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Histoire parlementaire de France, Volume 3.: Recueil complet des discours prononcés dans les chambres de 1819 à 1848

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M. Guizot.—S'il ne s'agissait que d'un débat purement personnel, la Chambre peut être sûre que je ne reprendrais pas la parole; mais il y a ici une question de conduite, de principe, d'intérêt public que je ne peux pas laisser passer sans en dire un mot définitif.

Dans une autre enceinte, la première fois que j'ai été forcé d'aborder ce côté de la question, je me suis exprimé ainsi:

«C'est dans cet état que j'ai trouvé l'affaire; je n'hésite pas à le dire, j'ai tenu le gouvernement français pour moralement engagé; il est vrai qu'il ne l'était pas rigoureusement, qu'il pouvait refuser de signer le traité; mais je n'ai pas cru qu'avec de tels antécédents cela fût de mon devoir ni de l'honneur de la France et de son gouvernement.»

La Chambre sait que je n'ai entendu en aucune façon ni éluder ni atténuer la responsabilité qui m'appartient. Oui, je pouvais refuser de signer le traité; je l'ai signé parce que j'ai cru qu'avec tous les antécédents de l'affaire la France était moralement engagée. (Interruption à gauche.)

M. Mauguin.—Elle ne l'était pas.

M. le ministre.—J'ai cru qu'avec tous les antécédents de l'affaire le gouvernement était moralement engagé, et que l'inconvénient de manquer à cet engagement eût été très-grave. La question de la valeur de l'engagement, valeur morale, je le répète, il ne s'agit pas d'une valeur officielle, subsiste donc tout entière. (Interruption à gauche.) Il faut bien, messieurs, que ce langage et ces distinctions soient admis, car c'est là ce qui fait que, dans les négociations diplomatiques, on n'écrit pas tout, on ne signe pas tout; on n'agit pas comme dans les actes de la vie civile; on s'en rapporte aux paroles les uns des autres, aux engagements moraux qui ont une valeur. (Nouvelle interruption.)

M. le président.—Je ne puis laisser aller la discussion comme cela, vous demanderez la parole après M. le ministre si vous le voulez.

M. le ministre.—La vivacité avec laquelle la question est accueillie prouve qu'il faut qu'elle soit vidée jusqu'au fond, et que rien ne reste qui n'ait été dit et entendu.

Je dis, messieurs, que, dans la série des actes d'une négociation, lorsqu'il intervient un acte comme celui dont la Chambre a connaissance, une proposition faite par les plénipotentiaires de deux gouvernements à trois autres gouvernements, et non désavouée d'aucune manière ni à aucune époque par les deux gouvernements qui l'ont faite, il faut bien qu'on ait le droit d'appeler cela un engagement moral, car, s'il n'en était pas ainsi, il n'y aurait aucun engagement moral possible. (Approbation aux centres.—Murmures à gauche.)

C'est un de ces engagements qui ne lient pas un pays. Un pays n'est pas même lié lorsqu'un traité n'est que conclu et signé; le pays n'est lié que lorsque le traité est ratifié. Jusque-là, en effet, la signature peut être refusée. J'ai le premier proclamé ces principes, je les ai pratiqués, et j'en accepte la complète responsabilité. Mais, messieurs, encore une fois, dans le cours d'une négociation, avant que le pays soit lié, avant que le gouvernement lui-même soit lié, il y a des actes qui lient moralement les négociateurs. (Vive interruption.)

M. Mauguin.—Nouveaux ministres, nouvelle politique!

M. le président.—M. Mauguin, vous n'avez pas la parole. Je ne souffrirai pas qu'on interrompe.

M. Mauguin.—On n'a pas besoin de changer les ministres, alors!

M. le ministre.—Je ne conteste en aucune façon qu'un ministère qui fût venu après celui du 15 avril, et qui eût retiré la proposition, qui l'eût désavouée, n'en eût eu le droit; de même que le cabinet du 29 octobre avait le droit, comme je l'ai dit, de refuser la signature. Je n'ai pas besoin qu'on me rappelle ces principes, je viens de les proclamer. Mais je dis, et l'impression que la Chambre a ressentie tout à l'heure lorsque je lui lisais simplement les actes et que je faisais appel à son sentiment instinctif, cette impression est la meilleure preuve que, lorsque deux gouvernements ont fait une proposition formelle à trois autres gouvernements, ils sont moralement engagés envers ces gouvernements-là. (Vive dénégation à gauche.)

M. Mauguin.—Ce sont les ministres, et non pas les gouvernements.

M. Berryer.—Il n'y avait pas d'instruction, ou plutôt il y avait instruction contraire.

M. le ministre.—Quand une telle proposition a été faite, qu'elle n'a pas été faite à l'insu du gouvernement, et qu'elle n'a pas été désavouée, ni retirée, elle a certainement une grande valeur morale. (Nouvelle interruption.)

M. Mauguin.—Il faut qu'on rappelle l'ambassadeur.

M. le ministre.—Mais on ne l'a pas rappelé.

M. le président.—M. le ministre seul a la parole, personne ne peut l'avoir maintenant.

M. le ministre.—En vérité, messieurs, si je cherchais à envenimer ce débat, si je l'avais provoqué, je comprendrais la vivacité qu'on y apporte. Mais je discute une question d'un grand intérêt public, et je n'ai pas la moindre envie que mon pays soit engagé légèrement; je n'ai pas la moindre envie qu'il ne conserve pas jusqu'au bout la liberté de discuter ses intérêts, et de les faire prévaloir dans les négociations. Je vous disais tout à l'heure que le gouvernement avait le droit de ne pas signer ce qu'il avait proposé, qu'il avait le droit de ne pas ratifier ce qu'il avait signé; mais, je dis en même temps que, dans les négociations, dans les rapports de gouvernement à gouvernement, une proposition pareille, faite officiellement par un plénipotentiaire qui n'est pas désavoué, a une valeur immense (Réclamations aux extrémités), et il n'y a que les peuples, que les gouvernements qui ne se respectent pas... (Violentes et nouvelles réclamations.)

M. Mauguin.—Je demande la parole.

M. le ministre des affaires étrangères.—Il n'y a que les gouvernements qui ne se respectent pas qui puissent ne pas tenir compte de telles paroles et de telles propositions.

Si je venais vous dire que j'ai été lié à ce point que je n'ai pas été libre de ne pas signer, si je venais vous dire que j'ai été lié à ce point que je n'ai pas été libre de ne pas ratifier, vous auriez pleinement raison. Mais j'affirme ma liberté, j'accepte ma responsabilité, et dès lors, véritablement, il est étrange que vous veniez contester la valeur de l'engagement moral contracté auparavant. (Approbation au centre.)

Comment! à un homme qui n'élude rien, qui ne méconnaît aucune difficulté, qui ne refuse aucune des parties de sa responsabilité, on vient dire qu'une proposition officiellement faite et non désavouée par un, deux, trois ministères, on vient dire que cela n'est rien!

Une voix à gauche.—Ce sont des paroles.

M. le ministre.—Que ces paroles n'ont aucune valeur! messieurs, il n'y a pas de négociations, il n'y a pas de diplomatie, il n'y a pas de rapports internationaux, si votre doctrine était admise.

Voix nombreuses au centre.—Très-bien! C'est vrai! c'est incontestable! (Agitation aux bancs de l'opposition, et interruption de quelques minutes.)

M. le ministre des affaires étrangères.—Messieurs, en soutenant la doctrine que je soutiens, je crois soutenir l'honneur de mon pays (Nouvelle interruption à gauche.—Au centre: Oui! oui!), l'autorité de ses démarches et l'autorité des paroles de ceux qui parlent ou agissent en son nom.

Je suis de ceux qui pensent qu'aucune démarche faite au nom de la France, aucune parole dite au nom de la France, n'est insignifiante ni légère, et que plus vous attacherez d'importance et de gravité aux paroles et aux actes qui ont lieu au nom du pays, plus vous grandirez le pays en Europe, plus vous lui rendrez les rapports internationaux faciles et sûrs.

