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L'heure décisive

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XI

D’Astyèves arrivait à la Schlucht. Il laissa souffler son cheval qu’il avait rudement mené depuis Gérardmer, dans sa crainte de ne pouvoir rejoindre Denise si elle avait commencé l’ascension du Hoheneck. Vanore, le matin même, lui avait incidemment appris que sa femme emmenait la jeune fille et les enfants, sous l’escorte de Grisel, en excursion à la Schlucht ; et, sans hésiter, il avait dirigé sa promenade de ce côté, cédant à ce désir impérieux de voir Denise que chaque jour avivait en lui, sans qu’il en prît désormais souci.

Dans son égoïsme d’homme violemment épris, il allait maintenant droit devant lui où son désir le poussait, insouciant de ce qui en résulterait pour elle, comme pour lui, dans une détente consentie de sa froide volonté. Il était comme un homme qui s’enivre, avec la conscience du danger couru, mais trouve l’ivresse si douce qu’il s’y abandonne corps et âme, dominé par la magie de l’heure présente… Toujours ainsi, il avait suivi son bon plaisir, avec un orgueilleux dédain des conséquences…

Il avait tout juste aperçu Denise, depuis le soir où il s’était trahi. Et dans leurs brèves rencontres chez Vanore d’où elle sortait quand il arrivait, chez Mme Arnales où elle était apparue seulement un moment pour chanter, il l’avait retrouvée insaisissable comme aux premiers temps où il la voyait ; libre d’esprit, ne semblant avoir nul souvenir de l’aveu dont pourtant il avait bien senti l’écho frémir en elle. Et, à son exemple, il ne s’était pas même permis une allusion.

De la part d’une autre, il eût pu croire à une manœuvre de coquette, mais elle était incapable de pareils calculs, il en avait la certitude, si sceptique fût-il… Alors pourquoi semblait-elle résolue à se faire « lointaine » comme jadis ? Oh ! ce « pourquoi ? » Combien de réponses il lui avait cherchées tandis que, pour aller à elle, encore, il lançait son cheval sur la belle route boisée que ses yeux ne voyaient pas…

Maintenant la dernière côte était gravie ; il arrêta la bête ruisselante.

Mais son regard ne chercha pas le décor magnifique de la vallée de Munster qui s’allongeait à l’horizon. D’un coup d’œil, il enveloppait un groupe de touristes arrêtés devant l’hôtel unique, dressé en cette solitude ; puis la silhouette de ceux qui s’éloignaient sur la route vers les roches du Kruppenfels, ou s’engageaient dans les sentiers coupant la frontière pour monter au Hoheneck… Mais aucune n’était celle de Denise. L’idée lui traversa l’esprit que, peut-être, il ne parviendrait pas à la rencontrer et il tressaillit d’une anxiété d’homme altéré, qui craint de voir lui échapper la source d’eau vive.

Il se dirigea vers l’hôtel et demanda :

— N’avez-vous pas eu à déjeuner une dame avec trois ou quatre enfants et une jeune fille brune, accompagnées d’un homme grand et très fort ?…

— Oui, monsieur, mais cette société-là est partie pour le Hoheneck.

— Il y a longtemps ?

— Une demi-heure à peu près.

— Savez-vous par quel sentier, français ou allemand ?

Le domestique donna l’indication approximative ; et Bertrand, ayant laissé son cheval, s’engagea dans le chemin indiqué qui montait doucement sous la ramure des arbres. Il espérait bien que les promeneurs n’auraient pas sur lui grande avance, car il savait combien Mme Vanore et Grisel marchaient lentement et il songea :

— Mme Vanore aura, sûrement, demandé à se reposer au point de vue des Rochers de la Source… Je vais les y trouver…

Le sentier tourna. Une fois encore, la destinée était pour lui. Sous le dôme léger des branches, il aperçut Mme Vanore retenant Huguette à ses côtés, puis Grisel qui fumait, paresseusement allongé sur l’herbe ; et enfin, entre Jean et Madeleine, elle, Denise, contemplant les sauvages profondeurs de l’admirable ravin boisé, hérissé de roches, qui dévalait à pic, cerné à l’horizon par les crêtes onduleuses des Vosges. La petite Huguette l’aperçut tout de suite.

— Ah ! monsieur d’Astyèves !

Les autres tournèrent la tête avec des exclamations. Mais, en cette minute, lui ne voyait que Denise. Leurs regards se rencontrèrent. Elle comprit pourquoi il était là, et victorieuse de sa volonté, une douceur ardente s’épandit en elle, pareille à une joie, cette joie qui pénètre les plus fières quand elles se sentent l’aimée…

Mme Vanore s’écriait, accueillant d’Astyèves d’un sourire de bienvenue :

— C’est une bonne surprise de vous voir surgir ainsi ! Est-ce le hasard qui vous amène, ou saviez-vous que nous étions ici ?

