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Quand la terre trembla

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III
NUAGES A L’HORIZON

L’automne vint, et les pluies. Bientôt les premières neiges apparurent.

— Nous aurons froid, mon enfant, dit Savinski à Lydia.

— Dans tes bras, je n’aurai jamais froid, répondit-elle en riant.

Dans l’appartement de l’Aptiékarski Péréoulok, Savinski fut obligé de fermer la salle à manger pour économiser sa provision de bois qu’il renouvelait avec peine. On ne chauffa plus que le cabinet de travail et la chambre à coucher. A la Fontanka, il restait du bois pour deux ou trois mois seulement. On avait de grandes difficultés à se nourrir, quelque argent que l’on dépensât. Dans l’hôtel du prince Serge, seules les pièces sur le quai étaient habitables. Chez les Choupof-Karamine, la situation était moins tendue, car Nathalie avait reçu — on ne savait d’où — une vingtaine de sagènes du plus beau bouleau. Des camions militaires les avaient apportées un jour. Son cercle s’était restreint encore. Elle n’avait plus qu’une dizaine d’amis russes et quelques ministres des légations neutres auxquels elle prodiguait ses amabilités.

Séméonof avait refait son apparition à Pétrograd. Sous Trotski, ministre de la Guerre, il était rentré en faveur et avait reçu le commandement militaire de la ville. Savinski avait appris son retour sans plaisir. Pourtant, il le voyait quelquefois. Il semblait qu’avec le succès Séméonof fût devenu un peu plus humain. Le triomphe du bolchévisme, sur lequel il avait spéculé, le comblait d’aise. Il était tout à la tâche d’organiser l’armée rouge, qui était la grande pensée du règne de Trotski.

— Nous allons rétablir l’empire dans ses frontières naturelles, dit-il un jour à Savinski, et peut-être même lui donner une étendue qu’il n’a jamais eue. La tâche nous est facile maintenant. La guerre a épuisé l’Europe. Le mécontentement est partout. Les sacrifices ont été trop grands. Et puis, tous les peuples aujourd’hui se haïssent. Il n’y a plus d’Europe, mais une confusion prodigieuse de passions et d’intérêts antagonistes. Nous seuls avons une doctrine et une foi en face d’adversaires divisés. Nous ferons de grandes choses, je vous l’avais prédit… Jusqu’à quand continuerez-vous à nous bouder ? Voyez quelles positions nous pouvons offrir à ceux qui se rallient sincèrement à nous ! Vous avez lu le mot de Lénine disant qu’il donnerait un demi-milliard au financier qui pourrait mettre sur pied les finances de l’État.

Savinski haussa les épaules avec lassitude. Il ne se sentait pas la force de discuter. Il se borna à dire :

— Vous avez peut-être raison, Léon Borissovitch. Hélas ! je ne me sens pas de taille à entreprendre cette tâche-là.

— Réfléchissez encore, Nicolas Vladimirovitch, mais les temps sont tels qu’il faut être avec nous ou contre nous. Dans la période où nous sommes, les dilettantes seront écrasés. Souvenez-vous de ce que je vous dis. Je ne vous prends pas en traître.

C’était le Séméonof de naguère qui parlait encore et Savinski le quitta l’âme glacée.

Se rallier au bolchevisme était hors de question. Se faire le complice des atrocités qui ensanglantaient la Russie et abattaient autour de lui tous ses anciens amis, il ne fallait pas y songer. Et, du reste, quelle action y exercerait-il ? Comment arrêter la catastrophe économique, la chute à l’abîme où roulait la Russie ?

Mais alors, combien de temps pourrait-il continuer à y vivre ? Chaque jour ajoutait aux difficultés et aux dangers. Où aller ? Perm et Koltchak ? L’Ukraine ? Comment emmener Lydia, dont il ne pouvait se passer ? Le vieux prince impotent. La princesse, de volonté malade, incapable de quitter son petit salon. Gagner la Finlande avec eux tous, s’il les pouvait décider ? Mais y retrouverait-il les facilités qu’il avait à Pétrograd de voir Lydia librement cinq ou six heures par jour ? Sa femme et ses enfants étaient en Angleterre. Sonia ne voudrait-elle pas revenir alors auprès de lui ? Comment pourrait-il ne pas la recevoir ? Et la même réponse se faisait entendre sans cesse : il ne renoncerait pas à Lydia.

