Anciennes loix des François, conservées dans les coutumes angloises, recueillies par Littleton, Vol. I
SECTION 541.
Item, si jeo sue seisie dun villein come de villein en gros, (a) & un auter luy prent hors de ma possession, enclaimant luy destre son villein la ou il navoit ascun droit daver luy come son villeine, & puis jeo confirma a luy lestate que il ad en mon villeine, cest confirmation semble void, pur ceo que nul poit aver possession de un home come de villeine en grosse, si non celuy que ad droit de luy aver come son villein en grosse. Et issint entant que celuy a que le confirmation fuit fait, ne fuit seisie de luy come de son villeine a le temps de confirmation fait, tiel confirmation est void.
SECTION 541.—TRADUCTION.
Si étant propriétaire du droit d'avoir un villain, comme villain en gros, quelqu'un s'empare de ce villain & soutient, sans aucun droit, qu'il doit le garder, en confirmant la possession que ce particulier auroit de mon villain, je ferois un acte nul: car personne ne peut avoir la possession légitime d'un villain, comme villain en gros, qu'autant qu'il a la propriété du droit d'avoir un villain de cette espece.
REMARQUE.
(a) Villein en gros.
Les villains qui tenoient des terres payoient une certaine partie du revenu de ces terres au Seigneur durant leur jouissance; les villains en gros qui ne tenoient point de terres, devoient le droit de chevage ou de capitation; ce droit étoit fixé au douzieme siecle à un denier par an,[1061] & à un jour de service durant le mois d'Août. Pour revendiquer un villain dépendant d'un Fief, il falloit commencer par prouver que l'on jouissoit de ce Fief; & en reclamant un villain en gros on étoit obligé de justifier que l'on étoit encore saisi ou de ses enfans ou de ses meubles, car nul ne purra clamer droit en les appartenances ne en les accessories que nul droit n'ad en le principal.[1062]
[1061] Britton, pag. 80.
[1062] Ibid, c. 49, fol. 126.
SECTION 542.
Mes en cest cas, si tiels parols sueront en le fait, &c. Sciatis me dedisse & concessisse tali, &. talem villanum meum, cest bone, mes ceo urera per force & voy de grant & nemy per voy de confirmation, &c.
SECTION 542.—TRADUCTION.
Cependant, en ce cas, si dans l'acte on employoit ces mots, sçachez que j'ai donné & concédé à un tel tel villain, cette concession seroit valable; non pas en ce que l'acte contiendroit une confirmation, mais en ce qu'il seroit une vraie donation.
SECTION 543.
Et ascuns foits ceux verbs Dedi & concessi, ureront per voy dextinguishment del chose done ou grant, sicome un tenant tient de son seignior per certeine rent, & le seignior granta per son fait a le tenant & a ses heires le rent, &c. ceo urera a le tenant per voy dextinguishment, car per cel grant le rent est extinct, &c.
SECTION 543.—TRADUCTION.
Quelquefois ces mots, j'ai donné, j'ai cédé, ont l'effet d'anéantir la chose donnée ou transportée. Par exemple, si un vassal doit à son Seigneur une rente, cette rente est éteinte dès que ce Seigneur la donne ou cede à ce vassal & à ses hoirs.
SECTION 544.
En mesme le manner est lou un ad un rent charge hors de certaine terre, & il graunta al tenant de la terre le Rent charge, &c. & la cause est, pur ceo que appiert, per les parols del grant, que le volunt le donor est, que le tenant avera le rent, &c. entant que il ne puit aver ne perceiver ascun rent hors de son terre demesne, per ceo le fait serra intendue & pris pur l' pluis advantage & availe pur le tenant que puit este pris, & ceo est per voy dextinguishment.
SECTION 544.—TRADUCTION.
On doit dire la même chose lorsqu'un Seigneur qui a une Rente-charge affectée sur une terre, donne cette rente à celui à qui cette terre appartient, & la raison de cette maxime est palpable; lorsque le donateur se dessaisit de la rente en faveur du débiteur, son intention est que ce débiteur ne la paye plus, car il ne peut la payer à soi-même.
SECTION 545.
Item, si jeo lessa terre a un home pur terme dans, & puis jeo confirma son estate sans pluis parolx mitter en le fait, per cel il nad pluis greinder estate que pur terme dans, sicome il avoit adevant.
SECTION 545.—TRADUCTION.
Il faut néanmoins observer que lorsque mon tenant ne jouit que pour quelques années, je ne lui donne, en confirmant purement & simplement son état, que la faculté de continuer sa jouissance telle qu'elle étoit déterminée auparavant.
SECTION 546.
Mes si jeo relessa a luy mon droit que jeo aye en le terre sans plus parols mitter en le fait, il ad estate de franktenement. Issint poyes entend, mon fits, divers grands diversities perenter Releases & Confirmations.
SECTION 546.—TRADUCTION.
Si au contraire je lui fais délaissement du droit que j'ai sur le fonds, sans dire autre chose dans l'acte, son état est pour sa vie. Ainsi, mon fils, vous voyez la différence qu'il y a entre délaissement & confirmation.
SECTION 547.
Item, si jeo esteant deins age lessa terre a un auter pur terme de xx. ans, & puis il grantee le terre a un auter pur terme de x. ans, issint il granta forsque parcel de son terme, en cest case quant jeo sur de pleine age, si jeo relessa al grantee de mon lessee, &c. cest release est void, pur ceo que il ny ad ascun privitie perenter luy & moy, &c. Mes si jeo confirme son estate, donque cest confirmation est bone. Mes si mon lessee graunta tout son estate a un auter, donques mon release fait a l' grantee est bone & effectual.
SECTION 547.—TRADUCTION.
Si ayant cédé, étant mineur, ma terre à quelqu'un pour vingt ans, celui ci donne ensuite cette même terre à un autre pour dix ans, en faisant après ma majorité un délaissement de cette terre au donataire de mon cessionnaire, ce délaissement seroit nul; car il n'y a nulle correspondance immédiate entre ce donataire & moi, mais l'acte par lequel je confirmerois l'état du donataire seroit bon. Un délaissement de ma part seroit également valable, si je le faisois au profit du donataire de celui auquel j'aurois cédé le fonds.
SECTION 548.
Item, si home granta un rent charge issuant hors de son terre a un auter pur terme de son vie, & puis il confirma son estate en le dit rent, a aver & tener a luy en fee taile ou en fee simple, cest confirmation est voyd, quant a enlarger son estate, pur ceo que celuy que confirme navoit ascun reversion (a) en le rent.
SECTION 548.—TRADUCTION.
Si un homme ayant d'abord donné pour terme de vie une Rente-charge qui lui appartient à vie sur un fonds qui ne lui appartient pas, confirme ensuite l'état du donataire sur ladite rente, à l'effet que ce dernier la tienne en fief tail ou en fief simple, la confirmation est nulle, quant à la plus grande étendue qu'elle attribueroit au premier état du donataire; parce que ce n'est pas à celui qui fait l'acte de confirmation que la rente, après l'usufruit expiré, doit retourner: ce droit de réversion appartient au propriétaire du fonds sur lequel la rente est affectée.
REMARQUE.
(a) Navoit ascun reversion.
Voyez ce qui a été dit précédemment sur les Rentes-charges.
SECTION 549.
Mes si home soit seisie en fee de Rent service ou de rent charge, & il grant le rent a un auter pur terme de vie, & le tenant atturna, & puis il confirma lestate de le grantee en fee taile ou en fee simple, cest confirmation est bone, quant a enlarger son estate, solonque les parols le confirmation, pur ceo que celuy que confirmast al temps de confirmation, avoit un reversion del rent.
SECTION 549.—TRADUCTION.
Quand on vend à quelqu'un une Rente de service ou une Rente-charge à terme de vie, si après que le tenant du fonds affecté à cette rente a agréé l'acquereur, celui qui a vendu confirme l'état de cet acquereur en fief tail ou en fief simple, la confirmation doit avoir son effet, parce qu'au temps de cet acte le vendeur a en ce cas sur la rente un droit de réversion.
SECTION 550.
Mes en cas avantdit lou home graunt un rent charge a un auter pur terme de vie, sil voile que le grauntee averoit estate en le taile, ou en fee, il covient que le fait de graunt del rent charge pur terme de vie, soit surrender (a) ou cancell & donques de faire un novel fait dautiel rent charge: A aver & perceiver a le grantee en le taile, ou en fee, &c. Ex paucis plurima concipit ingenium.
SECTION 550.—TRADUCTION.
Nota. Que dans l'espece ci-devant proposée où un homme donne une Rente charge ou une rente d'autre espece à quelqu'un pour sa vie, afin que le donataire puisse en jouir en fief simple ou conditionnel, il faut que l'acte de donation ait été scellé & suivi de possession, & que la confirmation de cet acte soit faite par un acte nouveau, où il soit dit que la rente sera à l'avenir perçue à titre de fief simple ou de fief conditionnel, &c.
REMARQUE.
(a) Surrender. Délivrer.
 
CHAPITRE X. D'ATTOURNEMENT.
SECTION 551.
Attornement est come si soit Seignior & tenant, & le Seignior voile granter per son fait les services de son tenant a un auter pur terme dans, ou pur terme de vie, ou en taile, ou en fee, il covient que le tenant atturna (a) al grauntee en le vie le grantor, per force & vertue del grant, ou auterment le grant est void. Et atturnement est nul auter en effect forsque quant le tenant ad oye del grant fait per son Seignior, que mesme le tenant agree a per parol a le dit grant, sicome adire a le grauntee, jeo moy agreea le grant fait a vous, &c. ou jeo seu bien content de le graunt fait a vous, mes le pluis common atturnment est, adire Seignior, jeo atturna a vous per force del dit graunt, ou jeo deveigne vostre tenant, &c. ou liverer al grantee un denier, ou un maile, ou un farthing per voy dattornement.
SECTION 551.—TRADUCTION.
L'Attournement a lieu lorsqu'un Seigneur veut transporter les services de son tenant à un autre pour un certain nombre d'années ou viagérement, ou sous condition ou en fief simple; car il convient que le tenant agrée le transport, sans quoi cet acte seroit nul. L'Attournement peut se faire en ces termes: je suis content du transport, ou j'approuve le transport qui vous a été fait. Mais les expressions les plus ordinaires sont celles-ci: je vous attourne tel transport, & je serai à l'avenir votre tenant, c'est pourquoi je vous donne ce denier ou cette maille ou ce fardin.
REMARQUES.
(a) Il covient que le tenant atturna.
Si le tenant refusoit son consentement, on étoit obligé d'obtenir un Bref du Roi pour le forcer à le donner.[1063] Le vassal pouvoit appuyer son refus sur l'indigence de celui auquel on vouloit transporter ses services. Il étoit en effet bien important pour le vassal que son Seigneur fût en état de le garantir & de le défendre contre ceux qui auroient pu attenter à la franchise de sa tenure. C'étoit aussi par cette raison qu'en différentes Seigneuries les Seigneurs s'étoient privés de transporter à d'autres les services de leur Fief contre le gré de leurs hommes.[1064] Ce transport, de la part du Seigneur, n'opéroit au profit du transportuaire aucuns droits utiles, tels que le relief; ce dernier ne pouvoit exiger que l'hommage ou la féauté, selon l'espéce de la tenure.
[1063] Britton, c. 41.
[1064] Ibid c. 68
Les services corporels ou relatifs à la guerre ne pouvoient être attournés, parce qu'il auroit pu arriver qu'un Seigneur auroit assujetti son vassal à son plus cruel ennemi, & l'auroit forcé de se parjurer en lui promettant sa foi.[1065]
[1065] Coke, pag. 309.
Le nom d'Attourné, dans l'origine, étoit commun à tous porteurs de procuration, & conséquemment à ceux qu'un Seigneur se substituoit pour régir ses Fiefs ou commander ses vassaux en son absence. Ces substitués ne devinrent perpétuels que lorsqu'il fut permis de démembrer les Fiefs, & d'en sous-inféoder des portions considérables, sans recours aux chefs-Seigneurs.
SECTION 552.
Item, si le Seignior graunt l' service de son tenant a un home, & puis per un fait portant un darreine date, il granta mesmes les services a un auter, & l' tenant attorne a le second grantee, ore le dit grauntee ad les services, & coment que apres le tenant voile attorner a le primer grantee, cest clerement void, &c.
SECTION 552.—TRADUCTION.
Quand un Seigneur cede les services qui lui sont dûs successivement à deux personnes; le tenant, après avoir agréé le dernier cessionnaire, ne peut plus valablement faire ses services au premier.
SECTION 553.
Item, si home soit seisie de un mannor, quel mannor est parcel en demesne, & parcel en service, sil voile aliener cel mannor a un auter, il covient que per force del alienation, que touts les tenants que teignont del alienor, come de son Mannor attornerent al alienee, ou auterment les services demurront continualment en lalienor, forprise tenants a volunt, car il ne besoigne que tenants a volunt atturnent sur tiel alienation, &c.
SECTION 553.—TRADUCTION.
Qu'un homme saisi d'un manoir, dont partie est en domaine & l'autre partie en service, aliene ce manoir à un autre, il faut qu'il fasse agréer cette aliénation par tous les vassaux, sans cela ceux-ci pourront valablement refuser leurs services à l'acquereur, à moins qu'ils ne soient tenans à volonté; car le consentement de cette espece de vassaux n'est requis en aucune circonstance.
SECTION 554.
Item, si soient Seignior & tenant, & le tenant lessa la terre a un auter pur terme de vie, ou dona la terre en le taile savant le reversion a luy, &c. si le Seignior en tiel cas granta son seigniory a un auter, il covient que celuy en le reversion atturna al grauntee, & nemy le tenant a terme de vie, ou le tenant en le taile, pur ceo que en cest cas celuy en le reversion est tenant al Seignior, & nemy le tenant a terme de vie, ne le tenant en le taile.
SECTION 554.—TRADUCTION.
