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Histoire du Consulat et de l'Empire, (Vol. 17/20): faisant suite à l'Histoire de la Révolution Française

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Notes

1: Je cite ici en original cette lettre intéressante et instructive, qui peint exactement les dispositions personnelles de l'empereur d'Autriche pour sa fille, pour son gendre et pour la France.

«Le 26 décembre 1813.

»Chère Louise, j'ai reçu hier ta lettre du 12 décembre, et j'ai appris avec plaisir que tu te portes bien. Je te remercie des vœux que tu m'adresses pour la nouvelle année; ils me sont précieux parce que je te connais. Je t'offre les miens de tout mon cœur.—Pour ce qui regarde la paix, sois persuadée que je ne la souhaite pas moins que toi, que toute la France, et à ce que j'espère que ton mari. Ce n'est que dans la paix qu'on trouve le bonheur et le salut. Mes vues sont modérées. Je désire tout ce qui peut assurer la durée de la paix, mais dans ce monde il ne suffit pas de vouloir. J'ai de grands devoirs à remplir envers mes alliés, et malheureusement les questions de la paix future, et qui sera prochaine, je l'espère, sont très-embrouillées. Ton pays a bouleversé toutes les idées. Quand on en vient à ces questions, on a à combattre de justes plaintes ou des préjugés. La chose n'en est pas moins le vœu le plus ardent de mon cœur, et j'espère que bientôt nous pourrons réconcilier nos gens. En Angleterre il n'y a pas de mauvaise volonté, mais on fait de grands préparatifs. Ceci occasionne nécessairement du retard jusqu'à ce qu'enfin la chose soit en train: alors elle ira, s'il plaît à Dieu. Les nouvelles que tu me donnes de ton fils me réjouissent fort. Tes frères et sœurs allaient bien d'après les dernières nouvelles que j'en ai reçues, ainsi que ma femme. Je suis aussi bien portant. Crois-moi pour toujours,

»Ton tendre père,

»François

2: L'ouvrage de M. Fain, qui sur ce point contient plus d'une erreur, bien que rédigé sur les documents du duc de Bassano, fait arriver Ferdinand VII à Madrid le 6 janvier. Ce prince ne partit de Valençay que le 19 mars.

3: M. Fain et d'autres écrivains ont prétendu que Napoléon fit dès ce jour partir le Pape pour Rome. C'est une erreur démontrée par des documents certains. Le départ de Fontainebleau fut bien le commencement du voyage qui ramena le Pape à Rome, mais ne fut point ordonné avec l'intention de l'y envoyer actuellement. Ce ne fut que plus tard que Napoléon donna l'ordre de l'y laisser rentrer, et par des motifs que nous ferons connaître en leur lieu. Les archives de la secrétairerie d'État contiennent des instructions de Napoléon et des lettres du colonel Lagorsse qui ne laissent de doute sur aucun de ces points.

4: Des historiens, des auteurs de Mémoires, n'ayant pas lu la correspondance de Napoléon, ne sachant pas ce qu'il faisait, le déclarent presque fou, pour s'être arrêté à Brienne après le combat du 29, et avoir voulu y livrer une seconde bataille avec des forces si disproportionnées. On voit s'il était fou, par l'exposé que nous venons de faire, et s'il est sage de juger un tel homme lorsqu'on ne connaît pas ses intentions d'après des documents authentiques. Le maréchal Marmont, dans ses Mémoires, se récrie contre l'ordre que Napoléon lui donna de se retrancher à Morvilliers. Le général Koch, excellent écrivain militaire et bien autrement sérieux dans ses jugements que le maréchal Marmont dans les siens, demande comment on pouvait vouloir avec trente mille hommes livrer une seconde bataille à toutes les armées de la coalition. On voit, d'après ce qui précède, quelles étaient les véritables intentions de Napoléon. L'ennemi pouvant opérer par Troyes ou par Châlons, il devait se tenir entre deux, de manière à courir sur celle des deux routes qui serait menacée, ne cherchant pas une bataille générale comme on l'en accuse, mais tâchant de pourvoir à toutes les éventualités avec ce qu'il avait, c'est-à-dire avec presque rien. Il n'y a donc qu'à admirer à la fois son génie et son caractère dans cette situation étrange, et presque sans égale dans l'histoire.

