Anciennes loix des François, conservées dans les coutumes angloises, recueillies par Littleton, Vol. I
[676] Du mot disrationare, parce que cette action étoit accordée au défendeur pour montrer par son serment & celui de 2 témoins, à son pair, que celui-ci lui avoit imputé un fait dont il n'étoit pas civilement responsable, Anc. Coutum. c. 123, & que conséquemment l'action étoit contre raison, desrénable pour déraisonnable.
L'en doibt savoir que ceulx sont appellés Jureurs, qui par le serment qu'ils ont fait en Court, sont tenus à dire vérité des querelles selon ce qu'il leur sera enchargié par la Justice ou par cil qui sera en son lieu. Quand contends doibt estre finé par le serment de Jureurs, il convient qu'ils sachent les circonstances des contends, si come des personnes entre qui le contends est, & de la chose de quoy il est, la cause, le lieu, le temps & la maniere.
Les espéciaulx amis, ne les ennemis, ne les cousins, ne aulcun de qui l'en puisse par certaine raison avoir soupçon d'amour ou de haine ou de lignage, ne doibvent pas estre reçus au serment, ne ceulx qui sont personiers de la querelle ou qui ont semblable querelle, ne ceulx qui l'ont menée ou deffendue en Court, ne maintenue ou esté conseilleur, ne ceulx qui rien ne savent de la chose de quoy le contends est, & qui ne sont du temps ne du lieu de quoy ils en puissent rien savoir, ne doibvent estre reçus en la Jurée, ne ceulx qui sont reprins de parjure ou de porter faux témoins, ou vaincus en champ de bataille, ou ceulx qui sont infames, & pour ce doibt l'en savoir que l'en doibt semondre aux Jurées les plus prudhommes, & les plus loyaux & les plus prochains, &c. Ch. 69.
REMARQUES.
(a) Assise.
Quand un particulier avoit obtenu du Prince un Bref portant permission de poursuivre son droit en assise; si celui contre lequel le Bref étoit accordé n'avoit aucune exception valable à proposer, soit contre le porteur du Bref, soit contre sa forme; le Vicomte composoit un Tribunal assisam des personnes qu'il croyoit les plus capables de prononcer sur la question.[677] Ces personnes au nombre de douze, en présence des parties & de la Cour où la cause devoit s'instruire, prêtoient serment qu'elles avoient la connoissance requise pour indiquer le meilleur droit. Après que les reproches de parenté, inimitié, &c. avoient été examinés, ceux que l'on substituoit aux suspects faisoient la vue ou examen du lieu, du fonds ou du fait contesté; & comme il arrivoit ou que tous, ou que quelques-uns seulement n'avoient aucune notion du fait en litige, on choisissoit douze autres jureurs, ou on suppléoit par d'autres à ceux qui ne se trouvoient pas en état de décider, de maniere que le nombre requis par le Bref fût complet. Quelquefois cependant les uns étoient favorables au demandeur & d'autres au défendeur, & alors on augmentoit le nombre des jureurs de part & d'autre, jusqu'à ce qu'il y en eût douze d'avis uniforme. Cet avis formoit la Sentence des Juges, & toute Sentence d'assise étoit sans appel,[678] à moins que le condamné n'offrît prouver que toute l'assise, ou plutôt les jureurs de l'assise, avoient fait un faux serment; car cette preuve ne pouvoit être refusée. Elle se faisoit par vingt-quatre hommes irréprochables; & les parjures duement convaincus, non-seulement étoient punis par la confiscation de leurs biens, mais de plus ils gardoient prison pendant un an, & étoient déclarés infames.[679]
[677] Reg. Maj. L. 3, c. 28.
[678] Ibid. L. 1, c. 12.
[679] Ibid. c. 14, & Quoniam attachiam. ch. 53.
(b) Legales homines.
Il ne faut pas confondre ces hommes loyaux ou jureurs avec les témoins ordinaires. Les jureurs n'étoient point obligés d'attester qu'un fait étoit tel qu'une des parties l'articuloit, mais seulement qu'ils avoient lieu de penser, par des raisons d'équité ou de convenance, que ce fait étoit ou n'étoit pas vrai. C'est pour cela que la Loi Salique[680] n'exige de l'homicide insolvable, que le serment de douze jureurs en état de déclarer qu'ils n'ont rien vu, ni sur la superficie, ni dans l'intérieur de ses terres, d'équivalent à la composition qu'il doit; & que dans les Capitulaires, les accusés de conspiration sont autorisés d'administrer des jureurs pour attester que leurs assemblées n'ont eu pour cause aucun projet pernicieux à l'Etat.[681] Les jureurs mettoient la main sur les Evangiles ou sur des Reliques; & comme en certains cas la Loi n'exigeoit que deux ou trois jureurs, & dans d'autres plus, ce qui alloit quelquefois à trois cens: il y est ordonné que l'accusé jurera par deux, trois, quatre, cinq mains, &c. suivant les circonstances. Les laïcs avoient pour jureurs des laïcs, les Ecclésiastiques des jureurs de leur ordre, les femmes des personnes de leur sexe;[682] les Moines ne prêtoient jamais serment. Plût à Dieu qu'ils vécussent encore d'une maniere à être crus, comme autrefois en Jugement, sur leur simple parole.[683]
[680] Lex Salic. c. 61: De chrenechruda.
[681] Capitul. L. 3, c. 9.
[682] Annal. Benedict. L. 14, ann. 659, tom. 1, pag. 417, & tom. 3, L. 37, pag. 270, ann. 274.
[683] Ibid, tom. 2, L. 28: Felices! si tales se præstarent ut iis simpliciter affirmantibus vel in propriâ causâ, ut olim, etiam nunc crederentur. Vid. ann. 887, ibid, tom. 3, pag. 245.
(c) Bref de mort d'ancester.
Voici le modele de ce Bref, tiré des Loix d'Ecosse & de l'ancien Coutumier Normand.
Rex justiciario salutem mandamus vobis quatenus per probos & fideles homines justè & secundum assisam terræ recognosci faciatis, si quondam A... pater B... latoris præsentium obiit vestitus & saisitus de terrâ F... & si dictus B... filius dicti A... sit legitimus & propinquior hæres ejusdem de eâdem terrâ, & si nihil sit, saisinam dictæ terræ de jure recuperare non debeat; quod si ita esse inveneritis & talis injustè terram detinet ut dicit, talem saisinam dicto B... justè habere faciatis.[684]
[684] Quoniam attachiam., c. 52.
Se T..... donne plége de suivir sa clameur, semond le recognoissant du voisiné qu'il soit aux premieres assises du Bailliage, à reconnoître, sçavoir, se N.... étoit saisi en cet an quand il morust de la terre que T..... lui déforce, fise A.... & comment, & sçavoir se T.... est le plus prochain hoir à avoir l'échéance de N.... la terre soit dedans le veue, & soit en paix.[685]
[685] Anc. Cout. c. 98, sur cette expression, Mort d'ancêtres, qui se trouve dans l'article 22 de la grande Chartre, Rapin de Thomas, Hist. d'Angl. L. 8, pag. 295, dit qu'elle signifie la poursuite faite par le fils ou un autre descendant d'un home tué. On peut juger de son erreur par les Textes des deux Loix que je mets sous les yeux du Lecteur.
(d) Darraine presentment.
Ce Bref ne différoit des autres que par son objet:
Si T.... donne plége de suivir sa clameur, semond le recognoissant du voisiné, qu'il soit aux prochaines assises, &c. à reconnoître, savoir, qui presenta la darreine parsonne à l'Eglise D.... que G... lui deforce & fais dedans ce voir l'Eglise, & être en paix.
Telle est la Formule qu'en donne Glanville & le vieux Coutumier Normand.[686] Le Coutumier fait cependant observer que le Juge qui a reçu le Bref doit envoyer des Lettres-Patentes à l'Evêque dont le Bénéfice dépend, conçues en ces termes:
[686] Anc. Cout. c. 109. Glanville, L. 4, c. 10, 11, 13 & 18.
Pour ce que T.... nous a montré sa clameur que jaçoit ce qu'il presenta la darraine personne à l'Eglise D.... G.... lui deforce de son autorité & y veut presenter nouvelle personne, nous vous défendons fermement de par le Duc de Normandie, que vous ne receviez aulcunes personnes à celle Eglise devant que le plaid soit finé.[687]
[687] Art. 2 du Record des Droits des anciens Ducs Normands en 1205. Vide Bruss. Chartr. 2e vol. pag. 24.
Quand le procès n'étoit pas fini dedans six mois, l'Evêque pouvoit nommer qui il vouloit. La procédure sur le Bref de patronage, ne différoit en rien de celle usitée sur les Brefs en matiere profane. Mais depuis Philippe le Bel, lorsque la contestation étoit entre un Ecclésiastique & un Laïc, la vue de l'Eglise ordonnée par le Bref étoit faite, en Normandie, par quatre Prêtres & quatre Chevaliers des mieux créables, & qui par aulcun saonnement ne pussent être ôtés hors de la jurée. Ces huit personnes examinoient les jureurs en présence de l'Evêque & du Juge séculier, ou du Juge séculier seul, si l'Evêque étoit absent: & comme il pouvoit arriver que l'Evêque refusât d'envoyer des Prêtres pour assister à la jurée, le Juge, en ce cas, recouroit à l'ancienne Coutume & tenoit le reconnoissant par les lais.[688]
Le droit de Patronage a eu diverses causes, auxquelles se rapportent les différens noms[689] donnés aux Patrons par les anciennes Loix Françoises, Angloises & Normandes. On trouve dans les Capitulaires que les Eglises avoient droit de demander au Roi des Avocats ou Défenseurs, Advocatos, Defensores, toutes les fois qu'elles avoient à redouter l'oppression de quelque puissance.[690] On y voit aussi qu'outre les Avocats ou Avoués les Eglises avoient des Seigneurs auxquels les Curés devoient des honneurs dans leurs Eglises, ut Episcopi provideant quem honorem Presbiteri, pro Ecclesiis suis, senioribus tribuant.[691] Ces Seigneurs étoient ceux qui avoient doté & bâti sur leurs fonds une Eglise paroissiale: l'Evêque y préposoit des Prêtres ou Curés pour y exercer le Saint Ministere; mais ordinairement ils lui étoient présentés par le Seigneur ou Patron. Dans la suite ces Patrons & les Avoués ont été confondus, soit parce que les Evêques préférerent de mettre leur Evêché sous la protection des Grands qui, dans leur Diocèse, par leurs fondations, avoient donné plus de preuves de leur attachement pour le culte Divin, soit parce que ceux que le Roi leur avoit choisi ou permis de prendre pour protecteurs de leurs Evêchés, fonderent eux-mêmes des Monasteres ou des Eglises, à condition qu'ils en nommeroient les Ministres;[692] soit enfin parce que les Fondateurs d'Eglises apposerent à leur générosité cette clause, qu'elles seroient à perpétuité sous la protection de tel Seigneur & de ses descendans.[693] En sorte que le Patronage, vers la fin de la deuxieme Race & dans la suite, a non-seulement donné la faculté de présenter à l'Eglise un Ministre, mais encore celle de soutenir les droits de l'Eglise en Justice, & même de rendre justice aux vassaux de l'Eglise. Les Patrons Normands avoient les mêmes prérogatives, à l'exception de la derniere, comme je l'ai déjà observé, parce que toute Jurisdiction s'exerçoit, en Normandie, au nom seul de ses Ducs.[694]
[689] Senior, Patronus, Advocatus, Defensor.
[690] L. 5, c. 31 des Capitul. & L. 7, c. 308.
[691] Discipl. Ecclésias. 2e part. L. 1, pag. 172.
[692] Annal. Bénédict. L. 66, pag. 163, ann. 1081. Roger, Avoué de Vignory, y construit & fonde une Eglise.
[693] Ibid, L. 68, ann, 1094, pag. 317.
[694] Sect. 10, supr.
(e) Assise est prise pur un ordinance.
