La guirlande de Julie: augmentée de documents nouveaux
LE SOUCY
SOUS LE NOM DE CLYTIE
AU SOLEIL
PERFIDE Amant, je te declare
Que mon cœur n'est plus ton captif;
C'est trop chercher un fugitif
Et trop reclamer un barbare.
Un plus admirable flambeau,
Un Astre plus doux et plus beau
Me vient guerir de ma folie.
J'adore son feu nompareil,
Et ne cognois plus de Soleil
Que dans les beaux yeux de Julie [110].
SUR LA FLEUR DE GRENADE
MOY qui pouvois passer pour la Reyne des Fleurs,
Je seiche, je languis, je flestris et je meurs
Quand je voy ces beaux yeux, dont l'esclat me surmonte;
Mon teint n'a plus ce feu qui brilloit vivement,
Et s'il rougit encore, il rougit seulement
De depit et de honte [111].
LE NARCISSE
APRÈS m'estre perdu dans une onde perfide,
Je seiche au feu des yeux d'une belle homicide,
Quand je luy rend hommage et m'acquitte d'un vœu.
O Destin, qui me fais cette injure seconde!
N'estoit-ce pas assez d'avoir pery par l'onde
Sans perir par le feu [112]?
LA FLEUR D'ADONIS
JE suis si fragile en mon estre
Que je ne puis longtemps fleurir;
Le vent qui les Roses fait naistre
Est si fort qu'il me fait mourir.
Je dépens du moindre Zephyre,
Et dès le moment qu'il souspire
Je tombe à terre et ne vis plus:
Mais si je suis sur vostre teste,
Ne seray-je pas au-dessus
Et des vents et de la tempeste [113]?