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Pages d'Islam

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FRÈRES DE RENCONTRE

L’AMI

Ordonnances tous deux, Louis Lombard, le tringlot, et Dahmane Bou Saïd, le tirailleur, étaient voisins.

Ils étaient arrivés à El-Oued presque en même temps et avaient éprouvé le même dépaysement au milieu de tout ce sable à l’horizon flamboyant, Lombard surtout, montagnard du Jura… Depuis qu’il avait quitté le pays pour faire son « service », il était en proie à une sorte de cauchemar qui allait en s’assombrissant, à mesure que l’aspect des choses environnantes changeait, devenant plus étrange. Dans le décor figé des dunes, dans la ville singulière aux mille coupoles grises, le malaise qui étreignait l’âme fruste du paysan atteignit un degré d’intensité proche du désespoir. C’était si loin, ce pays perdu, et l’œil ne trouvait rien de connu, rien de familier sur quoi se reposer de tout cet éblouissement morne. Et le tringlot errait dans cette vie nouvelle, accablé, le cœur en détresse. Il lui arrivait même de pleurer, la nuit, en pensant à la ferme de ses parents et aux chers vieux.

Bou Saïd était né sur le bord de la mer, à Bône. Lui aussi était habitué à l’ombre des jardins verts au pied de la montagne… Son père, propriétaire aisé, lui avait fait donner une instruction primaire à l’école arabe-française et à la zaouïya. Mais, devenu homme, de caractère aventureux, Dahmane avait quitté la maison paternelle et s’était engagé. Pour lui, comme pour le tringlot, l’exil au pays de sable avait été douloureux. Lui aussi avait senti l’emprise angoissante du désert… quoique musulman ; les hommes du sud étaient bien différents des Arabes du nord, et ils fuyaient les tirailleurs, qu’ils dédaignaient. Bou Saïd s’isolait, ne voulant pas descendre à la brutalité de ses camarades, dont il avait connu plusieurs, cireurs de bottes à Bône ou portefaix. Et le hasard le rapprocha du tringlot.

Les deux ordonnances ne s’étaient d’abord pas parlé, indifférents. Mais un soir, comme Lombard conduisait le cheval du major à l’abreuvoir, la bête s’emballa et jeta à terre le tringlot. Bou Saïd s’élança à son secours et arrêta l’animal furieux.

Lombard, un grand blond, encore presque imberbe, avait l’habitude de regarder les gens un peu de côté et en dessous, malgré l’honnêteté foncière de son cœur. Il dévisagea le tirailleur, et cette fine figure aquiline, bronzée par le soleil du sud, lui plut.

— Merci… Donne-moi voir la main pour rentrer cette sale bête à l’écurie…

Pour la première fois, Lombard avait adressé la parole à un Arabe : ces hommes d’un type inconnu, à l’incompréhensible langage, au costume étrange, l’effrayaient presque.

— Tu viens de France, demanda Bou Saïd, comme ils cheminaient côte à côte.

— Ben sûr… Et toi, t’es de par ici ?

— Oh non ! Je suis de Bône, un beau pays où il y a des arbres, de l’eau et des montagnes… Pas comme ici !

— Oh oui, pour un fichu pays, c’est un fichu pays.

Sans savoir, Lombard avait éprouvé du plaisir en apprenant que Bou Saïd n’était pas de ce « fichu pays ». Ça l’encourageait à lui parler. Depuis ce jour, toutes les fois qu’ils se rencontraient, ils se parlaient et, malgré l’abîme qui les séparait, ils devinrent bientôt amis. Lombard, lui aussi, était esseulé parmi ses camarades français, les infirmiers et les joyeux.

Les premiers, des Algériens, se moquaient de lui, parce qu’il était tringlot, « royal-cambouis », comme ils disaient. Quant aux joyeux, leur argot cynique lui déplaisait. Il préféra la société de ce garçon sérieux et réfléchi comme lui qu’était Bou Saïd.

Quand ils n’avaient rien à faire, ils se réunissaient dans la petite chambre de Lombard et recousaient leur linge en s’interrogeant mutuellement sur leurs pays.

