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Comment on Prononce le Français: Traité complet de prononciation pratique avec le noms propres et les mots étrangers

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NOTES:

[1] Domergue, Manuel des étrangers amateurs de la langue française, 1805 (les exemplaires de 1806 portent pour premier titre la Prononciation française); Mᵐᵉ Dupuis, Traité de prononciation ou Nouvelle Prosodie française, 1836.

[2] Le Traité complet de la prononciation française de Lesaint, même revu et complété en 1890 par le Professeur Dʳ Chr. Vogel, est fait sans méthode, et ne peut avoir aucune autorité: il prononce encore scouère, et ton, pour ta(o)n, et mosieu, etc., sans parler de Haydn prononcé èdn, avec Ghy-ane et Ghy-enne. Puis, voici M. Sudre, docteur ès lettres, professeur à la Guilde internationale, qui trouve très légitime qu’on prononce cinque francs ou neufe sous, qui admet aspè, aspec ou aspect et préfère aspect! Le reste à l’avenant. Voilà ce qu’on enseigne aux étrangers. Un autre, professeur au Conservatoire, enseignait aux Français qu’«on commence à pouvoir dire: une main habile.» (Dupont-Vernon, l’Art de bien dire.)

[3] Ou bien il a des formules singulières comme celle-ci: Beaucoup de personnes (!) ne prononcent pas f dans les bœufs.

[4] Je ne parle pas de Littré, qui en cette matière est déjà suranné sur beaucoup de points, notamment par son obstination à maintenir le son de l’l mouillé, et à séparer des syllabes que tout le monde réunit. Littré n’est déjà plus qu’un témoin historique, d’ailleurs infiniment précieux.

[5] Jusqu’à la lettre O, la finale-aille est ouverte presque partout; ensuite elle est généralement fermée.

[6] Par exemple, il identifie pour la prononciation grêle adjectif et grêle substantif; il fait l’a final bref dans vasistas, et ferme au dans aurore ou augmenter, etc.

[7] Il croit que l’a est fermé dans crasse et dans latrines; il prononce coïncidence comme coin; quadrilatère par coua ou ca, et plutôt ca, joigne avec oua ou ouè, frêlon avec e ouvert, asymétrie et imprésario avec des s doux, enharmonique avec un h aspiré; il croit qu’on peut dire indifféremment échev’lé ou éch’vélé, déjà ou d’jà, quérir ou qu’rir, des gentilzhommes ou des gentil(s)hommes, hai(e) ou haye, gen(s) ou gensse; il admet la suppression du c dans sanctuaire, sanction et sanctifier; celle du p dans cep et septembre; il s’imagine que des bouches françaises peuvent encore garder une diphtongue dans des mots comme meurtrier, encrier, bouclier, sablier, etc.: il excepte seulement ouvri-er!

[8] Je recommande particulièrement à ce point de vue le chapitre de en prononcé an ou in, ou celui du groupe ti devant une voyelle.

[9] Nous le citerons cependant, vu son importance, au même titre et dans les mêmes cas que le Dictionnaire général.

[10] Les éléments de ces notes historiques sont naturellement empruntés au livre de Thurot: de la Prononciation française depuis le commencement du XVIᵉ siècle, 1881-1883. A défaut de ce livre capital, ceux qui s’intéressent à ces questions trouveront encore la plupart des renseignements nécessaires dans Rosset, les Origines de la prononciation moderne, 1911.

[11] Ceci ne peut suffire que pour les poètes:

A noir, E blanc, I rouge, U vert, O bleu, voyelles,
Je dirai quelque jour vos naissances latentes.

Mais quel E ou quel O? celui d’écho ou celui d’orge? Et les autres sons?

[12] Par exemple cacique, gigot, salutation.

[13] Ces questions sont certainement un peu arides. Mais le lecteur qui ne s’intéresse qu’aux faits, et ne tient pas à s’en rendre compte méthodiquement et par principes, peut très bien passer directement au chapitre de la voyelle A. Il reviendra ensuite sur les principes, si le cœur lui en dit. Je dirai même que pour le lecteur qui n’est pas initié, mieux vaut sans doute commencer par les faits: il comprendra mieux les principes après cette étude préliminaire, et c’est toujours une bonne méthode que d’aller du concret à l’abstrait.

[14] On voit que la voyelle fermée est aiguë, et que la voyelle ouverte est grave. On pourrait donc employer ces mots les uns pour les autres. Mais comme il convient de choisir, pour simplifier le vocabulaire, nous emploierons les deux termes ouvert et fermé, qui sont ceux dont les autres voyelles s’accommodent le mieux.

[15] Cette distinction est si nette que ces mots ne sauraient d’aucune façon rimer ensemble correctement, malgré l’exemple de V. Hugo, qui rapproche constamment trône de couronne, ou rôle de parole.

[16] Cette distinction n’apparaît pas d’abord manifestement; mais une expérience facile, indiquée par l’abbé Rousselot (voir son Précis de prononciation, page 39), montre que le mot est en somme parfaitement exact: si l’on prononce normalement la voyelle a, et si, sans rien changer à la position de la bouche, on en rapproche et retire alternativement la main, on sentira nettement ce que c’est qu’un a fermé; or la main fait ici l’office du gosier. Ajoutons, pour mieux caractériser encore l’a fermé, qu’il se rapproche de l’o, au moins à Paris.

