimistes devaient s'abstenir de toute espèce de service dans l'État.
[76] Le Feld-Maréchal comte Leiningen avait été chargé d'une mission diplomatique auprès de la Porte Ottomane, concernant les différends entre les deux Gouvernements. Ayant remis au Sultan, le 3 février, la lettre autographe de l'Empereur d'Autriche, le comte de Leiningen était de retour le 16 février à Vienne, la Porte ayant adhéré aux demandes et réclamations que l'Autriche lui avait adressées par l'intermédiaire de ce diplomate.
[77] Elle était dame d'honneur de Mme la Comtesse de Chambord.
[78] Mari de Mme la Duchesse de Berry.
[79] De l'italien: le véritable portrait du très saint Fondateur des Ordres mendiants.
[80] Princesse d'Orléans, fille du Roi Louis-Philippe.
[81] Le Roi Léopold des Belges, dans le but de présenter aux principales Cours de l'Europe son fils aîné, qui avait atteint sa majorité, et qu'il voulait marier, et en même temps désireux d'obtenir l'augmentation des garanties de l'indépendance de la Belgique, ainsi que la conclusion d'un traité de commerce avec le Zoll-Verein, entreprit, au mois de mai 1853, un voyage à Berlin et à Vienne. Le Roi de Prusse, qui le reçut à Berlin avec une grande affabilité, le retrouva peu de jours après dans la capitale de l'Autriche, où Frédéric-Guillaume IV, accompagné de son frère, le Prince Charles de Prusse, se rendit le 20 mai pour y signer le traité de commerce austro-prussien. Le Roi put alors assister aux fiançailles du Duc de Brabant avec l'Archiduchesse Marie, fille de feu le Palatin. Ce mariage fut célébré le 23 août suivant.
[82] Hansdorf était alors la station du chemin de fer d'embranchement de Berlin-Sagan.
[83] La Grande-Duchesse Stéphanie.
[84] Le Prince Albert de Prusse, qui vivait séparé de sa femme depuis quelque temps, venait d'épouser, assez clandestinement, une dame d'honneur de cette Princesse, Mlle de Rauch, qui reçut le titre et le nom de comtesse de Hohenau.
[85] L'Église grecque, dans les Lieux Saints, empiétait sur l'Église latine qui perdait ainsi tout droit. Appuyée par la France, l'Église latine demanda que la question reçût un nouveau règlement, et la Turquie fut appelée à en décider. La Russie, croyant le moment venu d'imposer ses volontés, envoya à Constantinople le maréchal Menschikoff, avec des propositions dont elle exigeait la signature immédiate. La Turquie, voyant l'abdication de son indépendance, les rejeta. La Russie envahit aussitôt les Principautés danubiennes. C'était un casus belli. L'Angleterre, la France et l'Autriche, dans l'espoir de maintenir la paix, adressèrent à la Russie une note portant leurs trois signatures. La Turquie, n'ayant pas accepté, sans modification, le contenu de cette note, le Czar la rejeta, et le but que l'on se proposait ne fut pas atteint.
[86] L'Empereur Nicolas arriva, en effet, à Olmütz: il était accompagné de son beau-frère, le Prince de Prusse, pour s'entendre avec l'Autriche et la Prusse. Une longue conférence eut lieu le 2 octobre, sous la tente impériale, entre les deux Empereurs, le Prince de Prusse et MM. de Nesselrode et de Buol. Les délibérations en restèrent d'abord secrètes, puis, on apprit bientôt que le Czar avait fait savoir à la Porte Ottomane que ces puissances ne lui donneraient qu'une garantie séparée de chacune d'elles, et non pas une garantie collective, et qu'il n'y aurait aucune solidarité entre les garants de l'intégrité et de l'indépendance de la Turquie. La proposition austro-russe fut repoussée à Londres comme à Paris, et absolument rejetée à Constantinople.
[87] Pour le mariage du Duc de Brabant.
[88] Marquise de Castellane.
[89] Une dépêche avait apporté la déclaration formelle de la guerre de la Porte à la Russie. Le texte en était d'abord parvenu à la Légation ottomane à Vienne avec la condition que les hostilités ne seraient ouvertes que dans le cas où la Russie n'évacuerait pas les Principautés danubiennes dans les quatre semaines.
[90] Maréchal des logis.
[91] Lord Clarendon.
[92] (De l'anglais), de second rang.
[93] M. de Nesselrode avait envoyé une dépêche datée du 7 septembre, destinée à expliquer les motifs par lesquels l'Empereur Nicolas avait rejeté les modifications, demandées par le Sultan, au projet de note préparé par le Cabinet de Vienne. Entre autres, il joignait à cette dépêche une note spéciale adressée à M. de Meyendorff, alors ambassadeur de Russie à Vienne, dans laquelle étaient discutées point par point les modifications elles-mêmes.
[94] Le duc de Wellington.
[95] Allusion à ces vers de Racine dans sa tragédie de Bajazet:
L'imbécile Ibrahim, sans craindre sa naissance,
Traîne, exempt de péril, une éternelle enfance.
Indigne également de vivre et de mourir,
On l'abandonne aux mains qui daignent le nourrir.
[96] Mgr Fœrster.
[97] Le 3 novembre, les Turcs remportèrent un avantage notable sur la rive valaque du Danube. Au nombre de douze mille hommes, ils passèrent le fleuve entre Lurtukai et Oltenitza, maintinrent leurs positions dans ce dernier endroit et s'y fortifièrent. Les Russes firent de grandes pertes.
[98] Vers la fin du règne de Louis-Philippe, M. Cousin comprit qu'il était inutile de lutter contre l'ordre des choses. Sans renoncer positivement au libre-penser, il se rapprocha des doctrines plus saines et publia en 1853 un ouvrage intitulé Du vrai, du beau et du bien. Il y faisait appel à la conciliation et rêvait l'union des idées religieuses avec la liberté, en émettant des regrets de nature à calmer les animosités, au sujet des aberrations de sa vie passée.
[99] L'histoire de Grégoire VII fut trouvée achevée dans les papiers de M. Villemain et ne fut publiée qu'après sa mort, en 1873. L'auteur en avait tracé le plan et rédigé une notable partie à la fin de la Restauration, puis l'abandonna lorsque la révolution de Juillet eut soufflé sur les entreprises du clergé, et y revint dans les dernières années de sa vie.
[100] Allusion à la façon malveillante et peu impartiale dont M. Thiers avait parlé du prince de Talleyrand dans son grand ouvrage: Le Consulat et l'Empire.
[101] Le 18 décembre 1853, lord Palmerston, qui voulait devenir Premier ministre, et qui n'était alors que ministre de l'intérieur dans le Cabinet wigh-peelite, donna sa démission, en refusant d'accepter le nouveau bill de Réforme électorale, proposé par lord John Russell dans le sein du Cabinet; puis, sous le prétexte d'une méprise qui se serait dissipée, il reprit son portefeuille, qu'il n'avait jamais sérieusement abandonné. Ce ne fut que le 8 février 1855 que lord Palmerston parvint à remplacer, comme premier Lord de la Trésorerie, lord Aberdeen, à la joie de Constantinople et à la stupeur de la Russie.
[102] L'amiral russe Dachinoff avait remporté, le 30 novembre, une éclatante victoire dans la mer Noire, près de Synope, sur une division navale turque, commandée par Osman-Pacha, qui fut fait prisonnier et vit tous ses navires détruits. Quelques jours plus tard, le général russe Andranikoff battait les Turcs sur terre à Aikaizick. Ils perdirent quatre mille hommes dans ce sanglant combat.
[103] Le comte Pourtalès à Londres et M. de Bunsen à Paris avaient pour mission de s'assurer des déterminations positives des puissances occidentales, dans le but de dessiner la part de la Prusse à l'action commune; on espérait ainsi avoir une influence considérable sur l'Autriche, qui, si elle devait se ranger du côté de la Russie, se trouverait fort embarrassée par l'hostilité de la France à l'ouest, et par sa grande rivale allemande au nord.
[104] A la réception de la dépêche annonçant le combat naval de Synope, les Gouvernements de France et d'Angleterre envoyèrent à leurs amiraux respectifs l'ordre d'entrer immédiatement dans la mer Noire; par suite de quoi, les vaisseaux russes se trouvèrent bloqués à Sébastopol, et la Turquie put travailler librement à son ravitaillement.
[105] On faisait courir en Angleterre mille bruits absurdes sur l'influence que le Prince Albert cherchait à prendre dans les affaires politiques et même sur ses ambitions personnelles pour accaparer l'autorité. La populace commençait à s'en montrer très irritée.
[106] De l'anglais: la populace.
[107] Ce volume était la première partie des Souvenirs littéraires de M. Villemain, qui publia la seconde deux ans après.
[108] Comme suite à son premier volume sur Mme de Longueville, Cousin fit paraître en 1854 une étude sur Mme de Sablé, poursuivant ainsi ses publications sur les femmes de la société du dix-septième siècle.
[109] M. de La Rochejaquelein, partisan du suffrage universel, s'était rallié au coup d'État, après avoir rompu avec les légitimistes de la rue de Poitiers, ainsi qu'avec M. le Comte de Chambord. M. de Pastoret, qui avait refusé en 1830 de prêter serment à Louis-Philippe, avait trempé dans le complot des tours de Notre-Dame, se montra sympathique au gouvernement du Prince Louis-Napoléon, qui le nomma sénateur en 1853.
[110] La comtesse Radetzky de Ravez était morte à Vérone, le 12 janvier, des suites d'une fluxion de poitrine.
[111] L'Empereur Nicolas comprenant l'importance de l'Union des Puissances belligérantes tentait, alors, par un vigoureux effort de rompre l'accord de la Conférence de Vienne et de rattacher à sa cause l'Autriche et la Prusse. Ce fut le but de la mission du comte Orloff. La lettre autographe de son maître, dont le comte Orloff était porteur pour l'Empereur d'Autriche, lui demandait de prendre, conjointement avec le Roi de Prusse, vis-à-vis de lui, l'engagement d'observer une neutralité stricte, pendant toute la durée de la guerre; mais François-Joseph s'y refusa nettement, le Czar ne voulant pas donner la promesse de ne pas franchir le Danube et de ne pas troubler l'ordre et la possession territoriale de l'Empire turc. A Berlin, l'Empereur Nicolas voulut traiter l'affaire comme en famille. Il en chargea tout simplement son représentant accrédité à cette Cour, le baron de Budberg. Celui-ci se servit, en cette occasion, de l'intervention du Ministre de la maison du Roi et non de celle du Ministre des Affaires étrangères. M. de Manteuffel, blessé de ce procédé, donna sa démission qui ne fut pas acceptée, et le baron de Budberg fut éconduit moins courtoisement que ne l'eût été le comte Orloff.
[112] Le 30 janvier 1854, le prince Napoléon fit à Bruxelles une visite toute de courtoisie, très officielle, mais sans mission politique spéciale.
[113] Allusion aux décrets du 22 janvier 1852, relatifs à la confiscation des biens de la famille d'Orléans.
[114] La diplomatie officielle et régulière étant à bout de ressources, l'Empereur Napoléon III avait, avec l'assentiment du Gouvernement anglais, écrit à l'Empereur Nicolas une lettre confidentielle où il se montrait très désireux d'une conclusion pacifique et proposant de signer, tout d'abord, un armistice, pour reprendre ensuite le cours régulier diplomatique. A la date du 8 février, l'Empereur Nicolas répondait négativement à cette lettre, qui fut fort indiscrètement publiée dans les journaux; et il la faisait suivre d'un manifeste adressé au peuple russe sur sa mésintelligence avec la Porte Ottomane. Le Czar y évoquait le souvenir de l'année 1812 et attestait la valeur déployée par son peuple dans ces fastes mémorables.
[115] Un parti, ayant à sa tête le prince Adolphe de Hohenlohe-Ingelfingen, représentait à la Chambre prussienne la nuance des Conservateurs-libéraux. Dans la session de 1854, une proposition faite par le comte Westphalen, se rapportant à l'état des communes pour les six provinces orientales n'ayant pu aboutir à une solution dans la Commission constituée pour en délibérer, des membres des divers partis libéraux, auxquels se joignirent ceux de la fraction Hohenlohe, composèrent un nouveau projet, modifiant la proposition du Gouvernement et demandant qu'il fût examiné par la Commission. Cette demande, qui s'appelait la demande de la fraction Hohenlohe, fut rudement attaqué par le parti de la Kreuzzeitung.
[116] Le parti du Prince et de la Princesse de Prusse était ainsi désigné.
[117] L'Autriche, invitée par les Puissances occidentales à s'allier avec elles contre les Russes, en transmit la proposition à la Prusse avec les modifications suivantes: «L'Autriche ne se croit pas appelée à s'associer aux Puissances occidentales dans une déclaration de guerre contre la Russie, mais elle est prête à signer une convention pour garantir l'intégrité de la Turquie selon l'esprit du traité de 1841.» En outre, l'Autriche maintiendrait la paix en Serbie, dans le Montenegro et en Bosnie, laissant aux puissances de l'Occident le soin de s'occuper de la Grèce et des provinces grecques de la Turquie.
[118] De l'anglais: A la classe des caractères plus sérieux.
[119] De l'italien: triomphe et s'anime.
[120] La Russie avait envoyé à Vienne un projet de préliminaires de paix, offrant d'évacuer les Principautés, lorsque ces préliminaires seraient signés. La Conférence, réunie alors à Vienne, considérant les conditions, auxquelles cet arrangement était subordonné, absolument inacceptables, rejeta ce projet.
[121] Le comte Buol.
[122] L'esprit faible et flottant de Frédéric-Guillaume IV était disputé par deux influences rivales: d'un côté, le parti de la Cour, acquis à la Russie; de l'autre, les Chambres prussiennes acquises à l'opinion libérale et parlementaire, naturellement peu favorable à cette Puissance du nord. Le Roi, cherchant toujours à temporiser, envoya le prince de Hohenzollern à Paris et le général de Grœben à Londres pour donner confidentiellement des explications sur sa politique, qui furent assez froidement reçues, comme étant celles d'un homme à la parole duquel on croyait peu.
[123] Les tiraillements entre les deux frères étaient comme étouffés par la noble attitude du Prince de Prusse, qui disait très haut que la volonté du Roi devait faire loi. Mais personne n'ignorait que le Prince déplorait les hésitations du Roi, sa politique vacillante, et que, désirant un rapprochement avec les Puissances occidentales, il se trouvait en contradiction avec la politique conseillée à son royal frère.
[124] Le 18 mars 1854, le Ministère prussien présenta à la seconde Chambre un projet d'emprunt de 30 millions de thalers, accompagné d'un mémoire annonçant que la Prusse maintiendrait le protocole de Vienne, et établissant les résolutions que le Roi se proposait de prendre à l'égard des États de la Confédération allemande.
