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Histoire Sainte; ou, Histoire des Israélites: Depuis La Création, Jusqu'a La Dernière Destruction De Jérusalem

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CHAPITRE IV.

DEPUIS LA CONQUÊTE DE CHANAAN JUSQU'A SAUL.
 
(2489-2882.)
 

Entrée du peuple israélite dans la terre promise.

Après la mort de Moïse, Josué fils de Nun, rempli de l'esprit de sagesse, fut reconnu pour chef, comme Moïse l'avait ordonné. Josué fit alors ce commandement aux préposés du peuple, et leur dit: Passez par le milieu du camp, et donnez cet ordre au peuple, et dites-leur: Faites provision de vivres; car dans trois jours vous passerez le Jourdain, et vous irez prendre possession de la terre que l'Eternel votre Dieu doit vous donner. Il dit aussi à ceux de la tribu de Ruben, à ceux de la tribu de Gad, et à la demi-tribu de Manassé: Souvenez-vous de ce que vous a ordonné Moïse. (Moïse en leur donnant le pays de Sihon et d'Og les avait engagés formellement à ne pas quitter les autres tribus, mais à les secourir pour la conquête du pays de Chanaan.) Ils lui répondirent: Nous [pg 110] ferons tout ce que vous nous ordonnerez, et nous irons partout où vous nous enverrez. Comme nous avons obéi à Moïse en toutes choses, nous vous obéirons aussi. Seulement que l'Eternel votre Dieu soit avec vous, comme il a été avec Moïse. Que celui qui contredira les paroles qui sortiront de votre bouche, et qui n'obéira pas à tout ce que vous lui ordonnerez, soit puni de mort. Soyez ferme seulement, et agissez avec un grand courage.

Josué envoya donc secrètement de Schitim deux espions: il leur dit: Allez et examinez bien le pays et particulièrement la ville de Jéricho. Ils partirent aussitôt, examinèrent le pays comme Josué le leur avait ordonné et revinrent en faisant le rapport demandé. Josué, s'étant donc levé avant le jour, décampa; et étant sorti de Schitim, lui et tous les enfants d'Israël, ils vinrent jusqu'au Jourdain, où ils demeurèrent trois jours. Ce temps expiré, les hérauts passèrent par le milieu du camp, et commencèrent à crier: Quand vous verrez l'arche de l'alliance, les prêtres et les lévites qui la porteront, levez-vous aussi vous autres, et marchez après eux; et qu'il y ait entre vous et l'arche un espace de deux mille coudées, afin que vous puissiez la voir de loin, et connaître le chemin par où vous irez; parce que vous n'y avez jamais passé; et prenez garde de ne vous point approcher de l'arche. Josué dit aussi au peuple: Sanctifiez-vous; car l'Eternel fera demain des choses merveilleuses parmi vous. Et il dit aux prêtres: Prenez l'arche de l'alliance, et marchez devant le peuple. Ils firent ce qu'il leur avait commandé; et ayant pris l'arche, ils marchèrent devant le peuple. Et Josué dit encore au peuple: Vous reconnaîtrez à ceci que l'Eternel, le Dieu vivant, est au milieu de vous, et qu'il expulsera à vos yeux les Chananéens et les autres [pg 111] habitants idolâtres de ce pays. L'arche de l'alliance du Seigneur de toute la terre marchera devant vous au travers du Jourdain. Tenez prêts douze hommes des douze tribus d'Israël, un de chaque tribu. Et lorsque les prêtres qui portent l'arche auront mis les pieds dans les eaux du Jourdain, les eaux d'en bas s'écouleront et laisseront le fleuve à sec; mais celles qui viennent d'en haut s'arrêteront et demeureront suspendues. Le peuple sortit donc de ses tentes pour passer le Jourdain; et les prêtres qui portaient l'arche de l'alliance marchaient devant lui. Et aussitôt que ces prêtres furent entrés dans le Jourdain, et que l'eau commença à mouiller leurs pieds (c'était au temps de la moisson, où le Jourdain regorgeait par-dessus ses bords), les eaux qui venaient d'en haut s'arrêtèrent en un même lieu; et s'élevant comme une montagne, elles paraissaient de bien loin, depuis la ville qui s'appelle Adom jusqu'au lieu appelé Sarthan; mais les eaux d'en bas s'écoulèrent dans la mer du désert, qui est appelée maintenant la mer Morte, jusqu'à ce qu'il n'en restât point du tout. Cependant le peuple marchait vis-à-vis de Jéricho, et les prêtres qui portaient l'arche de l'alliance, se tenaient toujours au même état sur la terre sèche au milieu du Jourdain, et tout le peuple passait au travers du canal qui était à sec. Josué dit alors aux douze hommes choisis par les douze tribus: Allez devant l'arche au milieu du Jourdain, et que chacun de vous emporte de là une pierre, selon le nombre des tribus des enfants d'Israël; afin qu'elles servent de signe et de monument parmi vous; et à l'avenir quand vos enfants vous demanderont: Que veulent dire ces pierres? vous leur répondrez: Les eaux du Jourdain se sont séparées devant l'arche de l'alliance, lorsqu'elle passait au travers de ce fleuve. C'est pourquoi ces [pg 112] pierres ont été mises en ce lieu, pour servir aux enfants d'Israël de monument éternel. Le peuple fit donc ce que Josué avait ordonné. Ils prirent du milieu du lit du Jourdain douze pierres; et les portant jusqu'au lieu où ils campèrent, ils les y posèrent. Josué mit aussi douze autres pierres au milieu du lit du Jourdain, où les prêtres qui portaient l'arche s'étaient arrêtés, et elles y sont demeurées jusqu'aujourd'hui. Or le peuple sortit du Jourdain le dixième jour du premier mois (Nisan), et ils campèrent à Gilgal vers le côté de l'orient de la ville de Jéricho. Josué posa aussi à Gilgal les douze pierres qui avaient été prises du fond du Jourdain. Les enfants d'Israël demeurant à Gilgal y firent la Pâque le quatorzième jour du mois sur le soir, dans la plaine de Jéricho. Le lendemain ils mangèrent les fruits de la terre et des pains sans levain. Et après qu'ils eurent mangé des fruits de la terre, la manne cessa, et les enfants d'Israël n'usèrent plus de cette nourriture.

