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Mémoires touchant la vie et les écrits de Marie de Rabutin-Chantal, (2/6)

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Il donna librement sa foi

Tour à tour à chaque couronne;

Il se fit l'étrange loi

De ne la garder à personne.

Cette morale dépravée fut commune parmi les guerriers de ce temps, et le duc de Lorraine fit plus d'un élève. On peut lire dans les Mémoires de Loménie de Brienne, t. II, p. 295, quels affreux conseils donnait à ce jeune homme entrant dans le monde le duc de Vendôme.

Page 414, ligne 20: En épousant ensuite Béatrix de Cusane, princesse de Cantecroix.

Le mariage du duc de Lorraine avec la princesse de Cantecroix eut lieu en 1637, à Besançon.

Page 415, ligne 25: Les déterminations de Charles IV.

La duchesse de Châtillon elle-même ne craignait pas de donner de la jalousie à Condé, en faisant des coquetteries au duc de Lorraine.

Page 416, ligne 2: Ses manières si étranges parurent piquantes.

Dans une promenade au Cours que le duc de Lorraine fit avec la duchesse de Chevreuse, sa fille, et madame de Frontenac, sa conversation fut tout à fait ordinaire. Voyez les Mémoires de Conrart.

Page 416, ligne 10: Les troupes de tous les partis.

Les troupes du duc de Lorraine n'étaient pas les seules qui commissent des désordres; celles des princes, les troupes royales elles-mêmes, ne se conduisaient pas mieux. Pour donner une idée de l'indiscipline de ces dernières, il suffit de dire que le maréchal d'Hocquincourt, qui les commandait, ne put empêcher sa maison d'être dévastée. Chavagnac avoue que pendant deux jours qu'il fut cantonné à Poissy, il reçut de riches présents des propriétaires des environs pour empêcher qu'ils ne fussent pillés.

Page 416, ligne 20: Le chef d'une troupe de démons que, comme un général d'armée...

Loret, dans sa gazette, raille ainsi les Parisiens de l'accueil qu'ils faisaient au duc de Lorraine:

Les soldats du duc de Lorraine

Ont enfin traversé la Seine,

Et plusieurs des gens de Paris,

Loin d'en avoir les cœurs marris,

Après avoir mangé leurs soupes,

Allèrent voir passer ces troupes

Avant-hier, qu'il faisait beau,

Dans la plaine de Long-Boyau.

Ils ont brûlé cinq cents villages,

Ravi douze cents pucelages,

Fait deux mille maris cornus,

Et pourtant sont les bien-venus.

Page 418, ligne 15: L'abbesse de Pont-aux-Dames.

Conrart place ce fait le 4 juin.

Page 421, lignes 6 à 8: Elles portaient des rubans, des montres d'or, etc.

Au sujet des habillements de ces religieuses, voici comment s'exprime saint Vincent de Paul:

«Plures vestes monialum deferunt indecentes, et immodestas. In locutoriis se ostentant vittis ignei coloris fulgentes; horarias aureas, seu horologia aurea gestitant; chirotecas etiam raras, et quas vocant hispanas, induunt.» (G. Delort, Mes Voyages aux environs de Paris, in-8o, t. II, p. 173.)

CHAPITRE XXX.

Page 425, ligne 6: Où chaque guerrier se bat avec acharnement.

Cette bataille eut lieu le 5 juillet. Les descriptions qu'en ont données les historiens que j'ai cités se ressemblent toutes, et sont exactes; mais elles sont dépourvues de ces scènes animées qu'on trouve dans les Mémoires, et dont nous avons tenté de donner une esquisse. Il y a dans Ramsay, ainsi que dans Désormeaux, un très-beau plan de cette bataille; c'est le même dans les deux ouvrages. Il a été réduit dans l'édition in-12 de l'ouvrage de Désormeaux.

Page 425, ligne 21: En versant des torrents de sang.

L'aide de camp de Chavagnac, après s'être battu en brave homme, fut tellement frappé d'horreur du massacre de cette journée, qu'il quitta l'état militaire et se fit capucin.

Page 426, ligne 16: Mais nul plus que Saint-Mesgrin.

Personne n'était plus aimé à la cour que Saint-Mesgrin. Malgré sa jeunesse, il avait commandé en chef une armée en Catalogne, et déployé dans cette campagne les plus grands talents pour la guerre. La reine mère, dont il était chéri et favorisé, le pleura, et le fit inhumer avec pompe à Saint-Denis. Saint-Simon donne très en détail, dans l'endroit cité, toute l'histoire du père de ce jeune homme, qui mourut en 1665, à l'âge de quatre-vingt-trois ans. Il était gendre du maréchal de Roquelaure, et grand sénéchal de Guyenne. Saint-Simon nous apprend que le vrai nom du père de Saint-Mesgrin était Esthbuert; ce fut par une héritière de Caussade, dont il joignit son nom au sien, qu'il devint Saint-Mesgrin. Dans l'insipide ouvrage de Somaize, il y a quelques détails sur la duchesse de Chaulnes, qui fut veuve de Saint-Mesgrin, et sur les femmes qui étaient ses amies. Elle est désignée sous le nom de Clidaris; Sophronie est madame de Sévigné; le Palais-Sénèque est le Palais-Royal; Barsane est cette marquise des Brosses dont j'ai raconté les aventures touchantes dans la Vie de Maucroix. Le jeune de Fouilloux s'était joint aussi à Saint-Mesgrin, et périt dans la même action.

Page 428, lignes 8 et 9: Dans une maison de particulier.

Cette maison était celle d'un nommé de La Croix, maître des comptes.

CHAPITRE XXXI.

Page 431, ligne 16: Le duc de Beaufort, le héros de la populace de Paris.

L'hôtel de Beaufort était alors rue Quincampoix.

Page 431, lignes 19, 20: Qui épouvantèrent le gouverneur, le prévôt des marchands, les échevins.