Skénée nous a conservé, dans son recueil, une assise de David premier de ce nom, Roi d'Ecosse, sur les poids, mesures & monnoies. C'est dans cette assise que le poids du sterling est fixé à trente deux grains, boni & rotundi frumenti.[695] On trouve aussi, dans la collection de cet Auteur, une autre assise qui regle la police des moulins. Le droit de moute y est fixé, pour l'homme libre, au seizieme, au vingtieme & au trentieme, suivant la Coutume de la Seigneurie dans laquelle ces terres inféodées se trouvent assises; mais le tenant par villenage doit le treizieme. Il est encore décidé que quiconque ayant acheté du bled dans un Fief, passe en un autre Fief, & pour se délasser dépose son sac rempli de bled dans le grand chemin, ne doit rien au Seigneur; mais que s'il entre dans une auberge du dernier Fief, & y décharge son grain, il est sujet au droit de moute. Chaque Meûnier y est aussi assujetti à avoir deux valets ou Sergens, servientes, qui, après avoir prêté serment au Seigneur & aux vassaux, peuvent arrêter ceux qui fraudent la moute. Le cheval du fraudeur, en ce cas, appartient au Seigneur, & le bled & le sac aux domestiques ou Sergens. Il est défendu à ceux qui portent leur grain au moulin de prendre les rangs les uns des autres, & ce rang y est appellé Rovum, terme qui a encore la même signification chez le menu peuple de Normandie.
[695] Laur. Ord. tom. 1.
SECTION 235.
Item, si soit Seignior & tenant, & le Seignior granta le rent son tenant per son fait a un auter, savant a luy les services, & l' tenant atturna, ceo est un rent seck, come est dit adevant. Mes si le rent a luy soit denie al prochein jour de payement, il ny ad ascun remedie, pur ceo que il navoit de ceo ascun possession. Mes si l' tenant quaunt il atturna al grantee, ou apres, voile doner al grantee un denier, ou un maile, &c. en nosme de seisin de le rent, donques si apres a le procheine jour de payment le rent a luy soit denie, il aver assise de novel desseisin. Et issint est lou home granta per son fait un annual rent issuant hors de sa terre a un auter, &c. si le grantor a donques ou apres paya al grantée un denier, ou un mail en nosme de seisin de le rent, donques si apres al procheine jour de payment le rent soit denie, le grantee poet aver assise, ou auterment nemy, &c.
SECTION 235.—TRADUCTION.
Si un Seigneur aliene, du consentement de son tenant, la rente que ce dernier lui doit, en se réservant néanmoins les services ou devoirs seigneuriaux, la rente, en la main de l'acquereur, est une Rente-seche, comme on l'a précédemment dit; & cet acquereur, dans le cas où le payement lui seroit refusé, ne pourroit user de saisie sur le fonds. Mais si le débiteur, en consentant le transport de la rente, a seulement donné à cet acquereur un denier ou une maille, en signe de ce qu'il le reconnoît saisi de la rente; à défaut de payement, le nouveau propriétaire de cette rente peut se pourvoir en l'assise de nouvelle dessaisine. Ainsi il est essentiel que le débiteur de la rente ensaisine l'acquereur de quelques sommes d'argent, afin que celui-ci ait le droit de se pourvoir en l'assise.
SECTION 236.
Item, de Rent seck, home poet aver Assise de mort dancester, ou Brife de Apel, ou de Cosinage, & touts auters manners dactions Reals, come la case gist, sicome il poet aver dascun auter rent.
SECTION 236.—TRADUCTION.
Quoique l'on n'ait pas la voie de l'assise de nouvelle dessaisine pour une Rente-seche, cependant on peut obtenir, pour s'en faire payer, l'assise de mort d'ancêtres, ou un Bref d'ayeul ou de parenté, ou tout autre Bref établi pour l'introduction des actions réelles, ainsi que l'on en use à l'égard de toutes les autres rentes.
SECTION 237.
Item, sont trois causes de disseisin de Rent Service, scavoir Rescous, Replevin & Enclosure: rescous est quaunt le Seignior en la terre tenus de luy distrein per son rent arere si le distres de luy soit rescous: ou si le Seignior vient sur la terre & voile distreyner, & le tenant ou auter home ne luy voile suffer, &c. Replevin est, quant le Seignior ad distreine, & Replevin soit fait de les distresse per Briefe, ou per plaint. Enclosure est, si les terres ou les tenements sont issent encloses, que le Seignior ne poyt vener deins les terres ou tenements pur distreyne. Et la cause pur que tiels choses issint faits sont disseisins al Seignior, est pur ceo que pur tiels choses le Seignior est disturbe de le mean per que il doit avoire & vener a son rent, scavoir, de le distresse.
SECTION 237.—TRADUCTION.
On est réputé dessaisi d'une Rente de service en trois cas; pour récousse, réplévine ou main-levée, en closure ou opposition. La récousse a lieu, quand le Seigneur saisit pour les arrérages de sa rente, & quand un autre vient reclamer les effets saisis, ou s'opposer à ce qu'il les enleve; la main-levée s'entend de celle qu'obtient le Débiteur des choses saisies par Bref ou sur sa plainte judiciaire. L'enclosure signifie toute espece d'obstacles qui empêche le créancier de la rente d'user de saisie sur les fonds qui y sont affectés. Or, comme ces trois choses attaquent la propriété de la rente, elles sont censées en dessaisir le propriétaire.
SECTION 238.
Et sont 4 causes de disseisin de rent charge scilicet, Rescous, Replevin, Enclousure, & Denier, car Denier est un disseisin de Rent charge, come est avantdit de Rent secke.
SECTION 238.—TRADUCTION.
Il y a quatre cas dans lesquels on est dessaisi de la Rente-charge, sçavoir, celui de recousse, ceux de main-levée, d'opposition, de refus; car refuser une Rente-seche, c'est en dessaisir celui à qui elle appartient.
SECTION 239.
Et deux sont causes de disseisin de Rent seck, cest ascavoir, denier & enclosure.
SECTION 239.—TRADUCTION.
On ne peut être dessaisi d'une Rente-seche que par le refus & l'opposition.
SECTION 240.
Et il semble que il y ad un auter cause de disseisin de touts les trois services avantdits, cest ascavoir, si l' Seignior soit en alant a la terre tenus de luy pur distreyner pur le Rent arere, & le tenant ceo oyant, luy encounter, & luy forstala (a) la voy ovesque force & armes, ou luy manace en tiel forme que il ne osast vener a sa terre pur distreiner pur son rent arere pur doubt de mort, ou mutilation de ses membres, ceo est un disseisin, pur ceo que le Seignior est disturbe de le meane, pur que il doit vener a son rent. Et issint est si pur tiel forstalement ou menace, celuy que ad un rent charge ou rent secke est forstalle, ou ne osast vener a la terre a demaunder le rent arere, &c.
SECTION 240.—TRADUCTION.
Cependant il y a un autre cas de dessaisine des trois Rentes dont on vient de parler: c'est celui où un Propriétaire de rente s'étant transporté sur le fonds pour en distraire ou saisir jusqu'à concurrence des arrérages qui lui sont dûs, on s'est opposé à son passage à main armée, ou on lui a fait des menaces de mort ou de mutilation.
REMARQUE.
(a) Forstala.
Foristalamentum: ce terme est ici pris pro obstrusione viaæ, vel transitûs impedimento. Il s'entend en général, dans les anciennes Loix Angloises, de tout empêchement causé à tel droit que ce soit. Ainsi quiconque faisoit des amas de grains pour les vendre plus cher dans un temps de stérilité, on vendoit sa marchandise clandestinement sans l'exposer aux marchés, ou qui, sans être membre d'une communauté d'artisans établie dans un Bourg, en exerçoit la profession, ou qui violoit les statuts, gildam, de cette communauté. Par exemple, les Cordonniers qui employoient du cuir de mauvaise qualité, qui faciunt calceos ex corio & pellibus animalium quorum cornua & aures sunt ejusdem longitudinis. Les Tailleurs qui coupoient les étoffes qu'on leur confioit, de façon qu'il leur en restoit une partie considérable. Les Brasseurs de biere qui ne lavoient point suffisamment l'orge qu'ils y destinoient, quod est ejus perfectionis impedimentum, &c. En un mot, tout contrevenant aux regles établies dans les Bourgs, étoit regardé comme coupable d'avoir voulu mettre des bornes à ses franchises, & c'est ce qu'on appelloit foristallator.[696] La vraie origine de ce mot vient de ces deux, forum & stallum. Stallum in foro, lieu où on peut étaler ou exposer sa marchandise dans un marché. Stalli fori violator, celui qui viole la liberté, le droit de détail; il n'y avoit que les Bourgeois qui eussent ce droit.[697]
[696] Iter camerar. c. 21, Statut. Willelm. Reg. Collect. Sken.
[697] Stallagiator qui habet stallum, & locum in publicâ viâ tempore fori. Sken. Leg. Burg. not. in cap. 40.
Fin du second Livre.
LIVRE TROISIEME.
CHAPITRE I.
DE PARCENIERS.
SECTION 241.
Parceners sont en deux maners, cest ascavoir, Parceners solonque l' course del common ley, & Parceners solonque le custome. Parceners solonque le course del common ley sont, lou home ou feme seisie de certaine terres ou tenements en fee simple, ou en taile, nad issue forsque files & devie, & les tenements discendont a les issues, & les files entront en les terres ou tenements issint discendus a eux, donques els sont appels Parceners, & quaunt a files els sont forsque un heire (a) a lour ancestor. Et els sont appel Parceners, pur ceo que per le briefe que est appel Briefe de Participatione facienda (b) la ley eux voet cohert que partition serra fait enter eux. Et si sont deux files al queux les terres discendont, donque els sont appels deux Parceners. Et si sont trois files, donque els sont appels trois Parceners, & si quater files, quater Parceners, & issint ouster.
SECTION 241.—TRADUCTION.
On distingue deux sortes de Parceniers, les Parceniers selon la commune Loi, & les Parceniers suivant la Coutume. On comprend dans la premiere classe les filles qui succedent aux Fiefs simples ou conditionnels de leurs peres & meres; & parce que la Loi considere ces filles comme n'étant toutes ensemble qu'un seul héritier, & que par le Bref nommé de Participatione faciendâ, il leur est enjoint de partager également la succession entr'elles, on les nomme parcenieres. Ainsi qu'il n'y ait que deux filles, on dit qu'elles sont deux Parcenieres; si elles sont trois ou quatre, on dit que dans telle succession il y a trois ou quatre Parcenieres, &c.
ANCIEN COUTUMIER.
Quant à aulcun est eschu l'héritage de son pere, ou de son aël ou de son bisaël, s'il a freres qui soient du lignage à celui de qui l'héritage descend, le Fief doit estre laissé au puisné pour en faire autant de parties comme ils sont de personiers principaulx, selon la Coustume du pays.
Les uns sont principaulx personiers, les aultres seconds. Les principaulx sont ceulx entre qui l'héritage doibt estre party principalement; c'est quand l'un en doibt avoir autant comme l'aultre, ainsi comme sont freres.
Les seconds personiers sont ceulx qui n'attendent pas telle partie en l'héritage, mais y reclament aulcune chose, si come sont les enfans à un des freres qui est mort qui doibvent partir entr'eux la partie qui appartenoit à leur pere.
Le puisné doibt faire les parties en telle maniere qu'il ne départe pas le Fief de Hautbert ne les aultres Fiefs où il y a garde, & mesme qu'il ne mesle pas les héritages d'une Ville avec celle d'une aultre Ville, & ainsi qu'il ne retaille pas les pieces de terres pourtant que les parties puissent estre faites égales sans les retailler. Il doibt joindre celles qui sont plus prochaines sans retailler les membres, mais les greigneures[698] peut-il retailler pour joindre avec les membres pour rendre les parties égales.
[698] Plus considérables.
Car si le puisné mettoit la moitié de tout l'héritage en un lot, afin que l'aisné le print, en ce il empireroit les lots aux aultres freres, & pour ce, se l'en y appercevoit malice ou tricherie, les parties doibvent estre faites également, par le serment de douze hommes loyaux & croyables. Se le puisné fait les parties, & il va contre les Coustumes du pays, ils doibvent estre despécées & refaites, & il doibt amender la faute, û,[699] s'il ne le veut faire, il sera sans partie tant comme il sera en ce; ou les aultres freres feront les parties avenants, si que la part au mendre n'en soit empirée. Quand l'héritage vient aux femmes par défaut des hoirs masles, elles le partiront ainsi comme les freres feroient, si que le Fief de Hautbert & les Seigneuries sont partables entre sœurs quant ils leur viennent. Ch. 26.
[699] Ou.
REMARQUES.
(a) Et quaunt a files els sont forsque un heire.