Après qu'un vassal a cédé sa terre à un autre pour le terme de sa vie ou en tail, en se réservant le droit de réversion, si le Seigneur de cette terre vend sa Seigneurie, c'est celui qui a retenu le droit de retour du fonds qui doit agréer la vente, & non le détenteur viager ou en tail; parce que ce détenteur n'est pas le vrai vassal du Seigneur.
SECTION 555.
En mesme le manner est, tou sont Seigniour, mesne & tenant, si le Seignour voile granter les services del mesne, coment que il ne fait ascun mention en son grant del mesne, uncore il covient que le mesne atturna, &c. & nemy le tenant perravaile, &c. pur ceo que le mesne est tenant a luy, &c.
SECTION 555.—TRADUCTION.
Il en est de même si un Seigneur suzerain aliene les services dûs au Seigneur moyen; car quoique ce Seigneur moyen ne soit pas mentionné en l'acte d'aliénation, c'est lui & non le sous-feudataire qui doit approuver la vente.
SECTION 556.
Mes auterment, est lou certaine terre est charge dun rent charge, ou Rent seck, car en tiel case si celuy que ad le rent charge ceo grant a un auter, il covient que le tenant del franktenement atturna al grantee, pur ceo que le franktenement est charge ou le rent, &c. & en rent charge nul avowrie doit estre fait sur ascun person pur le distresse prise, &c. mes il avowera le prise bone & droiturel, come en terres ou tenements issint charges a son distresse, &c.
SECTION 556.—TRADUCTION.
Il faut raisonner différemment quand le créancier d'une Rente-charge ou d'une Rente-seche la transporte à un autre: c'est, en effet, celui qui possede le fonds qui doit agréer ce transport; car ces sortes de rentes sont affectées spécialement sur la jouissance. Aussi quand le possesseur est saisi pour le payement de ces rentes, il ne peut appeller aucun garant, les terres dont il jouit n'étant chargées de la rente qu'au détriment de sa possession, la saisie du créancier de cette rente lui est totalement personnelle.
SECTION 557.
Item, si soit Seignior & tenant, & le tenant lessa son tenement a un auter pur terme de vie l' remainder a un auter en fee, & puis le Seignior granta les services a un auter, &c. & le tenant a terme de vie attorna, ceo est assets bone, pur ceo que le tenant a terme de vie est tenant en cest case al seignior, &c. & celuy en le remainder ne poit estre dit tenant le seignior, quant a cel entent forsque apres la mort le tenant a terme de vie, uncore en cest case si celuy en le remainder morust sans heire, le seignior avera le remainder per voy descheate, pur ceo que coment que le seignior en tiel cas covient davower sur le tenant a terme de vie, &c. uncore tout lentier tenement quant a toutes les estates de franktenement, ou de fee simpl', ou auterment, &c. en tiel cas sont ensemble tenus de le seignior, &c.
SECTION 557.—TRADUCTION.
Lorsqu'un tenant cede son tenement à un autre pour sa vie, & le retour de ce tenement, après la jouissance de ce dernier expirée, à quelqu'un en fief simple; si le Seigneur transporte les services que ce tenement lui doit, & fait agréer ce transport par le tenant à terme de vie, le transport est bon, parce que le tenant viager est dans ce cas tenant du Seigneur; car le cessionnaire de la réversion du fonds ne peut devenir tenant qu'après la mort de l'usufruitier. Il est vrai que si celui à qui le droit de réversion est cédé mouroit sans hoirs, le Seigneur auroit ce droit par deshérence, quoique le tenant viager fût le seul qui auroit été reconnu pour vassal: ceci part de cette maxime que tous les états qu'on peut acquerir sur un tenement, soit quant à l'usufruit, soit quant à la propriété, relevent également & indivisément des Seigneurs.
SECTION 558.
Item, si soit Seignior & tenant, & le tenant lessa les tenements a un feme pur terme de vie, le remainder ouster en fee, & la feme prent baron, & puis le seignior granta les services, &c. a le baron & ses heires, en cest case le service est mis en suspence durant le coverture. Mes si la feme devie vivant le baron, le baron & ses heires averont le rent de ceux en le remainder, &c. & en ceo case il ne besoigne ascun attornement per parol, &c. pur ceo que le baron que doit attorne accepta le fait del graunt de les services, &c. le quel acceptance est un attornement en la Ley.
SECTION 558.—TRADUCTION.
Si un tenant ayant cédé à une femme son tenement à terme de vie, & à un autre la propriété en fief simple, cette femme se marie, & le Seigneur donne les services que ce tenement lui doit au mari de cette femme & aux descendans de ce mari, alors les services sont suspendus tant que le mariage dure; mais après le décès de la femme, le mari & ses héritiers auront les services dûs sur celui à qui la propriété a été inféodée. Dans l'espece proposée ici il n'est pas besoin que le don fait des services par le Seigneur soit agréé par la femme, attendu que ce seroit son mari qui devroit pour elle ce consentement, & qui le devroit à lui-même, puisque les services lui sont cédés. L'acceptation que le mari fait du don des services est donc regardée comme renfermant tacitement de droit l'approbation de la cession que le Seigneur en a faite.
SECTION 559.
En mesme le manner est, si soyent Seignior & tenant, & le tenant prent feme, & puis le Seignior granta les services a la feme & ses heirs, & le baron accepta le fait, en cest cas apres la mort le baron, la feme & ses heires averont les services, &c. car per le acceptance del fait per l' baron, ceo est bone attornement, &c. coment que durant la coverture ses services sont mis en suspence, &c.
SECTION 559.—TRADUCTION.
C'est la même chose lorsqu'un tenant prend une femme, & que le Seigneur cede les services affectés sur la tenure à cette femme, & à ses enfans; car si le mari meurt après avoir accepté la cession, la veuve & ses enfans ont les services à leur profit, le mari étant réputé avoir agréé l'avantage qui leur a été fait, quoique le payement des services ait été suspendu pendant le mariage.
SECTION 560.
Item, si soyent Seigniory & tenant, & l' tenant granta les tenements a un home pur terme de sa vie, le remainder a un auter en fee, si le Seignior granta les services a le tenant a terme de vie en fee, en cest cas le tenant a terme de vie ad fee en les services. Mes les services sont mis en suspence durant sa vie. Mes les heires le tenant a terme de vie averont les services apres son decease, &c. Et en cest cas il ne besoigne attornement, car per lacceptance del fait de celuy que doit attourner, &c. est ceo attournement de luy mesme.
SECTION 560.—TRADUCTION.
Qu'un tenant cede la jouissance de ses terres à l'un pour sa vie, & la propriété de ces terres à un autre en fief simple, si le Seigneur ensuite abandonne en fief simple ses services au tenant viager, ce tenant aura en propriété & pour toujours ces services, lesquels étant demeurés en souffrance durant sa vie, pourront être exigés par ses héritiers après son décès. Dans cette espece l'attournement de la cession du Seigneur n'est pas requise, parce que le tenant viager, qui seul avoit droit d'approuver cette cession au temps où elle a été faite, n'a pu l'accepter sans approuver en même-temps que le Seigneur aliéna.
SECTION 561.
Mes lou le tenant ad cy grand & haut estate en ses tenements, sicome le Seignior ad en le Seigniory, en tiel case, si le Seignior graunta les services al tenant in fee, ceo urera per voy dextinguishment, Causa patet.
SECTION 561.—TRADUCTION.
Observez que si le tenant auquel le Seigneur cederoit ses services en fief simple possédoit sa tenure aussi en fief simple, ce tenant par la cession se trouveroit déchargé des services par voie d'extinction.
SECTION 562.
Item, si soyent Seignior & tenant, & l' tenant fait un leas a un home pur terme de sa vie, savant l' reversion a luy, si le Seignior granta l' Seigniorie a le tenant a terme de vie en fee, en cest case il covient que celuy en le reversion attorna al tenant a terme de vie per force de cel grant, ou auterment l' granta, est voyde, pur ceo que celuy en le reversion est tenant al Seignior, &c.
Et uncore il ne tiendra del tenant a terme de vie, durant sa vie. Causa patet.
SECTION 562.—TRADUCTION.
Quand un tenant vend à quelqu'un son fonds à vie, en s'en réservant le retour, si le Seigneur cede en fief simple à l'acquereur ses services, c'est le vendeur qui doit agréer la cession, parce qu'il est le véritable vassal du Seigneur; cependant ce vassal, tant qu'il vit, ne le devient pas pour cela du tenant viager.
SECTION 563.
Item, si soient seignior & tenant, & le tenant tient del Seignior per xx. maners des services, & le Seignior granta son seignory a un auter, si le tenant paya en fait ascun parcel dascun de les services al grauntee ceo est bone attornment, de & pur touts les services, coment que lentent de le tenant fuit dattourner forsque de cel parcel pur ceo que le Seigniory est entier, coment que ils sont divers maners des services que le tenant doit faire, &c.
SECTION 563.—TRADUCTION.
Un vassal releve de son Seigneur par vingt services différens, le Seigneur vend sa Seigneurie, & le vassal acquitte quelques-uns de ses services entre les mains de l'acquereur; dès-lors ce vassal est présumé avoir agréé la vente ou transport de tous les services, parce que les services sont dûs au Seigneur par une obligation indivisible, quoique l'espece en soit différente.
SECTION 564.
Item, si soit seignior & tenant, & le tenant tient del seignior per plusors maners des services, & l' seignior granta les services a un auter per fine, si le grantee sua un Scire facias hors del mesme l' fine pur ascun parcel de les services, & ad judgement de recover, cel judgement est bone attornement en ley pur touts les services.
SECTION 564.—TRADUCTION.
Un Seigneur vend les divers services que lui doit son vassal en vertu d'une transaction, l'acquereur ensuite poursuit le vassal pour le forcer à lui rendre quelques-uns de ses services, & le vassal est condamné; cette condamnation équivaut-elle à un attournement pour tous les services? L'affirmative est sans difficulté.
SECTION 565.
Item, si le Seignior dun rent service granta les services a un auter, & le tenant attorna per un denier, & puis le grantee distraine pur le rent arere, & le tenant a luy fait rescous, (a) en ceo cas le grauntee navera assise del rent, forsque briefe de rescous, per ceo que le don del denier pur le tenant, ne fuit forsque per voy dattornement, &c. Mes si le tenant avoit done a le grauntee le dit denier, come parcel de le rent, ou un maile, ou un farthing per voy de seisin del rent, donque ceo est bone attornment, & auxy est bone seisin al grauntee del rent, & donques sur tiel rescous le grantee avera assise, &c.
SECTION 565.—TRADUCTION.
Voici un autre cas.
Un Seigneur, propriétaire d'une rente consistante en services, aliene ces services, & son vassal agrée l'aliénation par la tradition d'un denier, l'acquereur saisit ensuite sur les fonds pour les arrérages de la rente, & le vassal s'oppose à la saisie par voie de récousse, cet acquereur dans cette circonstance ne peut obtenir l'Assise de Rente, mais il doit se pourvoir seulement contre l'opposition par Bref de Récousse, parce que le don qui lui a été fait d'un denier ne l'a été que pour tenir lieu de consentement au transport de la rente; au lieu que si le vassal eût payé ce denier ou une maille, ou un liard à compte des arrérages de cette rente, la saisine de la rente alors se seroit trouvée jointe à l'approbation du débiteur, & l'acquereur auroit eu droit d'obtenir l'Assise sur la Récousse ou opposition du vassal.
REMARQUE.
(a) Rescous.
La Rescousse empêchoit le créancier de saisir les fonds & les avoirs ou bestiaux essentiels à la culture. Lors donc que le débiteur avoit seulement agréé le transport d'une rente, quoique fonciere, il n'avoit encore obligé par là que l'usufruit du fonds; or l'ensaisinement de cette rente, c'est à dire, le payement des arrérages ou de partie des arrérages fait sans restriction, pouvoit seul donner au propriétaire de la rente, le droit de s'emparer du fonds même ou des dépendances du fonds sur lequel la rente étoit affectée. On trouve encore des traces de ces maximes dans diverses Coutumes, entr'autres dans celle de Bretagne, Art. 406 & 407.
SECTION 566.
Item, si sont plusors jointenants que teignont per certaine services, & le Seignior graunta a un auter les services, & un de les joyntenants attorna al grauntee, ceo est auxy bon, sicome touts ussent attorne, pur ceo que le Seigniory est entire, (a) &c.
SECTION 566.—TRADUCTION.
Que plusieurs jointenans tiennent à la charge de certains services, si le Seigneur les transporte à quelqu'un, il suffit que l'un des jointenans agrée le transport; parce que les tenures, pour être possédées par plusieurs, ne changent rien à l'intégrité de la Seigneurie, ou du domaine du Seigneur.
REMARQUE.
(a) Le Seigniory est entire.
La maxime contenue dans cette Section ouvre une voie facile pour remédier à la prescription dont use un coobligé contre son coobligé; elle consiste à faire poursuivre par le Seigneur celui qui oppose la prescription.
SECTION 567.
Item, si home lessa tenements a terme dans, per force de quel lease le lessee est seisie, & puis le lessor per son fait granta le reversion a outer pur terme de vie, ou en taile, ou en fee, il covient en tiel case que le tenant a terme dans attorna, ou auterment rien passera a tiel grantee per tiel fait. Et si en cest case le tenant a terme dans attorna al grantee, donque maintenant passera le franktenement al grauntee per tiel atturnement sauns ascun liverie de seisin, &c. pur ceo que si ascun livery de seisin, &c. serra ou besoigne destre fait en cel case donque le tenant a terme dans serroit al temps de liverie de seisin ouste de son possession, le quel serroit encounter reason, &c.
SECTION 567.—TRADUCTION.