[17] Il s’agit ici bien entendu du c et du g tels qu’on les entend devant a, o, u, et non transformés en d’autres consonnes, comme ils le sont devant e et i.

[18] On ne le retrouve guère que dans certaines parties du Midi et en Suisse. Peut-être y a-t-il encore des instituteurs qui s’efforcent de le rétablir sous la forme ly: alyeurs pour ailleurs, mais c’est autre chose, et c’est peine perdue. Il est encore plus vain de vouloir restaurer ce son disparu du français que de s’obstiner à faire vibrer l’r.

[19] Voir sur ce point Léonce Roudet, la Désaccentuation et le déplacement d’accent dans le français moderne, dans la Revue de philologie française, 1907.

[20] Voir Roudet, article cité. Toutefois l’auteur me semble réduire à l’excès le nombre des syllabes accentuées en fait. Il y a en moyenne un accent, plus ou moins fort, par groupe de trois syllabes, et c’est pourquoi il y a en moyenne quatre accents dans un alexandrin, l’accent étant sur la dernière syllabe non muette de chaque groupe. Ainsi dans ce vers:

Laissez-moi , vous dis-je, et courez vous cacher,

il n’y a que quatre accents, mais il y en a quatre: sur , dis, rez et cher.

[21] Acte de volonté qui devient d’ailleurs facile et même inconscient, grâce à l’habitude, mais qui n’en subsiste pas moins, comme ceux qui dirigent les doigts du pianiste, même dans les «traits» les plus faciles, où le jeu semble le plus machinal.

[22] On voit que l’accent dit aigu, quand il n’est pas final, surmonte presque toujours un e à demi ouvert; pourtant l’é initial est souvent moins ouvert que l’é intérieur.

[23] Je ne parle pas, bien entendu, des noms étrangers, comme Brahms, où l’h allonge l’a, à côté de rams, qui a l’a bref.

[24] Exactement et en fait, les groupes sont: bl, cl, fl, gl, pl, et br, cr, dr, fr, gr, pr, tr, vr. C’est ce que les grammairiens appellent muta cum liquida. Mais nous savons que les muettes sont b et p, c et g, d et t; f et v sont des spirantes (labiales ou fricatives). On voit qu’en principe, parmi les muettes, d, t, v, ne se groupent qu’avec l’r, en français; quant aux autres spirantes, s et z, ch et j, elles ne se groupent même pas avec l’r: quand par hasard elles en rencontrent un, comme dans Is-raël, ce qui est rare, elles n’appartiennent pas à la même syllabe.

[25] Les plus nombreuses sont précisément celles dont la première consonne est l ou r, comme -arbe, -arc, -arde, etc.

[26] On sait que cet accent tient presque toujours la place d’une lettre disparue, généralement un s, qui ne se prononçait plus, mais dont la présence allongeait la voyelle. Seulement, quand la syllabe qui a l’accent circonflexe est finale, l’allongement ne se fait plus sentir: aimât, forêt et bientôt (de même que reçût ou fît) ne se prononcent plus autrement qu’aima, foret et paletot. Il en est de même, disons-nous, de aimâmes et aimâtes, comme de fîmes ou reçûmes. Et ceci n’est pas nouveau: Mᵐᵉ Dupuis l’avait déjà constaté. Nous signalerons, en temps et lieu, les autres exceptions. D’ailleurs, comme les mots à accent circonflexe sur la finale ne sont pas très nombreux, on les trouvera tous dans les notes.

[27] Sauf, très mal à propos, les trois noms de mois en -ose: nivôse, ventôse et pluviôse.

[28] Le Dictionnaire général donne la fermé et fa ouvert: c’est certainement une erreur, si ce n’est pas une faute d’impression. On notera en passant que les noms des voyelles intermédiaires, é, eu, o, et ceux des consonnes qui s’énoncent avec un e à la suite, b, c, d, etc., sont également fermés, ainsi que les notes do ou , car tous appartiennent à des finales fermées.

[29] La preuve, c’est que beaucoup d’h sont tombés, notamment dans casba, véranda, smala, massora, et même poussa, et les noms de lieux arabes, comme Blida; mais ceux qui restent ne se sentent guère plus, par exemple dans sura(h), ou même sha(h), surtout dans sha(h) de Perse, ou Jéhova(h): je ne vois guère qu’Allah, où l’on maintienne parfois, par un effort volontaire, l’a long et fermé.

[30] Cette identité de prononciation entre les singuliers et les pluriels est déjà constatée par Mᵐᵉ Dupuis; mais les voyelles sont restées longues et fermées pendant longtemps au pluriel, en souvenir du temps où l’s se prononçait; elles ne le sont plus aujourd’hui que dans certaines provinces.

[31] Sauf bien entendu bât, dégât, mât, appât, où l’a est encore un peu fermé par l’accent circonflexe, qui a remplacé l’s antérieur; mais cette différence même est en voie de disparaître. C’est déjà chose faite, nous l’avons dit, pour les subjonctifs: aimât (pour aimast) ou aima ne diffèrent plus en rien, et malheureusement la confusion des prononciation amène parfois la confusion des formes elles-mêmes.

[32] Sans aucun souci de l’étymologie, comme on peut voir. Ainsi l’a de pénates ou sonate, qui était long en latin ou en italien, est bref en français; de même pour s’évade ou arcane.