Le service militaire dû par un Fief étant indivisible, il étoit naturel que l'aîné des freres en fût chargé préférablement aux autres. Mais l'aînée des filles, à qui un Fief sujet à un service de cette espece échéoit, ne pouvant pas plus satisfaire personnellement à ce service que ses puînées, elles étoient tenues solidairement à se substituer une personne capable de s'en acquitter en leur nom. Le Seigneur ordinairement ne s'adressoit qu'à l'aînée pour obtenir les services que le Fief lui devoit, parce que cette aînée ayant le choix des lots, elle préféroit presque toujours celui où le principal manoir étoit compris. Or, c'étoit à ce manoir que l'on faisoit les sommations au vassal de rendre les devoirs dont tout le Fief étoit chargé, & par cette raison, les Parcenieres s'obligeoient de payer en ce lieu, qui étoit regardé comme la principale portion, le chef-lieu du Fief, leurs contributions. Les sœurs cadettes ne devoient cependant pour cela, à leur aînée, ni foi ni hommage:[700] car c'étoit uniquement pour la commodité de toutes, & non à raison de supériorité, qu'une seule d'entr'elles s'assujettissoit à veiller pour les autres à ce que le service du Seigneur fût effectué. Ce qui d'abord ne fut fondé que sur des raisons de convenance, devint dans la suite une Loi pour quelques cantons. Le manoir, auquel chaque sœur avoit pu originairement prétendre aussi-bien que l'aînée, fut réservé à celle-ci.[701] Souvent les cadettes lui devoient leur premiere éducation, & il parut raisonnable qu'elle pût leur continuer ses leçons dans la maison où ses peres & meres lui en avoient confié le soin de leur vivant. Cette maison auroit été souvent le domicile particulier de la puînée, si celle-ci en fût devenue propriétaire; au lieu que l'affection d'une aînée pour des sœurs qu'elle avoit élevées, étoit un gage assuré que sa maison ne cesseroit point de leur être commune tant qu'elles le voudroient. L'union que les Coutumes Normandes & Angloises avoient eu en vue d'établir entre les sœurs se continuoit entre leurs enfans. Les descendans des puînées s'acquittoient de leurs devoirs envers le Suzerain jusqu'au quatrieme dégré, par la médiation de leurs cousins, enfans de l'aînée. Ceux-ci mêmes répondoient à toutes les actions relatives au Fief divisé entr'eux.[702] Mais les représentans de la fille aînée pouvoient exiger des puînés, parvenus au quatrieme dégré, l'hommage, le relief & la contribution aux autres services dûs au Suzerain.[703]
[700] Reg. Maj. L. 2, c. 28 & 29.—Glanville, L. 7, ch. 3.
[701] Britton, c. 72.
[702] I. Stat. Robert. 1, c. 3, Collect. Sken.
[703] Glanv. L. 7, c. 3, fo 46, vo.
(b) Briefe de participatione faciendâ.
La forme de ce Bref étoit semblable à celle des Brefs dont j'ai déjà parlé, elle tiroit son origine des Capitulaires de nos premiers Rois.[704] La Loi des Allemands[705] ne permettoit aux enfans de disposer de leur part en la succession de leurs ancêtres, qu'après en avoir fait des lots avec leurs cohéritiers. Si cependant on avoit joui pendant quarante ans de quelques biens provenans de ses ayeul & pere, & que l'on fût en état de prouver qu'on les avoit acquis d'eux, ou qu'ils provenoient de quelque échange fait avec eux, on n'étoit pas obligé de les partager avec ses freres ou cousins.[706]
[704] Coheres, si sponte noluerit (res suas cum hæredibus suis divisas habere) aut per Comitem, aut per missum ejus destringatur ut divisionem cum illo faciat ad quem defunctus hæreditatem suam voluit pervenire.... & hoc observetur erga patrem & filium, & nepotem usque ad annos legitimos, &c. Capitul. L. 4, Can. 20, pag. 779, tom. I, Ed. Balus.
[705] Tit. 89.
[706] Leg. Longob. t. 48.
SECTION 242.
Auxy si home seisie de tenements en fee simple ou en fee taile, devy sauns issue de son corps engender, & les tenements discendont a ses soers, els sont Parceners, come est avantdit. Et en mesn le manner, lou il nad pas soers, mes les tenements discendont a ses aunts, els sont Parceners, &c. Mes si home nad forsque un file, et ne poit estre dit Parcener, mes el est appelle file & heire, &c.
SECTION 242.—TRADUCTION.
Si un homme saisi de Fiefs simples ou conditionnels décede sans enfans, ses biens échéans à ses sœurs ou à ses tantes, celles-ci sont parcenieres; mais si le défunt ne laisse qu'une fille, on l'appelle héritiere.
SECTION 243.
Et est ascavoir, que partition enter parceners poit estre fait en divers manners. Un est quant els agreeont (a) de faire partition, & font partition de les tenements, sicome si soyent deux parceners a devider enter eux les tenements en deux parts, lots, chescun part per soy en severaltie, & de egal valu. Et si sont 3 parceners a devider les tenements en trois parts per soy en severaltie, &c.
SECTION 243.—TRADUCTION.
On peut procéder différemment au partage des successions: 1o. Quand il y a deux ou trois parcenieres, elles peuvent former elles-mêmes deux ou trois lots de différens fonds, & se saisir mutuellement d'un desdits pourvu qu'ils soient d'égale valeur.
REMARQUE.
(a) Quant els agreeont, &c.
Marculphe[707] donne un modèle de partage amical entre cohéritiers: Il observe d'abord que cette maniere de partager de gré à gré, est préférable à celle qui se fait judiciairement; & il ajoute que l'acte en doit être dressé par écrit. Les partageans, selon la Formule dressée par Marculphe, s'investissoient réciproquement de leur lot par la tradition d'une petite branche, per fistucam; & afin qu'ils ne pussent, à l'avenir, prétendre rien au delà de ce qu'ils s'étoient mutuellement cédés, ils s'écrivoient-chacun une lettre où les clauses arrêtées entr'eux étoient exprimées.
[707] L. 2, Formul. 14.
En joignant à cette Formule la trente-neuvieme, incerti authoris: placuit atque convenit inter illum & Germanum suum illum de alode quæ fuit genitoris sui ut inter se æqualentia dividere vel exequare deberent; quod ita & fecerunt. Accepit ille de parte sua mansum de pago illo, &c. è contra ad vicem accepit ille de parte sua mansum in pago illo, &c. Et pars contra parem suum invicem tradidit & per eorum fistucam pars contra parem suum se exinde exutos fecerunt, &c. On a les deux manieres dont on pouvoit, dans le septieme siecle, partager toutes especes de successions, quand les Pairs ou Parceniers y avoient un intérêt égal; c'est-à-dire, par Lettres ou par Chartres.
SECTION 244.
Un auter partition est, a eslier per agreement enter eux, certaine de lour amies (a) de faire partition des terres ou tenements en le forme avantdit. Et en tiels cases apres tiel partition, le eigne file prymerment esliera un des partes issint divides, que el voit aver pur sa part, & donques le second file prochein apres luy auter part, & donques l'tierce soer auter part, donques la 4 auter part, &c. si issint soit que soit plusors soers, &c. si ne soit auterment agree enter eux. Car il poit estre agree enter eux, que un avera tiels tenements, & un auter tiels tenements, &c. sans ascun tiel primer election, &c.
SECTION 244.—TRADUCTION.
2o. Les Parcenieres peuvent encore choisir une amie pour faire leurs partages, & en ce cas l'aînée prend le lot qui lui plaît; la premiere puînée a ensuite le choix sur les lots qui restent, & les autres prennent leur part selon l'ordre que l'âge leur donne; à moins que toutes les sœurs ne conviennent entr'elles que l'une aura tel fonds, une autre tel autre fonds, car en ce cas il n'y a plus ni choix ni préférence.
REMARQUE.
(a) Lour amies.
Ce texte peut confirmer ce que j'ai dit déjà, qu'il s'est glissé dans les Loix d'Ecosse, recueillies par Skénée, beaucoup de dispositions du Droit Romain; car, à la différence des Loix Angloises, elles interdisent aux femmes tout arbitrage.[708]
[708] Reg. Maj. L. 2, c. 4.
SECTION 245.
Et la part que leigne soer ad est appelle en Latin Enitia pars. (a) Mes si les parceners agreeont, que leigne soer ferra partition de les tenements en le forme avantdit, & si ceo el fait, donques el est dit que leigne soer esliera pluis darreine pur sa part, & apres chescun de ses soers, &c.
SECTION 245.—TRADUCTION.
La part de la sœur aînée s'appelle en Latin Enitia pars. Mais si les sœurs consentent que l'aînée fasse les lots, elle ne choisira pas, elle se contentera de la part que ses sœurs n'auront pas choisie.
REMARQUE.
(a) Enitia pars.
Cette Section prouve qu'avant la conquête de Guillaume, l'aînesse ne consistoit pas, pour la fille aînée, au principal manoir; mais que sa part étoit seulement désignée par ce nom comme choisie la premiere. Enitia pars;[709] d'autres écrivent, eisnetia ou aeisnetia, de ces deux mots François, ains-née, ains pour ante, ante nata, la premiere née.[710]
[709] Britt. c. 72.
[710] Rech. de Pasq. L. 8, c. 1.
SECTION 246.
Un auter partition ou allotment est, sicome soient quater parceners, & apres le partition de les terres fait, chescun part del terre soit per soy solement escript en un petit escrovet, & soit covert tout en cere (a) en le manner dun petit pile, issint que nul poit veir lescrovet, & donque soient les 4 piles de cere mis en un bonnet, a garder en les maines dun indifferent home, & donques leigne file primerment mettra sa maine en le bonnet, quel prendra un pile de cere ovesque lescrovet deins mesme le pile pur sa part, & donques le second soer mettra sa maine en le bonnet, & prendra un auter, le tierce soer le 3 pile, & le quater soer le 4 pile, &c. & en ceo cas covient chescun de eux luy tener a sa chance & allotment.
SECTION 246.—TRADUCTION.
Une autre façon de partager est de faire quatre lots des fonds, s'il y a quatre parcenieres, & d'écrire sur quatre rouleaux de papier ce que chaque lot doit contenir. Après avoir enfermé chaque rouleau dans une boule de cire, de maniere qu'on ne puisse appercevoir ce qu'ils contiennent, on les confie à quelqu'un qui les mêle dans son bonnet, d'où l'aînée & les trois puînées tirent successivement une des boules: celle qui leur écheoit regle irrévocablement quelle doit être leur part.
REMARQUE.
(a) Escrovet covert tout en cere, &c.
La plus ancienne maniere de procéder aux partages étoit de faire mesurer les terres, d'en composer autant de lots qu'il y avoit d'héritiers quand ils devoient avoir part égale, & de jetter ces lots au sort.[711] Ce n'étoit pas seulement dans les cas de partage qu'on avoit recours au sort, il étoit usité dans toutes les circonstances où le droit de plusieurs étant le même sur le même objet, un seul cependant pouvoit en jouir.[712]
[711] Leg. Long. c. 48.
[712] Lex Allemann. Tit. 8, art. 6.
SECTION 247.
Item, un auter partition il y ad sicome sont quater Parceners, & ils ne voilent agreer (a) a partition destre fait enter eux, donque lun poit aver brief, De partitione facienda, envers les auters trois: ou deux de eux poient aver brief De partitione facienda envers les auters deux, ou trois de eux poyent aver briefe De partitione facienda envers le quart, a lour election.
SECTION 247.—TRADUCTION.
En supposant que les parcenieres ne puissent s'accorder pour faire leurs lots, l'une d'elles peut obtenir un Bref, De partitione facienda, contre les trois autres. Deux ou trois auroient la même faculté contre la seule qui seroit refusante.
REMARQUE.
(a) Et ils ne voilent agreer, &c.
Il arrivoit quelquefois qu'après que le Juge auquel le Bref étoit adressé avoit, de l'avis des douze hommes libres voisins des fonds partables, fait la vue de ces fonds, & donné à chaque Parceniere son lot, &c,[713] une des Parcenieres troubloit une ou plusieurs de ses copartageantes en leur possession; en ce cas celles qui étoient inquiétées pouvoient se pourvoir en l'Assise, y appeller toutes leurs sœurs, & si le trouble se trouvoit fondé, toutes étoient obligées de remettre en commun leurs parts, pour être procédé à un nouveau partage.[714]
[713] Formul. brevis de partitione facienda. Coke, Sect. 248.—Charlemagne fait assigner ses enfans au Parlement pour le partage de sa succession, & le fait jurer aux Seigneurs & Pairs. Pasquier, L. 2, c. 2. Peut-être n'en avoit-on choisi que douze pour faire serment, puisque ce nombre de Pairs suffisoit dans les causes des particuliers, & de-là le nombre des Pairs de France se sera insensiblement trouvé réduit à douze.
[714] Britton, c. 73, fol. 191.
SECTION 248.
