Au Sahara : $b Illustré d'après des photographies de l'auteur
ÉPILOGUE
Tout cela n’est plus que souvenir. Rentré dans le cadre de ma vie ancienne, entouré des visages et des objets familiers, je me demande parfois si je l’ai traversé, ce beau pays de mirage, si tout cela n’est pas un rêve…
Alors je ferme les yeux, je me recueille et voici ce que je vois.
… C’est la marche de cinq heures. Les méhara ont soif et nos gosiers sont desséchés. Soudain, à l’horizon, les guides aperçoivent des points qui remuent. On pousse à eux. Voici un petit berger saharien, perdu avec ses chèvres, entre le ciel et le sable. Il accourt pour nous baiser la main. Il lève vers nous, avec son sourire blanc, dans sa figure brûlée, une petite écuelle de bois où le lait écume. Puis nous reprenons la route, au rythme des sonnailles et de la petite flûte rafraîchie.
Non, non, je ne rêve point. J’ai vraiment bu ce lait, je me suis recueilli pendant le silence des heures chaudes au pied des gours, dans la flaque d’ombre du drîne. J’ai longuement passé au crible tout ce que j’ai trouvé dans ma tête, dans mon cœur. Le bagage qui me reste est léger. Il suffira — si Dieu le veut — à me conduire au bout de l’autre voyage.