5: L'ennemi parla de 2 mille ou 2,500 prisonniers. C'étaient des blessés que nous abandonnions, faute de pouvoir les emmener, et non point de vrais prisonniers pris en ligne.

6: Le 2, Napoléon en écrivait quelques mots obscurs, mais très-positifs, au ministre de la guerre.

7: Suivant mon habitude de ne jamais tracer des tableaux de fantaisie, je dirai que j'emprunte ces détails non-seulement à la correspondance du roi Joseph, qui a été publiée en partie, mais à celle du prince Cambacérès, du duc de Rovigo, du duc de Feltre, qui ne l'ont pas été, et qui sont extrêmement détaillées. Elles donnent avec encore plus de vivacité toutes les particularités que je rapporte ici. J'atténue donc plutôt que je n'exagère les couleurs, sachant qu'il faut toujours ôter quelque chose à l'exagération du temps, bien que cette exagération soit un des traits de la situation qu'il convient de conserver dans une certaine mesure.

8: Ce fait si triste au milieu de tant d'autres ne peut plus être mis en doute depuis la publication des papiers de lord Castlereagh. On y voit en effet que c'est la reine qui avait été l'agent principal de la négociation.

9: Nous devons ici quelques détails sur une question historique que soulèvent les Mémoires du maréchal Marmont relativement aux affaires de Champaubert, Montmirail, Vauchamps, etc. Ce maréchal, homme d'un esprit brillant, mais pas aussi solide que brillant, est mort avec la conviction qu'il était l'auteur de l'importante manœuvre de Montmirail, laquelle valut à Napoléon, à la veille de sa chute, cinq ou six des plus belles journées de sa vie. Or voici sur quoi il se fondait pour le croire, et sur quoi il se fonde dans ses Mémoires pour le raconter. Avec son esprit qui était prompt, il avait aperçu d'Arcis-sur-Aube et de Nogent-sur-Seine, lieux où il avait séjourné du 2 au 6 février, le mouvement de Blucher, et par un instinct assez naturel il avait écrit le 6 à Napoléon pour lui proposer de se jeter sur le général prussien. Le 7 il reçut l'ordre de marcher sur Sézanne, et même avec moins d'amour-propre qu'il n'en avait, il aurait pu se croire l'inspirateur de cette belle manœuvre. C'est là ce qu'il raconte dans ses Mémoires, en citant ses propres lettres et celles qu'on lui a écrites en réponse, en quoi il est parfaitement exact. Mais il n'ajoute pas deux circonstances, l'une qu'il ignorait, l'autre qu'il avait peut-être oubliée, et qui toutes deux changent le récit de fond en comble. D'abord tandis qu'il écrivait pour la première fois le 6 février, dès le 2 Napoléon avait annoncé au ministre de la guerre son projet, qui était en même temps sa dernière espérance, et qui dépendait d'une faute de l'ennemi qu'avec son regard perçant il prévoyait avant qu'elle fût commise. Du 2 au 6 il avait tout disposé conformément à ces vues, et n'en avait rien dit au maréchal Marmont, qui, ne sachant ce que pensait et écrivait Napoléon, se croyait seul l'auteur de la combinaison projetée. Ensuite, le maréchal Marmont n'ajoute pas qu'arrivé à Chapton il perdit courage, crut la manœuvre impossible, rebroussa chemin, et écrivit le 9 à Napoléon une lettre de quatre pages, laquelle existe au dépôt de la guerre, et conseille de renoncer au projet dont toute sa vie il s'est cru l'auteur. Napoléon, comme on vient de le voir, s'inquiétant peu de ce qui avait alarmé Marmont parce qu'il embrassait l'ensemble des choses, certain que s'il se trouvait quelques mille hommes à Champaubert, il n'était pas possible que les 60 mille hommes de Blucher signalés à la fois aux Vertus, à Étoges, à Montmirail, à Château-Thierry, fussent tous à Champaubert, marchait en avant, convaincu qu'il percerait, et poussé d'ailleurs par la puissante raison qu'il fallait tout risquer dans sa situation pour le succès de sa grande manœuvre. On va voir qui eut raison de lui ou de son lieutenant, et qui était le véritable auteur de l'admirable opération dont il s'agit. Nous avons déjà fourni bien des preuves de la difficulté d'arriver à la vérité historique, et le fait que nous discutons en est un nouvel exemple. Pourtant le maréchal Marmont était un homme d'esprit, un témoin oculaire, et il pouvait dire: J'y étais. C'est pour cela que Napoléon dans une de ses lettres, dit avec autant d'esprit que de profondeur, que ses officiers savaient ce qu'il faisait sur un champ de bataille, comme les promeneurs des Tuileries savaient ce qu'il écrivait dans son cabinet, ce qui signifie que lui seul planant sur l'ensemble des opérations connaissait le secret de chacune. Aussi est-ce toujours dans ses ordres et ses correspondances que nous allons chercher ce secret, et non dans les mille récits des témoins oculaires qui ont sans doute leur valeur légendaire, mais très-relative, toujours bornée au fait matériel qu'ils ont eu sous les yeux, et s'étendant rarement jusqu'au sens véritable de ce fait.