Et quant judgment serra done sur tiel brief, le judgment serra tiel, que partition serra fait enter les parties, & que le Vicount en son proper person alera a les terres & tenements, &c. & que il per l' escrement de 12 loyalx homes de son Bayliwicke, &c. (a) ferra partition enter les parties, & que lun part de mesmes les terres & tenements soyent assignes al plaintif, ou a lun des plaintifs, & un auter part a un auter Parcener, &c, nient feasant mention en le judgement de leigne soer pluis que de puisne.
SECTION 248.—TRADUCTION.
Le Jugement sur ce Bref doit porter 1o. que le partage sera fait entre les Parties; 2o. que le Vicomte ira en personne sur les terres, &c. & que là, après serment prêté par douze loyaux hommes de son ressort, il divisera les fonds entre la plaintive & ses coparcenieres. Mais il n'y est pas fait une mention plus particuliere de l'aînée que des autres sœurs.
REMARQUES.
(a) Vicount...... Baylivvicke, &c.
Les Comtes, les Gouverneurs & les Juges supérieurs des Provinces étant devenus propriétaires des Bénéfices dont nos Rois leur avoient confié l'administration, se substituerent des Vicaires ou Vicomtes qu'ils envoyerent[715] tenir les plaids dans chaque Fief particulier dépendant de leur gouvernement. Les Centeniers, chefs des Jurisdictions des Villes ou des Bourgs, furent souvent honorés de cet emploi. Chaque Vicomte avoit sous lui plusieurs Subdélégués ou Baillis, auxquels il attribuoit l'inspection ou la garde des différentes Cours seigneuriales. Mais outre les défaultes en droit que les Seigneurs commettoient envers leurs vassaux, & que les Vicomtes avoient seuls le pouvoir de réformer,[716] l'inexécution des Sentences des Officiers de ces Seigneurs de la part des condamnés, étoit aussi de leur compétence. Ils étoient d'ailleurs spécialement chargés de faire exécuter les Brefs de Chancellerie dans toute l'étendue des Seigneuries de leur district. Ainsi il ne restoit, à proprement parler, aux Juges des Seigneuries particulieres, que la connoissance des causes que les Vicomtes ne vouloient point juger.
[715] L. 2, Capitul. 24 & 28.
[716] Glanville, L. 12., c. 9. Regiam Maj. L. 3, c. 22.
Des pouvoirs aussi étendus, joints à l'indifférence des Comtes pour l'admistration de la Justice, rendoient chaque Vicomte seul & unique Gardien ou Baillif des Jurisdictions de tout un Comté. En conséquence, ce titre de Baillif devint particulier aux Vicomtes, & celui de Vicomte devint propre aux Baillifs.
On doit donc considérer les chefs des Jurisdictions qui étoient inférieures à l'Echiquier, & dont l'établissement fut fait en Angleterre postérieurement à la conquête, sous les dénominations suivantes. 1o. Les Vicomtes porterent d'abord ce nom: on les appella Hauts-Baillis, Baillis royaux, Baillis greigneures, dès que les Comtes eurent cessé d'exercer la Justice civile. 2o. Après les Vicomtes il y avoit originairement les Baillis des Fiefs. Mais lorsque les Vicomtes furent devenus chefs de Justices subalternes des Provinces, ces Baillis s'étant trouvés remplir à peu près les mêmes fonctions sous ces Vicomtes, que ceux-ci avoient originairement exercées sous les Comtes, ils s'appellerent Vicomtes, ou Baillis meindres, Baillis seigneuriaux.
Ainsi quand Littleton parle du Baylivvicke, ou Bailliage du Vicomte, il donne à entendre que de son temps les Vicomtes avoient déjà donné à leur Ressort le nom de Bailliage; & quand l'ancien Coutumier dit que les Justiciers plus hauts ou Greigneurs, s'appelloient Baillis, & qu'ils étoient établis par le Prince au-dessus des autres pour garder les droitures au Duc, &c. & que les Vicomtes sont meindres Justiciers établis sous les Justiciers greigneurs, &c. il fait voir que les Vicomtes ne portoient déjà plus, en Normandie ce titre, au temps de sa rédaction, & qu'ils l'avoient abandonné à ceux qu'ils préposoient pour maintenir, à leur décharge, les Coutumes des Seigneuries dont l'inspection leur avoit été d'abord confiée.[717] Or, c'est par cette raison que lorsque les Seigneurs sont parvenus à obtenir des Ducs de Normandie ou des Rois d'Angleterre la Jurisdiction dans l'étendue de leurs Fiefs, ils ont appellé Baillis ou Vicomtes leurs Officiers, selon que ceux-ci avoient Haute ou Basse-Justice par le titre de leur inféodation.
[717] Anc. Cout. ch. 4 & 5, & Rouillé sur ledit chap.
SECTION 249.
Et de la partition que l' Vicount ad issint fait il ferra notice as Justices south son Seale, (a) & les Seales, de chescun de les 12, &c. Et issint en cest case poies veier que leigne soer navera my la primer election, mes le Vicount luy assignera sa part que el avera, &c. Et poit estre que le Vicount doit assigner primerment un part a le plus puisne, &c. & darreinement al eigne, &c.
SECTION 249.—TRADUCTION.
Le Vicomte après le partage arrêté doit le faire notifier, par un acte scellé de lui & des douze loyaux hommes, aux Justiciers inférieurs. Or, il peut arriver que dans ce partage il ait assigné à la puînée le premier lot, & à l'aînée le dernier; car l'aînée n'a point le droit de choisir quand les lots se font en Justice: le Vicomte est maître en ce cas de donner aux Parcenieres la part qu'il lui plaît.
REMARQUE.
(a) Seale, &c.
On donnoit anciennement l'investiture des fonds, comme je l'ai observé, avec un brin de paille; & pour anéantir la convention, cette paille étoit rompue par les contractans. De-là vint que dans la suite, lorsqu'on dressoit un acte par écrit de la cession d'une terre, on attachoit à cet acte la paille dont les parties s'étoient servies, pour désigner la translation de la propriété.[718] Si cette paille se trouvoit rompue & perdue, l'acte étoit annullé,[719] parce qu'on présumoit alors que la résiliation de ses clauses s'étoit faite entre les intéressés, par la restitution mutuelle de moitié du signe ou sceau qu'ils avoient apposé à leur traité. La fragilité d'un sceau de cette espece, les inconvéniens fréquens qui en résultoient engagerent à donner aux sceaux plus de consistance. Au lieu d'une paille, d'un rameau d'arbre, &c. on abandonna aux donataires tout ou partie de sa ceinture,[720] son couteau, une piece d'argent percée, son portrait;[721] toutes ces choses étoient jointes à l'acte, & conservées aussi précieusement que l'acte même; & de-là cette diversité dans la forme des sceaux attachés aux Chartres concernant des concessions faites par des particuliers. Les volontés des Rois étoient manifestées par des signes plus uniformes; leurs Préceptions & leurs Chartres furent souscrites d'abord de leur propre main[722] d'une simple croix, ensuite elles ont été marquées comme tous les actes judiciaires l'avoient toujours été dès les premiers temps de la Monarchie Françoise,[723] d'un sceau dont les Officiers, chargés d'agir en leur nom, étoient dépositaires,[724] & qui, par cette raison, ne varioit point durant leur regne.[725]
[718] Annal. Bened. tom. 2, pag. 223.
[719] Beauman. c. 35, pag. 189.
[720] Je dis partie, parce que quelquefois le signe de la donation étoit divisé entre les deux intéressés à l'acte qui étoit en ce cas fait double, & à chaque double on attachoit une portion du signe.
[721] C'étoit à sa ceinture qu'on attachoit son épée, ses clefs, sa bourse, son couteau: ainsi en abandonnant sa ceinture, on faisoit entendre qu'on se dépouilloit de tout en faveur du cessionnaire. C'étoit encore pour marquer qu'on ne se réservoit rien que certains sceaux représentoient le donateur presque nud: chaque signe du don étoit toujours relatif aux bornes ou à l'étendue que le donateur lui avoit prescrite. Pasquier, pag. 377. Ann. Bened. tom. 4 & 5, pag. 325, 454 & 459, &c. Ducange, au mot Investiture.
[722] Marculph. L. 1, Form. 4, 7 & 12, Manu nostrâ decrevimus roborare, &c.
[723] Capitul. de Dagobert en 630, Sect. 23, no5, Sect. 28, no1, 2, 3 & 4.
[724] Capitul. Caroli Calvi, ann. 877, art. 17.
[725] Lex Alleman. tom. 4, tit. 28. Nouveau Traité de Diplom. tom. 4, 2e part. Sect. 5, c. 3.
SECTION 250.
Et nota, que partition per agreement per enter parceners, poit estre fait per la ley enter eux auxy bien per parol sans fait, come per fait.
SECTION 250.—TRADUCTION.
Il est d'observation que les parcenieres peuvent légalement faire des lots entr'elles de parole.
SECTION 251.
Item, si deux meases descendont a deux Parceners, & lun mease vault per an 20 s. lauter forsque 10 s. per an, en cest cas partition poit estre fait enter eux en tiel forme, cest ascavoir que un parcener avera lun mease, & que lauter parcener avera lauter mease, & celuy que avera le mease que est de value de 20 s. & ses heires, payeront un annual rent de 5 s. issuant hors de mesme le mease a lauter parcener, & a ses heires a touts jours, pur ceo que chescun de eux avoit owelty en value.
SECTION 251.—TRADUCTION.
S'il y a dans une succession deux masures, l'une de 20 s. l'autre de 10 s. & s'il n'y a que deux parcenieres, en ce cas on peut donner à chacune d'elles une de ces masures, en chargeant la plus considérable d'une rente annuelle de 5 s. envers celle à qui la masure qui n'est que de 10 s. écherra, parce que les lots doivent être égaux en valeur.
SECTION 252.
Et tiel partition fait per parol est assis bone, & mesme le parcener que avera le rent & ses heires, purront distreiner de common droit, (a) pur le rent en le dit mease de le value de 20 s. si le rent de 5 s. soit aderere en ascun temps en quecunque mains que mesme le mease deviendra, coment que ne fuit unques ascun escripture de ceo fait enter eux de tiel rent.
SECTION 252.—TRADUCTION.
Cette sorte de partage, quoique fait verbalement, est valable, & celui à qui la rente écheoit a le droit de distreiner ou de saisir le fonds de l'autre pour les arrérages de cette rente, quand même ce fonds passeront en d'autres mains.
REMARQUE.
(a) Purront distreiner de commun droit.
La raison de cette maxime se tire de ce que si la rente étoit refusée, le demandeur pouvoit obtenir un Bref de mort d'ancêtres, & demander partage de la terre, en prouvant qu'elle provenoit de ses ascendans. Or, il n'y avoit plus d'autre moyen, en ce cas, pour le faire évincer de sa prétention, qu'en lui établissant que cette terre ne lui devoit qu'une rente; mais en faisant cette preuve, on faisoit connoître que cette rente tenoit lieu du fonds, & conséquemment la restitution de ce fonds, faute de payement, devenoit incontestable. Cette faculté, qu'on avoit anciennement d'obliger un possesseur à donner une part au fonds dont il jouissoit, à celui qui lui prouvoit que ce fonds avoit fait partie de ceux de ses peres, a donné lieu à cette disposition de la Coutume Réformée de Normandie, qu'il n'y a point de prescription entre cohéritiers, tant qu'il ne paroît point qu'il y ait eu de partages.[726]
[726] Coutume Réformée, Art. 529.
SECTION 253.
Et mesme l' maner est, de touts maners de terres & tenements, &c. lou tiel rent est reserve a un, ou a divers parceners sur tiel partition, &c. Mes tiel rent nest pas rent service, mes rent charge de common droit ewe & reserve pur egaltie de partition.
SECTION 253.—TRADUCTION.
Il en faut dire autant de toutes terres ou tenemens affectés à des rentes créées pour rendre des partages égaux; ces sortes de rentes ne sont cependant pas des Rentes de service, mais des Rentes-charges; leur privilége vient de ce qu'elles tiennent lieu d'une portion de fonds.
SECTION 254.
Et nota, que nulles sont appelles parceners per le common ley, mes females, ou les heires de females que veignont a terres & tenements per descent. Car si soers purchase terres ou tenements, de ceo ils sont appelles joyntenants, (a) & nemy parceners.
SECTION 254.—TRADUCTION.
Nota. Qu'il n'y a que les filles & leurs enfans, lorsqu'ils succedent au droit de leurs meres, qui soient appellées parcenieres, suivant la commune Loi; car si des sœurs acquierent ensemble des terres ou tenemens, elles ne sont point parcenieres, mais jointenantes.
REMARQUE.
(a) Joyntenants.