Il ne daigna pas éviter une franche réponse.

— Je le savais ; j’ai rencontré ce matin Vanore qui me l’a dit ; et, en dirigeant ma promenade de ce côté, cette après-midi, j’espérais bien avoir quelque chance de vous retrouver.

Naïvement, elle approuva :

— C’est gentil, cela ! Une excellente inspiration que vous avez eue là ! Alors vous recommencerez avec nous l’ascension du Hoheneck ?

— Si je ne suis pas indiscret…

— Pas du tout. Quelle idée ! N’est-ce pas ? Denise. Seulement, je ne vous promets pas que Charles et moi nous monterons jusqu’en haut, car nous ne sommes, ni l’un ni l’autre, des spécimens d’alpinistes. Je vous confierai les enfants, du moins les grands, je garderai Huguette. Cela dit, je ne vous offre pas de vous asseoir, car il faut nous remettre en route. Jean ne tient plus en place.

Elle se levait sans enthousiasme, vaincue par les appels réitérés de son fils, et, lentement, elle se reprit à marcher dans le sentier qui, en pente insensible, s’élevait vers les hauteurs du Hoheneck. Mais elle ne paraissait pas songer à rendre la liberté à Bertrand et continuait à bavarder avec lui. Il l’accompagnait, secoué d’une furieuse impatience en voyant, devant lui, avancer Denise, escortée de Grisel, avec qui elle causait, sans qu’il pût entendre une de leurs paroles.

Mais, tout à coup, il dressa la tête, tout son être attentif au caquetage de Mme Vanore. Elle disait :

— Je suis ravie que nous ayons pu faire aujourd’hui cette excursion à la Schlucht, afin que Denise en profite avant son départ.

— Avant son départ ?…

— Mais oui ; vous ne saviez pas ?… Mon mari ne vous a pas raconté ?… Sa mère la réclame et elle est sous le coup d’une lettre qui lui dise quel jour elle est attendue. Nous en sommes tous désolés, à commencer par Mme Champdray qui espérait la garder jusqu’en octobre.

Il demanda encore :

— Mlle Muriel savait qu’elle pouvait ainsi être rappelée ?

— Oh ! de la part d’une femme fantasque comme sa mère, rien ne doit la surprendre beaucoup ! Pourtant, elle ne prévoyait pas ce brusque rappel dont elle a eu l’annonce hier matin. Mais vous savez comme elle est dévouée ! Du moment qu’on la demande, elle est prête à partir, à sacrifier toute la fin de ses vacances, même pour satisfaire un caprice.

Bertrand n’écoutait plus. Une pensée avait chassé toutes les autres de son cerveau : elle allait partir, lui échapper…

Sa volonté se cabra en une révolte aveugle.

— Je ne veux pas la perdre !… Je ne veux pas !

Ce devenait pour lui un supplice de devoir continuer à marcher courtoisement auprès de Mme Vanore, de lui répondre, de ne pouvoir aller vers Denise dont la présence allait lui être enlevée… Comment n’avait-elle pas pitié de lui, ne sentait-elle pas que le regard, les mots de bienvenue dont elle l’avait accueilli étaient une goutte d’eau pour sa soif d’elle, que, impérieusement, il appelait par toutes les fibres de son être…

Mais, enfin, le sentier finissait devant l’étendue des prairies qui s’élevaient maintenant jusqu’au sommet du Hoheneck. Les arbres disparaissaient, même les buissons de hêtres, courbés par les vents, écrasés par les neiges. Dans l’herbe courte, des gentianes jaunes fleurissaient.

Denise s’arrêta, enfin !… Sans doute, pour mieux contempler l’horizon ; un de ces larges horizons qu’elle adorait, enveloppant la terre de Lorraine et ses lacs dont les eaux luisaient dans la noire verdure des sapins ; la terre d’Alsace, baignée par son large fleuve qu’enserraient et les cimes bleuâtres de la forêt Noire et les sommets arrondis des Vosges, marbrés d’ombres par les nuages que le vent emportait en lourdes masses floconneuses, à travers l’immensité du ciel.

Bertrand s’approcha. Elle le devina plus qu’elle ne l’entendit et tourna un peu la tête vers lui.

Dans les yeux, elle avait cette expression qui illuminait le visage comme une flamme. Avant qu’il eût parlé, elle dit :

— C’est beau ici, n’est-ce pas ?… Plus encore qu’aux Gouttridos !

— Et vous en jouissez comme on jouit de ce qu’on va perdre ! Est-ce donc vrai que vous allez partir ?

La question lui était échappée irrésistiblement.

— Oui, c’est vrai.

— Vous partez…, pourquoi ?