10: À peine arrivé à Paris le général Reynier fit de ces entretiens un rapport fidèle qui fut envoyé immédiatement à Napoléon. Ce rapport, l'un des documents secrets les plus curieux du temps, est digne de la plus entière confiance, car le général Reynier était incapable d'altérer la vérité, et d'ailleurs son rapport concorde avec tout ce que les dépêches diplomatiques françaises et étrangères nous apprennent sur le quartier général des souverains.

11: Je réponds ici au reproche très-peu fondé que le général Koch, dans son excellent et consciencieux ouvrage sur la campagne de 1814, adresse à Napoléon de n'avoir pas marché directement de Montmirail à Provins, au lieu de rétrograder jusqu'à Meaux. Le général Koch, toujours éclairé et impartial, est le seul des écrivains de ce temps qui mérite une vraie confiance; pourtant il s'est trompé quelquefois, surtout quand il n'a pas eu sous les yeux la correspondance impériale, ce qui l'a empêché de connaître et d'apprécier les motifs des déterminations qu'il examine. C'est, comme nous l'avons répété souvent, avec une extrême réserve qu'il faut juger Napoléon, et l'on doit se bien dire que lorsqu'il se trompe, ce qui ne lui arrive presque jamais dans ses combinaisons militaires, c'est qu'il est mu par sa passion politique ou qu'il a été dans l'ignorance forcée de ce que faisait l'ennemi. Mais dans toute autre circonstance on peut affirmer que ses mouvements sont calculés avec une profondeur, une sûreté de vue incomparables. Il faut donc toujours, avant de se prononcer, avoir lu tout ce qui reste de ses intentions écrites, et se dire, lorsqu'on ne trouve pas ses motifs dans les deux causes que nous venons de signaler, qu'ils se trouveront dans les faits mieux étudiés. Il est rare en effet, en les étudiant davantage, qu'on n'y rencontre pas des raisons nouvelles d'admirer son génie, tout en déplorant la politique immodérée qui l'a perdu.