Croyez-le bien, ce n'est pas en montrant que les paroles ne sont rien, que les démarches ne comptent pour rien, que les propositions sont sans valeur, qu'il est indifférent d'avoir proposé ou de n'avoir pas proposé, d'avoir désavoué ou de n'avoir pas désavoué, ce n'est pas en agissant ainsi que vous faciliterez les négociations de la France; ce n'est pas ainsi que vous ferez respecter les engagements pris envers la France. Persuadez-vous bien ceci: c'est que vous ne ferez jamais trop d'attention à vos paroles, jamais trop d'attention aux paroles et aux démarches de ceux qui vous représentent. Persuadez-vous bien que, plus on vous verra scrupuleux et exacts dans ce que vous aurez dit ou fait, plus on vous respectera, et meilleurs deviendront vos rapports. (Marques d'approbation.)

Je comprends parfaitement ce que disait tout à l'heure à cette tribune l'honorable M. de Salvandy. Sans doute on a eu des motifs très-graves, M. le comte Sébastiani d'accepter et de proposer, et M. le comte Molé de ne pas désavouer; la situation de l'Europe, l'affaire de Belgique pendante, je comprends que ces motifs aient déterminé le cabinet d'alors à ne pas désavouer ce qu'avait proposé l'ambassadeur. Mais on ne prend pas de telles résolutions gratuitement et sans en supporter les conséquences.

M. Mauguin.—Je demande la parole.

M. le ministre.—On ne consent pas à accepter ce qui a été fait dans une situation difficile pour le retirer huit jours après et n'en tenir aucun compte. La responsabilité consiste à accepter les conséquences de ce qu'on a fait; elle consiste à ne pas prétendre que, lorsqu'on a eu une bonne raison pour ne pas désavouer, on peut ensuite, huit jours, trois mois, deux ans après, n'en tenir aucun compte, et agir comme si on avait désavoué. Non, quand on a pris une résolution, on en porte les conséquences; quand on n'a pas désavoué en pareil cas, on a avoué.

Et ne croyez pas que je vienne ici faire peser sur mon pays un engagement fatal. Non certes; car, comme je le disais tout à l'heure, j'ai été le premier à reconnaître que l'engagement n'était pas définitif. (Interruption.)

C'est inconcevable; je ne dis rien qui puisse blesser personne. (À gauche.—On approuve!)

Je dis que c'est dans l'intérêt de l'autorité de mon pays, dans l'intérêt de la valeur de ses engagements, dans l'intérêt de son crédit en Europe, de sa bonne position extérieure, que je maintiens les principes que je développe ici.

L'honorable M. de Salvandy a fait valoir tout à l'heure ce qu'avait répondu la Russie. Mais nous, nous n'avions rien à répondre, nous avions proposé: la Russie, elle, n'avait pas proposé. (Exclamations diverses.) C'était à elle, c'était aux trois puissances que la proposition avait été faite: nous l'avions faite, nous.

M. Durand (de Romorantin). En tiers.

M. le ministre.—Nous avions fait à deux la proposition adressée à trois; certainement la position des deux et la position des trois n'était pas la même; il était naturel que les trois vinssent faire des observations, demander des changements: c'est ce qui est arrivé. Je sais que l'honorable comte Sébastiani, avec sa prudence et sa sagacité accoutumées... (Nouvelles exclamations aux extrémités.)

Messieurs, je vous en demande pardon, mais vous vous décidez bien vite sur de telles questions, vos impressions sont bien vives, et permettez-moi de vous dire que vous n'avez pas pensé à toutes les difficultés, à toutes les faces de la question.

M. le comte Sébastiani ne siége pas en ce moment à sa place; mais, s'il était là, je le dirais, comme je le dis en son absence; oui, à mon avis, dans la situation où nous étions, avec toutes les difficultés qui pesaient alors sur le gouvernement, l'honorable comte Sébastiani a bien fait. (Mouvements divers.) Il a fait, en acceptant une grande responsabilité, tout ce qui était en lui pour aider son gouvernement à supporter les difficultés de la situation; il a, lui, rempli son devoir; il a acquitté son rôle; c'était à son gouvernement à voir ce qu'il avait à faire après, à le soutenir ou à le désavouer.

Maintenant on a parlé des réserves qu'a faites l'honorable général Sébastiani, qui écrivait à son gouvernement qu'il s'était réservé le droit d'introduire des modifications dans le traité; mais l'honorable M. de Salvandy se trompe, ces réserves ne sont pas dans le protocole.

M. de Salvandy.—Je ne l'ai pas dit.

M. le ministre.—Ces réserves n'ont été nulle part exprimées aux trois puissances auxquelles la proposition avait été faite; nulle part. La proposition a été faite, à en juger par tous les actes officiels, sans réserve, comme une proposition concertée d'avance entre la France et l'Angleterre, et adressée aux trois autres puissances. Les réserves pouvaient conserver leur valeur vis-à-vis de l'Angleterre, mais elles n'en avaient pas, ou du moins elles en avaient très-peu à l'égard des trois autres puissances qui ne les connaissaient pas.

Je ne veux rien dire qui aggrave les difficultés de la situation, rien qui introduise des difficultés personnelles; comme je le disais en commençant, j'ai été forcé à entrer dans ce débat; je ne l'ai pas élevé; je m'étais borné à dire d'une manière générale, et sans rappeler aucun acte, aucune pièce, aucune personne, que j'avais trouvé le traité préparé. Le débat donc qui s'était élevé entre les divers ministères, entre les diverses personnes qui ont pris part au traité, j'ai été forcé d'y entrer, et la Chambre me rendra la justice que je n'ai pas cherché à éluder, à atténuer ma part de responsabilité dans ce grand acte. Mais j'ai cru, puisqu'on m'y forçait, que je devais hautement établir les faits et montrer la part de responsabilité de chacun.

Maintenant quelques membres de cabinets qui ont signé, qui ont laissé signer, qui n'ont pas désavoué le protocole du 12 décembre, veulent avoir été complétement étrangers au traité; ils ne veulent y être entrés pour rien; ils ne veulent avoir aucune part dans la responsabilité de cet acte. J'avoue qu'à leur place ce n'est pas ainsi que j'agirais: je prendrais ma part de la responsabilité, je la prendrais au commencement comme je la prends à la fin. La mienne est à la fin, je ne la discute pas, je l'accepte. Si elle était au commencement, je la prendrais également. Je ne puis admettre qu'un acte comme celui que la Chambre connaît, un acte dans lequel les puissances auxquelles on l'avait adressé ont été sincères, un acte dont elles n'ont connu aucun désaveu, pour lequel on ne leur a demandé aucune modification, je ne puis admettre que cet acte-là ait été insignifiant à leur égard; je ne puis admettre qu'elles ne soient pas autorisées à nous dire qu'elles nous ont crus engagés par notre propre proposition. Je répète devant la Chambre, je dirais volontiers devant Dieu que si c'était là, à cette époque de l'affaire, que se trouvât ma part de responsabilité, si c'était là que les faits me l'avaient assignée, je la prendrais et l'accepterais hautement.

Maintenant, messieurs, j'écarte ce passé, je sors de cette discussion, j'en viens à la situation actuelle. Voyons où nous nous trouvons.

Nous sommes encore libres... (Légère rumeur), le traité n'est pas ratifié. Officiellement, diplomatiquement, nous sommes libres. Les puissances étrangères avec lesquelles nous avons été dans le cours de la négociation, moralement engagés... engagés plus ou moins, je ne discute pas la limite, mais enfin elles ont eu le droit de nous croire, dans une certaine mesure, moralement engagés envers elles; eh bien! aujourd'hui, dis-je, ces mêmes puissances, en vertu de la force de nos institutions, en vertu du poids de l'opinion publique sur le gouvernement, reconnaissent notre liberté.

Pour Dieu, messieurs, ne pensons qu'à sortir honorablement et raisonnablement d'une situation difficile; que cette seule considération nous préoccupe. C'est par là que je termine, c'est le dernier et seul appel que j'adresse à la Chambre. Une grande responsabilité pèse sur le cabinet et sur moi en particulier. Je l'ai acceptée, je l'accepte pleinement sans aucune hésitation. J'ai dit à la Chambre la position que nous avons prise, j'ai dit à la Chambre ce que nous pouvons faire et ne pas faire. J'ai pris le seul engagement que je puisse prendre: c'est de ne pas conseiller la ratification du traité tel qu'il est; j'ai annoncé que, par les complications de la question et de tous les éléments qui s'y rattachent, il était possible, probable, que le temps amènerait à cette situation difficile une solution raisonnable et honorable. C'est à la Chambre à voir si elle veut aider le gouvernement dans ce travail, ou si elle veut l'aggraver pour lui. (Agitation générale.)