[125] Le Gouvernement anglais fit alors la publication des pièces diplomatiques échangées en 1853 entre la Russie et l'Angleterre, au sujet de la Turquie, dans lesquelles se trouvaient de longs récits des conversations de l'Empereur Nicolas avec sir Hamilton Seymour. Le Czar dissimulait mal ses ambitieux projets et, pour arriver à son but, il représentait à l'ambassadeur d'Angleterre la ruine certaine et imminente de la Turquie, et il semblait avoir arrêté dans sa pensée que l'heure pour sa dissolution devait être arrivée. A cette politique, John Russel et lord Clarendon furent aussi explicites que conséquents; ils refusèrent ouvertement de partager cette idée fixe de l'Empereur Nicolas et se montrèrent très décidés à prévenir une catastrophe en Turquie.
[126] Une fièvre typhoïde des plus graves, dont la Princesse Louise fut atteinte à l'âge de seize ans, l'avait laissée faible de tête. Cette maladie causa la rupture de négociations déjà entamées avec la Cour de Sardaigne au sujet d'un mariage projeté avec le Duc de Gênes.
[127] Le prince de Hohenzollern-Sigmaringen à Paris, le général de Grœben à Londres.
[128] Les rapports du prince de Hohenzollern-Sigmaringen et du général de Grœben à la Cour de Berlin déterminèrent le départ du général de Lindheim pour Saint-Pétersbourg, avec une lettre particulière pour le Czar dans laquelle le Roi faisait de nouvelles propositions de médiation. L'Empereur Nicolas, ne pouvant maîtriser sa colère, chargea le prince Georges de Mecklembourg-Strélitz de porter sa réplique dans une lettre où il disait hautement à son royal beau-frère: «que quand les Puissances occidentales assureront l'émancipation des chrétiens en Turquie par un traité, lui, le Czar, consentirait à évacuer les Principautés, en même temps que les flottes combinées évacueraient le Pont-Euxin.»
[129] Dans le parti libéral en Prusse, il y avait la nuance des vieux Prussiens, à la tête desquels se trouvaient Bethmann-Holweg, Usedom, Pourtalès, Goltz. Le Preussische Wochenblatt était leur organe et avait comme rédacteur le docteur Jasmund. On le nommait communément le Journal de Bethmann-Holweg. Cette feuille se distinguait par des articles bien écrits, critiquant avec une certaine modération les actes du Gouvernement, mais pleins d'amertume contre le parti représenté par la Kreuzzeitung. Cette feuille cessa de paraître en 1861.
[130] Ferdinand-Charles III, duc de Parme, avait succombé le 27 mars 1854, après avoir été frappé la veille par un assassin qui lui avait porté un coup de couteau dans le ventre.
[131] Le parti russe de la Cour regardait le général de Bonin comme un ennemi personnel, et multiplia ses intrigues dans les hauts parages pour le faire sortir du ministère de la Guerre. Comme le Prince de Prusse, M. de Bonin était également favorable à un rapprochement avec les Puissances occidentales; aussi, sa démission, demandée par le Roi, fit la plus fâcheuse impression en dehors du cercle de la Cour. On se rappela l'énergie déployée par le Ministre dans la Commission au sujet de l'emprunt, et l'ardeur avec laquelle il sentait la nécessité de la réalisation d'une entente plus intime entre la Prusse et l'Autriche. Cette entente était devenue un si pressant besoin que l'Empereur d'Autriche n'hésita pas d'envoyer alors à Berlin le général de Hess avec des propositions formelles d'une alliance offensive et défensive, insistant pour que la Prusse concentrât un corps d'armée sur sa frontière. Ces négociations aboutirent à un renouvellement formel du traité secret de 1851, par lequel la Prusse et l'Autriche se garantissaient réciproquement leurs États, quoique le Gouvernement prussien se fût efforcé d'écarter toute stipulation qui pouvait l'obliger à se montrer en armes contre la Russie.
[132] Le comte d'Alvensleben, qui avait refusé une mission spéciale à Londres et était retourné dans ses terres, venait d'en être rappelé et pressé de partir pour Vienne, afin de s'y concerter et d'y surveiller de plus près les mesures à prendre avec le Cabinet autrichien, après la négociation du général de Hess à Berlin.
[133] Duc de Valençay.
[134] La duchesse de Talleyrand se retrouvait pour la première fois à Rochecotte, depuis qu'elle en avait cédé la propriété à sa fille en 1847.
[135] Marquise de Castellane.
[136] M. de Salvandy était atteint au cou d'une loupe d'un volume considérable. Il en souffrit durant de longues années et cette tumeur fut la cause de sa fin.
[137] Dans la lutte de l'Épiscopat français contre l'enseignement des langues anciennes, Mgr Dupanloup, s'étant prononcé avec beaucoup de talent pour l'Université, s'était acquis un titre qui lui ouvrit les portes de l'Académie française où il remplaça M. Tissot, le traducteur des Bucoliques de Virgile. Cette réception eut lieu le 8 novembre 1854.
[138] Lorsque éclata la guerre d'Orient, le maréchal de Saint-Arnaud reçut le commandement de l'armée française qui s'embarqua du 24 au 29 avril 1854. Il débarqua avec ses troupes le 14 septembre en Crimée; et, de concert avec les troupes alliées, remporta la victoire de l'Alma qui leur ouvrit la route de Sébastopol. Accablé d'une maladie mortelle, il dut remettre le commandement de l'armée au général Canrobert, puis s'embarqua pour la France. Il mourut pendant la traversée le 29 septembre. Ses restes furent déposés en grande pompe à l'Hôtel des Invalides à Paris.
[139] L'Autriche avait à peine conclu à Berlin le traité d'alliance offensive et défensive négocié par le général de Hess, que, sans en prévenir la Prusse, et profitant des droits qu'elle s'était réservé de conclure indépendamment des traités, elle s'était empressée de s'entendre avec les Puissances belligérantes. Le Moniteur de Paris, du 4 décembre, annonçait que le 2, à Vienne, un traité d'alliance avait été signé entre les plénipotentiaires de la France, de l'Autriche et de la Grande-Bretagne.
[140] Désirant assister aux solennités qui se préparaient dans la Ville Éternelle pour la proclamation du dogme de l'Immaculée-Conception le 8 décembre, la marquise de Castellane, emmenant sa fille avec elle, se rendit à Rome, par mer, vers la fin de novembre; elle y séjourna jusqu'à la fin du mois d'avril 1855.
[141] La princesse revenait de Bruxelles où elle s'était réfugiée après l'entrée en campagne des Puissances belligérantes.
[142] De l'anglais: pernicieux.
[143] Le palais Cafarelli à Rome était la propriété du Roi de Prusse et la résidence de la Légation auprès du Saint-Siège.
[144] Le traité du 2 décembre avait fait la plus profonde impression à Saint-Pétersbourg. La Russie cherchait, par des moyens détournés, d'affaiblir cette puissante coalition, afin d'enlever au Cabinet de Vienne tout prétexte d'hostilité active. Le prince Gortschakoff, ambassadeur de Russie, se déclara autorisé à négocier d'une manière générale. Les plénipotentiaires des trois Puissances alliées du 2 décembre se réunirent à Vienne dans la journée du 28. Les explications, données de part et d'autre, montrèrent qu'on se comprenait, et qu'on était d'accord sur les points essentiels, mais sous réserve de l'assentiment des Cabinets de Londres et de Paris; une base de paix était comme posée, mais la Russie, n'ayant jamais voulu faire aucune concession, quant au nombre des vaisseaux qu'elle pourrait avoir dans la mer Noire, les négociations tirèrent en longueur et n'aboutirent pas.
[145] Fille de M. Molé.
[146] La duchesse de Talleyrand avait une terreur innée des chats qu'elle ne parvint jamais à vaincre.
[147] L'étrange épuisement qui consumait l'armée anglaise devant Sébastopol avait déchaîné l'opinion publique en Angleterre contre le Ministère, qui réclamait à grands cris le relèvement de la puissance britannique. Le 27 novembre 1854, la Reine avait convoqué d'urgence le Parlement, pour le 12 décembre, afin de prendre des mesures qui pousseraient la guerre avec vigueur et accroîtraient les forces de l'armée. Lord Palmerston, le ministre le plus populaire de l'Angleterre, reçut la mission de former un nouveau Cabinet. Celui-ci concentra dans les mains du commandant en chef de l'armée les forces militaires, réforma le commissariat, organisa un service de transport, et les dons des particuliers affluèrent en telle exubérance, qu'après avoir passé par toutes les souffrances, par tous les dénûments de l'extrême misère, l'armée anglaise connut toutes les abondances, et aussi tous les dangers de l'extrême bien-être.
[148] Le dissentiment, qui s'était manifesté entre l'Autriche et la Prusse sur la question de la mobilisation, avait fait commencer au Cabinet de Vienne des négociations avec différents gouvernements allemands, et pour donner un point d'appui, l'Empereur d'Autriche manifestait le désir de se placer à la tête de l'armée fédérale. Effrayée de cet isolement, la Prusse avait envoyé le comte de Wedel à Paris, dans l'espoir de s'entendre directement avec les Puissances occidentales. La France devait reconnaître à la Prusse le droit de prendre part au Congrès de Vienne et la Prusse disposée à accéder au traité du 2 décembre. Mais ces négociations échouèrent complètement.
[149] M. de Niebuhr, conseiller du Cabinet du Roi, passait pour un ami de la Russie.
[150] Chez Mme de Lieven.
[151] Au retour de la campagne peu fructueuse de la Baltique, l'amiral Napier, le cœur gonflé d'amertumes, ne respectant ni autorité, ni discipline, ni convenance, ni lui-même, avait, après un dîner du Lord-Maire, prononcé un discours extraordinaire dans lequel il attaquait le Gouvernement et sir James Graham, président de l'Amirauté. Il le déclara indigne de présider, puisque sir James Graham s'était joint aux hommes qui l'avaient blâmé de n'avoir pas enlevé Cronstadt et de s'être opposé à son attaque. Il avait fallu rabattre des illusions qu'on se faisait si légèrement au commencement des hostilités du Nord et de l'Orient; les Anglais rendirent leurs chefs responsables des difficultés, le langage de sir Charles Napier et la conduite de lord John Russell abandonnant ses collègues à l'heure du danger et travaillant ouvertement, par ses intrigues, à supplanter l'administration dont il avait fait partie, rendirent plus complète l'anarchie qui régnait dans les régions les plus élevées du pouvoir.
[152] Ce fait n'a pas été prouvé et fut même démenti. On en parla beaucoup à Turin, à cette époque, et il est certain que le Roi Victor-Emmanuel ne signa qu'avec une grande répugnance les lois dont il est ici question. La mort avait frappé, en un mois, la Reine mère, la Reine régnante et le Duc de Gênes, frère du Roi.
[153] Ce fut, en effet, en 1855 que le duc de Broglie prit possession du fauteuil laissé vacant par la mort de Sainte-Aulaire à l'Académie française. M. Ernest Legouvé remplaça M. Ancelot. M. Ponsard succéda, dans la même année, à M. Baour-Lormian.
[154] Le général de Wedel avait été chargé de négocier à Paris un projet de traité séparé, pour conclure entre la Prusse et la France, sur la base que la Prusse serait disposée à signer, le protocole du 28 décembre, afin de prendre sa place dans la Conférence de Vienne. Mais ces négociations n'aboutirent pas, la Prusse cherchant toujours à conserver sa liberté d'action.
[155] L'Empereur Nicolas avait cru au prompt triomphe de ses armes; les défaites qu'elles essuyèrent successivement en Crimée lui portèrent un coup terrible qui abrégea ses jours. Déjà souffrant en janvier, il commença à ressentir les atteintes de la grippe; malgré les défenses des médecins, il voulut, un jour, inspecter les troupes qui partaient pour la Crimée; le mal s'aggrava et fit des progrès si rapides qu'il fut emporté subitement le 2 mars. Cette nouvelle inattendue fut comme un coup de foudre pour l'Europe, particulièrement pour Berlin.
[156] Le 25 février 1855, M. Berryer prenait place à l'Académie française. Il y était reçu par M. de Salvandy et remplaçait Alexis de Saint-Priest dont il avait à faire l'éloge. En parlant des relations de M. de Saint-Priest, M. Berryer avait dit entre autres: «De bonne heure, il fut admis dans les entretiens familiers où M. de Talleyrand se jouait et profitait avec éclat et finesse de ses avantages, étant d'assez grande naissance et revêtu d'assez hautes dignités, pour ne parler ou se taire, n'interroger ou ne répondre qu'à son moment, toujours assuré de la victoire, comme un capitaine pouvant toujours, à son gré, choisir le terrain du combat.»
[157] Le 5 mars 1855, l'Impératrice d'Autriche accoucha de son premier enfant. A l'occasion de sa naissance, l'Empereur accorda une amnistie qui fut publiée simultanément dans toutes les provinces de l'Empire. Cette jeune Archiduchesse mourut à l'âge de deux ans.
[158] Les difficultés inattendues que les troupes expéditionnaires rencontrèrent en Crimée et les épreuves qu'elles eurent à subir avaient, en Angleterre, dépopularisé lord Raglan en le rendant responsable de ce que Sébastopol était entouré de murailles et de ce qu'il y avait de la neige en Crimée. Comme sir Charles Napier, lord Raglan était fort attaqué par l'opinion publique.
[159] Winterhalter, qui avait peint en 1837 le fameux tableau: le Décaméron, fut choisi pour reproduire, dans le même genre d'attitudes, l'Impératrice Eugénie entourée des dames de sa Cour. Ce tableau, qui prit place à l'Exposition de 1855 à Paris, fournit une ample matière aux critiques les plus mordantes.
[160] Ce livre, qui formait la seconde partie des Souvenirs historiques et littéraires de M. Villemain, piqua encore plus vivement l'opinion publique que la première. Dans le chapitre consacré au Congrès de Vienne, se trouvait un portrait aussi fin que spirituel de l'auteur de cette Chronique.
[161] Extrait de lettre à M. de Bacourt.
[162] Les alliés avaient ouvert le 9 avril le feu de toutes leurs batteries contre Sébastopol et une brèche y avait été pratiquée dans la journée du 10.
[163] Le 28 avril, l'Empereur Napoléon III montait à cheval les Champs-Élysées, lorsqu'un Italien, nommé Pianori, lui tira un coup de pistolet sans l'atteindre. Arrêté, il déclara qu'il avait voulu venger la République romaine. Il fut condamné à mort et exécuté le 14 mai suivant.
[164] Le 23 avril, dans la séance de la Chambre des Communes, lord Palmerston déclarait que les Conférences étaient ajournées indéfiniment, la Russie ayant refusé de réduire sa flotte et de considérer le Pont-Euxin comme mer neutre.
[165] Dans le but de l'empêcher d'aller en Crimée, les Cabinets anglais et français avaient persuadé à l'Empereur Napoléon III de venir rendre visite à la Reine d'Angleterre. Il y alla, en effet, passer une semaine, au mois d'avril 1855, accompagné de l'Impératrice Eugénie.