12: Nous avons déjà fait remarquer que, faute de connaître la correspondance de Napoléon, on lui reproche souvent ou des fautes qu'il n'a pas commises, ou des intentions qu'il n'a pas eues. Les deux jours passés à Surville en fournissent un nouvel exemple. Divers critiques français et étrangers, après avoir demandé pourquoi en quittant Blucher il ne marcha pas tout droit de Montmirail à Provins pour se jeter dans le flanc du prince de Schwarzenberg, au lieu de faire un détour en arrière par Meaux et Guignes, demandent encore pourquoi il ne franchit pas la Seine à Nogent ou à Bray, au lieu de la franchir à Montereau seulement, et pourquoi après avoir choisi Montereau il perdit deux jours entiers au château de Surville? La lecture de ses lettres répond à toutes ces questions. À Nogent et à Bray la nature des lieux, plats et couverts de villages sur les deux rives, offrait à l'ennemi de telles chances de résistance qu'il n'y avait pas espérance de forcer le passage, et d'ailleurs les ponts étant en bois laissaient peu de moyens de les préserver de la destruction. À Montereau au contraire, on pouvait, grâce au coteau de Surville qui dominait la rive opposée, s'emparer plus aisément du passage; en outre le pont étant en pierre on avait plus de temps pour le sauver. L'événement prouva que Napoléon avait raison. Enfin l'espérance de saisir le corps qui s'était avancé jusqu'à Fontainebleau était un dernier motif capital de préférer le passage à Montereau. Napoléon n'en essaya pas moins de passer les trois ponts à la fois, en appuyant davantage sur le dernier, qui fut le seul sur lequel on réussit. Il fit donc tout ce qu'il pouvait faire. Quant au temps perdu le 19 et le 20 février, sa correspondance démontre qu'il trépignait d'impatience pendant les heures employées à traverser le pont et la petite ville de Montereau. Ce défilé passé, il fallut la journée du 20 pour se concentrer à gauche sur Nogent. Il n'y eut par conséquent pas un moment perdu, et Napoléon qui à cheval franchissait en trois heures les espaces que son armée ne parcourait qu'en vingt-quatre, put rester de sa personne à Surville pour employer la journée du 20 à ses affaires générales, qui n'étaient pas moins urgentes que celles qu'il dirigeait directement. On voit donc qu'ici comme toujours il a raison contre ses critiques, lorsqu'il s'agit bien entendu d'opérations militaires. Mais pour se convaincre de cette vérité, il faut lire ses ordres et ses correspondances, que les historiens, en écrivant son histoire, n'avaient pas eus jusqu'ici à leur disposition.

13: Je ne suppose rien, je prends ces détails dans la correspondance du ministre de la police, dans celle de l'archichancelier, qui informaient Napoléon des moindres détails. J'en avertis le lecteur pour la centième fois, et heureusement pour la dernière, car je suis au terme de ma tâche. Mais je ne me lasse pas de mettre à couvert ma responsabilité d'historien, et c'est un scrupule que le lecteur me pardonnera, car il lui prouvera, je l'espère, mon amour de la vérité.

14: Ces instructions existent à la secrétairerie d'État, et n'étaient pas, comme on l'a dit, purement verbales. Le sens en est donc connu d'une manière tout à fait certaine.

15: Le duc de Raguse, ignorant comme toujours les motifs de Napoléon, et le jugeant très-légèrement, lui reproche de n'être parti que le 27, tandis qu'il lui avait fait arriver le 24 l'avis du mouvement de Blucher, et prétend que s'il avait agi deux jours plus tôt, la perte de l'armée de Silésie eût été certaine. La correspondance répond péremptoirement à ce reproche. L'avis du mouvement de Blucher envoyé le 24 de Sézanne ne parvint à Napoléon que le 25, et le 25 même il fit partir Victor de Méry pour Plancy, Ney de Troyes pour Aubeterre. Il n'y eut donc pas une heure de perdue. Le 26, quand l'intention de Blucher fut bien démontrée, Napoléon continua ce mouvement, et il ne partit que le 27 de sa personne, parce qu'il devait donner à ses troupes le temps de marcher. L'avis étant arrivé le 25, le 27 ses troupes étaient rendues à Herbisse au delà de l'Aube. On ne pouvait donc pas agir plus vite, et quand on sait quelle sûreté de jugement, quelle vigueur de caractère il faut à la guerre pour prendre ses résolutions sur-le-champ, surtout dans une position aussi grave que celle où se trouvait Napoléon, position où le premier faux mouvement devait le perdre, on ne peut trop admirer la précision, la vigueur de conduite d'un capitaine, qui, une heure après avoir reçu un avis, met ses troupes en marche, et ne reste en arrière de sa personne que pour cacher plus longtemps ses projets à l'ennemi, et donner, pendant que ses troupes cheminent, des ordres qui embrassent à la fois la direction de toutes les armées et le gouvernement d'un vaste empire.