CXXIV

Sur les relations commerciales de la France et des États-Unis d'Amérique, et sur la conduite des agents diplomatiques et consulaires français.

—Chambre des députés.—Séance du 21 mai 1842.—

En octobre 1841, les États-Unis d'Amérique avaient modifié les tarifs de leurs règlements de douane au détriment du commerce étranger. Dans la discussion du budget de 1843, M. Legentil, député de la Seine, éleva, à cette occasion, des plaintes, non-seulement contre la mesure américaine, mais contre la négligence ou l'inefficacité des agents diplomatiques et consulaires français. Je lui répondis:

M. Guizot.—L'honorable préopinant a raison. Les mesures prises récemment par les États-Unis d'Amérique et les nouvelles mesures annoncées sont très-graves; elles pourraient être, elles ont déjà été très-fâcheuses pour notre commerce, et le gouvernement du roi en est aussi préoccupé que le commerce lui-même.

Mais, comme le disait tout à l'heure l'honorable préopinant, nous ne pouvons nous armer ici d'un droit; les États-Unis sont les maîtres de faire chez eux, pour leur législation intérieure, pour leurs tarifs, les lois dont ils croient avoir besoin.

Quels moyens avons-nous de lutter contre ces tarifs quand ils nous deviennent nuisibles? Nous n'en avons que deux, les négociations et les représailles.

Les négociations! je voudrais que l'honorable préopinant, je voudrais que la Chambre tout entière put connaître la vivacité, l'insistance des représentations, je ne veux pas me servir d'un autre mot qui serait blessant, des représentations adressées au gouvernement des États-Unis par le gouvernement français, non pas hier, non pas depuis deux mois, mais depuis six mois, depuis un an, depuis qu'il a été question des mesures dont il s'agit. Le ministre du roi à Washington n'a cessé d'agir auprès du gouvernement des États-Unis; il est entré en relation avec les hommes considérables du pays, avec les représentants des différents États, et il a essayé, il essaye tous les jours de se servir des intérêts divers de ces différents États pour agir sur le gouvernement fédéral lui-même.

Quel sera le résultat de ces représentations, de ces négociations? Il m'est impossible de le dire aujourd'hui à la Chambre. Les États-Unis, personne ne peut se le dissimuler, sont dans un état de crise intérieure, de crise financière très-grave: ils se croient obligés de changer leur système de législation commerciale; ils ont cherché, dans l'exhaussement des tarifs et dans la protection de la fabrication intérieure, des ressources qu'ils n'y avaient pas cherchées auparavant. Les représentations que nous pourrons leur adresser, les représailles dont nous pourrons user, seront-elles suffisantes pour les faire revenir sur les mesures qui ont déjà été prises, ou pour les arrêter dans les mesures nouvelles qu'ils veulent adopter? J'y ferai tout ce qui sera en mon pouvoir; les agents du roi emploieront tous les moyens légitimes, réguliers; mais encore une fois, l'honorable préopinant le sait comme moi, il m'est impossible de répondre du résultat des négociations.

Quant aux représailles, le préopinant a posé lui-même le principe; les représailles sont bonnes si elles pèsent davantage à celui contre qui elles sont faites qu'à celui qui les fait. Ainsi, sans aucun doute, si nous pouvons user de représailles qui infligent aux États-Unis une perte, une souffrance plus grande que celle que nous en ressentirons nous-mêmes, il n'y a pas à hésiter; quand les moyens de négociation seront épuisés, s'il est évident que ces moyens ne suffisent pas, il faudra bien employer les représailles, mais à la condition qu'elles seront plus nuisibles aux États-Unis qu'à nous-mêmes.

Eh bien, les deux grands moyens de représailles que nous avons, c'est d'augmenter les droits sur la navigation américaine, et les droits d'importation sur les matières premières venant des États-Unis.

Quant aux droits d'importation sur les matières premières, qui sont les éléments de notre grande industrie, il serait très-grave d'élever ces droits, le droit sur les cotons, par exemple.

M. de Beaumont.—Je ne l'ai pas conseillé.

M. le ministre des affaires étrangères.—Il faut bien que j'examine la question, que je parle des divers moyens de représailles. L'honorable préopinant dit qu'il n'a pas indiqué celui dont je viens de parler. Je crois qu'il a raison de ne pas l'indiquer, car l'aggravation de ce droit nous serait probablement plus nuisible à nous qu'aux États-Unis.

Quant aux droits de navigation, c'est autre chose. La Chambre me permettra de ne pas exprimer d'opinion arrêtée à ce sujet. (Oui! oui!) J'ai fait et je fais examiner à fond la question en ce moment; je la fais examiner par les hommes les plus éclairés en cette matière, éclairés soit par l'étude scientifique, soit par l'expérience, par la pratique. Quand j'aurai recueilli leur avis, quand je serai entouré de toutes les lumières qu'ils peuvent me donner, je proposerai au gouvernement du roi les mesures qui me sembleront praticables, toujours guidé par ce principe que les représailles ne seront bonnes qu'autant qu'elles pèseront sur les États-Unis plus que sur nous-mêmes.

C'est là, messieurs, quant aux États-Unis et à nos relations avec eux, tout ce qu'il m'est permis de dire en ce moment. Je puis assurer à l'honorable préopinant que je sens, comme lui, toute la gravité de la situation, que le gouvernement du roi en est fortement préoccupé, et que nous ferons tout ce qui sera en notre pouvoir pour en détourner les maux; s'il n'était pas possible de les détourner, nous donnerions le plus tôt possible au commerce tous les avis qui pourraient lui être utiles.

Je prie toujours la Chambre de bien remarquer qu'il s'agit ici de mesures intérieures que le gouvernement des États-Unis a le droit de prendre, contre lesquelles nous n'avons aucun droit précis à invoquer, et que nous ne pouvons attaquer que par la voie des représentations ou par celle des représailles.

Avant de descendre de la tribune j'ai quelques mots à dire sur les observations de M. de Beaumont. Je crois pouvoir assurer que nos agents apportent, en ce qui concerne les voyageurs français à l'étranger, beaucoup de zèle et d'assiduité, qu'ils se donnent toutes les peines possibles pour leur épargner les embarras et leur procurer les agréments du voyage.

J'ajoute que les Français ne sont pas, à cet égard, dans une autre situation que les autres étrangers; ils ne sont pas soumis à des précautions particulières, ils n'ont pas de mesures spéciales à prendre ou à subir; ils sont dans la condition générale: et j'affirme que nos agents se donnent beaucoup de peine pour leur en épargner les ennuis.

Il est très-vrai que, dans certains cas, sur certains points, nous n'avons pas un nombre d'agents suffisant, ni des agents suffisamment rétribués. J'ai déjà eu l'honneur de le dire plusieurs fois à la Chambre, les agents de plusieurs autres États sont, sur plusieurs points, plus nombreux et mieux rétribués que les nôtres: aussi peuvent-ils faire plus de démarches et exercer plus d'action.

La Chambre sait que, dans le budget qui lui est actuellement présenté, je lui ai proposé de remédier sur quelques points à cet inconvénient. À mesure que je reconnaîtrai ces inconvénients, je mettrai sous les yeux, du gouvernement d'abord et des Chambres ensuite, les remèdes que je croirai possibles.

Quant aux consuls, l'honorable préopinant parlait tout à l'heure de la convenance qu'il pourrait y avoir à ce qu'ils fussent nommés et dirigés par le ministre du commerce.

Je lui représenterai que cela est impossible. Il n'y a que le ministre des affaires étrangères qui puisse accréditer au dehors des agents. Le ministre du commerce est un ministre tout intérieur, qui n'agit que dans les limites du royaume. Le ministre des affaires étrangères est le seul qui ait action au dehors, qui ait des rapports avec les gouvernements étrangers, et qui puisse accréditer et soutenir auprès d'eux soit des agents politiques, soit des agents commerciaux.

J'ajoute que, partout où nous avons des agents politiques, nos consuls ne s'occupent pas de politique; ils n'ont rien à démêler avec la politique, ils ne s'occupent que de commerce. C'est là où nous n'avons pas d'agents politiques, là où les consuls sont en même temps agents commerciaux et agents politiques qu'il faut bien qu'ils s'occupent de politique, et qu'ils donnent à l'État les renseignements politiques dont il a besoin. Il est vrai que cela est quelquefois nuisible, et qu'il vaudrait mieux que partout les agents commerciaux et les agents politiques fussent distincts; mais cela coûterait fort cher, et la Chambre sait à quel prix elle pourrait procurer au pays cet avantage-là.