[33] Je ne parle pas bien entendu des finales dont il est question page 38: algue, calme, Alpes, salve, apte, rhubarbe, charge, écharde, écharpe, etc.: on sait que l’a n’y est jamais long ni fermé.

[34] Il s’agit bien entendu du c guttural et non du c spirant ou sifflant de ce et ci.

[35] De même Balzac ou Aurillac, Karnak, Bach ou Andromaque. On excepte Isaac et Jacques, dont l’a est fermé, et naturellement Pâque et Pâques, pour Pa(s)que. D’ailleurs Isaac s’est longtemps prononcé isac, où la contraction naturellement allongeait la voyelle. La réaction orthographique a fait rétablir le premier a, mais l’effort fait pour distinguer les voyelles maintient l’allongement de la seconde. En revanche, on ouvre ordinairement l’a dans les Jacques (d’où Jacquerie, et peut-être jaquette), et dans faire le Jacques.

[36] De même Gap, Priape, Chappe, Esculape, Jemmapes, la Trappe.

[37] On exclut, bien entendu, hâte, bâte, gâte, mâte et démâte, pâte, empâte et appâte, et hâte, qui tous ont perdu un s. L’a est douteux dans Pilate, seul parmi les noms propres: cf. Josaphat, Croates, Hécate, Agathe, Dalmates, Carpathes, Socrate, etc.

[38] De même Malgache, Gamache, Carrache, Eustache, etc. On excepte naturellement bâche, rabâche, fâche, gâche, lâche, relâche, mâche (substantif ou verbe) et tâche (ne pas confondre avec tache): tous avaient un s, sauf bâche et mâche (salade), qui ont pris l’accent circonflexe par analogie.

[39] Sauf pour rimer avec châsse et grâce, dont l’accent circonflexe est d’ailleurs assez mal justifié. Quant à crasse, il est toujours ouvert, et a toujours été bref, et je ne sais pourquoi Michaëlis et Passy distinguent ici l’adjectif du substantif: c’est le même mot. Savantasse a eu l’a fermé; il s’est ouvert, par analogie avec tous les mots où le suffixe asse prend un sens péjoratif. Masse, terme de jeu, a aussi été long. D’autres encore ont été longtemps discutés. Ajoutons que l’a est long dans Annemasse et Grasse, et bref dans le Tasse, comme dans tous les autres noms propres: Paillasse, Madécasses, Sargasses, aussi bien que Curiace, Ignace, Boccace, Daces, Laplace, Horace, Thrace, Alsace, etc.

[40] Le Dictionnaire général, qui s’en rapporte trop facilement à l’étymologie, conserve l’a ouvert et bref dans stras (du nom propre Strass) et vasistas (de l’allemand was ist das), et même dans hypocras; il ne distingue pas entre ce qui devrait être et ce qui est.

[41] Entendez le g guttural, et non le g chuintant qu’on entend dans ge et gi.

[42] Le Dictionnaire général le fait ouvert, et il a certainement raison en principe, sinon en fait. On se demande ce qui a pu amener cette prononciation singulière, qui remonte fort loin. Cet a finira probablement par s’ouvrir là comme ailleurs, un jour où l’autre, à cause du b, comme a fait l’o de globe et lobe, qui jadis était fermé aussi. L’a de Souabe est aussi bref que celui de Mab ou Achab.

[43] De même Joad, Tchad, Timgad, Alcibiade, Henriade, Pléiades, etc.

[44] L’a est moins ouvert dans Reichstag et Landtag, mots étrangers, que dans zigzag. Il est ouvert dans Agag, Copenhague, Birague, Prague, etc.

[45] Ce sont hâle, mâle et râle (verbe), qui ont perdu un s, avec râle, oiseau (pour raalle), châle et pâle, dont l’accent est peu justifié. On y joindra Bâle, qui a aussi perdu un s, et Domba(s)le, qui a gardé le sien: cf. Duche(s)ne, Ne(s)le, etc. Saint-Graal et Ruisdaël, où on ne prononce qu’un a, ont aussi la finale longue et fermée, et l’obligation de distinguer deux a paraît fermer à demi l’a final de Baal ou Transvaal. L’a est ouvert dans les autres noms propres, Montréal, Martial, Annibal, Portugal, Cantal, Lamballe, Cancale, Bengale, saint François de Sales, Ambarvales, etc.

[46] A ces mots il faut ajouter brahme, à cause de l’h, sans compter âme (pour an-me nasal), blâme et pâme, qui ont perdu leur s, et infâme (par réaction étymologique, et aussi par emphase, car il avait autrefois l’a bref, comme diffame). Pour ne pas trahir le poète, mais pour ce motif seulement, il faudra prononcer brame avec a fermé dans ces vers:

Elle brame
Comme une âme
Qu’une flamme
Toujours suit.
V. Hugo, les Djinns.

La double voyelle paraît fermer à demi l’a final dans Balaam et Abraham, comme ci-dessus dans Isaac ou Baal; il est ouvert dans les autres noms propres, Roboam, Priam, Annam, Bergame, Pyrame, etc.