16: M. le général Koch dit, chapitre XIV: «L'Empereur, dont le plan était déjoué par un événement aussi inattendu, demeura un jour entier dans l'incertitude, et laissa percer son embarras par la nature des opérations divergentes et hardies qu'il entreprit.» C'est une erreur fort excusable pour qui n'a lu ni les ordres ni la correspondance de Napoléon. Il était assurément fort déçu, mais point déconcerté, comme on va le voir, et il ordonna, sans une heure de temps perdu, les nouvelles dispositions qu'exigeait la circonstance. Ce qui a causé l'erreur de M. le général Koch, c'est qu'il suppose que la reddition de Soissons ayant eu lieu le 3, Napoléon dut la savoir le 4, à cause de la proximité. Mais la correspondance prouve que Napoléon ne la sut que le 5 au matin, parce que les maréchaux Mortier et Marmont ne la connurent que le 4 au soir. Or tous les ordres du passage de l'Aisne sont du 5 au matin. Il n'y eut donc ni hésitation ni temps perdu, et, en pareille circonstance, il y a certainement de quoi s'en étonner.

17: Le principal personnage employé dans ces négociations, M. de Vitrolles, a raconté dans des mémoires spirituels, et encore inédits, sa mission au camp des alliés. J'en ai dû la communication à l'obligeance du dépositaire. Je suis donc certain d'être exact dans le récit que je viens de faire, et d'autant plus que j'ai pu confronter le témoignage de M. de Vitrolles avec celui de quelques-uns des principaux personnages du temps, et que c'est de leurs témoignages comparés que j'ai composé cette narration.

18: Le procès-verbal de ce Conseil existe avec l'avis de chacun, et si jamais il est publié on verra que nous n'exagérons rien.

19: Je parle ici d'après la correspondance de Napoléon, retraçant jour par jour, heure par heure, ses résolutions et ses mouvements.

20: Je n'aime point la caricature en histoire, et je ne veux point en faire une ici, mais je rapporte ce détail parce qu'il me paraît caractéristique, et qu'il est contenu dans les mémoires intéressants, spirituels et certainement sincères de M. de Vitrolles.

21: Je tiens ce déplorable détail de témoins oculaires, hommes respectables que je ne puis nommer, et qui peuvent être rangés au nombre des plus honnêtes gens de leur temps.

22: On a dit, on a écrit, on a répété sous toutes les formes, que la scène qui s'était passée le 4 avril au matin dans le cabinet de l'Empereur avait été une scène de violence poussée jusqu'à la menace, jusqu'à lui arracher presque son abdication par la force. J'ai eu sous les yeux les mémoires manuscrits des deux témoins les plus respectables de cette scène; j'ai recueilli les souvenirs de témoins oculaires dignes de foi, et j'ai acquis la conviction que les récits qu'on a répandus à ce sujet sont entièrement controuvés. Au fond, la scène eut bien pour but et pour résultat d'arracher à Napoléon son abdication conditionnelle, mais quant à la forme les choses se renfermèrent dans la mesure que j'ai gardée dans ce récit. Les versions exagérées dont je conteste l'exactitude ont eu pour origine, et pour triste origine, les vanteries de certains personnages militaires, qui, voulant se faire valoir quelques jours après, se représentèrent comme plus coupables envers Napoléon qu'ils ne l'avaient été véritablement, et eurent fort à le regretter un an après. Ce sont ces vanteries, exagérées encore par des colporteurs de faux bruits, qui ont donné lieu aux versions inexactes répandues sur ce sujet, et je suis certain que la vérité se réduit à ce que je viens d'exposer.