Elle eut l’intuition qu’il craignait un rapport entre ce départ inattendu et l’aveu qu’il lui avait fait. Alors, arrêtant sur lui son regard clair, elle expliqua simplement :

— Parce que ma mère est rentrée à Paris, très fatiguée de sa saison d’eaux et qu’elle a besoin de moi.

Ainsi c’était vrai, bien vrai. Cette chose si naturelle à laquelle il n’avait pas songé, vite habitué à l’effleurement délicieux de sa jeune vie, cette chose allait s’accomplir ! Elle allait s’éloigner, disparaître dans la foule des êtres que le grand Paris absorbe. De nouveau, une révolte gronda en lui, l’animant d’une volonté invincible de ne pas la laisser lui échapper. Soudain, il lui paraissait impossible d’accepter de ne plus la voir chaque jour, de ne plus la sentir vivre près de lui, de renoncer à l’espoir de l’enivrer enfin du parfum d’amour dont il l’enveloppait… Et une prière inconsciente lui jaillit des lèvres :

— Ne partez pas encore ! Restez, je vous en supplie…

— Rester…, pourquoi ? Je ne puis pas. N’avez-vous pas compris que je suis attendue le plus tôt possible ?…

Comme elle regardait droit devant elle, il ne vit pas qu’au fond de ses yeux, s’allumait la mystérieuse clarté dont, un soir unique, il avait vu déjà le rayonnement. Il entendit seulement l’accent résolu de la belle voix grave, et une sorte de colère le bouleversa de la voir calme ainsi, alors qu’elle avait soulevé en lui un souffle de tempête.

— Soit, il faut, en effet, que vous partiez… Et peu vous importe !… Avec quelle sérénité d’âme vous acceptez de faire souffrir en vous éloignant…

— De faire souffrir ? Oh ! non, je ne ferai souffrir personne. Vous me supposez trop de puissance. Tout au plus, pourrais-je peut-être laisser quelques regrets, parmi de très bons amis… Mais, heureusement, ces regrets-là n’ont rien de douloureux !

— Denise ! ah ! Denise, est-ce vous, la sincérité même, qui pouvez parler ainsi !

Il avait jeté les mots presque violemment. Elle tressaillit et, d’instinct, leva les yeux vers lui. Mais ce ne fut qu’une seconde, elle avait peur du charme tout-puissant qui, une fois déjà, l’avait divinement vaincue…

— Denise, pour dire… ce que vous dites, vous n’avez donc pas senti ce que vous êtes devenue pour moi, tellement l’âme même de ma vie, que je ne puis plus concevoir l’existence sans vous, loin de vous ; que l’idée de vous laisser partir, ou de ne pas vous suivre, me paraît monstrueuse, insensée, impossible enfin à accepter… Car, lorsqu’on est un pauvre homme fait de chair, de sang, de passion, non pas un saint ! on n’accepte pas ce qu’on sait être pour soi un supplice…

Oh ! Dieu, pourquoi avait-il cette ardente sincérité d’accent qui faisait ses paroles si dangereuses, distillant le vertige… Ah ! heureusement, elle allait partir… Alors, elle redeviendrait sage… Et lui, il oublierait, quoi qu’il en dît…

Comme s’il avait l’intuition de son scepticisme, il demandait, avec une sorte d’autorité suppliante :

— Denise, vous ne me croyez pas ?

— Oh ! si je vous crois… Je ne doute pas qu’en ce moment vous… n’aimiez la femme séduisante que vous imaginez voir en moi, mais…

— Mais vous n’en prenez guère souci… Ah ! quel cœur avez-vous donc pour rester ainsi… indifférente et froide !… quand vous devez vous sentir aimée follement, au point que, si vous daigniez le vouloir, vous feriez votre chose de l’homme qui n’a plus que vous en lui…

Elle devint très pâle et, machinalement, regarda autour d’elle, comme un être ébloui qui cherche un appui… La grande solitude des sommets l’entourait. Elle avait continué à monter, et bien loin en arrière, étaient Blanche Vanore et Grisel, qui se reposaient de nouveau. En avant, Jean avait entraîné sa sœur, et les cheveux d’or blond de Madeleine ne formaient plus qu’une petite tache lumineuse… Elle était toute seule avec le tentateur, encore une fois, n’étant protégée que par sa science triste de la vie.

Frémissante, elle dit :

— Vous ne vous étonneriez pas de me voir tant de scepticisme, tant de sagesse, si vous saviez combien déjà j’ai entendu de telles paroles ! combien j’ai pu mesurer la valeur de ce qu’elles enfermaient !… C’est pour cela que, maintenant, tous peuvent inutilement me parler d’amour.

— C’est parce que, comme moi, les autres ignorent les mots qui ouvriront votre cœur… Ah ! vous le gardez bien…

— Oui, de toutes mes forces, de toute ma volonté !