Voyez Section 277, & suivantes, ce que l'on entend par jointenants.
SECTION 255.
Item, si deux parceners de terre en fee simple, font partition enter eux, & la part de un vault pluis que le part de lauter, si els fueront al temps de la partition de pleine age, scavoir de 21 ans, donques la partition, touts dits demurrera, & ne serra, unques defeat. Mes si les tenements (dont els font partition) soyent a eux en fee taile, & le part que lun ad est melieux en annual value, que est la part le lauter, coment que els sont concludes durant lour vies a defeater la partition, uncore si le parcener que ad le meinder part en value ad issue & devy, lissue poit disagreer a la partition, & enter & occupier en common lauter part que fuit allotte a sa Aunt, & issint lauter poit enter & occupier en common lauter part allotte a sa soer, &c. sicome nul partition ust este fait.
SECTION 255.—TRADUCTION.
Item, si deux parcenieres majeures de 21 ans font des lots entr'elles de terres tenues en fief simple, quoique la part de l'une soit plus forte que celle de l'autre, le partage ne peut cependant être annullé; mais si les tenemens partagés étant en fief conditionnel le lot de l'une est d'un revenu annuel plus fort que le revenu de l'autre lot, dans le cas où après qu'elles seroient convenues de changer ces lots, l'une d'elles décéderoit sans avoir exécuté cette convention, son héritier pourroit forcer sa tante de s'y conformer, & d'occuper en commun avec lui les fonds compris dans les deux lots.
SECTION 256.
Item, si deux parceners de tenements en fee preigne barons, & els & lour barons font partition enter eux, si la part lun est meinder en annual value que la part lauter, durant les vies lour barons, la partition estoyera en sa force. Mes coment que il estoyera durant les vies les barons, uncore apres la mort le baron, celuy feme que ad le meinder part poit enter en le part sa soer come est avantdit, & defeatera la partition.
SECTION 256.—TRADUCTION.
Si deux parcenieres de terres en fief se marient, le partage fait par leurs époux étant inégal, elles peuvent le rétracter après le décès de leurs maris.
SECTION 257.
Mes si l' partition fait perenter les barons suit tiel, que chescun part al temps dallotment fait, fuit de egal annual value, donque il ne poit apres estre defeat en tielx cases. (a)
SECTION 257.—TRADUCTION.
Si cependant les lots faits par les époux sont égaux en revenu annuel, ils doivent subsister.
ANCIEN COUTUMIER.
L'en doibt savoir que l'homme ENCOMBRE[727] le mariage de sa femme, quant il fait en quelque maniere que ce soit qu'elle en est dessaisie; mesmement si elle le vendoit ou forjuroit, s'il n'est gagé vers elle par la Loi de Bataille ou par recognoissant. Car se concorde en étoit faite par son mary, la femme ne seroit pas tenue à la garder; car dès ce que la femme est en la poste[728] de son mary, il peut faire à sa volonté d'elle & de ses choses & de son héritage, & ne peut rien vendre tant comme il vive, ne encombrer en derriere de lui qu'il ne puisse rappeller; mais elle ne peut rappeller ce qu'il fait, ne estre ouye tant qu'il vive en derriere de lui. Il y a un cas en quoy femme doibt estre ouye en derriere de son mary, si come se son mary la méhaigne, ou luy creve les yeux, ou luy brise les bras, ou il a accoustume de la traiter vilainement, car ainsi ne doibt l'en pas chastier femme. Ch. 100.
[727] Diminue, aliene ou détériore les biens dotaux de la femme.
[728] In potestate.
REMARQUE.
(a) Il ne poit apres estre defeat en tielx cases.
Pour acheter valablement le propre d'une femme, la Loi des Lombards exigeoit le consentement du mari, & l'avis des plus proches parens de cette femme. Si elle déclaroit, en leur présence, qu'elle ne concouroit à l'aliénation que parce qu'elle y étoit forcée par les violences de son mari, l'acquisition qu'on en faisoit étoit nulle.[729] Le mari étoit donc seulement administrateur ou gardien des biens de sa femme, & il n'en pouvoit disposer que pour l'avantage de celle-ci, ou dans une nécessité pressante. Le pouvoir du mari sur la personne de son épouse avoit aussi ses bornes; il ne pouvoit l'exposer au deshonneur, même de son consentement: ce consentement de la part de la femme étoit, en ce cas, puni de mort;[730] & le mari qui l'avoit induite à l'accorder, payoit à ses parens la composition qu'il leur auroit due s'il lui eût ôté la vie. Ces maximes Françoises paroissent avoir été copiées par les Rédacteurs des anciennes Coutumes d'Angleterre & de Normandie; les biens propres des femmes ne peuvent, suivant ces Coutumes, être aliénés par leurs époux sans leur approbation & celle de leurs héritiers, à moins que le mari lui-même n'ait des propres suffisans pour remplacer[731] la valeur de l'aliénation. La vente subsiste cependant tant que le mari vit avec sa femme; & ce n'est qu'après le décès du mari que le droit de révoquer ses actes peut être exercé par son épouse & ses successeurs.[732] D'après ces principes, Littleton considere le partage fait par un mari des biens échus à sa femme par succession, quand il est inégal, comme une sorte d'aliénation; & ceci est d'autant plus raisonnable, que sous le prétexte de division de biens, le mari auroit pu, de concert avec les cohéritiers de son épouse, ou au moyen d'une certaine somme, leur céder une portion de la propriété qui auroit appartenue à sa femme. Il falloit donc que les actes du mari, relatifs à la régie des biens de sa femme, fussent au-dessus de tout soupçon pour être irrévocables. Comme les hommes ne pouvoient obliger leurs épouses à exécuter les obligations qu'ils avoient contractées pour elles, les femmes, réciproquement, ne pouvoient par leur fait engager les biens de leurs époux. Si une femme commettoit quelque crime, elle se défendoit sans le consentement de son mari, pourvu qu'elle trouvât des cautions; & quand elle succomboit, celui-ci ne pouvoit être obligé à payer pour elle au-delà de la valeur de quatre deniers. Il y a plus: pour empêcher la récidive, il étoit tenu de la châtier comme un jeune enfant, tenetur, sine consilio viri sui facientem, castigare quasi puerum infra ætatem.[733] Ce devoir de corriger sa femme étoit si essentiel, qu'en certaines circonstances le mari ne pouvoit se garantir d'être solidairement condamné avec elle, qu'autant qu'il s'en étoit fidèlement acquité. Si præsumitur quod vir sit fidelis & quod eam sæpius castigabat in quantum potuit, non respondebit pro eâ. Cette correction n'étoit cependant pas illimitée; la femme qui y étoit exposée, parce qu'elle refusoit d'obéir à son mari en quelques mauvaises actions,[734] pouvoit se plaindre en Justice; ou si ses parens soupçonnoient le mari de l'avoir fait périr par ses maltraitemens, ils avoient le droit de l'accuser; mais les preuves, dans ces deux cas, dévoient être bien claires. In hoc exaudiri non debet actor, nisi notorium fuerit quod vir ejus interfecerit eam, vel plagam ei dederit de quâ mortua fuit. Les Loix d'Ecosse en donnent cette raison, qu'un honnête-homme qui avoit une femme fort méchante lui ayant un jour donné un léger soufflet, mû de zèle pour sa conversion, bóno zelo eam castigando; cette femme fiere & peu docile conçut, dès ce moment, une si grande haine pour son époux, qu'elle ne voulut plus boire ni manger, & se fit ainsi mourir. Le mari ayant été appellé en Justice comme homicide de sa femme, auroit subi le dernier supplice, si la douceur de la correction qu'il avoit exercée envers elle, & la malignité de cette derniere à refuser toute espece d'alimens pour exposer son mari à une peine capitale, n'eussent pas été également prouvées. Il n'y a point à craindre que les femmes d'à présent sacrifient ainsi leur vie pour se venger de leurs époux. Leurs mœurs sont naturellement bonnes, toutes leurs passions sont calmes, peu actives, peu raffinées; & graces, sans doute, au changement de notre climat; au lieu des corrections dont nos anciennes Loix supposoient la nécessité, la moindre police,[735] selon le célebre Auteur de l'Esprit des Loix, suffit maintenant pour les conduire.
[729] Leg. Long. tit. 17.
[730] Ibid, tit. 101.
[731] Sken. Annot. in Reg. Maj. L. 2, c. 29. Glanville, L. 6, c. 13.
[732] Quoniam attachiam. c. 20.
[733] Sken. Leg. Burg. c. 131.
[734] Il seroit sans doute bien étonnant que la Loi qui avoit défendu, sous les plus grandes peines, aux femmes de souffrir leur propre deshonneur, même du consentement de leurs maris, eût en même-temps, en faveur des Seigneurs, établi un droit aussi contraire à l'honneur que celui que Skénée a cru appercevoir sous le nom de Marcheta mulierum. Mark, dit cet Auteur, equum significat, hinc deducta metaphora ab equitando; marcheta mulieris dicitur virginalis pudicitiæ prima violatio & delibatio. Aussi Skénée s'est-il trompé à cet égard. Le ch. 31 du Livre 4 de la Loi Reg. Majest. fixe seulement la composition des femmes & filles qui commettent quelque crime, & n'offre rien qui caractérise un droit seigneurial, aussi infame que celui dont Skénée attribue l'invention à Ævenus.
[735] Espr. des Loix, tom. 2, L. 16, c. 11, pag. 113.
SECTION 258.
Item, si deux parceners sont, & le puisne esteant deins lage de 21 ans, & partition est fait enter eux, issint que la purparty que est allot al puisne est de meindre value que la purparty lauter, en cest case le puisne durant l' temps de son nonage, & auxy quaunt el vient a pleine age, (a) scavoir, de 21 ans, poit enter en la purparty a sa soer allot & defeatera la partition. Mes bien soy gard tiel parcener quant el vient a sa plein age, que el ne preign a son use demesne touts les profits des terres ou tenements que a luy fuerent allots. Car donques el soy agreea a le partition a tiel age, en quel case la partition estoyera & demurra en sa force: Mes paraventure les profits de la moitie el poit prender, relinquisant les profits de lauter moitie a sa soer.
SECTION 258.—TRADUCTION.
Quand de deux parcenieres l'une n'est point majeure de 21 ans, le lot qui échoit à la plus jeune étant inférieur en revenu à l'autre lot, celle-ci peut demander un nouveau partage, soit avant, soit après sa majorité; mais elle doit prendre garde de ne pas recevoir les fruits de sa part étant majeure, car elle ratifieroit par-là le partage, & il seroit dès-lors irrévocable. Ce ne seroit cependant pas approuver un partage inégal fait en minorité que de ne toucher que la moitié du revenu de son lot, en laissant l'autre moitié à sa cohéritiere.
REMARQUE.
(a) Pleine age.
Il y avoit deux sortes de majorités, le plein age à vingt-un ans, & le meindre age à quatorze ans. A quatorze ans un mineur pouvoit ester en Jugement, pour reclamer une possession qui lui étoit enlevée; mais il étoit obligé d'attendre son âge parfait pour se faire ajuger irrévocablement la propriété.[736] A quatorze ans on ne pouvoit être témoin, on pouvoit seulement disposer de ses meubles, faire commerce. La majorité de quatorze ans répondoit à notre émancipation: l'émancipé peut disposer, en Normandie, de ses revenus; cependant il ne peut vendre, aliéner, ni donner ses fonds. Le Titre LII de la Loi des Lombards[737] a été la source de cette Jurisprudence.
[736] Glanville, L. 13, c. 12 & 13. Reg. Majest. L. 3, c. 32, no 5. Quoniam attachiam. c. 99.
[737] Addit. ad Leg. Longob. Lutprandi Regis de anno regni ejus 14.
SECTION 259.
Et est ascavoir que quant il est dit, que males ou females sont de pleine age, ceo serra entendue de age de 21 ans, car si devant tiel age, ascun fait ou feoffement, grant, release, confirmation, obligation ou auter scripture soit fait per ascun de eux, &c. ou si ascun deins tiel age, soit Baylife ou receiver a ascun home, &c. tout serve pur nient, & poit estre avoyde. Auxy home devant le dit age, ne serra my jure en un Enquest, &c.
SECTION 259.—TRADUCTION.
Quand on dit que mâles & femelles sont de plein âge, cela s'entend de l'âge de 21 ans; car tous dons, inféodations, ratifications, obligations & autres actes, ou toute acceptation d'Office, comme de Bailli, de Receveur faite avant cet âge, peuvent être annullés; on ne peut même avant 21 ans être reçu à prêter serment dans une Enquête.
SECTION 260.