Josué se disposa donc à s'emparer d'une grande partie de la Palestine méridionale, du centre de ce pays et en outre de quelques parties de la Palestine septentrionale. Il commença par la conquête de Jéricho, ville dont il se rendit maître d'une manière tout à fait merveilleuse. Il fit alors attaquer la ville d'Aï située dans les environs de Beth-El, et fit alliance avec les Gibaonites. Il vainquit ensuite les cinq rois de Jérusalem, d'Hébron, de Jarmoth, de Lachis et d'Eglon, qui s'étaient tous réunis pour faire la guerre aux Gibaonites à cause de leur alliance avec Israël, et il finit par assujettir les peuples alliés habitant le nord de la Palestine. Mais alors un des premiers préceptes de la loi de Moïse fut violé. La loi recommandait d'expulser tous les habitants du pays pour qu'ils ne pussent engager [pg 113] les Israélites à quitter l'Éternel et à servir les faux dieux. Cette ordonnance ne fut point suivie, et beaucoup de Chananéens, peuples idolâtres, restèrent dans le pays et demeurèrent au milieu des Israélites.—Sept ans après l'entrée des Israélites en Palestine, le pays conquis fut partagé entre les tribus. Le partage des terres se fit par le sort, eu égard toutefois au nombre des personnes de chaque tribu et à la qualité du terrain. Chaque tribu occupa ce qui lui était échu en partage et s'empara de ce qui restait encore à conquérir. Quarante-huit villes du pays furent assignées pour demeure aux Lévites qui n'entrèrent point dans le partage.—Le pays étant ainsi conquis et divisé, Josué fit venir ceux des tribus de Ruben et de Gad, et la demi-tribu de Manassé, et il leur dit: Vous avez fait tout ce que Moïse serviteur de l'Éternel vous avait ordonné: vous m'avez aussi obéi en toutes choses; et dans un si long temps vous n'avez point abandonné vos frères jusqu'à ce jour. Puisque l'Eternel votre Dieu a donné la paix et le repos à vos frères, selon qu'il avait promis, allez-vous-en, et retournez dans vos tentes et dans le pays qui est à vous, que Moïse vous a donné au delà du Jourdain. Ayez soin seulement d'observer exactement et de garder avec soin les commandements et la loi que Moïse serviteur de l'Eternel vous a prescrite, qui est d'aimer l'Eternel votre Dieu, de marcher dans toutes ses voies, de vous attacher à lui, et de le servir de tout votre cœur et de toute votre âme. Josué les bénit ensuite et les renvoya de Silo (Schilo), endroit où était depuis lors le siége du sanctuaire, et ils retournèrent à leurs tentes.

[pg 114]

 
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Josué exhorte les Israélites à observer la loi.

Or, longtemps après que l'Eternel eut donné la paix à Israël, et qu'il lui eut assujetti toutes les nations qui l'environnaient, Josué étant déjà vieux et fort avancé en âge, fit assembler tout Israël, les anciens, les chefs et les magistrats, et il leur dit: Je suis vieux, et mon âge est fort avancé. Vous voyez tout ce que l'Eternel votre Dieu a fait à toutes les nations qui vous environnent, de quelle sorte il a lui-même combattu pour vous. Fortifiez-vous donc de plus en plus, et gardez avec grand soin tout ce qui est écrit dans le livre de la loi de Moïse, sans vous en détourner ni à droite ni à gauche; de peur que vous mêlant parmi ces peuples qui demeureront parmi vous, vous ne juriez au nom de leurs dieux, et que vous ne les serviez, et ne les adoriez. Mais attachez-vous à l'Eternel votre Dieu, selon que vous l'avez fait jusqu'à ce jour. Alors un seul d'entre vous poursuivra mille de vos ennemis, parce que Dieu combattra pour vous, comme il l'a promis. Prenez garde seulement, et ayez soin sur toutes choses d'aimer l'Eternel votre Dieu. Si vous voulez vous attacher aux erreurs de ces peuples qui demeurent parmi vous, et vous mêler avec eux par le lien du mariage, et par une union d'amitié, sachez dès maintenant que l'Eternel ne les expulsera point devant vous, mais qu'ils deviendront à votre égard comme un piége et comme un filet, comme des pointes qui vous perceront les côtés, et comme des épines dans vos yeux jusqu'à ce qu'il vous enlève et vous extermine de cette terre excellente qu'il vous a donnée. Pour moi, je suis [pg 115] aujourd'hui sur le point d'entrer dans la voie de toute la terre; et vous devez considérer avec une parfaite reconnaissance que tout ce que l'Eternel avait promis de vous donner, est arrivé sans qu'aucune de ses paroles soit tombée à terre. Comme donc Dieu a accompli tout ce qu'il vous avait promis et que tout vous a réussi très-heureusement, ainsi il fera tomber sur vous tous les maux dont il vous a menacés, si vous violez l'alliance que l'Eternel a faite avec vous; si vous servez et adorez des dieux étrangers, vous serez alors promptement enlevés de cette excellente terre que Dieu vous a donnée.

 
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Josué fait assembler le peuple pour la dernière fois.