Et la voix musicale s’éleva avec une gravité passionnée :

— Je ne le donnerai, je l’espère, que quand je pourrai le faire, non seulement avec amour, mais encore avec foi ; quand ce sera pour tout l’avenir, pour être la femme, porter le nom de celui qui me dira qu’il m’aime… Et cela, je sais, sans illusion, qu’à cette heure, ce n’est pas un honneur auquel il me soit permis de prétendre !… Aussi, tout ce qu’il peut y avoir en moi de raison, je l’emploie à me défendre, autant contre les autres que contre moi-même… Car je ne suis ni froide, ni indifférente, hélas ! Je ne suis pas arrivée encore à me rendre insensible comme je m’y applique, c’est vrai, autant que j’en ai le courage… Et je me le reproche ! Mais toute la volonté du monde ne peut faire qu’à mon âge, on atteigne aussi aisément au paisible détachement d’une vieille femme…, ne peut faire qu’on n’ait plus dans l’âme la soif, — ah ! bien douloureuse, quelquefois ! — de connaître le bonheur de celles qui sont aimées, et d’être ainsi heureuse, à ne plus rien demander à la vie !… Vous voyez que je suis franche ! Seulement…

Elle s’arrêta une seconde, tant son cœur battait à coups pressés dans sa poitrine.

— … Seulement, grâce à Dieu ! j’ai aussi l’horreur invincible de tout ce qui salit et l’orgueil de croire que je vaux plus que ce qui m’est seulement offert ! Et c’est cet orgueil, sans doute, qui me rend forte comme je veux, comme je dois l’être !

Avec le meilleur de lui-même, vraiment, il l’avait écoutée, sans un geste même pour l’arrêter ou la prier. Cette fois, elle venait de lui ouvrir toute, largement, comme il l’avait tant souhaité, sa jeune âme de passionnée, mais aussi de droite et fière créature. Et, en lui, soudain, avait pénétré, avec la certitude que, jamais, elle n’accepterait un amour qui serait une insulte, l’intolérable sensation de s’être conduit vis-à-vis d’elle comme un voleur qui cherche à détrousser une créature que nul ne défend…

Mais aussi combien elle lui apparaissait désirable, d’autant plus qu’elle ne voulait pas se donner !… Et, soudain, un irrésistible élan abolit en lui sa volonté, un de ces élans qui élèvent un être au-dessus de lui-même, l’entraînent aux généreuses folies dans lesquelles sombrent les misérables calculs de l’égoïsme humain… Les mots que criait toute son âme lui échappèrent :

— Denise, je vous aimerai comme vous voulez l’être… Soyez mienne… Devenez ma femme…

Il y eut un silence. Une seconde, elle ferma les yeux, blanche jusqu’aux lèvres. Puis, elle répéta d’un ton bas :

— Que je sois votre femme ?… Moi ?… c’est là ce que vous me demandez ?…

Elle s’était arrêtée ; lui aussi. Ils se regardaient dans la solitude de la montagne, qui les isolait du reste de la terre. Leurs âmes s’interrogeaient, palpitantes, à cette heure décisive où s’engageaient leurs destinées…

Elle dit, d’une voix qui tremblait :

— Pourquoi essayez-vous de me tenter ? C’est mal !

— Denise, je vous veux toute, comme je vous aime toute !

— Vous voulez que je devienne votre femme… Vous le voulez…, depuis quand ? depuis un moment ?…

Il n’y avait ni amertume ni ironie dans son accent. C’était une question solennelle de créature loyale, en un instant où la vérité seule devait être dite.

— Depuis la minute où j’ai compris que, par-dessus tout, je voulais votre chère présence pour la vie entière…

Et il était sincère. Le monde était loin, si loin que ses préjugés, ses ambitions, ses exigences, lui apparaissaient comme des ombres vaines ; aussi insignifiantes que le semblaient les lointaines maisons dispersées dans la vallée qui, vues de ce sommet, étaient pareilles à de minuscules jouets d’enfants… La seule réalité, exquise, divine, c’était cette jeune créature qui, tout à coup, lui paraissait l’incarnation même de son bonheur humain ; dont, à cette heure, il n’adorait plus seulement la grâce de femme, la forme charmante, les prunelles d’ombre, la bouche hautaine et caressante, mais aussi l’âme de vierge, orgueilleusement gardée…

Elle ne répondait pas. L’angoisse de ne pas l’obtenir étreignit Bertrand.

— Denise, pourquoi vous taisez-vous ? Je sais bien que je ne suis rien pour vous, à peine plus qu’un étranger… Aussi, ce que je vous demande, c’est seulement de vous laisser aimer, en attendant que j’aie conquis votre cœur, pour que nous soyons heureux follement… Et c’est si bon d’être heureux ! Denise, ne réfléchissez pas, ne me repoussez pas ! Donnez-moi votre vie pour que j’essaye d’y mettre du bonheur en vous adorant…

Elle répéta, suppliante :

— Ne me tentez pas !… Soyez généreux puisque je vous ai avoué que j’étais faible, que, moi aussi, — comme toutes les jeunes, je suppose, — je trouverais… si bon ! de me donner toute en me sentant le tout d’un autre être !