Quand un homme a cédé ses tenemens pour plusieurs années à quelqu'un, si après que cette cession a été suivie d'exécution, le cédant transporte le droit de réversion à une autre personne en fief simple ou en tail, ou viagérement, en ce cas c'est au tenant à terme d'ans qu'il appartient d'agréer le transport, autrement ce transport n'aura point son effet. C'est, en effet, ce tenant à terme qui peut seul procurer au transportuaire l'effet de l'acte qui a été fait à son profit; car il seroit absurde que sa possession dépendit de celui qui ne doit en jouir qu'après lui.
SECTION 568.
Item, si tenements soient lesses a un home pur terme de vie, ou done en le taile savant le reversion, &c. si celuy en le reversion, en tiel case granta le reversion a un auter per son fait, il covient que le tenant de la terre attourna al grantee en la vie le grantor, ou auterment, le graunt est voyd.
SECTION 568.—TRADUCTION.
Dès que le retour d'un fonds cédé à vie ou en tail appartient à quelqu'un, le transport qu'il fait de ce droit de retour doit être agréé pendant sa vie; sans cela ce transport deviendroit nul.
SECTION 569.
En mesme l' maner est, si terre soit done en taile, ou lesse a un home pur terme de vie, le remainder a un auter en fee, si celuy en l' remainder voile granter cest remainder a un auter, &c. si le tenant del la terre atturna en la vie le grantor, donques l' grant de tiel remainder est bon, ou auterment nemy.
SECTION 569.—TRADUCTION.
Par une suite de cette regle, quand une terre est donnée à l'un en tail ou pour terme de vie, & à l'autre, quant au droit de réversion, en fief simple; si le donataire de ce droit l'aliene, cette aliénation ne peut valoir qu'autant qu'elle est agréée durant la vie du vendeur.
SECTION 570.
P. 12. (a) E. 4. Et la est tenus per tout le Court, que tenant in taile ne serra arct datturner, mes sil atturna gratis, cest assets bone.
SECTION 570.—TRADUCTION.
Dans le douzieme Parlement tenu sous Edouard IV, toute la Cour décida qu'un tenant en tail ne pouvoit être contraint d'attourner; mais que cependant son consentement ou attournement seroit valable, s'il le donnoit volontairement.
REMARQUE.
(a) Parl. 12.
Ce texte n'est pas de Littleton. Voyez Coke, fol. 316, verso.
SECTION 571.
Item, si terre soit lesse a un home pur terme dans, le remainder a un auter pur terme de vie, reservant al lessour un certaine rent per an, & liverie de seisin sur ceo est fait al tenant pur terme dans, si cestuy en le reversion en cest case granta le reversion a un auter, &c. & le tenant que est en le remainder apres le terme dans soy attourna, ceo est bone Attournement, & celuy a que cest reversion est graunt per force de tiel Attournement distreynera le tenant a terme dans pur le rent due apres tiel Attournement, coment que le tenant a terme dans ne unques attournast a luy. Et la cause est, pur terme que lou le reversion est dependant sur lestate del franktenement, suffist que le tenant del franktenement attourna sur tiel grant del reversion, &c.
SECTION 571.—TRADUCTION.
Une terre a été cédée à un homme pour plusieurs années, le droit de réversion l'a été à un autre pour sa vie, avec réserve au cédant d'une rente annuelle: après cela le cessionnaire à terme d'ans a pris possession de la terre, & celui qui avoit le droit de réversion a vendu ce droit; le tenant viager, en agréant ensuite cette vente, l'agrée valablement; & en conséquence celui à qui le droit de retour de la terre appartient peut, en vertu de cet agrément, distrainer ou user de saisie envers le tenant à terme d'ans pour les arrérages de la rente, quoique celui ci n'en ait pas consenti la vente. La raison de cette maxime naît de ce que le droit de réversion d'un fonds est une dépendance de l'usufruit, & qu'il suffit à celui qui a ce droit d'avoir l'approbation de l'héritier pour pouvoir le mettre a exécution.
SECTION 572.
Et est ascavoir, que lou un leas a terme dans, ou a terme de vie, ou done en taile est fait a ascun home, reservant a tiel lessor, ou donor un certaine rent, &c. si tiel lessor, ou donor, graunta son reversion a un auter, & le tenant del terre attourna, le rent passa al grauntee coment que en le fait del grant de reversion nul mention soit fait de le rent, pur ceo que le rent est incident al reversion en tiel case, & nemy è converso, &c. Car si home voile graunter le rent en tiel case a un auter, reservant a luy le reversion del terre, coment que le tenant attorna a le grauntee, ceo serra forsque un Rent secke, (a) &c.
SECTION 572.—TRADUCTION.
Observez que lorsqu'il s'agit de la cession d'un fonds pour plusieurs années ou pour la vie d'un homme, ou du don d'un fief conditionnel sur lequel le cédant ou le donateur se réserve une rente; si celui-ci aliene le droit de réversion qu'il a, & fait approuver l'aliénation par le possesseur de la terre, quoique l'acte par lequel cette approbation est donnée ne fasse aucune mention de la rente, le donataire ou le cessionnaire du droit de réversion aura cette rente, parce que la rente est une dépendance du retour de la terre que le vendeur ou le donateur s'est réservé. Il n'en seroit pas de même si on aliénoit la rente seulement: car le droit de réversion, en ce cas, resteroit au vendeur, & la rente en la main de l'acquereur seroit une Rente-seche.
REMARQUE.
(a) Rent secke.
Cette rente répond à nos rentes purement hypotheques. Les Coutumes de la Marche, Article 180, 411, 432, 437; celle d'Acqs, Titre 8, Article 7; celle de Saint Sever, Titre 6, & celle de Bayonne, Titre 4, Article 10 & 11, ont retenu cette dénomination de rentes seches.
SECTION 573.
Item, si home lessa terre a un auter pur terme de sa vie, & puis il confirma per son fait lestate del tenant a terme de vie, le remainder a un auter en fee, & le tenant a terme de vie accepta le fait, donques est le remainder en fait en celuy a que le remainder est done ou limitte per mesme le fait, car per lacceptance del tenant a terme de vie del le fait, ceo est un agreement del luy, & issint un attornement en ley. Mes uncore celuy en le remainder navera ascun action non de Waste ne auter benefit per tiel remainder, si non que il avoit l' dit fait en poigne, per que le remainder fuit taile ou graunt a luy. Et pur ceo que en tiel cas le tenant a terme de vie voile per cas reteigner le fait a luy, a cel entent que celuy en le remainder naveroit ascun action de Waste envers luy, pur ceo que il ne poit vener daver le fait en sa possession, il serra bone & sure chose en tiel cas pur celuy en le remainder, que un fait endent soit fait per celuy que voile fait tiel confirmation, & le remainder ouster, &c. & que celuy que fait tiel confirmation delivera un part del Indenture al tenant a terme de vie, & le auter part a celuy que avera le remainder. Et donque il per monstrance de le part del endenture, poit aver action de Waste envers le tenant a terme de vie, & touts auters advantages que celuy en le remainder poit aver en tiel case, &c.
SECTION 573.—TRADUCTION.
Lorsqu'un homme a cédé à un autre pour sa vie une terre, & quand après avoir confirmé l'état du cessionnaire, il a transporté à un autre le retour de la terre à titre de fief simple; si le tenant viager accepte ensuite le transport, ceci forme de droit un attournement ou une acceptation valable de ce transport, & cependant le transportuaire n'a aucune action de Wast ni autre privilége sur le fonds qu'autant qu'il représente un acte par lequel le retour du fief lui a été transporté purement & simplement ou sous condition. Mais comme il pourroit arriver qu'en ce cas le tenant à terme de vie soutiendroit que l'acte n'opéreroit aucune action de Wast contre lui, parce qu'il n'auroit point participé à cet acte, & qu'on ne lui en auroit point donné une expédition; il est plus sûr que le transportuaire d'un droit de réversion fasse faire l'acte de transport double, dont un restera en ses mains, & l'autre sera remis en celles du tenant viager; à ce moyen ce dernier deviendra susceptible & garant de tout Wast ou dégradation du fonds.
REMARQUE.
Voyez Section 525, suprà.
SECTION 574.
Item, si deux joyntenants sont, les queux lessont lour terre a un auter pur terme de vie, rendant a eux & a lour heires certaine rent per an, en cest case si un des joyntenans en le reversion, relessa a lauter joyntenant en mesme le reversion, cest releas est bone, & celuy a que le releas est fait avera solement le rent del tenant a terme de vie, & avera solement un briefe de Waste envers luy coment que il ne unques attorneroit per force de tiel releas, &c. Et la cause est pur le privity que un foits fuit perenter le tenant a terme de vie, & eux en le reversion.
SECTION 574.—TRADUCTION.
Si deux jointenans ayant cédé leur terre à un autre pour sa vie, à la charge de leur faire une rente & à leurs héritiers, un de ces jointenans transporte ensuite à l'autre le droit de réversion qu'il a sur cette terre, ce transport est bon; & en vertu de cet acte, le jointenant auquel la réversion est abandonnée aura la rente dûe par le tenant viager, & en même-temps un Bref de Wast contre ce dernier, sans qu'il soit besoin que celui-ci agrée ledit acte. Ceci est fondé sur ce que le cessionnaire du droit de réversion avoit déjà part à ce droit avant le transport qui lui a été fait par son jointenant.
SECTION 575.
En mesme le maner, & pur mesme la cause est, lou home lessa terre a un auter pur terme de vie, le remainder a un auter pur terme de vie, reservant le reversion al lessour, en cest cas si celuy en le reversion relessa a celuy en le remainder & a ses heires tout son droit, &c. donques celuy en le remainder ad un fee, &c. & il avera un briefe de Wast envers le tenant a terme de vie sans ascun attornement de luy, &c.
SECTION 575.—TRADUCTION.
C'est par cette même raison que lorsqu'un homme ayant cédé à vie sa terre à quelqu'un, en transporte ensuite le droit de retour à un autre, aussi à vie, en se réservant la réversion de la terre après le décès de ce dernier, il n'est pas besoin que le tenant viager agrée la cession que le propriétaire du fonds fait de son droit de réversion à celui qui ne l'a que pour sa vie, afin que ce dernier ait la faculté d'agir contre le tenant pour dégradations.
SECTION 576.
Item, si home lessa terres ou tenements a un auter pur terme des ans, & puis il ousta son termour, & ent enfeoffa un auter en fee, & puis le tenant a terme dans enter sur le feoffee, enclaimant son terme, &c. & puis fait wast, en cest case le feoffee avera per la ley un briefe de wast envers luy, & uncore il nattornast pas a luy. Et la cause est, come jeo suppose, pur ceo que celuy que ad droit de aver terres ou tenements pur terme dans, ou auterment, ne serroit per la ley misconusant de les feoffments que fueront faits de & sur mesmes les terres, &c. & entant que per tiel feoffement le tenant a terme dans fuit mis hors de son possession, & per son entre il causast le reversion destre a celuy a que le feoffment fuit fait, ceo est bone attornement, car celuy a que le feoffment fuit fait, avoit nul reversion devaunt que le tenant a terme dans avoit enter sur luy, pur ceo que il fuit en possession en son demesne come de fee, & per lenter del tenant a terme dans il y ad forsque un reversion, quel est per le fait l' tenant a terme dans, scavoir, per son entrie, &c.
SECTION 576.—TRADUCTION.
Si un homme ayant cédé ses terres à un autre pour plusieurs années donne, après l'avoir obligé de déguerpir du fonds, ces mêmes terres à un autre en fief simple; dans le cas où le tenant à terme d'ans rentre dans le fonds, sous le prétexte que son terme n'est pas expiré, & y commet des dégradations, le feudataire aura un Bref de Wast contre le tenant à terme d'ans, quoique celui-ci n'ait pas agréé l'inféodation; & je crois qu'on peut en donner cette raison, que celui qui a droit de jouir d'un fonds pour quelques années, dans l'espece proposée, ne méconnoît pas qu'il n'a droit sur la terre que pour un certain temps: or, en ne reprenant la possession de cette terre que pour ce temps-là, il reconnoît tacitement que le droit de réversion en appartient à celui à qui elle a été donnée en fief simple; ce qui équivaut à un attournement.
SECTION 577.
Mesme la ley est, come il semble, lou un leas est fait pur terme de vie, savant le reversion al lessor, si l' lessour disseisist le lessee, & fait feoffment en fee, si le tenant a terme de vie enter & fait waste, le feoffee avera briefe de waste sans ascun auter attournment. Causa qua suprà, &c.
SECTION 577.—TRADUCTION.
La même regle doit être suivie lorsqu'une cession est faite à vie avec réserve de la réversion au profit du cédant: car si ce dernier dépossede le cessionnaire, & donne en fief simple le fonds à un autre, le cessionnaire viager en reprenant sa possession, & commettant des dégradations, donne droit à celui qui tient en fief simple d'obtenir Bref de Wast, quoique son inféodation n'ait pas été attournée ou agréée.
SECTION 578.
Item, si leas soit fait pur terme de vie, le remainder a un auter en le taile, le remainder ouster a les droit heires le tenant a terme de vie. En cest case si le tenant a terme de vie granta son remainder en fee a auter per son fait, cel remainder maintenant passa per le fait sans ascun attournment, &c. Car si ascun doit attorne en cest case, ceo serroit le tenant a terme de vie, & en vain serroit que il atturneroit sur son grant demesne, &c.
SECTION 578.—TRADUCTION.
Quand une cession est faite à quelqu'un d'un fonds à terme de vie, & de la réversion de ce même fonds en tail à un autre, & enfin du retour de cette terre après le tail ou la condition expirée aux héritiers du tenant à terme de vie; en ce cas si le tenant viager transporte à quelqu'un, par acte écrit, le droit de retour qu'il a sur la propriété, le transportuaire de ce droit est exempt de la formalité de l'attournement: car si quelqu'un devoit agréer le transport, ce seroit le tenant viager; or il seroit absurde de l'obliger à agréer la vente faite par lui-même.
SECTION 579.
