M. Renan, l'Allemagne et l'athéisme au XIXe siècle
EXTRAIT
DES ÉLÉMENTS DE THÉOLOGIE
DU BIENHEUREUX HIÉROTHÉE.
« La divinité du Seigneur Jésus est la cause et le complément de tout ; elle maintient les choses dans un harmonieux ensemble, sans être ni tout ni partie ; et pourtant elle est tout et partie, parce qu’elle comprend en elle et qu’elle possède par excellence et de toute éternité le tout et les parties. Comme principe de perfection, elle est parfaite dans les choses qui ne le sont pas ; et en ce sens qu’elle brille d’une perfection supérieure et antécédente, elle n’est pas parfaite dans les choses qui le sont. Forme suprême et originale, elle donne une forme à ce qui n’en a pas ; et dans ce qui a une forme, elle en semble dépourvue, précisément à cause de l’excellence de la sienne propre. Substance auguste, elle pénètre toutes les substances, sans souiller sa pureté, sans descendre de sa sublime élévation. Elle détermine et classe entre eux les principes des choses, et reste éminemment au-dessus de tout principe et de toute classification. Elle fixe l’essence des êtres. Elle est la durée, elle est plus forte que les siècles et avant tous les siècles. Sa plénitude apparaît en ce qui manque aux créatures ; sa surabondance éclate en ce que les créatures possèdent. Indicible, ineffable, supérieure à tout entendement, à toute vie, à toute substance, elle a surnaturellement ce qui est surnaturel, et suréminemment ce qui est suréminent. De là vient (et puissent nous concilier miséricorde les louanges que nous donnons à ces prodiges qui surpassent toute intelligence et toute parole !), de là vient qu’en s’abaissant jusqu’à notre nature, et prenant en réalité notre substance, et se laissant appeler homme, le Verbe divin fut au-dessus de notre nature et de notre substance, non-seulement parce qu’il s’est uni à l’humanité sans altération ni confusion de sa divinité, et que sa plénitude infinie n’a pas souffert de cet ineffable anéantissement ; mais encore, ce qui est bien plus admirable, parce qu’il se montra supérieur à notre nature et à notre substance dans les choses mêmes qui sont propres à notre nature et à notre substance, et qu’il posséda d’une manière transcendante ce qui est à nous, ce qui est de nous. »
(Œuvres de saint Denis l’Aréopagite, traduites du grec ; précédées d’une introduction par l’abbé Darboy, p. 361.)