Ils tâchaient de se représenter, d’après leurs récits, ces lieux que, probablement, ni l’un ni l’autre ne verraient jamais. Et ils se consolaient d’être des exilés, des captifs, en parlant des êtres et des choses qu’ils avaient aimés.

Pendant plus d’un mois, Lombard n’avait pas osé sortir du bordj ; les ruelles enchevêtrées et étroites où circulaient des Arabes ne lui semblaient pas bien sûres. D’ailleurs, où serait-il allé ?

Un soir pourtant, Bou Saïd, qui s’ennuyait de cet emprisonnement, lui proposa de lui montrer la ville, et ils sortirent. Presque craintif, Lombard suivait le tirailleur, et ses pieds inaccoutumés enfonçaient dans le sable blanc, si fin qu’on l’eût dit tamisé. Maintenant qu’il commençait à s’habituer à ce pays et qu’il avait quelqu’un à qui confier ses impressions, une curiosité lui venait de tout cet inconnu environnant. Il savait tout juste lire et écrire, mais son esprit ensommeillé était capable d’un réveil.

Dans les rues, à la tombée de la nuit, les Arabes, graves, encapuchonnés et portant de longs chapelets au cou, passaient, regagnant leurs mystérieuses demeures à coupoles ou s’installant devant les cafés maures sur des nattes. Quelques-uns échangeaient un salut bref avec Bou Saïd.

— Qu’est-ce qu’il t’a dit ? demandait Lombard intrigué.

— Il m’a salué.

— C’est que tu le connais, alors ?

— Non, dans notre religion, c’est l’habitude de se saluer, sans se connaître.

— Ça, c’est bien. Faut être poli. Mais, dis voir, pourquoi que les femmes elles se cachent la figure et qu’il y en a si peu dans la ville ?

— Ce n’est pas l’habitude pour nos femmes de sortir… Mais si tu veux en voir, des Mauresques, je vais t’en faire voir. Viens ! Ah, si on pouvait, quand on sera relevé, être envoyé dans le Tell, c’est là que tu verrais de belles femmes !

— Où c’est-y encore, ça, le Tell ?

— C’est le Nord, le pays que tu as vu en débarquant.

— Ça serait chic…

La nuit était tout à fait tombée et la ville se faisait déserte. Lombard et Bou Saïd sortirent sur « la route » de Touggourth — une piste dans le sable — et montèrent vers une maison qui dominait le désert, finissant la ville, au sud ouest. Les portes de ce lieu étaient ouvertes, et on y faisait beaucoup de tapage. Sur des bancs, des tirailleurs étaient assis, qui buvaient, chantaient ou se disputaient. Mais les regards du tringlot furent surtout captivés par une dizaine de créatures étranges, vêtues comme des fantômes et qui portaient sur leur visage bronzé des signes tatoués en bleu. Quelques-unes buvaient avec les tirailleurs, tandis que les autres dansaient en se trémoussant drôlement.

L’une d’elles, assise à la manière des tailleurs, battait du tambourin et chantait, d’une voix de fausset, une complainte monotone, dont la tristesse jurait étrangement avec le lieu et l’assistance.

— Elles ne sont pas bien jolies, dit Bou Saïd, mais que veux-tu ? Y en a pas d’autres par là, pour ceux qui n’ont pas d’amies en ville.

L’une des danseuses, roulant ses hanches drapées de rouge, vint s’asseoir près de Lombard et lui prit la main. Elle parlait sabir et Lombard la comprenait à peu près. Un fort parfum se dégageait des vêtements de cette femme, quelque chose comme la senteur de la cannelle et du musc mélangés. Lombard examinait curieusement sa voisine et il éprouvait pour elle à la fois une sorte de crainte, comme devant un être d’une autre espèce, et une attraction sensuelle… Lombard et Bou Saïd burent beaucoup ce soir-là, et ils finirent par s’attarder très longtemps là, dans la « taverne » de Ben Dif Allah.