23: Je parle d'après le témoignage écrit des hommes les plus dignes de foi, et les moins hostiles au maréchal Marmont et aux Bourbons.

24: Il est aussi difficile de savoir ce qui s'est passé dans cette dernière entrevue que dans la précédente, dont nous avons parlé, page 704 et suivantes. Le maréchal Ney n'a rien écrit, et Napoléon dans ses Mémoires de Sainte-Hélène, par respect pour l'infortune et l'héroïsme du maréchal, a gardé un complet silence. Seulement il est facile de reconnaître à quelques-unes de ses expressions, qu'il avait senti vivement l'attitude du maréchal Ney dans les derniers jours de l'Empire. Le maréchal eut le tort en rentrant à Paris de se vanter, notamment auprès du général Dupont, ministre de la guerre, qui en a consigné le souvenir dans ses Mémoires, d'avoir forcé Napoléon à abdiquer. Tout prouve que le maréchal en cette occasion s'accusa mal à propos, et qu'il s'était borné, dans la scène de Fontainebleau, à manquer de ménagements envers le malheur, sans se permettre une violence de propos qui n'était guère possible. Ce qui nous porte à le croire, c'est que M. de Caulaincourt en arrivant vers minuit, c'est-à-dire quelques instants après le maréchal Ney, trouva Napoléon parfaitement calme, n'ayant ni dans son attitude ni dans son langage l'animation qu'une scène violente aurait dû lui laisser, n'ayant de plus aucune résolution arrêtée. M. de Caulaincourt, dans quelques souvenirs consignés par écrit, dit positivement qu'en comparant ce qu'il avait vu à Fontainebleau avec ce qu'il entendit raconter quelques jours plus tard de la conduite du maréchal Ney, il eut de la peine à s'expliquer les versions répandues, et qu'il ne put s'empêcher de croire que le maréchal Ney s'était calomnié lui-même. Sans doute il ne fut content ni du langage ni de l'attitude du maréchal Ney à l'hôtel Saint-Florentin, mais il ne put croire à la réalité des scènes de violence qu'on racontait à Paris, et que beaucoup d'historiens ont rapportées depuis. Quant au maréchal Macdonald, tout en se montrant, dans ses Mémoires manuscrits, peu satisfait du maréchal Ney, il raconte les scènes auxquelles il a pris part d'une manière qui exclut complétement l'idée d'une violence exercée sur Napoléon. Nous citons ces deux personnages éminents, les seuls qui aient écrit comme témoins oculaires les scènes de Fontainebleau en 1814, et les plus dignes de foi entre tous ceux qui auraient pu les écrire, pour ramener toutes choses au vrai. Aussi nous flattons-nous d'avoir donné ici comme ailleurs la vérité aussi exactement que possible, et ne craignons-nous pas d'affirmer que tous les récits qui s'écartent de la mesure dans laquelle nous nous renfermons, sont ou entièrement faux, ou au moins singulièrement exagérés.

25: M. de Caulaincourt, qui avait connu l'auteur de la dénonciation, n'a pas voulu le livrer au mépris de la postérité, et a refusé d'en consigner le nom dans ses souvenirs.

26: C'est le propre récit du maréchal dans ses Mémoires encore manuscrits.

27: C'est le propre récit de M. de Vitrolles.

28: Les lecteurs de cette histoire se souviennent sans doute qu'à l'époque de la capitulation de Prenzlow les soldats de Lannes poussèrent ce cri à la vue de la mer du Nord, et que Lannes l'écrivit à Napoléon qui ne répondit rien.

Note au lecteur de ce fichier numérique:

Seules les erreurs clairement introduites par le typographe ont été corrigées. L'orthographe de l'auteur a été conservée.

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