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Histoire Sainte; ou, Histoire des Israélites: Depuis La Création, Jusqu'a La Dernière Destruction De Jérusalem

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CHAPITRE VIII.

DEPUIS LA GUERRE DE LA DÉLIVRANCE JUSQU'AUX
TEMPS DE L'INDÉPENDANCE.
 
(3610-3634)
 

Cruautés d'Antiochus Épiphanes.

Le règne d'Antiochus Epiphanes, roi de Syrie, rejeta de nouveau les Israélites au milieu des souffrances et des persécutions. Il y avait déjà un assez grand nombre d'années que la Palestine était assujettie à la Syrie, lorsque ce roi monta sur le trône. Dans la fausse idée de maintenir plus sûrement les Israélites dans son obéissance, Antiochus se proposa d'anéantir leur religion et de les forcer à embrasser celle des païens. Il y avait alors deux grands prêtres à Jérusalem, l'un se nommait Jason et l'autre Ménélaus. Ces hommes, ainsi qu'une grande partie du peuple, étaient entièrement portés à embrasser les mœurs des Grecs. Ils établirent à Jérusalem des jeux gymniques et dépouillèrent le temple pour payer les contributions promises au roi Antiochus. Peu de temps après cette spoliation, Antiochus envahit l'Egypte, et le faux bruit de sa mort se [pg 262] répandit. Alors le peuple irrité de la spoliation du sanctuaire, se révolta contre les deux prêtres sacriléges. A ces nouvelles, Antiochus se dirigea vers Jérusalem. Arrivé en cette ville, il tua une grande partie du peuple, en vendit quatre mille comme esclaves, enleva tous les vases d'or et d'argent consacrés au temple, et pour insulter au peuple, il profana le temple en y faisant égorger un porc sur l'autel. Quelque temps après, ce même roi, forcé par les Romains à quitter l'Egypte, exerça de nouveau toute sa rage contre la Palestine; il envoya à Jérusalem une armée qui pilla la ville et en massacra sans pitié les malheureux habitants. Il défendit, sous peine de mort, d'exercer la religion de quelque manière que ce fût; il fit déchirer les livres de la loi et dressa partout des temples d'idoles. Il envoya à cet effet un prêtre grec à Jérusalem pour instruire le peuple dans la religion païenne. Ce prêtre viola le temple de Jérusalem en le consacrant à Jupiter et en y plaçant la statue de cette idole, puis il sacrifia sur l'autel de Dieu à la manière grecque.

Beaucoup d'Israélites abandonnèrent alors leur religion; mais aussi il y en eut beaucoup qui s'enfuirent ou moururent de la mort des martyrs. Au nombre de ces derniers se trouva un vieillard qui se nommait Eliasar. Celui-ci préféra mourir que de transgresser les commandements de Dieu lors même que le tyran ne lui demandait qu'une transgression apparente. Il y eut aussi une femme, nommée Hanna, qui se montra tellement attachée aux devoirs de sa religion, qu'elle ne chancela pas un instant dans la foi en voyant même de ses propres yeux, qu'on égorgeait ses sept fils les uns après les autres, qui se refusèrent tous à sacrifier aux faux dieux. Le dernier de ses fils, très-jeune encore, fut même encouragé à l'idolâtrie par le tyran, [pg 263] qui lui promit de le sauver, s'il fléchissait seulement le genou devant l'idole, ne fût-ce que pour l'apparence. Mais ce jeune homme qui avait vu mourir courageusement ses six frères n'hésita point et, rendant le dernier soupir sous la main de son bourreau, il s'écria: «Ecoute Israël! l'Eternel est notre Dieu, l'Eternel est unique!» Cette mère ayant ainsi vu mourir tous ses enfants de la mort des martyrs, mort à laquelle elle les avait encouragés elle-même, ne se sentit plus de douleur; elle se précipita du haut d'une maison et mourut.

 
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Les Machabées.