— Alors, Denise, soyez confiante, laissez-moi vous apprendre cette joie que vous ne connaissez pas et que votre jeunesse appelle…

Oh ! la redoutable puissance des mots qui effleurent comme des caresses, qui jettent dans l’âme l’enivrante certitude d’être l’élue, celle pour qui les sacrifices sont des joies… Pourquoi donc ne pouvait-elle s’y abandonner, sans regret, sans crainte, sans pensée, dans l’allégresse d’un bonheur suprême venu à elle tout à coup ? Pourquoi ne pouvait-elle, comme lui, oublier l’existence d’un monde tout-puissant, hostile et ironique, prêt à se dresser contre elle si elle se permettait d’oublier les lois qu’il formule pour parquer les êtres en castes, selon leur fortune…

D’un geste d’angoisse, elle serra ses deux mains :

— C’est un rêve irréalisable que vous essayez de me faire faire !

— Irréalisable, pourquoi ?

— Parce que tout nous sépare…, tout ! et que demain, peut-être même dans un moment, vous en aurez conscience aussi clairement que moi, vous vous apercevrez de tout ce que vous m’avez sacrifié !

— Et vous pensez que je regretterai d’avoir voulu être infiniment heureux par vous ?… Ah ! Denise, comme vous me jugez !… Vous raisonnez parce que vous n’aimez pas ! Vous ne parleriez pas ainsi, si j’avais pu éveiller en vous une ombre même de la passion que vous m’avez jetée dans tout l’être !

La voix lente, elle dit un peu bas :

— Pour que j’aime, il faut que je puisse croire… presque comme on croit en Dieu, en s’abandonnant à lui, dans une foi sans limite…

— Et cette foi, vous ne l’avez pas !

— Je voudrais tant l’avoir ! Ah ! mon ami, pardonnez-moi, si je vous fais injure… C’est si cruel pour moi, cette crainte qui m’obsède, qui m’empêche d’aller à vous, comme vous le souhaitez…

— Laquelle ? Dites-la-moi, même si en parlant, vous allez vous montrer dure…

Elle le regarda. Il y avait dans ses yeux une expression que jamais encore il n’y avait vue, de douceur infinie et tendre, de prière triste :

— Ne me jugez pas encore insensible, mauvaise… Que sais-je ? Oui, je crois, je suis certaine que je vous suis chère en ce moment, à vous faire oublier tout ! pour que nos deux existences se confondent… Mais, en même temps, j’ai… si forte !… la conviction décevante que vous m’avez parlé dans un élan que vous regretterez quand je serai loin, que vous aurez repris l’entière possession de votre jugement… Je crois que vous m’aimez avec tout votre être, sauf avec votre raison… Et j’ai peur de votre raison…

Oh ! cette clairvoyance aiguë qui fouillait les obscurs bas-fonds de son âme d’homme, y découvrait l’éternelle présence de l’égoïsme étouffé sous une rafale de passion… Il avait pâli. Pourquoi lui disait-elle ces choses que, confusément, il sentait trop vraies ?… Alors que, lui-même, tout bas, redoutait, autant qu’elle, le réveil de la froide sagesse, quand il ne subirait plus le charme triomphant de sa présence qui enlevait en lui toute autre pensée que celle de la retenir toujours… Pourtant, est-ce qu’il pourrait regretter ou souhaiter quelque chose de meilleur au monde, s’il lui était donné de la tenir entre ses bras, sous ses lèvres, sienne à jamais de corps et d’âme !… Et il supplia :

— Denise, ne parlez pas ainsi… Ayez pitié de nous… N’écoutez pas votre scepticisme. Dites que vous consentez à être ma femme et vous ferez de moi un autre homme qui ne méritera plus que vous doutiez de lui… Ne vous refusez plus… Laissez-nous essayer d’être heureux, comme tous deux nous en avons soif ! Vous m’apprendrez à être ce que vous voulez que je sois, à valoir plus que je ne vaux, à obtenir votre foi, votre amour, vous, mon unique

Elle tressaillit ! Et s’il disait vrai ? Si la sagesse était de faire du bonheur avec la fragilité d’un caprice ?… Ah ! si elle eût ignoré ses ambitions, ses goûts et ses besoins de luxe, si elle eût été son égale en fortune devant le monde, comme elle se fût enfin confiée à lui, délicieusement conquise ! Mais sa délicate fierté de fille pauvre lui scellait les lèvres pour accepter si vite qu’il lui sacrifiât son avenir d’homme. Et, avec une douceur profonde et grave, elle dit lentement :

— Toute ma vie, quelle qu’elle soit, je me rappellerai comment vous êtes venu à moi, me recherchant pour moi seule, qui suis pauvre, sans relations dans votre monde qui n’est plus le mien, puisque j’appartiens maintenant à la classe de celles qui gagnent leur pain. Mais pour cela, justement, je ne puis aujourd’hui, oh ! non, je ne puis vous promettre d’être votre femme comme vous me le demandez… Je ne le dois pas… Ce serait mal !