Item, si terres ou tenements soyent dones a un home en le taile, quel ad tant des terres en fee simple, & ad issue deux files, & devie, & ses deux files font partition enter eux, issint que la terre en fee simple est allot a le file puisne en allowance des terres & tenements tailes allottes a le file eigne, si apres tiel partition fait, la puisne file alienast sa terre en fee simple a un auter en fee, & ad issue fits ou file & devie, lissue poit bien entrer en les tenements tailes, & eux tener & occupier en purparty ovesque son Aunt. Et ceo est pur deux causes: un est, pur ceo que lissue ne poit aver ascun remedie de la terre alien per sa mere, per ceo que la terre fuit a luy en fee simple, & pur tant que il est un de les heires en taile, & nad my ascun recompence de ceo que a luy affiert de les tenements tailes, il est reason que el eit sa purparty de les tenements tailes, & nosmement quant tiel partition ne fait ascun discontinuance.
Mes le contrary est tenus M. 10. H. 6, scavoir, que le heire ne poit enter sur l' parcener que ad la terre taile, mes est mis a Formedon. (a)
SECTION 260.—TRADUCTION.
Lorsqu'un donataire de terres ou tenemens, à titre de fief conditionnel, possede propriétairement une égale quantité de terres en fief simple, & qu'en mourant il laisse deux filles, si en faisant des lots entr'elles, les terres en fief simple échéent à la cadette, & celles tenues en fief conditionnel composent le lot de l'aînée, la cadette peut aliéner ses fonds; mais les enfans qui lui survivent après cette aliénation pourront jouir en commun des terres tenues en fief conditionnel, & possédées par leur tante. Ceci est fondé sur deux motifs: le premier, parce que les enfans de celle qui a vendu ne peuvent rétracter cette vente, attendu que leur mere étoit propriétaire incommutable du fief simple, au lieu qu'elle n'a pu les priver de la part qu'elle avoit aux fiefs, ou plutôt aux terres tenues en fief tail ou conditionnel, & il leur en est dû récompense, sur-tout quand le fonds subsiste en la main d'un héritier direct sans avoir changé de ligne.
Cette Jurisprudence a cependant été réformée sous Henri VI par le Statut de la 10e année de son regne. L'héritier, dans l'espece dont on vient de parler, n'a plus, depuis ce Statut, contre sa tante que l'action de Forme-don.
REMARQUE.
(a) Formedon.
Breve de formâ donationis; c'étoit le nom du Bref qui s'obtenoit pour reclamer la part que l'on avoit en un fonds cédé ou donné sous condition. Britton, ch. 119, fol. 270, verso.
SECTION 261.
Un auter cause est, pur ceo que il serra rete la folly del eign soer que il voit suffer ou agree a tiel partition, ou el puissoit aver si el voile, la moitie de la terre en fee simple, & son moitie des tenements en le taile, pur sa purparty, & issint estre sur sans dammage.
SECTION 261.—TRADUCTION.
Une autre raison de la maxime contenue en la Section précédente se tire de ce que la sœur aînée fait une faute lorsqu'elle consent à un partage tel que celui dont parle cette même Section; car il ne tient qu'à elle, pour se mettre à l'abri de toute inquiétude, de prendre moitié de la terre en fief simple, & moitié de celle à fief conditionnel.
SECTION 262.
Auxy si home soit seise en fee dun carve de terre per just title, & disseisist un enfant deins age dun auter carve, & ad issue deux files, & morust seisie dambideux carves, lenfant adonques esteant deins age, & les files entront & font partition, issint que lun carve est allotte al pur party lun, come per case al puisne en allowance dauter carve que est alotte a le purparty de lauter, si puis lenfant enter en le carve dont il fuit disseisist sur l' possession la parcener que ad mesme le carve, donques mesme le parcener poit entrer en lauter carve que sa soer ad, & tener en parcenary ovesque luy: Mes si le puisne aliena mesme la carve a un auter en fee simple devant lentrie lenfant, & puis lenfant enter sur le possession lalienee, donque el ne poit enter en lauter carve, pur ceo que per son alienation el ad luy tout ousterment dismisse daver ascun part de les tenements come parcener. Mes si le puisne devant lentrie lenfant fait de ceo un lease pur terme dans, ou pur terme de vie ou en fee tayle, savant la reversion a luy, & puis lenfant enter, la pereventure auterment est, pur ceo que el ne soy dismisse de tout ceo que fuit en luy, mes ad reserve a luy le reversion & le fee, &c.
SECTION 262.—TRADUCTION.
Quand un homme possesseur, à titre de fief, de quarante arpens de terres, dessaisit un mineur de pareille quantité de terres tenues aussi en fief, & ensuite meurt en laissant deux filles pour héritieres, que ces deux filles partagent ces terres de maniere que l'aînée ait celles dont leur pere étoit propriétaire, & la cadette les fonds dont il s'étoit fait envoyer en possession. Si le mineur réussit ensuite à prouver que cet envoi en possession a été injustement fait, & recouvre sa terre; la cadette, à qui elle étoit échue, pourra demander à sa sœur aînée moitié de la terre qui lui reste. Mais dans le cas où la puînée auroit aliéné les fonds avant que le mineur les eût reclamés, & en eût obtenu la restitution, elle ne pourra demander aucune récompense du recours que son acquereur dépossédé par le mineur pourroit exercer contr'elle, parce que par la vente elle est réputée avoir renoncé à tout droit sur le lot échu à son aînée.
Il en seroit autrement si la cadette avoit, au lieu de vendre, donné seulement à vie ou pour terme d'ans ou à condition, les fonds, revendiqués par le mineur; cette sorte d'aliénation conserve toujours, en effet, à celui qui l'a faite un droit de reversion, & ne le dépouille pas absolument de sa propriété.
SECTION 263.
Item, si soient trois ou quater parceners, &c. que font partition enter eux, si le part dun parcener soit defeat per tiel loyal entrie, el poit enter & occupier lauter terres ovesque touts les auters parceners, & eux compellez de fair novel partition de lauters terres, enter eux, &c.
SECTION 263.—TRADUCTION.
Si trois ou quatre parcenieres font partage entr'elles, l'une étant ensuite valablement dépossédée, elle peut contraindre les autres de faire de nouveaux partages.
SECTION 264.
Item, si sont deux parceners, & lun prent baron, & le baron & sa feme ont issue enter eux, & la feme devy, & le baron soy tient eins en le moity come tenant per le curtesie, en ceo cas le parcener que survesquist, & le tenant per le curtesie bien poient faire partition enter eux, &c. Et si le tenant per le curtesie ne voit agreer al partition destre fait, donques le parcener que survesquist poit aver envers le tenant per le curtesie, briefe De partitione facienda, &c. & luy compeller de faire partition. Mes si le tenant per le curtesie voile aver partition enter eux destre fait, & le parcener que survesquist ne voit ceo aver, donque le tenant per le curtesie navera ascun remedy pur aver partition, &c. Car il ne poit aver briefe De partitione facienda, pur ceo que il nest parcener, (a) car tiel briefe gist pur parceners tantsolement. Et issint poyes veyer que briefe de partitione facienda gist envers tenant per le curtesie, & uncore il mesme ne poit aver tiel briefe.
SECTION 264.—TRADUCTION.
Si de deux parcenieres l'une prend un mari, en a des enfans, & décede; son mari, jouissant à droit de viduité de ses biens, peut faire des lots avec celle qui devoit partager avec sa femme; il peut même être contraint de procéder au partage par un Bref De partitione faciendâ; mais il n'a pas la faculté d'obtenir ce Bref, car il n'est établi que pour ceux qui sont coparceniers.
REMARQUE.
(a) Il nest parcener, &c.
Le mari, dans l'espece proposée, ne peut demander la division des fonds, parce qu'il n'est point propriétaire; il n'a droit, comme usufruitier, que de jouir des revenus en commun avec la sœur ou cohéritiere de sa femme.
CHAPITRE II. DES PARCENIERS suivant la Coutume.
SECTION 265.
Parceners per le custome sont lou home seisie en fee simple, ou en fee taile de terres ou tenements que sont de tenure appel Gavelkind deins l' County de Kent, & ad issue divers fits, & devie, tielx terres ou tenements discenderont a touts les fits per le custome & ovelment enheriteront & ferront partition enter eux per le custome, sicome females ferront, & briefe de Partitione facienda gist en ceo cas, sicome enter females, mes il covient en la declaration de faire mention de l' custome. Auxy tiel custome est en auters lieux Dengleterre. Et auxy tiel custome est North Galles, &c. (a)
SECTION 265.—TRADUCTION.
Parceniers suivant la Coutume sont ceux qui sont saisis, en fief simple ou conditionnel, de terres ou tenemens chargés de redevances appellées Gabelles dans la Province de Kent. Leurs enfans mâles partagent également entr'eux ces tenures, & ils ont, comme les filles ont dans les autres lieux, droit de se pourvoir pour obtenir partage par la voie du Bref de Partitione faciendâ. Mais afin que ce partage égal ait lieu entre garçons, il faut que l'inféodation fasse mention de la Coutume du lieu où les fonds sont assis: car cette Coutume est non-seulement établie dans le Comté de Kent, mais encore dans la Principauté de Galles.
REMARQUE.
(a) North Galles, &c.
Aliter usitatum est in Walliâ quam in Anglià quoad successionem hæreditatis, & quod hæreditas partibilis est inter hæredes masculos à tempore cujus non extitit memoria, partibilis extitit. Dominus Rex non vult quod consuetudo illa abrogetur. Statut. VValliæ anno 12. Edovvard II.
SECTION 266 & 267.
Item, il y ad auter partition quel est dauter nature & dauter form que ascuns des partitions avantdits sons. Sicome home seisie de certain terres en fee simple, ad issue deux files & leigne est mary, & le piere dona parcel de ses terres a le baron ove sa file en frankmariage, & morust seisin de le remnant, le quel remnant est de pluis greinder value per an, que sont les terres dones en frankmariage;
En cel case le baron ne le feme avera reins pur lour purpartie de le dit remnant, sinon que ils voile mitter lour terres dones en frankmariage en Hotchpot, (a) ovesque le remnant de la terre ovesque sa soer. Et si issint ils ne voilent fayre, (b) donques puisne poet tener & occupier mesme le remnande, & prendra a luy les profits tantsolement. Et il semble que cest parol (Hotchpot) est en English, A Pudding, car en tiel Pudding nest communement mies un chose tantsolement, mes un chose ovesques auters choses ensemble. Et pur ceo il covient en tiel case de mitter les terres dones en frankmariage ovesque les auters terres en Hotchpot, si le baron & sa feme voilent aver ascun part en les auters terres.
SECTION 266 & 267.—TRADUCTION.
Il y a d'autres especes de partages. Par exemple, lorsqu'un propriétaire de terres en fief simple a deux filles, & qu'en mariant l'aînée il lui a donné partie de ses terres en Franc-Mariage: si cet homme décede saisi du surplus de sa terre, dont la valeur est plus forte que celle des terres données en Franc-Mariage;
Alors ni le mari de la fille aînée ni elle-même ne peuvent demander sur ce surplus aucune part, à moins qu'ils ne rapportent leur Franc-Mariage, & ne le mettent en Hotchpot avec ce qui reste de la terre au suppôt de la succession du défunt: car s'ils se refusent à ce rapport, la cadette aura les fonds laissés par son pere à son seul profit. Et il semble que ce terme, Hotchpot en Anglois, dérive du mot Pudding, qui signifie l'assemblage de divers ingrédiens qui entrent dans la composition d'un mets très-connu.
REMARQUES.
(a) Hotchpot, veut dire un salmiguondis; Pudding, du Boudin.
(b) Et si issint ils ne voilent fayre.
Il étoit libre à la fille de s'en tenir à ce que son pere lui avoit donné en la mariant. Cette Jurisprudence a encore lieu en Normandie, quand le don promis à la fille est totalement acquitté; ceci a eu pour principe d'assurer l'état des maris. S'ils étoient obligés de rapporter, il arriveroit quelquefois qu'après avoir compté sur une fortune honnête de la part de leurs femmes, ils s'en trouveroient dépouillés après le décès de leurs beaux-peres. Mais pour être dispensée de rapporter, la fille mariée n'étoit tenue qu'à la simple déclaration judiciaire qu'elle n'entendoit mettre en partage son mariage, nec vult maritagium in partem ponere:[738] la renonciation n'étoit usitée que dans le cas où, en ne retenant rien, ni ne prétendant rien de la succession d'un parent, pour n'être pas exposé à payer ses dettes, on se retranchoit de sa famille: ce qui se faisoit en rompant sur sa tête quatre fust ou baguettes dont l'on jettoit les morceaux en présence du Juge en l'Audience, en disant, que l'on n'entendoit plus être exposé à poursuivre la vengeance des affronts que cette famille pourroit éprouver, ni succéder à aucuns des membres dont elle seroit composée.[739]
[738] Coke, pag. 176.