Item, si soit Seignior & tenant, & le tenant tient del Seignior per certaine rent, & service de chivaler, si le Seignior granta les services de son tenant per fine, les services sont maintenant en le grantee per force del fine, mes uncore le Seignior ne poit pas distreyne per ascun parcel de les services sans attournment: Mes si le tenant devia (son heire deins age) le Seignior avera le gard del corps del heire, & de ses terres, &c. coment que il ne unques atturnast, pur ceo que le Seigniorie fuit en le grantee, maintenant per force del fine. Et auxy en tiel cas, si le tenant morust sans heire, le Seignior avera les tenements per voy descheat.
SECTION 579.—TRADUCTION.
Le Seigneur de celui qui tient par service de Chevalier & par une rente, aliénant les services de son tenant par une transaction, l'acquereur a bien la jouissance de ces services en vertu de la transaction; mais il ne peut s'emparer d'aucune partie du fonds au défaut de ces services, si la transaction n'a pas été agréée par le vassal. Cependant quand ce vassal décede & laisse un mineur, l'acquereur a la garde du mineur & de ses terres, & après la mort de ce mineur, sans héritiers, la terre lui retourne par deshérance.
SECTION 580.
En mesme le manner est, si home granta le reversion de son tenant a terme de vie, a un auter per fine, le reversion passa maintenant al grantee per force del fine, mes le grantee jammes navera action de Wast sans atturnment, &c.
SECTION 580.—TRADUCTION.
Voici plusieurs autres exemples d'aliénations qui peuvent être valables sans attournemens.
1o. Si un homme cede par transaction le droit de réversion de la terre qu'il a cédée à vie, le cessionnaire exercera ce droit de réversion sans attournement; & cependant il n'aura point d'action pour les dégradations.
SECTION 581.
Mes uncore si le tenant a terme de vie alienast en fee, le grantee poit enter, &c. pur ceo que l' reversion fuit en luy per force del fine, & tiel alienation fuit a son disheritance.
SECTION 581.—TRADUCTION.
2o. Si le tenant viager rétrocede à quelqu'un en fief simple un fonds dont le droit de réversion est cédé à un autre, celui qui a ce droit de réversion peut reprendre la possession du fonds; parce qu'une pareille aliénation de la part du tenant viager tend à priver le propriétaire du droit de retour qu'il a sur le fonds.
SECTION 582.
Mes en cest cas lou le Seignior granta les services de son tenant per fine, si tenant devie (son heire esteant de plein age) le grantee per l' fine navera reliefe, ne unques distreinera pur reliefe, sinon que il avoit lattornement del tenaunt que morust, car de tiel chose que gist en distresse, sur que le Briefe de replevin est sue, &c. home doit & covient davower l' prisel bone & droiturel, &c. & la covient estre attornement del tenant, coment que le graunt de tiel chose soit per fine, mes daver le gard de les terres ou tenements issint tenus durant le nonage lheire, on de eux aver per voy descheat, la ne besoigne ascun distresse, &c. mes un entrie en la terre per force de le droit del seigniorie, que le grantee ad per force del fine, &c. Sic vide diversitatem.
SECTION 582.—TRADUCTION.
Cependant quand le Seigneur cede par transaction les services de son tenant; si ce tenant meurt laissant un fils majeur, le cessionnaire n'aura pas le relief, & conséquemment ne pourra s'emparer du fonds pour le payement de ce droit, à moins que le tenant décédé n'ait agréé la cession: car il est de principe que pour tous les droits auxquels est attaché le privilége d'envoi en possession des fonds qui y sont affectés, & pour lesquels le Bref de Réplevin peut être obtenu, il est nécessaire d'avoir la reconnoissance personnelle du débiteur. Or, pour exercer le Droit de Garde durant la minorité, ou le retour de la terre par deshérance, on n'a pas besoin d'user de saisie sur le fonds, ce fonds est dévolu de droit à celui auquel le propriétaire l'a cédé; il suffit d'entrer en ce fonds en vertu de la transaction ou transport dont on est porteur.
SECTION 583.
Item, si soit Seignior, mesne & tenant, & le mesne le granta per fine les services de son tenant a un auter in fee, & puis le grantee morust sans heire, ore les services del mesnaltie deviendront & escheate al Seignior paramont per voy descheat, & si apres les services del mesnaltie sont aderere, en cest cas celuy que fuit Seignior paramont poit distreiner le tenant, nient obstant que le tenant ne unques atturnast, & le cause est, pur ceo que le mesnaltie fuit en fait en le grantee per force de le dit fine, & le Seignior paramont puissoit avower sur le grantee, pur ceo que il fuit son tenant en fait, coment que il ne serroit a ceo compelle, &c. Mes si le grantor en cest case deviast sans heire en la vie le grantee, donque il serroit compelle davower sur le grantee, & auxy entant que le Seignior paramont ne claime le mesnaltie per force del graunt fait per fine le vie per le mesne, mes per vertue de son Seigniorie paramont, scavoir, per voy descheat, il avowa sur le tenant pur les services que le mesne avoit, &c. coment que le tenant ne unques atturna pas.
SECTION 583.—TRADUCTION.
Lorsqu'il y a un Seigneur suzerain, un Seigneur moyen & un vassal, & que le Seigneur moyen cede par transaction les services du vassal à quelqu'un en fief simple, si le cessionnaire décede sans laisser d'enfans, les services retournent, à ce titre de deshérence au Seigneur suzerain, lequel peut saisir sur le fonds pour les arrérages des services, quoique le vassal n'ait pas consenti la cession qui en a été faite au défunt. Ceci est fondé sur ce que du moment de la transaction par laquelle les services ont été cédés, le suzerain acquiert la liberté, quoiqu'il ne puisse y être contraint, d'avouer le cessionnaire pour son vassal, parce que ce vassal l'est dans le fait. Cependant si dans l'espece ci-devant proposée le cédant mouroit sans héritiers du vivant de son cessionnaire, le suzerain alors seroit obligé d'avouer ce dernier pour son tenant, parce qu'alors ce suzerain ne seroit plus fondé à exercer sa Seigneurie sur ce tenant, en conséquence de la transaction faite entre celui-ci & son vendeur; mais il l'exerceroit par voie d'échéance ou de deshérence qui est un droit inhérant à sa qualité, & pour l'exercice duquel il n'a pas besoin de l'agrément du vassal.
SECTION 584.
En mesme le maner est, lou le reversion dun tenant a terme de vie soit grant per fine a un auter en fee, & le grantee apres morust sans heire, ore le Seignior ad le reversion per voy descheat. Et si apres le tenant fait waste le Seignior avera briefe de wast envers luy, nient contristeant que il ne unques atturna, Causa qua supra. Mes lou un home claime per force del graunt fait per le fine, scavoir, come heire, ou come assignee, &c. la il ne distreinera ne avowera, ne avera action de wast, &c. sans attornement.
SECTION 584.—TRADUCTION.
Supposons que la réversion d'un tenement cédé à terme de vie soit transporté en fief simple à un autre par une transaction, & que le transportuaire décede sans laisser d'enfans: le Seigneur auroit, en ce cas, la réversion à titre de deshérence, & par conséquent l'action de Wast contre le tenant en fief simple, quoiqu'il n'eût pas agréé le transport fait à ce tenant; & cela par le motif allégué en la précédente Section. Mais quand un homme succede, soit comme héritier, soit comme substitué à un fonds qui a été cédé par transaction, il ne peut ni saisir, ni avouer, ni poursuivre le tenant pour dégradations, si ce tenant n'a pas agréé la transaction.
SECTION 585.
Item, en ancient Boroughs & Cities, lou terres & tenements deins mesme les Boroughes & Cities sont devisable per testament per custome & use, &c. si en tiel borough ou citie home soit seisie de rent service, ou de rent charge, & devisa cel rent ou service a un auter per son testament & morust, en cest cas celuy a que tiel devisee est fait, poit distreiner le tenant pur le rent ou service aderere, coment que le tenant nattorna pas.
SECTION 585.—TRADUCTION.
Quelques Bourgs ou Villes ont des usages particuliers en vertu desquels les héritages qui y sont assis peuvent être partagés par testament. Or, quand un habitant de ces Bourgs ou Villes est propriétaire d'une Rente de services ou d'une Rente-charge, il peut les diviser par son testament entre ses légataires; & alors ceux-ci, après son décès, ont droit, en vertu du testament, de saisir les fonds auxquels les rentes sont affectées, quoique le tenant n'ait pas agréé les dernieres dispositions du décédé.
SECTION 586.
En mesme le manner est lou home lessa tiels tenements devisables a un auter pur terme de vie, ou pur terme dans, & devisa le reversion per son testament a un auter en fee, ou en fee taile & morust, & puis le tenant fait waste, celuy a que le devise suit fait avera brief de waste, coment que le tenant ne unque attorna. Et la cause est pur ceo, que la volunt le devisour fait per son testament serra performe solonque lentent del devisour, & si leffect de ceo girroit sur lattournement del tenant, donques per case le tenant ne voyle unques atturner, & donques le volunt del devisor ne serroit unque performe, &c. & pur ceo le devise distreinera, &c. ou avera action de Waste, &c. sans attournement. Car si home devisa tiels tenements a un auter per son testament, Habend' sibi imperpetuum, & morust, & le devisee enter, il ad fee simple (a), Causa qua supra, uncore si fait de feoffment ust estre fait a luy per le devisor en sa vie de mesmes les tenements, Habend' sibi imperpetuum, & livery de seisin sur ceo fuit fait, il naveroit estate forsque pur terme de sa vie.
SECTION 586.—TRADUCTION.
Par une suite naturelle de ce qu'on vient de dire, si un homme saisi de tenemens qui peuvent être divisés les cede à quelqu'un pour sa vie ou pour plusieurs années, & ensuite legue en fief simple, ou à tail, le droit de réversion qu'il a sur ces tenemens après le décès du testateur, le légataire a Bref de Wast contre le tenant à vie ou à terme, quoique celui-ci n'ait point attourné ni agréé le legs. Rien de plus équitable que cette maxime: car si un testament ne pouvoit être exécuté que par l'approbation qu'y donneroit un débiteur, ce seroit en lui, & non dans le testateur, que résideroit la faculté de tester. Remarquez cependant que lorsqu'un homme legue ses tenemens à un autre pour les tenir à perpétuité, si après le décès du testateur le légataire prend possession, le droit de ce dernier sur les tenemens est en fief simple; au lieu qu'un donataire n'y a droit que pour sa vie seulement, si le propriétaire les lui a cédés à perpétuité par acte entre-vifs.
REMARQUE.
(a) Il ad fee simple.
On présumoit qu'un testateur, n'ayant indiqué personne à qui le fonds dût retourner après le décès du légataire, avoit eu intention de lui léguer la propriété de ce fonds. Cette présomption n'étoit pas admissible à l'égard d'une donation qui devoit s'effectuer du vivant du donateur; au contraire, il étoit, en ce dernier cas, tout naturel de penser que l'intention de ce donateur avoit été de se réserver la réversion du fonds, par préférence aux héritiers du donataire, si ce dernier décédoit le premier.
SECTION 587.
Item, si home seisie dun mannor quel' est parcel en demesne & parcel en service, & en soit disseisie, mes les tenants que teignont del mannor ne unques attournant a le disseisor, en cest cas coment que le disseisor morust seisie, & son heire soit eins per discent, &c. uncore poit le disseisee distreine pur le rent arere, & avera les services, &c. Mes si les tenants viendront al disseisor, & diont, nous deveignomus vostre tenants, &c. ou auter attournement a luy faisoyent, &c. & puis le disseisor morust seisie, donque le disseisee ne poit distreine pur le rent, &c. pur ceo que tout le manor discendist al heire le disseisor, &c.
SECTION 587.—TRADUCTION.
Un homme saisi d'un manoir dont il possede lui-même partie, & dont l'autre partie est aliénée, à la charge de service, étant dépossédé de ce manoir, ses vassaux ne veulent pas reconnoître pour Seigneur celui qui a dépossédé; dans cette circonstance celui-ci meurt, & son héritier succede au manoir: le dessaisi peut-il saisir les vassaux pour les services & les rentes? L'affirmative ne peut-être révoquée en doute. Mais si les vassaux s'étant avoués tenans de celui qui auroit dessaisi, après le décès de ce dernier, son héritier prenoit possession du manoir, le dessaisi ne pourroit plus agir contre ces vassaux pour le payement de ses rentes; parce que l'héritier auroit par succession ces rentes, aussi-bien que le manoir, puisque son pere ou son parent auroit été en bonne & valable possession de l'un & de l'autre avant son décès.
SECTION 588.
Mes si un tient de moy per rent service, le quel est un service en grosse, & nient per reason de mon mannor, & un auter que nul droit ad claima le rent, & resceive & prent mesme le rent de mon tenant per cohersion de distres, ou per auter forme, & disseisist moy per tiel prender de rent, coment que tiel disseisor morust issint seisie en pernant de rent, uncore apres sa mort jeo puissoy bien distreiner le tenant pur le rent que fuit aderere devant le decease del disseisor, & auxy apres son decease. Et la cause est, pur ceo que tiel disseisor nest pas mon disseisor forsque a ma election & ma volunt. Car coment que il prent le rent de mon tenant, &c. uncore jeo puissoy a touts foits distreiner mon tenant pur le rent arere, issint que il est a moy forsque sicome jeo voile sufferer le tenant, estre per tant de temps arere pur paier a moy mesme le rent, &c.
SECTION 588.—TRADUCTION.
Quelqu'un tient de moi par un service en gros, c'est-à-dire, par un service qui n'est pas spécialement affecté sur mon manoir, & un particulier qui n'a aucun droit à ce service, l'exige de mon tenant & le force à le lui faire par la saisie de ses avoirs ou par d'autres voies semblables; par-là suis-je dessaisi de mon service, de maniere qu'après le décès de celui qui s'en est emparé, je ne puisse agir contre mon tenant pour le payement des arrérages qui me sont dûs? Cette question est aisée à résoudre. Celui qui me dessaisit d'une Rente de service ne le peut valablement que par transport ou en vertu de mon consentement. Ainsi quand mon tenant paye une rente de cette nature à un autre, je ne suis jamais présumé avoir approuvé ce payement, mais seulement avoir accordé à mon débiteur des délais pour s'acquitter des services qui m'appartiennent.