[47] Le Dictionnaire général donne à ce mot l’a ouvert et moyen. L’accent circonflexe est seulement dans âne, pour a(s)ne, dans flâne (étym. inconnue), mânes, qui garde l’a long du latin, et crâne (dont l’allongement ne s’explique pas). On ferme aussi assez généralement l’a de Jeanne, quand il n’y a pas de nom à la suite (moins, par exemple, dans Jeanne d’Albret). Beaucoup de gens disent encore Anne avec a fermé et long, et surtout Marie-Anne, sans doute afin de distinguer ce prénom de Marianne. D’ailleurs Marianne aussi eut autrefois l’a long, puisqu’on l’écrivait Mariamne, comme condamne, et Diane également, à cause de l’étymologie. Cet a est bref et ouvert aujourd’hui, comme dans les autres noms propres, Ariane, Guyane, Toscane, Modane, Aristophane, Tusculanes, Tigrane, Fontanes, etc., aussi bien que Cannes, Lannes, Suzanne, Lausanne, ou Ahriman et les noms étrangers en -mann; on doit le fermer dans Hahn, à cause de l’h qui le suit.

[48] Le Dictionnaire général les fait longues par principe.

[49] Ceci reste du temps où ce mot se prononçait gan-gne. L’a est ouvert également dans Ascagne, Cerdagne, Allemagne, Espagne, etc.

[50] C’est-à-dire a, suivi d’un l mouillé, mais qui se prononce en réalité comme a-ye, l’ancien son mouillé étant complètement perdu.

[51] Prononcé à l’anglaise, nous le retrouverons à ai, avec mail-coach.

[52] Il est remarquable qu’au contraire la même intention péjorative tend plutôt à ouvrir et abréger l’a de la finale -asse.

[53] Je sais bien que d’aucuns ferment et allongent autant qu’ils peuvent où voulez-vous que j’aille; mais cela ne sent-il pas un peu le faubourg extérieur?

[54] Ce mot est le seul pour lequel le Dictionnaire général hésite. Mais d’ailleurs sa doctrine a singulièrement changé au cours de l’impression: jusqu’à la lettre O, tous les a sont ouverts, sauf dans godaille et quelques verbes en -ailler; à partir d’O, l’a fermé l’emporte de beaucoup; mais pourquoi relevailles et trouvaille ont-ils l’a ouvert, à côté de semailles et volaille, qui l’ont fermé?—Il va sans dire qu’à Paris on fait l’a long et fermé dans Versailles, et aussi dans Cornouailles ou Xaintrailles, et même dans Noailles.

[55] De même Biscaye, Lucayes, Hendaye, Blaye. On prononce Baïes de la même façon, et aussi quelques mots étrangers en -aï, comme Shanghaï: voir page 119, note 2.

[56] Il me semble qu’il ne l’est plus dans les noms propres, Baléares, Icare, Pindare, Bulgare, Ténare, Saint-Lazare, etc. Faute d’avoir distingué entre bref et ouvert (qu’il appelle aigu), comme entre long et fermé (qu’il appelle grave), Thurot a manqué de précision et d’exactitude, autant que les grammairiens qu’il cite, en ce qui concerne les finales en -re. J’ajoute, en passant, que, dans le même chapitre de la quantité, il a oublié les finales en -se doux (-ase, -èse, etc.).

[57] De même Astyage, Pélage et même Péla(s)ges, Ménage, Abencérages, Carthage, Caravage, etc.

[58] Peut-être l’a est-il un peu plus bref dans les formes verbales: il bave, pave ou grave, par analogie avec baver, paver, graver; cette distinction a déjà été faite par un grammairien du XVIIᵉ siècle, Chifflet, qui cependant exceptait encave, évidemment à cause de cave. Tous ces mots ont été autrefois très discutés. L’a a également une tendance à se fermer dans les noms propres, Moldaves, Barnave, Moraves, Tamatave, Octave, Gustave, etc.

[59] De même Anabase, Caucase, Las Cases, Métastase, Diaz, Hedjaz, Decazes, etc.

[60] Le Dictionnaire général fait l’a long partout, mais l’ouvre aussi partout, sauf dans fable: pourquoi celui-là seul? Quant à l’accent circonflexe, il n’y avait guère de raison pour que ceux qui l’ont le prissent plutôt que d’autres; pourquoi pas fâble comme hâble?

[61] Sans parler de bâcle, débâcle et renâcle, dont l’accent circonflexe est peu justifié.

[62] Il n’y a pas de mots en -agle. L’a est ouvert dans Naples ou Étaples.

[63] L’a est naturellement long et fermé dans âpre et câpre, qui avaient un s, dans âcre (mot savant qui a conservé la quantité latine, qu’il aurait perdue sans l’accent), dans bâfre (onomatopée probable), et dans une trentaine de mots en -âtre, pour a(s)tre, y compris ceux qui désignent des couleurs approchantes, blanchâtre, bleuâtre, etc. Il est ouvert dans Odoacre ou Saint-Jean-d’Acre, Affre et Cafre et aussi dans La Châtre, malgré l’accent circonflexe; il est fermé dans Malfilâtre et Cléopâtre.

[64] De même Œagre, Méléagre, Tanagre.

[65] Le Dictionnaire général l’ouvre dans escadre; mais c’est évidemment l’étymologie qui le détermine et non l’usage, car, dans la marine, on ferme l’a, et je pense que l’usage des marins doit être considéré ici comme le bon.

[66] Michaëlis et Passy, qui ferment beaucoup d’a, ferment encore celui de ladre et aussi celui de macle, et celui d’affres, et acceptent même qu’on ferme celui de nacre!