Il y avait alors un prêtre, nommé Mathatias, qui avait cinq fils: Jochanan Gadi, Simon Thassi, Juda Machabée, Eleasar Havran et Jonathan Haphus. Cet homme, témoin des maux de son peuple, s'enfuit avec ses fils pour aller demeurer dans la petite ville appelée Modin. Cependant les agents syriens y vinrent aussi. Ils lui parlèrent et lui firent les plus grandes promesses s'il voulait renoncer aux croyances de ses pères. Voyez, lui dirent-ils, vous êtes l'homme le plus distingué dans cette ville et père d'une famille nombreuse, soyez donc aussi le premier en faisant tout ce que le roi ordonne; suivez l'exemple de toutes les nations et d'une foule d'Israélites. Le roi vous regardera alors comme son ami, et vous et vos fils seront largement récompensés, vous aurez de l'or et de l'argent et de riches présents. Or Mathatias répondit: Quand même tout le monde abandonnerait la loi de Dieu, moi et mes fils nous lui resterons fidèles. Que Dieu nous préserve de jamais [pg 264] consentir à l'exigence d'Antiochus, jamais nous ne servirons les faux dieux. Pendant que Mathatias parlait ainsi, un Israélite s'avança aux yeux de tout le peuple pour sacrifier aux idoles dans la ville de Modin. Mathatias en voyant cet acte d'idolâtrie fut entraîné par son ardeur: il se précipita sur cet homme, le terrassa près de l'autel, tua l'agent du roi, détruisit l'autel et s'écria de toutes ses forces: Que quiconque brûle d'amour pour Dieu et la loi, me suive! Ses fils et tous ceux qui aimaient la justice et la vérité le suivirent alors avec leurs femmes et leurs enfants et tout ce qu'ils possédaient, ils s'enfuirent dans le désert et s'y établirent, car la misère les entourait de tous côtés et la tyrannie était à son comble. Cependant, à mesure que la cruauté d'Antiochus s'augmentait, le parti de Mathatias devenait plus fort et plus nombreux. Ce digne prêtre parcourut le pays, renversa les autels des faux dieux, punit les apostats et souvent fit essuyer des pertes nombreuses aux généraux d'Antiochus. Cet homme courageux venant à mourir, Juda son fils, obéissant à la dernière volonté de son père, se mit à la tête du peuple et remporta les plus grandes victoires. Antiochus en devint furieux et jura la ruine complète du peuple israélite. Cependant, étant sur le point de se charger lui-même du commandement de ses troupes, il tomba de son char et mourut dans les douleurs les plus atroces. Déchiré par la souffrance et tourmenté par la crainte de la mort, il promit de faire pénitence, fit même le vœu de se faire israélite dès qu'il serait rétabli; tout fut vain. Eupator son fils, et Démétrius Soter successeur de ce dernier, continuèrent à faire la guerre aux Israélites, et tous les deux, ils furent vaincus par Juda Machabée qui défit leurs armées, les expulsa de Jérusalem, purifia le temple, réorganisa le culte, et ordonna en [pg 265] mémoire de ces grands événements, la célébration de la fête ordinairement appelée Chanouka, c'est-à-dire, consécration du temple18.

Juda Machabée19 est le premier chef du peuple israélite qui fit alliance avec les Romains. Il succomba dans la guerre, entreprise contre Bacchides, général de Démétrius. Jonathan, le plus jeune de ses frères lui succéda dans le commandement de l'armée. C'était un homme sage et vaillant comme Juda son frère. Les Romains le reçurent dans leur alliance et les rois d'Egypte et de Syrie ambitionnèrent son amitié. Cependant, un homme rusé appelé Tryphon, tuteur du jeune prince Antiochus Theos, invita Jonathan avec ses fils à se rendre à Ptolomâus, prétextant vouloir lui donner cette ville comme gage de son amitié. Mais il l'y retint prisonnier et le tua avec ses fils.

 
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Construction du temple égyptien.