L’angoisse parfois lui serrait le cœur. Il ne retrouvait la paix qu’auprès de sa maîtresse. Il ne se lassait pas d’elle ; elle ne se fatiguait pas de lui. Chaque jour, au contraire, rendait plus étroits et plus forts les liens qui les liaient. Avait-il vécu avant de la connaître ? Pourrait-il continuer d’être sans elle ? Il causait librement avec Lydia ; il ne lui cachait aucune de ses préoccupations ; il n’y avait entre eux pas l’ombre d’un secret. Devant elle, il « pensait à haute voix », comme il disait, et rien n’était plus précieux, dans l’étouffement que la terreur faisait planer sur la ville, que cette entière ouverture d’âme à deux.

La première fois qu’il parla à cœur ouvert de la situation telle qu’il la voyait, il n’aborda qu’avec crainte l’hypothèse d’un retour possible de sa femme en Finlande.

Lydia l’arrêta aussitôt qu’elle comprit où il voulait en venir. Elle se jeta dans ses bras en pleurant.

— Est-ce que je ne te suffis donc pas ? dit-elle au milieu de ses sanglots. Es-tu las de moi ?… Ne m’aimes-tu déjà plus ?…

Elle étouffait de douleur ; elle ne pouvait parler. En vain, Savinski essayait-il de la raisonner, de lui montrer l’absurdité de ses craintes. Elle n’écoutait rien. Lorsque cette crise eut épuisé sa violence, elle sembla tout à coup transformée. Elle avait repris son sang-froid. Elle discutait avec un calme apparent.

— Je comprends bien, dit-elle à Savinski stupéfait, que tu cours de grands risques ici et que tu ne les supportes qu’à cause de moi. Tu peux être jeté en prison ; il peut t’arriver pire encore. Si tu as peur, comment t’en vouloir ?… A ta place, je sentirais comme toi… Alors, pourquoi discuter ? Il n’y a rien à dire… Prépare ton départ. Je t’aiderai en toutes choses. Mais moi, je ne quitterai pas la Russie… J’aime mieux mourir ici que vivre ailleurs…

Mais elle ne put soutenir plus longtemps cet effort. Elle tomba sur le divan, la tête enfouie dans les coussins, toute frissonnante de mouvements nerveux. Et comme Savinski se penchait vers elle, elle prit la tête de son amant entre ses deux mains.

— Pardonne-moi, balbutia-t-elle, pardonne-moi… Je suis une méchante fille… Mais j’ai trop de chagrin… Ne me quitte pas, toi qui es à moi… Je te suivrai où tu voudras… Tu es le maître ; je serai ta servante…

Elle le couvrait de baisers passionnés. La serrant contre lui, sa joue mouillée des larmes de sa maîtresse, Savinski ne pouvait que répéter :

— Lydotchka, je te l’ai dit il y a longtemps déjà, je ne te quitterai jamais.

....... .......... ...

Le lendemain de cette scène qui avait brisé les nerfs des deux amants, lorsque Lydia arriva, vers les trois heures, chez Savinski, elle trouva Annouchka dans la consternation. A dix heures, ce même matin, un commissaire et un soldat étaient venus chercher son maître en automobile pour l’emmener à la Gorokhovaia. On ne lui avait pas laissé le temps d’écrire, mais il faisait dire à Lydia Serguêvna qu’il ne s’agissait vraisemblablement que d’un interrogatoire et qu’il serait relâché dans l’après-midi. Sinon, elle recevrait le lendemain un billet qu’il lui ferait passer par un des prisonniers qu’on libérait quotidiennement. Lydia pâlit et s’appuya sur la vieille Annouchka, qui la soutint. Savinski en prison !… Sans elle !… A cause d’elle, sans doute… Un remords affreux lui déchirait l’âme au souvenir des paroles dites la veille. Comment attendre ? Comment perdre un instant ? Il fallait courir chez Séméonof… La nécessité d’agir lui rendit des forces. Elle se dirigea à pas rapides vers l’état-major, sur la place du Palais, et demanda à voir le général.

