La Mal'aria: Etude Sociale
XVIII
LA LIBÉRATRICE
A peine rentrée chez elle, elle ressortit, sauta dans un fiacre et se fit mener d'un train d'enfer, en promettant des pourboires extravagants, chez le vieux Gustave, lequel attendait dans une douce quiétude la décision judiciaire qui allait le mettre pour longtemps à l'abri d'indiscrétions redoutables.
— Je m'étais trompée, dit Emmeline, en entrant impétueusement dans l'atelier, que l'artiste en faux avait sinon embelli, du moins rapproprié depuis que la manne y avait pénétré par la fenêtre à tabatière. Il parlait même de déménager.
— En quoi vous étiez-vous trompée? demanda-t-il.
— Ce M. Gérald ne sait rien du faux acte que nous avons machiné. J'avais pris la mouche sur un mot que j'avais mal compris. C'était déjà assez vilain de l'envoyer en prison, même quand nous n'avions pas le choix. Aujourd'hui que sa condamnation ne nous profiterait en rien, ce serait abominable. Vite! il n'y a pas une minute à perdre. Il faut lui faire rendre immédiatement sa liberté.
Gustave sauta en l'air.
— Comment! lui faire rendre sa liberté? En voilà une forte! Est-ce que je le peux maintenant? Vous vous figurez donc que j'ai la clef de Mazas dans ma poche?
— Que vous l'ayez ou non, je vous dis qu'il le faut, insista-t-elle violemment. Je comprends qu'il sera malaisé de vous rétracter devant les juges. Vous allez être obligé de mentir de nouveau ; mais soyez tranquille, je vous en tiendrai compte. Quand je devrais vendre jusqu'à mon dernier bijou, je trouverai bien encore cinq mille francs à vous donner pour le sauver.
— Après m'en avoir donné dix mille pour le perdre! fit remarquer Gustave en haussant les épaules d'un air bon enfant, cette perspective de cinq nouveaux mille francs ayant déjà aplani une partie des difficultés qu'il signalait.
— Oui, rien n'est plus simple, fit-elle, en renversant en imagination tous les obstacles. Il est incroyable que moi, une femme, je sois obligée de vous indiquer la marche à suivre. Vous allez trouver le juge d'instruction et vous lui déclarez que, toute réflexion faite, vous n'êtes pas bien sûr que le prévenu soit l'homme que vous avez vu ramassant vos obligations. Vous ajoutez que l'autre était plus grand, autrement vêtu, enfin tout ce que vous voudrez.
— Ma parole d'honneur, on n'est pas enfant à ce point-là! s'exclama-t-il. Puisque le paquet a été saisi chez lui dans un meuble, avec les numéros des titres qu'on a confrontés. Il n'y a pas à aller contre l'évidence.
— Ah! mon Dieu! mon Dieu! que devenir? répétait Emmeline en joignant les mains au-dessus de sa tête. Tant que ce pauvre jeune homme sera en prison, je ne vivrai pas.
— Au commencement, c'était parce qu'il n'y était pas que vous ne pouviez pas vivre. Les femmes, vraiment, c'est à pouffer de rire!
Mais Emmeline n'était pas d'humeur à savourer ses réflexions. Elle ne lui permit pas le moindre répit :
— Voyons, voyons, trouvez quelque chose! fit-elle.
Le vieux pandour prit une attitude résignée qui semblait dire :
— Il faut bien trouver quelque chose, en effet, puisque vous l'exigez absolument.
Il se recueillit quelque temps, couvrant ses yeux de sa main droite, comme pour empêcher qu'on ne vît le travail qui s'opérait dans son cerveau fécond ; et, après une méditation assez longue pour laisser supposer à Emmeline qu'il allait lui en donner pour cinq mille francs, il développa ce projet :
— Il n'y a guère qu'un moyen d'arrêter les frais auprès du juge d'instruction : c'est de substituer Lilio à notre Gérald. Nous achèterons à l'Italien un chapeau dans le genre de celui du peintre, nous lui mettrons sur le dos une vareuse à peu près pareille à celle dans laquelle le pauvre diable a été arrêté ; on les placera l'un à côté de l'autre, et je déclarerai alors ne plus savoir lequel j'ai vu ramasser le rouleau d'obligations que j'avais laissé tomber.