[166] La plus célèbre des sources à Carlsbad.
[167] Dans la matinée du 18 juin 1855, les Français avaient attaqué Malakoff et les Anglais le grand Redan. Cet assaut fut rejeté sur tous les points avec des pertes immenses pour les deux armées alliées, qui y perdirent chacune plusieurs généraux et un grand nombre d'officiers supérieurs.
[168] Lord Raglan avait soutenu avec dignité le poids du commandement, mais le dénuement de ses soldats et les attaques de la presse anglaise contre un état de choses, auquel il ne pouvait remédier, l'affectèrent vivement. Atteint du choléra, il n'y résista pas et mourut à son quartier général.
[169] L'Empereur Napoléon III avait convoqué les Chambres en session extraordinaire, afin de faire un nouvel appel à leur patriotisme, en leur demandant les moyens de continuer la lutte.
[170] A propos de l'observation du dimanche et du bill dit du Commerce de lord Growenor, une démonstration populaire avait eu lieu à Hyde-Park. La police dut arrêter la circulation des voitures et sévir contre les personnes qui avaient voulu intervenir.
[171] De l'anglais: pauvre chère vieille Angleterre.
[172] La Reine Marie-Amélie voulant aller passer une partie de l'hiver en Italie, on avait parlé d'une visite à Frohsdorff, mais la Reine se borna à un séjour à Savone, sans donner suite à ce premier projet.
[173] Le bruit s'était répandu que, sur la demande du prince Napoléon, l'Empereur retirerait son commandement au maréchal de Castellane.
[174] Maison de campagne des évêques d'Orléans que Mgr Fayet avait eu la bonne fortune d'acquérir pour le diocèse. Elle avait appartenu, au commencement de ce siècle, à la célèbre comédienne Mlle de Raucourt. Mgr Dupanloup en faisait sa résidence d'été, à proximité de laquelle se trouvait son petit séminaire, objet de ses soins particuliers.
[175] Quelques jours avant la prise de Sébastopol, l'Empereur Napoléon III eut le grand triomphe de recevoir à Paris la Reine Victoria, accompagnée du prince Albert. Sur les conseils du Gouvernement anglais, desireux de resserrer l'alliance entre les deux peuples, la Reine vint à Paris pour y visiter l'Exposition universelle.
[176] Le 8 septembre 1855, à midi, les Français avaient emporté d'assaut la tour de Malakoff regardée comme la clef de Sébastopol et, un peu plus tard, le Grand Redan. Les Russes, voyant la solide occupation de ces deux points principaux, se déterminèrent à évacuer la place, après avoir ruiné et fait sauter par la mine, les défenses, les édifices et avoir coulé leurs derniers vaisseaux.
[177] Ce mot allemand, intraduisible en français, veut dire: quelque chose de désagréable.
[178] Dans la nuit du 26 au 27 août 1855, cinq à six cents ouvriers des ardoisières de Maine-et-Loire s'étaient emparés d'une caserne de gendarmerie et avaient essayé de surprendre la ville d'Angers; ils furent dispersés par la force armée et pour la plupart faits prisonniers. Ils appartenaient à la société secrète dite de la Marianne.
[179] La duchesse d'Istrie habitait le premier étage de l'ancien hôtel Talleyrand, alors en possession du baron de Rothschild, qui en avait fait l'acquisition après la mort du prince de Talleyrand.
[180] De l'anglais: bas bleu.
[181] Dans cet ouvrage, M. Cousin essaie de peindre, dans toute sa vérité, la lutte mémorable que le cardinal Mazarin eut à soutenir, en 1643, au début de la Régence, contre les Importants, les devanciers des Frondeurs. Parmi ses nombreux et puissants adversaires, figurent deux femmes qui avaient déjà tenu tête à Richelieu. C'étaient Mme de Chevreuse et Mme d'Hautefort qui, dit M. Cousin, «est à peu près assurée de plaire par le pur éclat de sa beauté, la vivacité généreuse de son esprit, la délicatesse et la fierté de son cœur et son irréprochable vertu.»
[182] Le 21 février 1856 s'était ouvert à Paris, sous la présidence du comte Walewski, un Congrès des grandes Puissances qui avaient pris part à la guerre de Crimée, pour arrêter les bases d'un traité. L'Autriche, quoique non belligérante, étant directement intéressée dans la lutte, dont la rive gauche du Danube était l'enjeu, y prit une large part par son représentant le comte Buol, dont l'attitude raide et cassante fut souvent une cause d'irritation parmi les négociateurs, froissés d'entendre l'Autriche parler comme si elle avait pris Sébastopol; mais ce ne fut que quand les principales clauses du traité furent arrêtées le 18 mars par les Puissances, qu'elles admirent la Prusse à la continuation des débats qui allaient s'engager sur la convention des Détroits, la Prusse ayant été partie contractante en 1841 dans l'acte relatif à la fermeture des Dardanelles et du Bosphore. La paix fut signée le 30 mars, amenant la neutralisation de la mer Noire et empêchant l'absorption de l'Empire Ottoman par la Russie. Tout paraissait donc fini, mais l'Empereur Napoléon et le comte de Cavour en avaient décidé autrement. Le 27 mars, les plénipotentiaires sardes avaient présenté aux Ministres des Affaires étrangères de France et d'Angleterre une note relative aux affaires d'Italie. M. Walewski, par ordre de son maître, proposa aux plénipotentiaires d'ajourner leur départ pour un échange d'idées sur différents sujets qui demandaient une solution. Les discussions restèrent sans conclusion alors, mais grâce à la connivence des Gouvernements de France et d'Angleterre, qui soutinrent vivement le comte de Cavour, la situation des affaires italiennes n'en fut pas moins traduite à la barre de l'Europe.
[183] M. de Rochow, membre de la Chambre des Seigneurs de Prusse, avait tué en duel M. Hinckeldey, directeur général de la police à Berlin. Le Roi, ayant eu connaissance de ce projet de duel, avait chargé M. Raümer, conseiller du Ministère de sa maison, de voir les adversaires et de les réconcilier. N'ayant pas réussi dans sa mission, celui-ci se suicida en apprenant la fatale issue de ce duel. A la séance de la Chambre des Seigneurs, le Président, prince de Hohenlohe, ayant simplement exprimé le regret que M. de Rochow se trouvait empêché de s'y rendre, le point d'honneur l'ayant forcé d'enfreindre les lois du pays, sans parler de la mort de M. Hinckeldey, un grand mécontentement s'en était suivi en ville.
[184] La visite du Comte de Chambord à sa tante la Reine Marie-Amélie avait eu lieu à Nervi les tout premiers jours d'avril.
[185] La Princesse Marguerite, l'aînée de ces deux enfants, est Reine d'Italie.
[186] M. de Sainte-Aulaire.
[187] En 1854, l'Empereur François-Joseph avait inauguré une ligne de chemin de fer qui reliait directement la ville de Vienne à la mer Adriatique. Une Compagnie, dont M. Nathaniel de Rothschild était un des principaux actionnaires, avait, à l'aide de seize mille ouvriers, construit cette voie ferrée qui, tout en serpentant la chaîne du Semmering, la traverse à plus de trois mille pieds au-dessus du niveau de la mer.
[188] L'Archiduc fut reçu à Paris avec tous les honneurs civils et militaires. Son voyage était sans but politique, quoique le bruit courut que ce Prince venait négocier une entrevue à Munich entre l'Empereur, son auguste frère, et l'Empereur Napoléon.
[189] Pendant que le Congrès était réuni à Paris, l'Impératrice Eugénie donna le jour à un fils qui naquit aux Tuileries, le 16 mars 1856. D'abord ondoyé, le Prince Impérial ne fut baptisé que le 15 juin suivant, très solennellement à Notre-Dame. Le Pape Pie IX, qui était son parrain, se fit représenter par le cardinal Patrizi, et la Reine de Suède, sa marraine, par la Grande-Duchesse Stéphanie de Bade.
[190] Le prince Windisch-Graetz se trouvait alors à Berlin pour assister à des manœuvres militaires. Il n'avait aucune mission politique.
[191] Le Prince Louis de Bade incapable de régner, par suite d'une maladie mentale des plus graves, son frère cadet, le Prince Frédéric-Guillaume, succéda en 1852 à leur père, le Grand-Duc Charles-Léopold. Il prit d'abord le titre de Régent, et ce ne fut qu'en 1856 qu'il s'attribua le titre de Grand-Duc, par une patente spéciale.
[192] Le 24 août était le jour de naissance du Comte de Paris qui, en 1856, atteignait l'âge de dix-huit ans, par conséquent, la majorité pour les rois de France.
[193] Le duc de Morny se rendait à Moscou comme Ambassadeur extraordinaire, pour représenter la France au couronnement de l'Empereur Alexandre II. Il déploya un luxe qui paraissait d'un goût douteux à côté de celui du prince Esterhazy et de lord Granville, le premier représentant l'Autriche, le second l'Angleterre.
[194] Après la signature de la paix et l'évacuation de la Crimée, le maréchal Pélissier revint en France au mois d'août 1856. Il fut reçu avec les plus grands honneurs et un accueil enthousiaste de la part de la population. En débarquant à Marseille, le Maréchal trouva une lettre de l'Empereur qui lui conférait le titre de duc de Malakoff; en outre, le Corps législatif lui vota une dotation annuelle de cent mille francs, transmissible à sa descendance directe de mâle en mâle.
[195] Mme la Duchesse d'Orléans était pour un mois à Hambourg où elle avait appelé plusieurs de ses partisans.
[196] Le Prince Adalbert, grand-amiral de la flotte prussienne, à bord de la frégate Dantzig, avait été attaqué sur la côte du Maroc par les pirates du Riff. Le Prince avait reçu une balle dans la cuisse durant le combat où il perdit sept hommes, son lieutenant de vaisseau entre autres, et dix-sept blessés. Cette mésaventure avait péniblement impressionné à Berlin où, par dérision, on la compara au désastre de cette formidable flotte de guerre, connue sous le nom de l'invincible Armada, équipée en 1588 par le Roi Philippe II d'Espagne et destinée à envahir l'Angleterre afin d'y rétablir le catholicisme.
[197] Le comte Schulenbourg avait été frappé à table, pendant qu'il dînait, le 3 septembre, d'une attaque d'apoplexie, dont il mourut le lendemain.
[198] Devenue veuve le 10 février 1855 du Duc de Gênes, la Duchesse avait épousé morganatiquement et secrètement, en octobre 1856, un marquis de Rapollo qui avait été aide de camp de son mari.
[199] La Princesse Louise de Prusse, fille de celui qui fut plus tard l'Empereur Guillaume 1er, avait épousé, le 20 septembre 1856, le Grand-Duc de Bade.
[200] La question de l'Altesse Royale pour le Duc de Cobourg-Gotha n'avait pas encore été acceptée ni réglée en Prusse.
[201] Le maréchal Marmont avait épousé, en 1798, la fille du banquier comte de Perrégaux qui devint sénateur, puis régent de la Banque de France. Les Mémoires du duc de Raguse ont un cachet d'âpreté et d'amour-propre qui froissèrent bien des personnes quand ils furent publiés en 1856.
[202] Le mariage de la Princesse Charlotte, fille du Roi des Belges, avec l'Archiduc Maximilien d'Autriche venait d'être décidé; mais il ne fut célébré que l'année suivante, le 27 juillet 1857.
[203] Le discours royal avait surtout un passage relatif aux affaires de Neuchâtel, que le Roi se montrait disposé à traiter comme une question de droit européen, et, sans les spécialiser, Sa Majesté annonçait qu'une augmentation des recettes du budget était indispensable pour pourvoir à plusieurs pressants besoins.
[204] L'exécution du traité de Paris ayant soulevé quelques difficultés de détail entre la Russie et les autres puissances contractantes, la réunion d'une nouvelle conférence fut décidée le 31 décembre. La première séance eut lieu à Paris au ministère des Affaires étrangères pour arriver à mettre fin aux difficultés qui entravaient l'exécution de l'article 20 du traité du 30 mars précédent. Cet article comprenait la nouvelle délimitation de la Bessarabie, la possession de la ville de Belgrade, l'évacuation de Kars et de l'île des Serpents par les Russes. L'entente entre les deux puissances fut faite le 8 janvier 1857.
[205] Lord Shrewsbury avait légué sa fortune au second fils du duc de Norfolk, mais le comte Henry-Jean Chetwynd Talbot avait hérité des titres et armes de lord Shrewsbury. Le duc de Norfolk lui en ayant contesté le droit, la Chambre des lords fut saisie du procès le 30 juillet 1858; sur un rapport du lord Chancelier, les pairs d'Angleterre rendirent un jugement favorable au comte Henry-Jean Chetwynd Talbot.
[206] Le 4 janvier 1857, l'archevêque de Paris, Mgr Sibour, avait été frappé d'un coup de poignard dans l'église de Saint-Étienne-du-Mont, où il officiait, par un prêtre du diocèse de Meaux, nommé Verger, récemment interdit et que Mgr Sibour avait refusé de recevoir dans son clergé. Jugé et condamné à mort, Verger fut exécuté le 30 janvier suivant.
[207] L'abbé Ledieu avait été, en 1684, attaché à la personne de Bossuet en qualité de secrétaire. Quatre ans avant la mort de l'évêque de Meaux, il se mit à écrire un journal, aussi curieux qu'instructif, notant jour par jour, heure par heure, les faits et gestes de son illustre maître. Ces Mémoires, qui renferment des trésors de détails des plus intéressants, ne furent publiés qu'en 1856 par l'abbé Guette, d'après le manuscrit autographe.
[208] En revenant du couronnement de Moscou, M. de Morny épousa à Saint-Pétersbourg une princesse Troubetskoï, demoiselle d'honneur de l'Impératrice, qui devint en secondes noces duchesse de Sesto.
[209] A la suite d'une insurrection qui avait éclaté dans le canton le 29 février 1848, Neuchâtel s'était rendu indépendant de la Prusse en proclamant une constitution démocratique. Le Roi de Prusse protesta et, au mois de septembre 1856, le parti royaliste, ayant à sa tête le comte de Pourtalès, tenta un coup de main pour rétablir la suzeraineté prussienne. Cette tentative fut réprimée par les troupes du Conseil fédéral, qui firent plusieurs prisonniers, et il fallut l'intervention de la France pour obtenir leur élargissement sans caution, après avoir fait prendre au Roi de Prusse l'engagement de renoncer à son droit de suzeraineté. Le traité du 26 février 1858 affirma définitivement l'indépendance de Neuchâtel.
