← Retour
La Légende des siècles tome III
16px
100%
XVII
SEGRAIS
O fraîche vision des jupes de futaine
Qui se troussent gaîment autour de la fontaine!
O belles aux bras blancs follement amoureux!
J’ai vu passer Aminthe au fond du chemin creux;
Elle a seize ans, et tant d’aurore sur sa tête
Qu’elle semble marcher au milieu d’une fête;
Elle est dans la prairie, elle est dans les forêts
La plus belle, et n’a pas l’air de le faire exprès;
C’est plus qu’une déesse et c’est plus qu’une fée,
C’est la bergère; c’est une fille coiffée
D’iris et de glaïeuls avec de grands yeux bleus;
Elle court dans les champs comme, aux temps fabuleux,
Couraient Léontium, Phyllodoce et Glycère;
Elle a la majesté du sourire sincère;
Quand elle parle, on croit entendre, ô bois profond,
Un rossignol chanter au-dessus de son front;
Elle est pure, sereine, aimable, épanouie,
Et j’en ai la prunelle à jamais éblouie;
Comme Faune la suit d’un regard enflammé!
Comme on sent que les nids, l’amour, le mois de mai,
Guettent dans le hallier ces douces âmes neuves!
Dans des prés où ne coule aucun des divins fleuves
Qu’on appelle Céphise, Eurotas ou Cydnus,
Elle trouve moyen d’avoir de beaux pieds nus;
Cette fille d’Auteuil semble née à Mégare!
Parfois dans des sentiers pleins d’ombre elle s’égare;
Oh! comme les oiseaux chuchotaient l’autre soir!
Pas plus que le raisin ne résiste au pressoir,
Pas plus que le roseau n’est au zéphyr rebelle,
Nul cœur pouvant aimer n’élude cette belle.
Comme la biche accourt et fuit à notre voix,
Elle est apprivoisée et sauvage à la fois;
Elle est toute innocente et n’a pas de contrainte;
Elle donne un baiser confiant et sans crainte
A quiconque est naïf comme un petit enfant;
Contre les beaux parleurs, fière, elle se défend;
Et c’est pourquoi je fais semblant d’être stupide;
Telle est la profondeur des amoureux. Et Gnide,
Amathonte et Paphos ne sont rien à côté
Du vallon où parfois passe cette beauté.
Muses, je chante, et j’ai près de moi Stésichore,
Plaute, Horace et Ronsard, d’autres bergers encore;
J’aime, et je suis Segrais qu’on nomme aussi Tircis;
Nous sommes sous un hêtre avec Virgile assis,
Et cette chanson s’est de ma flûte envolée,
Pendant que mes troupeaux paissent dans la vallée
Et que du haut des cieux l’astre éclaire et conduit
La descente sacrée et sombre de la nuit.
Qui se troussent gaîment autour de la fontaine!
O belles aux bras blancs follement amoureux!
J’ai vu passer Aminthe au fond du chemin creux;
Elle a seize ans, et tant d’aurore sur sa tête
Qu’elle semble marcher au milieu d’une fête;
Elle est dans la prairie, elle est dans les forêts
La plus belle, et n’a pas l’air de le faire exprès;
C’est plus qu’une déesse et c’est plus qu’une fée,
C’est la bergère; c’est une fille coiffée
D’iris et de glaïeuls avec de grands yeux bleus;
Elle court dans les champs comme, aux temps fabuleux,
Couraient Léontium, Phyllodoce et Glycère;
Elle a la majesté du sourire sincère;
Quand elle parle, on croit entendre, ô bois profond,
Un rossignol chanter au-dessus de son front;
Elle est pure, sereine, aimable, épanouie,
Et j’en ai la prunelle à jamais éblouie;
Comme Faune la suit d’un regard enflammé!
Comme on sent que les nids, l’amour, le mois de mai,
Guettent dans le hallier ces douces âmes neuves!
Dans des prés où ne coule aucun des divins fleuves
Qu’on appelle Céphise, Eurotas ou Cydnus,
Elle trouve moyen d’avoir de beaux pieds nus;
Cette fille d’Auteuil semble née à Mégare!
Parfois dans des sentiers pleins d’ombre elle s’égare;
Oh! comme les oiseaux chuchotaient l’autre soir!
Pas plus que le raisin ne résiste au pressoir,
Pas plus que le roseau n’est au zéphyr rebelle,
Nul cœur pouvant aimer n’élude cette belle.
Comme la biche accourt et fuit à notre voix,
Elle est apprivoisée et sauvage à la fois;
Elle est toute innocente et n’a pas de contrainte;
Elle donne un baiser confiant et sans crainte
A quiconque est naïf comme un petit enfant;
Contre les beaux parleurs, fière, elle se défend;
Et c’est pourquoi je fais semblant d’être stupide;
Telle est la profondeur des amoureux. Et Gnide,
Amathonte et Paphos ne sont rien à côté
Du vallon où parfois passe cette beauté.
Muses, je chante, et j’ai près de moi Stésichore,
Plaute, Horace et Ronsard, d’autres bergers encore;
J’aime, et je suis Segrais qu’on nomme aussi Tircis;
Nous sommes sous un hêtre avec Virgile assis,
Et cette chanson s’est de ma flûte envolée,
Pendant que mes troupeaux paissent dans la vallée
Et que du haut des cieux l’astre éclaire et conduit
La descente sacrée et sombre de la nuit.
Chargement de la publicité...