— Votre idée n'a pas le sens commun, lui fit brutalement observer Emmeline, qui, pour son argent, s'accordait le droit de s'exprimer en toute franchise. Si on relâche M. Gérald, ce sera pour incarcérer à sa place votre Italien. Or il ne se laissera pas arrêter comme ça sans crier. Il racontera tout et nous serons bien obligés d'expliquer dans quel but nous avons tendu ce traquenard à un homme que nous ne connaissions pas et contre lequel nous ne devions avoir aucun motif d'animosité.
— Mais laissez-moi donc faire! insista Gustave, en haussant les épaules. Lilio ne racontera rien : d'abord, parce que nous le payerons pour se taire, et, en second lieu, parce que lui ne pourra être accusé d'un délit quelconque. Voici quelle sera sa déposition devant le juge instructeur :
« Je suis modèle de mon état ; je cherchais des poses et j'avais aperçu de la rue les fenêtres d'un atelier de peintre. Au moment où je me dirigeais vers la maison pour monter chez M. Gérald, mon pied a donné dans un rouleau de papier que j'ai pris pour du papier à dessin. Je l'ai ramassé sans y attacher la moindre importance ; et la preuve, c'est que je l'ai déposé machinalement sur une table dans l'atelier de M. Gérald, qui n'était pas chez lui en ce moment. C'est sans doute la femme de ménage qui, sans y faire attention, aura serré ce paquet dans le meuble où on l'a découvert ; et comme il renfermait des obligations de la Ville, on aura supposé que ces valeurs avaient été ramassées rue Condorcet non par moi, mais par Gérald lui-même : d'autant plus que le propriétaire des obligations a affirmé l'avoir reconnu pour l'homme au pied de qui il les avait laissées tomber. »
L'erreur semblera évidente, ajouta le vieux faussaire, d'autant que je justifierai la confusion que j'ai faite par la ressemblance des costumes de Lilio et de Gérald, qui, bruns tous deux et à peu près de même taille, peuvent, en somme, être facilement pris l'un pour l'autre. Hein! qu'avez-vous à répondre?
— C'est, en effet, très ingénieux, ne put s'empêcher d'avouer Emmeline.
— Notez, continua-t-il, que si on interroge la femme de ménage qui balayait l'atelier quand Lilio y est monté, elle abondera forcément dans notre combinaison. Et Gérald ne saura même pas qu'il vous doit la clef des champs : ce qui, à mon avis, est de première importance.
Ce Gustave était décidément plein de ressources. Nul doute qu'avec son aplomb, il ne fît accepter par la justice cette version nouvelle, d'ailleurs très vraisemblable et même en grande partie vraie, puisque effectivement le jeune modèle était monté chez Gérald pour y déposer subrepticement le rouleau dénonciateur. Du moment où le possesseur légitime des obligations proclamait lui-même le quiproquo et se désistait de sa plainte, la réhabilitation et l'élargissement immédiat du détenu ne souffriraient aucune difficulté.
Emmeline descendit allègrement les innombrables étages de la maison de la rue Viollet-le-Duc. Elle était soulagée de ce poids intolérable qu'elle craignait d'avoir à porter toute sa vie. Le madré Lilio se fit une tête d'imbécile pour aller demander à être entendu par le juge d'instruction dans l'affaire Péronaud. Il expliqua comment, étant retourné à l'atelier de la rue Condorcet pour y demander si on avait besoin de lui, il avait appris que l'artiste qui le louait était accusé d'avoir volé des papiers qu'on avait retrouvés chez lui, mais que personne, dans la maison, ne le croyait coupable, parce qu'il avait toujours parfaitement payé son terme et qu'il passait pour un très honnête garçon.