Je sens l'importance d'avoir des agents consulaires bien au courant des intérêts commerciaux, qui transmettent au gouvernement tous les renseignements commerciaux possibles; et, à ce sujet, je dirai à l'honorable préopinant que les consuls sont assujettis à donner, tous les semestres, des renseignements spéciaux et complets sur les faits de production, de consommation et de commerce des différents pays dans lesquels ils résident; j'ajouterai que ces renseignements sont en effet transmis tous les six mois, qu'ils sont communiqués à M. le ministre du commerce. Nous avons, par exemple, et M. le ministre du commerce a entre les mains tous les tarifs de tous les pays étrangers. Sans nul doute il serait très-utile de les faire traduire et de les publier; mais c'est une assez grande dépense, pour laquelle nous n'avons pas d'argent: il n'y a pas de fonds au budget.

Un membre.—Demandez-en!

M. le ministre.—Je ne demande pas mieux. Je suis d'avis qu'il serait de la plus grande utilité de publier régulièrement, non-seulement ces tarifs, mais la plupart des renseignements commerciaux transmis par les consuls. C'est au gouvernement à faire le choix, à démêler les renseignements qui doivent être publiés et ceux qui ne doivent pas l'être. Je suis d'avis d'une publication régulière de ces états, et je m'engage volontiers à demander à la Chambre des fonds pour cette publication. (Très-bien!).

M. Chaix-d'est-ange.—Je demande à dire un mot de ma place. C'est à propos de ces contrefaçons qui affligent notre commerce, et dont l'existence vient d'être signalée à MM. les ministres. Je voulais signaler cet état de choses avec tous ses dangers.

À l'étranger, on contrefait nos produits, nos noms, nos marques; on inonde le monde de produits mal fabriqués qui portent les marques et les noms de nos fabricants, et l'on discrédite ainsi nos meilleures maisons. C'est là, messieurs, un inconvénient très-grave qui vient d'être justement signalé à l'attention de la Chambre et à celle du gouvernement.

Mais voici ce qui arrive: c'est qu'en France on veut faire la même chose, et rendre la pareille aux étrangers; on contrefait leurs produits et leurs marques pour un commerce, par exemple, qui a pour l'exportation plus d'importance qu'il ne semble d'abord en avoir, c'est le commerce des parfumeries. Les produits étrangers de ce genre sont contrefaits en France, on y met le nom et la marque anglaise. Les maisons anglaises se plaignent, elles font des procès, et les tribunaux français condamnent à des indemnités.

M. Chégaray.—Ils font bien.

M. Chaix-d'est-ange.—J'entends un honorable magistrat me dire: Ils font bien. Je ne le crois pas; mais je ne dis pas le contraire, de sorte que ce n'était pas la peine de m'interrompre. Seulement voici l'objet de mon observation.

Si nos cours royales font très-bien de condamner, il faudrait que les maisons françaises qui sont contrefaites pussent obtenir à l'étranger la même justice. Eh bien, c'est cet état de choses que je veux signaler, et je trouve que cet esprit de justice qu'on approuve, en disant que nos cours royales font très-bien, devrait trouver de l'écho ailleurs. Je voudrais que nos intérêts fussent assez bien défendus à l'étranger pour qu'ils y obtinssent la même justice que ceux des étrangers en France.

Je demande donc l'égalité, la réciprocité; ou bien que nous puissions user ici de représailles par la contrefaçon, ou bien qu'on n'ait pas le droit de nous contrefaire à l'étranger. (Très-bien! très-bien!)

M. le ministre des affaires étrangères.—Je dirai que plusieurs fois déjà nous avons réclamé, auprès de quelques gouvernements étrangers, contre l'impunité dont ces contrefaçons jouissaient chez eux; mais il faut les amener à un changement dans leur législation intérieure. Ce changement, nous l'avons sollicité et nous persisterons à le solliciter; mais pour atteindre au but il faut deux choses: d'abord que les étrangers changent leur législation, et ensuite que nos négociants entament des procès, qu'ils portent leurs plaintes et en acceptent les charges et les lenteurs.

M. Chégaray, député des Basses-Pyrénées, examina l'état de nos relations commerciales avec l'Espagne, dans leurs rapports avec les anciens traités et avec nos intérêts actuels.

M. le ministre des affaires étrangères.—Je veux dire un seul mot en réponse à l'honorable M. Chégaray.

Nous sommes depuis longtemps en réclamation auprès du gouvernement espagnol pour l'exécution des anciens traités, et les dernières propositions de loi qui ont eu lieu à Madrid me donnent l'occasion de renouveler nos plaintes de la manière la plus vive.

Nous avons ici, comme dans la question des États-Unis, la voie des représentations et la voie des représailles. Seulement, la voie des représailles nous est, quant à présent, plus difficile en Espagne qu'ailleurs, car c'est au nom de nos anciens traités que nous réclamons. Si nous violions nous-mêmes ces traités, si nous en sortions, ce qui aurait lieu par les représailles, nous nous ôterions l'argument que nous employons en ce moment; il faut donc que l'inutilité de cet argument soit démontrée pour que nous en venions aux représailles.

M. Glais-Bizoin.—Je demande la parole. (Aux voix! aux voix!)

M. le président.—Avant de mettre le chapitre aux voix, il est nécessaire que M. Glais-Bizoin explique son amendement.

La parole est à M. Glais-Bizoin.

M. Glais-Bizoin proposa le rejet de l'augmentation de 15,000 fr. réclamée pour le traitement de l'ambassadeur de France à Naples.

M. Guizot, ministre des affaires étrangères.—Je dois répondre aux observations de l'honorable préopinant.

Il a dit que tous nos agents pourraient également produire des preuves que leur traitement ne suffit pas à la situation qu'ils occupent; il a parlé des fonctionnaires publics en général. Je bornerai ma réponse à ce qui concerne nos agents à l'extérieur; ce sont les seuls dont j'aie à parler aujourd'hui.

La preuve que cette assertion n'est pas exacte, c'est que je ne réclame pas pour tous les ambassadeurs et agents, et que la plupart d'entre eux se contentent parfaitement de la situation que le budget leur a faite.

Quant à l'ambassadeur de Naples, j'ai mis sous les yeux de la commission les renseignements les plus détaillés pour prouver que son traitement était insuffisant, complétement insuffisant pour les dépenses de sa situation. La commission a été convaincue par les détails que j'ai mis sous ses yeux, et si je pouvais les mettre sous les yeux de la Chambre, je ne fais pas le moindre doute que sa conviction serait la même.

L'ambassadeur de France à Naples a un traitement très-inférieur à celui des autres ministres étrangers près la même cour. Aussi, c'est sur sa propre fortune, en grevant sa propre fortune, qu'il a suffi jusqu'ici aux dépenses de sa situation.

Les renseignements que j'ai donnés à la commission ont porté la conviction dans son esprit, et je n'hésite pas à affirmer à la Chambre que l'augmentation est nécessaire pour que notre ambassadeur puisse suffire aux charges qui lui sont imposées.

La Chambre vota l'augmentation demandée.

M. le président.—La Chambre passe à la délibération du budget du ministère de l'instruction publique.

M. Étienne.—Je demande la parole sur un chapitre qui ne se trouve pas au budget des affaires étrangères. (Hilarité.)

Je voulais rappeler qu'en 1839 un crédit de 500,000 francs avait été voté pour la construction du palais de l'ambassade à Péra. Ces 500,000 fr. ont été employés; ont-ils suffi à l'achèvement du palais, ou bien un nouveau crédit sera-t-il demandé dans l'exercice prochain?

M. le ministre des affaires étrangères.—La somme de 500,000 francs n'a pas suffi pour la construction du palais; il sera nécessaire d'y ajouter, au moins d'après les renseignements que j'ai reçus jusqu'à présent, la somme de 560,000 fr. (Rires à gauche.) Je n'ai pas voulu demander ce crédit supplémentaire à la Chambre avant d'avoir complétement recueilli les renseignements qui en démontrent la nécessité. Il m'a paru que, puisqu'il y avait eu erreur dans l'évaluation primitive, il fallait que les causes de cette erreur fussent mises sous les yeux de la Chambre avec la plus évidente clarté. Je me suis donc décidé, malgré quelques inconvénients attachés à cette résolution, à attendre des renseignements plus complets pour proposer à la Chambre ce nouveau crédit supplémentaire.