— Denise, prenez garde ! C’est peut-être notre bonheur à tous deux que vous jouez en ce moment par orgueil !

— Peut-être… Mais je ne veux pas avoir conquis le mien par surprise ! Mon ami, de toute mon âme, je vous remercie de m’avoir parlé comme vous l’avez fait… Écoutez-moi, et je vous en supplie, comprenez-moi…

Elle s’interrompit encore, l’émotion brisait sa voix. Elle sentait bien qu’il avait raison, qu’elle jouait son avenir, mais elle était incapable de passer outre le scrupule qui la dominait…

— Denise, que pensez-vous ?

— Ceci. Demain ou après, je vais partir… Vous resterez des semaines sans me voir, selon toutes prévisions. Puis, la vie de Paris vous reprendra comme elle m’aura déjà reprise, alors…

— Alors ? Denise.

— Alors, si, à ce moment, je suis encore pour vous… la même, si vraiment vous souhaitez que je devienne votre femme, malgré tout ce qui est entre nous ; après que vous aurez bien réfléchi à ce tout !… alors, vous pourrez venir me chercher… Je ne me défendrai plus d’aimer et je l’apprendrai de vous de tout mon cœur…

Il allait parler. Elle l’arrêta d’un faible geste :

— Laissez-moi vous dire tout ce que je pense… Si, au contraire, vous en venez à trouver, comme moi, que trop nous sépare, je ne m’en étonnerai pas, car je vous considère comme libre, autant que moi-même, après mon refus aujourd’hui ! Je me souviendrai seulement de cette heure-ci comme d’un rêve très bon dont je suis réveillée et que je vous resterai reconnaissante de m’avoir donné… oh ! bien reconnaissante, mon ami…

Ce qu’elle disait là lui semblait, à lui, poignant comme un adieu. Il eût voulu la supplier de l’enchaîner à jamais par une de ces promesses qu’un homme d’honneur ne peut rompre… Pourtant ses lèvres ne prononcèrent pas les mots qui eussent imploré, quoiqu’il jugeât son silence misérablement lâche, alors que nul effort ne lui eût paru trop pénible pour qu’elle fût à lui en dehors de tout lien ! Et le mépris qu’il éprouvait de lui-même lui arracha un cri d’une sincérité amère :

— Ah ! vous avez raison de ne pas vouloir vous confier à moi ! Je ne mérite guère une femme telle que vous… Et c’est tout ce que vous valez qui nous met loin l’un de l’autre, bien plus que les misérables questions auxquelles votre générosité a songé !

Il ne poursuivit pas. D’un mouvement rapide, elle lui imposait le silence ; tout près d’eux, arrivait Blanche Vanore.

Il regarda la jeune femme avec stupeur. Il avait si bien oublié son existence, — comme celle de tous les êtres, hors un seul, — que son apparition lui semblait un fait anormal dont le sens lui échappait…

Et la voix joyeuse, un peu haletante, qui appelait « Denise ! » sonna à son oreille comme une note discordante. Derrière elle, arrivait Grisel qui tenait Huguette par la main, puis d’autres promeneurs, dont les paroles vibraient dans l’air vif.

Elle s’arrêta hors d’haleine, si absorbée, heureusement, par sa fatigue, qu’elle ne remarquait même pas l’étrange expression qui flottait sur le visage de Denise ni la contraction des traits de Bertrand. Gaie, elle s’exclamait :

— Eh bien, vous connaîtrez le panorama du Hoheneck ! Vous a-t-il assez fait disserter ! Charles et moi, nous finissions par être tellement intrigués de vous voir ainsi immobilisés à la même place, que la curiosité nous a rendu des forces pour venir voir à notre tour ce qui vous intéressait tant !

Denise dit machinalement :

— La vue est magnifique ici… Il semble qu’on y soit en plein ciel !

