Nymphes dansant avec des satyres
VI
Je renonce à dire l'animation qui régna dans nos groupes dès que l'on tint, du Roi lui-même, que l'on allait voir le Messie. Il se trouva des gens qui dès auparavant s'en doutaient. On loua leur retenue. Mais la plupart furent émus très profondément. On en faillit négliger le boire et le manger. Des dames passèrent les nuits à regarder les astres, de leurs beaux yeux nus, dans l'espoir intime de quelque signe privilégié. Quelques-unes confessèrent avoir reçu confirmation particulière de l'événement. On se fit mille descriptions de la figure qu'on imaginait au Messie. On négligea les nègres. On se pardonna les injures. On s'occupa de la tenue que l'on aurait au jour de la présentation. On déplora de n'avoir pas été prévenu plus tôt, à cause des robes et des parures. On se dépita, s'injuria de nouveau ; l'humeur fut exécrable. La maison du Roi dut abandonner plusieurs tentures riches et vénérables, quoique Xerxès y eût fait représenter la prise d'Athènes et la Victoire des Thermopyles, qu'il s'attribuait. On les coupa ; se les partagea ; en couvrit les selles des chevaux et des mules. Nous passions seuls des nuits calmes, ma petite esclave et moi ; et lui ôtant ses bandeaux, je lui faisais des contes, comme elle les aime, c'est-à-dire de ceux qui ne peuvent point arriver.