CXXV

Sur le projet de loi relatif à la régence.

—Chambre des députés.—Séance du 18 août 1842.—

Après la mort du duc d'Orléans (13 juillet 1842), les Chambres furent convoquées en session extraordinaire. Elle s'ouvrit le 26 juillet. Un projet de loi fut présenté le 9 août à la chambre des députés pour régler la question de la régence. Le rapport en fut fait le 16 août par M. Dupin. La discussion s'ouvrit le 18. M. de Lamartine attaqua le projet et réclama pour les femmes le droit à la régence. Je lui répondis immédiatement. Après un long et solennel débat dans les deux Chambres, le projet présenté par le gouvernement fut adopté.

M. Guizot.—Messieurs, en entrant dans ce débat, je veux en écarter sur-le-champ ce qui tout à l'heure a été près d'y rentrer par les discours de quelques-uns des honorables préopinants; je veux dire ces perspectives de parti, ces pressentiments sinistres qui s'étaient élevés dans beaucoup d'esprits au moment où le malheur nous a frappés. Rien de semblable n'y peut aujourd'hui prendre place. Sans doute la gravité de la question, les difficultés possibles de l'avenir ont de quoi nous préoccuper fortement. À Dieu ne plaise que je dise un mot, un seul mot qui puisse affaiblir l'impression du vide immense que laisse au milieu de nous le noble prince que nous avons perdu. (Très-bien! très-bien!) Les meilleures lois ne le remplaceront pas. (Marques prolongées et très-vives d'assentiment.) Mais en gardant toute notre tristesse, nous pouvons, nous devons avoir pleine confiance. Je renvoie ceux qui en douteraient au spectacle auquel nous assistons tous depuis un mois. Ce sentiment national si profond, si rapide, si unanime, qui a éclaté avec notre malheur, ce sentiment européen qui a si bien répondu au sentiment national, ce deuil de notre prince royal porté avec une douleur si vraie par toute la France, accepté avec une émotion si sincère par toute l'Europe, voilà notre réponse aux alarmes, aux craintes ou aux espérances sinistres.

Oui, la dynastie de Juillet a essuyé un affreux malheur; mais de son malheur même est sortie à l'instant la plus évidente démonstration de sa force (Mouvement), la plus éclatante consécration de son avenir. (Très-bien!) Plus l'épreuve qu'elle subissait a paru grave, plus la nécessité de sa présence et la grandeur de sa mission ont été vivement et universellement senties. (Très-bien!) Elle a reçu partout, chez nous, hors de chez nous, le baptême des larmes royales et populaires. (Nouvelles marques d'approbation.) Et le noble prince qui nous a été ravi a appris au monde, en nous quittant, combien sont déjà profonds et assurés les fondements de ce trône qu'il semblait destiné à affermir. (Mouvement.) Il y a là une joie digne encore de sa grande âme et de l'amour qu'il portait à sa patrie. (Sensation.)

J'écarte donc complétement toute perspective sinistre, toute préoccupation étrangère à la question même. Non, nous n'avons pas besoin d'apporter, à la dynastie que nous soutenons, des forces extraordinaires, des forces d'emprunt, contraires aux intérêts et aux libertés du pays. Nous pensons, comme vous, que c'est dans les intérêts, dans les libertés du pays qu'elle doit pousser, qu'elle a déjà poussé ses racines; ce n'est que là que nous les cherchons. (Très-bien! très-bien!) Nous nous sentons parfaitement libres de faire une loi dégagée de toute préoccupation extraordinaire: l'avenir nous appartient; notre loi le réglera; le règle-t-elle sagement? Voilà toute la question. Que la Chambre soit libre comme nous; nous ne demandons à personne une concession, une complaisance; nous invitons la Chambre à voter cette loi aussi librement, aussi sévèrement que toute autre mesure politique, sans rien accorder aux circonstances, aux exigences du moment: nous n'en avons pas besoin. (Très-bien! très-bien!).

Avons-nous le droit de faire cette loi?

Question étrange, à ne consulter que le simple bon sens! Quand il survient dans la vie d'un peuple quelque circonstance extraordinaire, quelque grande question imprévue, par qui convient-il, selon le simple bon sens, qu'elle soit traitée et décidée?

Évidemment par les pouvoirs les mieux instruits des intérêts de la société, les plus exercés à la gouverner.

Les premières conditions d'un bon gouvernement, ce sont l'expérience et l'autorité que donne l'expérience prouvée. (Très-bien!) Quand on a sous la main des pouvoirs qui réunissent ces conditions, les écarter au moment où l'on a le plus besoin d'eux, pour appeler un pouvoir extraordinaire, un pouvoir nouveau venu, messieurs, c'est de la folie!

Si des pouvoirs vous regardez aux affaires elles-mêmes, vous arrivez au même résultat. Quand une affaire extraordinaire survient, comment doit-elle être traitée, résolue? Elle doit être mise, autant qu'il se peut, en harmonie avec l'état permanent et régulier de la société; elle doit être adaptée aussi promptement, aussi complétement qu'il se peut, à ce qui était hier, à ce qui sera demain. L'esprit de suite, le ménagement prudent des transitions; le maintien du lien continu qui doit unir tous les actes, tous les jours de la vie sociale, c'est là une nécessité impérieuse. Il n'y a que les pouvoirs permanents, les pouvoirs habituels de la société qui soient en état et en disposition de résoudre les affaires avec cette mesure, avec ce bon sens, en tenant compte de tout, en adaptant leurs décisions aux intérêts réguliers et permanents de la société. (Très-bien!)

Supposez, après les trois journées, une assemblée spéciale, une convention nationale convoquée pour accomplir politiquement la révolution de juillet: que serait devenue la France?

Je n'hésite pas à le dire: la façon dont la révolution de Juillet a été saisie et accomplie par les pouvoirs constitutionnels ordinaires, tels qu'ils pouvaient être en ce moment, a fait le salut de la France, et fera sa gloire dans l'avenir. (Approbation.)

Et aujourd'hui nous n'aurions pas le droit, nous pouvoirs constitutionnels, établis, éprouvés depuis douze ans, nous n'aurions pas le droit de fonder une loi de régence, quand nos devanciers ont fait une royauté en 1830! (Mouvements divers.) Messieurs, cela choque le simple bon sens, cela est contraire aux plus évidentes leçons de l'expérience du monde et de la nôtre.

On parle de principes, de la souveraineté nationale, de limites assignées au droit et à l'action du gouvernement, même libre et constitutionnel.

Si l'on veut dire par là que la société et le gouvernement ne sont pas une seule et même chose, que le gouvernement, même libre et constitutionnel, n'a pas le droit de tout faire, qu'il peut arriver tel jour, telle occasion où la société ait droit et raison de se séparer de son gouvernement, on exprime une grande vérité, que j'admets pour mon compte pleinement, que de nos jours, après ce qui s'est passé en 1830, il n'y a pas grand mérite à reproduire, et qui n'est, en ce moment, d'aucune application.

Mais si on prétend qu'il existe ou qu'il doit exister au sein de la société deux pouvoirs, l'un ordinaire, l'autre extraordinaire, l'un constitutionnel, l'autre constituant, l'un pour les jours ouvrables (permettez-moi cette expression), l'autre pour les jours fériés, (On rit.) en vérité, messieurs, on dit une chose insensée, pleine de dangers et fatale. Le gouvernement constitutionnel, c'est la souveraineté sociale organisée. Hors de là, il n'y a plus que la société flottant au hasard, aux prises avec les chances d'une révolution. On n'organise pas les révolutions; on ne leur assigne pas une place et des procédés légaux dans le cours des affaires de la société. Aucun pouvoir humain ne gouverne de tels événements; ils appartiennent à un grand maître, Dieu seul en dispose; (Mouvement.) et quand ils éclatent, Dieu emploie, pour reconstituer la société ébranlée, les instruments les plus divers.

