Le ménagier de Paris (v. 1 & 2)
Chière seur, par ce que dit est vous povez veoir qu’est diligence et qu’est persévérance, et ainsi, chière seur, est le premier article démonstré.{v. 2, p.43}
LE SECOND ARTICLE
DE LA SECONDE DISTINCTION,
LEQUEL ARTICLE DOIT PARLER DE COURTILLAGE.
Primo, est à noter que tout ce que l’on sème, plante ou ente, l’en le doit semer, planter ou enter par temps moite et au soir ou au bien matin, avant l’ardeur du soleil et en décours[522], et doit-l’en arroser le pié et la terre et non la fueille.
Item, par l’ardeur du soleil l’en ne doit mie arroser, mais au soir et au matin; ne coper choux, percil[523], ne autres telles verdures qui regettent, car la chaleur du soleil cuiroit la coupeure et l’ardroit, et ainsi ne regetteroit jamais par iceluy endroit de la coupeure.
Nota que en temps pluieux fait bon planter, mais non mie semer, car la graine se retient au ratel.
Dès la Toussains sont fèves des marais, mais afin que icelles ne gellent, on en plante vers Noël et en Janvier et Février et au commencement de Mars; et les plante-l’en ainsi à diverses fois afin que se les unes sont gelées, les autres ne le soient pas. Et quant elles se lièvent hors de terre, si tost qu’elles poignent l’en les doit harser et rompre le premier germe: et si tost qu’elles ont six fueilles l’en les doit seurfouir[524]. Et de toutes icelles, les premières venues sont les plus chières et doivent estre mengées le jour qu’elles sont escossées, ou autrement elles deviennent noires et aigres.
Nota que marjolaine et violettes que l’en veult garder en yver contre la froidure, l’en ne les doit mie mettre{v. 2, p.44} soudainement de froit à chault, ne de moite à froit, car qui longuement les garde l’iver en un célier moite et soudainement les met au sec, il les pert; et sic de contrariis similibus.
En yver l’en doit oster les branches du sauger qui sont mortes. Encores en Janvier et Février, sauge, lavende, coq[525], mente, toutebonne[526] soient plantés jusques à Juing.—Panoit[527] soit semé large à large.—Oseille soit semée ou décours et jusques à Mars et plus.
Nota que l’iver de Décembre et de Janvier fait mourir les porées, c’est assavoir ce qui est hors terre, mais en Février les racines regettent nouvelle et tendre porée, c’est assavoir si tost comme la gelée cesse, et quinze jours après viennent les espinars.
Février.—Sarriette et marjolaine sont comme d’une saveur à mengier, et sont semés ou décours et ne sont que huit jours en terre.—Item, sarriette ne dure fors jusques à la Saint-Jehan.—Item, en décours doit-l’en planter arbres ou vignes et semer choux blans et pommés.—Nota que les marquets chevelus portent dès l’année qu’ils sont plantés chevelus.
Espinars sont en Février et ont longue fueille et crenelée comme fueille de chesne, et croissent par touffes comme porées, et les convient esverder[528] et bien cuire après.—Bettes viennent après.
Nota que framboisiers et aussi framboises sont bonnes à planter.
Mars.—Ou décours doit l’en enter: jombarde[529] planter{v. 2, p.45} de Mars jusques à la Saint-Jehan.—Violettes, giroflée semée en Mars ou plantée à la Saint-Remy.—Item, soit l’une, soit l’autre, quant les gelées approuchent, l’en la doit en aucun décours replanter en pos pour mettre à couvert et garder en cave ou en célier pour le froit, et de jour mettre à l’air ou au soleil et arroser de telle heure que l’eau soit beue et la terre sèche avant que l’en la mette à couvert, car nullement l’en ne la doit au vespre estuier[530] mouillée.—Fèves planter et rompre le premier tuiau au herser comme dit est dessus.—Nota que le percil qui est semé la veille de la Nostre-Dame en Mars, yst hors de terre à neuf jours.
Fenoul et marjolaine plantez ou décours de Mars ou en Avril; et nota que marjolaine veult plus grasse terre que violettes[531], et s’elle a trop ombre elle devient jaune.—Item, quant elle est bien reprise, adonc la dois arrachier par touffes et replanter à large en pots.—Item, les branches couppées, fichées en terré et arrousées prennent racines et croissent.—Item, terre engressée par fiens de vaches et brebis est meilleur que de fiens de cheval.
Violette de karesme et violette d’Arménie[532] ne veullent ne couver ne mucier; et nota que violette d’Arménie ne porte fleur jusques au deuxième an, mais les jardiniers qui l’ont eue un an en terre, la vendent et replantent ailleurs, et lors elle porte.{v. 2, p.46}
Ozeille, bazeillecoq[533] soient semées en Janvier et Février ou décours et jusques à Mars, et se tu veulx replanter ozeille surannée[534], il te la convient replanter à toute sa terre qui est entour la racine. Item, à la queillir a maistrise[535], car l’en doit tousjours queillir les grans fueilles et laissier croistre les petites fueilles qui sont dessus icelles grans; et se tout estoit par aventure cueilli, il convient coupper le tuyau rez à rez de terre, et il regettera nouvelle ozeille.
Percil sème, sarcle, oste les pierrettes; et celuy qui est semé en Aoust est le meilleur, car il n’espie[536] point et se tient en vertu toute l’année.
Laictues doivent estre semées, et nota qu’elles n’arrestent point en terre et reviennent bien drues: et pour ce les arrache-l’en çà et là à toute la racine pour donner espace aux autres et oster espoisseur. Et nota que la semence des laictues de France est noire, et la semence des laictues d’Avignon est plus blanche, et en fit apporter Monseigneur de La Rivière[537], et sont les laictues{v. 2, p.47} trop meilleurs et plus tendres assez que celles de France; et ne se queult la semence fors bouton après autre, ainsi comme chascun bouton s’avance de getter sa bourre.—Nota que laictues ne se plantent point, et mesmement quant l’en les veult mengier, si arrache-l’en racine et tout.
Courges. Les pepins sont la semence et les convient tremper deux jours, puis semer, et sans les moullier laisser croistre jusques à ce qu’elles appairent dehors, et lors mouillier le pié seulement et la terre sans moullier les feuilles, et en Avril les arrouser courtoisement et les planter d’un lieu en autre un dour[538] ou demy pié en terre, et à demy-pié l’une courge de l’autre, et moullier le pié continuelment et pendre à un eschalat un pot percié, un festu et de l’eaue etc., ou une lesche de drap neuf ou pot[539].
Bettes semez en Mars, et quant elles sont bonnes à mengier, soient coupées près de la racine, car tousjours rejettent et recroissent et deviennent porées.
Bourraches, arraches[540] comme dessus.{v. 2, p.48}
Choulx blans et choulx cabus est tout un; et sont semés ou décours de Mars, et quant ils ont cinq fueilles, adonc l’en les arrache courtoisement et les plante-l’en à demy-pié loing l’un de l’autre, et les convient mettre en terre jusques à l’œil et arrouser le pié; et les mengue-l’en en Juing et en Juillet.—Pommes de chou sont semées en Mars et replantées en May.—Choulx Romains sont de la nature de pommés et de auques[541] pareille semence, car l’une et l’autre semence croist sur un tronc, et de la semence qui vient par le tuyau du milieu et qui est au bout d’en haut croist la pomme, et de la semence qui vient d’en bas viennent les choulx Romains.—Minces en karesme est le regaing du chou, et durent jusques en Mars, et lors sont icelles minces en Mars de plus fort saveur à mengier, et pour ce les convient plus parboulir, et en iceluy temps l’en arrache les troncs hors de terre.—Nota que en Juillet, quant il pleut, l’en doit planter des choulx.
Nota que se fromis habondent en un jardin, et l’en gette en leur repaire de la scieure d’ais de chesne, ils mourront ou vuideront à la première pluie qui cherra, car les scieures retiennent la moiteur.
Nota que en Avril et Mai, tout le mois, sème-l’en les porées qui sont mangées en Juing et en Juillet.—Les porées d’esté doivent estre soyées, et laissées les racines en terre, et après yver les racines gettent, et les convient surfouir et lever la terre à l’environ et illecques semer les nouvelles qui venront et cueillir le gecton des vieilles.—Nota que depuis Avril jusques à la Magdelaine fait bon semer porées, et les porées de karesme{v. 2, p.49} sont semées en Juillet et jusques à la Magdelaine et non plus, elles appelle-l’en bettes.—Item, espinars.—Item icelles bettes, quant elles sont levées de terre, sont replantées par ordre.—Item, en Avril et May convient planter choulx blans et pommes de chou qui furent semés en Février et Mars.—En May treuve-l’en fèves nouvelles, navez, raves.
Nota que en Juing, la végille St.-Jehan, doit-l’en semer percil, et aussi la veille de la mi-Aoust.
Aoust et my-Aoust.—Ysope semez. Choulx pasquerés[542] soient semés ou décours; percil aussy, car celui n’espie point.
Nota que la porée qui est en terre regette nouvelle porée cinq ou six fois comme percil, et la peut-l’en coupper audessus du troignon jusques la my-septembre, et d’illec en avant non mie coupper, car le troignon pourriroit, mais esbranchier à la main les fueilles d’entour, et non le milieu.
En icelluy temps convient esbranchier[543] toutes semences de porées, car les semences ne pevent meurir pour la froidure du temps, mais la semence esbranchée et gettée, le troignon regette nouvelle porée.—Item, en ce temps ne convient point couper le percil, mais effueiller.
Après la septembresse[544], pivoine, serpentine, oignons de lis, rosiers, groselliers soient plantés.
Octobre.—Pois, fèves, un doit[545] parfont en terre, et loing l’un de l’autre un dour, et que ce soient grosses fèves des plus grosses, car quant elles sont nouvelles, elles se démonstrent plus grosses que les petites ne{v. 2, p.50} font, et n’en doit-l’en planter que un petit, et à chascun décours après, un petit, afin se l’une partie gelle que l’autre non.
Se tu veulx semer ou planter poix perciés, sème les par temps sec et bel et non pluyeux, car se l’eaue de la pluie entroit dedens les pertuis du pois, il se fendroit et partiroit en deux et ne germeroit point.
Jusques à la Toussains peut-l’en tousjours replanter choulx: et quant ils sont trop mengiés de chenilles, qu’il n’y a point de fueille fors les arrestes, s’ils sont replantés, tout revient minces: et convient oster les feuilles d’en bas et les replanter jusques à l’euil d’en hault. Les troncs qui sont tous défueillés ne convient-il plus replanter, mais laissier en terre, car ils getteront minces.
Nota que se tu replantes en esté en temps sec, tu dois getter de l’eaue en la fosse; en temps moiste, non.
Nota que se les chenilles menguent tes choulx, quant il plouvera sème de la cendre par dessus les choulx et les chenilles mourront.—Item, tu peus regarder par dessoubs les fueilles des choulx et là trouveras grant assemblée de mittes blanches en un tas, et saches que c’est dont les chenilles naissent, et pour ce l’en doit coupper la place où est celle graine et getter loing.
Poreaux soient semés en la saison, puis replantés en Octobre et Novembre.
Se vous voulez avoir roisins sans pépins, prenez en croissant[546] ou temps que l’en plante la vigne, c’est assavoir en Février, une plante de vigne avecques la racine et fendez le cep moitié par moitié tout au long jusques à la racine, et ostez la mouelle d’une part{v. 2, p.51} et d’autre. Puis rongnez le cep et liez tout au long de fil noir, puis plantez le cep et fumez de bonne fumeure et estoupez de terre le trou d’en hault de la jointure du cep.
Se vous voulez enter un cerisier ou un prunier sur et dedans un cep de vigne, tailliez la vigne, puis en Mars la fendez à quatre dois près du bout et ostez la mouelle d’une part et d’autre, et là faictes la place de l’amande d’un noyau de cerise, et la mettez et encloez dedens celle fente et liez de fil le cep joinct comme devant.