Le carrosse du prévôt des marchands fut attaqué par la populace, et un échevin fut blessé. On pilla la boutique d'un armurier nommé Regnicourt. Un nommé L'Espinois, capitaine de son quartier, manqua d'être jeté à l'eau, parce qu'il était accusé d'être retz ou mazarin.

Page 431, ligne 21: Et forcèrent à fuir sous divers déguisements...

La maréchale de Turenne, qui demeurait alors rue Saint-Louis au Marais, alla rejoindre la cour; Seguier, premier président, en fit autant, ainsi que le roi et la reine d'Angleterre, qui se trouvaient alors à Paris. (Loret, liv. III, p. 64.)

Page 432, ligne 9: Força de recourir à une assemblée générale.

Talon donne, dans cet endroit de ses Mémoires, des renseignements curieux et intéressants sur les grandes et les petites assemblées de la ville de Paris.

Page 432, lignes 16 et 17: De ses soldats déguisés en gens du peuple.

Lefebvre de La Barre, prévôt des marchands, donna sa démission aussitôt après le tumulte.

Page 432, ligne 22: A se soustraire à la fureur populaire.

Les vers de Loret, quoiqu'ils soient toujours dépourvus de grâce et de poésie, ont, en racontant ces scènes déplorables, une naïveté qui plaît, parce qu'on y voit une douleur sincère dans celui qui les écrivait. Ce gazetier si insipide, ce versificateur si plat, était un des plus honnêtes hommes de cette époque; il montre partout les sentiments d'un bon Français; et s'il flattait les grands, il ne les abandonnait pas dans le malheur, comme le prouva l'affaire de Fouquet.

Page 434, ligne 24: Avaient encore augmenté le resserrement de la population.

Talon dit qu'il y avait alors cent mille personnes auxquelles la charité était distribuée. Le pain blanc valait le 6 juillet onze à douze sous la livre (c'est vingt-quatre sous d'aujourd'hui). Le pain bis valait sept sous (quatorze sous).

Page 435, ligne 21: Pour un vol de 300,000 livres de marchandises.

C'est Chavagnac lui-même qui raconte ce fait. Ces marchandises appartenaient à des bourgeois de Paris.

Page 435, ligne 25: Gaston fit aussitôt conduire le comte de Rieux à la Bastille.

Il est fait mention de cette affaire du comte de Rieux dans plusieurs des Mémoires du temps; mais c'est dans les Mémoires de Talon qu'elle est le mieux détaillée.

Page 436, ligne 11: Beau, galant, gracieux et enjoué.

Voici le portrait que Bussy-Rabutin, qui n'est pas louangeur, nous a laissé du duc de Nemours: «Ce duc avait les cheveux fort blonds, le nez bien fait, la bouche petite et de belle couleur; il avait la plus jolie taille du monde, et dans ses moindres actions une grâce qu'on ne pouvait assez admirer; l'esprit fort enjoué et badin.»

Page 438, ligne 25: Pour en arracher cette détermination.

Condé, par le moyen de ses liaisons avec l'Espagne, avait obtenu, au moyen d'une rançon, la liberté du duc de Guise, fait prisonnier par les Espagnol, lors de son expédition contre le royaume de Naples; mais en arrivant à Paris le duc de Guise se déclara pour le roi, et siégea dans la séance où la déclaration royale qui proscrivait Condé fut enregistrée. Le duc de Rohan aussi accepta l'amnistie, et ne suivit pas Condé.

Page 439, ligne 24: Depuis qu'il n'était plus obligé de la disputer à Nemours.

Lorsque Condé, par une habile manœuvre, eut enfermé l'armée de Turenne entre la sienne et celle du duc de Lorraine, il fut saisi d'une fièvre qui lui dura quelques jours, et l'empêcha de profiter des succès de ses combinaisons. Guy-Joly dit, dans ses Mémoires, que cette indisposition de M. le Prince fut causée par une comédienne dont il s'était trop approché. Ce qui me semble prouver, comme je l'ai dit, que Condé bien avant son départ de Paris était fort refroidi à l'égard de la duchesse de Châtillon.

Pages 441, lignes 1 et 2: De femmes qui dans le vice conservassent moins de respect pour la vertu.

Sauval donne encore pour amants à la duchesse de Châtillon, Bouchu, intendant de Bourgogne, et Cambiac, auquel il donne le titre de chanoine d'Alby et de Montauban. Mais Sauval, mal instruit des choses de la cour, a écrit longtemps après les événements. Pour tous ces petits faits scandaleux, qui ont de l'importance par leur influence sur les grands événements, il faut consulter les Mémoires des personnes qui ont connu les personnages mêmes auxquels ces anecdotes sont relatives. Les Mémoires de Montpensier, de Motteville, et surtout ceux de Bussy, sont les meilleures sources et les plus authentiques.

CHAPITRE XXXII.

Page 446, ligne 17: Telles étaient les dispositions où se trouvait Balzac.

Jean-Louis Guez, seigneur de Balzac, naquit en 1594 et mourut en 1655. Employé d'abord à Rome sous le cardinal de la Valette, il avait été fait conseiller d'État.

Page 448, lignes 20 et 27: Le suivirent à Nantes.

Salmonet était d'avis que le cardinal de Retz s'évadât; et s'il avait suivi ce conseil et qu'il eût cessé d'intriguer avec ceux du parti de Condé, il se serait encore arrangé avec la cour, tant la possession de l'archevêché de Paris et son union avec le clergé de cette ville le rendaient puissant, et exigeaient de ménagements de la part de l'autorité.

Page 451, lignes 17 et 18: Après ce piquant écrit: Vita Mamurræ.

La Vita Gargillii Mamurræ fut composée en 1636, et imprimée en 1643 par Adrien de Valois, dans un recueil de pièces contre Montmaur, t. I, p. 23. L'Anti-Gomorrhe, t. I, p. 44, de Sallengre, est de Charles Vion. Sallengre cite des mots de Montmaur très-spirituels. La Vita Mamurræ est dédiée à un nommé Ferramus, avocat; il était de Boulogne.