Le hasard voulut qu’il fût à son bureau. Lorsque le nom de Lydia Serguêvna lui fut passé, il la fit entrer aussitôt. Il y avait plus d’un an qu’ils ne s’étaient vus, et l’insensible Séméonof resta stupéfait du changement qu’un temps si bref avait apporté dans l’expression de la jeune fille. Il l’avait quittée, elle était presque une enfant. Il avait devant lui une femme dont les traits bouleversés ne pouvaient altérer la beauté. Et ce visage tout vibrant d’émotion faisait comprendre même à Séméonof la profondeur d’une vie passionnelle qu’il n’avait jusqu’alors pas soupçonnée. Pour la première fois, il sentit un cœur d’homme battre dans sa poitrine, et, comme Lydia lui disait : « Nicolas Vladimirovitch est en prison », il la rassura et, en même temps, un curieux sentiment, jamais éprouvé, et qui ressemblait singulièrement à de la jalousie, monta en lui.

— Ne vous inquiétez pas, dit-il, je vais m’occuper de lui tout de suite.

Il saisit le téléphone. Mais Lydia lui prit la main.

— Il est à côté d’ici, fit-elle d’une voix altérée, à deux pas, à la Gorokhovaia. Allons-y ensemble.

Séméonof la regarda, étonné. Comme elle l’aimait ! Mais il ne résista pas et suivit la jeune fille. Arrivé au bas de l’escalier, avant de sortir sur la place du Palais, il lui dit :

— Restez ici, Lydia Serguêvna. Je ne puis vous emmener à la Gorokhovaia. Je reviens dans un instant.

Mais Lydia refusa…

— Je vous attendrai dans la rue, dit-elle, chaque instant compte…

Sur la place et dans les quelques minutes du trajet, Séméonof dit à Lydia :

— Puisque je vous vois enfin et puisque vous avez de l’influence sur Nicolas Vladimirovitch, laissez-moi vous faire comprendre que vous pouvez lui rendre un grand service. Il est menacé, c’est vrai… Je pourrai peut-être encore le tirer d’affaire, mais, Lydia Serguêvna, il faut qu’il se rallie à nous, qu’il travaille avec nous. Nous avons besoin de lui. Persuadez-le… Sinon, je ne serai pas toujours assez puissant pour le sauver…

— Oui, oui, disait Lydia, qui paraissait ne pas entendre. Je vous le promets… Mais hâtons-nous… Je vous reverrai plus tard. Vous m’expliquerez alors ce que je dois faire.

Ils étaient à la porte de la préfecture. Séméonof entra seul. Dix minutes plus tard, il retrouva Lydia, immobile et pâle, sur le trottoir.

— La chose est arrangée, dit-il. Notre ami sera libéré, mais il y a des formalités à remplir. J’ai dit qu’on l’amène à l’état-major. Si vous voulez l’attendre, venez chez moi vous chauffer. Je ne veux pas vous laisser sur ce trottoir glacé.

Lydia le suivit sans protester. Elle avait froid ; elle était fatiguée. Depuis qu’elle appartenait à Savinski, elle n’avait pas connu une heure où elle se sentît aussi misérable.

Séméonof reprit le thème qu’il avait abordé en se rendant à la prison. Savinski risquait gros maintenant ; aujourd’hui déjà, sa libération n’avait pas été accordée sans difficulté. Et, comme il savait Lydia ardente patriote, il développa avec ingéniosité le thème de la réunion des terres russes sous le drapeau rouge et l’anéantissement de l’œuvre impie de dislocation menée par la première révolution. Sur ce terrain, il était à son mieux.