[210] En ouvrant le 15 février la session législative de 1857, l'Empereur Napoléon III avait prononcé un discours dans lequel il célébrait les bienfaits de la paix qu'il était parvenu à rétablir, l'intention de réduire les dépenses sans suspendre les grands travaux et de diminuer certains impôts. Puis il remerciait les députés d'avoir proclamé l'Empire pendant leur législature, de l'avoir soutenu pendant la guerre, et résumait toute sa pensée dans cette phrase où il faisait une si évidente allusion à M. Thiers: «La France, sans froisser les droits de personne, a repris dans le monde le rang qui lui convenait et peut se livrer en toute sécurité à tout ce que produit le grand génie de la paix. Que Dieu ne se lasse pas de la protéger et bientôt l'on pourra dire de notre époque ce qu'un homme d'État, historien illustre et national, a écrit du Consulat: «La satisfaction était partout, et quiconque n'avait pas dans le cœur les mauvaises passions des partis était heureux du bonheur public.»
[211] On trouvera la lettre de M. le Comte de Chambord au duc de Nemours aux pièces justificatives de ce volume.
[212] De l'anglais: sa lune de miel.
[213] De la maison de Bourbon.
[214] Le Consulat et l'Empire.
[215] M. de Falloux fut reçu à l'Académie française le 26 mars 1857; il y remplaçait M. Molé. Son discours fut accueilli assez froidement par la docte Assemblée, comme par une grande partie du public, qui s'interdisait une approbation littéraire pouvant ressembler à un assentiment politique.
[216] Mgr de Dreux-Brézé.
[217] M. de Falloux avait été Ministre de l'Instruction publique et des Cultes sous la Présidence]
[218] Le Grand-Duc Constantin, frère cadet de l'Empereur de Russie et marin de profession, vint en France accompagné du général de Totleben et d'une suite nombreuse. A la tête d'une escadre russe, il débarqua à Toulon le 20 avril et fut reçu avec un grand éclat dans toutes les villes de France où il s'arrêta. Pendant les dix jours qu'il séjourna à Paris et les quatre qu'il passa avec la Cour à Fontainebleau, on multiplia les fêtes en son honneur. Après avoir séjourné un mois en France, le Grand-Duc s'embarqua à Bordeaux le 21 mai sur un yacht impérial, la Reine Hortense, mis à sa disposition; il visita les principaux ports et les établissements maritimes de l'Océan et se rendit à Osborne pour saluer la Reine d'Angleterre. Il retourna ensuite par l'Allemagne en Russie.
[219] Cette course à Vienne, sans motif politique, eut lieu le 8 juillet. Le Roi était accompagné de sa sœur, la Grande-Duchesse de Mecklembourg-Schwerin. Ce fut au retour, à Marienbad, qu'il eut une petite attaque d'apoplexie que l'on crut pouvoir dissimuler, mais qui fut le commencement de sa maladie, un ramollissement du cerveau qui conduisit le Roi au tombeau quelques années plus tard.
[220] Pie IX, ayant résolu de se rendre à Lorette pour y accomplir un pieux pèlerinage, entreprit un voyage qui, pendant quatre mois, le tint éloigné de Rome. Parti le 4 mai 1857, il ne rentra dans sa capitale que le 5 septembre suivant. Après avoir été prier dans la Casa Sancta, s'être rendu à Sinigaglia, sa ville natale, et dans plusieurs autres villes d'Italie, le Saint-Père fit encore visite au Duc de Modène et au Grand-Duc de Toscane.
[221] Le général de Goyon avait reçu, en 1856, le commandement du corps d'occupation que la France entretenait auprès du Pape depuis 1850. Le général était fort bien vu par Pie IX; mais de fréquents démêlés avec le proministre des armes pontificales, Mgr de Mérode, rendirent petit à petit sa position difficile. Il fut obligé de revenir en France en 1862.
[222] Une nouvelle attaque d'apoplexie, beaucoup plus grave que celle de Marienbad, frappa Frédéric-Guillaume IV le 6 octobre 1857, ce qui le força (par un décret du 23 octobre 1857) à remettre provisoirement à son frère, le Prince de Prusse, les rênes du gouvernement pour trois mois. Dans son manifeste, le Prince promit de gouverner conformément à la Constitution et aux lois, et confirma les Ministres de son frère dans leurs fonctions. Le Cabinet se composait de MM. de Manteuffel, de Heydt, Simon de Raümer, de Westphalen, de Massow, de Bodelschwing et du comte de Waldersee.
[223] Fils unique du Prince de Prusse, monta sur le trône en 1888 sous le nom d'Empereur Frédéric III; son règne n'eut qu'une durée de quatre-vingt-dix-neuf jours.
[224] Après le mariage de sa fille et son retour d'Allemagne, la marquise de Castellane tomba gravement malade à Paris d'une inflammation intestinale et ne se remit que lentement de cette atteinte sérieuse.
[225] Orsini avait médité d'assassiner Napoléon III, qu'il regardait comme la cause des malheurs de sa patrie; il s'était associé à trois réfugiés italiens, Pieri, Rudio et Gomes. Trois bombes fulminantes éclatèrent coup sur coup, au moment où l'Empereur et l'Impératrice se rendaient en voiture le 14 janvier à l'Opéra; ni l'un ni l'autre ne furent atteints, mais il y eut cent cinquante-six personnes blessées, plus ou moins mortellement. Rudio et Gomes furent condamnés aux travaux forcés, les deux autres à la peine de mort. Orsini avoua tout, et en posant sa tête sur la fatale machine, il poussa le cri de: «Vive l'Italie! Vive la France!» De sa prison de Mazas, il avait adressé à Napoléon III une lettre qui fit beaucoup de bruit et dont voici les principaux passages: «Les dépositions que j'ai faites contre moi-même dans le procès politique, intenté à l'occasion de l'attentat du 14 janvier, sont suffisantes pour m'envoyer à la mort; près de la fin de ma carrière, je viens, néanmoins, tenter un dernier effort pour venir en aide à l'Italie, dont l'indépendance m'a fait, jusqu'à ce jour, tenter tous les périls, aller au-devant de tous les sacrifices. Elle fait l'objet de toutes mes affections, et c'est cette pensée que je veux déposer dans ces paroles que j'adresse à Votre Majesté. Pour maintenir l'équilibre actuel de l'Europe, il faut rendre l'Italie indépendante ou desserrer les chaînes dans lesquelles l'Autriche la tient en esclavage. Demandé-je pour sa délivrance que le sang des Français soit répandu pour les Italiens? NON, je ne vais pas jusque-là. L'Italie demande que la France n'intervienne pas contre elle; elle demande que la France ne permette pas à l'Allemagne d'appuyer l'Autriche dans les luttes qui vont peut-être s'engager. Or, c'est précisément ce que Votre Majesté peut faire si elle le veut. De votre volonté dépendent, ou le bien-être ou les malheurs de ma patrie, la vie ou la mort d'une nation à qui l'Europe est en grande partie redevable de sa civilisation. Telle est la prière que, de mon cachot, j'ose adresser à Votre Majesté, ne désespérant pas que ma faible voix soit entendue. J'adjure Votre Majesté de rendre à ma patrie l'indépendance que ses enfants ont perdue en 1849 par la faute même des Français.»
[226] La marquise de Castellane était tombée malade chez la duchesse d'Albuféra, où elle resta des mois.
[227] Le 1er février 1858, l'Empereur Napoléon et l'Impératrice recevaient à Paris: le Prince Albert de Prusse, le plus jeune frère du Roi, le Prince Frédéric-Charles de Prusse, neveu du Roi, et le Prince Adalbert de Prusse, cousin du Roi.
[228] Le 21 février, lord Palmerston tomba du pouvoir après l'avoir tenu en main pendant trois années consécutives, et sur la demande de la Reine, ce fut lord Derby qui reconstitua un Cabinet dans lequel on remarquait lord Salisbury, comme Président du Conseil, le général Peel à la Guerre, lord Malmesbury aux Affaires étrangères et M. Disraeli, chancelier de l'Échiquier; mais la politique de lord Salisbury n'ayant point été approuvée par le Parlement, lord Palmerston et lord John Russell reprirent les rênes du gouvernement en juin 1859.
[229] Les habitants de Londres, afin de protester contre le bill relatif aux conspirations pour assassinat, s'étaient portés en foule à Hyde-Park pour y faire une réunion monstre; mais en arrivant, le public trouva une affiche, annonçant que les promoteurs du meeting y avaient renoncé à la suite du vote de la Chambre des Communes qui avait renversé le Ministère.
En même temps, il paraissait à Londres une brochure, Lettre au Parlement et à la presse, signée: Félix Pyat, Besson et Talandier au nom du Comité de la commune révolutionnaire et en date du 24 février 1858. Cette brochure défendait le droit à l'assassinat et faisait l'apologie de l'attentat dans le langage le plus passionné.
[230] Le Moniteur du 1er mars annonçait que le général Changarnier et le général Bedeau étaient autorisés à rentrer en France.
[231] Cette brochure était un exposé des questions que les derniers événements avaient fait surgir entre la France et l'Angleterre. L'auteur, qui était, dit-on, M. de la Guéronnière, débutait en rappelant les gages nombreux de sympathie que l'Empereur Napoléon III avait donnés à l'Angleterre pour maintenir les bons rapports entre les deux pays et éviter les conflits; puis il arrive à l'attentat du 14 janvier, aux incidents qu'il a déterminés entre les deux pays et il établit que ces complots sont préparés, organisés, exécutés par les réfugiés de Londres. Au moment où cette brochure paraissait, il y avait quelques difficultés diplomatiques entre la France et l'Angleterre, le ministre des Affaires étrangères de Londres n'ayant pas jugé à propos de répondre à une note adressée par M. Valewski, ministre des Affaires étrangères de France. La chute du Cabinet britannique s'en était suivie, et lord Malmesbury, devenu ministre, ne pouvant s'entendre avec M. de Persigny, ambassadeur de France à Londres, celui-ci dut donner sa démission.
[232] M. Rigault avait fait paraître dans le Journal des Débats du 6 avril un feuilleton critique et moqueur sur ce qu'il appelait la dévotion du temps et l'éloquence religieuse. Il y faisait trois catégories de prédicateurs, et distinguait, par les opinions, le clergé séculier de la rive droite de la Seine de celui de la rive gauche.
[233] Le Président du Conseil en Prusse, le 12 avril 1858, annonçait aux Chambres que le Roi venait de conférer de nouveau les pouvoirs complets, pour trois mois, à son frère le Prince de Prusse.
[234] C'était à propos de la façon dont M. Guizot avait parlé, dans les chapitres III et IV du premier volume de ses Mémoires, de M. de Talleyrand; il s'agissait d'insinuations, malveillantes dans le fond quoique courtoises dans la forme, dont M. Guizot avait fait usage, au sujet du rôle politique de M. de Talleyrand pendant la Révolution, qu'il rapprochait de celui qu'il avait rempli au Congrès de Vienne; comme aussi de celui qu'il avait joué lors de la restauration des Bourbons.
[235] Le maréchal Pélissier avait remplacé à Londres, comme ambassadeur de France, M. de Persigny.
[236] Après l'attentat d'Orsini, lord Palmerston proposa un bill pour modifier la loi sur les réfugiés. Lord John Russel parla contre cette proposition et froissa le Premier Ministre qui se brouilla avec lui, et le Cabinet tomba sous le blâme d'avoir gardé le silence sur une dépêche de M. Valewski, accusant le Gouvernement britannique de trop de tolérance pour les réfugiés. Quelques mois après, lord Palmerston et lord John Russel se réconcilièrent dans une entrevue chez M. Ellice et formèrent en juin 1859 un nouveau Cabinet.
[237] La Duchesse d'Orléans, qui habitait alors avec ses enfants à Richmond en Angleterre, était morte le 17 mai, enlevée en très peu de jours par une grippe inflammatoire, et sans qu'on se soit douté autour d'elle du danger qui la menaçait.
[238] De l'italien: le monde marche tout seul.
[239] La Reine Victoria vint à Cherbourg pour en visiter le port; elle fut reçue le 6 août 1858, avec autant de pompe que d'honneurs, par l'Empereur Napoléon III et l'Impératrice Eugénie. Un mois plus tard, la Reine vint à Potsdam et à Berlin pour y voir sa fille mariée depuis quelques mois au Prince Frédéric-Guillaume de Prusse.
[240] Appelé paletot classique par Humboldt.
[241] De l'anglais: «Comment pouvez-vous aller à une telle humiliation nationale?»
[242] La majorité de la Chambre, en Belgique, se basant sur l'avis que le projet du Gouvernement n'offrait pas assez de stabilité, en alléguant qu'une place forte intérieure serait plus utile, avait rejeté le projet du Gouvernement de fortifier le port et la ville d'Anvers. Le lendemain de ce vote, le Ministère donnait lecture à la Chambre de deux arrêtés royaux, l'un déclarant que le Gouvernement retirait son projet; l'autre que la session de la Chambre était close.
[243] Cette Conférence, où siégeaient les plénipotentiaires de France, d'Autriche, de la Grande-Bretagne, de Prusse, de Russie, de Sardaigne et de Turquie, avait pour but de régler l'organisation des Principautés danubiennes. Le 19 août, la première partie de cette tâche étant accomplie, une convention, arrêtée et signée, devait former un acte additionnel au traité de Paris. La Conférence, ayant rejeté le travail de la Commission relatif à la navigation du Danube, ce point resta encore en suspens.
[244] L'attentat d'Orsini fut le point de départ mystérieux de la phase des affaires italiennes et l'origine de la guerre de 1859, préparée, au fond, dès le Congrès de 1856. A partir de cette époque, la situation prit une gravité singulière et un emportement effaré sembla régner à Paris. Deux diplomaties s'y jouaient en même temps. D'un côté, le comte Walewski s'adressait de toutes parts pour réclamer des garanties contre le droit d'asile; de l'autre, l'Empereur Napoléon très tourmenté, surtout depuis la lettre qu'Orsini lui avait adressée la veille de son exécution, trouvait que, s'il y avait des conspirateurs, la faute était à la situation violente de l'Italie; et dans l'intimité des Tuileries, il se disait que tant qu'il y aurait des Autrichiens en Italie, il y aurait des attentats à Paris. Au mois de mai 1858, l'Empereur Napoléon faisait écrire secrètement au comte de Cavour une lettre contenant tout un plan d'alliance entre la France et le Piémont, les conditions d'arrangements réciproques, et même une proposition de mariage du prince Napoléon avec une fille du Roi Victor-Emmanuel; et il faisait prévenir de la possibilité d'une négociation décisive. Rien n'était pourtant possible sans une entrevue, et comme il en fallait détourner les soupçons, le docteur Conneau (médecin de l'Empereur) passa en juin par Turin, sous prétexte d'un voyage de plaisir en Italie, chargé de convenir d'une excursion, sans éclat, du comte de Cavour à Plombières où l'Empereur devait se rendre. Le Comte s'y achemina, en effet, sans bruit et y arrivait le 20 juillet. De suite, l'Empereur aborda le sujet en question et se dit décidé à appuyer la Sardaigne de toutes ses forces dans une guerre contre l'Autriche, pourvu que la guerre fût entreprise pour une cause non révolutionnaire, qui pût être justifiée aux yeux de la diplomatie et de l'opinion publique en France et en Europe. Il toucha ensuite la constitution d'un royaume italien de onze millions d'âmes, la cession de la Savoie et de Nice à la France, et le mariage du prince Napoléon avec la princesse Clotilde. Durant l'automne, on sortait des conventions verbales pour la signature d'un traité d'alliance offensive et défensive entre la France et le Piémont; et au grand étonnement de la France mal informée, Napoléon III, en recevant le 1er janvier 1859 le corps diplomatique, témoignait brusquement à M. de Hübner, ambassadeur d'Autriche, son regret que les relations fussent mauvaises entre Paris et Vienne. Ces quelques mots et ceux que le Roi Victor-Emmanuel prononçait quelques jours après, le 10 janvier, en ouvrant les Chambres, furent en quelque sorte l'éclair précurseur de l'orage qui allait éclater. C'était la première conséquence des engagements de Plombières.