Elle y avait aperçu l’entrée de l’éden dont, volontairement, elle s’était fermé la porte. L’arrivée de Blanche Vanore la rejetait dans la réalité des choses ; et, presque, elle eût pu croire sortir d’un rêve si elle n’avait vu le visage altéré de Bertrand dont les yeux lui murmuraient encore la même prière éperdue : « Laissez-vous aimer… Oubliez votre mortelle sagesse ! »

Charles Grisel les rejoignait, laissant échapper Huguette qui voulait courir vers son frère, aperçu un peu plus haut encore, sur le faîte du Hoheneck. Lui aussi se chargeait de rompre le charme redoutable. Avec un rire sonore, il interrogeait :

— Eh bien, on ne monte plus ?… Est-ce Mlle Denise qui vous arrête ? Blanche. Diable ! quelle ascension, j’en suis époumoné ! Si jamais l’on m’y reprend…

— Allons, Charles, un peu de courage… Nous sommes presque arrivés à notre but… Il faut bien aller voir ce que deviennent les enfants. Jean a entraîné sa sœur, comme toujours… Pourvu qu’elle n’ait pas eu froid… L’air est si vif à cette hauteur ! Charles, voulez-vous mettre le manteau de Huguette ?… Oh ! pardon, Denise, de vous en donner la peine…

La jeune fille, en effet, avait pris le petit collet, trop heureuse d’avoir un prétexte pour se dérober à ceux qui l’entouraient. Mais sa tâche remplie, les laissant achever l’ascension, elle continua de monter seule ; et son pas vif l’enleva bientôt au bavardage de Blanche Vanore, aux prosaïques réflexions de Grisel, surtout à la muette supplication de Bertrand que tout son cœur entendait…

Là-haut, c’était la paix sereine des sommets. Dans le cirque majestueux des montagnes, s’allongeaient des vallées paisibles, des bois, des prairies d’herbe veloutée, sous le ciel immense dont l’infini bleu s’épandait dans la déchirure des grosses nuées que le vent amenait. A ses pieds, bien loin, elle apercevait des villages, des petites villes perdues dans la brume fine de l’horizon, où vivaient des êtres qui, eux aussi, sans doute, connaissaient les heures de doute sur la route à suivre… Et elle songea encore, meurtrie par l’angoisse :

— Ai-je bien fait ou ai-je mal fait ?

Éperdument, elle s’interrogeait. Mais toute son âme vibrait encore des paroles de Bertrand et elle ne pouvait plus bien lire en elle-même…

D’ailleurs, tous déjà la rejoignaient. Les enfants et Grisel s’emparaient d’elle. Et, la pensée absente, elle devait écouter, répondre, causer ; même, pour satisfaire Jean, regarder la table d’orientation qui donnait aux touristes curieux les noms des montagnes dressées à l’horizon.

Mais cette contrainte lui était si dure, qu’avec une sensation de délivrance, elle entendit Mme Vanore demander à redescendre, craignant le froid pour Huguette. Bertrand avait fait un mouvement pour se rapprocher d’elle.

Soit hasard, soit intention secrète, la jeune femme l’arrêta par une question et, comme au départ, se prit à causer avec lui, l’obligeant ainsi à cheminer près d’elle. Bientôt même, elle lui demanda son bras, rappelant qu’elle était une pitoyable marcheuse :

— A mon tour de vous accaparer, lui dit-elle en riant, à celui de Charles de profiter un peu de la présence de Denise que, jusqu’ici, vous avez gardée pour vous tout seul ! Mon cher ami, il est heureux qu’elle s’en aille, vous finiriez par la compromettre. Vous savez que Grisel était tout à fait déconfit de vous voir tant bavarder tous les deux si longuement, sans que nous pussions nous mêler à votre conversation, qui avait l’air, d’ailleurs, fort intéressante.

Intéressante ! Presque un sourire passa sur les lèvres de Bertrand. Cette jeune femme était donc à ce point aveugle qu’elle ne soupçonnait rien ?…

Peut-être, Grisel avait-il été plus clairvoyant. Il n’avait pas son habituel entrain et descendait, silencieux, avec Jean, après avoir marché d’abord auprès de Denise. Mais la jeune fille, qui s’était prêtée de son mieux au désir de conversation qu’il manifestait, lui avait, de nouveau, échappé et cheminait, en avant de tous, la petite main d’Huguette glissée dans la sienne, Madeleine l’escortant de l’autre côté…

Que pensait-elle ? De la voir s’éloigner ainsi, devant lui, sans se retourner, de ce pas rapide qui, à chaque seconde, mettait entre eux une plus grande distance, l’impression décevante s’emparait de lui, qu’ainsi elle s’éloignait de sa vie ; ombre exquise qu’il n’avait pas su retenir…

Ce fut seulement devant l’hôtel de la Schlucht qu’il se retrouva près d’elle enfin, mais dans le milieu bruyant des touristes dont on attelait les voitures pour redescendre vers Gérardmer.

Grisel s’agitait pour faire préparer celle de Mme Vanore, occupée du goûter des enfants. Il se rapprocha, les nerfs tendus jusqu’à la souffrance.

— Denise, pourquoi m’avez-vous fui ainsi ?

— J’avais besoin d’être seule, mon ami ; mais j’ai tant pensé à vous, à nous, que vous ne deviez pas me sentir loin…

— Vous êtes loin, toujours trop loin !