[739] Lex Sal. tit. 63, les parens étoient de droit caution les uns des autres. Willelm. Wast Glossar. verbo plegium.
SECTION 268.
Et cest terme (Hotchpot) nest forsque un terme similitudinarie, & est a tant adire, cestascavoir, de mitter les terres en frankmariage, & les auters terres en fee simple ensemble, & ceo est a tiel entent de conuster le value de touts les terres, savoir, de les terres dones en frankmariage, & de le remnant que ne fueront dones, & donque partition serra fait en le form que ensuist. Sicome, mittomus que home soit seisie de l' 30 acres de terre en fee simple, chescun acre de value de 12 deniers per an, & que il ad issue deux files, & lun est covert de baron, & le pier dona 10 acres de les 30 acres a le baron, ove sa file en frankmarriage, & morust seisie de remnant donques lauter soer entra en le remnant, scavoir en les 20 acres, & eux occupier, a son use demesn, si non que le baron & sa feme voil mitter les 10 acres dones en frankmarriage, ove les 20 acres en Hotchpot, cestascavoir, ensemble, & donque quant le value de chescun acre est conus, cest ascavoir que chescun acre vault per an, & est assesse, ou enter eux agree, que chescun acre vault per an 12 deniers, donques le partition serra fait en tiel forme, cestascavoir le baron & sa feme averont oustre les 10 acres dones a eux en frankmarriage 5 acres en severaltie de les 20 acres, & lauter soer avera le remnant, scavoir 15 acres de les 20 acres pur sa purpartie, issint que accomptant les 10 acres que le baron & sa feme ount per le done en frankmarriage, & les auters 5 acres de les 20 acres, le baron & sa feme ont autant en annual value, que lauter soer ad.
SECTION 268.—TRADUCTION.
Ce terme Hotchpot est une expression symbolique, qui ne signifie rien autre chose, sinon que l'on ne fait qu'une seule masse des terres données en Franc-Mariage, & de celles restées en fief simple au défunt, après cependant avoir fait faire estimation des unes & des autres, pour les partager en la forme qui suit. En supposant un homme possesseur de trente acres de terres en fief simple, chaque acre valant douze deniers par an: si de deux filles qu'il laisse en mourant, la fille aînée qui aura eu en Franc-Mariage dix acres, & qui peut, si elle le veut, laisser en propriété à sa sœur les vingt acres restantes, exige des lots, & joint ses dix acres aux vingt, ceci s'appelle mettre les dix acres en Hotchpot; & en ce cas la valeur de chaque acre étant duement fixée, de gré ou de rigueur, à douze deniers, la fille mariée prendra cinq acres sur les vingt de la succession de son pere, ce qui avec les dix qu'elle aura en Franc-Mariage, formera quinze acres, & conséquemment une part égale à celle qui restera à sa sœur.
SECTION 269.
Et issint tout soits sur tiel partition, les terres dones en frankmarriage demurgent a les donees & a lour heires solonque le forme de le done. Car si lauter parcener avoit riens de ceo que est done en frankmarriage, de ceo ensueroit inconviens, & chose encounter raeson, que la ley ne voit suffer. Et la cause pur que les terres dones en frankmarriage serront mis en Hotchpot, est ceo, quant home done terres ou tenements en frankmarriage ove sa file, ou ove auter cosin, il est entendus per la ley que tiel done fait per tiel parol (frankmarriage) est un avancement, & pur avancement de sa file, ou de son auter cosin, & nosmement quant le donor & ses heyres naveront ascun rent ne service de eux, sinon que soit fealty, tanque le quart degree (a) soit passe, &c. Et pur tiel cause la ley est que el avera riens de les auters terres ou tenements discendus a lauter parcener, &c. sinon que el voile mitter les terres dones en frankmariage en Hotchpot, come est dit. Et si il ne voille mitter les terres dones en frankmariage en Hotchpot, donque el navera riens del remnant, pur ceo que serra entendu pur la ley que el est sufficientment avance, a que avancement el soy agree & luy tient content.
SECTION 269.—TRADUCTION.
Toutes les fois qu'une donataire en Franc-Mariage fait des lots, elle conserve ce qui lui a été donné; parce que si la copartageante lui en retiroit partie, il en naîtroit des inconvéniens que la Loi a voulu prévenir.
La donataire en Franc-Mariage, & ses hoirs, jusqu'au quatrieme dégré, sont exempts de tous services ou rente envers le donateur, & ne lui doivent que la foi. D'où il suit qu'elle doit être libre de jouir après la mort du donateur de cet avantage; mais en le conservant elle ne doit avoir rien de plus que ce qui lui a été promis lorsqu'on le lui a accordé: par cette raison elle est donc forcée, quand elle veut partager de, mettre les fonds dont elle a été avancée en Hotchpot; c'est-à-dire, de tenir compte de leur valeur.
REMARQUE.
(a) Le quart degree, &c.
Voyez la réponse de Saint Grégoire au Moine Saint Augustin sur les dégrés dans lesquels les Anglois pouvoient contracter mariage. Il le permet entre le troisieme & quatrieme dégré de consanguinité.[740] Voyez aussi Glanville, L. 7, ch. 18.
[740] Epist. divi Greg.
SECTION 270.
Mesme la ley est parenter les heires de les donees en frankmariage, & les auters parceners, &c. si les donees en frankmariage deviont devant lour auncester, ou devant tiel partition, &c. quant a mitter en Hotchpot, &c.
SECTION 270.—TRADUCTION.
La même Loi a lieu entre les héritiers des donataires en Franc-Mariage, & les autres parceniers, quant à la maniere de mettre en Hotchpot les fonds donnés en Franc-Mariage, pourvu que ces donataires décedent avant leur ancêtre ou avant le partage, &c.
SECTION 271.
Et nota, que dones en frankmariage fueront per le common ley devant le Statute de Westminster second, & tout temps puis ad este use & continue, &c.
SECTION 271.—TRADUCTION.
Nota. Que les dons en Franc-Mariage étoient de commune Loi avant le deuxieme Statut de Westminster, & que depuis l'usage en a été conservé sans altération.
SECTION 272.
Item, si tiel mitter en Hotchpot, &c. est lou les auters terres ou tenements que ne fueront dones en frankmariage descendont de les donors frankmariage tantsolement, car si les terres descenderont a les files per le pier le donor, ou per le mere le donor, ou per le frere l' donor, ou auter ancestor, & nemy per le donor, &c. la auterment est, car en tiel cas el a quel tiel done en frankmariage est fait avera sa part sicome nul tiel done en frankmarriage ust este fait, pur ceo que el ne fuit avance per eux, &c. eins per un auter, &c.
SECTION 272.—TRADUCTION.
La mise en Hotchpot n'a lieu que lorsque les autres fonds qui ne sont pas donnés en Franc-Mariage font partie de la succession des donateurs en Franc-Mariage; car si ces fonds descendent aux fils du donateur par le pere ou la mere, ou le frere ou autre parent de ce donateur en Franc-Mariage, & non directement du donateur lui-même, le donataire en Franc-Mariage, outre son don, prendra sa part sur lesdits fonds, parce qu'il ne tient rien en ce cas du décédé.
SECTION 273.
Item, si home seisie de 30 acres de terre chescun acre de ovel annual value eiant issue deux files come est avantdit, & dona 15 acres de ceo a le baron ove sa file en frankmariage, & morust seisie de les auters 15 acres, en cest case lauter soer avera les 15 acres issint descendus a luy sole, & le baron & feme ne mitteront en tiel cas les 15 acres a eux donnes en frankmarriage en Hotchpot, pur ceo que les tenements dones en frankmarriage sont de auxy grand & de bone annual value come les auters terres discendus, &c. Car si les terres dones en frankmarriage sont de tant egal annual value, que le remnant sont, ou de pluis value, en vaine & a nul entent (a) tielx tenements dones en frankmariage serra mis en Hotchpot, & pur ceo que el ne poit reins aver de les auters terres discendus, &c. car si el avoit ascun parcel de les tenements discendus, donques el avera pluis de annual value que sa soer, &c. que la ley ne voit, &c. Et sicome est parley en les cases avantdits de deux files ou de deux parceners en mesme le manner est en semblabl' cas lou sont plusors soers ou plusors parceners, solonque ceo que l' case & matter l' est, &c.
SECTION 273.—TRADUCTION.
Si un homme saisi de trente acres de terre, chaque acre étant d'un égal revenu, laisse deux filles, celle qu'il aura mariée, & à qui il aura donné en Franc-Mariage quinze acres, conservera ses quinze acres, & les quinze autres resteront à sa sœur.
Il en seroit de même si ces terres données en Franc-Mariage étoient d'un revenu supérieur à celui des terres existantes au suppôt de la succession du pere; car alors si la fille mariée avoit droit de prendre part sur ces terres, outre son Franc-Mariage qui doit lui rester, elle auroit plus de revenu que sa sœur. On doit étendre cette maxime à tous les cas semblables, où deux parcenieres peuvent se trouver.
REMARQUE.
(a) En vaine & a nul entent.
Pour entendre cet article, il faut observer que la fille étoit libre de conserver son franc-mariage, & que lorsqu'elle le mettoit à hotchpot, ce n'étoit pas pour le partager, mais pour obtenir un supplément au revenu de son franc-mariage, proportionné à celui des terres restées au suppôt de la succession: il étoit donc inutile de rapporter le franc-mariage quand il excédoit la valeur des fonds restans, puisque le donataire du franc-mariage pouvoit le garder en entier, sans en devoir à sa sœur aucune indemnité. Le don en franc-mariage étoit une inféodation en Fief simple; & il étoit de maxime que les dons en Fiefs simples n'étoient sujets à rapport qu'autant que les donataires y consentoient.[741]
[741] Britton, c. 72: Et si pere ou mere ou ambideux doynent à un des parceners en mariage tout lour héritage, en tiel cas ne chiera mi le héritage en devision.
SECTION 274.
Et est ascavoir, que terres ou tenements dones en frankmariage ne serra mise en Hotchpot, forsque ou terres descende en fee simple, car de terres discendus en fee tail (a) partition serra fait, sicome nul tiel done en frankmariage ust este fait.
SECTION 274.—TRADUCTION.
Toutes terres données en Franc-Mariage ne doivent pas être mises en Hotchpot, il n'y a que celles qui sont échues par succession en fief simple qui soient dans ce cas; car les terres tenues à condition, qui viennent par succession, doivent être partagées comme si on ne les avoit pas données en Franc-Mariage.
REMARQUE.
(a) Car de terres discendus en fee tail, &c.
La raison en est palpable: après la condition de l'inféodation expirée, l'une des Parcenieres, ou ses descendans, se seroit trouvée sans part en la succession de son pere, tandis que sa copartageante & ses descendans auroient possédé les Fiefs simples à perpétuité. D'ailleurs, le Fief conditionnel devoit être garanti par tous les cohéritiers; & cette garantie étant solidaire, la jouissance du Fief ne pouvoit être au profit d'un seul.
SECTION 275.
Item, nuls terres serra mise en Hotchpot ove auters sinon terres que fueront done en frankmariage tantsolement: Car si ascun feme ad ascuns auters terres ou tenements per ascun auter done en le tayle, el ne unques mittera (a) tiel terre issint done en Hotchpot, mes il avera sa purpaty de le remnant discendus, &c. scavoir, a tant que lauter parcener avera de mesme le remnant.
SECTION 275.—TRADUCTION.
On ne met les terres en Hotchpot que lorsqu'elles sont données en Franc-Mariage; car tout don fait à une femme à condition ou autrement, n'est pas sujet à rapport, & n'empêche pas qu'elle ne partage la succession du donateur, en l'état qu'elle se trouve, sans que son don entre en considération dans le partage.
REMARQUE.
(a) El ne unques mittera, &c.
Depuyr feffement ne tient jamais lieu devision. Car aussi estable volons que tielxs dons de puyr feffement sauns faire mention de mariage, soient tenus en les priviez du saung, come seroit en une estrange persone.[742]
[742] Britton, c. 72, fo 189.
SECTION 276.