Josué ayant ensuite assemblé toutes les tribus d'Israël à Sichem, fit venir les anciens, les juges, les magistrats et les préposés du peuple. Et lorsqu'ils furent tous présentés devant l'Eternel, Josué leur raconta l'histoire de leurs pères en disant: Vos pères jusqu'à Tharé, père d'Abraham, ont habité dans les premiers temps au delà du fleuve d'Euphrate, et ils ont servi des dieux étrangers. Mais l'Eternel tira Abraham votre père de la Mésopotamie et l'amena au pays de Chanaan. Il multiplia sa race.—Et Josué continua à leur raconter tout ce qu'ils ont fait et tout ce qui leur est arrivé jusqu'à ce jour. Maintenant donc, dit-il, craignez l'Eternel, et servez-le avec un cœur parfait et sincère. Si vous croyez que ce soit un malheur pour vous de servir l'Eternel, vous êtes dans la liberté de prendre tel parti que vous voudrez. Choisissez aujourd'hui ce qu'il vous plaira; [pg 116] et voyez qui vous devez plutôt adorer, ou les dieux que vos pères ont servis dans la Mésopotamie, ou les dieux des Amorrhéens au pays desquels vous habitez; mais pour ce qui est de moi et de ma maison, nous servirons l'Eternel. Le peuple lui répondit: A Dieu ne plaise que nous abandonnions l'Eternel et que nous servions les dieux étrangers. C'est l'Eternel notre Dieu qui nous a tirés, lui-même, nous et nos pères du pays d'Egypte, de la maison de servitude; qui a fait de très-grands prodiges devant nos yeux, qui nous a gardés dans tout le chemin par où nous avons marché, et parmi tous les peuples par où nous avons passé. C'est lui qui a chassé toutes ces nations, et les Amorrhéens qui habitaient le pays où nous sommes entrés. Nous servirons donc l'Eternel, parce que c'est lui-même qui est notre Dieu. Josué répondit alors au peuple: Vous êtes témoins que vous avez choisi vous-mêmes l'Eternel pour le servir. Ils lui répondirent: Nous en sommes témoins. Josué fit donc alliance de la part de l'Eternel en ce jour-là avec le peuple, et il lui présenta les préceptes et les ordonnances de l'Eternel à Sichem15. Il écrivit aussi toutes ces choses dans le livre de la loi de l'Eternel, et il prit une très-grande pierre qu'il mit sous un chêne placé dans le sanctuaire de l'Eternel, et il dit à tout le peuple: Cette pierre que vous voyez vous servira de monument et de témoignage qu'elle a entendu toutes vos promesses de peur qu'à l'avenir vous ne vouliez le nier, et mentir à l'Eternel votre Dieu.—Il renvoya ensuite le peuple chacun dans ses terres.

[pg 117]

 
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Mort de Josué et d'Éléazar.

Après cela Josué fils de Nun, serviteur de l'Eternel, mourut étant âgé de cent dix ans; et ils l'ensevelirent dans la terre qui lui appartenait à Thamnath-Saré, sur la montagne d'Ephraïm, vers le septentrion du mont Gaas. Israël servit l'Éternel pendant toute la vie de Josué et des anciens qui vécurent longtemps après Josué, et qui savaient toutes les choses merveilleuses que l'Eternel avait faites dans Israël. Ils prirent aussi les os de Joseph, que les enfants d'Israël avaient emportés d'Égypte, et ils les ensevelirent à Sichem, dans cet endroit du champ que Jacob avait acheté des enfants d'Hemor père de Sichem, pour cent Kesitah, et qui fut depuis aux enfants de Joseph. Eléazar fils d'Aaron mourut aussi, et ils l'ensevelirent sur une colline qui était à Phinées son fils, et qui lui avait été donnée en la montagne d'Ephraïm.

 
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Les juges.

Lorsque Josué et toute sa génération et les anciens qui avaient été témoins des œuvres merveilleuses que l'Eternel avait faites dans Israël, furent réunis à leurs pères, il s'en éleva d'autres en leur place qui ne connaissaient ni l'Eternel, ni les merveilles qu'il avait faites en faveur d'Israël. Les enfants d'Israël firent donc le mal à la vue de l'Eternel, et ils servirent Baal. Ils abandonnèrent le Dieu de leurs pères, qui les avait tirés du pays de l'Egypte, et ils servirent des dieux étrangers, les dieux des peuples qui demeuraient [pg 118] autour d'eux. Ayant ainsi abandonné l'Éternel, la juste punition ne tarda pas à venir; Dieu les livra entre les mains de leurs ennemis, il les vendit aux nations ennemies qui demeuraient autour d'eux, et ils ne purent résister à ceux qui les attaquaient. Cependant lorsqu'ils furent réduits à la plus extrême misère, Dieu leur suscita des juges, pour les délivrer des mains de ceux qui les opprimaient; car Dieu écoutait les soupirs des affligés, et les délivrait de ceux qui les avaient pillés et qui en avaient fait un grand carnage. Mais après la mort de ces juges, ils retombaient aussitôt dans leurs péchés, suivaient des dieux étrangers, les servaient et les adoraient. Demeurant ainsi au milieu des peuples idolâtres, qu'ils avaient laissés dans les pays, ils épousèrent leurs filles, et leur donnèrent les leurs en mariage, et ils adorèrent leurs dieux. Ils firent le mal aux yeux de l'Eternel et ils oublièrent leur Dieu, adorant Baalim et Astaroth. L'Éternel les livra donc entre les mains de Chusan-Rasathaïm roi de Mésopotamie, auquel ils furent assujettis pendant huit ans. Mais ayant fait pénitence l'Éternel eut compassion de leurs maux, et il leur suscita un sauveur qui les délivra, ce fut:

JUGE 1er.    Othoniel fils de Kenaz, frère puîné de Caleb. L'esprit de l'Éternel fut en lui, et il jugea Israël. Et s'étant mis en campagne pour combattre Chusan-Rasathaïm roi de Syrie, l'Eternel le livra entre les mains d'Othoniel qui le défit. Le pays demeura en paix durant quarante ans, et Othoniel fils de Kenaz mourut ensuite. Alors les enfants d'Israël commencèrent encore à faire le mal aux yeux de l'Eternel, qui fortifia contre eux Eglon roi de Moab, parce qu'ils avaient péché devant lui. Ce roi se joignit à Ammon et Amalec, et s'étant avancé sur eux il défit Israël, et se rendit maître de la ville des Palmes. Les enfants d'Israël [pg 119] furent assujettis à Eglon roi de Moab pendant dix-huit ans. Après cela ils prièrent l'Éternel, et il leur suscita un sauveur nommé

JUGE 2e.    Ehud fils de Gera. Celui-ci vainquit les Moabites, après avoir tué leur roi. Moab fut alors humilié sous la main d'Israël, et le pays demeura en paix pendant quatre-vingts ans. Après Ehud,

JUGE 3e.    Samgar fils d'Anath fut en sa place. Celui-ci fut aussi le défenseur et le libérateur d'Israël.