Quelquefois, Lombard et Bou Saïd allaient s’étendre sur le sable pur et moelleux comme un tapis, au sommet d’une grande dune grise qui dominait El-Oued, le moutonnement infini de l’Erg[23] et les tristes petites villes essaimées autour d’El-Oued : Gara, Sidi-Abdallah, Teksebeth, où, parmi des amas de ruines, les chèvres noires erraient sous les coupoles caduques des maisons.

[23] L’Erg, les grandes dunes.

De là-haut, ils regardaient les jeux splendides, les jeux capricieux de la lumière vespérale sur le sable versicolore et les théories de femmes qui rentraient des puits, courbées sous les peaux de bouc pleines ou portant sur leur tête, en un geste gracieux, de grandes amphores ruisselantes…

Peu à peu, ils s’habituaient à ce pays de lumière et de silence, et il ne leur faisait plus peur. Mais ils en sentaient pourtant toujours d’instinct l’immense, l’irrémédiable tristesse…

— … Lombard ! Il y a une lettre pour moi ! dit Bou Saïd en rentrant après la distribution du vaguemestre.

— Moi aussi, j’en ai une !

Serrant précieusement leurs chères lettres dans leurs bourgerons, les ordonnances allèrent d’abord porter le courrier à leurs officiers, puis, congédiés pour la nuit, ils coururent s’enfermer dans la chambre de Lombard. Là, assis sur le lit, ils décachetèrent vite leurs lettres. Alors, avec une joie d’enfants, ils se communiquèrent les nouvelles de leurs pays, et les vieux noms de France s’entrecroisaient avec ceux de l’Islam.

— Tiens ! Ma cousine Jeanne qui se marie avec le fils Besson, celui qui tient le jeu de boules à Copponex.

— Mon frère Ali s’est marié avec la fille de Si Hadj Tahar, le maquignon de Morris.

— Et le frère qui a acheté à la foire de Gaillard deux vaches de Suisse, une rousse et une noire, qu’elles vont bientôt vêler… Les affaires marchent, cette année, et les vieux sont contents. Ah ! le fichu sort d’être paresseux… Moi, je voudrais bien les voir, leurs nouvelles vaches…

A la fin, Lombard, baissant la voix, ajouta une confidence :

— Et la Françoise, la fille à Mouchet, un qui en a, du bien, celle que je lui parlais, elle me fait donner le bonjour et elle me fait dire comme ça que c’est toujours entendu pour quand je finirai mon service.

Comme Bou Saïd lisait toujours, Lombard se pencha par-dessus son épaule. Il resta stupéfait en voyant les minces petites arabesques qui couvraient la moitié d’une grande feuille de papier pliée par le milieu.

— Alors, c’est ça ta lettre ? Et tu y comprends quelque chose, toi ? Ah ben, ma foi !

Les soirs de courrier étaient des heures de joie pour les deux soldats et ils les passaient à relire leurs lettres, à les commenter indéfiniment, à se donner des explications.

A la fin, ils connaissaient mutuellement leurs familles, s’en demandaient des nouvelles, sachant jusqu’à la disposition des lieux où chacun d’eux avait passé son enfance. Dans leurs réponses, qu’ils faisaient ensemble, ils parlaient l’un de l’autre, disant leur amitié. Ils en vinrent à se dire :

— N’oublie pas surtout de bien leur donner le bonjour de ma part, à tes vieux !

… L’hiver était venu, un étrange hiver, triste et inquiétant. Sous le grand ciel noir, les dunes semblaient livides et le vent hurlait lugubrement, accumulant les sables gris contre les murs du bordj. Il faisait froid et les deux amis ne se promenaient plus que rarement. Ils avaient choisi, pour passer les longues veillées, la chambre de Lombard, mieux exposée et plus grande. Dans un coin, il y avait le lit, puis la table et le banc de bois. Au mur, sur une planche, le sac du tringlot, et, à côté, le fusil et le sabre-baïonnette. Les frusques étaient pendues à des clous. Bou Saïd, vieux soldat rengagé, avait une sollicitude paternelle pour son ami le bleu. Il lui faisait « son truc », lui lavait son linge. Il avait blanchi les murs, cloué des images de journaux illustrés et un miroir arabe.