SECTION 589.
Car le payment de mon tenant a un auter, a que il ne doit pas payer, nest pas disseisin a moy, ne ousta moy pas de mon rent sans ma volunt & ma election, &c. Car coment que jeo puissoy aver Assise envers tiel pernor uncore ceo est a mon election, si jeo voile prender luy come mon disseisor ou non. Issint tiels discents de rents en gros, ne ousteront pas le seignior de distreyner, mes a chescun temps ils poyent bien distreyner pur l' rent arere, &c. Et en cest case si apres le distresse de luy que issint torciousment prist le rent, jeo graunt per mon fait le service a un auter, & le tenant attourna, ceo est assets bone, & les services per tiel graunt & attournement maintenant sont en le grantee, &c. Mes auterment est, lou le rent est parcel del manor, & le disseisor morust seisie del manor entire, come en le case procheine avant est dit, &c.
SECTION 589.—TRADUCTION.
Et en effet, le payement que mon tenant fait à un étranger, à qui il ne doit rien, ne me dessaisit pas, puisque cela se fait à mon insçu. L'usurpation de cet étranger me donne cependant la faculté de le traduire en l'Assise; mais je suis libre d'exercer cette faculté comme de n'en faire aucun usage. De-là il suit donc que malgré la jouissance qu'un étranger se procure d'une Rente en gros qui n'est pas fonciere, je ne suis pas moins en droit de saisir mon tenant pour le payement des arrérages de cette Rente; & conséquemment si après que cet étranger s'est emparé d'une pareille rente je la vends, & fais agréer la vente par mon vassal, cette vente est bonne, & l'acquereur doit être maintenu dans son acquisition. Il en seroit autrement si la rente étoit assignée sur un fonds ou tenoit lieu d'un fonds: car celui qui décéderoit saisi de ce fonds, après s'en être saisi pour le payement des arrérages de la rente, seroit réputé avoir dépossédé le propriétaire, comme je l'ai dit en la Section 587.
SECTION 590.
Item, si jeo sue seisie dun manor parcel en demesne, & parcel en service, & jeo done certaine acres del terre, parcel de demesne de mesme l' manor a un auter en le taile, rendant a moy & a mes heires un certaine rent, &c. Si en cest case jeo sue disseisie de la Manor, & touts les tenants atturnont & payont lour rents al disseisor, & auxy le dit tenant en le taile paya le rent per moy reserve al disseisor, & puis le disseisor morust seisie, &c. & son heire entra, & est eins per discent, uncore en cest case jeo puisse bien distreigner le tenant en le taile, & ses heires, pur le rent per moy reserve sur le done, scavoir, auxybien pur le rent esteant aderere devant le discent al heire le disseisor, & auxy pur le rent que happa destre aderere apres mesme le discent, nient obstant tiel morant seisi del disseisor, &c. Et la cause est, pur ceo que quant home dona tenements en le taile, savant le reversion a luy, & il sur le dit done reserva a luy un Rent ou auters services, tout le rent & les services sont incidents a la reversion, & quant un home ad un reversion, il ne puissoit estre ouste de son reversion per le fait dun estrange home, sinon que le tenant soit ouste de son estate & possession, &c. car cy longement que le tenant en le taile & ses heires continuont lour possession per force de mon done, cy longement est le reversion en moy & en mes heires, & entant que le rent & les services reserves sur tiel done sont incidents & dependants al reversion, quecunque que ad le reversion, avera mesme le rent & services, &c.
SECTION 590.—TRADUCTION.
Si étant saisi d'un manoir, dont partie est en ma main & l'autre est inféodée à charge de services, je cede en tail à quelqu'un tant d'acres de terres faisant partie de mon domaine non fieffé, à la condition de me faire & à mes héritiers une rente; lorsqu'après cette cession je suis dessaisi du manoir, & que mes vassaux & le cessionnaire reconnoissent pour Seigneur celui qui m'a dépossédé, & lui payent leurs rentes, quoique ce dernier décede possesseur du manoir, & que son héritier continue d'en jouir, je ne suis cependant pas privé pour cela d'user de saisie envers mon tenant en tail ou ses héritiers pour les arrérages de la rente en laquelle il s'est constitué envers moi; parce que quand on donne un fief en tail, en se réservant une rente ou autres services, & le retour du fief, cette rente & ces services sont une suite du droit de réversion. Or, il est de principe qu'on ne peut être privé d'un droit de réversion qu'autant que le tenant, après le décès duquel il doit y avoir ouverture à ce droit, est lui-même privé de son état & de sa possession: donc tant que le tenant en tail & ses hoirs continuent de jouir en vertu de la cession que je leur ai faite, j'ai, ainsi que mes successeurs, les rentes & services dépendans de la réversion que je me suis réservée.
SECTION 591.
En mesme le manner est, lou jeo lessa parcel del demesne del maner a un auter pur terme de vie, ou pur terme dans, rendant a moy certaine rent, &c. coment que jeo soy disseisie del manor, &c. & le disseisor morust seisie, &c. & son heire esteant eins per discent, uncore jeo distreiner pur le rent arere ut supra, nient obstant tiel discent. Car quant home ad fait tiel done en taile, ou tiel leas pur terme de vie, ou pur terme dans del parcel de le demesne de un mannor, &c. savant le reversion a tiel donour ou lessour, &c. & puis il soit disseisie de le manor, &c. tiel reversion apres tiel disseisin est sever dal manor en fait, coment que ne soit sever en droit. Et issint poyes veier (mon fits) diversitie, lou il y ad un manor parcel en demesne & parcel en services, les queux services sont parcel de mesme le manor nient incidents a ascun reversion, &c. & lou ils sont incidents al reversion, &c.
SECTION 591.—TRADUCTION.
Ces conséquences ont encore leur application à l'espece suivante. J'abandonne partie de mon domaine à quelqu'un pour sa vie ou pour plusieurs années, à la charge de me faire une rente; quoique je sois ensuite dépossédé de mon fief, & que mon dépossesseur, étant décédé en possession de ce fief, l'ait transmis à son héritier, cependant je peux saisir celui auquel j'ai cédé le fonds pour les arrérages de ma rente. En effet, lorsqu'un homme, après avoir donné en tail ou à terme partie de son domaine, en s'en réservant le retour, est dessaisi de son fief, le droit de réversion se trouve par le fait indépendant du fief même, quoique ce fief & ce droit de réversion soient de droit individuels. Ainsi, mon fils, vous pouvez facilement appercevoir la différence qu'il y a entre le cas où il s'agit du transport du manoir, dont partie est en la main du Seigneur & partie inféodée à charge de services sans aucune réserve du droit de réversion, & le cas où ces services sont une dépendance inhérente au droit de réversion que le Seigneur s'est réservé sur le fonds.
REMARQUES.
Tous les principes de ce Chapitre peuvent beaucoup servir à éclaircir la matiere des transports des rentes ou des héritages autorisés par le Droit coutumier François; il développe les motifs sur lesquels s'est établie cette maxime: Un simple transport ne saisit point; il indique les personnes qui avoient autrefois droit d'agréer les transports, & auxquels conséquemment on doit maintenant les signifier pour en assurer l'exécution; il fait connoître les caracteres qui distinguent les transports d'avec la vente, & les bornes dans lesquelles on doit renfermer l'usage des Actes auxquels cette dénomination de transport convient. Il détermine enfin les circonstances où un détenteur de fonds peut être personnellement poursuivi par l'acquereur d'une rente, dont il n'a cependant point consenti le transport, mais à laquelle le fonds est essentiellement affecté; & celles où le débiteur d'une rente seche, volante, purement hypotheque, est réputé avoir suffisamment reconnu le détenteur, pour que celui-ci puisse valablement le contraindre au payement par la saisie du fonds qu'il possede, quoique ce fonds ne soit entré en aucune considération dans l'Acte de transport.
 
CHAPITRE XI. DE DISCONTINUANCE ou Interruption.
SECTION 592.
Discontinuance est un ancient parol en la ley, & ad divers significations, &c. Mes quant a un entent, il ad tiel signification, scavoir, lou un auter alien certaine terres ou tenements & morust, & un auter ad droit de auter mesmes les terres ou tenements, mes il ne poit enter en eux per cause de tiel alienation, &c.
SECTION 592.—TRADUCTION.
Discontinuance est un terme ancien de la Loi qui a diverses significations. Ici il est pris pour désigner l'état où se trouve celui qui ayant des droits sur des tenemens d'un particulier décédé, & qu'il ne représente pas, ne peut cependant entrer en ces tenemens à cause de l'aliénation qui en a été faite par le défunt.
SECTION 593.
Sicome un Abbe seisie de certaine terres ou tenements en fee, & alienast mesmes les terres ou tenements a un auter en fee, ou en fee taile, ou pur terme de vie, & puis labbe morust, son successor ne poit enter en les dits terres ou tenements, coment que il en droit eux aver come en droit de son meason, mes il est mis a son action de recoverer mesmes les terres ou tenements, quel est appelle, Breve de ingressu sine assensu Capituli, (a) &c.
SECTION 593.—TRADUCTION.
Par exemple: Si un Abbé saisi en fief simple de certaines terres, après les avoir cédées en fief simple ou en fief tail, ou pour terme de vie, décede; son successeur ne peut reprendre de lui-même la possession de ces terres, quoiqu'au droit de son Monastere elles soient à lui; mais il est obligé d'obtenir le Bref d'Entrée que l'on appelle sine assensu Capituli.
REMARQUE.
(a) Sine assensu Capituli.
Ces termes étoient employés dans le Bref, parce que l'acte de vente faite par un chef de Monastere étant évidemment illégitime, il étoit inutile d'avoir l'approbation de la Communauté pour la faire annuller.
SECTION 594.
Item, si home seisie de terre come en droit de sa feme, &c. & ent enfeoffa un auter, &c. & morust, la feme ne puit enter, (a) mes est mis a son action, le quel est appel Cui in vita, &c.
SECTION 594.—TRADUCTION.
Qu'un homme saisi d'un fonds au droit de sa femme, inféode ce fonds à un autre & décede, sa femme ne peut reprendre cette possession de sa propre autorité; elle doit avoir recours au Bref Cui in vita.
REMARQUE.
(a) Ne puit enter.
L'héritier du mari pouvoit donner d'autres fonds à la femme, & par-là maintenir l'acquereur dans celui que le défunt lui avoit vendu;[1066] le Bref Cui in vita n'avoit lieu que lorsque les héritiers de son mari ne pouvoient la récompenser de l'aliénation de ses biens.
[1066] Glanville, L. 6.
SECTION 595.
Item, si tenant en taile de certaine terre & enfeoffa un auter, &c. & ad issue & morust, son issue ne poit pas enter en la terre coment que il ad title & droit a ceo, mes est mis a son action que est appel Formedon (a) en le discender, &c.
SECTION 595.—TRADUCTION.
Si un tenant en tail, ayant cédé sa terre à un autre en fief simple, meurt & laisse un enfant, cet enfant ne peut prendre possession de cette terre qu'en vertu d'un Bref de Formedon.
REMARQUE.
(a) Formedon.
La tenure en tail n'étoit point restrainte à celui qui le premier l'acceptoit, elle s'étendoit à tous ceux qui étoient désignés par l'acte d'inféodation. Dans l'espece proposée l'enfant du tenant à tail étant compris dans le don fait à son pere, celui-ci ne pouvoit donc priver son fils de l'effet de ce don; en conséquence on accordoit à cet enfant un Bref Formâ donationis pour suppléer à l'acte de donation auquel il avoit intérêt, & dont son pere l'avoit dépouillé en le transportant à un étranger.
SECTION 596.
Item, si soit tenant en le taile, l' reversion esteant al donor & a ses heires, si le tenant fait feoffement, &c. & morust sans issue, celuy en le reversion ne poit enter, mes est mis a son action de Formedon en le reverter.
SECTION 596.—TRADUCTION.
Supposons un tenant en tail & un Seigneur donataire de la tenure en tail qui s'y est réservé le droit de retour; si le tenant inféode à quelqu'un sa tenure, & meurt sans postérité, le Seigneur ne peut, en vertu du droit qu'il s'est réservé, entrer en possession des fonds sans un Bref de Formedon, où il énoncera que la reversion lui appartient.
SECTION 597.
En mesme l' maner est, lou tenant en le taile seisie de certeine terre dont le remainder est a un auter en le taile, ou a un auter en fee. Si le tenant en le taile alienast en fee, ou en fee taile, & puis deviast sans issue, ceux en le remainder ne poient enter, mes sont mis a lour briefe de Formedon en le remainder, &c. & pur ceo que per force de tielx feoffments & alyenations en les cases avantdits, & en semblables cases, ceux queux ont title & droit apres la mort de tiel feoffour ou alienour, ne poient pas enter, mes sont mises a lour actions Ut supra, & pur ceo cause tiels feoffments & alienations sont appels discontinuances.
SECTION 597.—TRADUCTION.
Ce Bref est encore nécessaire quand un tenant en tail est saisi d'un fonds dont le droit de réversion a été aussi cédé en tail ou en fief simple à un autre; car si le tenant en tail aliene ce fonds à perpétuité ou sous condition, & décede sans enfans, celui qui a le droit de reversion ne peut, de sa propre autorité, entrer sur le fonds. C'est donc parce que dans les différens cas dont on vient de parler, ceux qui ont droit sur des tenemens, après le décès des fieffeurs ou des donateurs, n'y peuvent entrer sans les formalités que l'on appelle les dons ou inféodations qui produisent cet effet, Interruptions.