Page 452, ligne dernière du texte: Dans cette première édition des poésies de Ménage.

Ménage, à la cinquième édition, ajouta à l'idylle d'Alexis les deux vers suivants, p. 146:

Digne objet de mes vœux, à qui tous les mortels
Partout, à mon exemple, élèvent des autels.

Et dans la septième, à ces mots: à la tendre amitié, il substitua: aux lois de l'amitié; et à ceux-ci: et dont l'âme insensible,—et toujours insensible.

CHAPITRE XXXIII.

Page 456, ligne 1re du texte: Le marquis de Tonquedec était...

Conrart rapporte les deux versions qui coururent dans le public sur cette première rencontre de Tonquedec et de Rohan: la version de Rohan et celle de madame de Sévigné (p. 91). Celle de madame de Sévigné mérite le plus de confiance, et est aussi la plus vraisemblable.

Page 459, lignes 22 et 23: Et Loret même en avait parlé dans sa gazette.

Loret, dans sa Muse historique, annonce ainsi cette affaire.

Rohan, dont le cœur et la mine

L'ont fait parvenir à l'hermine,

Et le marquis de Tonquedec,

Quoique dans un lieu de respec,

Savoir, chez Sevigny la belle,

Eurent entre eux grosse querelle, etc.

Page 461, ligne 25: Le duc de Rohan mourut.

Loret a donné la date précise de la mort du duc de Rohan, dans sa gazette datée du 6 mars, lorsqu'il dit:

Ce fut depuis sept jours en çà
Que le noble duc trépassa, etc.

CHAPITRE XXXIV.

Page 464, ligne 1re: Scarron se maria.

L'époque du mariage de Scarron avec Françoise d'Aubigné (depuis madame de Maintenon) se trouve exactement déterminée par la gazette de Loret; cependant presque tous les auteurs qui ont écrit sur elle ou sur Scarron l'ont ignorée, ou, ce qui est pire, lui ont assigné une fausse date. M. Monmerqué, si curieux et si exact dans ses recherches, ne donne point la date de ce mariage dans l'article Maintenon, dont il a enrichi la Biographie Universelle. Madame Suard et Dreux du Radier placent ce mariage en 1650, deux ans avant sa véritable date. Madame Guizot le met en 1651, probablement sur l'autorité de La Beaumelle, qui même va jusqu'à désigner en marge le mois d'avril; mais la date de l'année comme celle du mois sont également fausses. Segrais, par ses contradictions, est la première cause de ces erreurs; dans une page de ses Souvenirs, il dit que Scarron se maria en 1650 (voyez page 100), et dans une autre, p. 105, en 1651. Les auteurs subséquents ont pris à peu près au hasard l'une ou l'antre date, sans se douter qu'ils ne choisissaient qu'entre deux erreurs. Cependant, longtemps avant moi, les frères Parfaict, dans leur Histoire du Théâtre français, avaient, d'après la gazette de Loret, donné la véritable date. M. Fabien Pillet, dans l'article Scarron, de la Biographie Universelle, a bien dit que ce mariage eut lieu en 1652, mais sans aucune discussion, et sans détermination plus précise. C'est dans sa lettre 52, du 31 décembre 1651 (liv. II, p. 179), que Loret parle du projet de Scarron de se transporter en Amérique avec la sœur Céleste (mademoiselle de Palaiseau), quand le printemps sera venu; nulle mention alors que Scarron eût pris femme: c'est dans la lettre 22 du 9 Juin 1652 (liv. III, p. 77) que Loret parle du mariage récent de Scarron, et de son procès avec sa belle-mère.

Monsieur Scarron, esprit insigne...,

Avait un procès d'importance,

Lequel il a perdu tout net.

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Car enfin ledit personnage

Ayant contracté mariage

Avec une épouse ou moitié,

Qu'il a prise par amitié,

Il était chargé, ce me semble,

De deux pesants fardeaux ensemble.

C'est à l'imitation de Scarron que Loret écrivait sa gazette en style burlesque. Il le regardait comme son maître et son modèle dans ce genre d'écrire. Il professait pour lui la plus grande admiration. Il donne place dans sa gazette aux plus petites choses qui le concernent. Si donc ce mariage avait été antérieur de plus de quinze jours à cette feuille du 9 juin, Loret n'aurait pas manqué d'en faire mention dans les gazettes antérieures; il n'en dit rien: donc c'est entre la gazette qui a précédé celle-ci et le 9 juin que ce mariage a eu lieu.

Page 463, note 2: Lettre à mademoiselle d'Aubigné.

Cette curieuse lettre de Scarron est certainement adressée à mademoiselle d'Aubigné, quoique son nom ne soit pas dans les éditions. Les correspondances de Scarron, de madame de Maintenon, et de Bussy, ont été imprimées avec une négligence qui les rend souvent inintelligibles même aux plus instruits.

Page 464, lignes 7 et 8: Agée de seize ans et demi.

Madame de Maintenon était née le 28 novembre 1635; elle avait donc seize ans et demi lors de son mariage; son frère était plus jeune.

Page 465, lignes 6 et 7: Contemplez cet enfant qui se joue sur le rivage de Sicile.