Les enfants d'Israël recommencèrent cependant encore à faire le mal aux yeux de l'Éternel et furent livrés entre les mains de Jabin, roi des Chananéens, qui régna dans Chazor (ville située dans le district appartenant à la tribu de Naphthali). Jabin, roi très-puissant, les opprima cruellement pendant vingt ans. Il avait pour général de son armée un nommé Sisara. Les enfants d'Israël prièrent donc l'Éternel, et il les secourut de nouveau. La femme de Lapidoth, prophétesse nommée

JUGE 4e.    Debora, jugeait en ce temps-là le peuple d'Israël. Elle s'asseyait sous un palmier qu'on avait appelé de son nom, entre Rama et Bethel, sur la montagne d'Ephraïm, et les enfants d'Israël venaient à elle, pour faire juger tous leurs différends. Elle envoya donc vers Barac fils d'Abinoëm de Cedès de Naphthali et l'ayant fait venir, elle lui dit: Allez, et menez l'armée sur la montagne de Thabor. Prenez avec vous dix mille combattants des enfants de Naphthali et des enfants de Zabulon. Quand vous serez au torrent de Cison, Dieu vous amènera Sisara général de l'armée de Jabin avec ses chariots et toutes ses troupes, et il vous les livrera entre les mains. Barac lui répondit: Si vous venez avec moi, j'irai; si vous ne voulez point venir, je n'irai point. Debora lui dit: Je veux bien aller [pg 120] avec vous; mais la victoire pour cette fois ne vous sera point attribuée, parce que Sisara sera livré entre les mains d'une femme. Debora partit donc aussitôt, et s'en alla à Cedés avec Barac; lequel ayant fait venir ceux de Zabulon et de Naphthali, marcha avec dix mille combattants, étant accompagné de Debora. En même temps Sisara fut averti que Barac fils d'Abinoëm s'était avancé sur la montagne de Thabor. Et il fit assembler ses neuf cents chariots armés de faux, et fit marcher toute son armée au torrent de Cison. Alors Debora dit à Barac: Courage; car voici le jour où l'Éternel a livré Sisara entre vos mains; c'est l'Eternel qui vous conduit. Barac descendit donc de la montagne de Thabor, et dix mille combattants avec lui. En même temps l'Eternel frappa de terreur Sisara, tous ses chariots et toutes ses troupes aux yeux de Barac; de sorte que Sisara sautant de son chariot en bas, s'enfuit à pied. Barac poursuivit les chariots qui s'enfuyaient et toutes les troupes et les battit complétement. Sisara voulant se sauver dans une maison y fut tué par une femme. Dieu confondit donc en ce jour-là Jabin roi de Chanaan devant les enfants d'Israël, qui devenant chaque jour plus puissants, se fortifièrent de plus en plus contre Jabin roi de Chanaan, et l'accablèrent jusqu'à ce qu'il fût ruiné entièrement. En ce jour-là Debora et Barac, fils d'Abinoëm, chantèrent un cantique en l'honneur de l'Eternel, sauveur d'Israël. Le pays demeura ensuite en paix pendant quarante ans.

Les enfants d'Israël commencèrent de nouveau à faire mal aux yeux de l'Éternel, et il les livra pendant sept ans entre les mains des Midianites. Ces peuples les tinrent dans une si grande oppression, qu'ils furent obligés de se retirer dans les antres et dans les cavernes des montagnes, et dans les lieux les plus fortifiés pour pouvoir résister aux [pg 121] Midianites. Lorsque les Israélites avaient semé, les Midianites, les Amalécites et les autres peuples de l'Orient venaient sur leurs terres, dressaient leurs tentes, ruinaient tous les grains et ne laissaient aux Israélites rien de tout ce qui était nécessaire à la vie. Israël fut donc extrêmement humilié sous Midian. Et il pria l'Éternel, lui demandant secours contre les Midianites. Alors l'Eternel leur envoya un prophète qui leur dit: «Voici ce que dit l'Eternel le Dieu d'Israël: Je vous ai fait sortir d'Egypte, et je vous ai tirés d'un séjour de servitude: je vous ai délivrés de la main des Egyptiens, et de tous les ennemis qui vous affligeaient: j'ai chassé les Amorrhéens de cette terre à votre entrée, je vous ai donné le pays qui était à eux. Et je vous ai dit: Je suis l'Eternel votre Dieu, ne craignez point les dieux des Amorrhéens dans le pays duquel vous habitez: cependant vous n'avez point voulu écouter ma voix.—Or l'Eternel ayant pitié d'Israël lui envoya encore une fois un sauveur, nommé:

JUGE 5e.    Gidéon fils de Joas. C'est aussi à ce libérateur que Dieu révéla d'une manière merveilleuse sa volonté céleste. Cet homme commença par détruire l'autel de Baal (c'est pourquoi il fut aussi appelé Jerobaal), et construisit un autel à l'Eternel, Dieu d'Israël. Or tous les Midianites, les Amalécites et les peuples d'Orient se joignirent ensemble; et ayant passé le Jourdain, ils vinrent se camper dans la vallée de Jezraël. En même temps l'esprit de l'Éternel remplit Gidéon, qui sonnant de la trompette assembla toute la maison d'Abiezer, sa famille, afin qu'elle le suivît. Il envoya aussi des gens dans toute la tribu de Manassé qui le suivit aussi, et il en envoya d'autres dans la tribu d'Aser, de Zabulon et de Naphthali: et ceux de ces tribus vinrent au-devant de lui. Gidéon se leva donc et vint accompagné de tout le peuple se camper à une fontaine nommée [pg 122] Charod. Quant aux Midianites, ils étaient campés dans la vallée, vers le côté septentrional de la colline appelée Moreh. C'est en ce lieu que Gidéon congédia une grande partie de son armée, de sorte qu'il ne lui resta que trois cents hommes. Gidéon en agissant ainsi se conforma à la volonté divine, pour montrer aux Israélites que ce n'est que la main de Dieu qui les secourt. La nuit suivante, Gidéon accompagné de son serviteur Phura, s'en alla secrètement à l'endroit du camp où étaient les sentinelles de l'ennemi. Et lorsqu'il se fut approché du camp, il entendit un soldat qui contait son songe à un autre, et qui lui rapportait ainsi ce qu'il avait vu: J'ai eu un songe, disait-il, et il me semblait que je voyais comme un pain d'orge cuit dans la cendre, qui roulait en bas et descendait dans le camp des Midianites; et y ayant rencontré une tente, il l'ébranla, la renversa par terre. Celui à qui il parlait lui répondit: Tout cela n'est autre chose que l'épée de Gidéon fils de Joas Israélite; parce que l'Éternel lui a livré entre les mains les Midianites avec toute leur armée. Gidéon ayant entendu ce songe et l'interprétation qui en avait été donnée, adora Dieu. Et étant retourné au camp d'Israël, il dit aux siens: Allons promptement; car l'Eternel a livré entre nos mains le camp de Midian. Et ayant divisé ses trois cents hommes en trois bandes, il leur donna des trompettes à la main et des pots de terre vides avec des lampes au milieu des pots, et il leur dit: Faites ce que vous me verrez faire. J'entrerai par un endroit du camp: faites tout ce que je ferai. Quand vous me verrez sonner de la trompette que j'ai en main, sonnez de même de la trompette tout autour du camp, et criez tous ensemble: Pour l'Éternel et pour Gidéon! Gidéon suivi de ses hommes entra donc par un endroit du camp au commencement de la veille du milieu de la nuit. [pg 123] Et les gardes s'étant réveillés, Gidéon et ses gens commencèrent à sonner de la trompette, et à heurter leurs pots de terre les uns contre les autres. Faisant donc autour du camp en trois endroits différents un bruit terrible, et ayant rompu leurs pots de terre, ils tinrent leurs lampes de la main gauche, et de la droite les trompettes dont ils sonnaient, et crièrent tous ensemble: Pour l'Eternel et pour Gidéon! Chacun resta à son poste autour du camp des ennemis. Aussitôt le camp des Midianites se trouva tout en désordre; ils jetèrent de grands cris, et ils s'enfuirent tous. Les trois cents hommes continuèrent à sonner de la trompette, et les ennemis tournèrent leurs épées les uns contre les autres, et ils s'entre-tuèrent. Ils s'enfuirent jusqu'à Bethsetta et jusqu'au bord d'Abelmehula en Tebbath. Mais les enfants d'Israël des tribus de Naphthali et d'Aser, et tous ceux de la tribu de Manassé se rassemblèrent et poursuivirent les Midianites. Et Gidéon envoya des gens sur toute la montagne d'Ephraïm, pour dire au peuple: Marchez au-devant des Midianites, et saisissez-vous des eaux jusqu'à Bethbera et de tous les passages du Jourdain. C'est par suite de cet avis que l'ennemi fut complétement battu. Gidéon ne se reposa qu'après avoir rejoint les princes des armées ennemies et les avoir faits prisonniers. Les Midianites furent donc humiliés devant les enfants d'Israël, et ils ne purent plus lever la tête. Le pays demeura en paix pendant quarante ans du temps de Gidéon. Après cette victoire remportée sur Midian, tous les enfants d'Israël dirent à Gidéon: Soyez notre prince, et commandez-nous, vous, votre fils et le fils de votre fils, parce que vous nous avez délivrés des mains des Midianites. Gidéon leur répondit: Je ne serai point votre prince, et je ne vous commanderai point, ni moi, ni mon fils, mais ce sera l'Éternel qui sera [pg 124] votre prince et qui vous commandera. Gidéon avait soixante et dix fils, parce qu'il avait plusieurs femmes: et une autre femme qu'il avait à Sichem, eut de lui un fils nommé Abimelech. Gidéon fils de Joas mourut enfin dans une heureuse vieillesse, et il fut enseveli dans le sépulcre de Joas son père à Ephra. Après la mort de Gidéon, les enfants d'Israël se détournèrent du culte de Dieu, et se prostituèrent à l'idolâtrie de Baal. Ils oublièrent l'Éternel leur Dieu, qui les avait délivrés des mains de tous leurs ennemis, dont ils étaient environnés. Ils n'usèrent point de miséricorde envers la maison de Gidéon, pour reconnaître tout le bien qu'il avait fait à Israël.