Alors, il s'était rappelé être monté un jour chez ce pauvre M. Gérald, après avoir ramassé presque à sa porte un rouleau de papiers qu'il avait dû déposer quelque part, attendu qu'il n'avait jamais su où il était passé. Lui, il était Italien et ne savait pas lire le français. Ce papier ne pouvait lui servir à rien. Il l'avait probablement jeté sur une table et jamais il ne se serait souvenu de cette histoire-là, sans le malheur qui était arrivé à M. Gérald. On lui avait conseillé d'aller tout de suite prévenir M. le juge d'instruction. Il y venait, et voilà.
Le magistrat, un peu désappointé de voir lui échapper un prévenu auquel il avait à plusieurs reprises irréfutablement démontré qu'il était coupable, objecta à ce témoin gênant que le détenu Gérald avait été formellement reconnu par l'honorable propriétaire des obligations comme l'individu qui les avait escamotées sous ses yeux.
— Oui, mais peut-être que ce monsieur a la vue basse! fit observer le modèle en jouant le jocrisse.
Bien que les hommes ne croient guère au hasard non plus qu'aux coïncidences, celui devant lequel venait spontanément témoigner cet Italien, qui bredouillait à peine la langue française, fut bien obligé de constater que le costume de Lilio concordait singulièrement avec celui du prévenu Gérald. Il espérait cependant encore que, mis en leur présence à tous deux, le plaignant persisterait dans ses affirmations. Il eût été trop cruel pour ce magistrat de perdre ainsi le bénéfice d'une affaire qu'il avait si bien menée. Décidément, la police n'avait pas de chance depuis quelque temps. Les coupables lui échappaient à qui mieux mieux ; et quand, par aventure, elle en arrêtait un, il se trouvait qu'il était innocent.
Le juge s'exécuta pourtant et, après avoir envoyé chercher Gérald à Mazas, il fit demander à Gustave de vouloir bien se rendre au Palais de Justice. Gérald entra le premier dans le cabinet du juge d'instruction, où se tenait Lilio, assis dans un coin. Avant de se décider à la comparaison entre le prévenu et le témoin, le magistrat risqua une dernière tentative :
— Vous feriez cent fois mieux d'avouer, dit-il presque tendrement à Gérald. Le tribunal vous saura gré de votre franchise, tandis que votre obstination vous coûtera probablement très cher.
— J'ai fait tous les aveux dont j'étais capable, répondit le peintre. J'ai avoué mon innocence. Je ne puis rien de plus.
— C'est bien! fit le juge. Nous allons procéder à une nouvelle confrontation entre vous et M. Bachelin qui vous accuse de lui avoir dérobé les valeurs que vous savez. Ce sera la dernière, et elle sera décisive.
Gustave, qui avait attendu sa convocation toute la matinée, arriva comme un homme très surpris qu'on l'eût dérangé de nouveau.
— Il est heureux qu'on m'ait trouvé chez moi, j'allais sortir. Est-ce que nous en avons pour longtemps, monsieur le juge d'instruction? dit-il. Tout ce que j'avais à dire, il me semble que je l'ai dit.
— Connaissez-vous monsieur? demanda l'instructeur à Gustave en lui désignant Lilio, auquel il avait fait signe de se lever.
— Non, monsieur le juge d'instruction, je ne connais pas monsieur, répondit-il nettement.
— Maintenant, dit le magistrat à Lilio, veuillez vous tenir debout, le chapeau sur la tête, à côté du prévenu, qui se coiffera également du chapeau qu'il tient à la main et qui est bien, n'est-ce pas? celui qu'il portait le jour où le délit a été commis?
Gérald et Lilio se placèrent côte à côte ; et bien que le dernier fût un peu moins grand que l'autre, l'aspect général, grâce à l'identité du costume et de la coiffure, était tellement similaire que le juge d'instruction jeta à son greffier un regard désolé.
Le vêtement et le chapeau du jeune modèle s'appareillaient d'autant plus à ceux du peintre que Gustave les lui avait achetés, l'avant-veille, aussi ressemblants que possible.