Des recherches récentes, dues à un savant Italien, sur l'origine de la famille de Mazarin, ont constaté ces faits. Ils m'ont été communiqués par M. Artaud de Montor, qui a résidé longtemps en Italie, auquel nous devons la meilleure traduction et la meilleure vie du Dante, et tant d'excellents ouvrages qui concernent l'Italie. Saint-Simon, si curieux et si savant sur tout ce qui se rapporte aux recherches généalogiques, avait en quelque sorte deviné la naissance infime de Mazarin; car dans ses Mémoires, après avoir parlé des nièces du cardinal, il dit: «Si les pères de ces nièces n'étaient rien, leurs mères, sœurs du cardinal Mazarin, étaient, s'il se peut, encore moins. Jamais on n'a pu remonter plus haut que le père de cette fameuse éminence, ni savoir où elle est née, ni quoi que ce soit de sa première jeunesse. On sait seulement qu'ils étaient de Sicile; on les a crus des manants de la vallée de Mazare, qui avaient pris le nom de Mazarin, comme on voit à Paris des gens qui se font appeler Champagne, Bourguignon. La mère du cardinal était Buffalini. Son père mourut obscur à Rome, en 1654, âgé de soixante-dix-huit ans. Cela n'y fit pas le moindre bruit. Les nouvelles publiques de Rome eurent la malice d'y insérer ces mots: «Les lettres de Paris nous apprennent que le seigneur Pietro Mazarini, père du cardinal de ce nom, est mort en cette ville de Rome, etc.» (T. XI, p. 190.) Loménie de Brienne, qui écrivait du vivant même de Mazarin, et lorsqu'il était tout-puissant, ne savait rien non plus sur son origine; il dit, t. II, p. 10: «Que le cardinal fût de Rome ou de Mazara, qu'il fût né gentil-homme ou non, je laisse ces difficultés à débrouiller aux généalogistes.»

Page 466, ligne 24: Au dur despotisme d'une parente avare.

Cette parente était la comtesse de Neuillant, mère de madame la duchesse de Navailles.

Page 466, lignes 26 et 27: On la croyait née en Amérique.

Saint-Simon le croyait encore, et ignorait de qui elle était descendue. La justice vient tard pour les personnages qui ont exercé un grand pouvoir; tout ce que dit Saint-Simon sur madame de Maintenon est l'expression de la haine et le résultat de la plus injuste partialité. Il en est de même de ce qu'a dit Madame (mère du duc d'Orléans, régent) dans sa correspondance. Il en est de même de presque tous ceux qui ont écrit sur cette femme célèbre dans le temps de sa faveur. Pendant tout le dix-huitième siècle les philosophes, à cause de sa dévotion, lui ont attribué sur les affaires une influence qu'elle n'avait pas, afin de pouvoir rejeter sur elle les malheurs publics et les désastres des dernières années du règne de Louis XIV. Ce n'est que de nos jours que l'on a commencé à la juger impartialement.

Page 467, lignes 17 et 18: Loret, en devisant sur ce prétendu voyage dans sa bavarde gazette.

Dans la lettre 25, en date du 5 octobre 1652, liv. III, p. 139, Loret dit:

Monsieur Scarron, auteur burlesque,

Fort aimé du comte de Fiesque,

Est parti de cette cité

Ayant sa femme à son côté,

Ou du moins en étant bien proche,

Lui dans une chaise, elle en coche,

Pour devers la ville de Tours

Aller attendre quelques jours

L'embarquement pour l'Amérique,

Où sa personne poétique

Espère trouver guérison.

Puis, dans la lettre 45, en date du 9 novembre 1652, liv. III, p. 154, c'est-à-dire un mois après la lettre précédente:

J'avais dit, en juin ou juillet,

Que cet esprit rare et follet,

Admiré de tout galant homme,

Qui le petit Scarron se nomme,

Avait choisi par amitié

Une jeune et belle moitié.

J'ai dit, en une autre semaine,

Que vers les champs de la Touraine

Icelui s'était transporté

Ayant sa femme à son côté,

Avec intention formée

(Ce disait lors la Renommée)

D'attendre, sans y manquer,

La saison propre à s'embarquer,

Pour voguer en terre lointaine,

Que l'on appelle américaine,

En laquelle il prétend, dit-on,

Devoir rehausser son menton.

Or, j'ai maintenant à vous dire

Que cet auteur à faire rire,

Nonobstant son corps maladif,

Est devenu génératif;

Car un sien ami tient sans feinte

Que sadite épouse est enceinte

De trois ou quatre mois et plus.

Et puis dites qu'il est perclus!

Madame de Maintenon écrivait, dans une de ses lettres à son frère: «Vous savez que je n'ai jamais été mariée.»

Page 468, lignes 15 et 16: C'est elle-même qui a fait l'aveu de ce dernier motif comme d'une faiblesse...

Dans le passage cité de La Beaumelle, elle dit: «J'en suis punie aujourd'hui par l'excès de faveur; comme si Dieu m'eût dit, dans sa colère: Tu veux de la gloire et des louanges: eh bien! tu en auras jusqu'à en être rassasiée.»

Pages 468 et 469, lignes dernière et première: Les doutes qu'on a élevés sur madame Scarron au sujet du marquis de Villarceaux.

Tallemant des Réaux, après avoir rapporté un voyage que madame Scarron fit au château de Villarceaux avec Ninon, et l'amour que Villarceaux avait pour madame Scarron, et les efforts qu'il fit pour la séduire, termine ainsi: «On croit cependant qu'elle n'a pas franchi le pas.» Scarron à l'endroit cité marque le commencement de sa liaison avec Villarceaux, et ajoute: «Je vous en dirai demain davantage chez mademoiselle de Lenclos, où je me ferai porter à l'heure du dîner.»

Page 469, ligne 21.

La pièce de Scarron intitulée Étrenne à mademoiselle de Lenclos est, suivant moi, du temps de la jeunesse de Scarron et de Ninon. Voici le passage de Saint-Simon sur la liaison de madame de Maintenon avec Ninon: «Elle (Ninon de Lenclos) avait été amie intime de madame de Maintenon tout le temps que celle-ci demeura à Paris. Madame de Maintenon n'aimait pas qu'on lui parlât d'elle, mais elle n'osait la désavouer. Elle lui a écrit de temps en temps jusqu'à sa mort avec amitié. Lenclos (car Ninon avait pris ce nom depuis qu'elle eut quitté le métier de sa jeunesse longtemps poussée) n'y était pas si réservée avec ses amis intimes; et quand il lui est arrivé de s'intéresser fortement pour quelqu'un ou quelque chose, ce qu'elle savait rendre rare et bien ménager, elle en écrivait à madame de Maintenon, qui la servait efficacement et avec promptitude; mais depuis sa grandeur elles ne se sont vues que deux ou trois fois, et bien en secret.»