JUGE 6e.    Alors Abimelech, fils de Gidéon, s'en alla à Sichem trouver les frères de sa mère, et tous ceux de sa famille, et il leur parla à tous en ces termes: Représentez ceci, leur dit-il, à tous les habitants de Sichem: Lequel est le meilleur pour vous, ou d'être dominés par soixante et dix hommes, tous enfants de Jerabaal, ou de n'avoir qu'un seul homme qui vous commande? Et de plus, considérez que je suis votre chair et votre sang. Tous les parents de sa mère ayant donc parlé de lui en cette manière à tous les habitans, ils gagnèrent leur cœur et leur affection pour Abimelech. Ils lui donnèrent alors soixante et dix sicles d'argent, qu'ils prirent du temple de Baal-berith. Abimelech avec cet argent leva une troupe de gens misérables et vagabonds qui le suivirent; et, étant venu en la maison de son père, à Ephra, il tua sur une même pierre les soixante-neuf fils de Jerobaal, ses frères: et de tous les enfans de Jerobaal il ne resta que Joatham, le plus jeune de tous, que l'on cacha. Alors tous les habitans de Sichem s'étant assemblés avec toutes les familles de la ville de Millo, allèrent établir roi Abimelech près du chêne qui [pg 125] est à Sichem. Joatham en ayant reçu la nouvelle, s'en alla au haut de la montagne de Garizim, où, se tenant debout, il cria à haute voix, et parla de cette sorte (voici une des plus belles et des plus anciennes paraboles): Écoutez-moi, habitants de Sichem, comme vous voulez que Dieu vous écoute. Les arbres s'assemblèrent un jour pour s'élire un roi, et ils dirent à l'olivier: Soyez notre roi. L'olivier leur répondit: Puis-je abandonner mon suc et mon huile par laquelle on honore Dieu et les hommes, pour venir m'établir au-dessus des arbres? Les arbres dirent ensuite au figuier: Venez régner sur nous. Le figuier leur répondit: Puis-je abandonner la douceur de mon suc et l'excellence de mes fruits, pour venir m'établir au-dessus des arbres? Les arbres s'adressèrent encore à la vigne, et lui dirent: Venez prendre le commandement sur nous. La vigne leur répondit: Puis-je abandonner mon vin qui est la joie de Dieu et des hommes, pour venir m'établir au-dessus des arbres? Enfin tous les arbres dirent au buisson: Venez, vous serez notre roi. Le buisson leur répondit: Si vous m'établissez véritablement pour votre roi, venez vous reposer sous mon ombre; si vous ne le voulez pas, que le feu sorte du buisson et qu'il dévore les cèdres du Liban. Considérez donc maintenant si vous avez agi avec justice et innocence en établissant ainsi Abimelech pour votre prince; si vous avez bien traité Jerobaal et sa maison; si vous avez reconnu, comme vous le deviez, les grands services de celui qui a combattu pour vous, et qui a exposé sa vie à tant de périls pour vous délivrer des mains des Midianites; et si vous avez dû vous élever, comme vous l'avez fait, contre la maison de mon père, en tuant ses soixante-neuf fils, et en établissant Abimelech, fils de sa servante, pour prince des habitants de Sichem, parce [pg 126] qu'il est votre frère. Si donc vous avez traité comme vous deviez Jerobaal et sa maison, et que vous ne lui ayez point fait d'injustice, qu'Abimelech soit votre bonheur, et puissiez-vous être aussi le bonheur d'Abimelech. Mais si vous avez agi contre toute justice, que le feu sorte d'Abimelech, qu'il consume les habitans de Sichem et la ville de Millo; et que le feu sorte des habitants de Sichem et de la ville de Millo, et qu'il dévore Abimelech... Ayant dit ces paroles, il s'enfuit, et s'en alla à Bera, où il demeura, parce qu'il craignait Abimelech, son frère. Abimelech fut donc prince d'Israël pendant trois ans. Mais Dieu envoya un esprit de haine et d'aversion entre Abimelech et les habitants de Sichem, qui commencèrent bientôt à le détester. Ils lui dressèrent des embûches; un homme qui s'appelait Gaal, se mit à la tête de la révolte, Abimelech le vainquit, attaqua la ville, et l'ayant prise, il en tua tous les habitants, et la détruisit d'une telle sorte, qu'il sema du sel au lieu où elle avait été. Abimelech marcha de là vers la ville de Thèbes, située à trois lieues de distance, l'investit et l'assiégea avec son armée, et la prit. Il y avait au milieu de la ville, une haute tour, où tous les principaux de la ville, hommes et femmes, s'étaient réfugiés: ils en avaient fermé et barricadé la porte et étaient montés sur le haut de la tour pour se défendre par les créneaux. Abimelech était au pied de la tour combattant vaillamment; et, s'approchant de la porte, il tâchait d'y mettre le feu. En même temps, une femme jetant d'en haut un morceau d'une meule de moulin, cassa la tête à Abimelech, et lui en fit sortir la cervelle. Aussitôt il appela son écuyer, et lui dit: Tirez votre épée, et tuez-moi, de peur qu'on ne dise que j'ai été tué par une femme. L'écuyer, faisant ce qu'il lui avait commandé, le tua. Abimelech étant mort, tous ceux d'Israël qui étaient avec lui [pg 127] retournèrent chacun en sa maison. Ainsi Dieu rendit à Abimelech le mal qu'il avait commis contre son père, en tuant ses soixante-neuf frères. Les Sichimites aussi reçurent la punition de ce qu'ils avaient fait; et la malédiction que Joatham, fils de Jerobaal, avait prononcée, tomba sur eux.

JUGE 7e.    Après Abimelech, Thola, fils de Phua, de la tribu d'Issachar, et qui demeurait à Schamir, en la montagne d'Ephraïm, fut établi chef d'Israël; et après avoir jugé Israël pendant vingt-trois ans, il mourut, et fut enseveli dans Schamir.

JUGE 8e.    Jaïr de Galaad lui succéda, et il fut juge dans Israël pendant vingt-deux ans. Jaïr mourut depuis, et fut enseveli au lieu appelé Camon. Alors les enfants d'Israël recommencèrent à commettre des crimes, firent le mal aux yeux de l'Eternel, et adorèrent les idoles de Baal et d'Astaroth, et les dieux de Syrie et de Sidon, de Moab, des enfants d'Ammon et des Philistins; ils abandonnèrent l'Eternel et cessèrent de l'adorer. La juste punition de Dieu ne tarda donc pas à venir, l'Eternel les livra entre les mains des Philistins et des enfants d'Ammon, qui les affligèrent en les opprimant pendant dix-huit ans. Et lorsque les enfants d'Israël reconnurent leurs péchés, abandonnèrent la mauvaise voie et retournèrent à l'Eternel, le seul vrai Dieu, l'Eternel fut de nouveau avec eux et leur suscita un sauveur qui les délivra des mains de leurs oppresseurs.