Se vous voulez enter un cep de vigne dedans un cerisier, faictes tailler le cep de vigne qui sera planté et de long temps enraciné emprès le cerisier, et en Mars, environ Nostre-Dame[547], perciez icelluy cerisier d’une tarière du gros[548] d’icelluy cep, et parmy le trou dudit cerisier boutez icelluy cep, qu’il passe tout oultre un pié de long, puis estoupez le tout aux deux costés du cerisier, c’est assavoir de terre glaze, de mousse, et entortillez de drappeaulx tellement que aucune pluie ne puisse atouchier au pertuis. Item, le cep de vigne doit estre escorchié et l’escorce d’icelluy cep pelée et ostée jusques au vert, en tant seulement comme touche ce qui est dedans le corps du cerisier, car s’ainsi est fait et que l’escorce soit pelée et ostée, le vif du cep qui joindra au vif du cerisier se consolidera l’un à l’autre, ce qui seroit empeschié par l’escorce du cep se elle y demouroit. Ce fait laissiez les ensemble deux ans, et après coupperez le cep par derrière, et audessoubs de la jointure du cerisier.
Item, sur un tronc ou souche de chesne, povez enter{v. 2, p.52} dix ou douze
arbres, c’est assavoir que ou mois de Mars, environ la Nostre-Dame,
vous soiez garnis de tant de greffes et de divers fruis que vous
vouldrez avoir pour enter, et ferez scier au travers le chesne ou
arbre sur lequel vous vouldrez enter; et aiez aguisés vos greffes
d’un costé tant seulement à manière d’un coin borgne si comme il est
cy:
et tellement que l’escorce d’icelluy
greffe soit toute entière de l’un des costés et sans estre escorchée
ou entamée, puis fichiez vos greffes entre l’escorce du chesne et la
char, ou[549] le vif du greffe devers le bois ou le vif du chesne.
Puis estoupez et couvrez de terre glase, de mousse et de drappeaulx
tellement[550] que pluie, neige ou gelée ne y puisse férir.
Se vous voulez garder roses en yver[551], prenez sur le rosier petis boutons qui ne soient point espanis et les laissiez les queues longues, et entassez en un petit tonnelet de bois comme un tonnellet à composte et sans eaue. Faictes bien enfoncer le tonnellet et qu’il soit serréement relié qu’il n’y puisse riens entrer ne yssir,{v. 2, p.53} et aux deux bouts d’icelluy tonnellet liez deux grosses pierres pesans et mettez icelluy tonnellet en une rivière courant.
Romarin. Les jardiniers dient que la semence de romarin ne vient point en la terre de France, mais qui d’un romarin arracheroit et desmembreroit, en dévalant, aucunes petites branchettes et les tendroit par le bout et les plantast, ils revendroient; et qui les vouldroit envoïer loing, il convendroit icelles branches envelopper en toile cirée et coudre, et puis oindre par dehors de miel, et puis poudrez de fleur de fourment et l’envoïez où vous vouldrez.
J’ay oy dire à Monseigneur de Berry que en Auvergne a trop plus grosses cerises que en France pour ce qu’ils provignent leurs cerisiers.
DE LA SECONDE DISTINCTION
LE TROISIÈME ARTICLE
QUI DOIT PARLER DE CHOISIR VARLETS, AIDES ET CHAMBERIÈRES, ETC.
Sur quoy, chière seur, ou cas que vous vouldriez entreprendre à estre mesnagière, ou introduire une autre vostre amie, sachiez que serviteurs sont de trois manières. Les uns qui sont prins comme aides pour certaine heure, à un besoing hastif, comme porteurs à l’enfeutreure[552], brouetiers, lieurs de fardeaulx et les semblables; ou pour un jour ou deux, une sepmaine ou{v. 2, p.54} une saison, en un cas nécessaire ou pénible ou de fort labour, comme soieurs, faucheurs, bateurs en granche ou vendangeurs, hottiers, fouleurs, tonneliers et les semblables. Les autres à temps et pour certain mistère, comme cousturiers, fourreurs, boulengiers, bouchiers, cordoenniers et les semblables qui euvrent à la pièce ou en tâche pour certain euvre. Et les autres sont pris pour estre serviteurs domestiques pour servir à l’année et demourer à l’ostel. Et de tous les dessusdis aucun n’est qui voulentiers ne quière besongne et maistre.
Quant est des premiers, ils sont neccessaires pour descharger et porter fardeaulx et faire grosses et pesans besongnes; et ceulx sont communément ennuyeux, rudes et de diverses responses: arrogans, haultains, fors à paier, près de dire injures et reprouches se l’en ne les paie à leur gré quant la besongne est faicte. Si vous pry, chière seur, que quant vous en aurez à faire, dictes à maistre Jehan le despensier[553] ou autres de vos gens qu’ils quièrent et choisissent et prennent ou facent choisir et prendre les paisibles; et tousjours faictes marchander à eulx avant ce qu’ils mettent la main à la besoigne afin qu’il n’y ait débat après, jasoit-ce que le plus souvent il ne veulent marchander, mais se veulent bouter en la besoigne sans marchié faire, et si doulcement dient: «Monseigneur, ce n’est riens, il n’y a que faire: vous me paierez bien, et de ce que vous vouldrez je seray content.»—Et se ainsi maistre Jehan les prent,{v. 2, p.55} quant ce sera fait ils diront: Sire, il y avoit plus à faire que je ne cuidoie; il y avait à faire et cecy et cela, et d’amont et d’aval; et ne se vouldront païer et crieront laides parolles et villaines. Si dictes à maistre Jehan qu’il ne les embesoigne point, ne seuffre embesoigner, sans marchander avant, car ceulx qui ont voulenté de gaigner sont vos subjects avant que la besoigne soit commencée, et pour le besoing qu’ils ont de gaigner, craignent que un autre ne l’entrepreigne par devant eulx pour doubte de perdre le marchié et que autre n’ait ce gaing: et pour ce ils se mettent à plus grant raison. Et se maistre Jehan estoit si crédule à eulx et à leurs douces paroles ès quelles il se fiast trop, et il advenoit que il souffrist que sans marchander ils entrassent en la besoigne, ils scevent bien que après la besoigne par eulx commencée, nul autre, pour honte, n’y mettra pardessus eulx la main, et ainsi seriez en leur subjection après et en demanderoient plus; et se lors ils ne sont païés à leur voulenté, ils crieront et brairont vilain blasme et oultrageux, et ne sont honteux de rien et publient male renommée, qui est le pis. Et pour ce est-il meilleur de faire marchander à eulx plainement et entendiblement avant le coup pour oster toutes paroles de débat. Et très à certes vous prie que se le cas ou la besoinge le désire, vous faictes enquerre de quelle condition sont et ont esté vers autres, ceulx que vous vouldrez faire embesongner, et aussi que à gens repliquans, arrogans, haultains, raffardeurs[554] ou de laides responses ne aiez riens à faire, quelque prouffit que vous y véez ou quelque advantage, ne quelque bon{v. 2, p.56} marchié qu’ils vous facent, mais gracieusement et paisiblement les esloingnez de vous et de vos besongnes, car se ils s’y boutent, vous n’en eschapperez jà sans esclandre ou débat. Et pour ce faictes par vos gens prendre des serviteurs et aides paisibles et debonnaires et leur donnez plus, car c’est tout repos et paix que d’avoir à faire à bonnes gens; pour ce est-il dit que qui a à faire à bonnes gens, il se repose: et par semblable peut-l’en dire que qui a à faire à hargneux, douleur luy croist.
Item, des autres comme vignerons, bateurs en granche, laboureurs et les semblables, ou autres comme cousturiers, drapiers, cordoenniers, boulengiers, mareschaulx, chandeliers de suif[555], espiciers, fèvres, charrons, vignerons et les semblables autres, chière seur, je vous conseille et pry que vous aiez tousjours en mémoire de dire à vos gens qu’ils aient à besongner à gens paisibles, et marchandent tousjours avant le fait, et comptent et paient souvent sans attendre longue créance sur taille ne sur papier, jasoit-ce que encores vault-il mieulx taille ou escripture que soy attendre du tout à sa mémoire, car les créditeurs cuident tousjours plus et les debteurs moins, et de ce naissent débas, haines et lais reprouches; et vos bons créanciers faictes païer voulentiers et souvent de ce que vous leur devrez et les tenez en amour afin qu’ils ne vous changent, car l’en n’en recueuvre mie bien tousjours de bien paisibles.
Item, quant aux chamberières et varlets d’ostel que l’en dit domestiques[556], chière seur, sachiez que afin{v. 2, p.57} qu’elles vous obéissent mieulx et qu’elles vous doubtent et craignent plus à courroucier, je vous laisse la seignorie et auctorité de les faire choisir par dame Agnès la béguine[557] ou autre de vos filles qui vous plaira, à recevoir en nostre service, de les louer à vostre gré et de les païer et tenir en nostre service tant comme il vous plaira et leur donner congié quant vous vouldrez. Toutesvoies de ce devez-vous à part secrètement parler à moy et faire par mon conseil pour ce que vous estes trop jeune et y pourriez bien estre déceue par vos gens mesmes. Et sachiez que d’icelles chamberières qui n’ont service, pluseurs sont qui se offrent et ramentoivent et quierent à grant besoing maistres et maistresses, et de celles ne prenez aucunes que vous ne sachiez avant où elles ont demouré, et y envoiez de vos gens pour enquérir de leurs conditions sur le trop parler, sur le trop boire: combien de temps elles ont demouré: quel service elles faisoient et scevent faire: se elles ont chambres ou acointances en ville: de quel païs et gens elles sont: combien elles y demourèrent et pourquoy{v. 2, p.58} elles s’en partirent; et par le service du temps passé, enquérez quelle créance ou espérance l’en peut avoir de leur service pour le temps à venir. Et sachiez que communément telles femmes d’estrange pays ont esté blasmées d’aucun vice en leur pays, car c’est la cause qui les amaine à servir hors de leur lieu. Car s’elles fussent sans tache, elles fussent maistresses et non serviteresses; et di des hommes autel. Et se vous trouvez par le rapport de leurs maistres ou maistresses, voisins ou autres, que ce soit vostre besoigne, sachiez par elles, et devant elles faictes par maistre Jehan le despensier enregistrer en son papier de la despense[558] le jour que vous la retendrez, son nom et de son père et de sa mère et d’aucuns de ses parens: le lieu de leur demourance et le lieu de sa nativité et ses pleiges[559]; car elles en craindront plus à faillir pour ce qu’elles considéreront bien que vous enregistrez ces choses pour ce que s’elles se deffuioient de vous sans congié, ou qu’elles feissent aucune offense, que vous en plaindriez ou rescririez à la justice de leur pays ou à iceulx leurs amis. Et nonobstant tout, aiez en mémoire le dit du philosophe lequel s’appelle Bertran le vieil, qui dit que se vous prenez chamberière ou varlet de haultes responses et fières, sachiez que au départir, s’elle peut, elle vous fera injure; et se elle n’est mie telle, mais{v. 2, p.59} flateresse et use de blandices, ne vous y fiez point, car elle bée en aucune autre partie à vous trichier; mais se elle rougist et est taisant et vergongneuse quant vous la corrigerez, amez la comme vostre fille.
Après, chière seur, sachiez que sur elles, après vostre mary, vous devez estre maistresse de l’ostel, commandeur, visiteur, gouverneur et souverain administrateur, et à vous appartient de les tenir en vostre subjection et obéissance, les endoctriner, corrigier et chastier; et pour ce, deffendez leur à faire excès ne gloutonnie de vie tellement qu’elles en vaillent pis. Aussi deffendez les de rioter[560] l’une à l’autre ne à vos voisins; deffendez leur de mesdire d’autruy, fors seulement à vous et en secret, et en tant comme le meffait toucheroit vostre prouffit seulement, et pour eschever vostre dommaige et non plus; deffendez leur le mentir: le jouer à jeux illicites: de laidement jurer et de dire parolles qui sentent villenies ne parolles déshonnestes ne gouliardeuses, comme aucunes mescheans ou mal endoctrinées qui maudient de males sanglantes fièvres, de male sanglante sepmaine, de male sanglante journée. Il semble qu’elles sachent bien qu’est sanglante journée, sanglante sepmaine etc., et non font-elles, ne doivent point savoir qu’est sanglante chose, car preudefemmes ne le scevent point, car elles sont toutes abhominables de veoir seulement le sang d’un aignel ou d’un pigon quant on le tue devant elles. Et certes, femmes ne doivent parler de nulle laidure, non mie seulement... des secrès membres de nature, car c’est déshonneste chose à femme d’en parler.{v. 2, p.60}
J’oy une fois raconter d’une jeune preudefemme qui estoit assise en une presse de ses autres amis et amies, et par adventure, elle dist par esbatement aux autres: Vous me pressez si fort que....[561] Et jasoit-ce qu’elle l’eust dit par jeu et entre ses amis, cuidant faire la galoise[562], toutesvoies les autres saiges preudefemmes ses parentes l’en blasmèrent à part. Item, telles femmes gouliardoises dient aucunes fois de femme qu’elle est p..... ou qu’elle est ribaude, et par ce disant il semble qu’elles sachent qu’est p..... ou ribaude, et preudefemmes ne scevent que ce est de ce; et pour ce deffendez leur tel langaige, car elles ne scevent que c’est. Deffendez leur vengence, et endoctrinez en toute patience à l’exemple de Melibée dont il est cy-dessus parlé, et vous mesmes, belle seur, soiez telle en toutes choses que par vos fais elles puissent en vous prendre exemple de tout bien.