Il mordit ses lèvres pour arrêter les vaines paroles prêtes à s’en échapper… Mais ses yeux disaient ce que sa bouche n’articulait pas… Une seconde, elle lui abandonna les siens, tout pleins d’une infinie douceur, bien qu’ils fussent pensifs et graves, dans leur chaude clarté. Puis elle murmura, pour elle-même plus que pour lui :

— Que c’est donc étrange un amour d’homme.

— Pourquoi ?…

Elle eut un geste lent d’épaules. Mais elle ne répondit pas ; Jean arrivait, lui annonçant que la voiture était attelée et que sa mère l’attendait.

— Je viens tout de suite, Jean. Voulez-vous prendre mon manteau dans le vestibule de l’hôtel ?

Il disparut. Elle tendit la main à d’Astyèves.

— Adieu, mon ami.

— Pas adieu, au revoir ! Vous viendrez ce soir chez Mme Arnales.

— Non… Il y a soirée dansante, et je vais chez elle seulement pour chanter ! Vous y êtes un invité ; moi pas…

Il avait eu un tressaillement, comme sous le coup d’une secrète blessure.

— Un jour viendra où c’est vous qui choisirez parmi ces snobs ceux que vous daignerez recevoir.

— Peut-être… Mais ce jour n’est pas encore tout proche, je crois. Au revoir…

Très bas, il s’inclina et baisa la main qu’il avait gardée jalousement emprisonnée dans la sienne.

— Au revoir, en attendant que vous me permettiez de vous dire : « A toujours… »

Jean reparaissait :

— Denise, j’ai votre manteau. Vous venez ?

— Oui, Jean, me voici.

Elle le suivit. Mme Vanore était déjà montée dans le break où elle s’affairait pour envelopper ses filles, car la fraîcheur tombait avec le soleil, qui s’embrumait au couchant. Grisel fumait, considérant les chevaux d’un œil distrait.

— Vite, Denise, voulez-vous monter ? Il est déjà tard. Nous ne serons à Gérardmer qu’à la nuit.

Elle obéit. D’Astyèves, correct, échangeait les propos d’adieu avec Mme Vanore et Grisel, expliquant :

— Je vais vous suivre de bien près. On prépare mon cheval.

Le break s’ébranlait. Avec toute son âme, Denise regarda le paysage superbe que, peut-être, elle ne reverrait jamais et devant lequel son avenir de femme s’était décidé, sans doute. A cette terre d’Alsace, elle laissait de sa vie… Même quand des années et des années auraient passé, elle se souviendrait encore des lointains bleus qu’elle contemplait tandis qu’elle entendait l’aveu inoubliable…

Les chevaux l’emportaient. De plus en plus petite, se découpait sur l’horizon clair, la silhouette haute et mince de Bertrand d’Astyèves, debout au milieu de la route, immobile à la place où il lui avait dit adieu. Puis la distance le fit invisible…

La voiture filait avec un roulement sonore sur la terre très sèche, suivant la même route que le matin Denise avait parcourue avec une gaieté d’enfant. A peine, maintenant, elle en remarquait le décor pittoresque. Ses yeux, indifférents pour la première fois, voyaient fuir les sous-bois obscurcis, les allées vertes allongées entre les fûts sveltes des sapins, les ravins au fond desquels, sous le ciel rose, s’endormaient les prairies et les grands lacs paisibles. Immobile, elle songeait. Blanche Vanore s’étonna.

— Denise, êtes-vous fatiguée ? Vous ne causez pas !

Elle fit un effort pour répondre.

— Excusez-moi, Blanche, le crépuscule me rend volontiers silencieuse ! C’est mon heure de prédilection et je résiste mal à la tentation d’en jouir en silence.

— Comme vous voudrez, ma chérie. Avez-vous assez chaud ? Votre compositeur ne me pardonnerait pas si je vous ramenais enrhumée !

Presque comme la voiture atteignait Gérardmer, un cavalier la rejoignit ; d’Astyèves qui, ayant été retardé à la Schlucht, avait mené son cheval un rude galop pour regagner le temps perdu. Mais dans la nuit venue, il ne pouvait même plus distinguer les traits du visage cher… Non plus, il ne lui était plus donné d’aller à elle pour la supplier de ne pas persévérer dans son fier refus !

Alors, exaspéré de sentir l’impuissance de sa volonté, il continua solitairement sa route, laissant le break derrière lui.

Seuls, maintenant, les enfants y causaient. Blanche Vanore somnolait ; près du cocher, Grisel fumait ; Denise, elle, rêvait, la nuit tentatrice réveillant en elle, tout bas, la soif éperdue de se laisser emporter vers l’amour…

Quand elle entra dans le salon des Xettes, Mme Champdray lui tendit une lettre ; quelques lignes de sa mère lui disant qu’elle était attendue le surlendemain…

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