JUGE 9e.    Cet homme s'appelait Jephté (Jiphtach). Comme les enfants d'Ammon combattaient contre Israël et le pressaient vivement, les anciens de Galaad allèrent trouver Jephté au pays de Tob, pour le faire venir à leur secours. Il commença par envoyer des ambassadeurs au roi des enfants d'Ammon en lui faisant remarquer l'injustice de ses prétentions et des guerres qu'il ne cessait de faire aux enfants d'Israël. Mais, voyant que ce roi ne [pg 128] voulait point se rendre à ces représentations amicales, Jephté s'avança à la tête de son armée, passant de Mispha en Galaad jusqu'aux enfants d'Ammon, et fit à l'Eternel ce vœu inconsidéré: Dieu, si vous livrez entre mes mains les enfants d'Ammon, je vous consacrerai le premier qui sortira de la porte de ma maison, et qui viendra au-devant de moi, lorsque je retournerai victorieux du pays des enfants d'Ammon, et je vous offrirai un holocauste. Jephté passa ensuite dans les terres des enfants d'Ammon pour les combattre; et l'Eternel les livra entre ses mains. Il prit et ravagea vingt villes depuis Aroër jusqu'à Mennith. Les enfants d'Ammon perdirent dans cette défaite un grand nombre d'hommes, et ils furent désolés par les enfants d'Israël. Mais lorsque Jephté revenait dans sa maison, sa fille unique, vint au-devant de lui en dansant au son des tambours. Jephté l'ayant vue, déchira ses vêtements, et dit: Ah! malheureux que je suis! ma fille, vous m'avez affligé, vous êtes au nombre de ceux qui me ruinent; car j'ai fait vœu à l'Eternel de lui offrir ce qui se présenterait à moi, et je ne puis faire autre chose que ce que j'ai promis. Sa fille lui répondit: Mon père, si vous avez fait un vœu à l'Eternel, faites de moi tout ce que vous avez promis, après la grâce que vous avez reçue de vous défaire de vos ennemis, et de remporter sur eux une si grande victoire. Accordez-moi seulement, ajouta-t-elle, la prière que je vous fais: Laissez-moi aller sur les montagnes pendant deux mois, afin que je pleure ma virginité avec mes compagnes. Jephté lui répondit: Allez; et il la laissa libre pendant ces deux mois. Elle alla donc avec ses compagnes et ses amies, et pleura sa virginité sur les montagnes. Après les deux mois elle revint trouver son père, et il accomplit le vœu qu'il avait fait à l'égard de sa fille. En effet, elle ne connut point d'homme [pg 129] (il lui fut défendu de se marier). De là vint la coutume qui s'est toujours depuis observée en Israël, que toutes les filles d'Israël s'assemblent une fois l'année, pour pleurer la fille de Jephté de Galaad pendant quatre jours.—Jephté jugea le peuple d'Israël pendant six ans, et il mourut ensuite, et fut enseveli dans une des villes de Galaad.

JUGE 10e.    Abezan (Ibzan) de Beth-lehem fut après lui juge d'Israël; et après avoir jugé Israël pendant sept ans, il mourut et fut enseveli dans Beth-lehem.

JUGE 11e.    Ahialon (Elon) de Zabulon lui succéda, et il jugea Israël pendant dix ans; et, étant mort, il fut enseveli à Ahialon, dans le pays de Zabulon.

JUGE 12e.    Abdon, fils d'Illel de Pharathon, fut après lui juge d'Israël pendant huit ans; et étant mort, il fut enseveli à Pharathon, au pays d'Ephraïm, sur la montagne d'Amalec. Les enfants d'Israël commirent encore le mal aux yeux de l'Éternel, qui les livra aux mains des Philistins pendant quarante ans. Alors il appela cette fois encore un héros à leur secours pour les affranchir du joug accablant des Philistins.

JUGE 13e.    Samson (Schimschon) était le nom de ce héros. Cet homme était doué d'une force si prodigieuse qu'un jour il mit en pièces un jeune lion furieux qui venait à lui. Il causa beaucoup de pertes aux Philistins en leur faisant continuellement la guerre. Un jour il prit trois cents renards qu'il lia deux à deux par la queue en y attachant des flambeaux, et, les ayant allumés, il chassa les renards, afin qu'ils courussent de tous côtés. Ils allèrent courir au travers des blés des Philistins, et y ayant mis le feu, les blés qui étaient déjà en gerbes, et ceux qui étaient encore sur pied, furent brûlés; et le feu même se mettant dans les vignes et dans les plants d'oliviers, consuma tout. Une autre fois il tua mille hommes, armé seulement d'une [pg 130] mâchoire d'âne. Il prit, un jour, les deux portes de la ville d'Aza, les mit sur ses épaules, et les porta sur le haut d'une montagne voisine.

Après avoir ainsi vengé son peuple des Philistins, il se laissa entraîner par une femme des Philistins, nommée Délila, qui le trompa en lui arrachant le secret de sa force surnaturelle. Comme cette femme l'importunait sans cesse, il ne put lui résister, et lui découvrant son secret, il lui dit: Le rasoir n'a jamais passé sur ma tête, parce que je suis nazaréen, c'est-à-dire, consacré à Dieu dès le ventre de ma mère. Si l'on me rase la tête, toute ma force m'abandonnera, et je deviendrai faible comme les autres hommes. Elle attendit donc qu'il se fût endormi, fit alors raser les sept touffes de ses cheveux et le livra de cette manière aux mains des Philistins ses ennemis. Ceux-ci l'ayant pris, lui arrachèrent aussitôt les yeux; et, l'ayant mené à Aza chargé de chaînes, ils l'enfermèrent dans une prison, où ils lui firent tourner la meule d'un moulin. Or, ses cheveux commençaient déjà à revenir, Samson ayant alors prié l'Éternel de lui rendre sa première force, il prit les deux colonnes d'une maison dans laquelle beaucoup de Philistins s'étaient assemblés pour faire des festins de réjouissance à leur dieu Dagon, et s'étant emparé de ces deux colonnes sur lesquelles la maison était appuyée, il les ébranla fortement et la maison tomba sur tous ces Philistins et sur Samson lui-même. Ses frères et tous ses parents étant venus en ce lieu, prirent son corps, et l'ensevelirent entre Saraa et Esthaol, dans le sépulcre de son père Manué (Manoach), après qu'il eut été juge d'Israël pendant vingt ans.

[pg 131]

 
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REMARQUE GÉNERALE.

État du peuple israélite à l'époque des juges.

Dans ce temps-là, comme nous venons de le voir, il n'y avait pas encore de rois en Israël; chacun faisait ce que bon lui semblait. Or partout où la religion et la justice ne sont protégées par aucun pouvoir, le méchant fait ce qu'il veut, et toute la société humaine tombe dans l'iniquité et la honte. La nation manquait d'unité; des tribus, des villes même agissaient de leur propre autorité. L'arche d'alliance déposée par Josué à Silo, n'était pas en état seule de maintenir le peuple dans son ensemble. Il y en avait très-peu qui se rendissent à Silo avec leurs offrandes; on préférait sacrifier dans la localité sans l'assistance des prêtres. Il en résulta que ceux-ci s'appauvrirent, l'enseignement de la loi de Dieu ne se donna plus, la plus grande ignorance et l'oubli de Dieu se répandirent partout, et ce qui avait particulièrement contribué à ce résultat, c'était la faiblesse qu'on avait montrée à l'égard des peuples idolâtres en ne les dépossédant pas du pays, d'après la volonté de l'Éternel dans la loi de Moïse. Il est donc évident par tout cela, qu'Israël devait nécessairement se trouver dans un triste état, et c'est en nous rappelant seulement quelques événements arrivés à cette époque, que nous en reconnaissons la profonde dépravation. Ainsi le simulacre de Micha; l'abomination des Benjaminites. [pg 132] Il fut donc déterminé par la sagesse divine que cette condition devait cesser, et en effet elle ne se prolongea que pendant la vie du juge suivant, l'avant-dernier et dont le nom était Éli, pontife.    JUGE 14e.