SECTION 598.
Item, si tenant en taile soit disseisie, & il relessa per son fait a la disseisor, & a ses heires tout le droit, le quel il ad en mesme les tenements, ceo nest pas discontinuance, pur ceo que rien de droit passa all disseisor, forsque pur terme de vie del tenant en le taile que fist le release, &c.
SECTION 598.—TRADUCTION.
Si un tenant en tail est dépossédé, & fait délaissement à celui qui le dépossede & à ses héritiers de tout son droit sur le fonds, ceci n'est pas une discontinuance, parce qu'il ne passe au dépossesseur qu'un droit viager sur le fonds; car le droit du tenant en tail ne pouvant s'étendre au-delà de sa vie, il ne peut faire son délaissement à perpétuité.
SECTION 599.
Mes per feoffment del tenant en le taile, fee simple passa per mesme le feoffement per force de Liverie de seisin, &c.
SECTION 599.—TRADUCTION.
Lorsque le tenant en tail cede sa terre en fief simple, cette cession, suivie de prise de possession, transmet au fieffataire un droit sur la propriété.
SECTION 600.
Mes per force dun release rien passera forsque le droit que il voit loyalment, & droituralment relesser, sans ley de ou damage as auters persons queux ent averont droit apres son decease, &c. Issint il est graund diversity perenter un feoffement dun tenant en le taile, & un release fait per tenant en le taile.
SECTION 600.—TRADUCTION.
Au lieu que par le délaissement on ne cede rien que ce dont on est soi-même en possession, sans préjudice des droits d'autrui, & conséquemment sauf le droit de réversion auquel les fonds qu'on possede sont assujettis. Ainsi il y a une grande différence entre l'inféodation pure & simple faite par un tenant en tail & le délaissement fait par ce même tenant.
SECTION 601.
Mes il est dit, que si le tenant en taile en cest cas relessa (a) a son disseisor, & oblige luy & ses heires a garrantie & morust, & cest garranty discendist a son issue, ceo est discontinuance per cause de le garrantie.
SECTION 601.—TRADUCTION.
Remarquez cependant que si ce tenant en tail fait délaissement à celui qui le dépossede avec garantie, après son décès son héritier, devenant le garant du dépossesseur, ne peut entrer; il y a en ce cas discontinuance ou interruption de son droit.
REMARQUE.
(a) Relessa.
C'est ce que nos Coutumes appellent quittances d'héritages, déguerpissemens. Voyez Coutume de Touraine, art. 198. & suiv. Coutumes de Laudunois, art. 3. ch. 18. & le chap. de Délaissemens ci-dessus.
SECTION 602.
Mes si un home ad issue fits per sa feme, & sa feme morust, & puis il prent auter feme, & tenements sont dones a luy & a sa second feme, & a les heires de lour deux corps engendres, & ils ont issue un auter fits, & le second feme morust, & puis le tenant en le taile est disseise, & il relessa al disseisor tout son droit, &c. & oblige luy & ses heires a le garrantie, &c. & devia, ceo nest pas discontinuance al issue en le taile per l' second feme, mes il poit bien enter pur ceo que le garrantie discendist a son eigne frere (a) que son pier avoit per le primer feme, &c.
SECTION 602.—TRADUCTION.
Un homme a un enfant d'une premiere femme; devenu veuf il en prend une seconde, & durant ce second mariage on lui donne un tenement tant pour lui que pour sa femme & leurs enfans; le donataire a ensuite un fils de sa deuxieme femme, & après le décès de cette femme il est dépossédé & obligé de faire un délaissement à celui qui l'a dessaisi de tous ses droits, avec garantie, à laquelle il s'oblige & ses héritiers: dans cet état, si cet homme meurt, dira-t-on qu'il y a discontinuance au droit du fils du second mariage, ensorte qu'il n'ait point la faculté d'entrer sur le fonds? Non; parce que la garantie ne regarde que le fis aîné du défunt sorti du premier mariage.
ANCIEN COUTUMIER.
Cil qui est querellé n'est pas tenu à respondre en derriere de son aisné du fief qui est venu de ses ancesseurs. Ch. 50.
REMARQUE.
(a) Le garrantie discendist a son eigne frere.
Par le délaissement, le fief conditionnel étant sorti des mains du pere, les fiefs simples qui lui restoient devenoient donc les seuls objets de la garantie du délaissement. Dès lors l'aîné, comme unique héritier de ces fiefs simples, devoit seul cette garantie; & il n'auroit pas été juste que par l'obligation que son pere avoit contractée de faire valoir le délaissement, le cadet eût été privé d'un droit qu'il ne tenoit pas de son pere, mais du donateur.
SECTION 603.
En mesme le manner est, lou tenements sont discendable a le fits puisne, solonque le custome de Burgh English, queux sont entailes, &c. & le tenant en le taile ad deux fits, & est disseisie, & il relessa a son disseisor tout son droit oue garrantie, (a) &c. & morust, le puisne fits poit enter sur le disseisor, nient obstant le garrantie, pur ceo que le garrantie discendist al eigne fits, car touts foits le garrantie discendera a celuy que est heire per le common ley.
SECTION 603.—TRADUCTION.
Il y a le même motif de décision lorsque des fonds situés en bourgage Anglois ont été donnés en tail à un homme qui meurt ayant deux enfans, & après avoir délaissé à celui qui l'a dépossédé de ces fonds tout son droit avec garantie; car le fils puîné peut entrer, nonobstant cette clause de garantie, sur les fonds, parce que c'est l'aîné qui, selon la commune Loi, est héritier des biens de son pere situés hors bourgage, & conséquemment garant du délaissement fait par ce dernier.
REMARQUE.
(a) Garrantie.
Voyez Sections 718, 735, 736, 737. du Chap. de Garantie infrà.
SECTION 604.
Item, si un Abbe soit disseisie, & il relessa a le disseisor ouesque garrantie, ceo nest pas discontinuance a son successor, pur ceo que rien passa per cel releas, forsque le droit que il ad durant le temps que il est Abbe, & le garrantie est expire per son privation, ou per sa mort.
SECTION 604.—TRADUCTION.
Si un Abbé étant dessaisi délaisse à celui qui l'a dépossédé ses droits avec garantie, ce délaissement n'interrompt point le droit de son successeur, puisque ce délaissement ne peut s'étendre au-delà du temps de la jouissance de celui qui l'a fait; ensorte que dans ce cas la garantie expire au moment du décès ou de la destitution de celui qui s'y est obligé.
SECTION 605.
Item, si home seisie en droit sa feme est disseisie, & il relessa, &c. oue garrantie, ceo nest pas discontinuance a la feme si el survesquist son baron, mes que el poit enter, &c. Causa patet.
SECTION 605.—TRADUCTION.
Si un homme possede un fonds au droit de sa femme, le délaissement qu'il fait avec garantie ne peut interrompre l'usage du droit de cette femme; conséquemment après le décès de son mari elle peut entrer.
SECTION 606.
Item, si tenant en taile de certaine terre, lessa mesme la terre a un auter pur terme des ans, per force de quel le lessee en eit possession, en quel possession le tenant en taile per son fait relessa tout le droit que il avoit en mesme le terre, a aver & tener a le lessee & a ses heires a touts jours, ceo nest pas discontinuance, mes apres le decease l' tenant en taile, son issue poit bien enter, pur ceo que per tiel release riens passa forsque pur terme de la vie de le tenant en le taile.
SECTION 606.—TRADUCTION.
Quand un tenant en tail a cédé sa terre pour plusieurs années à un autre qui s'en met en possession, si le cédant fait ensuite délaissement au cessionnaire & à ses hoirs à perpétuité de tous ses droits sur cette terre, il n'y a point en ce cas de discontinuance, & après le décès du tenant en tail, son fils peut rentrer sur les fonds; car son pere n'a pu faire délaissement que pour le temps qu'il vivroit.
SECTION 607.
En mesme le manner est, si le tenant en le taile, confirma lestate le lessee pur terme des ans, a aver & tener a luy & a ses heires, ceo nest pas discontinuance, pur ceo riens passa per tiel confirmation forsque lestate que le tenant en le taile avoit pur terme de sa vie, &c.
SECTION 607.—TRADUCTION.
C'est la même chose si un tenant en tail confirme l'état de son cessionnaire à terme d'ans, parce que la confirmation ne donne au cessionnaire que l'état dont le cédant jouit lui-même pendant sa vie.
SECTION 608.
Item, si tenant en taile apres tiels leas granta le reversion en fee per son fait a auter, & voile que apres le terme fine, que mesme le terre remaindroit a le grantee & a ses heires a tout jours, & le tenant a terme dans atturna, ceo nest pas discontinuance. Car tiels choses queux passont en tiels cases de tenant en le taile tant solement per voy de graunt, ou per confirmation, ou per tiel release, rien poit passer pur faire estate a celuy a que tiel graunt, ou confirmation, ou release est fait forsque ceo que le tenant en taile poit droiturelment faire, & ceo nest forsque pur terme de sa vie, &c.
SECTION 608.—TRADUCTION.
Si ce tenant en tail après avoir cédé pour plusieurs années sa tenure en donne à un autre le droit de réversion, à condition qu'après que la cession à terme d'ans sera expirée, la terre restera au donataire du droit de réversion & à ses successeurs; quoique le tenant à terme agrée cette condition, cependant il n'y a point en ce cas de discontinuance: car tout tenant en tail ne peut jamais donner, céder, délaisser ni confirmer à qui que ce soit rien autre chose que la jouissance viagere qui lui appartient.
SECTION 609.
Car si jeo lessa terre a un home pur terme de sa vie, &c. & le tenant a terme de vie lesse mesme la terre a un auter pur terme des ans, &c. & puis mon tenant a terme de vie granta le reversion a un auter en fee, & le tenant a terme des ans atturna, en cest case le grantee nad en le franktenement forsque estate pur terme de vie son grauntor, &c. & jeo que suis en le reversion de fee simple, ne puisse enter per force de cel grant del reversion fait per mon tenant a terme de vie, pur ceo que per tiel grant mon reversion nest pas discontinue, mes tout temps demurt a moy, sicome il fuit adevant, nient obstant tiel grant del reversion fait al grantee a luy & a ses heires, &c. pur ceo que riens passa per force de tiel grant forsque estate que le grantor avoit, &c.
SECTION 609.—TRADUCTION.
En effet, je laisse une terre à quelqu'un pour sa vie, celui-ci la donne pour plusieurs années à un autre, ensuite mon tenant à vie cede encore à un autre en fief le droit de réversion; ce dernier, quoique le tenant à terme d'ans ait agréé la cession, n'a cependant état sur la jouissance que pendant la vie de celui de qui il tient le droit de réversion, & mon droit de retour que j'ai en la propriété n'est point discontinué; parce que, on le répete, un tenant à vie ne peut céder rien au-delà du terme de sa propre jouissance.
SECTION 610.
En mesme le maner est, sil le tenant a terme de vie, per son fait confirme lestate son lessee pur terme des ans, a aver & tener a luy & a ses heires, ou relessa a son lessee & a ses heires, uncore le lessee a terme dans nad estate forsque pur terme de vie de le tenant a terme de vie, &c.
SECTION 610.—TRADUCTION.
Voici encore une espece à laquelle cette maxime s'applique naturellement. Si un tenant viager confirme l'état de celui à qui il a cédé le fonds pour quelques années, ou lui fait délaissement, à l'effet que ce cessionnaire & ses héritiers en jouissent, en ce cas le cessionnaire n'a état que pendant la vie du tenant viager.
SECTION 611.
Mes auterment est quant tenant a terme de vie, fait un feoffement en fee, car per tiel feoffement le fee simple passa. Car tenant a terme dans poit faire feoffment in fee, & per son feoffement le fee simple passera, & uncore il navoit al temps del feoffement fait forsque estate pur terme dans, &c.
SECTION 611.—TRADUCTION.
Il ne faut pas confondre l'espece qu'on vient de proposer avec celle où un tenant viager vend à titre de fief simple sa tenure: car cette vente empêcheroit le droit d'entrée, quand même le vendeur n'auroit été tenant que pour quelques années.
REMARQUE.
SECTION 612.
Item, si tenant le taile granta son terre a un auter pur terme de vie de mesme le tenant en taile, & liver a luy seisin, &c. & apres per son fait il relessa a le tenant & a ses heires tout le droit quel el avoyt en mesme la terre, en cest cas lestate del tenant de la terre nest pas enlarge per force de tiel releas, pur ceo que quant le tenant avoit lestate en le terre pur terme de vie de le tenant en le taile, donque il avoit tout le droit que le tenant en le taile puissoit droiturelment granter ou relessor, issint que per tiel releas nul droit passa, entant que son droit fuit ale adevant.
SECTION 612.—TRADUCTION.
Si un tenant en tail donne pour le temps de sa propre vie sa terre à un autre, & après l'avoir mis en possession délaisse tout son droit au donataire & à ses héritiers, ce délaissement ne change point l'état de ce dernier: car lorsque ce donataire avoit son état sur le fonds pour tout le temps que vivroit le tenant en tail, il avoit dès lors tout le droit que ce tenant en tail possédoit lui-même.
SECTION 613.
Item, si tenant le taile per son fait grant a un auter tout son estate que il avoit en les tenements a luy tailes, a aver & tener tout son estate al auter & a ses heires a touts jours, & delivera a luy seisin accordant, en cest cas le tenant a que lalienation fuit fait, nad auter estate forsque pur terme de vie del tenant en taile, & issint il poit bien estre prove, que le tenant en taile ne poit pas graunter ne aliener ne faire ascun droiturel estate de franktenement a auter person, forsque pur terme de sa vie demesne, &c.
SECTION 613.—TRADUCTION.
Quand un tenant en tail cede tous les droits qu'il a sur un fonds à un autre à perpétuité, tant pour ce dernier que pour ses successeurs; quoique cette cession soit suivie de prise de possession, cependant le cessionnaire n'a d'état que pour la vie du cédant: ce qui prouve bien que tout tenant viager ne peut aliéner que pour le temps de la jouissance qui lui appartient.