[245] Le mariage ne fut célébré que le 2 octobre 1858.
[246] La Reine Élisabeth, qui était une Princesse de Bavière, avait, sous la pression de son beau-père Frédéric-Guillaume III, quelques années après son mariage, abjuré la religion catholique pour entrer dans l'Église protestante. Malgré cette situation difficile, le Roi et la Reine passèrent à Rome la plus grande partie de l'hiver 1858-1859.
[247] Fille du Roi de Saxe et première femme de l'Archiduc Charles-Louis d'Autriche. Cette Princesse venait de mourir en couches.
[248] Le nouveau Ministère prussien était ainsi composé: le prince de Hohenzollern-Sigmaringen, président du Conseil; M. d'Auerswald, ministre d'État; M. de Schleinitz, ministre des Affaires étrangères; le général de Bonin, ministre de la Guerre; M. de Patow, ministre des Finances; le comte Pückler, ministre de l'Agriculture; M. de Bethmann-Holweg, ministre des Cultes; M. de Heydt, ministre du Commerce; M. Simons, ministre de la Justice; M. de Flottwell, ministre de l'Intérieur.
[249] Dans une allocution que le Prince-Régent de Prusse avait adressée le 8 novembre au Ministère d'État, après la reconstitution du Cabinet, le Prince avait dit que, s'il s'était opéré un changement dans les conseillers de la Couronne, cela avait eu lieu parce qu'il avait trouvé chez tous les conseillers choisis par lui l'opinion qui était la sienne, à savoir: qu'il ne pouvait être question, ni maintenant, ni jamais, d'une rupture avec le passé, qu'il s'agissait seulement d'améliorer, là où l'arbitraire s'était fait sentir. L'opinion s'étant fort agitée sur ces paroles, les Ministres crurent nécessaire de les expliquer; mais ces explications étaient enveloppées d'obscurité et leur langage nébuleux rendait impossible d'y pénétrer.
[250] Ce programme était tout entier dans l'allocution du Prince-Régent au Ministère d'État, dont nous avons déjà parlé plus haut, et qu'une indiscrétion avait fait connaître aux gazettes qui, naturellement, l'imprimaient avec plus ou moins de vérité.
[251] Le prince Napoléon, accompagné du général Niel et de M. Bixio, était parti de Paris le 13 janvier pour Turin, où son mariage avec la princesse Clotilde, fille du Roi Victor-Emmanuel, fut célébré le 30 du même mois.
[252] Ce livre, qui parut au printemps de 1859, chez l'éditeur Michel Lévy à Paris, ne portait pas le nom de son auteur.
[253] La guerre était imminente, mais les Puissances médiatrices, comprenant que si elles voulaient en conjurer le fléau, elles devaient s'interposer activement, l'Angleterre donna à lord Cowley (alors ambassadeur de Londres à Paris), la mission de se rendre à Vienne pour sonder les dispositions de l'Autriche et amener la régularisation de ses rapports avec la Sardaigne; mais tout s'évanouit, quand, le 20 mars, éclata, en pleine Europe, une proposition de Congrès, venant de Pétersbourg (et en réalité, répondant à un vœu secret des Tuileries), qui compliquait la situation au lieu de la simplifier, en la faisant entrer dans une voie sans issue. Ce Congrès ne pouvait être et ne fut qu'une chimère.
[254] La révolution de 1848 ayant mis fin à sa carrière politique et militaire, le duc de Fezensac avait employé ses loisirs à écrire les souvenirs des grandes guerres de sa jeunesse dont il fit plus tard la publication.
[255] Le Moniteur du 4 mars contenait simplement ces mots: «Le Constitutionnel annonce que l'évacuation des États romains par nos troupes a été ordonnée, et que le corps d'armée français a déjà reçu l'ordre de se diriger sur Civita-Vecchia. Cette nouvelle est au moins prématurée.» Puis le lendemain, le Moniteur publiait une déclaration démentant tour à tour les bruits relatifs à des engagements contractés avec la Sardaigne et assurait qu'il n'y avait que la promesse, faite par la France, de défendre la Sardaigne contre tout acte agressif de l'Autriche, qui n'était nullement de nature à faire redouter la guerre.
[256] Sur son désir, le prince Napoléon s'était déchargé du ministère de l'Algérie et des Colonies.
[257] Au moment où éclatait la proposition de Congrès, la situation commençait à devenir critique; une scène des plus vives avait eu lieu à Paris entre le comte Walewski et le représentant sarde, M. de Villamarina. Le ministre des Affaires étrangères se laissait emporter jusqu'à dire que «l'Empereur ne ferait pas la guerre pour favoriser les ambitions de la Sardaigne; que tout devait être réglé par un Congrés auquel le Piémont n'avait aucun droit de participer». Un langage aussi acerbe était tenu à Turin par le ministre de France, le prince de la Tour-d'Auvergne. Le comte de Cavour se hâtait de faire face à l'orage. Il expédiait une lettre du Roi à l'Empereur à laquelle celui-ci répondait simplement: «Que le comte de Cavour vienne à Paris sans plus de retard.» Cavour était à Paris le 25 mars, où il eut des entrevues successives avec l'Empereur et reçut aux Tuileries un accueil cordial; mais il ne tarda pas à s'apercevoir de tout un travail dans l'entourage de l'Empereur, qui n'avait pas seulement pour objet le maintien de la paix (fût-ce par le sacrifice du Piémont), mais qui tendait à l'écarter lui-même comme le principal obstacle à la paix. M. de Cavour rentrait à Turin le 1er avril, quand, peu de jours après, l'Autriche envoya, le 23 avril, au Roi de Piémont un ultimatum qui n'était autre que la sommation immédiate de son désarmement, et que le moindre sentiment de fierté lui interdisait d'accepter. Les hostilités étant devenues imminentes, l'armée française franchit les Alpes.
[258] Au sujet de la réforme électorale, le Cabinet anglais ayant eu une minorité de trente voix, le Ministère résolut de ne pas donner sa démission, mais de dissoudre le Parlement. Lord Derby en fit communication le 4 avril à la Chambre et fit figurer en première ligne, dans son discours, l'intérêt qui s'attachait au maintien de la paix; en faisant allusion à lord Palmerston et à lord John Russel, il exprimait l'espoir que la résolution du Ministère serait approuvée par l'opinion publique, car la nation ne pourrait voir sans déplaisir le pouvoir passer dans les mains des partis coalisés, qui n'ont de force que pour détruire et non pour gouverner.
[259] Le 27 avril, le Grand-Duc de Toscane, pressé par une députation d'officiers supérieurs, qui s'étaient présentés pour lui demander d'opter entre l'alliance avec le Piémont ou son abdication, s'était retiré avec sa famille à Bologne. Aussitôt, le Roi de Sardaigne avait été proclamé Dictateur de la Toscane, pendant la durée de la guerre. Ce mouvement s'étendit immédiatement dans les Duchés voisins, notamment dans le duché de Modène. Une proclamation de commissaires extraordinaires, de Massa et de Carrare, plaçait ces villes sous la protection du Roi Victor-Emmanuel. Ce ne fut pourtant qu'au 15 juin que la Duchesse de Parme résolut d'abandonner ses États.
[260] Campagne du Grand-Duc et de la Grande-Duchesse de Weimar.
[261] Le 4 juin 1859, l'Empereur Napoléon s'était avancé sur Magenta, sans se rendre compte des forces qu'il avait devant lui; sa position était devenue fort critique. Le général de Mac-Mahon se porta, par une marche rapide, en avant de Magenta, avec une partie du second corps d'armée, sur les Autrichiens. Il parvint à dégager les grenadiers de la Garde fort compromis, prit et reprit sept fois le village de Magenta, fit cinq mille prisonniers et, vers huit heures du soir, resta maître du champ de bataille.
[262] Vers le 10 juin, les Autrichiens abandonnèrent la région du Pô pour se retirer derrière l'Oglio; ils quittèrent de même Ferrare, Ancône et les États romains, qui rejetaient l'autorité du Pape pour s'annexer au royaume de Sardaigne. Dans la nuit du 11 au 12 juin, les Autrichiens évacuaient Bologne, d'où le Cardinal-Légat se retirait, laissant à la Municipalité le soin de gouverner cette ville, qui proclamait immédiatement la dictature du Roi Victor-Emmanuel, auquel Parme et toutes les villes de la Lombardie s'empressaient de faire acte de soumission.
[263] Le prince de Metternich était mort, le 5 juin 1859, sous le coup des émotions que lui donnèrent les défaites des Autrichiens et la destruction des effets de sa politique en Italie.
[264] Une escarmouche d'avant-poste, à Bertoletto, où Garibaldi avait fait construire un pont sur la Chiese, avait amené un combat entre quelques compagnies des chasseurs des Alpes et les avant-postes autrichiens qui avaient d'abord battu en retraite. Les légionnaires, emportés par leur ardeur, les ayant poursuivis jusqu'à Castelnedolo, y trouvèrent l'ennemi en masse, qui chercha à les envelopper. S'apercevant du péril, ils durent se retirer devant les Autrichiens qui firent sauter le pont, à peine bâti sur la Chiese en face de Montechiari.
[265] Lord Palmerston.
[266] Le maréchal Canrobert, qui commandait le 3e corps d'armée, avait reçu l'ordre d'appuyer le général Niel; mais ne jugeant pas prudent de prêter, tout d'abord, son appui au commandant du 4e corps (celui de Niel) il crut plus sage de rester à surveiller les mouvements d'une colonne détachée dont le départ de Mantoue avait été signalé, ce qui amena entre les deux généraux d'amères récriminations après cette bataille de Solferino, qui fut livrée le 24 juin, les deux armées ennemies s'étant rencontrées inopinément, entre la Chiese et le Mincio. Le fruit de cette nouvelle victoire des armées alliées fut l'abandon par les Autrichiens de toutes les positions préparées par eux sur la rive droite du Mincio et amena les préliminaires de Villafranca.
[267] Une circulaire du comte de Cavour adressée, à la date du 14 juin 1859, à tous les représentants de la Sardaigne auprès des Cours étrangères, avait exposé le point de vue sous lequel il envisageait les derniers événements accomplis. Il rappelle d'abord que l'Autriche a refusé le Congrès proposé par la Russie, qu'elle a envahi le Piémont et que les victoires des armées alliées leur ont ouvert la Lombardie. Parlant ensuite des antipathies des populations italiennes qui ont éclaté contre l'Autriche et demandé l'annexion de leur pays au Piémont, M. de Cavour prouve que le Roi de Sardaigne, en acceptant ce vœu spontané de la volonté nationale, ne porte aucune atteinte aux traités existants, puisque l'Autriche, en refusant le Congrès, les a déchirés elle-même et a rendu les populations italiennes à leurs droits naturels. Le but, hautement avoué par le Roi, était l'indépendance italienne et l'exclusion de l'Autriche.
[268] Secrètement poussé par la Russie, qui ne pardonnait pas à l'Autriche son attitude pendant la guerre de Crimée, Kossuth lançait les nouvelles proclamations appelant la nation madgyare aux armes, à la lutte pour la liberté de la Hongrie et annonçait qu'il allait reparaître sur le sol de la patrie.
[269] Lady John Russell était la fille de lord Minto, connu par ses tendances libérales et son penchant pour la cause italienne.
[270] La Prusse s'efforçait justement d'amener les Gouvernements anglais et russe à tenter une médiation commune auprès des Puissances belligérantes, à laquelle, du reste, le Ministère anglais n'avait pas adhéré lorsque, par un inexplicable revirement d'idées, Napoléon III s'arrêta tout à coup, malgré une suite ininterrompue de victoires. Le 6 juillet, il offre un armistice à l'Empereur François-Joseph, alors à Vérone, avec son armée dans une situation fort compromise. La lutte est suspendue jusqu'au 15 août, et, le 11 juillet, Napoléon III et l'Empereur d'Autriche avaient, à Villafranca, une entrevue qui mettait fin à la guerre, avant que le comte de Cavour eût eu le temps d'accourir pour détourner le Roi Victor-Emmanuel d'adhérer à ce traité.
[271] Le prince Windisch-Graetz avait été envoyé à Berlin en mission militaire pour s'y assurer de la disposition des esprits et arrêter avec le Gouvernement la marche de trois corps d'armée, que l'Autriche devait mettre à la disposition de la Confédération germanique.
[272] En face de ce traité de Villafranca, qui n'était qu'une cruelle déception, laissant tous les problèmes à résoudre et ne répondant à aucune des espérances des Italiens, le comte de Cavour refusa de contresigner cette paix, abdiqua le Ministère, et l'âme remplie de douleur et d'agitation, remit aussitôt sa démission au Roi, croyant le devoir à lui-même, à son honneur et à sa politique. Il laissait le pouvoir à un Ministère formé avec le général La Marmora, Ratazzi et le général Dabormida.
[273] La Princesse Stéphanie de Hohenzollern avait épousé, en 1858, le Roi de Portugal.
[274] Dans ce discours, l'Empereur avait dit entre autres: «Si je me suis arrêté, ce n'est pas par lassitude ou par épuisement, ni par abandon de la noble cause que je voulais servir, mais parce que dans mon cœur quelque chose parlait plus haut encore: l'intérêt de la France.»
[275] Sous le prétexte que de nombreuses erreurs se seraient commises dans les tentatives de médiation faites par la Prusse, le Cabinet prussien avait adressé à tous ses agents diplomatiques en Allemagne une dépêche circulaire ayant le but de rétablir les faits.
[276] Le 10 août 1859, le Roi Frédéric-Guillaume IV avait été frappé d'une nouvelle attaque d'apoplexie.
[277] Le traité de Zurich entre la France et l'Autriche ne fut conclu que le 10 novembre 1859. Il n'était que la suite des préliminaires de Villafranca et mettait fin à la guerre qui, d'après la solennelle promesse de Napoléon III, devait avoir pour résultat l'affranchissement de l'Italie entière depuis les Alpes jusqu'à l'Adriatique. Mais en laissant tout désormais au désarroi et à l'imprévu, les Italiens prirent alors, eux-mêmes, la direction de leurs destinées et, déjouant les calculs, ils se chargèrent d'interpréter cette paix par laquelle on avait cru les enchaîner.