Page 472, ligne 14: Il propose des plans d'entreprise.

Il s'agissait de créer des offices de déchargeurs pour les marchandises, auxquels une compagnie aurait avancé des fonds pour payer les droits, et faire rendre et décharger les marchandises dans les magasins, aux frais, risques et périls des déchargeurs.

Page 473, ligne 7: Sa femme obtint une pension.

La Beaumelle place en 1653 la pension de seize cents livres que madame de Maintenon obtint par l'entremise de madame Fouquet.

Page 473, lignes 17 et 18: Qui chantaient les louanges de la belle Indienne.

Voici quelques vers de la pièce de La Mesnardière, intitulée la Belle Indienne, à la jeune, belle et spirituelle madame Scarron:

Galanterie.

Quant à moi, je me persuade

Que ce rare et plaisant malade,

Votre fameux et cher époux,

Se passera fort bien de vous.

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Et pour lui faire voir, ma belle,

Combien votre approche est mortelle,

Je connais des gens à la cour

Qui, pour avoir vu certain jour

Seulement votre gorge nue,

En ont la fièvre continue.

Quel devrait être leur tourment,

S'ils vous voyaient à tout moment!

Ceci prouve, au reste, qu'alors la mode pour les femmes était de se découvrir le sein lorsqu'elles étaient habillées; mais ce n'est pas sur ce ton que la Mesnardière louait les appas de la marquise de Rambouillet, ou de sa fille, la duchesse de Montausier. Segrais rapporte que Scarron avait un valet fort simple et fort benêt, auquel les jeunes seigneurs qui venaient chez lui s'amusaient à demander si son maître ne ferait pas bien un enfant à sa femme, parce qu'il répondait toujours: «Oui-da, monsieur, s'il plaît à Dieu.»

Page 473, ligne 23: Qu'avant l'invention des sonnettes de renvoi.

Saint-Simon dit aussi de l'abbé de Fleury, dans ses Mémoires, qu'il s'était rendu agréable dans plusieurs maisons, et qu'il suppléait aux sonnettes avant leur invention.

Page 474, ligne 16: Nos recherches n'ont pu nous faire découvrir.

J'ai cherché en vain l'époque de l'invention des sonnettes de renvoi dans les ouvrages qui décrivent l'art de la serrurerie, dans le grand Dictionnaire des Inventions. Elle n'est pas ancienne; et en parcourant les gazettes publiques du commencement de la régence, on doit pouvoir la déterminer facilement. Ceci m'a donné occasion de remarquer plusieurs passages de Saint-Simon qui nous indiquent les époques auxquelles il a écrit les différents volumes de ses Mémoires. Né en janvier 1675, déjà en 1699, à l'âge de vingt-quatre ans, il les avait commencés, puisque alors il consultait l'abbé de Rancé pour savoir si en sûreté de conscience il pouvait se permettre de les continuer. Ce qui concerne l'année 1714 a été écrit ou retouché postérieurement à l'année 1732 (voy. t. XI, p. 371), puisque Saint-Simon cite dans cet endroit ce que Du Halde lui a dit en 1732. L'année 1715 a été écrite en septembre 1745 (voyez t. XII, p. 248); une autre portion de ces mémoires, en 1746, c'est-à-dire plus de trente ans après l'événement. Le discours préliminaire, ou l'introduction, est daté de juillet 1743; c'est dans cette année ou dans l'année précédente qu'a été écrit le XVIIIe volume, qui concerne les années 1719 et 1721.

Page 474, deux dernières lignes: Qu'elle fit pleuvoir sur ses anciennes protectrices.

On trouve dans les lettres de Scarron quelques détails curieux sur les rapports de madame Scarron avec les grandes dames ses protectrices, dont quelques-unes ont été depuis protégées par elle. Scarron, t. I, p. 92, écrit au maréchal d'Albret: «Madame Scarron a été à Saint-Mandé. Elle est fort satisfaite de la civilité de madame la surintendante (madame Fouquet); et je la trouve si férue de ses attraits, que j'ai peur qu'il ne s'y mêle quelque chose d'impur. Mais comme elle ne va que quand ses amis la mènent, faute de carrosse, elle ne peut lui faire sa cour aussi souvent qu'elle le souhaite.»—Il dit encore au maréchal d'Albret: «Votre carrosse rendait ma petite porte vénérable à tous les habitants de la rue Saint-Louis.»—Dans sa lettre au duc d'Elbœuf, il se plaint que madame de Montchevreuil lui a enlevé madame Scarron.

CHAPITRE XXXV.

Page 479, avant-dernière ligne: Dans le grenier d'une maison voisine.

Le maître de la maison dans laquelle Marigny s'était retiré ne sut que longtemps après qu'il avait donné refuge à un criminel d'État, et les soins que sa servante lui avait rendus. C'est presque aussitôt après s'être évadé de Paris, et au commencement de l'année 1655, que Marigny écrivit de Bruxelles cette lettre à Gaston, qui depuis a été imprimée, et où il lui parle de toutes les beautés que le prince avait eu occasion de fréquenter autrefois pendant son séjour dans la capitale de la Flandre. Cette lettre nous apprend que la comtesse flamande qui envoya un médaillier à Gaston, dont parle mademoiselle de Montpensier, mais qu'elle ne nomme pas, était la marquise de Lédé.

CHAPITRE XXXVI.

Page 488, ligne 19: Nulle femme n'a jamais su mieux qu'Anne d'Autriche tenir un cercle.

Saint-Simon dit que Louis XIV, élevé dans les cercles brillants de la reine sa mère, aurait voulu les faire revivre, mais qu'il ne put y parvenir. Ces cercles finirent avec elle.

Page 490, ligne 24: Toutes les fois qu'on donnait le Cid.

On représenta le Cid aux noces de mademoiselle de Schomberg, et il eut alors un succès extraordinaire.

Page 492, lignes 16 et 17: Dans son château de Saint-Fargeau, qu'elle agrandissait.