SECTION 614.
Car si jeo done terre a un home en taile savant le reversion a moy, & puis le tenant en le taile enfeoffa un auter en fee le feoffee nad pas droiturel estate en les tenements pur deux causes. Un est, pur ceo que per tiel feoffement ma reversion est discontinue, le quel est a tort fait, & nemy a droit fait. Un auter cause est, si l' tenant en taile morust, & son issue suist Briefe de Formedon envers le feoffee, l' briefe dirra, & auxy le count, &c. que l' feoffee a tort luy deforce, &c. Ergo sil a tort luy deforce, &c. (a) il nad pas droiturel estate.
SECTION 614.—TRADUCTION.
Supposons que je donne en tail une terre, en me réservant le droit de retour après la condition expirée; si après cela mon tenant en tail transporte sa tenure à un autre en fief simple, quoique mon droit de réversion se trouve par-là interrompu, cependant l'acquereur n'a pas pour cela un état légitime, pour deux raisons: la premiere, parce qu'en interrompant l'exercice de mon droit, il me cause du dommage; & la deuxieme, parce que si le tenant en tail meurt, son héritier peut révendiquer le fonds en vertu d'un Bref de Formedon: or, ce Bref porte expressément ces termes: qu'il est accordé à tel... parce qu'on lui retient à tort son héritage: donc si c'est à tort, selon le Bref, qu'on le lui retient, la possession du détenteur n'est pas légitime.
REMARQUE.
(a) Deforce, &c. defortiamentum id est per vim aufferre vel impedire.[1067]
[1067] Glossar. Willelm. Wast. verbo Defortiare.
Du Cange indique les loix d'Alfred & autres Rois d'Angleterre antérieurs à Guillaume le Conquérant pour l'intelligence de cette expression; mais il auroit dû faire observer qu'elle n'a passé dans la traduction Latine de ces loix qu'après l'introduction des Coutumes Normandes en Angleterre. Déforcer est un ancien mot françois. Fortia est pris pour force dans la 28e. Formule du L. 1er. de Marculphe. Fidelis noster ille ad præsentiam nostram veniens, clementiæ regni nostri suggessit eo quod pagensis vester ille eidem terram suam per fortiam tulisset & post se retineat injustè, &c. Force, dit le vieux Coutumier Normand, est tort qui est fait à quelqu'un malgré soi contre la paix du pays & contre la dignité au Duc de Normandie, & pour ce qu'il appartient au Duc qu'il gouverne en paix le peuple qui est sous lui, il est tenu à chastier ceulx qui à force brisent la paix, & pour ce l'en doibt savoir que s'aulcun met un aultre hors de la possession de son fief à force: il appartient à la justice de enquérir de ce dedens lan que la force a été faite & en doibt faire rendre la possession à celui qui en a été dépouillé: ainsi doibt-on faire des aultres forces où il n'y a péril de vie. Ch. 52.
SECTION 615.
Item, si terre soit lesse a un home pur terme de sa vie le remainder a un auter en le taile, si celuy en le remainder voile graunter son remainder a un auter en fee per son fait, & le tenant a terme de vie atturna, ceo nest pas discontinuance de le remainder.
SECTION 615.—TRADUCTION.
Quand un fonds est laissé à un homme pour sa vie, & le droit de réversion à un autre en tail, si celui-ci cede à titre de fief simple ce droit de réversion du consentement du tenant viager, cette cession n'interrompt pas le droit de réversion.
SECTION 616.
Item, si home ad Rent service ou Rent charge en taile, & il granta le dit rent a un auter en fee, & le tenant attorna, ceo nest pas discontinuance, &c.
SECTION 616.—TRADUCTION.
Il n'y a pas de discontinuance ou interruption lorsqu'un créancier d'une Rente de service ou d'une Rente-charge qui lui a été cédée en tail la vend à un autre en fief simple, quoique le débiteur ait agréé la vente.
SECTION 617.
Item, si home soit tenant en taile, de un advowson en grosse, (a) ou de un common en grosse, sil per son fait voile graunt ladvowson, ou le common a un auter en fee, ceo nest pas discontinuance. Car en tielx cases les grauntees nont estate forsque pur terme de vie de le tenant en taile que fist le grant, &c.
SECTION 617.—TRADUCTION.
Si un homme tient en tail un Patronage ou un droit de Commune en gros, il n'interrompt pas le droit de réversion qui appartient à son Seigneur en vendant en fief simple ce droit de Commune ou ce Patronage: car la vente, en ce cas, n'a d'effet que pour la vie du vendeur.
REMARQUE.
(a) En grosse.
Tenir en gros, c'est tenir un droit, qui, par sa nature, est indivisible. Par exemple, les Patronages d'Eglises, les servitudes des fonds ne soeffrent point de perticions en lour singulerte;[1068] c'est-à-dire, que quoique plusieurs pussent participer à ces droits, cependant plusieurs ne pouvoient pas en jouir en même-temps. Ainsi quand divers héritiers étoient propriétaires d'un Patronage, tous ne présentoient pas au bénéfice lorsqu'il devenoit vacant; ils convenoient ordinairement entr'eux d'y présenter chacun à leur tour; & sans cette convention, si l'un des héritiers prétendoit, à raison de son âge ou pour d'autres raisons, présenter le premier, la présentation ne pouvoit s'effectuer tant que les autres cohéritiers s'y opposoient. Le Patronage étoit donc possédé en gros par tous, puisqu'il ne pouvoit s'exercer que de leur commun consentement. Il en étoit de même du droit de Communes ou autres servages de même genre; chacun de ceux auxquels ces droits appartenoient ne pouvoit pas faire seul pâturer le fonds: tous pouvoient s'arranger, soit pour le temps où ils pourroient en faire usage, ou déterminer le nombre de bestiaux dont ils chargeroient séparément le fonds assujetti à leur droit;[1069] mais aucun d'eux ne pouvoit en jouir exclusivement.
[1068] Britton, c. 72, fol. 187, verso.
[1069] Ibid.
SECTION 618.
Et nota, que de tiels choses que passont per voy de grant per fait fait en pays, & sans livery, la tiel graunt ne fait pas discontinuance, come en les cases avantdits, & en auter cases semblables, &c. coment que tiels choses sont graunts en fee per fine levie en le Court le Roy, (a) &c. uncore ceo ne fait discontinuance, &c.
SECTION 618.—TRADUCTION.
Observez que toute donation de fonds, faite même par acte passé dans le lieu où il est situé, n'apporte aucun obstacle aux droits de retour ou de succession, lorsque cet acte n'a pas été suivi de prise de possession. Les exemples proposés dans les articles précédens ont dû le prouver. J'ajoute encore que la donation sans possession n'auroit pas plus d'effet, quand même elle seroit fondée sur une transaction passée en la Cour du Roi.
REMARQUES.
(a) Fine levie en le court le Roi.
Dans le Recueil connu sous le nom de Glanville,[1070] on trouve cette Formule de Transaction passée en la Cour du Roi.
Hæc est finalis Concordia facta in curiâ Galfridi filii Petri, & postmodum recordata & irrotulata in curiâ Domini Regis West-Monasterii, anno regni Regis Henrici secundi 33a. die Lunæ proximâ post Festum Apostolorum Simonis & Jude, coram E. Eliensi[1071] Episcopo & J. Norvviensi[1072] Episcopo & Ranulpho Glanvillâ justiciario Domini Regis ibi tunc præsentibus inter prædictum G Filium Petri & R Filium Reginaldi de advocatione Ecclesie omnium sanctorum de Shuldam & de communiâ pasture de Heddon unde contentio fuerat inter eos scilicet quod predictus R recognovit predicto G sicut jus suum advocationem predicte Ecclesie, & quietum clamavit predicto G, & heredibus suis de se & heredibus suis in perpetuum, si quid juris in advocatione predicte Ecclesie habuerit preterea, predictus R quietum clamat predicto G communiam pasture de Heddon, & omnes Purpresturas,[1073] quas G fecerat in Shuldam in Frusseto,[1074] & molendinis & Crostis,[1075] & Turbariis[1076] de Shuldam, unde ipse R nihil retinet nisi quod opus erit ad comburendum in domo suâ sibi & heredibus suis sine aliquâ venditione, & omnes Faldas,[1077] forinsecas (exceptâ suâ propriâ), & precarias carucarum forinsecarum & consuetudines gallinarum & ovorum, & pro hâc concordiâ & quietâ clamantiâ dedit predictus G. dicto R. viginti marcas argenti.
[1070] L. 8, c. 3.
[1071] Eli, Ville du Comté de Cambridge. L'Evêque de cette Ville est Suffragant de Cantorbery.
[1072] Norwick dans le Comté de Norfolck, dont l'Evêque est sous la même Métropole que celui d'Eli.
[1073] Ce mot signifie ici des pourpris ou petites masures closes.
[1074] Frussetum, écachon, petit morceau de terre indépendant de toute habitation.
[1075] Tente, grotte destinée aux gardiens de troupeaux.
[1076] Terres d'où l'on tire des courbes.
[1077] Parc où l'on faisoit pernocter les bestiaux.
Les transactions passées en la Cour du Roi étoient irrélevatoires; mais lorsque les doubles des actes qui les contenoient ne s'accordoient pas entr'eux, on avoit la voie de faire recorder les conventions telles qu'elles avoient été arrêtées entre les parties.[1078]
[1078] Glanville, fol. 61.
SECTION 619.
Nota, si jeo donne terre a un auter en taile, & il lessa mesme la terre a un auter pur terme dans, & puis le lessor graunta le reversion a un auter en fee, & le tenant a terme dans atturna al grantee, & le terme est expire durant la vie le tenant en taile per que le grantee enter, & puis le tenant en taile ad issue & devie, en ceo case ceo nest discontinuance, nient obstant que le grant soit execute en la vie le tenaunt en taile, pur ceo que al temps de lease fait a terme dans, nul novel fee simple fuit reserve en le lessor, eins le reversion demurt a luy en taile sicome il fuit devant le lease fait.
SECTION 619.—TRADUCTION.
Nota. Que si après que j'ai donné ma terre à un homme en tail, mon donataire cede cette terre à quelqu'un pour plusieurs années, & à un autre le droit de retour en fief simple; quoique le tenant à terme d'ans ait approuvé ensuite cette aliénation du droit de réversion, ou même que le terme de sa tenure soit expiré durant la vie de mon tenant en tail, & que l'acquereur du droit de réversion ait pris possession de la terre, cependant après la mort de mon tenant en tail le droit d'entrée, qui appartient à l'héritier du tenant en tail, n'est pas pour cela interrompu. En effet, malgré la prise de possession effectuée par l'acquereur en fée simple pendant la vie de son vendeur, il est évident que, par l'acte de donation de la terre à terme d'ans, le donataire n'avoit reconnu dans le donateur aucun autre droit que celui de réversion du fonds pour les héritiers de ce dernier, tant que la condition ou tail de leur tenure subsisteroit, & conséquemment le donataire n'est pas réputé avoir approuvé la cession en fief simple dont l'hérédité ne souffre aucune restriction.
REMARQUE.
Cette Section a été ajoutée au texte de Littleton.[1079]
[1079] Coke, fol. 332, verso.
SECTION 620.
Mes si le tenant en taile fait leas a terme de vie le lessee, &c. en cest case le tenant en le tayle ad fait un novel reversion de fee simple en luy, pur ceo que quant il fist leas pur terme de vie, &c. il discontinua le taile, &c. per force de mesme le leas, & auxy il discontinua ma reversion, &c. & il covient que la reversion de fee simple soit en ascun person en tiel cas, & il ne poit estre en moy que sue donor, entant que mon reversion est discontinue. Ergo il covient que la reversion de fee soit en le tenant en le taile, que discontinua ma reversion per tiel leas, &c. Et si en cest case le tenant en le taile graunta per son fait cest reversion en fee a un auter, & le tenant a terme de vie atturna, &c. & puis le tenant a terme de vie morust, vivant l' tenant en le taile, & le grantee de le reversion entra, &c. en la vie le tenant en le taile, donque ceo est un discontinuance en fee, & si apres le tenant en le taile morust, son issue ne poit enter, mes est mis a son briefe de Formedon. Et la cause est, pur ceo que cestuy que avoit l' grant de tiel reversion in fee simple, avoit le seisin & execution de mesmes les terres ou tenements, daver a luy & a ses heires en son demesne come de fee, en la vie l' tenant en taile, & ceo est per force de grant de mesme le tenant en taile.
SECTION 620.—TRADUCTION.
Quand mon tenant en tail cede sa terre à quelqu'un pour tout le temps que ce dernier vivra, &c. alors le tenant en tail établit en sa faveur un nouveau droit de réversion sur la propriété; car par cette cession il interrompt la tail ou condition de sa tenure, en ce que cette condition ne devoit s'effectuer que par son propre décès & à mon seul bénéfice. D'ailleurs la réversion de la propriété ne peut appartenir sur une tenure qu'à une seule personne: or, elle ne m'appartient pas en vertu de la cession de mon tenant. Cette cession, de sa part, a donc interrompu mon droit. Cela est tellement constant, que si mon tenant en tail donne la réversion qu'il a sur l'inféodation qu'il a faite à vie, & si le feudataire viager agrée ensuite cette donation; dans le cas où ce feudataire décede tandis que mon tenant en tail est encore vivant, le donataire du droit de réversion, en prenant possession du fonds aussi pendant que mon tenant existe, l'héritier de ce dernier, après son décès, est privé d'entrer dans le fonds, & il n'a que la voie de recourir au Bref de Formedon. L'équité de ces regles est fondée sur ce que tout donataire d'un droit de réversion en fief simple a, tant pour lui que pour ses héritiers, le droit de propriété pendant la vie de son donateur, & qu'on ne peut être dépouillé d'une propriété que par les Brefs établis à cet effet.