Puis, au-dessus de la table, il avait fixé des cornes de gazelle volées à la popote des officiers. Il apporta des amulettes en cuir et des flèches touaregs en pierres multicolores. Il avait orné avec tout cela leur chambre : désertant la sienne, il apportait tous les soirs son matelas chez Lombard. — C’est beau, tu sais, par chez nous ! disait avec fierté Lombard, en considérant leur logis. Peu à peu, dans leur étroite amitié, guéris de l’angoisse de leur exil, ils s’étaient sentis heureux. Les mois qu’ils avaient encore à passer là ne les effrayaient plus. Ils n’aimaient même pas à parler de ce changement de détachement qui les séparerait probablement pour jamais.

*
*  *

Les camarades européens de Lombard accentuèrent leur mépris pour le tringlot : il était devenu l’ami d’un bicot. Quand ils se moquaient de lui, il les regardait de travers et, enfonçant sa tête blonde entre ses épaules de colosse, il répondait : — Ben quoi ? Et pis ? Et si ça me plaît de marcher avec l’Arabe, qu’est-ce que ça vous fiche, à vous autres ?

Depuis que, d’un coup de poing, il avait abattu un « joyeux » qui l’insultait, on n’aimait guère se disputer avec Lombard, et ses camarades finirent par lui laisser la paix, se contentant de sourire quand il passait avec le tirailleur.

Bou Saïd, lui aussi, savait se faire craindre : il dégainait très vite, à la moindre altercation, et avait déjà eu quelques disputes chez Ben Dif Allah. Les autres tirailleurs n’osèrent donc pas critiquer ouvertement son amitié avec le roumi, qui leur semblait déplacée chez un taleb comme Bou Saïd.

*
*  *

Maintenant qu’ils connaissaient la ville, ils eurent quelques ébauches de romans avec de jolies soufia aux chairs ambrées et aux yeux de velours. Très simples tous deux et très primitifs, ils avaient un peu la même manière de s’amuser. Mais Bou Saïd apportait dans ses aventures d’amour une passion et un sérieux qui étonnaient Lombard : pour lui, tout cela n’était que de la « rigolade », d’abord parce qu’on était jeune, ensuite, histoire de passer le temps. Pour lui, il ne pouvait être question d’amour que quand c’était pour le sérieux, comme il disait, c’est-à-dire pour le mariage. Et il s’étonnait que Bou Saïd pût être si souvent amoureux de créatures vénales. Ce qui le surprenait surtout, c’était qu’après des coups de passion et de jalousie, qui eussent pu aboutir au crime, ces amours de Bou Saïd passassent si vite pour faire place à d’autres. Mais Lombard, raisonnable, disait que le bon Dieu n’avait pas créé tout le monde la même chose et que « chaque pays a sa mode ».

*
*  *

… Pendant des mois, la vie commune des deux ordonnances s’écoula, d’une monotonie berceuse et, tous deux, inconsciemment, en désiraient la durée indéfinie.

Mais, vers la fin de l’hiver, Bou Saïd, déjà faible de poitrine, tomba malade. Il avait pris un mauvais coup de froid et n’avait pas voulu se faire porter malade. Mais une fièvre intense le prit et il dut entrer à l’hôpital… Dès le premier jour, le major le déclara perdu.

Lombard, désolé, passa tous ses instants de liberté auprès du malade, s’ingéniant à le soigner. Une angoisse horrible s’était emparée du tringlot à la pensée que Bou Saïd allait mourir. Le bon Dieu ne l’aimait donc pas, lui, qu’il lui prenait ainsi son seul ami !

… Pendant plusieurs jours, Bou Saïd, en proie au délire, fut privé de connaissance. Enfin, un soir, vers la tombée de la nuit, il reprit conscience.