— Je dois vous apprendre à présent, reprit le juge, à quoi tend cette mise en scène. Monsieur, qui est Italien, prétend être la personne qui a ramassé les obligations rue Condorcet, qui les a portées jusque chez le prévenu et qui les y a oubliées. Si bien qu'abusé par une sorte de ressemblance dans la tournure, dans l'habillement et dans la physionomie, vous auriez pris celui-ci pour celui-là.
Gustave, comme écrasé par la stupeur, prolongea son ébahissement quelques instants encore.
— En effet, balbutia-t-il, jamais je n'ai vu une personne en rappeler aussi exactement une autre. Si je m'y suis trompé, convenez, monsieur le juge d'instruction, que vous auriez fait de même. C'est vraiment incroyable!
— Monsieur ne parlant qu'assez incorrectement le français, dit le juge, je vais vous reconstituer la déposition qu'il vient de faire devant moi et dont je vous prie de vouloir bien relever les contradictions ou les erreurs.
Et il raconta bénévolement à Gustave tout ce que ce dernier avait inventé trois jours auparavant, et qu'il feignit d'écouter avec la plus scrupuleuse attention.
— Mais, fit-il observer, du ton d'un homme qui, pour être fortement ébranlé, n'est pas absolument convaincu, si ce jeune modèle est monté chez M. Gérald, il a été reçu par quelqu'un, un domestique, une bonne, un concierge.
— Oui, fit Lilio, en continuant à exagérer son accent étranger, il y avait là une vieille femme qui balayait.
— Quelle est cette femme? demanda le magistrat à Gérald.
— Ma femme de ménage, répondit-il.
— Et qu'est-elle devenue?
— Je l'ignore. Voici plus de trois mois que je suis en prison.
— Toute la question est de la retrouver, insista Gustave. Il est clair que si ce jeune Italien lui a parlé et qu'elle le reconnaisse, c'est que j'aurai été dupe d'une illusion que je regretterai profondément, mais qu'explique suffisamment le plus étrange concours de circonstances. Errare humanum est! conclut-il, pour faire montre de son érudition.
Car la loi, l'impassible loi, vous tient coffré pendant des mois, après quoi elle vous ouvre la porte de votre cellule en vous disant pour tous dommages-intérêts :
— Nous nous sommes trompés. Mais aussi, c'est de votre faute. Si vous n'aviez pas ressemblé comme deux gouttes d'eau à un autre pour lequel on vous a pris, ce désagrément ne vous serait pas arrivé.
L'essentiel était de retrouver et de faire comparaître la femme de ménage. Le vieux Gustave, qui avait pris des informations et savait parfaitement où aller la chercher, affecta un profond désespoir de l'erreur dont il était responsable. Il s'offrit à entreprendre toutes les démarches nécessaires à la découverte de cette fameuse vérité qu'on feint toujours de poursuivre et qu'on lâche si facilement quand on peut mettre la main dessus.
— Monsieur, dit-il en serrant à demi Gérald dans ses bras, si j'ai eu envers vous des torts involontaires, soyez sûr que je ne goûterai de repos qu'après les avoir réparés. Je vais me jeter sur la piste de cette femme et je ne m'arrêterai qu'après l'avoir amenée ici morte ou vive.
Cependant pour la vraisemblance, il ajouta :
— Je voudrais seulement savoir son nom.
— On l'appelait Mme Basile, répondit le peintre. Elle ne venait chez moi que depuis un mois, tous les jours, de dix heures à deux.
— Mme Basile, fit Gustave, en inscrivant sur un carnet d'homme sérieux ce nom qu'il connaissait depuis trois jours. Laissez-moi faire, monsieur le juge d'instruction : je m'engage à vous la conduire demain matin, à l'heure que vous voudrez bien fixer vous-même.