Il y fut brillant. Il évoqua les grands souvenirs de la Révolution française, et si Lydia ne voulut pas comprendre ce que pouvait avoir d’ingénieux l’allusion au jeune Bonaparte inconnu, cherchant sa voie dans la suite de Robespierre, c’est qu’elle n’y mit pas de bonne volonté. Mais, en vérité, Lydia écoutait à peine. Savinski tardait, à quoi pouvait-elle penser d’autre ? Tant qu’il ne serait pas là, elle n’aurait pas la paix du cœur. Et, du reste, ce cœur était profondément troublé. C’était à nouveau la question du départ qui se posait, la Finlande, le retour de Sonia… Lydia était comme morte. Pourtant, il lui fallut répondre à une question directe de Séméonof qui lui expliquait la nécessité pour elle aussi d’accepter une place dans les bureaux du gouvernement. Personne ne vivrait sans travailler pour les Soviets. Il pourrait la prendre à l’état-major comme secrétaire et lui donnerait une besogne intéressante à faire.

Elle sourit faiblement.

— Je vous remercie, Léon Borissovitch, vous êtes très aimable…

Et soudain, elle bondit sur la porte. Savinski entrait.

— Te voilà, dit-elle, je te revois !

Elle avait oublié jusqu’à la présence de Séméonof qui la regardait sans parler. Quelques minutes plus tard, elle emmenait son amant, lui laissant à peine le temps de remercier Léon Borissovitch.


Quelques semaines passèrent. Une fois de plus, les fêtes de Noël et du jour de l’an furent célébrées dans la tristesse et la misère générales. Les espérances de salut reculaient chaque jour. Il faudrait attendre maintenant l’été pour voir l’amiral Koltchak et le général Denikine reprendre l’offensive en Sibérie et dans le Sud. Réussiraient-ils ? Rien n’était moins certain, et cependant il fallait traverser les mois glacés de l’hiver avec une nourriture et un chauffage insuffisants. Lydia était souvent soucieuse et s’en voulait de sa tristesse. Elle aurait voulu ne donner avec sa jeunesse que de la gaieté et de la joie à son amant. Elle se disait qu’elle devait aujourd’hui lui tenir lieu de tout. N’était-il pas à Pétrograd pour elle seule, séparé des siens ?… Et pourtant, comment se résigner à partir ? Et si elle en avait la force, comment déciderait-elle sa mère murée chez elle, son père incapable de subir les fatigues d’un voyage difficile ? Et puis, auraient-ils un visa ? Ces obstacles lui paraissaient insurmontables, et, le plus grand, c’était en elle qu’elle le trouvait.

C’est alors qu’un événement imprévu vint, une fois de plus, modifier la situation et lui donner un aspect nouveau.

Elle arriva une après-midi de janvier chez Savinski, à peine avait-il fini de déjeuner solitaire sur une petite table collée au poêle de son cabinet de travail. Le visage de la jeune fille était animé et, dès les premiers mots, elle apprit à Savinski ce qui s’était passé.