L’infirmier venait d’allumer la veilleuse et sa petite flamme falote répandait une clarté rosée dans la chambre garnie de quatre lits hauts et étroits, tous vides, à l’exception de celui de Bou Saïd. Lombard tenait son ami par la main, et il fut tout joyeux quand il vit que le malade le reconnaissait.

— Lombard… Lombard…

Bou Saïd était d’une faiblesse extrême. Décharné, ses larges yeux noirs béants dans sa face décomposée, ses lèvres collées sur les dents blanches, le beau garçon qu’il avait été était méconnaissable. Ce qui était affreux surtout, c’était le râle et le sifflement de sa respiration.

— Faut pas te faire de mauvais sang, disait Lombard, à qui le silence faisait peur. A présent que t’as ta raison, c’est fini, t’es sauvé.

Mais Bou Saïd hocha la tête.

— Lombard… les papiers… les lettres… mes effets… garde-les… c’est pour toi…

— Mais non ! Qu’est-ce que tu chantes-là ? Faut pas te faire des idées comme ça, que ça me rompt le cœur !

Il disait cela, mais il voyait bien que c’était la fin, et il avait peur de se mettre à pleurer. Pendant un long instant, Bou Saïd resta immobile, les yeux clos. Lombard, le croyant endormi, garda le silence… Mais le râle du malade devint plus rauque et il roula sa tête sur l’oreiller… Il dégagea sa main de celle de Lombard et il leva l’index… Par trois fois, ses lèvres murmurèrent quelque chose que le tringlot ne comprit pas… Puis, après deux ou trois sursauts accompagnés d’un hoquet affreux, Bou Saïd se laissa aller dans les bras de son ami qui s’était levé, épouvanté.

— Bou Saïd ! Bou Saïd ! C’est, bon Dieu, pas possible, ça… c’est trop affreux ! répétait en sanglotant le tringlot.

Morne, la tête entre ses mains crispées, il veilla jusqu’au matin, le corps que les infirmiers avaient couvert d’un drap blanc.

Le matin, des hommes vêtus de blanc et d’aspect grave vinrent laver le corps de Bou Saïd, dans la salle des autopsiés. Après, ils l’enroulèrent dans un grand linceul blanc et lui couvrirent le visage, pour toujours. Puis ils récitèrent des oraisons, sur un ton solennel et monotone. Dans un coin, Lombard, son képi à la main, écoutait, priant en lui-même le bon Dieu : chacun avait sa religion, mais il n’y avait qu’un seul bon Dieu, se disait le tringlot.

On emporta Bou Saïd sur un brancard recouvert d’un drap blanc. Lombard suivit le cortège qui sortit de la ville et descendit vers la vallée grise où est le cimetière des Ouled-Ahmed. En demi-cercle devant le cadavre posé à terre, les Arabes prièrent, sans se prosterner. Puis, ils le descendirent dans la fosse large et profonde, le recouvrirent de palmes vertes et, très vite, rejetèrent le sable sec… Lombard, toujours en tête, debout, suivait des yeux les mouvements des Arabes. Une douloureuse torpeur l’avait envahi et il regardait avec angoisse le point de la terre d’exil où son ami avait disparu pour l’éternité. Le caporal de tirailleurs disposa, sur un mouchoir de troupe, quelques galettes azymes et des figues sèches que les tolba et les mendiants emportèrent.

Puis, tous regagnèrent la ville. Lombard, seul, suivait ces hommes d’une autre race. Son chagrin était immense, accablant.

Quand il rentra dans leur chambre, il pleura désespérément à la vue de tous ces objets qu’il avait si bien disposés… La nuit tombante, quand il sortit pour aller chercher le courrier du sous-officier, il songea que plus jamais Bou Saïd ne lirait ses lettres avec lui…

Alors, en rentrant, Lombard comprit qu’il ne lui restait plus rien à faire dans ce pays, sinon à compter les jours qui le séparaient encore de sa libération…

Il se jeta sur son lit et pleura longtemps, tandis que le vent glacé de l’hiver nivelait, au cimetière musulman, le petit tertre de sable qui était la tombe de Dahmane Bou Saïd.

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