Histoire Sainte; ou, Histoire des Israélites: Depuis La Création, Jusqu'a La Dernière Destruction De Jérusalem
SUITE DU CHAPITRE VII.
Le peuple israélite vécut en ces jours, et pendant quelque temps encore, paisible et tranquille. Quoiqu'il se trouvât sous la dépendance des rois de Perse, cependant l'administration immédiate en était confiée à ses grands prêtres, aux anciens et aux hommes les plus distingués du peuple. L'état des choses resta dès lors le même et aucun changement n'y fut introduit sous les dominations différentes qui vinrent bientôt succéder à celle des rois de Perse. Les Macédoniens, les Égyptiens et les Syriens, tous consentirent à laisser au peuple israélite son administration antérieure.—Jérusalem était généralement regardée comme la patrie commune, même par ceux d'entre les Israélites qui demeuraient en grand nombre dans d'autres pays. Le temple reconstruit semblait à tous être le centre de l'assemblée nationale, le symbole de l'unité, et ils y faisaient parvenir [pg 258] leurs offrandes et leurs dons des pays même les plus éloignés.—Tout cela ne manquait pas d'exercer l'influence la plus salutaire à l'égard de leur vie religieuse. Bien qu'il n'y eût plus de prophètes après la mort de Malachie, le penchant à l'idolâtrie avait cependant complétement disparu; heureux effet de la bonne instruction que le peuple recevait alors. L'ordre et la majesté qui régnaient dans leur temple et partout dans le service divin; leur union et leur fidélité envers leurs souverains; leur zèle et leur activité, tout cela les relevait aux yeux des nations étrangères et rendait la dignité à leur religion qui les obligeait à tous ces devoirs. Partout où ils demeuraient, ils trouvaient l'occasion de montrer que l'obéissance et la fidélité envers le souverain passaient à leurs yeux pour les premiers devoirs, et ils s'appliquaient en outre à répandre la connaissance de Dieu parmi tous ces peuples païens.
Un témoignage honorable d'estime leur fut accordé par Alexandre le Grand, roi de Macédoine. Ce grand conquérant, lors de son invasion dans la Phénicie, enjoignit au pontife de Judée de lui fournir des vivres pour son armée et de lui faire parvenir en même temps tous les impôts que les Israélites avaient à payer à Darius Kodomanus, roi de Perse. Mais le pontife lui répondit au nom du peuple israélite, qu'ayant prêté serment de fidélité à Darius son souverain, il devait être fidèle à ce prince. Cette réponse inattendue irrita tellement le roi Alexandre qu'il s'avança vers Jérusalem, résolu à punir les Israélites et à les forcer à lui obéir. Cependant, lorsque le pontife, accompagné du peuple, alla à sa rencontre, Alexandre lui fit un bon accueil, entra en paix dans la ville de Jérusalem, visita le temple, en examina les trésors sans y toucher, approuva la constitution israélite et garantit à tous ceux qui voudraient [pg 259] prendre du service dans son armée, la pleine liberté d'exercer leur culte. Beaucoup d'entre les Israélites se confiant à cette promesse se présentèrent alors à Alexandre et lui demandèrent l'admission dans son armée.
Émigration pour l'Égypte.
Après la mort d'Alexandre, ses généraux, ainsi que les gouverneurs placés à la tête des provinces qu'il avait conquises, s'érigèrent en rois de ces provinces. Il en résulta des guerres nombreuses, qui firent aussi beaucoup de mal à la Palestine. Ptolomâus Lagi, gouverneur d'Egypte, fut le premier qui s'empara de la Palestine. Ptolomâus s'étant convaincu de la fidélité des Israélites, qui avaient observé si fidèlement le serment autrefois prêté aux rois de Perse, les obligea à lui prêter le même serment. Il en emmena un grand nombre avec lui en Egypte, et beaucoup d'autres l'y suivirent volontairement. Il les mit, en partie, dans les forteresses comme garnison, les autres s'établirent à Alexandrie, jouissant des mêmes droits que les Egyptiens et les Grecs. Seleucus Nicator, roi de l'Asie Mineure, aimait aussi les Israélites à cause de leur fidélité, et il parvint à en attirer un grand nombre en leur accordant les mêmes droits qu'aux Grecs et en les élevant au rang des premiers citoyens. C'est principalement à Antiochie, la capitale, que beaucoup d'Israélites s'établirent. Ils se répandirent en général à cette époque bien avant dans l'Asie Mineure, dans la Syrie et dans la Grèce.
Ptolomâus Philadelphus, protecteur des sciences, possédait à Alexandrie une bibliothèque de plus de deux cent [pg 260] mille ouvrages. Il fit prier le pontife à Jérusalem de lui remettre une copie des saintes Ecritures et de lui envoyer en même temps quelques savants pour en faire la traduction en grec. Éliésar, alors pontife, lui envoya une magnifique copie accompagnée de soixante-douze hommes savants, qui en accomplirent la traduction, ordinairement appelée traduction des septante ou des soixante-dix interprètes. Cette traduction était très-considérée par les Israélites qui demeuraient hors de la Palestine. Ils s'en servaient pour expliquer la loi et pour en faire la lecture dans les synagogues, tandis que les Israélites en Palestine se servaient, pour le même usage, d'une traduction chaldéenne.
Le peuple israélite jouit de la paix pendant le long règne de Ptolomâus, il s'adonna alors en grande partie aux sciences, se familiarisa avec la littérature grecque et embrassa les usages et les coutumes de cette nation.
Antigonus, président du grand conseil, enseignait entre autres préceptes, qu'on ne peut servir Dieu, comme le serviteur sert son maître, en espérant d'être récompensé; mais qu'il faut le servir par l'amour le plus pur. Cette doctrine fut mal comprise par deux de ses élèves qui se nommaient Sadoc et Baithos. Ils en répandirent la maxime erronée, qu'il n'y a, après la mort, ni récompense ni punition. Les partisans de cette doctrine fausse, funeste et hérétique, étaient appelés la secte des Saducéens.
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