Or nous convient parler d’embesongner vos gens et serviteurs aux heures propres à besongner, et aux heures convenables leur donner repos.—Sur quoy, chière seur, sachiez que selon les besongnes que vous avez à faire et que vos gens sont propres plus à une{v. 2, p.61} besongne que à l’autre, vous et dame Agnès la béguine qui avec vous est pour vous aprendre contenance sage et meure et vous servir et endoctriner, et à laquelle principalment je donne la charge de ceste besongne, la devez diviser et crier, et commander l’une besongne à l’un, et l’autre besongne à l’autre. Et se vous leur commandez maintenant à faire aucune chose, et iceulx vos serviteurs respondent: il est assez à temps, il sera jà bien fait, ou il sera fait demain bien matin, tenez le pour oublié: c’est à recommencier, c’est tout néant. Et aussi de ce que vous commanderez généralment à tous, sachiez que l’un s’atend à l’autre: c’est comme devant.
Si soiez advertie, et dictes à dame Agnès la béguine qu’elle voie commencier devant elle ce que vous aurez à cuer estre tost fait; et premièrement qu’elle commande aux chamberières que bien matin les entrées de vostre hostel, c’est assavoir la salle et les autres lieux par où les gens entrent et s’arrestent en l’ostel pour parler, soient au bien matin balléyés et tenus nettement, et les marchepiés[563], banquiers et fourmiers qui illecques sont sur les fourmes, despoudrés et escoués; et subséquemment les autres chambres pareillement nettoiées et ordonnées pour ce jour, et de jour en jour, ainsi comme il appartient à nostre estat.
Item, que par la dicte dame Agnès vous faciez principalment{v. 2, p.62} et songneusement et diligemment penser de vos bestes de chambre comme petis chiennés, oiselets de chambre[564]: et aussi la béguine et vous pensez des autres oiseaulx domeschés, car ils ne pevent parler, et pour ce vous devez parler et penser pour eulx, se vous en avez.
Et aussi dy-je à dame Agnès la béguine que des autres bestes, quant vous serez au village, elle commande à ceulx à qui il appartient à en penser: comme à Robin le bergier, qu’il pense de ses moutons, brebis et aigneaulx; à Josson le bouvier, des beufs et des toreaulx; à Arnoul le vachier et Jehanneton la laictière, qu’ils pensent des vaches, genices et veaulx, truies, cochons et pourceaulx; à Eudeline femme du mettoier qu’elle pense des oés, oisons, coqs, gelines, poucins, coulons, pigons; au charretier ou mettoier, qu’il pense de nos chevaulx, jumens et les semblables. Et doit la dicte béguine et aussi vous devez faire semblant devant vos gens qu’il vous en souviengne, que vous y congnoissiez et que vous l’avez à cuer, car par ce en{v. 2, p.63} seront-ils plus diligens. Et faictes faire, s’il vous en souvient, par vos gens penser du vivre d’icelles bestes et oiseaulx, et y doit la dite dame Agnès embesongner ceulx et celles qui y sont propres. Et sur ce est à noter que à vous appartient bien à faire savoir par la dicte dame Agnès la béguine le conte de vos moutons, brebis et aigneaulx, et les faire reviseter, et enquérir de leur accroissement et descroissement, ne comment ne par qui elles sont gouvernées, et elle le doit rapporter à vous, et entre vous deux le devez faire enregistrer.
Et se vous este en païs ou il y ait repaire de loups, je vous enseigneray maistre Jehan vostre maistre d’ostel ou vos bergiers et gens de les tuer sans cop férir par la recepte qui s’ensuit.—Recepte de pouldre pour tuer loups et renars.—R.[565] la racine de l’ectoire de canarade (c’est l’ectoire qui fait fleur de couleur blanche[566]), et faictes séchier icelle racine meurement et sans soleil, et gectez hors la terre: et adonc face-en pouldre en un mortier, et avec celle poudre mettez la quinte partie de voirre bien moulu et la quarte partie de la feuille de lis, et tout soit meslé et pilé ensemble, et tellement qu’il se puisse passer ou cribler. Item, ait miel et sain[567] frès autant de l’un comme de l’autre et mesle parmy de la poudre dessusdite, et face paste qui soit dure et fort, et gros morceaulx rons du gros d’un œuf de poule, et cuevre iceulx morceaulx de sain frès et les mette sur les pierres ou tuillettes ès lieux qu’il saura que loups et renars repaireront. Et se il veult faire amorse[568] de une vielle beste morte, faire le peut deux ou trois jours{v. 2, p.64} devant. Item, sans faire morceaulx, peut-il la poudre jetter sur la charongne.
Ainsi vous et la béguine embesongnez les unes de vos gens aux choses et besongnes qui leur sont propres, et aussi dictes à maistre Jehan le despensier qu’il envoie ou face envoier les autres reviseter vos greniers, remuer et essorer[569] vos grains et autres garnisons[570]; et se vos mesgnies vous rapportent que les ras dommagent vos blés, lars, fromages et autres garnisons, dictes à maistre Jehan qu’il les puet destruire en six manières: 1º Par avoir garnison de bons chats. 2º Par ratières et soricières. 3º Par engins d’aiselles[571] appuiées sur buchettes que les bons serviteurs font. 4º Par faire tourtellés de paste et fromage frit ensemble et poudre de riagal[572], et mettre en leur repaire où ils n’aient que boire. 5º Se vous ne les povez garder qu’ils ne treuvent à boire, il convient faire de l’espurge[573] par morcellés, et lors s’ils les avallent, plus tost buveront et plus tost enfleront et mourront. 6º Prenez une once de riagal: deux onces fin arcenic: un quarteron gresse de porc: une livre fleur de farine de fourment et quatre œufs, et de ce faites pain et cuisiez au four et tailliez par lesches et les clouez à un clou.
Or revien encores à ma matière de faire embesongner vos gens, vous et la béguine, en temps convenable,{v. 2, p.65} par vos femmes essorer, esventer et reviseter vos draps, couvertures, robes et fourreures, pennes et autres telles choses.—Sur quoy sachiez et dictes à vos femmes que pour conserver et garder vos pennes et draps, il les convient essorer souvent pour eschever les dommages que les vers y pevent faire; et pour ce que telle vermine se congrée par le ramolissement du temps d’automne et de yver et naissent sur l’esté, en iceulx temps convient les pennes et les draps mettre à bon soleil et beau temps et sec; et se il survient une nuée noire et moicte qui s’assiée sur vos robes et en tel estat vous les ploiez, cest air envelopé et ployé dedans vos robes couvera et engendrera pire vermine que devant. Et pour ce, choisissiez bel air qui soit continué et bien sec, et tantost que vous verrez autre gros air survenir, avant qu’il soit venu vers vous, faictes mettre vos robes à couvert et escourre pour oster la grosse pouldre[574], puis nettoier à unes verges sèches[575]. Et la béguine scet bien et le vous le dira que s’il y a aucune tache d’uille ou autre gresse, le remède est tel: Ayez pis..t et le chauffez comme tiède, et mettez la tache tremper dedans par deux jours, et puis espraignez le drap où est la tache sans le tordre, et se la tache ne s’en est alée, si le face dame Agnès la béguine, mettre en un autre pis..t et battre un fiel de beuf avec, et face-l’en comme devant. Ou vous faictes ainsi: faites prendre de la terre de robes[576] et tremper en lessive, puis mettre sur la tache et laissiez sécher, et puis frotez; et se la terre ne s’en va légièrement, si faictes mouillier en lessive, et laissiez encores{v. 2, p.66} séchier et frotez tant qu’elle s’en soit alée; ou se vous n’avez terre de robes, faictes mettre cendres tremper en lessive, et icelles cendres bien trempées mettez sur la tache; ou vous faictes prendre de bien nettes plumes de poucins et moulliez en eaue bien chaude pour là laissier la gresse qu’elles auront prise, et remoulliez en eaue necte bien chaude: bien refrottez aussi et tout s’en yra.
S’il y a sur robe de pers[577] aucune tache ou destaincture de couleur, faictes prendre une espurge et la moulliez en necte et clère lessive, puis espraigniez et traynnez sur la robe en frotant la tache, et la couleur y revendra. Et se sur quelsconques autres couleurs de drap y a tache de destainture de couleur, faictes prendre de la lessive bien nette et qui point n’ait coullé sur drappeaulx, et mettre avec la cendre sur la tache, et laissiez sécher, puis faictes frotter, et la première couleur revendra.
Pour oster tache de robe de soie, satin, camelot, drap de Damas ou autre, trempez et lavez la tache en vertjus et la tache s’en yra, et mesmes se la robe est destainte, si revendra-elle en sa couleur (ce que je ne croy pas)[578].
Vertjus. Nota que ou temps que le vertjus nouvel se fait, l’en en doit prendre, sans sel, une fiole et la garder, car ce vault pour oster tache de robe et la remettre en sa couleur, et est tousjours bon, et nouvel et vieil.
Item, et se aucunes de vos pennes ou fourreures{v. 2, p.67} ont esté moulliées et se soient endurcies, faictes deffourrer le garnement[579], et arrouser de vin la penne qui est dure, et soit arrousée à la bouche ainsi comme un cousturier arrouse d’eaue le pan d’une robe qui veult retraire, et sur icelluy arrousement faictes gecter de la fleur[580] et laissiez sécher un jour; puis frottez très bien icelle penne[581]... en son premier estat.
Or revien au propos que devant, et dy que vostre maistre d’ostel doit savoir qu’il doit chascune sepmaine faire reviseter et boire de vos vins, vertjus et vinaigres; veoir les grains, huilles, noix, pois, fèves et autres garnisons. Et quant aux vins, sachiez que s’ils deviennent malades, il les convient garir de maladies par la manière qui s’ensuit:
Premièrement se le vin est pourri, il doit mettre la queue[582], en yver, emmi une court sur deux tréteaulx afin que la gelée y frappe, et il garira.
Item, se le vin est trop vert, il doit prendre plain pennier de morillons[583] bien meurs, et gecte dedens la queue, par le bondonnail, tous entiers, et il amendra.
Item, se le vin sent l’esventé[584], il doit prendre une once de seurmontain[585] en pouldre et autant en graine{v. 2, p.68} de paradis[586] en pouldre et mettre chascune desdictes pouldres en un sachet et le pertuisier d’une greffe[587], et puis pendez tous les deux sachets dedens la queue à cordelettes et estoupez bien le bondonnail.
Item, se le vin est gras, preigne douze œufs et mette boullir en eaue tant qu’ils soient durs, et puis gecte hors le jaune et laisse le blanc et les coquilles ensemble, et puis frire en paelle de fer et mettre tout chault dedens un sachet et pertuisé d’une greffe comme dessus, et pendre dedans la queue à une cordelette. Item, preigne un grant pot neuf et le mette dessus un trepié vuit[588], et quant il sera bien cuit, despièce le par pièces et le gecte dedans la queue, et il garira de la gresse.
Item, pour desroussir le vin blanc, preigne plain pennier de feuilles de houx et gecte dedens la queue par le bondonnail.
Item, se le vin est aigri, preigne une cruche d’eaue et gecte dedans pour départir le vin de devers la lie, et puis preigne plain plat de fourment et mettez tremper en eaue, et puis gectez l’eaue, et mettez boullir en autre eaue, et faciez bien boullir en autre eaue tant qu’il se vueille crever, et puis l’ostez; et s’il en y a des grains tous crevés, si les gecte, et après gecte le froment tout chault dedens la queue. Et se pour ce le vin ne veult esclarcir, preigne plain pennier de sablon bien lavé en Saine et puis gecte dedens la queue par le bondonnail et il esclarcira.
Item, pour faire ès vendenges un vin fort, n’emple pas la queue que il s’en faille deux sextiers[589] de vin, et{v. 2, p.69} frotte tout entour le bondonnail, et lors il ne pourra gecter et en sera plus fort.