Ce fut Le Vau, architecte du roi, qui fit les nouvelles constructions du château de Saint-Fargeau. Mademoiselle y dépensa plus de 200,000 fr., valeur de cette époque (400,000 fr.). Elle avait avec elle dans son exil la vieille comtesse de Fiesque, puis sa belle-fille la comtesse de Fiesque la jeune, et madame de Frontenac. Elle eut de fréquentes querelles avec ces deux dernières: elle n'en était guère aimée, et leur rendait le change. La vieille madame de Fiesque voulut introduire dans le château mademoiselle d'Outrelaise, qu'à cette occasion Loret nomme la divine. Nous reviendrons sur cette expression, et sur mademoiselle d'Outrelaise, lorsque madame de Sévigné, qui fait mention d'elle, nous en fournira l'occasion.

Page 492, ligne 19: Sa naine.

Loret, dans sa gazette, annonce sa mort et fait son épitaphe. Il dit qu'en la mettant dans une petite balance, avec sa robe, sa chemise et sa coiffure, elle ne pesait pas plus qu'un louis d'or. Si le fait était rigoureusement vrai, il resterait à déterminer quel était le poids d'un louis d'or en 1653.

Page 492, ligne 20: Entretenait une troupe de comédiens.

Nous avons dit qu'on ne donnait pas une grande fête, pas un grand repas, sans le secours des comédiens. Ainsi lorsque le président Tubœuf régala toute la cour dans son château de Ruel, qui avait appartenu au cardinal de Richelieu, il fit représenter, avec des décorations de Beaubrun, la pastorale d'Amarillis, qui avait eu tant de succès l'année précédente. Beaubrun était un fameux peintre de portraits, qui mourut en 1692, à quatre-vingt-huit ans. Loret a décrit le repas donné au mois d'août à Monsieur par Mazarin, et où se trouvèrent le roi, les deux reines, c'est-à-dire la reine mère et la reine d'Angleterre, avec les princes ses fils, le prince et la princesse de Galles, le duc d'York et le duc de Glocester, qui venait d'arriver; et dans cette description le gazetier n'oublie pas de nous dire

Qu'après les friands aliments

Vinrent les divertissements,

Savoir, d'excellentes musiques

Et de beaux spectacles comiques.

Loret nous apprend que le service fut fait en argent ou porcelaine. La porcelaine était donc alors en usage. Voyez Loret, liv. IV, p. 97, et liv. V, p. 24.

Loret, en décrivant le repas donné par le duc d'Arpajon, dit:

Tout y fut assez jovial,

Car la comédie et le bal

Qui suivirent cette abondance

Divertirent fort l'assistance.

Et aussi, lors du festin pour les noces du marquis de Bade:

Enfin, après ce grand repas

Si semé de plats et d'appas,

On ouït quelque mélodie,

Et sur le soir la comédie.

Voyez Loret, liv. V, p. 19, lettre en date du 7 janvier 1654, et p. 24, lettre en date du 21 février 1654. Je pourrais multiplier ces exemples.

Page 493, ligne 25: Et celui du Petit-Bourbon.

Loret nous apprend ce fait dans sa gazette du 30 août 1653:

Une troupe de gens comiques

Venus des climats italiques,

Dimanche dernier, tout de bon,

Firent dans le Petit-Bourbon

L'ouverture de leur théâtre.

Page 494, ligne 19: Ayant pour titre la Nuit.

La description de ce ballet de la Nuit fut imprimée chez Ballard; mais il en existe une copie manuscrite in-folio à la bibliothèque de l'institut, avec les dessins de tous les personnages revêtus de leurs costumes, peints à l'aquarelle. Ces costumes étaient riches en couleurs, chargés d'or et d'argent, de galons, et de paillettes brillantes, bizarres et fantastiques.

Je remarque que, dans la prolixe description qu'il a donnée de ce ballet, Loret parle de Villequier (probablement le duc de Villequier) qui distribuait des billets, et faisait placer tout le monde. La rue qui passait devant le théâtre du Petit-Bourbon, et qui était une continuation de la rue actuelle des Poulies, se nomme Villequier sur le plan de Paris de Berey de 1654; et je crois que ce nom a échappé à Jaillot, et à tous les laborieux scrutateurs des origines de Paris.

Page 496, lignes 12 et 13: La suite en fit voir de déplorables conséquences.

Philippe de France ou Monsieur, frère de Louis XIV, naquit le 21 septembre 1640; Louis XIV, le 5 septembre 1638. Les preuves abondent sur les goûts dépravés de Monsieur, qui inspiraient à son frère une juste aversion. Saint-Simon, à l'endroit cité, dit: «Le goût de Monsieur n'était pas celui des femmes, et il ne s'en cachait pas.» A ce ballet de la Nuit, le duc de Buckingham, fils de celui qui excita si vivement la jalousie de Louis XIII par ses attentions pour Anne d'Autriche, représenta le démon du feu. (Benserade, t. II, p. 57.)

Je remarque dans les diverses descriptions de ce ballet que certains objets de luxe étaient alors d'une cherté qu'on a peine à concevoir aujourd'hui: ainsi Loret nous apprend qu'une orange de Portugal coûtait cinq livres, c'est-à-dire dix livres de notre monnaie actuelle. (Loret, liv. IV, p. 59.)

Page 497, lignes 11 et 12: Monsieur et madame de Montausier étaient occupés à solliciter.

La marquise était venue à Paris la première, pour solliciter Mazarin. Son mari ne vint l'y rejoindre qu'après la paix de Bordeaux, le 31 juillet.

Page 498, lignes 20 et 21: Ne sont pas toujours exemptes d'obscénités.

Voyez, p. 74 de ce recueil de Sercy, une pièce intitulée A une demoiselle tourmentée de vents, dont je ne puis rien citer. Cela se dédiait à un aumônier du roi, et s'imprimait avec privilége du roi. Le privilége est du 19 janvier 1653. Le livre fut achevé d'imprimer le 24 mars de la même année.