[278] Cavour n'avait rien fait pour précipiter l'explosion de cette question de l'Italie méridionale qui allait naître d'une aventure. Sa politique eût été de nouer ce qu'il appelait «l'alliance des deux grands royaumes de la Péninsule», former ainsi le faisceau fédératif des forces italiennes du nord et du midi dans un intérêt d'avenir national. A l'avènement de François II, fils d'une Princesse de Savoie, Cavour avait envoyé à Naples le comte de Salmour avec une mission de paix, offrant amitié et appui. Avec Rome, avec Naples, Cavour se serait prêté volontiers aux ménagements et aux transactions.
[279] A Florence, Modène, Bologne, Parme, l'acte de Villafranca éclatait comme un coup de foudre. L'Autriche, à peine diminuée d'une province, restait, aux yeux de tous, la puissance débordante de l'Empire sur le Mincio et sur le Pô. Dès lors, la pensée de l'annexion à la Sardaigne domina toutes ces populations, afin de se créer le plus de forces italiennes possible pour sortir de l'alternative, ou d'une soumission découragée, ou du déchirement d'une résistance révolutionnaire; cela amena le vote unanime de ces petits États vers le Piémont, qui leur avait donné l'exemple du courage, de l'honneur militaire, du patriotisme éprouvé, de la liberté régulière. Le 21 août, l'Assemblée des notables, à Modène, votait la déchéance du Duc François V et leur annexion au Piémont; celle de Florence faisait de même; puis un décret royal annonçait que le général Garibaldi était nommé commandant de la 2e division des Toscans, et ce même jour, la ligue défensive de tous les États de l'Italie était conclue.
[280] Quartier général de l'Empereur Napoléon III.
[281] A la séance annuelle pour la distribution du prix Montyon, M. Villemain avait fait le rapport sur les œuvres littéraires et M. Guizot sur celui des œuvres de vertu, qu'il terminait par une allusion fort éloquente sur le dévouement pour la patrie des soldats morts dans la guerre d'Italie.
[282] L'article du Moniteur était un avertissement à l'Italie contre les annexions. Il y était déclaré que la restauration des Archiducs formait une partie importante des stipulations de Villafranca et la condition sine qua non des avantages qui résultaient pour l'Italie d'une partie de ces stipulations. Il énumérait ces avantages, mais repoussait l'idée de la restauration de ces Princes par une force étrangère. Il menaçait même d'une nouvelle guerre si les populations des Duchés persistaient à repousser leurs souverains; car l'Autriche se déclarerait alors comme déliée de ses engagements. L'article finissait par ces mots: «Que l'Italie ne s'y trompe pas: il n'y a qu'une seule Puissance en Europe qui fasse la guerre pour une idée; c'est la France, et la France a accompli sa tâche.» En même temps que cette déclaration, l'organe du Ministère anglais continuait à soutenir avec ardeur le parti de l'annexion des Duchés au Piémont et à promettre à l'Italie le concours de l'Angleterre. L'attention du Gouvernement français fut alors attirée sur la Chine et le Moniteur du 14 septembre annonçait que la France et l'Angleterre se concertaient pour infliger un châtiment aux violateurs du traité de Tien-tsin conclu en 1858.
[283] L' Empereur Napoléon III, toujours flottant, songeait de temps en temps à tenter, contre les provinces soulevées des États ecclésiastiques, l'effort des armes: trois fois déjà, ordres et contre-ordres avaient été donnés à ce sujet. Le duc de Gramont, de retour de France vers la fin d'août, eut, le 29, une entrevue prolongée avec le Pape. L'Ambassadeur recommandait des réformes pour le reste des États pontificaux et ajoutait que l'occupation militaire par une division française devait expirer dans le courant de l'année 1860. Le duc de Gramont exposait ensuite à Pie IX qu'il devait se préparer, lui-même, une force militaire sérieuse, en lui faisant entendre que l'Autriche n'interviendrait pas, et que si une troisième puissance venait s'immiscer dans les affaires d'Italie et que le Piémont voulût s'y opposer, la France n'aurait aucun motif suffisant pour y mettre obstacle et l'Angleterre pourrait bien appuyer directement les efforts de la Sardaigne.
[284] En prenant connaissance de l'allocution du Saint-Père au Consistoire du 26 septembre, dans laquelle le Pape annulait les actes de l'Assemblée bolonaise et rappelait les censures formulées contre les membres du Gouvernement des Légations, Mgr Dupanloup, qui, la veille, avait publié un exposé de ses sentiments sur les tristes circonstances où se trouvait placée l'Église romaine, protesta hautement contre ces attentats, en communiquant à son clergé les paroles textuelles de Pie IX. Plusieurs évêques de France adhérèrent à cette énergique protestation. Quelques-uns cependant le firent en montrant confiance dans les intentions du Gouvernement français.
[285] Le 6 octobre 1859, un comte Anviti, colonel de l'ancienne gendarmerie ducale, et connu par ses relations avec le Duc de Parme, avait été massacré, dans les rues de Parme, par une population furieuse. La rapidité avec laquelle ce malheureux événement eut lieu ne permit pas à la force armée d'intervenir à temps.
[286] L'Empereur Alexandre II et le Prince-Régent de Prusse se rencontrèrent le 23 octobre à Breslau et il semble que des liens plus intimes se nouèrent entre les Gouvernements des deux souverains, chacun sentant l'influence considérable que leur entente mutuelle pouvait amener sur la solution des difficultés qui préoccupaient, à ce moment-là, la diplomatie européenne.
[287] En 1859, Mme Lenormant, nièce et fille adoptive de Mme Récamier, écrivit la vie de sa tante en réunissant tous les souvenirs qui la concernaient, d'après les correspondances laissées par la défunte.
[288] Mme Récamier se trouvait à Rome en même temps que le duc de Devonshire qui, de peur que sa belle-mère, au moment de sa mort, ne révélât le secret obscur planant sur sa naissance, séquestra la Duchesse, en la privant de toute communication avec ses amis.
[289] De l'allemand: rudesse grossière.
[290] Le 10 novembre 1859, la pose de la première pierre d'un monument que la ville de Berlin élevait au poète Schiller, connu par ses idées démocratiques, avait un peu échauffé les têtes avancées qui voulaient en faire le motif d'une démonstration dans ce sens. Mais des mesures habiles prises à temps par le Magistrat de la ville empêchèrent la réunion des masses populaires et tout se passa avec ordre, malgré les orgies grossières (roheit) qui avaient précédé. Le Prince-Régent n'assista pas officiellement à cette cérémonie, qu'il regarda simplement d'une fenêtre de la Chambre de commerce (Seehandlung), institution datant de plus d'un siècle et qui fut toujours sous la dépendance du ministère des Finances en Prusse.
[291] Par une brochure retentissante, attribuée à l'Empereur lui-même, et intitulée le Pape et le Congrès, Napoléon III achevait de rendre ce Congrès impossible. Cet écrit servait de texte aux interprétations les moins rassurantes pour le pouvoir temporel du Pape quand, quelques jours après, dans une lettre du 31 décembre 1859 à Pie IX, l'Empereur insistait personnellement sur la nécessité qu'il y avait pour le Pape à céder aux circonstances et à faire le sacrifice des Romagnes, où le vœu des populations se prononçait en faveur de l'annexion à la Sardaigne. Le Pape répondit à toutes ces menaces par l'Encyclique du 19 janvier 1860, où il s'éleva violemment contre cette doctrine. En France, Mgr Dupanloup fit entendre un cri d'indignation dans un écrit intitulé: Lettre de Mgr l'évêque d'Orléans à un catholique sur la brochure «le Pape et le Congrès», tandis que le prince Albert de Broglie faisait entendre le sien dans un article du Correspondant intitulé: La lettre impériale et la situation, qui recevait aussitôt un avertissement du Gouvernement.
[292] M. Guizot était protestant.
[293] Nous avons déjà parlé de cet article du prince de Broglie intitulé: La lettre impériale et la situation. Sous une forme polie, discrète, mais claire, l'Empereur Napoléon, dans cette lettre, sommait, très respectueusement, le Pape de sacrifier ce qu'il avait perdu, sous peine de perdre ce qu'il possédait encore. On trouvera cette lettre aux pièces justificatives de ce volume.
[294] Ces soupçons n'étaient pas tout à fait sans fondement, car le journal l'Univers, supprimé par une ordonnance du 29 janvier 1860, motivée par une opposition directe de ce journal contre les droits de l'État, reparaissait par la bienveillance du Gouvernement, quelques jours après, sous ce titre nouveau, le Monde, rédigé également par M. Veuillot.
[295] Cette brochure, qui fut le prétexte de nombreuses manœuvres de Bourse, était anonyme, ce qui rendit facile au Gouvernement de la dénoncer, en la déférant à la justice. Sous le voile des limites naturelles, cet écrit traitait assez ouvertement l'idée, caressée par l'Empereur Napoléon, de l'annexion à la France des provinces rhénanes.
[296] Le maréchal Randon avait été fait ministre de la Guerre le 5 mai 1859, en remplacement du maréchal Vaillant, promu major général de l'armé alliée, lorsque les troupes françaises avaient franchi les Alpes.
[297] Le 24 avril eut lieu, à l'hôtel d'Albe à Paris (maison appartenant à Mme de Montijo, mère de l'Impératrice Eugénie), un bal qui resta célèbre dans les annales napoléoniennes, non seulement par l'étalage de la richesse des costumes et d'un luxe effréné, mais plus encore par le décolletage, les jupes trop courtes des dames, leur déguisement en homme, ainsi que le manque de convenance dans les propos qui s'y tinrent.
[298] Napoléon Ier, arrivé le 31 mars 1814 à quelques lieues de Fontainebleau, avait ordonné au duc de Vicence de partir sur-le-champ, pour aller trouver l'Empereur Alexandre Ier et essayer de conclure la paix aux conditions de Châtillon. M. Thiers, en rappelant cette circonstance dans le dix-septième volume, page 624, de son ouvrage, donne un tout autre caractère à cette mission. Il fait croire qu'elle n'avait d'autre but, dans la pensée de l'Empereur, que de lui faire gagner deux ou trois jours, afin de donner à l'armée le temps de le rejoindre.
[299] Dans une série d'articles publiés dans le Journal des Débats sur le XVIIe volume du Consulat et de l'Empire, Cuvillier-Fleury, tout en faisant ressortir l'immense succès de l'œuvre de M. Thiers, le critiquait spirituellement en le mettant en opposition avec lui-même. Il démontrait que, malgré ses opinions actuelles, M. Thiers ne semblait pas admettre que toute dictature ne fût fatalement entraînée à des excès qui la perdent; qu'il paraissait croire qu'une autorité forte, lorsqu'elle est indispensable, n'est pas nécessairement malfaisante, et qu'il admettait même qu'un despotisme qui vient à propos peut être sage.
[300] Ce livre est l'œuvre la plus complète et la plus sérieuse que Sainte-Beuve ait jamais faite. Elle occupa vingt-deux ans de sa vie, et l'histoire de ce couvent si attaqué, si défendu, devint, sous sa plume, une histoire littéraire du siècle de Louis XIV.
[301] Le général Ortega, capitaine général des îles Baléares, chef apparent d'une nouvelle tentative d'insurrection carliste, qui venait d'avorter en Espagne, fut fusillé le 18 avril 1860. Le comte de Montemolin et son frère, arrêtés en même temps, recouvrèrent promptement leur liberté en renonçant à leurs droits au trône par une lettre écrite en langue espagnole, adressée à la Reine Isabelle II, datée de Tortosa le 12 avril 1860.
[302] L'Empereur Napoléon III était très irrité contre l'Angleterre, qui protestait avec vigueur contre l'annexion de Nice et de la Savoie à la France. Lord Cowley avait eu, à ce sujet, des entretiens peu amicaux avec M. Walewski, ensuite avec M. Thouvenel, et échangeait sur ce point une correspondance confidentielle avec lord John Russel, ministre des Affaires étrangères. Dans un discours très violent contre l'Empereur Napoléon, prononcé par le chef du Foreign-Office à la Chambre des Communes le 25 mars, le noble Lord avait déclaré que l'Angleterre ne pouvait sacrifier pour la France l'alliance du reste de l'Europe. Tous ces symptômes de mécontentement entretenaient l'opinion publique dans la croyance d'une guerre prochaine avec l'Angleterre.
[303] L'Impératrice Eugénie.
[304] M. Mon était alors Ambassadeur d'Espagne à Paris.
[305] Le duc de Montpensier s'était définitivement fixé à Séville et y intriguait sourdement, malgré tous les honneurs dont l'avait comblé sa belle-sœur, la Reine Isabelle. Le comte d'Eu, fils du duc de Nemours, enseigne dans le régiment des chasseurs à cheval espagnols (Albuféra), faisait avec éclat ses premières armes au Maroc, à cette époque-là en guerre avec l'Espagne.
[306] Garibaldi quitta Gênes dans la nuit du 5 au 6 mai 1860, sur un bateau de plaisance qui lui appartenait, et rallia le bateau expéditionnaire qui, ayant prit une patente pour Malte, était sorti du port deux jours avant et se tenait au large. Après avoir abordé ce navire, Garibaldi fit route sur la Sicile, au lieu de se diriger sur Malte, suivi de plusieurs autres bâtiments chargés d'hommes et de munitions, qui le rejoignirent dans cette direction. Ils débarquèrent le 11 mai à Marsala et entrèrent dans Palerme le 27, après avoir bombardé cette ville pendant quelques heures. C'est ce qu'on a appelé l'expédition des Mille.
[307] Dans les premiers jours de juin 1860, le Ministre de France à Berlin, le prince de la Tour d'Auvergne, fit savoir au baron de Schleinitz, ministre des Affaires étrangères en Prusse, que l'Empereur Napoléon, ayant appris que le Prince-Régent allait se rendre à Bade, désirait aussi s'y rendre, car il considérait une entrevue avec ce Prince comme le meilleur moyen de rassurer l'Allemagne sur la stabilité de la paix. Soupçonnant que cette demande cachait un secret désir d'obtenir un agrandissement du côté du Rhin et l'espoir de disloquer la Ligue germanique, le Prince-Régent accepta la proposition de l'Empereur, qui vint à Bade du 15 au 17 juin; mais, auparavant, il faisait adresser une communication confidentielle à toutes les Cours allemandes, les invitant à venir à Bade assister à cette visite. Tous les Princes s'y trouvèrent, jusqu'au Roi de Hanovre, aveugle, au grand désappointement de Napoléon III, qui avait compté sur un tête-à-tête avec le Prince de Prusse.
[308] L'Empereur et l'Impératrice s'étaient rendus à Lyon pour y rencontrer l'Impératrice mère de Russie.