Item, pour traire une queue de vin sans luy donner vent, face un petit pertuis d’un foret emprès le bondonnail, et puis ait un petit plastreau[590] d’estouppes du large d’un blanc et puis mette dessus, et preigne deux petites bûchettes et mette en croix dessus le dit plastreau, et mette un autre plastreau sur les dictes bûchettes. Et pour esclarcir vin troublé, se c’est une queue, vuide-l’en deux quartes[591], puis le remue-l’en à un baston ou autrement, tellement que lie et tout soit bien meslé, puis preigne-l’en un quarteron d’œufs, et soient batus moult longuement les moyeulx et les blans tant que tout soit fin cler comme eaue, et tantost gectez après un quarteron d’alun batu et incontinent une quarte d’eaue clère et l’estoupez, ou autrement il se vuideroit par le bondonnail.
Et après ce et avec ce que dit est, belle seur, faictes commander par maistre Jehan le despensier à Richart de la cuisine escurer, laver, nettoier et tout ce que appartient à cuisine, et véez comme dame Agnès la béguine quant aux femmes, et maistre Jehan le despensier quant aux hommes, mettront vos gens en œuvre de toutes pars: l’un à-mont, l’autre à-val, l’un aux champs, l’autre en la ville, l’un en chambre, l’autre en solier[592] ou en cuisine et envoieront l’un ça, l’autre là, un chascun selon son endroit et science, et tant que iceulx serviteurs gaignent leur salaire chascun et chascune en ce qu’il saura et devra faire; et s’ils le font, ils feront{v. 2, p.70} bien, car sachez que paresse et oisiveté engendrent tous maulx.
Toutesvoies, belle seur, aux heures pertinentes faictes les seoir à la table, et les faites repaistre d’une espèce de viande largement et seulement, et non pas de plusieurs, ne délitables ou délicatives, et leur ordonnez un seul buvrage nourrissant et non entestant, soit vin ou autre et non de plusieurs; et les admonestez de mengier fort et boire bien et largement, car c’est raison qu’ils mengeussent d’une tire, sans seoir à oultrage[593], et à une alaine, sans reposer sur leur viande ou arrester ou acouster[594] sur la table. Et si tost qu’ils commenceront à compter des comptes ou des raisons, ou à eulx reposer sur leurs coustes[595], commandez la béguine qu’on les face lever et oster leur table, car les communes gens dient: Quant varlet presche à table et cheval paist en gué, il est tems qu’on l’en oste, que assez y a esté. Deffendez leur yvresse, et que personne yvrongne ne vous serve ne approuche, car c’est péril, et après leur reffection prise à midy, quant temps sera, les laissiez par vos gens remettre à besongner. Et après leur second labour et aux jours de feste aient autre repas, et après ce, c’est assavoir au vespre, soient repus habondamment comme devant et largement, et se la saison le requiert soient chauffés et aaisiés.
Et après ce, soit par maistre Jehan le despencier ou la béguine vostre hostel clos et fermé, et ait l’un d’eux les clefs par devers luy, afin que nuls sans congié n’y entre ne ysse. Et chascun soir et avant vostre coucher, faictes par dame Agnès la béguine ou maistre{v. 2, p.71} Jehan le despensier faire reviseter à la clarté de la chandelle les fons de vos vins, vertjus, ou vinaigre, que nul ne s’en voit[596], et facent par vostre closier ou fermier savoir par ses gens que vos bestes soient bien affouragées pour la nuit. Et quant vous aurez sceu par dame Agnès la béguine ou maistre Jehan le despencier que le feu des cheminées sera couvert partout, donnez à vos gens, pour leurs membres, temps et espace de repos. Et ayez fait adviser par avant, qu’ils aient chascun loing de son lit chandelier à platine[597] pour mettre sa chandelle, et les aiez fait introduire[598] sagement de l’estaindre à la bouche ou à la main avant qu’ils entrent en leur lit, et non mie à la chemise[599]. Et aussi les aiez fait admonnester et introduire, chascun endroit soy, de ce qu’il devra commencier l’endemain, et de soy lever l’endemain matin, et recommencier chascun endroit soy son service, et de ce soit chascun advisié. Et toutesvoies de deux choses vous advise: l’une que se vous avez vos filles ou chamberières de quinze à vint ans, pour ce que en tel aage elles sont sottes et n’ont guères veu du siècle, que vous les faciez coucher près de vous en garderobe ou chambre où il n’ait lucarne ne fenestre basse, ne sur rue, et se couchent et lièvent à vostre heure, et vous mesmes qui avant ce temps serez sage se Dieu plaist, les gardez de près; l’autre si est que se l’un de vos serviteurs chiet en maladie, toutes choses communes mises arrière, vous mesmes pensez de luy très amoureusement et charitablement et le revisetez et pensez de lui ou d’elle très curieusement{v. 2, p.72} en avançant sa garison, et ainsi aurez acompli cest article.
Or vueil-je, en cest endroit, vous laissier reposer ou jouer et non plus parler à vous:[600] vous esbatrez ailleurs, je parleray à maistre Jehan le despencier qui nos biens gouverne, afin que se aucun de nos chevaulx tant de charrue comme à chevauchier est en essoine[601], ou qu’il conviengne acheter ou eschanger, qu’il s’y congnoisse un petit.
Sachiez donc, maistre Jehan, que cheval doit avoir seize[602] conditions, c’est assavoir:
Trois des conditions du renart: c’est courtes oreilles droictes, bon poil et fort et roide, queue bien pelue.
Du lièvre quatre: c’est maigre teste, bien esveillé, de légier mouvant, viste et tost alant.
Du beuf quatre, c’est assavoir: la harpe[603] large, grosse et ouverte, gros bouel, gros yeulx et saillans hors de la teste, et bas enjointé.
De l’asne trois: bon pié, forte eschine, et soit débonnaire.
De la pucelle quatre, c’est assavoir: beaulx crins, belle poitrine, beaulx rains et grosses fesses.
Maistre Jehan, mon ami, qui veult acheter un cheval, il le doit premièrement veoir en l’estable, car là voit-l’en s’il est en main d’affaiteur ou non, et s’il est bien ou mal gardé; s’il abonne cocte[604], et comment il{v. 2, p.73} siet sur le fien[605]. Après ce, à l’issir de l’estable, s’il a courtes et droites oreilles, maigre ou grasse teste, bonne veue et saine, et bons yeulx, gros, saillans dehors la teste; et puis taster dessoubs les gencives qu’il y ait grant entre-deux et bonne ouverture et large, et qu’il n’y ait gourme, bube ne malen[606], et que l’entrée du gavion ne soit en riens empeschée.
Et puis, mon ami maistre Jehan, tu te dois congnoistre à l’aage; dont il est à savoir que quant un cheval a deux ans, il a ses dens nouvelles, blanches, déliées et pareilles. Au troisième an, les trois dens de devant luy muent, et dedens icelluy troisième an deviennent plus grosses assez et plus brunes que les autres. Au quatrième an, les deux dens qui sont aux deux costés d’iceulx trois dens muées, luy muent et deviennent pareilles aux trois dont dessus est parlé. Au cinquième an, les autres muent. Au sixième an, viennent les crochés dont le fons est creux, et est la fève ou fons du creux. Au septième an les hors du creux des crochés si usent, et n’y a mais point de creux ne de fève, et devient tout plat et tout aouni[607] et de là en avant on n’y congnoist aage.
Après ce, maistre Jehan, tu dois aviser se le cheval a bonne encontre et bonne herpe et ouverte: qu’il ne soit courbé ne fuiselé[608]; et s’il est durié[609] c’est bon signe. Et par entre les deux jambes de devant, regardes aux jambes de derrière qu’il n’y ait esparvain ou courbe. Esparvain dedens le plat de la cuisse de derrière est, et s’apperçoit mieulx par entre les deux jambes de devant. Courbe est à icelluy endroit que devant, et plus sur le derrière, car elle tient au bout du gerret derrière, sur{v. 2, p.74} le bout de la jointe de la queue en dévalant; et est au commencement une petite bossette qui agrandist et est longuette, et gist au long et dessoubs le pli du gerret. Et quant on veult gracieusement parler devant marchans, on dit ainsi: Véez-cy un bon cheval, il est long et esgarretté. Et lors on entent que c’est à dire qu’il est corbeux.
Après ce, maistre Jehan mon amy, tu dois aler au costé et regarder s’il est point grevé soubs la selle, car en cheval qui ait tendre dos ne vous fiez; gardez aussi qu’il ne soit blécié au jarret[610]. Item, qu’il ait bon bouel; s’il est point batu d’esperons, qu’il n’ait grosses c......, qu’il ait long corps, car on dit un cheval plat quant il n’est pas ront ne bien esquartellé. Véez aussi quelle chière il fait par l’apparence de ses oreilles et de ses yeulx et par l’esmouvement de sa teste et le remuement de ses piés, et gardez bien qu’il n’ait malandres, [malandre est dedans le garret derrière; gardez aussi qu’il n’ait][611] molettes ne suros; ne soit crapeux, ne ne s’entretaille de la jambe de l’autre lez[612], car d’illec le peut-l’en bien veoir.
Après ce que dit est, doit-l’en adviser que le cheval ait maigres jambes, larges et plates, et qu’il n’ait pas les genoulx couronnés, et que les joinctes[613] de dessus les couronnelles ne boutent mie devant. Et regardez s’il a piés gras et combles, piés fendus, faulx quartiers, piés avalés, crapaudines ou fourme. Fourme sur couronnelle est quant au travers sur le coup-du-pié a une soubaudreure[614] qui se hausse, et en huit jours est formée aussi derrière comme devant, et durant ce qu’elle est{v. 2, p.75} entière, l’en l’appelle fourme et fait piés avalés, mais quant elle est crevée, l’en dist crapaudine et ne garist-l’en puis, et est sur le bout de la couronnelle du pié[615].
Après, va par derrière et garde qu’il ait les fesses escartelées et bien secourcées[616], belle queue et bien pelue et serrant aux fesses que on ne la puisse sourdre[617], car c’est bon signe quant le cheval a bon et fort quoier, saines c....... Et encores de rechief, advise qu’il ne s’entretaille, ne ne soit crapeux ne rongneux, ne qu’il n’ait javart et rongne, et par entredeux icelles jambes de derrière qu’elles ne soient arçonnées parmy le milieu comme un arc, et audessoubs qu’il n’y ait esparvain, molette, suros dedens la jambe ou dehors, ou malandre, et qu’il ne s’entretaille ne n’ait crape[618] ne rape, ne derrière ne devant. Après, le convient veoir trotter bellement de rechief en sa droicte aleure commune, et adviser adonc s’il liève ses piés ouniement et égaulment, d’un hault[619] et d’une légièreté; s’il plie bien ses jambes devant et qu’elles ne soient mie roides; s’il escout sa teste, s’il soufle du nez et ouvre ses narines, et s’il est long en la main, car toutes ces choses sont de bon signe. Après, le dois faire trotter fort, et prendre garde s’il trotte bel et qu’il ne s’entretaille ne ataigne. Puis faire courre et aler les galos, et lors regarder à certes s’il a grosse alaine; s’il soufle et qu’il ait grant et grosse alaine par la bouche, se les flancs luy haletent ou qu’il soit poucis; et ce puet aussi estre veu dessoubs la queue. Puis le veoir l’endemain à froit, et savoir en{v. 2, p.76} l’estable comment il se tient sur le sien, puis trotter et aler les galos et reveoir s’il est poucis, et ce peut estre veu dessous la queue, puis le veoir et savoir de rechief aux champs et ailleurs s’il est bon aux esperons.
Nota, maistre Jehan, que ès festes de Flandres, se vous avez barguaignié[620] et sceu le pris d’un cheval, et vous demandez à le veoir courre, eo ipso vous vous départez de tous les autres vices, tellement que s’il est bon à l’esperon et qu’il queure, il est vostre, quelque autre tache qu’il ait.
Maistre Jehan, s’aucun cheval est qui ait passé aage, et soit trouvé sans suros, malandre, courbe, entretaille, molettes et similia, c’est adonc à entendre qu’il est affermé[621], et que puis qu’il a passé sa jeunesse sans tache, jamais n’en aura aucune.
Item, tant est un cheval plus court, maistre Jehan, tant a plus fort eschine.—Item, tant plus dur trotte, maistre Jehan, tant plus est fort.—Item, maistre Jehan, s’il est délié sur la poincte d’en bas, c’est mauvais signe.