SECTION 621.
En mesme le manner serra, si en le case avant dit, le tenant a terme de vie après lattournement al grantee ust alien en fee, & le grantee ust enter pur forfeiture de son estate, (a) & puis le tenant en taile ust devie, cest un discontinuance, Causa qua supra.
SECTION 621.—TRADUCTION.
Il faudroit faire le même raisonnement si, dans l'espece qu'on vient de proposer, le tenant viager, après avoir approuvé ou attourné le don de la réversion, aliénoit le fonds en fief simple: car en supposant que le donataire de la réversion eût pris ensuite possession de ce fonds pour forfaiture commise par le tenant en fief simple, mon droit d'entrée seroit interrompu après le décès de mon tenant en tail.
REMARQUE.
(a) Forfeiture de son estate.
Forfaiture se prend quelquefois pour ce que l'on fait au préjudice des droits d'autrui;[1080] mais dans sa signification la plus ordinaire, il exprime la peine dûe à ceux qui contreviennent à une loi ou à une convention. C'est en ce dernier sens qu'il est employé ici & dans divers Capitulaires.[1081] Forfaire son état, c'étoit donner ouverture à ce que celui de qui on l'avoit obtenu, le reprit, le confisquât. Voyez, sur la différence qu'il y a entre la Forfaiture & la Felonie, la remarque sur la Section 745.
[1080] Voyez Section 74 suprà.
[1081] Capitul. Pipini, anno 793, art. 20.
SECTION 622.
Mes en cest case, si tenant en taile que granta le reversion, &c. morust, vivant le tenant a terme de vie, & puis le tenant a terme de vie morust, & puis celuy a que le reversion fuit graunt enter, &c. donque ceo nest pas discontinuance, mes que lissu del tenant en taile poit bien enter sur le grauntee del reversion, pur ceo que le reversion que le grauntee avoit, &c. ne fuit execute, &c. en le vie le tenant en taile, &c. Et issint il est graund diversitie (a) quant tenant en taile fait un leas pur terme dans, & lou il fait leas pur terme de vie, car en lun cas il ad reversion en taile, & en lauter cas il ad un reversion en fee.
SECTION 622.—TRADUCTION.
Un tenant en tail donne son droit de réversion, & décede tandis que son tenant à terme de vie est encore vivant; ce tenant viager meurt ensuite, & celui qui a la réversion entre sur le fonds: cette entrée n'interrompt pas celle qui appartient à celui qui a la réversion de la tenure en tail; parce que le donataire de la réversion du tenement viager n'a pas pris possession pendant la vie de son donateur. Au reste, il est bien essentiel d'observer que lorsqu'un tenant en tail cede sa terre pour plusieurs années, il n'a la réversion qu'en tail; mais lorsqu'il cede cette terre pour la vie du cessionnaire, il s'attribue la réversion en fief simple.
REMARQUE.
(a) Graund diversitie.
Dans le premier cas le tenant en tail ne faisoit aucun tort à son Seigneur, il ne changeoit rien aux conditions de sa jouissance; dans le second, il s'attribuoit des droits sur la propriété en tant que celui à qui il cédoit son fonds pouvoit vivre plus long-temps que lui, & le cessionnaire jouir conséquemment du fonds, qui, par la nature de l'inféodation & par la mort du cédant, devoit retourner au Seigneur.
SECTION 623.
Car si terre soit done a un home & a ses heires males de son corps engendres, le quel ad issue deux fits, & leigne fits ad issue file & devy, & le tenant en taile fait un leas pur terme des ans, & devy, ore le reversion discendist a le fits puisne, pur ceo que le reversion fuit forsque en le taile, & le fits puisne est heire male, &c. Mes si le tenant ust fait un leas pur terme de vie, &c. & puis morust, ore le reversion discendist a le file del eigne fits, pur ceo que le reversion est en fee simple, & la file est heire generall, &c.
SECTION 623.—TRADUCTION.
Un tenement est donné en tail à un homme & à ses enfans mâles; cet homme a deux fils, l'aîné, après avoir eu une fille, décede; le pere cede le tenement pour plusieurs années, & meurt aussi; la terre, en ce cas, retourne-t-elle au fils puîné? Oui: parce que la réversion de la terre n'est qu'en tail, & que, suivant cette tail ou condition, les mâles y peuvent seuls succéder.
Mais si le pere avoit cédé le tenement pour le temps de la vie du cessionnaire, après son décès la fille du fils aîné auroit eu le droit de réversion; parce qu'alors cette réversion auroit été en fief simple, & les filles des aînés sont, comme leurs peres, les héritieres de ces sortes de fiefs.
SECTION 624.
Item, si home soit seisie en taile de terres devisables per testament, &c. & il ceo devisa a un auter en fee, & morust, & lauter enter, &c. ceo nest pas discontinuance, pur ceo que nul discontinuance fuit fait en la vie del tenant en le taile, &c.
SECTION 624.—TRADUCTION.
Si un homme saisi en tail de terres, dont on peut disposer par testament, les legue à quelqu'un en fief simple, & décede; le légataire, en prenant possession des fonds, n'interrompt pas le droit d'entrée de ceux qui ont le retour de la terre; parce qu'il n'a pas entré lui-même sur le fonds du vivant du tenant en tail.
SECTION 625.
Item, si terre soit done en taile, savant le reversion al donor, & puis l' tenant en taile per son fait enfeoffa l' donor a aver & tener a luy & a ses heires a touts jours, & liver a luy seisin accordant, &c. ceo nest pas discontinuance, pur ceo que nul poit discontinuer lestate en le taile, sinon que il discontinue le reversion celuy que ad le reversion, &c. ou le remainder, si ascun ad le remainder, &c. & entant que per tiel feoffment fait a le donor (le reversion adonque esteant en luy) son reversion ne fuit discontinue ne alterate, &c. cest feoffment nest pas discontinuance, &c.
SECTION 625.—TRADUCTION.
Qu'une terre soit donnée en tail avec réserve du droit de réversion de la part du donateur; si le tenant en tail cede ensuite, à titre de fief simple, sa terre à ce donateur, tant pour lui que pour ses héritiers, & le met en possession, cette cession n'interrompt point les droits des enfans du tenant en tail; parce que pour interrompre l'état de la tail ou la condition d'une tenure, il faut qu'il y ait interruption au droit de celui qui a la réversion de cette tenure. Or, dans l'espece dont il s'agit ici, la réversion du fief à tail n'est pas interrompue, puisque le fief simple est donné à celui même à qui la réversion de ce fief appartient.
SECTION 626.
En mesme le manner est, lou terres sont dones a un home en taile, le remainder, a un auter en fee, & le tenant en taile enfeoffa celuy, que est en le remainder, a aver & tener a luy & a ses heires, ceo nest pas discontinuance, Causa qua supra.
SECTION 626.—TRADUCTION.
On doit décider de la même maniere quand des terres sont données en tail, & lorsque le droit de propriété de ces terres, après la tail ou condition expirée, est cédé à un autre à titre de fief simple: car si le tenant en tail vend à ce même titre ses fonds à celui qui est cessionnaire du droit de propriété, à l'effet qu'il en jouisse & ses successeurs à perpétuité, celui-ci n'éprouve dans ses droits aucune discontinuance ou interruption.
SECTION 627.
Item, si un Abbe ad un reversion ou Rent service, ou Rent charge, & voile graunter cel reversion, ou Rent service, ou Rent charge a un auter en fee, & le tenant atturna, &c. ceo nest pas discontinuance.
SECTION 627.—TRADUCTION.
Si un Abbé a un droit de réversion, ou une Rente de service ou une Rente-charge, il n'interrompt point le droit des successeurs du tenant en aliénant en fief simple la réversion ou les rentes qui lui appartiennent, quand même il feroit agréer son aliénation par le tenant.
SECTION 628.
En mesme le manner lou Abbe est seisie dun Advowson, ou de tielx choses que passont per voy de grant sans liverie de seisin, &c.
SECTION 628.—TRADUCTION.
Il en est de même quand un Chef de Monastere est saisi d'un Patronage, ou autres droits de pareille nature, qui passent de droit aux acquereurs, sans qu'il soit besoin de prise de possession.
SECTION 629.
Item, si tenant en taile lessa sa terre a un auter pur terme de vie, & puis il graunta en fee le reversion a un auter, & l' tenant atturna, & puis le tenant a terme de vie aliena en fee, & le grantee de reversion entre, &c. en le vie le tenant en le taile, & puis le tenant en le taile morust, son issue ne poit enter, mes est mis a son Briefe de Formedon, pur ceo que le reversion en fee simple que le grauntor avoit per le grant del tenant en le taile fuit execute en le vie de mesme le tenaunt en le taile, & pur ceo est un discontinuance en fee, &c.
SECTION 629.—TRADUCTION.
Un tenant en tail cede sa terre à quelqu'un pour sa vie, & en vend en fief simple la réversion à un autre, le cessionnaire viager agrée cette vente, & ensuite en fait une du fonds, aussi en fief simple; l'acquereur du droit de réversion entre sur le fonds durant la vie de son vendeur tenant en tail, lequel décede: on demande si en ce cas l'héritier de ce dernier peut reprendre la possession du fonds? La négative ne peut être révoquée en doute. Cet héritier ne peut entrer qu'en vertu d'un Bref de Formedon, parce que celui qui a acquis du tenant en tail la réversion en fief simple, s'est mis en possession du vivant de son vendeur, & par-là a interrompu tout droit sur la propriété.
SECTION 630.
Et nota, que ascuns sont discontinuances pur terme de vie. Sicome tenant en le taile fait un lease pur terme de vie, savant le reversion a luy, auxy longement que le reversion est al tenant en taile, ou a ses heires, ceo nest discontinuance, forsque durant la vie le tenant a terme de vie, &c. Et si tiel tenant en taile dona les tenements a un auter en taile, savant le reversion, donques ceo est discontinuance durant le second taile, &c.
SECTION 630.—TRADUCTION.
Nota. Qu'il y a des discontinuances ou interruptions pour la vie seulement. Par exemple, un tenant en tail cede ses fonds pour le temps de la vie du cessionnaire, & s'en réserve & à ses héritiers la réversion pour & autant que la tenure en tail durera. Ceci n'est pas une interruption à la propriété, puisque la réserve ne s'étend point au-delà de la durée de la tenure en tail.
SECTION 631.
Mes lou le tenant en taile fait un lease pur terme dans, ou pur terme de vie, le remainder a un auter en fee, & delivere liverie de seisin accordant ceo est discontinuance en fee, pur ceo que le fee simple passa per force de liverie de seisin, &c.
SECTION 631.—TRADUCTION.
Si cependant le tenant en tail cédoit les fonds pour plusieurs années ou pour la vie du cessionnaire, & en donnoit en fief simple la réversion à un tiers, lequel, en conséquence, en prendroit possession; en ce cas la prise de possession opéreroit une discontinuance, &c.
SECTION 632.
Et est ascavoir que ascuns tiels discontinuances sont fait sur condition, &c. & pur ceo que les conditions sont enfreints, &c. ou pur auters causes, solonque le course en la ley, tiels estates sont defeates, donques sont les discontinuances defeates, & ne tollent ascun home per force de eux, de son entrie, &c. Come si le baron soit seisie de certain terre en droit sa feme, & fait feoffement en fee sur condition, & devie, si le heire apres enter sur le feoffee pur le condition enfreint, lentrie la feme est congeable sur le heire, pur ceo que per lentre del heire le discontinuance est defeat, come est adjudge.
SECTION 632.—TRADUCTION.
Il y a aussi des discontinuances sous condition; mais quand la condition n'est pas effectuée, ces sortes de discontinuances sont sans effet & ne peuvent priver personne de leur droit d'entrée. Ainsi lorsqu'un mari au droit de sa femme, saisi d'un fonds après l'avoir donné à fief sous condition, décede, si l'héritier du donateur entre dans le fonds, parce que le feudataire n'a pas rempli la condition, la femme, en ce cas, peut de plein droit expulser l'héritier de son mari; parce que la prise de possession de cet héritier n'a eu pour motif que la nullité d'un acte qui seul pouvoit interrompre le droit que la femme avoit d'entrer en jouissance des fonds.
SECTION 633.
Item, si feme inheritrix que ad un baron, quel baron est deins age, & il esteant deins age fait un feoffement de les tenements son fee en fee, & morust, il ad este question, si la feme poit enter ou non, &c. Et il semble a ascuns, que lentry la feme apres la mort sa baron, est congeable en cest cas. Car quant sa baron feasoit tiel feoffment, &c. il puissoit bien enter, (a) nient contristeant tiel feoffment, &c. durant la coverture, & il ne puissoit enter en son droit demesne, mes en le droit la feme, Ergo tiel droit que il avoit dentrer en droit sa feme, &c. cest droit dentrer demurt al feme apres son decease.
SECTION 633.—TRADUCTION.
Cependant quand une femme, héritiere de fonds, épouse un mineur, lequel, après avoir, durant sa minorité, aliéné à titre de fief simple les biens de sa femme, décede, on a douté si la femme pouvoit entrer sur les fonds après la mort de son mari; mais il est certain que comme ce mari, à cause de sa minorité, auroit lui-même pu de son vivant rentrer dans le fonds au droit de sa femme, celle-ci, à plus forte raison, après le décès de son mari, a cette même faculté.
REMARQUE.
(a) Il puissoit bien enter.
Le mariage n'émancipoit donc pas. La question de sçavoir si le mariage émancipe les enfans est encore indécise. Selon les anciennes Coutumes de Normandie, qui ont été reçues dans la suite en Angleterre & en Ecosse, le mariage n'émancipoit que pour mettre le mari en état de défendre ses possessions, celles de ses femme & enfans, & non pour aliéner leurs propriétés:[1082] Meliorem enim conditionem facere potest minor, deteriorem nequaquam.[1083]