C'était un homme pieux, mais sans énergie, hors d'état d'arrêter l'impiété et la méchanceté de ses propres fils; il était insensible à leur conduite, et quand le peuple s'en plaignait, ils en étaient quittes pour une légère réprimande. Aussi Dieu fit annoncer de grands malheurs à Éli et à sa maison. Ces malheurs arrivèrent en effet; car lorsque, peu de temps après, la guerre eut éclaté entre les Philistins et les Israélites, ceux-ci furent vaincus, l'arche d'alliance, qu'ils avaient fait chercher à Silo pour les accompagner dans la guerre, prise par l'ennemi, et les deux fils d'Éli tués au milieu du combat. Le jour même un homme de la tribu de Benjamin, échappé du combat, vint en courant à Silo. Il avait ses habits déchirés et sa tête couverte de poussière. Au moment que cet homme arrivait, Éli était assis sur son siége et tourné vers le chemin: car son cœur tremblait de crainte pour l'arche de Dieu. Cet homme étant donc entré dans la ville, et ayant dit les nouvelles du combat, il s'éleva des cris lamentables parmi tout le peuple. Éli, à ces nouvelles, tomba de son siége à la renverse et mourut. Il avait alors quatre-vingt-dix-huit ans: ses yeux s'étaient obscurcis, et il ne pouvait plus voir. Éli avait jugé Israël pendant quarante ans.

Les Philistins ayant donc pris l'arche de Dieu, la déposèrent dans le temple de Dagon. Or la main de l'Éternel s'appesantit sur eux, et les réduisit à une extrême désolation. Dieu les frappa de différentes maladies. Les Philistins attribuant ces malheurs à une punition divine, à l'arche d'alliance qui se trouvait parmi eux, la renvoyèrent aux [pg 133] enfants d'Israël, à Cariath-iarim. Les habitants de Cariath-iarim la mirent dans la maison d'Abinadab à Gabaa, et consacrèrent son fils Eléazar, afin qu'il gardât l'arche de l'Éternel. Il s'était passé beaucoup de temps depuis que l'arche de Dieu demeurait à Cariath-iarim; il y avait déjà vingt ans, lorsque toute la maison d'Israël commença à chercher son repos dans l'Éternel.

Samuël, quinzième et dernier juge d'Israël.

Samuël, ce vrai serviteur de l'Éternel, fut dès son enfance consacré par ses parents au service de Dieu. Il fut élevé dans la maison d'Éli, et quoique jeune encore, l'Éternel daigna lui faire connaître par une vision qu'il devait annoncer à Éli la ruine de sa maison. Il se distingua dans l'accomplissement de ses fonctions plus qu'aucun des juges ses prédécesseurs. Il inspira aux Israélites un saint amour et de la confiance en Dieu, rétablit le culte dans sa pureté primitive, instruisit le peuple dans les préceptes de la loi et, ce qui est peut-être le premier de ses mérites, il institua des écoles de prophètes dans lesquelles des jeunes gens capables étaient instruits dans la doctrine de la religion et dans d'autres connaissances utiles, mais principalement dans la poésie et dans l'art de chanter des hymnes religieuses.

En ces jours qu'Israël avait commencé à chercher son repos dans l'Éternel, Samuël, connu par tout Israël comme étant le fidèle prophète de l'Éternel, dit à toute la maison d'Israël: «Si vous revenez à l'Éternel de tout votre cœur, ôtez du milieu de vous les dieux étrangers Baal et Astaroth: tenez vos cœurs prêts à obéir à l'Éternel, et ne servez que lui seul; et il vous délivrera de la main des [pg 134] Philistins. Les enfants d'Israël rejetèrent donc Baal et Astaroth, et ne servirent que l'Éternel. Et Samuël leur dit: Assemblez tout Israël à Masphath (Mizpah), afin que je prie l'Eternel pour vous. Et ils s'assemblèrent à Masphath, ils se purifièrent de leur idolâtrie, jeûnèrent ce jour-là et se repentirent de leurs péchés devant Dieu. Or Samuël jugea les enfants d'Israël à Masphath.

Les Philistins ayant appris que les enfants d'Israël s'étaient assemblés à Masphath, leurs princes marchèrent contre Israël; ce que les enfants d'Israël ayant appris, ils eurent peur des Philistins. Et ils dirent à Samuël: Ne cessez point d'invoquer pour nous l'Eternel notre Dieu, afin qu'il nous sauve de la main des Philistins. Samuël offrit alors un sacrifice à l'Eternel, le pria pour Israël, et l'Éternel l'exauça. Lorsque Samuël offrait son holocauste, les Philistins commencèrent le combat contre Israël, et l'Éternel fit éclater en ce jour-là son tonnerre avec un bruit épouvantable sur les Philistins, et les frappa de terreur. Ainsi ils furent défaits par Israël. Les Israélites étant sortis de Masphath, poursuivirent les Philistins jusqu'au lieu qui est au-dessous de Bethchar. Et Samuël prit une pierre qu'il mit entre Masphath et Sen; et il appela ce lieu la Pierre de secours, en disant: L'Eternel est venu jusqu'ici à notre secours. Les Philistins furent alors humiliés, et ils n'osèrent plus venir sur les terres d'Israël. Car la main de l'Eternel fut sur les Philistins tant que Samuël gouverna le peuple. Samuël jugea Israël pendant tous les jours de sa vie. Il alla tous les ans à Bethel, à Galgala et à Masphath, et il y rendait la justice à Israël. Il retournait de là à Ramatha, qui était le lieu de sa demeure, et où il jugeait aussi le peuple. Il y bâtit même un autel à l'Eternel.

[pg 135]

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