Maistre Jehan, se vous voulez engresser, pour vendre, un de nos chevaulx, primo soit estrillé, lavé et tenu nettement, et fresche lectière.—Item, s’il ne fut pieçà seigné, si le faictes seigner des costés, c’est du ventre, car icelle seignée des costés est propre pour leur donner bon bouel. Puis luy emplissiez son ratellier de très bon foing d’une part, et de feurre d’avoine d’autre part; puis prenez quatre boisseaulx de bien nette paille de fourment, deux boisseaulx de bran[622], un boissel de fèves menues et un boissel d’avoine, et meslez tout{v. 2, p.77} ensemble et luy en donnez quatre fois le jour, avant boire. Item après, boire de l’eaue de rivière chauffée au soleil ou sur le fumier, ou en yver chauffée sur le feu, et y ait du son dedens une toille, car sans toille le cheval toussiroit comme s’il eust mengié plume; puis mengeusse du foing. Puis pour prou vendre[623], comme dessus, ou se c’est cheval de petit pris, il ait avant boire, trois fois orge boulu, et après boire, fèves et bran et bien pou d’avoine.
Oingnement pour les piés des chevaulx.—Prenez un quarteron de suif de bouc, un quarteron de cire, un quarteron de terbentine, un quarteron de poix rasine et boulez tout ensemble, et oignez les piés des chevaulx.—Item, aiez un drappel moullié en viez oint et mettez ou fons du pié et de la fiente avec.
Pour garir de rape, crape, rongne et javart, lavez d’uille de chennevis avec eaue batue ensemble, et s’il n’en garist, il le convient seigner de la pointe du pié.
Item, est à noter que quant un cheval est seigné du col, l’en le doit tenir lié hault, et faire petitement mengier et hault, car le débatement des mandibules et du col le pourroient faire escrever. Item, le convient abuvrer le plus loing de la seignée que l’en puet et lier hault, pour ce que le baisser la teste le fait escrever. Item, se le cheval est de grant pris, si soit veillé de nuit.
Malandre veult estre lavé deux fois le jour de chault pis..t ou chaude eaue. Item, idem, grosses jambes derrière[624]; et se ainsi l’en ne peut garir, que l’en face restrainctif, c’est assavoir de sang-de-dragon[625], d’aubun{v. 2, p.78} d’œufs[626], ou plastre bien sassé et aubun d’œufs[627], et liez par bandeaulx entour la jambe, et puis seicher à un tison de feu par derrière.
Quant cheval pert la veue, faictes mouldre du saing[628] de voirre vieil, et luy gette-l’en dedens l’ueil à un tuel[629].
Quant cheval a tranchoisons, faictes-le mettre par terre et puis luy faictes mettre à un cornet un quarteron de quelque huille dedens le c.l, et puis le faites chevauchier tant qu’il sue, et il garira.
Quant cheval a vives[630], il luy convient dire ces trois mos, avec trois patenostres: ✝ abgla, ✝ abgly, ✝ alphara, ✝ asy, ✝ pater noster etc.
Contre farcin, te convient ce couver[631] par neuf jours, et chascun jour en jeun dire par trois fois, et chascune fois dire trois patenostres et toucher le mal ✝ In nomine Patris ✝ et Filii ✝ et Spiritus Sancti ✝ amen ✝ Je te conjure, mal félon de par Dieu omnipotent et de par le Père et de par le Fils et de par le Saint Esperit, et de par tous les sains et de par tous les anges de nostre Seigneur Jhésu Crist. et par toutes les vertus que Dieu donna à paroles ne en voix, par les vertus que Dieu fist de faire le ladre guérir de sa maladie: et que tu, mal félon, n’ailles plus avant, et que ne doubles ne ne enfles, n’en fenestres, n’en fistules, néant plus que firent les cinq plaies nostre Seigneur Jhésu Crist, et aussi le monde sauva, et pour ce se firent les cinq plaies de nostre Seigneur, Jhésu Crist. In nomine Patris ✝ et Filii ✝ et Spiritus Sancti ✝ Amen.
S’aucun cheval est morfondu, il le convient tantost{v. 2, p.79} faire seigner des jambes devant au plus bas, et au hault du plat des cuisses, et recueillir le sang, et d’icelluy oindre les piés, puis torchier de foing moullié et pourmener sans boire et sans mengier, et dedens quatre heures ou environ, mettre un restraintif sur les couronnelles afin qu’il ne face pié neuf; et le convient pourmener sans arrest trente-six heures, et luy donner à la main du foing s’il en veult mengier: et ne boive point d’un jour naturel; et après vint-quatre heures depuis la seignée, boive de l’eaue chaude avec du bran. Et pendant le dit temps et tantost après ce qu’il sera seigné, soit couvert de trois linceuls moulliés tout à une fois, et au bout de trente-six heures ou plus, c’est assavoir quant il se prendra à mengier du bran et faire bonne chière et qu’il aura fienté, luy face-l’en bonne lictière et blanche, et le face-l’en reposer, puis pourmener, et quant il yra de bon cuer, si luy oste-l’en un jour un drap, l’autre jour l’autre, et le tiers l’autre, et ne luy donne-l’en fors brennée à boire et à mengier jusques à ce qu’il face bonne chière. Aucuns leur donnent du buvrage de pommes à un cornet. Et de tout le mareschal puet avoir franc et demi[632].{v. 2, p.80}
DE LA DEUXIÈME DISTINCTION
LE QUART ARTICLE[633]
QUI VOUS DOIT APRENDRE QUE VOUS, COMME SOUVERAIN MAISTRE DE VOSTRE HOSTEL, SACHIEZ COMMANDER ET DEVISER A MAISTRE JEHAN DISNERS ET SOUPPERS, ET DEVISER MÈS ET ASSIETES.
Et à ce commencement je vous mettray aucuns termes servans aucun pou, et qui vous donront commencement ou au moins esbatement.
Primo, pour ce qu’il convient que vous envoiez maistre Jehan ès boucheries, cy-après s’ensuivent les noms de toutes les boucheries de Paris et leur délivrance de char.
A la Porte-de-Paris[634] a dix-neuf bouchiers qui par estimation{v. 2, p.81} commune vendent, pour sepmaine, eulx tous, l’un temps parmi l’autre, et la forte saison portant la{v. 2, p.82} foible, dix neuf cens moutons, quatre cens beufs, quatre cens pourceaulx, et deux cens veaulx.{v. 2, p.83}
Saincte-Geneviefve: cinq cens moutons, seize beufs, seize porcs, et six[635] veaulx[636].
Le Parvis: quatre-vint moutons, dix beufs, dix veaulx, huit porcs.
A Saint-Germain a treize bouchiers; deux cens moutons, trente beufs, trente veaulx, cinquante porcs.
Le Temple, deux bouchiers; deux cens moutons{v. 2, p.84}, vint-quatre beufs, vint-huit[637] veaulx, trente-deux porcs.
Saint-Martin: deux cent cinquante moutons, trente-deux beufs, trente-deux veaulx, vint-deux[638] porcs.
Somme des boucheries de Paris, pour sepmaine, sans le fait du Roy et de la Royne et des autres nos seigneurs de France, trois mille quatre-vint moutons, cinq cent quatorze beufs, trois cent six veaulx, six{v. 2, p.85} cens porcs[639]. Et au vendredi absolut[640], sont vendus de deux mille à trois mille lars[641].
Pour ce qu’il a cy-devant esté parlé du fait du bouchier et poullaillier, le fait de l’ostel du Roy en office de boucherie monte bien, pour sepmaine, six-vints moutons, seize beufs, seize veaulx, douze porcs: et par an deux cens lars.
Le fait du poullaillier: par jour, six cens poullailles, deux cens paires de pigons, cinquante chevriaux, cinquante oisons.
La Royne et les enfans. Boucherie, pour sepmaine, quatre-vins moutons, douze veaulx, douze beufs, douze porcs: et par an six-vins lars.—Le fait du poullaillier: pour jour, trois cens poullailles, trente-six chevreaulx, cent cinquante paires de pigons, trente-six oisons.
Orléans[642] aussi.
Berry aussi.
Les gens de Monseigneur de Berry dient que aux dimenches et grans festes, il leur convient trois beufs, trente moutons, huit-vins douzaines de perdris, et connins à l’avenant, mais j’en doubte.—Avéré depuis.—Et est certain que[643] plusieurs grans festes, dimenches et jeudis, mais le plus commun des autres jours est à deux beufs et vingt moutons.—Nota encores que à la court de Monseigneur de Berry on fait livrée à pages et à varlets des joes de beuf, et est le museau du beuf taillié à travers, et les mandibules demeurent pour{v. 2, p.86} la livrée, comme dit est.—Item, l’en fait du col du beuf livrée ausdis varlets.—Item, et ce qui vient après le col est le meilleur de tout le beuf, car ce d’entre les jambes de devant, c’est la poitrine, et ce dessus, c’est le noyau[644].
Bourgoingne, de parisis à tournois du Roy[645].
Bourbon, la moitié du fait de la Royne.
Item, et sans espandre ou baillier vostre argent chascun jour, vous pourrez envoïer maistre Jehan au bouchier, et prendre char sur taille[646], considérant ce qui s’ensuit:
En la moitié de la poitrine de beuf a quatre pièces, dont la première pièce a nom le grumel[647]; et toute celle moitié couste dix blans[648] ou trois sols. En la longe a six pièces, et couste six sols huit deniers ou six sols. La surlonge trois sols. Ou giste[649] a huit pièces et est la plus grosse char, mais elle fait la meilleure eaue[650] après la joe; et couste le giste, huit sols.
Le quartier de mouton a quatre pièces ou trois pièces et l’espaule, et couste huit blans ou trois sols.
Le quartier de veel, huit sols. Porc[651]....{v. 2, p.87}
Et nota que ce que l’en dit la poictrine d’un beuf, l’en dit le brichet d’un mouton: et quant l’en parle d’un cerf, l’os d’icelle poictrine est nommé la hampe.
De la poictrine d’un beuf, la première pièce qui part d’emprès le colet est appellée le grumel, et est la meilleur. D’un mouton, le flanchet est ce qui demeure du quartier de devant quant l’espaule en est levée.—Item, l’en dit le couart[652] d’un cerf.—Item, les dentés sont les c......ns.
La surlonge trois sols. La longe six sols. La char d’un mouton dix sols.
Après ces choses, convient dire et parler d’aucuns termes généraulx qui regardent fait de queurie[653] en aucune qualité, et après sera monstré à congnoistre et choisir les viandes desquelles l’en doit ouvrer comme il s’ensuit:
Primo, que en toutes sausses et potages lians en quoy l’en broie espices et pain, l’en doit premièrement broïer les espices et oster du mortier, car le pain que l’en broie après, requeut ce qui des espices est demouré; ainsi on ne pert rien ce qu’on perdroit qui feroit autrement.
Item, des espices et lieures[654] mises en potages, l’en ne doit riens couler[655], combien que sausses si fait, afin que les sausses soient plus clères et aussi plus plaisans.
Item, sachiez que pou advient que pois ou fèves ou autres potages s’aoursent[656], se les tisons ardans ne touchent au cul du pot quant il est sur le feu.—Item,{v. 2, p.88} avant que ton potage s’aourse, et afin qu’il ne s’aourse, remue-le souvent au cul du pot et appuie ta cuillier au fons, afin que le potage ne se preigne là. Et nota que si tost que tu apparceveras que ton potage s’aoursera, si ne le remue point, mais l’oste tantost de dessus le feu et le mets en un autre pot.
Item, nota que communément tous potages qui sont sur le feu surondent et s’en vont sur le dit feu jusques à ce que l’en ait mis au pot sel et gresse, et depuis, non.
Item, nota que le meilleur chaudeau qui soit, c’est de la joe de beuf lavée en eaue deux fois ou trois, puis boullir et bien escumer.
Item, l’en scet se un connin est gras, à luy taster un nerf ou col entre les deux espaules, car là scet-l’en s’il a grosse gresse par le gros nerf; et s’il est tendre, l’en le scet à luy rompre une des jambes de derrière.
Item, nota qu’il y a différence entre les queux, entre boutonner et larder, car boutonner est de giroffle et larder est de lart.
Item, des brochets, le laictié vault mieulx que l’ouvé, se ce n’est quant l’en veult faire rissolles, pour ce que des œuvés l’en fait rissolles, ut patet in tabula. Des brochets, l’en dit lancerel, brochet, quarrel, lux et luceau[657].
Item, aloze franche entre en Mars en saison.