Page 498, note 1: Poésies choisies, etc.

C'est dans ce recueil de Sercy qu'on trouve aussi pour la première fois imprimés les vers pour la Guirlande de Julie, et les épigrammes, rondeaux et impromptus auxquels la dispute des sonnets de Job et d'Uranie a donné lieu.

CHAPITRE XXXVII.

Page 505, note 1: Corbinelli, Histoire de la maison de Gondi.

L'histoire généalogique de la maison de Gondi a été composée par Corbinelli, en commun avec Ant. Pezay. La duchesse de Lesdiguières en fit les frais. C'est un ouvrage magnifique, pour la beauté des portraits. Des Anciens Historiens réduits en Maximes, il n'y a d'imprimé que les extraits de Tacite.

Page 505, ligne 11: Il se logea dans le quartier du Marais du Temple.

Saint-Simon nous apprend qu'au sujet des différents quartiers de Paris, et des statues de nos rois qui s'y trouvaient, on disait: Henri IV avec son peuple sur le Pont-Neuf, Louis XIII avec les gens de qualité à la place Royale, et Louis XIV avec les maltôtiers à la place des Victoires. Sur quoi Saint-Simon ajoute: «Celle de Vendôme, faite longtemps depuis, ne lui a guère donné meilleure compagnie.»

Page 506, ligne 3: Il l'acheta 270,000 livres.

Bussy dit quatre-vingt-dix mille écus. C'était l'écu de 1641, qu'on appelait louis blanc; mais alors le louis d'or ne valait que 12 f., ou plutôt 11 f. 05. Voyez l'Extrait de tous les Édits et déclarations sur les Monnaies, 1643, in-4o. Bussy, dans l'histoire qu'il adonnée de cette charge de mestre de camp de la cavalerie légère, remonte jusqu'à sa première formation, due à un seigneur albanais nommé George Castriol, sous Charles VIII. Le prix de ces charges était énorme. Ainsi le marquis de Soyecourt vendit 400,000 liv. (800,000 fr.) la charge de maître de la garderobe au duc de Roquelaure, qui se maria ensuite à la belle du Lude (Loret, Muse historique, liv. IV, p. 106 et 107). Beringhen acheta le même prix de Saint-Simon (le père de l'auteur des Mémoires), alors en disgrâce, la chaire de premier écuyer, et de plus 20,000 fr. de pension sa vie durant. De tels prix ne pouvaient provenir que des droits et priviléges lucratifs attachés à ces charges. Mais ce qu'on a plus de peine à comprendre, c'est le haut revenu des gouverneurs des petites places de guerre. Celle de Doullens une des moindres, valait à son gouverneur vingt mille écus (120,000 fr. monnaie actuelle).

Page 507, ligne 26: La vicomtesse de Lisle.

Cette madame de Lisle, dont parle Bussy, était probablement belle-fille du comte de Lisle qui en 1654 servait sous Conti, à l'armée de Catalogne. Voyez Histoire de la Monarchie Françoise sous le règne de Louis le Grand, 1697, in-12, t. II, p. 66, 4e édit.

Page 513, ligne 1: Madame de Précy s'aperçut qu'elle était jouée.

Dans les éditions de 1710 (p. 337), comme dans l'édition de 1754, le récit de Bussy finit ainsi: «J'en avertis madame de Monglas, ce qui fut cause qu'elles rompirent ensemble, et que dans la suite cette belle eut toutes les raisons du monde de croire que j'avais véritablement de l'amour pour elle.» Dans les deux éditions de Liége sans date, page 69 de l'une, page 207 de l'autre, on lit pour cette fin: «Le grand jour obligea la compagnie à se séparer, et la fin de cette histoire mit fin à l'entretien des quatre illustres pénitents, qui après une si belle préparation s'en retournèrent à Paris faire leurs pasques.» Au lieu de cette fin, qui est une dérision, on lit ce qui suit dans le manuscrit de l'Institut: «Mais madame de Monglas, qui était prévenue de ses artifices, lui battit froid là-dessus; et c'est là où finit cette plaisante affaire, à cause que la fonction de ma charge m'obligea d'aller à l'armée.»

CHAPITRE XXXVIII.

Page 515, ligne 8: Le nombre de mariages.

Les principaux mariages qui eurent lieu pendant cet hiver dans la noblesse furent ceux du marquis de Bade et de la princesse de Savoie, et du comte d'Orval. Le grand maître de l'artillerie donna un dîner au roi; les religieuses même s'en mêlèrent. Il y eut un repas magnifique donné à la reine par l'abbé de Saint-Antoine, qui coûta 3,130 écus, ou environ 18,760 francs de notre monnaie actuelle.

Page 517, note 1: Description particulière du grand ballet de Pélée et Thétis, etc.

Dans cet ouvrage les costumes de chaque rôle sont décrits; on donne les noms de tous les acteurs, au nombre desquels étaient le roi de France, le duc d'York, la princesse d'Angleterre. Les figures de l'exemplaire qui est à la bibliothèque de l'Institut sont sur papier, mais peintes ou enluminées, et collées sur vélin. Le roi (Louis XIV) s'y trouve avec son costume d'Apollon. Ainsi que je l'ai déjà dit, ces costumes n'ont rien d'antique; ils sont bizarres, de mauvais goût, seulement éclatants par la richesse.

Le ballet de Pelée et Thétis fut joué alors, pour la dernière fois, en mai 1654. Cependant ce goût des ballets dura longtemps: dans un beau tableau de Mignard, que nous possédons, madame de Thianges est représentée en Thétis, tenant par la main le duc du Maine, âgé d'environ douze ans, costumé en guerrier, et figurant Achille adolescent. Loret nous apprend que des particuliers, à l'exemple du roi, firent jouer chez eux des ballets en action. Un sieur Maréchal fit représenter chez lui un ballet intitulé les Plaisirs de la Vie.

Page 518, ligne 8: Par les révélations de La Porte.