[67] Le Dictionnaire général ouvre l’a dans cinabre et glabre: il ignore palabre. L’a est aussi fermé le plus souvent dans Fabre, Labre, Calabre, Vélabre, Cantabre, comme dans Le Havre ou Jules Favre.

[68] C’est là encore un phénomène général qui se retrouve dans toutes les voyelles, car toutes sont longues devant la finale -re et s’abrègent en devenant atones sans être initiales: vénère-vénérer, honore-honorer, demeure-demeurer, admire-admirer, murmure-murmurer.

[69] Il faut excepter bâbord, qui doit son accent à des grammairiens trompés par une fausse étymologie: bas n’y est pour rien, et l’a de bâbord a toujours été aussi ouvert et bref que celui de d’abord.

[70] On peut même en voir un quatrième dans pâtisserie parisienne.

[71] L’a de Le Câtelet s’est également ouvert malgré l’accent circonflexe, ainsi que celui d’Asnières malgré l’s.

[72] L’a reste donc plus ou moins fermé, en devenant prétonique, dans casser, lasser et prélasser, classer (mais non classique, où l’on entend les deux s), amasser et ramasser (moins dans ramassis), passer et trépasser, tasser et entasser; de même dans clamer et ses composés, avec clameur; dans damner; dans barrer, barreau et barrière, carrer et contrecarrer, carreau et carrière (mais non carrefour et carrelage, sans doute à cause des consonnes consécutives pour l’oreille rf ou rl); dans vaseux, gazeux et tous les verbes en -aser, avec leurs dérivés, y compris brasier et brasero, embrasure, casuel et casuiste; de même encore dans sabler, racler, rafler ou érafler, dans cadrer ou encadrer, cabrer, délabré, sabrer, navrer (mais non cadran ni fabrique). L’a s’est ouvert dans bigarré, amarrer, chamarré, narrer.

[73] Si l’on peut fermer celui de lassitude, c’est uniquement à cause du sens, et parce qu’on appuie volontairement.

[74] Pourtant ces mots n’ont aussi que deux syllabes pour l’oreille, comme passant; mais le sens des composants est entièrement perdu de vue; dès lors, dans paspor ou paspoil, l’a est naturellement porté à s’ouvrir, à cause des deux consonnes, à moins d’une volonté expresse.

[75] L’a est ouvert aussi dans Jeannot, Jeannette, et Jeanneton. Il est fermé dans Jacob (mais non dans Jacobins ou Jacobites); dans Jacqu(e)line, qui n’a que deux syllabes pour l’oreille, il est douteux, la seconde des consonnes qui suivent l’a (cl) étant une liquide; mais il est ouvert dans Jac(que)mont ou Jac(que)mart, et même dans Jacquart, comme dans Jacquerie.

[76] Voir plus haut, pp. 27-28. Tous ces a sont naturellement fermés dans Rousselot, ainsi que dans Michaëlis et Passy, mais non dans le Dictionnaire général.

[77] Dont l’a est fermé dans Michaëlis et Passy.

[78] Malgré Michaëlis et Passy. L’a prétonique est aussi fermé généralement dans Basile, Bazeilles et Jason, moins régulièrement dans Bazaine, Dugazon et Lazare, et plutôt ouvert dans Saint-Lazare, où il n’est plus initial.

[79] De même Baron, Caron, Charon, Charron, Scarron, Varron (si on ne prononce qu’un r), en opposition avec Mascaron.

Toutefois, sur charron, l’accord n’est pas parfait, à cause des autres dérivés de même racine. Quant à marron, le Dictionnaire général fait l’a long dans le substantif et bref dans l’adjectif (esclave marron): c’est encore uniquement l’étymologie qui le guide sur ce point.

[80] Mais non dans Marennes, malgré Michaëlis et Passy.

[81] Tous ces a sont fermés dans Mᵐᵉ Dupuis, et même celui de déclarer! Michaëlis et Passy ferment aussi celui de latrines!

[82] Ceux qui ne prononcent pas l’s final de ce mot ferment l’a le plus souvent; mais il faut prononcer l’s.

[83] Mᵐᵉ Dupuis fermait l’a dans ces mots et même dans aveline, hameau et rogaton. L’a est encore fermé assez généralement dans Adam, Bataves, Calais, Chablis; il est flottant dans Satan et Madeleine, mais ouvert dans Bacchus et Cadix.

[84] Mᵐᵉ Dupuis fermait l’a même dans bascule, bastonnade et martyr, malgré les deux consonnes qui le suivent.

[85] Ou Majorque. Pour majorité, majorat ou majuscule, la question ne se pose même pas.

[86] L’a est fermé dans Janus, mais non dans anus, ni dans lapis (lazuli), et c’est très incorrectement qu’on le ferme dans pater ou même ad patres. Il serait aussi correct de faire certains a longs et fermés, comme en latin, dans quelques expressions latines souvent citées: audaces fortuna juvat, auri sacra fames, bella matribus detestata, delenda Carthago, dignus intrare, ense et aratro, errare humanum est, facit indignatio versum, genus irritabile vatum, in cauda venenum, irreparabile tempus, manu militari, mens sana in corpore sano, mirabile visu, nil admirari, profanum vulgus, o fortunatos, peccavi, persona grata, pro aris et focis, qualis pater, quantum mutatus, rara avis, si vis pacem, ultima ratio, vade retro, vanitas vanitatum; mais non dans panem et circenses, dont on allonge souvent l’a mal à propos.