Item, carpe doit estre très cuite, ou autrement c’est péril de la mangier.
Item, plais[658] sont doulces à applanier à la main, et lymandes au contraire.
Item, à Paris, les oyers[659] engressent leurs oies de{v. 2, p.89} farine, non mie la fleur ne le son, mais ce qui est entre deux, que l’en appelle les gruyaux ou recoppes: et autant comme ils prennent de ces gruyaux ou recoppes, autant mettent-ils d’avoine avec, et meslent tout avec un petit d’eaue, et ce demeure ensemble espais comme paste, et ceste viande mettent en une goutière[660] sur quatre piés, et d’autre part, de l’eaue et lictière nouvelle chascun jour, et en quinze jours sont gras. Et nota que la lictière leur fait tenir leurs plumes nettes.
Item, pour faisander chapons et gélines, il les convient saignier par la gueule et incontinent les mettre et faire morir en un scel d’eaue très froide, et il sera faisandé ce jour mesmes comme de deux jours tué.
Item, l’en congnoist les jeunes malars[661] des viels, quant ils sont aussi grans les uns comme les autres, aux tuyaux des esles qui sont plus tendres des jeunes que des vieulx.—Item, l’en congnoist ceulx de rivière à ce qu’ils ont les ongles fins, noirs, et aussi ont les piés rouges, et ceulx de paillier[662] les ont jaunes. Item, ont la creste[663] du bec, c’est assavoir le dessus, vert tout au long, et aucunes fois les masles ont au travers du col, endroit le hasterel[664], une tache blanche, et sont tous d’un plumage et ont la plume de dessus la teste très ondoiant.
Item, coulons ramiers sont bons en yver, et congnoist-l’en les vieulx à ce que les venneaulx[665] de leurs{v. 2, p.90} esles sont tout d’une couleur noire, et les jeunes d’un an ont les venneaulx cendrés et le surplus noir.
Item, l’en congnoist l’aage d’un lièvre au nombre des pertuis qui sont dessoubs la queue, car pour tant de pertuis, tant d’ans.
Item, les perdris qui ont les plumes bien serrées et bien joinctes à la char, et sont arrangéement et bien joinctes et sont comme les plumes sont sur un esprivier, sont fresches tuées: et celles dont les plumes se haussent contremont et laissent la char et se desrangent de leur siége et vont sans ordre çà et là, sont vieilles tuées.—Item, à tirer les plumes du braier[666], le sent-l’en.
Item, la carpe qui a l’escaille blanche et non mie jaune ne rousse, est de bonne eaue. Celle qui a gros yeulx et saillans hors de la teste, et le palais et langue mols et ouny, est grasse. Et nota, se vous voulez porter une carpe vive par tout un jour, entortilliez-la en foing moullié et la portez le ventre dessus, et la portez sans luy donner air, c’est assavoir en bouges ou en sac.
La saison des truites commence en[667]..... et dure jusques à Septembre. Les blanches sont bonnes en yver, et les vermeilles[668] en esté. Le meilleur de la truite est la queue, et de la carpe c’est la teste.
Item, l’anguille qui a menue teste, becque délié,{v. 2, p.91} cuir reluisant, ondoiant et estincelant, petis yeulx, gros corps et blanc ventre, est la franche. L’autre est à grosse teste, sor[669] ventre, et cuir gros et brun.
Cy-après s’ensuivent aucuns disners et soupers de grans seigneurs et autres, et notes sur lesquels vous pourrez choisir, reconqueillir[670] et aprendre des quels mets qu’il vous plaira, selon les saisons et les viandes qui seront ès païs où vous serez, quant vous aurez à donner à disner ou à soupper.
I. Disner a jour de char, servi de trente et un mès a six assiettes.
Première assiette. Garnache[671] et tostées[672], pastés de veel, pastés de pinparneaux, boudins et saucisses.
Seconde assiette. Civé de lièvres et les costellettes, pois coulés, saleure et grosse char, une soringue d’anguilles (12)[673] et autre poisson.
Tierce assiette. Rost: connins, perdris, chappons, etc., lux, bars, carpes, et un potage escartelé (35, 36, 37).
Quarte assiette. Oiseaulx de rivière à la dodine, ris engoulé (37), bourrée à la sausse chaude et anguilles renversées (26).{v. 2, p.92}
Quinte assiette. Pastés d’aloés, ruissolles, lait lardé (41), flaonnés succrés.
Sixième assiette. Poires et dragées, neffles et nois pelées. Ypocras et le mestier[674].
II. Autre disner de char de vint-quatre mets a six assiettes.
Première assiette. Pastés de veel menu déhaché à gresse et mouelle de beuf, pastés de pinparneaux, boudins, saucisses, pipefarce, et pastés norrois de quibus (41).
Seconde assiette. Civé de lièvre (16) et brouet d’anguille (17); fèves coulées, saleures, grosse char, s.[675] beuf et mouton.
Tiers mets. Rost: chappons, connins, veel et perdris, poisson d’eaue doulce et de mer, aucun taillis (36) avec doreures (39).
Quart mets. Mallars de rivière à la dodine, tanches aux soupes et bourrées à la sausse chaude[676] (26), pastés de chappons de haulte gresse à la souppe de la gresse et du persil.
Quint mets. Un boulli lardé, ris engoulé, anguilles renversées, aucun rost de poisson de mer ou d’eaue doulce, roissolles (41), crespes et vielz sucre (41).
La sixième assiette et derrenière pour yssue. Flanciaux succrés et lait lardé, neffles, noix pellées, poires cuites et la dragée. Ypocras et le mestier.{v. 2, p.93}
III. Autre disner de char.
Premier mès. Pastés de beuf et roissoles, poirée noire, lamproies à froide sauge, un brouet d’Alemaigne de char, une sausse blanche de poisson et une arbolastre, et grosse char de beuf et mouton.
Second mès. Rost de char, poissons d’eaue doulce, poissons de mer, une cretonnée de char, raniolles[677], un rosé de lapereaulx et de bourrées à la sausse chaude,[678] d’oiselets tourtes Pisaines (id est de Pise en Lombardie, et dit-l’en tourtes Lombardes, et y a des oiselets parmi la farce, et en plusieurs lieux cy-après dit tourtes Lombardes).
Tiers mès. Tenches aux souppes, blanc mengier paré, lait lardé, crottes, queue de sanglier à la sausse chaude, chappons à la dodine, pastés de bresmes et de saumon, pleis en l’eaue et leschefrite et darioles.
Quart mès. Fromentée, venoison, rost de poissons, froide sauge, anguilles renversées, gelées de poisson, pastés de chappons à là soupe courte.
IV. Autre disner de char.
Premier mès. Pastés norrois (40), un brouet camelin de char, bignés de mouelle de beuf, soringue d’anguilles, loche en eaue et froide sauge, grosse char et poisson de mer.
Second mès. Rost le meilleur que on peut et poisson{v. 2, p.94} doulx, un bouli lardé, un tieule[679] de char, pastés de chappons et crespes, pastés de bresmes, d’anguilles, et blanc mengier.
Tiers mets. Froumentée, venoison, lamproie à la sausse chaude (26), leschefrites, bresmes en rost et darioles, esturgon et gelée.
V. Autre disner de char.
Premier mets et assiette. Pastés de beuf et de mouelle, civé de lièvre, grosse char, un brouet blanc de connins, chappons et venoison aux souppes, porée blanche, navés, oés salées et eschinées.
Second mets. Rost le meilleur etc., un rosé d’aloés, un blanc mengier, nomblès et queue de sanglier à la sausse chaude (26), pastés de chappons gras, frittures et pastés norroix.
Tierce assiette. Fromentée, venoison, dorures de pluseurs manières, oés et chappons gras à la dodine, darioles de cresme et leschefrites sucrées, bourrées à la galentine chaude (26), gelée de chappons, connins, poucins[680], lapereaux et cochons.
Quarte assiette. Ypocras et le mestier pour issue.
VI. Autre disner de char.
Premier mets. Fèves frasées, un brouet de cannelle (13), un civé de lièvre noir (16), un brouet vert d’anguilles (17), harenc sor, grosse char, navès, tanches aux souppes, oés et eschinées salées, roissolles de mouelle de beuf (4) et hastelés de beuf ut pa[681].{v. 2, p.95}
Second mets. Rost le meilleur que on puet, poisson doulx, poisson de mer, plais en l’eaue, bourrées à la sausse chaude ut[682] lamproions (26), un gravé d’aloés g. i. g.[683], de fleur de peschier, blanc mengier parti, tourtes Lombardes, pastés de venoison et d’oiselets, cretonnée d’Espaigne, harenc frais.
Tiers mès. Froumentée, venoison, dorures, gelées de poisson, chappons gras à la dodine, rost de poisson, leschefrites et darioles, anguilles renversées, escrevices, crespes et pipefarces.
VII. Autre disner de char.
Premier mets. Poirée blanche, hastelés de beuf, grosse char, civé de veel, du brouet houssé.
Second mets. Rost de char, poisson de mer et d’eaue doulce, ranioles Lombardes, une cretonnée d’Espaigne.
Tiers mets. Lamproies, alause[684], un rosé, lait lardé et croutes de lait, tourtes Pisaines id est Lombardes, darioles de cresme.
Quart mets. Froumentée, venoison, doreures, pastés de bresmes et de gornaux, anguilles renversées, chappons gras à la dodine.
Yssue est ypocras et le mestier.—Boute-hors; vin et espices.
VIII. Autre disner de char.
Premier mets. Grosse char, pastés norrois, bignés de mouelle de beuf, brouet camelin de char, soringue{v. 2, p.96} d’anguilles, loches en eaue, poisson de mer et froide sauge.
Second mets. Rost le meilleur qu’on pourra, poisson doulx, un tieule de char, un bouli lardé de chevrel, pastés de chapons, crespes, pastés de bresmes et d’anguilles et blanc mengier.
Tiers mets. Froumentée, venoison, doreures, lamproies à la sausse chaude, leschefrites et darioles, bresmes en rost, boulis au verjus, esturgon et gelée.
IX. Autre disner de char.
Premier mets. Poreaux blans, pastés de beuf, oyes et eschinées, civé de lièvre et de connins, un geneste d’aloés, grosse char.
Second mets. Rost: queue de sanglier à la sausse chaude (26), blanc mengier parti, dodines d’oés, lait lardé et croutes, venoison, doreures, gelées, croutes au lait à la dodine, pastés de chapons, froide sauge, pastés de vache et talemouse.
X. Autre disner de char.
Premier mets. Pois coulés, harenc, anguilles salées, civé d’oestres[685] noir, un brouet d’amandes, tieule, un bouli de brochets et d’anguilles, une cretonnée, un brouet vert d’anguilles, pastés d’argent.
Second mets. Poisson de mer, poisson doulx, pastés de bresme et de saumon, anguilles renversées, une arboulastre brune, tanches à un bouli lardé, un blanc mengier, crespes, lettues, losenges, orillettes et pastés norrois, lux et saumons farcis.{v. 2, p.97}
Tiers mets. Fromentée, venoison, doreures de pommeaulx et de pès d’Espaigne et de chastellier, rost de poisson, gelée, lamproies, congres et turbos à la sausse vert, bresmes au vert jus, leschefrites, darioles et l’entremès grant.
XI. Autre disner.
Premier mets. Pastés de beuf et roissoles, porée noire, un gravé de lamproies, un brouet d’Alemaigne de char, un brouet georgié de char, une sausse blanche de poisson, une arboulastre.
Second mets. Rost de char, poisson de mer, poisson doulx, une cretonnée de char, ranioles, un rosé de lapereaulx et d’oiselets, bourrées à la sausse chaude (26), tourtes Pisaines.
Tiers mets. Tanches aux souppes, blanc mengier parti, lait lardé et croittes[686], queues de sanglier à la sausse chaude (26), chapons à la dodine, pastés de bresmes et de saumon, plais en l’eaue, leschefrictes[687] et darioles.
Quart mets. Fromentée, venoison, doreures, rost de poisson, froide sauge, anguilles renversées, gelée de poisson, pastés de chappons.
XII. Autre disner.
Premier mets. Fèves frasées, un brouet de canelle, un civé de lièvre noir ou brouet d’anguilles vert, harens sors, grosse char, navets, tanches aux souppes, oés et eschinées salées, roissolles de mouelle de beuf.