Pendant ces victoires remportées par les Machabées, Ménélaus, ce prêtre sacrilége, se réfugiait en Syrie où il mourut d'une mort honteuse. Un autre prêtre nommé Onias, croyant avoir des titres au pontificat, se retira en Egypte lorsqu'il vit qu'un autre lui était préféré. Arrivé dans ce pays, il s'y lia intimement avec un autre Israélite [pg 266] appelé Dositheus, et tous les deux, ils surent, par leurs talents et par leurs artifices, s'attirer tellement les égards et la considération du roi d'Egypte, Ptolomäus Philometer, qu'ils furent nommés par ce prince chefs de toute l'armée égyptienne. C'est sur leur proposition qu'un temple fut construit à Léontopolis, où s'exerçait le même culte qu'à Jérusalem. Ce temple se conserva pendant de longues années; il existait encore lorsque celui de Jérusalem était déjà détruit. Ce n'est que sous le règne de Trajan, l'empereur romain, qu'il fut ruiné.

 
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Simon investi par la nation du pontificat et du trône.

Après la mort de Jonathan, Simon son frère fut chargé du commandement de l'armée tout en remplissant les fonctions de pontife. Il renouvela l'alliance avec les Romains et fit la paix avec Démétrius roi de Syrie. Ce fut alors que le peuple israélite, voulant témoigner toute sa reconnaissance envers cette noble famille des Machabées, résolut, dans une assemblée générale, que toutes les dignités, dont Simon était revêtu temporairement, lui restassent héréditaires. Les Romains, ainsi que le roi de Syrie, adhérèrent à cet arrêté et le peuple israélite fut de nouveau reconnu comme nation indépendante. Les Israélites, en mémoire de cet événement glorieux, frappèrent une nouvelle monnaie et établirent une nouvelle ère à dater de l'époque de la délivrance.

Simon fut assassiné avec deux de ses fils au milieu d'un festin par Ptolomäus son gendre, gouverneur de Jéricho. Jean Hyrcan, son fils, lui succéda.

[pg 267] Ce prince s'empara de beaucoup de villes, qui avaient appartenu aux Israélites avant d'être enlevées par les Syriens et les Grecs. Il assujettit les Samaritains et détruisit leur temple, établi sur le mont Garizim. Il vainquit les Iduméens, qui embrassèrent alors la religion des Israélites et se confondirent avec cette nation.

 
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État de la religion.

Les cruelles persécutions religieuses d'une part et les relations fréquentes avec les païens de l'autre, devaient nécessairement exercer une grande influence sur les opinions religieuses du peuple. Aussi, vers cette époque, différentes sectes se firent-elles remarquer: les Hellènes, ou Israélites qui demeuraient en Egypte et exerçaient leur culte dans le temple de Léontopolis. Les Saducéens (voyez plus haut). Les Esséniens qui pour la plupart, habitaient dans la solitude, menant une vie retirée tout en admettant la communauté des biens. Ils croyaient à une récompense et à une punition future; mais ils expliquaient l'Ecriture sainte dans un sens figuré. Les Pharisiens prétendaient que Dieu, en se révélant à Moïse, lui avait communiqué la Loi écrite et lui en avait donné en même temps une explication orale; ils supposaient, par conséquent, que ces deux parties ne formaient qu'un seul tout. Cette explication, ou Loi orale, pour qu'elle ne fût pas un jour exposée à des exégèses erronées et à des interprétations arbitraires, ne pouvait être communiquée qu'à quelques hommes, les plus distingués de la nation, afin qu'ils conservassent ces doctrines pures et intactes. Ce n'est que [pg 268] plus tard, dans les temps d'oppression et de persécution, lorsqu'il était à craindre que ces traditions orales ne tombassent dans l'oubli, qu'un homme remarquable par sa piété et sa science, Rabbi Jéhuda Hanasi, se chargea enfin de les écrire. Cet ouvrage, formant six parties, s'appelle Mischna. Ce ne fut que trois cents ans après, que le commentaire de la Mischna fut recueilli (les cinq cent vingt-neuf chapitres de la Mischna s'y étendent en douze volumes in-folio) et conservé par écrit. L'ensemble de la Mischna et de son commentaire est ordinairement appelé Talmud ou Gamara.

[pg 269]

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