Les magistrats instructeurs sont ainsi faits : quand ils voient qu'un prévenu est manifestement innocent et que toute leur mauvaise foi ne réussirait pas à mettre debout l'accusation qu'ils ont tenté d'échafauder contre lui, ils deviennent aussi polis qu'ils ont été brutaux, et aussi bienveillants qu'ils étaient impitoyables. Comme homme, celui qui avait été chargé de suivre l'affaire entamée contre le jeune artiste avait puisé dans les interrogatoires auxquels il l'avait soumis la certitude de la non-culpabilité de ce prévenu, dont il n'avait même pu tirer l'apparence d'un aveu ou d'une contradiction, bien qu'il l'eût retourné dans tous les sens.
Comme magistrat, il se donnait une peine extraordinaire pour obtenir contre cet être récalcitrant quinze jolis mois de prison. Mais les nouvelles déclarations de l'insoupçonnable M. Bachelin, la similitude indiscutable entre la tournure, la coiffure, l'équipement du prévenu et ceux du jeune Italien qui, d'ailleurs, reconnaissait avoir ramassé sur le trottoir les papiers formant les seules pièces à conviction du procès, mettaient l'accusation à néant, au point qu'en insistant, le juge risquait simplement de se faire attraper par les journaux.
Il n'hésita donc pas à tourner bride ; et, tout en faisant ramener Gérald à sa prison en voiture cellulaire, il le réconforta par ces paroles d'espoir :
— Demain, monsieur, j'aurai l'honneur de faire parvenir au greffe de la prison la décision que j'aurai prise. Je n'ai pas besoin de vous répéter que je serais heureux qu'elle vous fût favorable.
Le lendemain, Lilio, convoqué de nouveau, fut confronté avec la femme de ménage, qui le désigna immédiatement comme l'italien qui était venu, environ une demi-heure avant la rentrée de M. Gérald, se proposer comme modèle. Avait-il ou n'avait-il pas un rouleau de papier à la main ; l'avait-il posé sur une table et l'avait-elle serré dans le bahut : voilà ce qu'elle était hors d'état d'affirmer ; toutefois, puisque le jeune homme le déclarait lui-même, elle n'avait aucune base de démenti à lui opposer.
— Ah! que je suis content! s'écria Gustave en respirant à pleins poumons. Le remords d'avoir fait condamner cette victime innocente m'aurait poursuivi jusqu'à la fin de mes jours.
Séance tenante, afin de donner devant témoins la mesure de son intégrité, le juge instructeur signa une ordonnance de non-lieu qu'il fit porter, accompagnée d'un ordre de mise en liberté, par un express auquel — toujours devant témoins — il recommanda la plus grande célérité.
Ce qui compléta la joie dont Gustave faisait parade, c'est qu'on lui rendit en même temps ses obligations, ou plutôt celles d'Emmeline, lesquelles étaient, depuis trois mois, restées dans le dossier. Il en donna décharge, se promettant tacitement de négliger le récit de ce dernier épisode, quand il raconterait à sa complice le dénouement du drame qu'ils avaient perpétré en collaboration.
Il salua profondément le juge d'instruction, puis Lilio, qu'il était censé avoir vu la veille pour la première fois, bien qu'il lui eût glissé ces mots pendant que le juge rédigeait l'exeat de Gérald :
— Je t'attendrai sur le quai, en face du Dispensaire.
Quoique parfaitement éclairé sur le malentendu qui avait coûté trois mois de cellule à son pensionnaire, le directeur de Mazas ne douta pas un instant que l'intervention de M. le député et de Mme son épouse n'eût été pour tout dans la libération de Gérald.
Au reçu de l'ordre signé du juge, le greffier de la prison se précipita dans la cellule du détenu qui, à la main chaleureuse que l'employé lui tendit, devina l'objet de tant d'empressement.
Quand on a de si belles connaissances, on est toujours à ménager. Aussi, afin de lui épargner la compagnie d'un gardien, le sous-fonctionnaire le conduisit-il lui-même au greffe pour la cérémonie de la levée de l'écrou, et Gérald prit congé sur cette prière qu'il lui adressa tout bas :
— Si vous vouliez être bien aimable, vous parleriez de moi à votre ami le député pour une direction en province.