Second mets. Rost le meilleur qu’on peut, poisson{v. 2, p.98} d’eaue doulce, poisson de mer, plais en l’eaue, bourrées à la sausse chaude, un gravé d’aloués en couleur de fleur de peschier, blanc mengier parti, tourtes Lombardes, pastés de venoison et d’oiselés, cretonnée d’Espaigne, harens frais.
Tiers mets. Froumentée, venoison, doreures, gelée de poissons, chappons gras à la dodine, rost de poisson, leschefrictes et darioles, anguilles renversées, escrevices, crespes et pipefarces.
XIII. Autre disner de char.
Premier mets. Un brouet d’Alemaingne, choulx cabus, une soringue d’anguilles, navez, pastés de beuf, grosse char.
Second mets. Rost le meilleur qu’on pourra avoir, oés grasses à la dodine, poisson d’eaue doulce, blanc mengier, une arboulastre, pastés norrois, crespes, lait lardé, tourtes de lait.
Tiers mets. Pastés de chapon à la doudine, ris engoulé, queue de sanglier à la sausse chaude, leschefrictes et darioles succrées.
Quart mets. Fromentée, venoison, doreures, anguilles renversées, rost de bresmes.
La teste de sanglier à l’entremès.
XIV. Autre disner de char.
Premier mets. Poreaulx blancs à chappons, oé à l’eschinée et à l’andoulle rostie, pièces de beuf et de mouton, un brouet gorgé[688] de lièvres, de veel, de connins.
Second mets. Chappons, perdris, connins, plouviers{v. 2, p.99}, cochons farcis, faisans pour les seigneurs[689], gelée de char et de poisson.
L’entremets. Lux et carpes.
L’entremets eslevé[690]. Cine, paons, butors, hérons et autres choses.
L’issue. Venoison, ris engoulé, pastés de chappons, flaons de cresme, darioles, anguilles renversées, fruit, oublées[691], estrées[692] et le claré[693].
XV. Autre disner de vint quatre mets[694] a trois assiètes.
Premier mets. Pois coulés, anguilles salées et harenc, poireaux aux amandes, grosse char, un brouet jaunet, une salemine, poisson de mer, civé d’oïtres.
Second mets. Rost, poisson doulx, poisson de mer, un brouet de Savoie, un brouet lardé d’anguilles renversées.
Tiers mets. Rost de bresmes, galentine, cine, chapons pelerins, gelée, blanc mengier parti, plais en{v. 2, p.100} l’eaue, turbos à la soucie, darioles de cresme, lamproies à la sausse chaude, doreures, ris engoulé, etc.
SOUPERS.
XVI. Souper de char a quatre assiètes.
Première assiète. Seymé, poules aux herbes, brouet de vertjus et de poullaille, une espinbesche de un bouly lardé, brochereaulx et loche en eaue, rougé et chastelongnes salées.
Second mets. Rost le meilleur que on peut de char et poisson, et drois au persil et au vinaigre, poisson à la galantine, une sausse blanche sur poisson, et fraze de char.
Tiers mets. Pastés de chapons, bécuit de brochets et d’anguilles, laittues, tubesches et une arboulastre, poisson, crespes et pipefarces.
Quart mets. Gelée, escrevices, plais en l’eaue, ables et froide sauge, nomblès à la sausse chaude, pastés de vache et talemouses.—Potage pour faire yssue, appellé gelée.
XVII. Autre souper de char.
Première assiète. Chapons aux herbes, une comminée, poix daguenets, loches au jaunel, venoison aux souppes.
Second mets. Rost le meilleur qu’on peut avoir, gelée, blanc mengier parti, flanceaulx de cresme bien succrés.
Tiers mets. Pastés de chapons, froides sauges, espaules de mouton farcies, brochetons à un rebouly, venoison à la queue de sanglier, escrevices.{v. 2, p.101}
XVIII. Autre souper de char.
Premier mets. Trois manières de potages, chapons entiers en un blanc brouet, une chaudumée de beschets, venoison aux souppes, loches et anguilles tronsonnées dessus.
Second mets. Rost, chapons, connins, perdris, plouviers, mesles[695], oiselets, chevriaulx, un blanc mengier sus, etc., lux carpes et bars, etc., anguilles renversées.—Faisans et cines pour entremets.
Tiers mets. Venoison à la froumentée, pastés de turtres et d’alouettes, tartes, escrevices, harens frais, fruit, claré, nieulles[696], neffles, poires, noix pelées.
XIX. Disners de poisson pour caresme.
Premier mets et assiète. Pommes cuites, grosses figues de Prouvence rosties et fueilles de lorier par-dessus, le cresson et le soret au vinaigre, poix coulés, anguilles salées, harens blans, gravé sur friture de mer et d’eaue doulce.
Second mets. Carpes, lux, soles, rougés, saumons, anguilles.
XX. Autre disner de poisson pour caresme.
Premier mets. Pommes cuites, etc., comme dessus.
Second mets. Carpes, lux, soles, rougés, saumon, anguilles renversées à la boe et une arboulastre.
Tiers mets. Pinperneaulx rostis, merlans fris, marsouin poudré à l’eaue et fromentée, crespes et pastés norrois. Yssue: figues et roisins, ypocras et le mestier, comme dessus est dit.{v. 2, p.102}
XXI. Autre disner de poisson.
Premier mets. Pois coulés, purée, civé d’oïstres, une sausse blanche de brochets et de perches, porée de cresson, harens, graspoix, anguilles salées, loches en l’eaue.
Second mets. Poisson d’eaue doulce et de mer, turbot à la soucie, taillis, un bécuit, anguilles en galentine.
Tiers mets. Rost le plus bel et le meilleur qu’on pourra avoir, blans pastés, larras, loche au waymel, escrevices, perches au percil et au vinaigre, tanches aux souppes, gelée.
XXII. Autre disner de poisson.
Premier mets. Pois coulés, harens, porée, anguilles salées, oïstres, une salaminée de brochets et de carpes.
Second mets. Poisson d’eaue doulce, une soringue d’anguilles, pastés norrois et blanc mengier parti, une arboulastre, pastés, bignés.
Tiers mets. Rost le meilleur, etc., ris engoulé, tartres, leschefrayes et darioles, pastés de saumon et de bresme, une chaudumée.
Quart mets. Taillis, crespes, pipefarces, escherois, loche frite[697], doreures, congres et turbos au soucié[698], tourtes Lombardes, anguilles renversées.
XXIII. Autre disner de poisson.
Premier mets. Pommes cuites, figues grasses, Garnache, cresson et poulés, pois coulés, aloze, anguille{v. 2, p.103} salée, harens et craspois, brouet blanc sur perches, et sèches à un gravé sur friture.
Second mets. Poisson doulx le meilleur qu’on peut et poisson de mer, anguilles renversées, bourrées à la sausse chaude, tenches aux souppes, escrevices, pastés de bresmes et plais en l’eaue.
Tiers mets. Fromentée au marsouin, pastés norrois et maquereaulx rostis, pinperneaulx en rost et crespes, oïttres, sèches frites avec un bescuit de brochereaulx.
XXIV. Autre disner de poisson.
Premier mets. Pois coulés, harenc, anguilles salées, civé d’oïttres noir, un brouet d’amandes, tieule, un bouly de brochets et d’anguilles, une cretonnée, un brouet vert d’anguilles, pastés d’argent.
Second mets. Poisson de mer, poisson doulx, pastés de bresmes et de saumon, anguilles renversées, une arboulastre brune, tanches à un bouly lardé, un blanc mengier, crespes, lettues, losenges, orillettes et pastés norrois, lux et saumon farcis.
Tiers mets. Fromentée au pourpois[699], doreures de pommeaulx et de pets d’Espaigne et de chastellier, rost de poisson, gelée, lamproies, congres et turbot à la sausse vert, bresmes au vert jus, leschefroies, darioles et l’entremès: puis Desserte, l’Issue et le Boutehors.
Cy après s’ensuivent aucuns incidens servans auques[700] a ce propos.
Primo, L’appareil que fist faire M. de Laigny[701] pour{v. 2, p.104} un disner qu’il fist à Monseigneur de Paris, le président, procureur et advocas du Roy et son autre conseil[702], montans{v. 2, p.105} à huit escuelles[703].
Primo, appareil de draps à tendre, vaisselle de sale{v. 2, p.106} et de cuisine, may, herbe vert à mettre sur table, aiguières et hanaps à pié, deux dragouers, salières d’argent, pain de deux jours pour chappeler et pour tranchouers. Pour cuisine: deux grans paelles, deux cuviers à eaue et deux balais.
Nota que Monsr. de Paris ot trois escuiers de ses gens pour luy servir, et fut servi seul et à couvert[704]. Et Monsr. le Président, un escuier, et fut servi seul et non couvert. Item, par le dit de Monsr. le président, le procureur du Roy fut audessus de l’advocat du Roy.
Les assietes et mès s’ensuivent: Garnache deux quartes, c’est à deux personnes une chopine[705], mais c’est sur le trop, car il souffist à trois une chopine et que les seconds en aient. Eschaudés chaulx, pommes de rouvel rosties et dragée blanche dessus, un quarteron: figues grasses rosties, cinq quarterons: soret et cresson, rommarin.{v. 2, p.107}
Potages, c’est assavoir salemine de six becquets et six tanches, poirée vert, et harenc blanc, un quarteron: six anguilles d’eaue doulce salées d’un jour devant et trois mellus trempés d’une nuit devant.
Pour les potages: amandes, six livres; pouldre de gingembre, demie livre; saffren, demie once; menues espices, deux onces; pouldre de canelle, un quarteron; dragée, demie livre.
Poisson de mer: soles, gournaulx, congres, turbot, saumon. Poisson d’eaue doulce: lux faudis[706], deux carpes de Marne[707] faudisses, bresme.
Entremès: plays, lemproie à la boe. Rost: et convient autres touailles et seize[708] pommes d’orenge, marsouin à sa sausse, maquereaux, soles, bresmes, aloses à la cameline ou au vertjus, ris et amandes frictes dessus; succre pour ris et pour pommes, une livre; petites serviettes.
Pour desserte: composte, et dragée blanche et vermeille mise par-dessus: rissoles, flaonnés, figues, dates, raisins, avelaines.
Ypocras et le mestier sont l’issue. Ypocras deux quartes, et est le surplus comme dit est dessus de Garnache[709], oublies deux cens et les supplications[710]. Et nota, pour chascune escuelle l’en prent huit oublies et quatre supplications et quatre estriers, et est largement; et coustent huit deniers pour escuelle.
Vin et espices sont le Boute-hors. Au laver, grâces et aler en la chambre de parement; et lors les servans{v. 2, p.108} disnent, et assez tost après vin et espices[711]; et puis congié.
L’ordenance des nopces que fera maistre Helye en May, à un mardy; disner seulement pour vint escuelles.
Assiette: beurre, rien, pour ce qu’il est jour de char. Item, cerises, rien, pour ce que nulles n’en estoient trouvées; et pour ce assiette nulle.
Potages: chapons au blanc mengier, grenade et dragée vermeille par-dessus.
Rost: en chascun plat un quartier de chevrel: quartier de chevrel est meilleur que aignel; un oison, deux poucins et sausses à ce; orenges, cameline, vertjus, et à ce fraîches touailles ou serviettes.
Entremès: gelée d’escrevices, de loches, lapereaux et cochon. Desserte: froumentée et venoison. Yssue: ypocras et le mestier. Boute-hors: vin et espices.
L’ordonnance du souper que fera ce jour est telle pour dix escuelles.
Froide sauge de moitiés de poucins, de petites oés, et vinaigrette de ce mesmes mets pour icelluy soupper en un plat. Un pasté de deux lappereaulx et deux flaons (jasoit-ce que aucuns dient que à nopces franches convient darrioles), et en l’autre plat la frase de chevreaulx et les demies testes dorées.
Entremets: gelée comme dessus. Issue: pommes et fromage sans ypocras, car il est hors de saison[712].
Dancer, chanter, vin et espices et torches à alumer.
Or convient[713] la quantité des choses dessus dictes et{v. 2, p.109} leurs appartenances et le pris d’icelles, et qui les pourverra[714] et marchandera.
Au boulengier, dix douzaines de blanc pain plat cuit d’un jour devant et de un denier pièce[715].
Pain de tranchouers, trois douzaines de demi pié d’ample et quatre dois de large de haut, cuit de quatre jours devant et sera brun, ou qu’il soit pris ès halles pain de Corbueil[716].
Eschançonnerie: trois paires de vins.