Item, un auter partition poet ester fait enter parceners que variast de les partitions avantdits. Sicome y sont trois parceners, & le puisne voet aver partition, & les auters deux ne voillont, mes voilent tener en parcenarie ceo que a eux affiert sans partition, en cest case si un part soit alot en severalty, al puisne soer solonque ceo que el doit aver, donques les auters poient tener le remnant en parcenary, & occupier en common sans partition si els voilent, & tiel partition est assets bone. Et si apres leign, ou le mulnes parceners voyle fayre partition inter eux, pur ceo que ils teignont, ils poient ceo bien faire quant a eux pleist. Mes lou partition serra fait per force de Briefe de Partitione facienda, la auterment est, car la covient que chescun parcener avera sa part en severaltie, &c.
Pluis serra dit des parceners en le Chapter de Joyntenants, & auxy en le Chapter de Tenants in Common.
SECTION 276.—TRADUCTION.
Il y a encore une autre maniere de partager différente de celles dont on vient de parler.
Par exemple, s'il y a trois parcenieres, que la puînée demande des lots, & que les autres les refusent, & veuillent tenir ensemble les fonds sans les partager; en ce cas on peut donner à la puînée son lot en particulier, & les deux aînées tiendront en commun le surplus des fonds, sauf à être fait des lots entr'elles dans la suite, sans y appeller leur sœur. Il n'en seroit pas de même si la puînée avoit demandé sa part en vertu d'un Bref de Partitione faciendâ, car chaque sœur auroit alors son lot séparé. Au reste nous parlerons des Parcenieres avec plus d'étendue dans les deux Chapitres suivans.
CHAPITRE III. DE JOINTENANS.
SECTION 277.
Joyntenants sont, si come home seisie de certaine terres ou tenements, &c. & enfeoffe deux, trois, quater ou plusors, a aver & tener a eux pur term de lour vies, ou a terme dauter vie, per force de quel feoffement ou lease ils sont seisies, tiels sont Joyntenants.
SECTION 277.—TRADUCTION.
On entend par Jointenans deux ou trois personnes, ou plus, auxquelles on a inféodé des terres ou tenemens pour les posséder ou tenir pendant leur vie, ou pendant la vie de quelqu'autre; car en vertu d'une inféodation de cette espece, suivie d'ensaisinement ou de prise de possession, on tient conjointement.
SECTION 278.
Item, si deux ou trois, &c. disseisont un auter dascun terres ou tenements a lour use demesne, donques les disseisours sont joyntenants. Mes sils disseisont un auter al use dun de eux, donques ils ne sont joyntenants, mes celuy a que use le disseisin est fait est sole tenant, & les auters nont riens en le tenancie, mes sont appels coadjutors a le disseisin, &c.
SECTION 278.—TRADUCTION.
Si deux ou trois personnes se font envoyer en possession d'un fonds, elles sont aussi jointenantes; mais si l'envoi en possession n'est qu'au profit de l'une d'elles, quoiqu'elles l'ayent conjointement poursuivi, elles ne sont point jointenantes, on les nomme Coadjutrices en dessaisine.
SECTION 279.
Et nota, que disseisin est properment lou un home entra en ascun terres ou tenements lou son entre nest pas congeable, & ousta celuy que ad franktenement, &c. (a)
SECTION 279.—TRADUCTION.
Nota. Que dessaisine est proprement l'expulsion d'un usufruitier de terres ou tenemens, sur la propriété desquels celui qui l'expulse a un droit incontestable.
REMARQUE.
(a) Frank-tenement.
Je traduis ici franktenement par usufruit: franktenement, dit Britton,[743] est une possession de soil[744] que frankhome tient en fee a luy & a ses heires ou au meins a terme de vie.
[743] C. 32, fo 83, vo.
[744] Soil. Solum, terre.
SECTION 280.
Et est ascavoir que la nature de joyntenancie est, que celuy que survesquist avera solement lentier tenancie solonque tiel estate que il ad, si le joynture soit continue, &c. Sicome si trois joyntenants sont en fee simple, & lun ad issue & devie, uncore ceux que survesquont averont les tenements entier, & lissue navera riens. Et si le 2 joyntenant ad issue & devie, uncore le tierce que survesquist avera les tenements entier, & eux avera a luy & a ses heires a touts jours. Mes auterment est de parceners. Car si trois parceners sont & devant ascun partition fait, lun ad issue, & deve, ceo que a luy affiert discendra a son issu. Et si tiel parcener morust sans issue, donques ceo que a luy affiert discendra a ses coheirs issint que ils averont ceo per discent, & nemy per survivor, come joyntenants averont, &c.
SECTION 280.—TRADUCTION.
L'effet de la jointenancie est que celui qui survit à son coassocié en la tenure ait le tenement entier, pourvu que dans l'inféodation il ait été stipulé que leur tenure ne cessera point par le décès de l'un des tenans. Ainsi que de trois personnes qui tiennent conjointement en fief simple, un ou deux ayant des enfans, décedent, ce n'est point à leurs enfans que leurs parts au fief retournent, mais à leurs jointenans, & le dernier des survivans transmet la propriété de ce fief à ses hoirs; ce qui fait voir la différence qu'il y a entre Jointenans & Parceniers: car si de trois parcenieres l'une ayant des enfans meurt avant le partage, ses enfans succedent à ses droits; & en supposant que la parceniere décédée n'ait pas d'enfans, sa part écheoit à ses coparcenieres par succession, & non par survivance.
SECTION 281.
Et come le survivor tient lieu enter joyntenants, en mesme le maner il tient lieu enter eux queux ont joynt estate ou possession ove auter de chattel real ou personal. Sicome si leas de terres ou tenements soit fait a plusors pur terme des ans, celuy que survesquist de les lessees avera les tenements a luy entier, durant l' terme, per force de mesme le leas. Et si un chival ou un auter chattel personal sont done a plusors, celuy que survesquist avera le chival solement.
SECTION 281.—TRADUCTION.
Comme le survivant des jointenans d'une terre succede à la tenure, de même il succede à la jouissance qu'il avoit conjointement avec un autre de Châtels réels ou personnels. Si donc quelqu'un a abandonné à plusieurs des terres pour en jouir durant un certain nombre d'années, le survivant des cessionnaires aura le revenu de ces terres (revenu qui est un Châtel réel) en entier jusqu'à l'expiration du terme. Il en faut dire autant à l'égard du survivant de plusieurs acheteurs d'un cheval ou d'autres Châtels personnels; car ces sortes de meubles restent toujours au dernier survivant des acheteurs.
SECTION 282.
En mesme le manner est de debts & duties, &c., (a) car si un obligation soit fait a plusors pur un debt, celuy que survesquist avera tout le debt ou dutie. Et issint est dauters Covenants & Contracts, &c.
SECTION 282.—TRADUCTION.
La même maxime doit être practiquée en fait de dettes ou de prêts. Si une obligation est faite au profit de plusieurs, celui des créanciers qui survit aux autres aura l'obligation à son seul bénéfice; on doit dire la même chose de tous autres Contrats ou accords.
REMARQUE.
(a) Duties, &c.
Les anciennes Loix Normandes admettoient la preuve d'une dette, dont il n'y avoit point d'acte écrit, par deux témoins qui avoient vu compter l'argent, ou entendu reconnoître le prêt; mais au-dessus de quarante sols, on ne recevoit que des preuves[745] écrites, ou la reconnoissance judiciaire du débiteur. On ne pouvoit, pour dettes mobiliaires, saisir les fonds, tant que le débiteur avoit des meubles: s'il n'avoit pas d'effets mobiliers suffisans, on l'assignoit en la Cour du Vicomte où le Juge l'avertissoit qu'au défaut de payement en dedans quinze jours, ses terres seroient vendues; ce délai passé, le Vicomte délivroit au créancier partie de ces terres, jusqu'à concurrence du capital exigé, & des frais, dépenses & intérêts. L'acquereur recevoit l'inféodation de ces fonds par une Chartre du Roi, s'ils relevoient de la Couronne. Quand ces fonds relevoient d'un Seigneur particulier, celui ci pouvoit acquitter la dette & reprendre la propriété du fonds, par préférence au créancier.[746]
[745] Sken. in Stat. Alex. 2, c. 28.
[746] Quoniam attach. c. 81.
La simplicité de ces formalités valoit bien, sans doute, la multiplicité de celles observées maintenant dans les Decrets. Les exceptions qu'on pouvoit faire valoir contre la demande du payement d'une obligation pour dette, étoient: 1o. l'absence du débiteur pour pélerinages solemnels. Un pélerinage étoit solemnel, lorsqu'avant le départ on s'étoit présenté à sa Paroisse, & qu'on avoit été conduit par le Clergé, hors de son étendue, avec la croix & l'eau-benite. La deuxieme exception étoit la minorité; car l'en ne doit pas marchander à ceux qui sont en nonage sans plége, & ils ne sont pas tenus à payer les dettes à leurs ancesseurs en Cours laye, devant qu'ils soient venus en âge.[747]
[747] Anc. Cout. c. 90.
SECTION 283.
Item, ascuns joyntenants poient estre que poient aver joynt estate, & estre joyntenants pur term de lour vies, & uncore ils ont severall enheritances. Sicome terres soient dones a deux homes & a les heires de lour deux corps engendres, en cest case les donees ont joynt estates pur terme de lour deux vies, & uncore ils ont severall inheritances, car si un des donees ad issue, & devy, lauter que survesquist aver tout per le survivor pur terme de sa vie, & si celuy que survesquist auxy ad issue & devy, donques l'issue del un avera moitie, & lissue del auter avera lauter moitie de la terre, & ils tiendront la terre enter eux en common, & ne sont pas joyntenants, mes sont tenants en common. Et la cause pur que tielx donees en tiel cas ont joynt estate pur terme de lour vies, est pur ceo que al commencement les terres fueront donees a eux deux, les queux parols sans pluis dire font joynt estate a eux pur terme de lour vies. Car si home voit lesser terre a un auter per fait ou sans fait, nient feasant mention que lestate il averoit, & de ceo fait liverie de seisin, (a) en ceo case le lessee ad estate pur terme de sa vie, & issint entant que les terres fueront dones a eux, ils ont joynt estate pur terme de lour vies: & la cause pur que ils averont several enheritances est ceo, entant que ils ne poient aver per nul possibility un heire enter eux engender, sicome home & feme poient aver, &c. donque la ley voet que lour estate & lour enheritance soit tiel come reason voet, solonque la forme & effect des parols del done, & ceo est a les heires que lun engendra de son corps per ascun de ses femes, & a les heirs que lauter engendra de son corps per ascun de ses femes, &c. Issint il covient per necessitie de reason que ils averont severalx inheritances. Et en tiel cas si lissue dun des donees apres la mort des donees devie issint que il nad ascun issue en vie de son corps engendre, donque le donor ou son heire poit enter en la moity come en son reversion, &c. coment que lauter des donees ad issue en vie, &c. Et la cause est que entant que les inheritances sont several, &c. le reversion de eux en ley est several, &c. & le survivor del issue del auter ne tiendra pas lieu daver lentier terre.
SECTION 283.—TRADUCTION.
Des jointenans peuvent tenir conjointement un fonds pour leur vie, & avoir divers successeurs. Ceci arrive dans le cas où des terres sont données à deux hommes & à leurs descendans; car ces donataires, tant qu'ils vivent, tiennent conjointement, & après le décès de l'un d'eux, le survivant jouit de tout: cependant si celui-ci laisse des enfans, ils ont moitié du don, & l'autre moitié appartient aux enfans du premier décédé; mais ils ne sont pas jointenans, ils sont tenans en commun. Observez, 1o. que les donataires, dont il est ici question, sont durant leur vie jointenans, parce que le don n'a pas été fait à un seul, mais à deux; & que cette clause dans les donations qu'elles sont faites à deux personnes, sans autre modification, forme une jointenancie pour le terme de la vie des donataires.
En effet, que quelqu'un veuille laisser à un autre, par écrit ou sans écrit, un fonds sans faire mention de la maniere dont celui-ci le tiendra, si le cessionnaire prend possession de ce fonds, il ne peut en jouir que tant qu'il vivra.
2o. Lesdits donataires ont divers successeurs, parce qu'il n'en est pas d'eux comme d'un mari & de sa femme auxquels on fait un don, & dont les enfans étant les mêmes doivent également hériter; les enfans des jointenans ayant différentes meres, la Loi & la raison exigent que leurs descendans respectifs succedent à leur part séparément.
Aussi dès que l'un des jointenans ou son héritier tenant en commun décède sans postérité, le donateur ou son héritier a la reversion de moitié du fonds, quoique l'autre jointenant ait des enfans.
REMARQUE.
(a) Liverie de seisin.
On regardoit un don qui n'étoit pas suivi d'ensaisinement, ou de prise de possession, plutôt comme une simple promesse que comme une donation véritable.[748]