J'ai vu, dans le cours de ma vie, trois pouvoirs constituants: en l'an VIII, Napoléon; en 1814, Louis XVIII; en 1830, la chambre des députés. Voilà la vérité, la réalité: tout ce dont vous avez parlé, ces votes, ces bulletins, ces appels au peuple, ces registres ouverts, tout cela, c'est de la fiction, du simulacre, de l'hypocrisie. (Marques très-vives d'approbation au centre.—Murmures aux extrémités.)

Eh bien, ces trois pouvoirs constituants que nous avons vus, les seuls qui aient vraiment constitué quelque chose, quelque chose qui ait duré, avaient-ils été prévus, avaient-ils été organisés d'avance? Non, ils ont été des instruments entre les mains du grand maître.

Soyez tranquilles, messieurs; nous, les trois pouvoirs constitutionnels, nous sommes les seuls organes légitimes et réguliers de la souveraineté nationale. Hors de nous, il n'y a, je le répète, qu'usurpation ou révolution. (Approbation.)

J'ai écarté toutes les préoccupations de parti; j'ai écarté toutes les prétentions d'une fausse science; j'aborde maintenant la loi elle-même.

On lui reproche d'être incomplète.

Je réponds qu'elle l'a voulu, et qu'en le voulant elle a cru faire acte de sagesse.

C'est une vaine et dangereuse prétention que celle de prévoir et de régler d'avance, en pareille matière, tous les cas possibles, toutes les hypothèses imaginables; on se crée ainsi des difficultés qu'on n'est pas chargé de résoudre, et on les résout mal. (Au centre. C'est vrai.) On ne fait pas de la politique par voie de prophétie (Rire approbatif au centre.), loin de la nécessité et des faits. C'est déjà bien assez d'avoir la sagesse nécessaire au présent, avec le fardeau de la responsabilité sur les épaules et le flambeau des faits devant les yeux. (Mouvement.)

La loi résout-elle toutes les questions que le besoin actuel des affaires et des circonstances de la société nous commande de résoudre? Les résout-elle selon l'intérêt du pays?

Voilà tout ce qu'on a le droit de lui demander, et tout ce qu'elle doit faire. J'affirme qu'elle le fait.

Deux questions dominent ici toutes les autres.

La régence sera-t-elle déférée de droit et en vertu d'un principe général, ou bien par voie d'élection et en vertu d'un acte spécial des pouvoirs constitutionnels?

Voilà la première question.

Voici la seconde: Dans l'une ou l'autre hypothèse, à qui la régence sera-t-elle déférée?

Je pose les deux questions dans leur simplicité; je vais les prendre l'une après l'autre.

Il faut qu'il soit bien entendu que la régence déférée, non pas de droit ni en vertu d'un principe général, mais dans chaque cas de minorité, et par un acte spécial des trois pouvoirs, c'est la régence élective.

Eh bien, nous pensons que la régence élective n'est en harmonie ni avec notre ordre politique ni avec notre ordre social...

M. de Tocqueville.—Je demande la parole.

M. le ministre.—Je dis que la régence élective n'est nullement en harmonie avec notre ordre politique.

Messieurs, le mérite et la véritable efficacité du gouvernement constitutionnel consistent, comme le disait très-bien votre honorable rapporteur, dans la bonne répartition des rôles et des forces entre les pouvoirs.

La royauté a pour mission spéciale de porter dans le gouvernement l'action et la fixité; elle est pouvoir exécutif et pouvoir perpétuel.

Je n'hésite pas à dire que, dans l'ensemble de nos institutions et de notre état social, la royauté n'a pas trop de force pour accomplir cette double mission.

Quand le roi est mineur, inévitablement la royauté est plus faible, et comme pouvoir exécutif et comme pouvoir perpétuel; elle est, soit en réalité, soit dans l'opinion, plus faible que ne le prévoit et ne le veut le régime constitutionnel.

Irons-nous l'affaiblir encore? Irons-nous fortifier le principe mobile aux dépens du principe stable, accroître la force d'impulsion variable aux dépens de la force d'action fixe? C'est là ce qu'on vous demande en vous demandant de rendre la régence élective.

Nous, en établissant la régence de droit, nous conservons aux divers pouvoirs leur rôle, leur situation, leurs forces, ainsi que la charte l'a prévu et réglé; nous maintenons la distribution des forces entre les différents pouvoirs, telle que l'a établie le régime constitutionnel complet et dans sa vigueur.

Vous, en établissant la régence élective, vous entendez changer la distribution des forces entre les pouvoirs, vous entendez altérer l'équilibre constitutionnel; vous entendez porter au sein de l'un de ces pouvoirs une force nouvelle, et l'y porter au moment même où le pouvoir royal est naturellement affaibli.

Non-seulement cela est, mais l'honorable M. de Lamartine, tout à l'heure, vous demandait formellement de le faire en vous disant bien ce que c'était, en vous expliquant bien que vous aviez là un moyen d'augmenter votre pouvoir, un moyen de rompre l'équilibre constitutionnel régulier. (Voix diverses. Oui! oui!—Non! non!) Je ne suppose pas, et personne, je crois, ne soutiendrait que, quand la Charte a réglé les fonctions et les forces des pouvoirs, elle a trop fait pour la royauté ou trop pour la Chambre des députés; non, je respecte davantage la Charte; je tiens les pouvoirs pour bien et légitimement distribués; je veux maintenir cette distribution; vous, vous voulez la rompre au profit du pouvoir électif, du pouvoir mobile... (Murmures à gauche.)

En vérité, je m'étonne de ces murmures, je croyais que vous professiez tout haut cette intention dont l'honorable M. de Lamartine vient de vous louer. (Réclamations.) Nous ne mettons, nous, ni réticence ni hypocrisie; nous disons les choses telles qu'elles sont. Eh bien, nous croyons que l'équilibre établi par la Charte est bon, nous voulons le maintenir; vous voulez l'altérer, pendant les minorités, au profit de l'un des grands pouvoirs.

M. Lherbette.—Je demande la parole.

M. le ministre des affaires étrangères.—Nous ne croyons pas cela bon, et c'est pour cela que nous disons que la régence élective ne convient pas à notre ordre politique; elle ne convient pas davantage à notre état social.

On parle beaucoup, messieurs, de la démocratie moderne, et quand on fait des lois pour elle, on oublie souvent sa nature et ses vrais intérêts.

C'est la nature, c'est l'intérêt, c'est l'honneur d'une grande société démocratique d'obéir à des principes généraux, à des droits fixes et préétablis.

Dans la société, la démocratie fait une large part aux volontés individuelles; dans le gouvernement, au contraire, elle restreint tant qu'elle peut leur empire et leur action; et c'est un profond instinct de sa nature et de son intérêt qui la fait agir ainsi.

Dans les monarchies absolues, il y a une volonté individuelle grande, haute, forte, qui peut abuser beaucoup du pouvoir, beaucoup, mais qui, enfin, est capable de l'exercer.

Dans les sociétés aristocratiques, il y a un certain nombre de volontés individuelles vouées aux fonctions, aux affaires publiques, et qui se concertent aisément pour les diriger avec intelligence et suite: elles peuvent abuser aussi; mais enfin elles sont là, capables de prendre et d'exercer le pouvoir.

Dans les grandes sociétés démocratiques, tous les individus sont petits, faibles, passagers. Voilà pourquoi la démocratie, dans son juste instinct, leur fait une petite part dans le gouvernement: elle a raison; ils y porteraient leur petitesse, leur mobilité, leur faiblesse.

La démocratie veut des principes généraux, des lois fixes, immuables, auxquelles elle puisse obéir avec sûreté et dignité.

C'est ainsi que les grandes sociétés démocratiques modernes veulent et peuvent être organisées.

Eh bien, ce qu'on vous demande de faire, au milieu de la plus grande société démocratique moderne, c'est d'introduire dans l'élément monarchique, dans sa représentation temporaire, le principe électif, c'est-à-dire de donner, aux défauts et aux imperfections de la démocratie, une grande facilité pour pénétrer jusque dans cette partie du gouvernement qui est destinée à les contre-balancer et à les combattre. (Très-bien!)

Messieurs, ai-je donc raison de dire que ce que l'on vous demande est aussi contraire à notre état social qu'à notre ordre politique, aussi contraire aux intérêts de la démocratie qu'aux intérêts de la royauté? On vous demande d'affaiblir la royauté pendant la minorité du roi pour abaisser et compromettre la démocratie pendant le même temps et par la même épreuve: cela est-il bon, messieurs?