[87] Et aussi dans Mahdi, Fahrenheit ou Hahnemann, comme dans Hahn, à cause de l’h. Il l’est aussi dans les noms propres étrangers où les deux a n’en font qu’un: Aarhus, Aalborg, Boerhaave, Saadi, Saale, Saalfed, Saardam, Saavedra, etc.; mais Saadi est devenu chez nous le prénom Sadi, avec a bref. On sépare les a dans A-ar, Ra-ab ou Nausica-a. Dans les noms hébreux, Ba-al, Isa-ac, Bala-am, Abra-ham, on sépare aussi aujourd’hui les a, mais au XVIᵉ siècle on les contractait volontiers, et on a continué à le faire pour Aaron, surtout les poètes, notamment Racine, quoiqu’il scande Ba-al, et aussi V. Hugo, qui écrit de préférence Aron. Pour a suivi de en, voir aux nasales.

[88] Je ne crois pas que la nasalisation du premier a soit due, comme le veut l’abbé Rousselot, à l’influence des deux m qui enferment l’a, sans quoi on devrait dire aussi man-mour ou man-melle. C’est plutôt ce phénomène de répétition de syllabes identiques qui a produit tant de mots enfantins, comme bobo, lolo, etc., et même pépée pour poupée.

[89] Nous retrouverons ces mots au chapitre des nasales, avec quelques autres où figure l’a.

[90] Livre Iᵉʳ, fable 1. Voir aussi fable 13 du livre Iᵉʳ, fables 9 et 10 du livre V, et ailleurs.

[91] L’Académie ne voit d’ailleurs rien de choquant à prononcer d’une part outeron, et d’autre part a-outer. L’abbé Rousselot et le Dictionnaire général sont d’accord pour ou, et il n’y a pas lieu de distinguer entre (a)oût, (a)oûter et (a)oûteron. A-ou ne paraît s’être maintenu constamment que dans le prénom Ra-oul, d’allure aristocratique et peu populaire, et dans un mot relativement récent, ca-outchouc; mais cette association est si peu naturelle en français qu’on entend parfois a-ou se réduire à ou même dans ce mot, ou bien au contraire se séparer par un yod: cayoutchouc.

[92] Le Dictionnaire général donne a-oriste.

[93] A-o n’a pu se maintenir ailleurs dans le français pur qu’au moyen d’un h: cahot, Cahors; mais l’a est tombé dans S(a)ône et Curaç(a)o: il serait si simple de ne pas l’y écrire. Les autres mots qui conservent a-o sont savants ou étrangers; a-orte, caca-o, cha-os, ka-olin, Bilba-o, La-os, etc. L’a était tombé et a revécu dans A-oste, comme dans a-oriste.

[94] On sait que l’orthographe anglaise est encore bien plus extravagante que la française, ce qui n’est pas peu dire.

[95] Rémy de Gourmont voudrait même qu’on écrivît boucmacaire, mais cela encore est un compromis: pour que le mot eût une forme véritablement française, il faudrait aller jusqu’à bouquemacaire: on avouera que cela ne s’impose pas.

[96] Mais c’est un a nettement ouvert qu’on prononce, à tort ou à raison, dans bar, black rot, cab, crack, dog cart, drag, fashionable, flint glass, goddam, krach, lad, lasting, malt, match, paddock, scratch, tatter-sall, tramway, waterproof, et dans that is the question (approximativement zatis-zecouèchtieune). De même dans Macbeth, Sydenham et les noms en -gham, sans parler de Bacon, qui est francisé depuis des siècles.

[97] Ainsi dans steeple-chase, plum-cake, keepsake, pale-ale, pall-mall-gazette, racing-club, shakehand, trades-unions (trèdiounieune), rallye-paper, God save, quaker, et aussi James (djèms), Bedlam ou Shakespeare.

[98] On en vient même à prononcer à la fois rallye à la française et paper à l’anglaise (rali-pepeur): il faudrait choisir pourtant! Je ne parle pas de baby, qui n’est plus guère qu’une orthographe prétentieuse, puisque nous avons bébé, qui est probablement le même mot, avec la même prononciation, approximativement. Sans doute il est trop français au goût de quelques-uns, qui trouvent baby beaucoup plus distingué. Pur snobisme, pour la plupart, comme d’écrire beefsteak. Mais au moins prononce-t-on bifteck, même quand on écrit beefsteack; le comble, c’est de prononcer babi, en s’imaginant que c’est de l’anglais! Il n’y a rien de plus ridicule que cette affectation dans l’ignorance. Je sais bien qu’on peut dire que baby a pris un sens différent de bébé, et désigne des bébés d’allure et de costume particuliers; c’est possible, mais mon observation demeure.

[99] En fait, cet a anglais est plutôt intermédiaire entre l’a et l’o, à peu près comme nous prononçons parfois un ah prolongé pour marquer de l’étonnement ou du mécontentement.

[100] Le Dictionnaire général les accueille toutes les trois.

[101] On ne voit pas très bien à quoi sert l’orthographe beefsteak et rumpsteak, puisque nous en avons fait bifteck et romsteck (avec un c complémentaire à l’allemande): qui donc prononce reumpstec?

