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La Puce de Mme Desroches

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QUATRAINS DE CATHERINE DES ROCHES
AUX POETES CHANTE-PUCES.

La Puce sauteloit au sommet d'une Roche
D'où premiere elle vid le soleil radieux:
Puis, dressant vers le Ciel son vol audacieux,
Plus son pouvoir l'elogne et son desir l'aproche.

Lors elle recognoist le danger qui s'apreste,
Pensant au vol d'Icare, au cours de Phaeton,
L'un mal-heureux oyseau, l'autre mauvais charton,
Se repent et reprend d'avoir haussé la teste.

O le digne ornement de la parfaite bande,
Pasquier, de qui le nom, l'oraison et les vers
Volent par la rondeur de ce grand Univers,
La Puce maintenant vostre secours demande.

Haussez la, grand Chopin, de qui la voix exquise
A souvent contenté ce fils de Jupiter,
Ce du Harlay qu'on void les hauts Dieux imiter,
Que tout le monde admire, estime, honore et prise;

Le Pillier, le miroir, l'oracle de la France,
Qui soutient, represente et anime sans fin
Peuples, Princes et loix, brise l'air Poitevin,
Pour conduire la Puce avec plus d'asseurance;

Mangot, le verd printemps à la vertu chenue,
Le favory des Dieux, le Mercure facond,
Qui est premier de tous et n'a point de second,
La sousleve, et luy fait outrepasser la nue.

Que diray-je, ô ESPRIT ORNÉ DE BEAUTÉ DINE,
De vos vers doux-coulans, sinon que les neuf Sœurs
Ont versé dedans eux leurs mielleuses douceurs
Pour attirer au Ciel la Puce Poitevine.

Celuy qui la reprend d'estre injuste et cruelle
L'honore en la blasmant; il ne fait voir sinon
Qu'elle est Puce fameuse et digne de renom,
Et la faisant mourir il la rend immortelle.

Ell' a pour son flambeau l'agreable lumiere
Des deux freres germains par les Muses élus,
Plus divins mille fois que Castor et Pollus,
Car ils ne changent point leur lampe journaliere.

Cet excellent rameau de la noble racine
Qui commandoit Verone a voulu prendre soin
De la petite Puce: aussi elle a besoin,
Pour monter dans les Cieux, d'une Escale divine.

Ainsi qu'elle approchoit du throne de sa gloire,
Amour la vint saisir. Ce petit affeté
En vain en est jaloux: car il est arresté
Que les vers de Binet luy donnent la victoire.

Qui seroit negligent à si loüable peine
Pour donner à la Puce un gentil ornement?
Le sçavant La Coudraye l'habille proprement,
Ores à la Françoise et or' à la Romaine.

Courage, ma mignonne, il faut prendre la place
Du meurtrier d'Orion, il faut prendre ce lieu
Qui vous est préparé d'un homme, mais d'un Dieu
Qui vous y fait guider par les mains de la Grace.

L'oyseau favorisé de l'archer du tonnerre,
Œilladant cette Puce avec un doux regard,
Luy veut prester son dos pour luy servir de chart,
Et de ses ailerons mignardement l'enserre.

Elle est placée au Ciel, et le fourier Hygine
N'a marqué son logis; mais cest oyseau sacré
Qui fait entre les Dieux ce qui luy vient à gré
A voulu qu'elle fut un favorable signe.

Bien-heureux qui l'aura au point de sa naissance
Pour son astre ascendant, et bien-heureux aussi
De qui elle prendra un gracieux soucy,
Faisant couler sur luy sa celeste influence.

Mais qui luy a donné cette chesne dorée?
Vrayment cest LE CLAIR OR, qui par l'eclair luysant
De ses beaux vers dorez luy a fait ce present,
Et par l'honneur de luy la Puce est honorée.
C. Des Roches.


TRADUCTION DU LATIN.

Ne t'estonne d'Ossan endossé sur l'Olympe,
Ny du Gean qui, fol, vers les estoilles grimpe,
Puis qu'on voit une Puce escheler le Rocher
Qui peut de Jupiter la hauteur approcher.
Pareils faits, non effetz: la terre enclost Typhée,
La Puce piafant fait des astres trophée,
Grands parreins les Geans bouleversez des Dieux,
Puce qui par Pasquier prend son vol jusqu'aux cieux.
E. Pasquier.


A PASQUIER.

Sur le teton jumeau je vy la Puce prendre
Et, riant, depucer la pucelle de pris.
Puce et pucelle ensemble, en tes divins escris,
Pasquier, tu veux et peux immortelles les rendre.
Fr. d'Amboise, advocat.


RESPONSE.

Tu t'abuzes, amy, la Puce ne feut prise,
Et pourquoy doncq'? D'autant que, sage, elle sautoit
Sur le sein de Madame, et là le suçotoit
Sans crainte, comme estant en un lieu de franchise.
E. Pasquier.


Ce n'est point par ma main que la sage pucelle
De Poictiers doit atteindre à l'immortalité:
Son sçavoir, sa vertu, ses meurs et sa beauté
La rendront à jamais de soy mesme immortelle.
E. Pasquier.


VŒU PASTORAL
EN FAVEUR DES POÈTES CHANTE-PUCES.

Celuy qui du Pascage emprunte le surnom,
Celle qui aux Rochers donne tant de renom,
Furent premiers motifs de cette Puce gaye.
Celuy qui à la Puce encor' a bonne part,
Et qui d'Amaryllis chante le sainct regard,
Trouva dans les forests le nom de la Couldraie.

Icy maint bon pasteur diversement voit on
Graver dans le sainct Roch sous l'a Bry son sainct nom;
Icy le bel Oysel degoiser son ramage,
Et le pastre Tourneur chanter mil beaux couplés,
Et tous abandonner la Deesse Palés
Pour faire à qui mieux mieux à une Puce hommage.

Icy voit-on le mont de Parnasse Escheler,
Icy le forgeron sainctement Marteler,
Icy pour, bien Biner, les riches fruicts renaistre
Au dessous des Chaux Pins, et le jeune berger,
Et Amboise des Dieux l'ambrosie Manger
Et du mielleux nectar souëfvement se paistre.

Vous qui hantez les Rochz, les pastiz, les forez,
Satyres chevrepieds et Faunes, quand orrez
De voz humbles pasteurs la devote musique,
Recevez dans vos monts, dans vos prés, dans vos bois,
D'un favorable accueil, leurs doux sonantes voix,
Mais gardez que comme eux la Puce ne vous picque.
E. Pasquier.


TRADUCTION DU LATIN.
(Voir les Notes.)

Sur la Puce maint manœuvre
S'est joué: Loisel icy
En fin sur ton nom descœuvre
Une couronne, et ainsi
La fin couronne ton œuvre.

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