— Imagine-toi, lui dit-elle, que nous avons eu, nous aussi, une perquisition cette nuit. Mais, grâce à Dieu, personne de nous n’a été arrêté. On venait voir si nous avions des armes cachées et des documents compromettants… Et puis, cela s’est fait à une heure convenable, au moins. Il n’était pas minuit et personne n’était couché… Le plus drôle, chéri, était que le commissaire militaire était ce même Ivanof qui est venu ici, tu te souviens… Il m’a reconnue, cela va sans dire, mais il n’a pas eu un mot devant ma mère… Seulement, quand nous étions seuls un instant, il m’a souri et m’a dit que j’étais toujours aussi belle, imagine-toi… Mon pauvre papa a été très bien. Aucune frayeur, pas même un étonnement. Il semblait qu’il escomptât leur arrivée et qu’il ne fût surpris que de leur venue si tardive. Ivanof s’est excusé auprès de lui et ils sont à peine restés dix minutes dans son appartement… Quant à maman, ç’a été bien autre chose. Il a fallu attendre à sa porte longtemps… Elle était enfermée avec sa femme de chambre et, quand elle a ouvert — le croirais-tu ? — elle s’était mise en grande toilette de bal avec tous les bijoux qui lui restent. Elle tremblait comme la feuille, ma pauvre maman, mais elle était pleine de dignité et dit aux commissaires : « Messieurs, je suis prête à vous suivre, excusez-moi de vous avoir fait attendre. » Elle ne voulait pas écouter un mot de ce qu’ils lui disaient. En vain Ivanof essayait de la rassurer… Elle répétait à chaque instant : « Je vous montrerai, messieurs, comment une vraie Russe sait mourir. » Et, d’abord, j’avais envie de rire, tu comprends, et puis j’ai eu tellement pitié d’elle que les larmes me sont montées aux yeux… Par moment, elle me prenait dans ses bras et disait : « Je pense que la mère vous suffira, messieurs, permettez que j’embrasse ma fille. » C’était une scène déchirante. Ils sont sortis, enfin, la laissant à moitié évanouie avec Katia… Et moi j’ai été obligée de les accompagner dans le reste de l’hôtel où on grelottait de froid… Ils sont partis à une heure et demie, n’ayant rien trouvé, ni papiers, ni armes, sauf un vieux sabre de papa qu’ils ont laissé… Les soldats, cette fois-ci, ont volé quelques objets…

Lydia s’arrêta brusquement, comme si elle avait quelque chose à dire encore devant lequel elle s’arrêtait. Savinski, qui ne la quittait pas des yeux, la vit devenir songeuse ; son front s’était plissé ; ses regards fuyaient ceux de son amant. Elle se rapprocha de lui, mit sa tête sur l’épaule de Savinski et resta longtemps silencieuse.

— Comment vont tes parents, aujourd’hui ? demanda-t-il enfin.

Lydia eut un mouvement brusque.

— Je te dirai tout, dit-elle… Papa est bien ; c’est même surprenant. Il y a longtemps qu’il n’a pas été en aussi bonne santé. Ce matin, il a fait quelques pas tout seul dans sa chambre avec ses deux cannes, et il chantonnait une vieille chanson qu’il aime et que je n’avais pas entendue depuis la révolution… Mais ma pauvre maman est tout à fait bouleversée… C’est un drame véritable… Pense un peu qu’elle ne s’est pas couchée. Non, elle n’a plus qu’une idée : quitter la Russie. Pendant la nuit même, elle a commencé à faire ses malles ; elle y a travaillé avec Katia toute la matinée. Elle répète sans cesse : « Je ne resterai pas un jour de plus dans un pays où les femmes sont traitées ainsi… » Je ne sais pas, mais je crois qu’elle a un peu perdu la tête… Ce matin, elle a voulu absolument envoyer le général Vassilief prendre des places à la gare de Finlande pour Stockholm. Elle croyait qu’on avait encore des billets pour l’étranger comme jadis… Il a fallu que le pauvre général y allât et, lorsqu’il est revenu les mains vides, elle lui a fait une scène, lui a dit que c’était de sa faute, qu’il n’était bon à rien et, finalement, a déclaré qu’elle voulait te voir, que seul tu saurais lui arranger toutes choses. C’est elle qui m’a envoyé chez toi. Elle t’attend…

De nouveau, il y eut un long silence. Lydia restait serrée contre Savinski, comme si elle n’osait le regarder. Il entendait les battements pressés de son cœur. Il n’était pas besoin de la questionner ; il savait quelle passion elle souffrait à cette heure. Il la caressait doucement et à basse voix il lui dit :

— Où que nous soyons, nous vivrons ensemble, ma petite âme… Console-toi, je t’en prie.

— Je sens que je vais te perdre, disait Lydia en sanglotant.

Et elle s’accrochait désespérément à son amant.

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