[102] Ajouter: Beaconsfield, Castlerea(gh), Chelsea, Chesapeake, Kean, Keats, le roi Lear, Shakespeare, etc.

[103] Et aussi dans le basque Coarraze.

[104] Law aussi, je parle du banquier, devrait se prononcer lo; mais ce mot ayant été à l’origine employé surtout au génitif (Law’s bank), le génitif fut pris pour le nom et la prononciation lasse prévalut, acceptée pas Law lui-même; elle prévaut encore. Nous avons un phénomène tout pareil aujourd’hui dans telles expressions assez absurdes, comme chez Maxim’s.

[105] Le groupe oi est dérivé d’un e latin qui s’est d’abord renforcé, ou simplement mouillé, en éï, puis ouvert en èï, et ensuite , la voyelle initiale étant toujours le son principal. Pendant ce temps l’orthographe suivait la prononciation. A partir de cette étape, elle n’a plus changé, mais la prononciation a continué à évoluer. D’abord i est devenu le son principal du groupe; puis s’est ouvert à son tour en , , oa, et, par l’assourdissement de l’o, ouè et oua. C’est là que nous en sommes, si bien qu’il n’y a plus aucun rapport entre l’écriture et la prononciation, qui est exactement wa, avec w consonne, sans i ni o. La lutte fut d’ailleurs très longue entre ouè et oua, sans compter è tout court, qu’on entendait notamment dans adroit, froid, trois et croire. Témoin la réponse de Fontenelle à qui on demandait comment il fallait prononcer je crois: Je crès, dit-il, qu’il faut prononcer je croa. Finalement on a adopté, pour le son è, l’orthographe ai, et oi a fini par passer à wa. Il n’y pas fort longtemps que le fait a été reconnu et accepté par les grammairiens. C’est seulement en 1805 que Domergue l’a proclamé, à l’encontre de tous les livres, qui continuaient à enseigner le son ouè. Aujourd’hui cette prononciation est tout à fait surannée et dialectale, et je ne sais où Michaëlis et Passy ont pu entendre indifféremment jwagne et jwègne.

[106] La finale oy a disparu de l’orthographe, mais se retrouve dans les noms propres français, où sa prononciation est la même: Darboy, Fontenoy, Jouffroy, de Troy, et même au besoin Rob-Roy, se prononcent comme s’ils avaient un i.

[107] Et aussi dans Troie, Troyes ou Millevoye, qui se prononcent exactement comme trois ou vois.

[108] Corneille, le Cid, acte II, scène 8.

[109] Il n’est guère possible de justifier roide, en dehors de la rime: la langue françoise ne s’en accommode plus. Domergue lui-même conseillait déjà rède, à côté de roidir et roideur. Faible aussi s’est longtemps écrit foible, même au XIXᵉ siècle; mais il se prononçait tout de même fèble, et je ne sais pourquoi il avait conservé son ancienne orthographe.

C’est seulement en 1835 que l’Académie se décida à écrire ai le groupe oi, quand il se prononçait è: encore fit-elle exception pour roide et harnois.

[110] Oi est aussi assez long dans les mots en -oirie: armoirie, plaidoierie, etc., mais moins que dans -oir. Autrefois il se fermait dans -oire, et y semblait plus long que dans -oir.

[111] Il représente aussi un s tombé (sauf dans benoît, benoîte, où il est peu justifié). C’est pourquoi on en tenait compte autrefois, et l’on trouve encore des exemples de la prononciation ancienne, mais elle est tout à fait surannée.

[112] Quand ce n’était pas ngn ou ingn: ainsi gagner s’écrivait aussi bien ga-igner, ga-ngner, ga-ingner, d’autant plus que le son de l’a a longtemps été nasal dans ce mot, comme l’o l’est resté ou plutôt redevenu dans Brongniart, qui, régulièrement, devrait se prononcer bro-gnar.

[113] Ces mots étaient pourtant à joindre, soin, loin, témoin, comme besogner, cogner et grogner sont à besoin, coin et groin.

[114] Mais pourquoi ne pas écrire ognon comme rognon? Le cas est exactement le même.

[115] Pourtant le Dictionnaire général les prononce par o et non par oi. Il retarde. Pourquoi pas élo(i)gner et so(i)gner? Lamoignon aussi, et Coigny, sont altérés désormais dans l’usage le plus ordinaire.

[116] Quoique ce soit admis par Michaëlis et Passy. Ajoutons que, très familièrement, voilà devient vla, sans doute par l’intermédiaire ancien de véla: cela est un peu trop négligé.

[117] On prononce dans Droysen, et, si l’on veut, Rob-Roy, par opposition aux noms français, Coypel, Coysevox, Loyson, Roybet, etc., où oy se prononce comme oi.

[118] Sauf un cas, qui sera examiné.

[119] On sait que l’e non muet se prononce é ou è, sans avoir d’accent, devant deux consonnes intérieures (sauf le groupe dit muta cum liquida), et aussi devant une consonne finale, sauf l’s, parce que, devant un s, sans accent, il serait muet. Autrefois il n’avait pas d’accent dans ce cas, mais il y avait un z à la place de l’s.