Voltaire a très-bien jugé ce fait, et bien apprécié la conduite de La Porte. La haine contre le cardinal l'aveugla; il crut avoir trouvé occasion de le perdre par la plus absurde des accusations. Mais La Porte était de bonne foi dans cette accusation.

Page 518, ligne 24: Cette gentille Henriette.

Louis XIV, à qui Henriette d'Angleterre plut peut-être trop par la suite, ne l'aimait pas dans sa jeunesse; ou plutôt encore adolescent, et dans la première effervescence des sens, l'instinct de la nature lui faisait préférer les femmes formées à celles qui étaient à peine sorties de l'enfance. En 1645, dans un bal où se trouvait la princesse d'Angleterre, il se disposait à commencer la danse avec Olympe Mancini: l'impétueuse Anne d'Autriche, qui était présente, devint rouge de colère, arracha à son fils la nièce du cardinal, qu'il tenait à la main, et le força d'aller prier la princesse d'Angleterre. Elle lui fit sévèrement sentir qu'étant roi, c'était à lui, plus qu'à tout autre, de donner l'exemple du respect et des honneurs dus au sang royal, et que la jeunesse de la princesse, comme lui issue de Henri IV, et sa parente, ne le dispensait pas de ce devoir. (Voir Motteville, t. XXXIX, p. 367-368.)

Page 519, note 4: Monmerque.

Le savant biographe donne sur ce sujet des détails curieux, et auparavant inconnus. Il rapporte une épître de Godeau, évêque de Vence, à Conrart, en date du 22 janvier 1655, qui prouve que la première partie de Clélie a dû paraître en 1654. Cependant l'exemplaire que j'ai vu porte pour cette première partie 1656. Est-ce un titre renouvelé, ou une réimpression?

Page 520, ligne 21: La mort du marquis de La Vieuville.

La Vieuville mourut le 2 janvier 1654.

Page 522, ligne 14: Ses châteaux de Vaux et de Saint-Mandé.

La bibliothèque que Fouquet avait réunie à Saint-Mandé était une des plus belles de l'Europe.

Page 523, ligne 25: De celle qu'il venait d'épouser.

Turenne s'était marié en 1653, à Charlotte de Caumont, fille du maréchal de La Force, riche héritière, qui mourut sans enfants.

CHAPITRE XXXIX.

Page 528, ligne 13: Ce nom de Saint-Nectaire.

Dans la gazette de Loret il est parlé «du bonhomme Senetaire, raffiné courtisan, vieil ami de maint partisan.» Ainsi Bussy, Loret, les Mémoires de madame de Motteville et ceux de Retz nous donnent des exemples de la transformation successive de ce nom de Saint-Nectaire en Senectaire, Senetaire, et Senneterre.

Page 533, lignes 3 et 4: «Si l'on pouvait avoir de vos poulets, madame, on ne ferait pas tant de cas de vos lettres.»

Le mot poulet signifiant un billet galant n'est pas fort ancien; il ne se trouve ni dans Nicot, ni dans Cotgrave. Il vient évidemment de l'usage d'appeler amoureusement une jeune fille poulette. Du temps de Voiture, qui s'est rendu célèbre par l'élégance de ses poulets, ce mot était fort en usage. Il l'était encore lorsque Bussy écrivait sa lettre à madame de Sévigné; mais, vingt-cinq ans après, Richelet remarqua dans son Dictionnaire (1699, in-4o, t. II, p. 199) que «le mot poulet en ce sens (de petite lettre d'amour ou galante) n'est pas si en usage qu'il était autrefois.» Cependant l'Académie Française n'a pas cessé dans toutes les éditions de son Dictionnaire, depuis la première jusqu'à la dernière (1694-1835) de mettre le mot poulet avec la signification donnée par Richelet, sans reproduire sa remarque, qui n'a pas cessé d'être vraie.

Page 536, ligne 16: La marquise d'Uxelles lui plaisait plus par son esprit que par sa beauté.

La lettre du 20 juin 1672 nous apprend que la marquise d'Uxelles était devenue fort grasse, et qu'elle avait eu une intrigue avec le fils du duc de Longueville. La lettre du 14 août 1676 prouve son étroite intimité avec un nommé La Garde, dont le mariage la contrarie si fortement.

Page 536, ligne 10: Déjà mariée en secondes noces.

Anne-Élisabeth, comtesse de Lannoi, fut mariée en premières noces à Henri-Roger du Plessis, comte de La Roche-Guyon. Elle fut mariée en secondes noces au duc d'Elbeuf, le 7 mars 1648, et mourut à vingt-huit ans, le 3 octobre 1654.

Page 537, lignes 6 et 7: Ne comptait pas une année de mariage.

Il résulte des deux lettres citées de Loret que le mariage de la duchesse de Roquelaure a eu lieu entre le 20 et le 26 septembre 1653. Dans la première lettre de Loret il est parlé des fiançailles de la duchesse de Roquelaure, et nous y apprenons que le duc de Roquelaure donne à sa fiancée douze bourses parfumées, contenant six mille pièces d'or de onze livres dix sous chacune, faisant 69,000 livres monnaie de cette époque, ou 138,000 fr. valeur actuelle.

Page 538, avant-dernière ligne: La cour entière fut attristée par sa mort.

D'après la dernière lettre de Loret que nous citons, nous voyons que cet accouchement, à la suite duquel mourut la duchesse de Roquelaure, était au moins le second, et que le premier accouchement avait été également difficile. Loret en annonçant cette mort de la duchesse de Roquelaure,

Plus fraîche et plus belle que Flore

ajoute:

Quand au Louvre on sut le trépas

De cet objet rempli d'appas,

Une tristesse générale

S'empara de la cour royale;

Et les cœurs les plus généreux,

Qui sans doute étaient amoureux

De ses vertus et de ses charmes,

Versant abondance de larmes,

Firent bien voir que cette mort

Les touchait et les blessait fort.

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

O fleurs d'une aimable jeunesse,

Vous êtes charmantes et belles,

Mais vous n'êtes pas immortelles.

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