Je n'hésite pas, pour mon compte, et avec la plus grande conviction, à repousser la régence élective comme une mauvaise institution, mauvaise pour notre gouvernement, mauvaise pour notre société; je n'hésite pas à maintenir la régence de droit comme la conséquence naturelle de la Charte et de l'état social de la France.

Maintenant la régence de droit une fois admise, à qui sera-t-elle déférée? Qui sera régent de droit?

La réponse est simple. Celui qui serait roi, si le trône était vacant. (Mouvements divers.)

Je ne puis pas faire une autre réponse que celle-là: Celui qui serait roi, si le trône était vacant. C'est lui qui, par nos institutions, est présumé le plus capable d'exercer la royauté; c'est lui qui est en même temps le plus intéressé à ce que la royauté soit bien exercée et demeure intacte, car c'est à lui qu'elle peut revenir.

Ainsi les grandes raisons, les raisons simples qui dominent la politique, ces raisons-là sont décisives en faveur de la régence masculine.

Mais les femmes, les mères!

Messieurs, la Chambre permettra que je traite cette question simplement et sévèrement. Je porte un trop profond respect à la noble princesse dont la pensée est ici dans tous les cœurs, et elle a l'esprit trop haut pour que je ne croie pas lui rendre l'hommage le plus digne d'elle en disant ce que je regarde comme la vérité, et comme l'intérêt de ses fils aussi bien que du pays.

Jetons d'abord un coup d'œil sur les lois providentielles du monde, sur ces lois qu'on peut appeler d'institution divine, tant elles sont généralement et constamment adoptées par les hommes.

En voici une. Les femmes sont vouées à la famille; leur destinée, c'est le développement individuel dans les affections de la vie domestique et les relations de la vie sociale. Le pouvoir politique n'y entre pas naturellement. De tout temps et en tout pays, sauf un petit nombre d'exceptions, ce principe a été adopté et pratiqué.

Plusieurs voix à gauche.—Au contraire!

M. le ministre.—Je dis: Sauf un petit nombre d'exceptions. Les honorables préopinants ne peuvent pas supposer que je les ignore. (Rires au centre.)

M. Chapuys-Montlaville.—Vous les connaissez très-bien; seulement vous oubliez de les citer.

M. le ministre.—Je vais vous dire quelle a été, à mon avis, la cause, l'origine de ces exceptions, de ces dérogations au droit commun.

Elles sont provenues précisément de l'empire des principes et des idées de famille, du respect pour les droits et les existences de famille. C'est parce que la royauté était considérée comme un patrimoine, c'est parce que le principe de l'hérédité royale était poussé jusqu'à ses dernières conséquences, que les femmes ont été quelquefois, dans un petit nombre de pays, appelées par exception, je pourrais dire par hasard, au pouvoir politique et à la royauté.

Maintenant, là où ces motifs d'exception n'existent pas, là où il n'y a plus de telles causes, là où la royauté n'est pas un pouvoir patrimonial, mais un pouvoir public, là où le principe de l'hérédité royale n'a pas été poussé jusqu'à cette extrême conséquence, d'être appliqué aux femmes, irez-vous, par voie d'exception, par voie d'élection, donner aux femmes le pouvoir politique contre le droit commun, contre le bon sens humain, contre les lois providentielles qui régissent le monde? (Réclamations à gauche.)

Voilà la question posée dans sa vérité, et, pour mon compte, je dis que la poser ainsi, c'est la résoudre.

À cette idée générale, simple, qui a été, je le répète, la règle commune du monde, on oppose des considérations historiques, pratiques, morales. Je ne les réfuterai pas; j'en indiquerai d'autres plus fortes, à mon avis, et qui concluent en sens opposé.

M. de Lamartine vous en a cité lui-même quelques-unes; il a parlé de l'esprit militaire bon à conserver dans un grand pays continental, et qui certes n'appelle pas le pouvoir politique des femmes. Il a parlé de nos institutions, de nos libertés, de la liberté de la presse. J'accepte ce qu'il en a dit. Seulement, j'avoue que je n'ai pas, comme lui, l'espérance que la licence de la presse s'arrête devant une femme; je souhaite me tromper, mais je ne l'espère pas. (On rit.)

Voici d'autres considérations qui ont échappé à l'honorable M. de Lamartine, et qui, à mon avis, ont bien leur poids.

L'esprit de cour s'est fort affaibli chez nous; je ne m'en plains pas (Rires à gauche), je dis le fait. Savez-vous, messieurs, ce qui a fait la force des régences féminines en France, je pourrais presque dire ce qui a fait les régences féminines? C'est l'esprit féodal d'abord, l'esprit de cour plus tard. Dans l'enceinte d'un château ou d'un palais, le pouvoir d'une femme est possible; hors de là, il ne l'est pas. (Interruption.)

Voici encore un autre motif. Il y a des exemples du pouvoir politique entre les mains des femmes dans les monarchies absolues, dans des sociétés aristocratiques ou théocratiques; dans les sociétés démocratiques, jamais. L'esprit et les mœurs de la démocratie sont trop rudes et ne s'accommodent pas d'un tel pouvoir.

Voyez notre situation en Europe, la place que nous y occupons et les rapports dans lesquels nous pouvons nous trouver. Par un hasard singulier, le pouvoir politique, excepté en Russie, à l'extrémité de l'Europe, ne peut être en des mains féminines que dans l'occident de l'Europe, en Angleterre, en Espagne, en Portugal. Supposez qu'en France aussi, par la régence, le pouvoir politique soit entre les mains d'une femme; il pourrait arriver que tous les États de l'Europe occidentale fussent gouvernés par des femmes. (Rires à gauche.)

Je fais la Chambre juge du sentiment qui se manifeste de ce côté. La Chambre croit-elle que ce fût là une force pour nous? La Chambre croit-elle qu'en présence de presque toute l'Europe virilement gouvernée, le pouvoir entre les mains des femmes, dans les quatre États occidentaux de l'Europe, fût une source de force, de fixité, de sûreté? Non, la Chambre ne le pense pas.

Les raisons en sont si simples que j'aurais honte de les développer devant la Chambre.

Et cela se ferait, comme vous le disait tout à l'heure l'honorable M. de Lamartine lui-même, quand vous avez des institutions nouvelles à fonder, une dynastie nouvelle à fonder! À l'une des époques les plus graves et les plus difficiles qui puissent survenir dans la vie d'une nation! Vous accepteriez ce surcroît de difficultés, ce surcroît de chances pour la faiblesse du pouvoir! La Chambre est trop sage, elle est trop pénétrée du sentiment des vraies mœurs de ce pays-ci pour admettre une pareille idée; je n'hésite pas à dire que la régence des femmes n'a pas plus de chances d'être acceptée dans cette enceinte que la régence élective. Elle dénaturerait également et nos institutions et notre société.

Messieurs, j'ai fini, je résume les caractères de la loi.

Elle est en harmonie avec notre ordre social, avec notre ordre politique, avec notre situation actuelle et ses intérêts les plus pressants; elle consolide la monarchie, la Charte, la dynastie et la révolution de 1830; toutes les propositions contraires compromettent ou affaiblissent l'un ou l'autre de ces intérêts, ou tous ensemble. Que la Chambre en décide.

On a parlé, à cette occasion, de l'union de toutes les opinions dynastiques, de l'oubli momentané de toutes les luttes ministérielles. On a eu raison. Évidemment, dans le projet que vous discutez, aucune pensée d'intérêt ministériel n'est entrée dans l'esprit du cabinet. La loi n'est pas plus favorable au cabinet qu'à l'opposition. Elle a été faite pour elle-même, dans la seule vue du bien de l'État, abstraction faite de tout parti, de tout ministère, de toute lutte, de toute prétention, de toute rivalité; nous ne demandons rien de plus. (Vives et nombreuses marques d'approbation.)

FIN DU TOME TROISIÈME.

