Contes pour lire au crépuscule
UN FAIBLE
Ce récit — ai-je besoin de le dire ? — n’est pas une copie conforme. J’y ai résumé et accumulé les traits que m’ont fournis non pas une, mais cent histoires analogues. Le collage est une infirmité qui, dans la vie maritime, devient tout particulièrement intense. Il y a à cela une foule de raisons. J’invite ceux qui s’en indigneraient à relire ces lignes du Roman d’un spahi :
« O vous qui vivez de la vie régulière de la famille, assis paisiblement chaque soir au foyer, ne jugez jamais ceux que la destinée a jetés avec des natures ardentes, dans des conditions d’existence anormales, sur la grande mer ou dans les lointains pays du soleil, au milieu de privations inouïes, de convoitises, d’influences que vous ignorez. Ne jugez pas ces exilés ou ces errants, dont les souffrances, les joies, les impressions tourmentées vous sont inconnues. » (Pierre Loti, Le Roman d’un spahi.)