[309] Le rôle que Mazzini remplit alors en Italie fut assez secondaire. Il essaya, sans succès, par diverses tentatives, de faire tourner au profit de la démocratie républicaine l'élan irrésistible qui poussait le pays tout entier à reconnaître son unité; il venait de publier, dans ce but, son manifeste intitulé: Ni apostat, ni rebelle, où il proclamait qu'entre le programme de Cavour et celui de Garibaldi, il choisissait le second, et que, sans Rome ni Venise, il n'y avait point d'Italie.
[310] Ce livre est un ouvrage de circonstance trop détaillé, mais formant un exposé complet au point de vue de l'exercice de la puissance spirituelle, de l'origine, de la durée et de la nécessité du pouvoir temporel.
[311] Le prince Jérôme-Napoléon Bonaparte, le plus jeune et le dernier survivant des frères de Napoléon Ier, qui avait été Roi de Westphalie, était mort à Paris, dans sa soixante-seizième année. Ses funérailles eurent lieu en grande pompe, le 3 juillet 1860, aux Invalides. L'Empereur Napoléon III s'y fit représenter par le duc de Malakoff.
[312] M. Prévost-Paradol, qui, en 1860, figurait parmi les collaborateurs du Journal des Débats, avait publié une brochure intitulée: Les anciens partis. Cette publication lui valut d'être traduit en police correctionnelle, comme ayant voulu exciter à la haine et au mépris du Gouvernement. M. Prévost-Paradol fut condamné à un mois de prison et à mille francs d'amende. Cette condamnation eut un tel retentissement qu'elle rendit M. Prévost-Paradol presque populaire.
[313] Il s'agit ici du fils issu du mariage légal et légitime que Jérôme avait contracté à Baltimore, en 1803, avec Élisa Paterson. Ce mariage, non reconnu par Napoléon, fut arbitrairement cassé en 1805; mais Élisa Paterson défendit ses droits toute sa vie, et ceux de son fils, avec une énergie singulière. Son fils se fixa à Baltimore et épousa dans cette ville, en 1829, Mlle Suzanne Gay dont il eut un fils qui vint s'établir à Paris où, grâce à la princesse Mathilde dont il avait su conquérir l'amitié, il entra dans le régiment des Guides, dont il fut un brillant officier. Pendant le siège de Paris, il se distingua et conquit les galons de colonel. Après la guerre de 1870, il se fixa à Boston et mourut en 1893.
[314] Vers le 1er juillet 1860, un document accompagné d'une lettre fut adressé par le comte de Montemolin à la Reine Isabelle II. Ces deux écrits expliquaient la renonciation passée et une rétractation présente: «Considérant, disait Don Carlos, que l'acte de Tortosa du 23 avril est le résultat de circonstances exceptionnelles; écrit dans une prison et au moment où toute communication nous était interdite, il ne remplit aucune des conditions qu'exigeait sa validité; que, par conséquent, il est nul et illégal et ne saurait être ratifié. Attendu l'avis de jurisconsultes compétents, nous le déclarons nul et non avenu et le rétractons.»
[315] Le 23 août 1860, l'Empereur Napoléon et l'Impératrice Eugénie entreprirent un voyage qui dura plus d'un mois, leur fit visiter Lyon d'abord, puis les nouvelles provinces annexées de la Savoie et de Nice. A leur passage par Chambéry, ils furent salués, au nom du Roi Victor-Emmanuel, par le ministre de l'Intérieur Farini et le général Cialdini, porteur d'une lettre autographe du Roi de Sardaigne à l'Empereur. Revenant ensuite à travers le Dauphiné, la Provence et Nice, ils s'embarquèrent pour la Corse; de là, ils allèrent en Algérie et ne revinrent que le 24 septembre à Saint-Cloud.
[316] Au banquet donné à Saint-Pétersbourg par l'Empereur Alexandre II pour le jour de la naissance de l'Empereur François-Joseph, le Czar avait dit dans son toast: «A mon cher frère l'Empereur d'Autriche.» Ces paroles furent commentées par les journaux allemands qui les rapprochèrent des conférences prolongées que M. de Rechberg avait alors à Vienne avec l'Ambassadeur de Russie, M. de Bolovine, depuis son retour de Teplitz; il s'établit ainsi la croyance d'une prochaine rencontre du Prince-Régent, de l'Empereur d'Autriche et de l'Empereur de Russie. Les trois souverains du Nord se rencontrèrent, en effet, le 23 octobre à Varsovie et tombèrent d'accord pour repousser toute proposition d'un Congrès sur la question italienne.
[317] A l'ouverture du Conseil général du département de la Loire dont M. de Persigny était président, celui-ci prononça un discours où l'intention de tranquilliser l'opinion publique était visible. M. de Persigny tendait à prouver que, malgré les guerres d'Italie et de Crimée, la parole de l'Empereur à Bordeaux: «L'Empire, c'est la paix!» était restée inattaquable, que le nouvel Empire n'acceptait la succession du premier Empire que sous bénéfice d'inventaire; qu'il répudiait l'héritage des luttes et des vengeances pour entrer dans des rapports de paix et de concorde avec toutes les Puissances et que son programme était fidèlement suivi.
[318] Frère de la Reine Louise de Prusse.
[319] Le Journal des Débats du 7 septembre 1860 disait: «On lit dans l'Opinion de Turin du 4 septembre: «Notre Parlement ne peut pas dévier d'une politique qui a produit de bons fruits, pour courir des aventures qui susciteraient contre lui toute l'Europe. Si jamais une autre politique devait prévaloir, si la force des événements contraignait le Gouvernement du Roi à prendre une autre attitude, le Ministère actuel n'y pourrait pas souscrire et accepter la responsabilité d'une situation qu'il ne pourrait pas dominer. Nous croyons que le parti libéral, qui a soutenu et soutient encore le Cabinet, est de cet avis et qu'en Italie on est assez sage pour éviter de nouvelles complications. En tout cas, le Ministère ne voudrait pas être responsable d'événements qui amèneraient une guerre entre la France et l'Autriche. Nous ignorons qui aurait le courage de s'exposer à une telle responsabilité. Assurément, il n'aurait pas à compter sur l'appui du Parlement qui, s'il est prêt à tout sacrifier pour la défense de la patrie, ne le fera qu'à la condition que le Gouvernement ne se laissera pas enlever la direction de la chose publique, et qu'au contraire, il dirigera le mouvement tendant à l'indépendance italienne.»
[320] La convention de Villafranca rencontrait tous les jours des obstacles plus sérieux; l'annexion de Nice et de la Savoie ajouta encore aux difficultés, quand il se fut agi de la réaliser, et elle jeta en Italie une nouvelle cause de haine contre la France qui, dès lors, la vit s'échapper définitivement de son influence. Le Gouvernement sarde était embarrassé entre les excitations du patriotisme et les remontrances de l'Empereur Napoléon; mais M. de Cavour se tenait prêt à jouer cette terrible partie, qui devait le mener à recevoir d'un seul coup le complément inespéré de son œuvre. Craignant les emportements de Garibaldi, il le suit vigilant, le couvrant seulement, en parvenant à paralyser la diplomatie qui regarde faire. Garibaldi, le cœur ulcéré par le ressentiment de la cession de Nice, fut facilement gagné à l'insurrection de Sicile qui, depuis quelque temps, tenait l'Italie en éveil. Il était parti à la dérobée par un soir de mai du golfe de Gênes avec mille à onze cents volontaires et ses deux navires: le Piemonte et le Lombarda. A travers les croisières napolitaines, il débarquait le 11 mai à Marsala et, après un sanglant combat à Calatafini, avec les troupes royales, entrait dans Palerme et disposait de la Sicile. Devenu ainsi en peu de jours dictateur victorieux, il passe au mois d'août le détroit de Messine, alla à Naples le 7 septembre, réduisant le Gouvernement napolitain à des conditions de libéralisme trop tardives. Cavour, qui voulait constituer l'Italie sans se laisser dominer par la révolution, accepter l'unité dans ce qu'elle avait de réalisable et marcher sur cette révolution pour l'arrêter et l'empêcher de compromettre la cause nationale, sentit que le moment critique était arrivé et il se décida à l'intervention. Considérer la révolution de Naples comme un fait accompli avant même que François II eût livré sa dernière bataille, pénétrer dans les Marches jusqu'à la frontière napolitaine pour empêcher Garibaldi de se jeter sur Rome, tel est l'acte auquel il se résolut. A Rome, toutes les fantaisies belliqueuses s'agitaient pour reconquérir les Romagnes; on y avait décidé la formation d'une armée pontificale dans la prévision du départ de la garnison française, qui semblait prochain: et le général Lamoricière en avait pris le commandement, par un ordre du jour, où il annonçait qu'il était venu pour combattre la révolution, ce nouvel «islamisme». Le Gouvernement sarde, voyant une menace pour la sécurité de l'Italie dans cette agglomération d'étrangers armés à Rome, dans le but avoué de reconquérir les provinces pontificales détachées des États de l'Église, Cavour saisit ce prétexte en envoyant, le 7 septembre 1860, au cardinal Antonelli la sommation de désarmer; puis, voulant devancer Garibaldi qui arrivait à Naples, deux corps d'armée sardes, sous les ordres des généraux Fanti et Cialdini, s'avancèrent alors par le territoire pontifical et en dix-huit jours occupèrent les places de Pesaro, Urbino, Perugio, Spoleto, rencontrèrent Lamoricière à Castelfidardo, où sa petite armée fut anéantie, et s'emparèrent d'Ancône que Lamoricière avait gagné rapidement avec quelques fidèles, après sa défaite. Pris par terre et par mer, Lamoricière serait contraint de capituler. La question des Marches ainsi tranchée, l'armée piémontaise, dont Victor-Emmanuel prit alors le commandement, gagna la frontière napolitaine où François II avait arrêté Garibaldi sur le Vulturne. Mais Cialdini battit l'armée napolitaine à Issernia et Sesso; François II, après avoir vainement réclamé la protection des escadres française et anglaise, quittait Naples pour se réfugier à Gaëte; Capoue se rendait le 2 novembre et le Roi Victor-Emmanuel faisait son entrée à Naples le 7 du même mois.
[321] Cette proclamation du Roi, datée de Turin du 11 septembre, était une réponse indirecte à l'ordre du jour de Lamoricière; la voici:
»Soldats! Vous entrez dans les marches de l'Ombrie pour restaurer l'ordre civil dans les villes désolées, pour donner aux peuples la liberté d'exprimer leurs propres vœux. Vous n'avez pas à combattre des armées puissantes, mais seulement à délivrer de malheureuses provinces italiennes de la présence de compagnies d'aventuriers étrangers. Vous n'allez pas venger des injures faites à moi ou à l'Italie, mais bien empêcher que les haines populaires se déchaînent contre les oppresseurs. Vous enseignerez, par votre exemple, le pardon des offenses et la tolérance chrétienne à ceux qui comparent l'amour de la nation italienne à l'islamisme. En paix avec toutes les grandes puissances, éloigné de toute provocation, j'entends faire disparaître du centre de l'Italie une cause continuelle de troubles et de discordes, je veux respecter le siège du Chef de l'Église, à qui je suis toujours prêt à donner, d'accord avec les Puissances alliées et amies toutes garanties d'indépendance et de sécurité, que ses aveugles conseillers ont espéré en vain du fanatisme de la secte méchante qui conspire contre mon autorité et contre la liberté de la nation. Soldats, on m'accuse d'ambition; oui, j'ai celle de restaurer les principes d'ordre moral en Italie et de préserver l'Europe des dangers continuels de révolution et de guerre.» (Copié textuellement dans le Journal des Débats du 13 septembre 1860.)
[322] La Russie et la Prusse rappelèrent leurs Ministres de Turin; mais Cavour eut l'habileté de ne pas prendre trop au sérieux cette rupture, surtout avec la Prusse, qu'il ne cessait de flatter dans ses ambitions secrètes, et dès le mois de janvier, au moment où le Prince-Régent devait ceindre la couronne, il envoyait le général la Marmora avec une mission particulière à Berlin. La France rappela de Turin M. de Talleyrand, sans donner au fond à ce rappel la forme d'une véritable rupture diplomatique.
[323] Allusion à la bataille de Castelfidardo qui avait été livrée le 18 septembre 1860. Par une marche forcée, Cialdini était parvenu à devancer Lamoricière qui réunissait ses troupes à Foligno, et en occupant les hauteurs d'Orsino et de Castelfidardo, il ferma le chemin d'Ancône aux troupes pontificales. Lamoricière voulut s'ouvrir un passage, attaqua les positions de l'armée piémontaise, qui le repoussa impétueusement et mit en déroute la petite armée du Pape.
[324] Dans cette ville, mal choisie pour y conférer sur l'indépendance des nations, les souverains du Nord eurent une nouvelle entrevue en octobre 1860. On croyait généralement que les délibérations qui s'y tiendraient feraient entrer les affaires d'Italie dans une nouvelle phase; mais l'Autriche ne put obtenir de la Russie ni de la Prusse l'appui et les encouragements sur lesquels elle avait compté pour lui assurer la possession de la Vénétie.
[325] L'Autriche, inquiète et troublée de voir que l'Italie avait su se constituer en nation, en se dégageant de l'absolutisme monarchique sans tomber dans le despotisme révolutionnaire, multipliait les efforts pour obtenir une garantie en cas d'attaque de la Vénétie. Vers la fin de septembre 1860, elle fit demander à Paris par le prince de Metternich et M. de Hübner si, devant la formation du royaume d'Italie, la France et le Piémont ne pourraient pas garantir à l'Autriche la possession de la Vénétie, vu que la situation n'était plus la même qu'au traité de Zurich et qu'un nouveau traité, ratifié par le Parlement piémontais, lui paraissait nécessaire. L'Empereur Napoléon se borna à inviter l'Autriche à faire cette proposition au Piémont, sans dissimuler à ses deux envoyés que l'acceptation d'une pareille proposition lui paraissait bien difficile. Cette réponse avait fait croire à l'existence d'un nouveau traité avec le Piémont au sujet de la Vénétie, qui était sans fondement.
[326] Le comte Albert Pourtalès était alors Ministre de Prusse à Paris.
[327] François II, trahi par les soldats de sa propre garde, ne recevant de secours de nulle part, quittait Naples le 6 septembre à l'approche de Garibaldi. Il prit d'abord position, avec ce qui lui restait de troupes, près de Capoue, où il livra le 1er octobre un combat, sur le Vulturne, qui resta indécis. Il essaya de prolonger la lutte en se réfugiant dans la forteresse de Gaëte; là, suivi par la Reine et le Corps diplomatique, ce jeune Souverain s'illustra d'un dernier effort de virilité. Garibaldi en commença le siège au mois de novembre 1860, mais empêché par l'escadre française, du côté de la mer, dans ses opérations militaires, ce siège marcha lentement et le drapeau bourbonien resta planté sur le rocher de Gaëte jusqu'au 13 février 1861. Après une courageuse défense. François II signa une capitulation et arriva à Rome avec la Reine le 15 février sur un bâtiment français. Le 25 septembre 1860, le Roi de Naples avait adressé un mémorandum à la diplomatie étrangère pour protester contre l'invasion de ses États et l'inaction des puissances européennes.