TABLE DES MATIÈRES DU TOME TROISIÈME.
DISCOURS

LXXIX.—Discussion du paragraphe de l'adresse relatif aux affaires d'Espagne. (Chambre des pairs, séance du 10 janvier 1837.) 1

LXXX.—Discussion du projet d'adresse sur la question des affaires d'Espagne et de la politique d'intervention ou de non-intervention dans ce royaume. (Chambre des députés, séance du 16 janvier 1837.) 12

LXXXI.—Continuation de la discussion du projet d'adresse sur les affaires d'Espagne. (Chambre des députés, séance du 17 janvier 1837.) 41

LXXXII.—Discussion sur les affaires de l'Algérie et sur la première expédition de Constantine. (Chambre des députés, séance du 22 avril 1837.) 48

LXXXIII.—Discussion des fonds secrets demandés par le cabinet en mars 1837, après ma rupture avec le comte Molé. (Chambre des députés, séance du 3 mai 1837.) 66

LXXXIV.—Continuation de la discussion sur les fonds secrets. (Chambre des députés, séance du 5 mai 1837.) 96

LXXXV.—Sur les encouragements littéraires et en particulier sur ceux qui avaient été accordés aux bénédictins de Solesmes. (Chambre des députés, séance du 8 juin 1837.) 111

LXXXVI.—Discussion de l'adresse.—Renouvellement du débat sur la question de l'intervention française en Espagne. (Chambre des députés, séance du 11 janvier 1838.) 117

LXXXVII.—Sur la pension à accorder à madame la comtesse de Damrémont, veuve du général comte de Damrémont, tué devant Constantine. (Chambre des députés, séance du 5 février 1838.) 132

LXXXVIII.—Sur la proposition de M. Passy, pour l'abolition de l'esclavage. (Chambre des députés, séance du 15 février 1838.) 136

LXXXIX.—Sur la situation des instituteurs primaires et ma conduite à leur égard pendant mon ministère de l'instruction publique. (Chambre des députés, séance du 17 février 1838.) 140

XC.—Discussion du projet de loi présenté par le cabinet présidé par le comte Molé, pour demander 1,500,000 francs de fonds secrets. (Chambre des députés, séance du 14 mars 1838.) 143

XCI.—Débat sur le projet de loi présenté pour le payement de l'emprunt grec. (Chambre des députés, séance du 26 mars 1838.) 156

XCII.—Discussion du budget du ministère de l'instruction publique en 1839. (Chambre des députés, séance du 5 juin 1838.) 160

XCIII.—Sur les affaires, les conditions et le mode de notre établissement dans l'Algérie. (Chambre des députés, séance du 8 juin 1838.) 164

XCIV.—Chambre des députés.—Débats de la coalition.—

  • Séance du 7 janvier 1839 183
  • Séance du 9 janvier 1839 196
  • Séance du 14 janvier 1839 213
  • Séance du 15 janvier 1839 225
  • Séance du 16 janvier 1839 231
  • Séance du 19 janvier 1839 235

XCV.—Discussion à l'occasion des interpellations de M. Mauguin sur la formation du cabinet après la coalition. (Chambre des députés, séance du 22 avril 1839.) 244

XCVI.—Sur les affaires d'Orient et les rapports du sultan avec le pacha d'Égypte. (Chambre des députés, séance du 2 juillet 1839.) 266

XCVII.—Discussion de l'adresse.—Question d'Orient.—Situation prise par le nouveau cabinet. (Chambre des pairs, 18 novembre 1840.) 280

XCVIII.—Discussion de l'adresse.—Affaires d'Orient.—Situation et conduite des deux cabinets du 1er mars et du 29 octobre 1840. (Chambre des députés, séance du 25 novembre 1840.) 296

XCIX.—Continuation de la discussion de l'adresse.—Affaires d'Orient. (Chambre des députés, séance du 26 novembre 1840.) 308

C.—Continuation de la discussion de l'adresse.—Affaires d'Orient. (Chambre des députés, séance du 28 novembre 1840.) 343

CI.—Continuation de la discussion de l'adresse.—Affaires d'Orient. (Chambre des députés, séance du 2 décembre 1840.) 357

CII.—Continuation de la discussion de l'adresse.—Affaires d'Orient. (Chambre des députés, séance du 4 décembre 1840.) 360

CIII.—Discussion du projet de loi relatif aux secours à accorder aux réfugiés étrangers.—Relations de la France avec l'Espagne. (Chambre des pairs, séance du 4 janvier 1841.) 364

CIII bis.—Discussion du projet de loi relatif aux fortifications de Paris. (Chambre des députés, séance du 25 janvier 1841.) 372

CIV.—Discussion du projet de loi relatif aux fortifications de Paris. (Chambre des députés, séance du 30 janvier 1841.) 384

CV.—Discussion sur le traité conclu le 29 octobre 1840 entre la France et la république argentine. (Chambre des pairs, séance du 8 février 1841.) 394

CVI.—Discussion sur le traité conclu avec le dictateur de la république argentine et sur les affaires de la Plata. (Chambre des députés, séance du 20 février 1841.) 411

CVII.—Débat sur les fonds secrets complémentaires demandés pour l'exercice 1841. (Chambre des députés, séance du 25 février 1841.) 425

CVIII.—Continuation du débat sur les fonds secrets demandés par le cabinet pour l'exercice 1841. (Chambre des députés, séance du 27 février 1841.) 430

CIX.—Discussion du projet de loi sur les fortifications de Paris. (Chambre des pairs, séance du 25 mars 1841.) 439

CX.—Renouvellement du débat sur les affaires d'Orient et sur les politiques comparées des cabinets du 1er mars et du 29 octobre 1841. (Chambre des députés, séance du 13 avril 1841.) 449

CXI.—Discussion du traité de commerce et de navigation conclu le 25 juillet 1840 entre la France et les Pays-Bas. (Chambre des députés, séance du 22 mai 1841.) 462

CXII.—Sur les affaires d'Espagne et d'Orient dans la discussion générale du projet d'adresse. (Chambre des pairs, séance du 12 janvier 1842.) 472

CXIII.—Sur les affaires d'Orient et la convention du 13 juillet 1841. (Chambre des députés, séance du 19 janvier 1842.) 490

CXIV.—Sur les conventions de 1831, 1833 et 1841 pour l'exercice du droit de visite en mer, afin d'arriver à l'abolition de la traite des nègres. (Chambre des députés, séance du 22 janvier 1842.) 521

  • —Séance du 24 janvier 1842 537

CXV.—Sur l'envoi d'un ambassadeur à Madrid et sur nos relations avec la cour d'Espagne. (Chambre des députés, séance du 25 janvier 1842.) 544

CXVI.—Discussion sur la proposition de M. Ducos, relative à l'extension des droits électoraux. (Chambre des députés, séance du 15 février 1842.) 554

CXVII.—Sur la non-ratification de la convention du 20 décembre 1841 pour l'abolition de la traite des nègres par le droit de visite. (Chambre des députés, séance du 28 février 1842.) 568

CXVIII.—Discussion du projet de loi portant demande d'un million de fonds secrets pour l'exercice 1842. (Chambre des députés, séance du 10 mars 1842.) 572

CXIX.—Discussion sur les missions extraordinaires ordonnées par le ministre des affaires étrangères. (Chambre des députés, séance du 4 avril 1842.) 580

CXX.—Discussion sur les relations des gouvernements français et espagnol. (Chambre des députés, séance du 6 avril 1842.) 587

CXXI.—Discussion sur l'affaire du Marabout, navire de commerce nantais capturé par un bâtiment anglais, en vertu des conventions de 1831 et 1833 pour l'abolition de la traite des nègres. (Chambre des pairs, séance du 11 avril 1842.) 594

CXXII.—Sur les conventions de 1831 et 1833 pour l'abolition de la traite des nègres par le droit mutuel de visite en mer. (Chambre des pairs, séance du 17 mai 1842.) 616

CXXIII.—Sur divers incidents survenus en mer et divers griefs élevés à l'occasion de l'exercice du droit de visite pour l'abolition de la traite des nègres. (Chambre des députés, séance du 19 mai 1842.) 633

  • Séance du 20 mai 1842 645

CXXIV.—Sur les relations commerciales de la France et des États-Unis d'Amérique, et sur la conduite des agents diplomatiques et consulaires français. (Chambre des députés, séance du 21 mai 1842.) 667

CXXV.—Sur le projet de loi relatif à la régence. (Chambre des députés, séance du 18 août 1842.) 677

FIN DE LA TABLE DU TOME TROISIÈME.

PARIS.—IMPRIMÉ CHEZ BONAVENTURE ET DUCESSOIS,
55, QUAI DES GRANDS-AUGUSTINS.

Notes

1: M. de Salvandy.

2: Tome IV, p. 282-312.

3: M. Berryer.

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