[120] Il n’en était pas ainsi autrefois; les finales en -ète, -ède, -ège, etc., et la plupart des finales à consonne unique ont été longtemps fermées: -éte, -éde, -ége, etc.; elles se distinguaient ainsi des finales à consonne double, -elle, -emme, -ette, etc. Ce n’est même qu’en 1878 que l’Académie a consenti l’accent grave aux finales en -ège.

[121] A latere, de profundis, ecce homo, epitome, in pace, miserere, noli me tangere, nota bene, pange lingua, salve, sine qua non, te deum, tolle, vade mecum, vice versa, aussi bien que avé, bénédicité ou fac-similé. La diphtongue latine æ se prononce aussi comme un e fermé: Dies iræ, lapsus linguæ, væ victis, Philæ.

[122] L’e final se prononce également dans Corte, mais non dans Casert(e), Bramant(e) ou Fiesol(e). L’allemand est traité comme l’italien: l’e ne se prononce pas dans Gœth(e), ni dans Moltk(e), Hohenloh(e), Carlsruh(e); mais il se prononce dans Encke, Heyne, Heyse, Rancke, Nietzche, etc. L’e final anglais se prononce i dans to be or not to be, où il est accentué; en général il ne se prononce pas: steepl(e) chas(e); il est muet même après une voyelle dans blu(e) book, Edgar Po(ë), Lugné-Po(ë), Monro(ë), de Fo(ë), Jellico(ë), et même Ivanho(ë); pourtant celui-ci, étant suffisamment populaire, se francise souvent en Ivanho-é, et il est à peu près impossible de ne pas franciser Cruso-é.

[123] Voir plus loin, au chapitre de l’R.

[124] Plessis-lez-Tours; on l’écrit souvent les, et même lès, très malencontreusement, car l’e est toujours fermé, même en liaison: Caudebec-lez-Elbeuf.

[125] Les noms propres Dumouriez, Duprez, etc., suivent la règle, sauf Forez, qui a l’e ouvert, quoique le z n’y sonne pas non plus.

[126] Au XVIIᵉ siècle, l’e de ces mots était déjà généralement fermé, au moins à Paris; ce n’est qu’au XVIIIᵉ siècle et au XIXᵉ que les grammairiens finirent par le faire ouvrir, dans la prononciation soutenue; mais la tendance était trop forte pour qu’on pût la détruire dans la langue courante.

[127] L’e final s’est également fermé dans certains noms propres grecs, Arachné, Phryné, malgré l’étymologie. Il est vrai que les érudits se croient souvent obligés de prononcer Athènè, Corè, Anankè; mais ces formes sont grecques et non françaises. Et puis, cette prononciation est-elle bien nécessaire? Si l’on ne veut pas dire Athéné, on ferait peut-être mieux de dire Athéna.

[128] Benêt (pour beneet), et ceux qui ont perdu l’s, genêt, acquêt, arrêt, intérêt, forêt, prêt, apprêt, protêt, revêt.

[129] On y peut joindre legs, dont il vaut mieux ne pas prononcer le g.

[130] Il n’y a véritablement d’e final fermé un peu long que dans des mots étrangers comme heimweh, à cause de l’h, et parce que le mot n’est pas français, sans quoi l’h tomberait, comme il est tombé par exemple dans narguilé.

[131] L’identité de et -ée est déjà constatée par Mᵐᵉ Dupuis. Aux finales en -ées appartient Séez, qu’on écrit plutôt Sées, ainsi qu’il convient, orthographe qui d’ailleurs n’est pas nouvelle. On s’étonne de voir Mᵐᵉ Dupuis prononcer le mot en deux syllabes.

[132] Sauf toujours des mots étrangers, comme Sainte-Wehme, Auerstædt ou Kehl, qui d’ailleurs se francisent parfois, et ne peuvent le faire qu’en s’ouvrant.

[133] Nous éliminons, comme pour l’a, les finales dont il est question page 38: direct, inepte, cercle, auberge, épiderme, alerte, observe, modeste, orchestre, index, etc., qui ont toujours l’e ouvert, au plus moyen.

[134] De même Québec, Gossec, Lamech, Utrech(t), Lubeck, Waldeck, Sénèque, La Mecque, etc. L’e est naturellement long et beaucoup plus ouvert dans évêque et archevêque, qui ont perdu leur s. Il redevient bref dans break, plum-cake, keepsake, qui, pour la prononciation, appartiennent à cette finale.

[135] Voir notamment les finales en -ome et -omme, en -one et -onne. L’e est naturellement long dans guêpe et crêpe, qui ont perdu leur s.

[136] On voit que le passage de complet à complète, ou pauvret à pauvrette, est encore le même que de délicat à délicate: voir page 44. Autrefois ète était fermé (éte) et ne rimait correctement ni avec ette ni avec aite L’Académie n’a adopté ète qu’en 1740; encore a-t-elle excepté athléte, jusqu’en 1835. L’e est également bref dans les noms propres: Huet, Japhet, Élisabeth, Macbeth, Gètes, Spolète, Polyclète, Épictète, Henriette, La Fayette, Colette, Charette, etc. Cependant Crète a l’e plus long, probablement par confusion avec crête.

[137] Au contraire l’e est toujours long dans bête, fête, honnête, tempête, quête, arête, arrête, crête, prête (adjectif et verbe), tête et vête, qui, comme êtes, ont perdu leur s. On notera aussi une sensible différence de quantité entre acquêt et conquête, arrêt et arrête, etc.

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