[328] L'Impératrice mère de Russie était morte le 1er novembre à Saint-Pétersbourg.
[329] L'Empereur d'Autriche venait de donner une nouvelle constitution à ses peuples; mais les Hongrois, qui croyaient au rétablissement pur et simple de leur ancienne constitution, se montrèrent fort mécontents et traduisirent ce mécontentement par des tumultes que la force armée dut réprimer.
[330] Après la chute des Bourbons de Naples, Murat écrivit, d'abord dans une lettre, qu'il déclinait toute initiative dans la revendication du trône autrefois occupé par son père; mais en mars 1861, après la chute de Gaëte, il revenait sur cette première résolution et lançait, dans une sorte de manifeste, ses prétentions au trône: prétentions que le Gouvernement français déclara ne vouloir encourager en rien, dans une note officielle.
[331] Le Moniteur venait d'annoncer que, par un décret donné le 24 novembre 1860, l'Empereur, voulant accorder aux grands Corps de l'État une participation plus directe à la politique générale, avait ordonné que le Sénat et le Corps législatif voteraient dorénavant tous les ans à l'ouverture de la session une Adresse, en réponse à son discours du trône.
[332] Mme Victor Tiby.
[333] M. Fould quitta le Ministère à cause du décret du 24 novembre.
[334] Le Roi Frédéric-Guillaume IV mourut à Sans-Souci dans la nuit du 1er au 2 janvier 1861.
[335] Le prince Joachim Murat, accompagné de deux officiers d'ordonnance, fut envoyé à Berlin vers le 10 janvier pour complimenter le Roi Guillaume Ier sur son avènement au trône, au nom de Napoléon III.
[336] Le Roi était enfermé dans Gaëte qui n'avait pas encore capitulé.
[337] M. Cuvillier-Fleury, qui avait épousé en 1840 Mlle Thouvenel, sœur du futur ministre des Affaires étrangères de l'Empire.
[338] Le Gouvernement français venait de faire distribuer au Sénat et au Corps législatif un volume de deux cent soixante pages, grand in-quarto, contenant des documents diplomatiques rangés sous les sept titres suivants: 1o Annexion de l'Italie centrale; 2o Question de Nice et de la Savoie; 3o Affaires de Rome; 4o Affaires de l'Italie méridionale; 5o Entrevue de Varsovie; 6o Affaire de Syrie; 7o Expédition de Chine.
[339] Marquise de Castellane.
[340] En réponse à un discours de M. de La Rochejaquelein, le prince Napoléon prit la parole au Sénat le 1er mars 1861, pour faire une charge à fond contre le pouvoir temporel du Pape et attaquer, dans le langage le plus véhément, le parti légitimiste et clérical français, ainsi que les mandements des évêques qui en avaient pris la défense. L'Empereur Napoléon ne blâma pas trop ce discours; il ne se montra qu'irrité de la violence des paroles.
[341] Le cardinal Morlot, archevêque de Paris, était encore: sénateur, grand-aumônier et membre du Conseil privé. Il ne voulut pas se démettre des charges indépendantes de son administration diocésaine, «craignant, disait-il, qu'en faisant un acte d'opposition au Gouvernement, l'Empereur n'en fût que plus fortifié dans sa pensée.»
[342] De l'anglais: mieux disposé.
[343] La date du 25 février donna le signal d'une insurrection qui marqua douloureusement dans les annales de la Pologne. Une manifestation pacifique de la population de Varsovie avait été arrêtée dans les esprits pour l'anniversaire de la bataille de Grochow livrée en 1831. On devait prier pour les morts. Le mauvais état du pont de la Vistule ne permettant pas de se rendre au champ de bataille, c'est sur la place du Vieux-Marché que les citoyens se réunirent. Le 25, à cinq heures du soir, une procession de trente mille personnes se mit en branle, entonnant l'hymne national de la Pologne, Dieu saint, Dieu immortel. Le colonel Trépow, effrayé de l'importance de cette démonstration, fit charger au sabre cette foule. Les morts et les blessés furent nombreux, et les événements se précipitant ainsi, amenèrent un véritable état de guerre, avec lequel la Russie dut lutter plus de deux ans, et qui finit par attirer des malheurs irréparables sur le pays. Le nom de nationalité n'avait pu retentir depuis un an en Europe, sans que la Pologne s'étonnât d'être oubliée et ne fût tentée de rappeler au monde que, parmi les nations dont on faisait tant de bruit, elle était la seule dont on ne parlât point, quoiqu'elle fût une des plus malheureuses.
[344] Il était alors question de fixer le couronnement du Roi de Prusse au mois de juin. Il n'eut lieu qu'au mois d'octobre.
[345] M. de Manteuffel, chef du Cabinet militaire du Roi, s'était battu en duel, le 30 mai, à Potsdam, avec M. Twesten, auteur d'une brochure intitulée Comment nous tirer d'affaire? qui contenait des attaques assez vives contre le Cabinet militaire. M. Twesten eut le bras droit brisé par une balle, et un jugement ayant condamné le général de Manteuffel à trois mois de prison dans une forteresse, il se rendit à Magdebourg pour se constituer prisonnier.
[346] C'est-à-dire l'hommage de toute la nation (couronnement).
[347] Depuis cet accident, la duchesse de Talleyrand ne retrouva plus la santé. A partir de cette époque, elle fut atteinte par cette maladie douloureuse, qu'elle supporta avec une patience exemplaire, pendant quatorze mois, et qui la conduisit graduellement au tombeau.
[348] Le Moniteur du 26 juin 1861 annonçait ainsi la reconnaissance du Royaume d'Italie: «L'Empereur a reconnu le Roi Victor-Emmanuel comme Roi d'Italie. En notifiant cette détermination au Cabinet de Turin, le Gouvernement de Sa Majesté a déclaré qu'il déclinait d'avance toute solidarité dans les entreprises de nature à troubler la paix de l'Europe, et que les troupes françaises continueraient d'occuper Rome, tant que les intérêts qui les y ont amenées ne seront pas couverts par des garanties suffisantes.»
[349] Le Sultan Abdul-Medjid venait de mourir à l'âge de trente-huit ans. Sous son règne, des luttes sanglantes ayant éclaté en 1860, entre les Druses et les Maronites dans le Liban, la France, qui s'attribuait le protectorat sur les chrétiens de ces contrées, intervint dans la querelle. Le général d'Hautpoul-Beaufort débarqua avec des troupes à Beyrouth; il s'ensuivit une occupation du pays par les Français, qui ne finit qu'à la suite des réclamations de la Turquie, appuyées par l'Angleterre. Une nouvelle organisation du Liban fut décidée dans une Conférence des Puissances européennes, où il fut déterminé que le Liban dépendrait directement de la Porte, tout en ayant un chef chrétien pris dans celle des Églises chrétiennes qui comptait le plus d'adhérents.
[350] Le Roi de Prusse devant rendre à l'Empereur Napoléon la visite que celui-ci lui avait faite à Bade, il avait d'abord été question du camp de Châlons comme lieu de rendez-vous; mais la rencontre n'eut lieu que plus tard, le 7 octobre, à Compiègne.
[351] Le 14 juillet, le Roi de Prusse faillit être victime à Bade d'un attentat. Un jeune homme de vingt et un ans, nommé Becker, étudiant à Leipzig, s'était approché de Guillaume 1er à la promenade, et lui lâcha un coup de pistolet à bout portant. La balle dévia et ne fit qu'effleurer l'épaule du Roi. Arrêté immédiatement, l'auteur de cet attentat déclara que son but avait été de délivrer l'Allemagne d'un Prince qui ne la poussait pas, avec une énergie assez active, dans les voies de l'unité. Becker fut condamné à vingt ans de réclusion, et, pour sa vie, sous la surveillance de la police.
[352] M. de la Guéronière ayant fait paraître une brochure intitulée: Rome, la France et l'Italie, Mgr Pie, évêque de Poitiers, la réfuta par un mandement où il comparait le chef de l'État à Pilate, «qui pouvait tout empêcher et qui laisse tout faire.» M. de Persigny, ministre de l'Intérieur, croyant voir une offense à la personne de l'Empereur Napoléon et une contravention aux lois de l'Empire, déféra Mgr Pie au Conseil d'État et le mandement fut annulé.
[353] La guerre d'Amérique, appelée aussi guerre de la Sécession, dura de 1861 à 1865. La question de l'esclavage avait divisé la république en deux camps; le Sud travaillant depuis longtemps à le propager dans l'Union, au risque de briser avec le Nord. En 1860, une élection présidentielle, dans laquelle le candidat abolitionniste Lincoln l'emporta sur le candidat esclavagiste Breckinridge, fut le prétexte dont le Sud s'empara pour rompre avec l'Union. Les hostilités commencèrent et, pendant quatre ans, les deux armées se battirent héroïquement avec des alternatives de revers et de succès; la lutte finit par la prise de Richmond en Virginie, où le général Lee, qui commandait les forces du Sud, fut contraint de capituler devant le général Grant, chef des troupes du Nord. La question de l'esclavage fut ainsi terminée.
[354] La Huldigung veut dire l'hommage; la Krœnung, le couronnement, le Turner-Verein, une société de gymnastique; le Sænger-Verein, une société orphéonique; le Schützen-Verein, la société des tireurs; le National-Verein, la société des patriotes. Toutes ces sociétés cachaient, sous le prétexte de se réunir pour s'amuser, le but de s'occuper de ce qui se passait dans l'État, et les meneurs en profitaient pour échauffer les têtes selon leurs idées politiques plus ou moins avancées.
[355] La question de préséance entre les diverses ambassades extraordinaires venues à Kœnigsberg et à Berlin pour le couronnement du Roi de Prusse fut réglée par la date de l'arrivée de chacune d'elles. Suivant cette règle, les Ambassadeurs prirent rang dans l'ordre suivant: pour l'Espagne, le duc d'Ossuna; pour l'Italie, le général della Rocca; pour l'Angleterre, lord Clarendon; pour la France, le duc de Magenta. L'Autriche, la Russie, la Belgique se firent représenter par des membres de familles royales et impériales. Le duc de Magenta se fit remarquer par la richesse de ses équipages et par une fort belle fête, qu'il donna dans la maison de l'ambassade de France à Berlin.
[356] L'Archevêque de Cologne était Mgr Jean Geissel.
[357] L'église de Saint-Michel est l'église catholique de la garnison de Berlin.
[358] En revenant de Breslau, où les Majestés Prussiennes allèrent, après les fêtes de Berlin, recevoir l'hommage de la province de Silésie, le Roi et la Reine s'arrêtèrent pendant un jour à Sagan, afin d'y voir pour la dernière fois la duchesse de Talleyrand et de Sagan déjà fort malade.
[359] Le couronnement du Roi de Prusse avait eu lieu le 18 octobre 1861 à Kœnigsberg. Avant comme après son couronnement, le Roi, en répondant aux différents discours qui lui furent adressés à cette occasion, avait mis une certaine affectation (même marquée) à dire qu'il ne tenait sa couronne que de Dieu, que la royauté était une grâce de Dieu, et que, dans cette grâce, résidait la sainteté de la couronne qui était inviolable. Ce langage indigna le parti libéral européen. Il trouva que le Roi semblait ainsi établir une lutte entre la royauté de droit divin et celle fondée par la souveraineté du peuple, comme sur une élection primitive, et ce parti trouva dans les paroles royales une pâture à de vaines querelles. Elles provoquèrent ensuite des discussions fort longues qui s'élevèrent de toutes parts.
[360] Le Gouvernement avait demandé une dotation annuelle de cinquante mille francs pour le général Cousin-Montauban, comte de Palikao, qui avait commandé les troupes françaises en Chine. La Commission chargée de cette demande avait conclu au rejet, le 28 février 1862; mais le Corps législatif ne se prononça pas le même jour et remit la discussion à plus tard. Craignant un refus de la Chambre, l'Empereur écrivit, le 4 mars, au président du Corps législatif qu'il y avait eu malentendu et qu'il présentait un nouveau projet, soumettant à la Chambre l'appréciation d'un principe général qui permettrait d'assurer, dans de justes limites, à toutes les actions d'éclat, depuis le maréchal jusqu'au soldat, des récompenses dignes de la grandeur du pays.
[361] La Chambre prussienne fut dissoute le 10 mars. Le Ministère, ayant été battu dans la discussion du budget, avait d'abord donné en bloc sa démission. Elle ne fut pas acceptée de suite par le Roi; mais peu à peu les Ministres furent relevés l'un après l'autre.
[362] A l'aide de subsides et de quêtes, l'Archevêque de Tours, avec l'autorisation gouvernementale, avait entrepris de relever l'antique basilique de Saint-Martin, presque entièrement disparue sous les profanations des guerres de religion du seizième siècle et les destructions causées par la grande Révolution.
[363] De l'allemand: très désagréable.
[364] M. de Bernstorff, ministre de Prusse à Londres, avait été appelé par le Roi pour remplacer M. de Schleinitz comme ministre des Affaires étrangères; M. von der Heydt avait pris le portefeuille des Finances, en gardant provisoirement celui du Commerce; le comte d'Itzenplitz, celui de l'Agriculture; M. von Mühler, les Cultes; le comte Lippe, la Justice; M. de Jagow, l'Intérieur.
[365] Dans la discussion de l'Adresse, accordée au Corps législatif depuis le décret du 24 novembre 1860, on attaquait alors le traité de commerce avec l'Angleterre, et le député de la Seine-Inférieure, M. Pouyer-Quertier, qui était protectionniste, le combattait avec beaucoup de violence.
[366] Marie de Castellane était alors à Marmoutiers au couvent du Sacré-Cœur.
[367] La marquise de Castellane.
[368] Antoine de Castellane, alors âgé de 5 ans.
[369] Mgr Dupanloup, évêque d'Orléans.
[370] Rochecotte.
[371] Fils aîné de la princesse Radziwill, alors âgé du 2 ans.
[372] Alexandre, duc de Dino et sa fille Élisabeth, plus tard comtesse Oppersdorff.
[373] Duc de Valençay.
[374] Correspondant de la Chronique.
[375] Prince de Sagan.
[376] Princesse de Sagan, née Seillière.
[377] Second fils du duc de Valençay.
[378] Le Pape avait invité tous les évêques du monde catholique à se rendre à Rome, le jour de la Pentecôte (8 juin 1862), pour assister à la fête de la solennelle canonisation de vingt-cinq martyrs qui, en 1594, avaient versé leur sang pour la foi à Nagasaki, au Japon, et avaient déjà été béatifiés en 1627. Plus de trois cents évêques se rendirent à l'appel de Pie IX.
[379] Au mois d'août 1861, M. de Lavalette, qui était Ambassadeur à Constantinople au moment des massacres du Liban, fut envoyé à Rome pour y remplacer M. de Gramont, comme Ambassadeur auprès du Pape.