Ma Fille Bernadette
UNE AUTRE SŒUR DE TON BISAIEUL JEAN-BAPTISTE
Si Clémence optait pour la vie contemplative, Célanire avait choisi la vie active. Je revois Célanire aux yeux bleus, au menton et au nez crochus, osseuse et voûtée sur le fond de suie de l’âtre où elle fixe à une pince de fer une chandelle de résine ; elle rompt du fagot sur son genou, évente les braises avec un écran, gonfle ses joues pour attiser le feu davantage, frotte le gril, avance et recule le pot où cuisent des haricots, suspend le chaudron à la crémaillère, bat l’omelette, s’impatiente, chasse les chats, balaie, cire, lave, tire du vin de la barrique et, à la mode béarnaise, lèche sur le dos de sa main un peu d’aigre pâte de millet.
C’est la saison où il faut surveiller les vendanges. Elle boit un peu de café et de bouillon, coiffe un chapeau de moissonneuse, grimpe dans le char-à-bœufs, se dispute avec le métayer et prétend lui confectionner des guêtres avec un vieux haut-de-forme.
Elle prise du tabac, joue au loto et cite des proverbes.
Le soleil descend comme un pressoir sur la colline rouge.