Au bouchier, demy mouton pour faire la souppe aux compaignons et un quartier de lart pour larder; le maistre os d’un trumeau de beuf pour cuire avecques les chapons pour avoir le chaudeau à faire le blanc mengier; un quartier de veel devant pour servir au blanc mengier. Les seconds[717], un trumel de veel derrière ou des piés de veel, pour avoir l’eaue pour la gelée. Venoison[718], un pié en quarreure.
A l’oubloier convient ordonner: primo, pour le service de la pucelle, douzaine et demie de gauffres fourrées[719], trois sols; douzaine et demie de gros bastons,{v. 2, p.110} six sols; douzaine et demie de portes[720], dix-huit deniers; douzaine et demie d’estriers, dix-huit deniers; un cent de galettes succrées, huit deniers.
Item, fut marchandé à luy pour vint escuelles, pour le jour des nopces au disner, et six escuelles pour les serviteurs, qu’il aura six deniers pour escuelle, et servira chascune escuelle de huit oublies, quatre supplications et quatre estriers.
Au poullaillier, vint chappons, deux sols parisis la pièce; cinq chevriaulx, quatre sols parisis; vint oisons, trois sols parisis pièce; cincquante poucins, douze deniers parisis pièce; c’est assavoir quarante rostis pour le disner, cinq pour la gelée et cinq au souper pour froide sauge. Cincquante lappereaux, c’est assavoir quarante pour le disner, lesquels seront en rost, et dix pour la gelée, et cousteront douze deniers parisis chascun. Un maigre cochon, pour la gelée, quatre sols parisis; douze paires de pigons pour le soupper, dix deniers parisis la paire.—A luy convient enquérir de la venoison.
Es halles, pain pour tranchouers, trois douzaines. Pommes grenades pour blanc mengier, trois qui cousteront.... Pommes d’orenges, cincquante qui cousteront[721].... Six frommages nouveaulx et un vieil, et trois cens œufs.
Est assavoir que chascun fromage doit fournir six{v. 2, p.111} tartelettes, et aussi pour chascun fromage convient trois œufs.
Ozeille pour faire vertjus pour les poucins, sauge et percil pour faire la froide sauge, deux cens pommes de blandureau.
Deux balais et une pele pour la cuisine, et du sel[722].
Au saussier, trois chopines de cameline pour disner et souper et une quarte de vertjus d’ozeille.
A l’espicier: dix livres d’amande, quatorze deniers la livre.—Trois livres fourment mondé[723], huit deniers la livre.—Une livre pouldre de gingembre-coulombin, onze sols.—Un quarteron gingembre-mesche, cinq sols[724].—Demie livre canelle batue, cinq sols.—Deux livres ris batus, deux sols.—Deux livres succre en pierre, seize sols.—Une once de saffren, trois sols.—Un quarteron clou[725] et graine entre,{v. 2, p.112} six sols.—Demi quarteron poivre long, quatre sols.—Demi quarteron garingal[726], cinq sols.—Demi quarteron macis[727], trois sols quatre deniers.—Demi quarteron feuille lorier vert, six deniers.—Deux livres bougie grosse et menue, trois sols quatre deniers la livre, valent six sols huit deniers.—Torches de trois livres la pièce, six; flambeaux de une livre la pièce, six; c’est assavoir trois sols la livre à l’achat, et la reprise six deniers moins pour la livre[728].
A luy espices de chambre[729], c’est assavoir orengat, une livre, dix sols.—Chitron[730], une livre, douze sols.—Anis vermeil, une livre, huit sols.—Succre rosat[731], une livre, dix sols.—Dragée blanche, trois livres, dix sols la livre.—A luy hypocras, trois quartes, dix sols la quarte, et querra tout.{v. 2, p.113}
Somme que ceste espicerie monta à douze francs, à compter ce qui fut ars des torches[732], et petit demoura d’espices; ainsi peut estre pris demi franc pour escuelle[733].
A la Pierre-au-Lait[734], un sextier de bon lait non esburré et sans eaue, pour faire la froumentée.
En Grève[735], un cent de costerez de Bourgongne, treize sols; deux sacs de charbon, dix sols.
A la Porte-de-Paris[736]: may, herbe vert, violette, chappeaulx, un quart de sel blanc, un quart de sel{v. 2, p.114} gros, un cent d’escrevices, une chopine de loche, deux pots de terre, l’un d’un sextier pour la gelée, et l’autre de deux quartes pour la cameline.
Or avons primo le service en général, et secondement où les matières seront trouvées: or convient, tiercement, trouver sur ce administreurs et officiers.
Primo, convient un clerc ou varlet qui fera finance d’erbe vert, violette, chapeaulx, lait, fromages, œufs, busche, charbon, sel, cuves et cuviers tant pour sale que pour garde-mengiers, vertjus, vinaigre, ozeille, sauge, percil, aulx nouveaulx, deux balais, une pesle et telles menues choses.
Item, un queux et ses varlets qui cousteront deux francs de loyer, sans les autres drois, mais le queux paiera varlets et portages, et dient: à plus d’escuelles, plus de loyer.
Item, deux porte-chappes[737], dont l’un chappelera pain et fera tranchouers et sallieres de pain, et porteront et le sel et le pain et tranchouers aux tables, et fineront pour la sale de deux ou trois couloueres pour gecter le gros relief[738] comme souppes, pain trenché ou brisié, tranchouers, chars et telles choses: et deux seaulx pour gecter et recueillir brouets, sausses et choses coulans[739].{v. 2, p.115}
Item, convient un ou deux porteurs d’eaue. Item, sergens grans et fors à garder l’uis.
Item, deux escuiers de cuisine et deux aides avec eulx pour le dressouer de cuisine, desquels l’un ira marchander de l’office de cuisine, de paticerie et du linge pour six tables; ausquelles convient deux grans pos de cuivre pour vint escuelles, deux chaudières, quatre couloueres, un mortier et un pestail[740], six grosses nappes pour cuisine, trois grans pos de terre à vin, un grant pot de terre pour potage, quatre jattes et quatre cuillers de bois, une paelle de fer, quatre grans paelles à ance, deux trépiers et une cuillier de fer. Et aussi marchandera de la vaisselle d’estain: c’est assavoir dix douzaines d’escuelles, six douzaines de petits plas, deux douzaines et demie de grans plas, huit quartes, deux douzaines de pintes, deux pos à aumosne[741].{v. 2, p.116}
Item, que[742] l’ostel; sur quoy est assavoir que l’ostel de Beauvais[743] cousta à Jehan du Chesne[744] quatre francs; tables, tresteaulx, fourmes et similia, cinq francs; et la chappellerie luy cousta quinze francs.{v. 2, p.117}
Et l’autre escuier de cuisine ou son aide ira avecques le queux vers le bouchier, vers le poullaillier, l’espicier, etc., marchander, choisir et faire apporter, et paier portages; et auront une huche fermant à clef où seront les espices, etc., et tout distribueront par raison et mesure. Et après ce, eulx ou leurs aides retrairont et mettront en garde le surplus en corbeillons et corbeilles,[745] en huche fermant pour eschever le gast et excès des mesnies.
Deux autres escuiers convient pour le dressouer de sale, qui livreront cuilliers et les recouvreront: livreront hanaps, et verseront tel vin comme chascun leur demandera pour ceulx qui seront à table, et recouvreront la vaisselle[746].
Deux autres escuiers pour l’eschançonnerie, lesquels livreront vin pour porter au dressouer, aux tables et ailleurs; et auront un varlet qui traiera le vin.
Deux des plus honnestes et mieulx savans[747], qui compaigneront tousjours le marié et avec luy yront devant les mets.
Deux maistres d’ostel pour faire lever[748] et ordener l’assiette des personnes[749], un asséeur et deux serviteurs pour chascune table, qui serviront et desserviront: getteront le relief ès corbeilles, les sausses et brouets ès seilles ou cuviers, et retrairont et apporteront la desserte des mets aux escuiers de cuisine ou autres qui{v. 2, p.118} seront ordonnés à la sauver, et ne porteront riens ailleurs.
L’office du maistre d’ostel est de pourveoir des salières pour la grant table; hanaps, quatre douzaines; gobelets couvers dorés, quatre; aiguières, six; cuilliers d’argent, quatre douzaines; quartes d’argent, quatre; pos à aumosne, deux; dragouers, deux.
Une chappelière[750] qui livrera chappeaulx le jour du regard[751] et le jour des nopces.
L’office des femmes est de faire provision de tapisseries, de ordonner à les tendre, et par espécial la chambre parer et le lit qui sera benoist[752].
Lavendière pour tressier[753].
Et nota que se le lit est couvert de drap, il convient penne de menu vair: mais s’il est couvert de sarge, de broderie, ou couste-pointe de cendail, non.
L’ordonnance pour les nopces Hautecourt[754], pour vint escuelles, ou mois de Septembre:
Assiette: roisins et pesches ou petis pastés.{v. 2, p.119}
Potages: civé, quatre lièvres et veau; ou pour blanc mengier vint chappons, deux sols quatre deniers pièce, ou poules.{v. 2, p.120}
Rost: cinq cochons, vint hétoudeaux, deux sols quatre deniers pièce; quarante perdriaux, deux sols quatre deniers pièce. Mortereul ou[755]...{v. 2, p.121}
Gelée: dix poucins, douze deniers; dix lappereaulx, un cochon; escrevices, un cent et demy.
Fromentée, venoison, poires et noix. Nota que pour la fromentée convendra trois cens œufs.
Tartelettes et autres choses, ypocras et le mestier, vin et espices.
Souper.—Gravé de douze douzaines d’oiselets ou de dix canets, ou bouly lardé de venoison fresche. Pastés de quarante lappereaulx, vint poucins, quarante pigons; quarante darioles ou soixante tartelettes.
Nota que trois oiselets en une escuelle, c’est assez; toutesvoies quant l’en a jugiers[756] de chappons vel similia, l’en met trois oiselès et demi jugier avec, en l’escuelle.
LA QUANTITÉ DES CHOSES DESSUS-DICTES.
Au boulengier, ut supra ès autres nopces précédens.
Au pasticier, ut supra.
Eschançonnerie, ut supra.
Au bouchier, trois quartiers de mouton pour faire les souppes aux compaignons, un quartier de lart pour larder, un quartier de veel de devant pour le blanc mengier; pour les servans, venoison.
A l’oubloier, douzaine et demie de gauffres fourrées faites, c’est assavoir de fleur de farine pettrie aux œufs et des leches de frommage mises dedens, et dix-huit autres gauffres pettries aux œufs et sans fromage. Item, douzaine et demie de gros bastons, c’est assavoir{v. 2, p.122} farine pettrie aux œufs et pouldre de gingembre batue ensemble et mis en la fourme, et aussi gros comme une andoulle: et lors mettre entre deux fers sur le feu. Item, douzaine et demie d’autres bastons et autant de portes.
Item, convient au dit regard envoier (oultre le fait dudit oubloier) cinquante pommes de blandureau, les chappeaulx et les ménestriers.
Item, audit oubloier, le service du jour des nopces ut supra ès nopces précédens.
Au poullaillier, les rots et la volaille et venoison ut supra.
Ès halles et à la Porte-de-Paris, les choses appartenans ut supra.
Au saussier, une quarte de cameline pour le disner, et à soupper deux quartes de moustarde.
A l’espicier, espices de chambre: dragée, succre rosat, noisettes confites, chitron et manus-christi[757], quatre livres pour tout. Item, ypocras. Espices de cuisine: poudre blanche, une livre; poudre fine, demie livre; poudre de canelle, demie livre pour blanc mengier. Menues espices, deux onces. Succre en pierre, trois livres; trois pommes grenades; dragée blanche et vermeille, demie livre; amandes, six livres; fleur de ris, une livre; un quart de froment mondé.
Au cirier furent prinses torches et flambeaux à{v. 2, p.123} trois sols la livre, et à deux sols six deniers de reprinse.
Item, pour louage de linge, c’est assavoir pour six tables, trois grans pos de cuivre, pour seize douzaines d’escuelles, deux chaudières, deux[758] couloueres, un mortier, un pestail, six grosses nappes pour cuisine, trois grans pos de terre à vin, un grant pot de terre pour potage, quatre jattes, quatre cuilliers de bois, une paelle de fer, quatre grans paelles à ance, deux trépiés et une cuillier de fer percée; pour ce, cinquante-six sols parisis.
Vaisselle d’estain: dix douzaines d’escuelles, six douzaines de petis plas, deux douzaines et demie de grans plas, huit quartes, deux douzaines de pintes, deux pos à aumosne; pour tout ce, seize sols.
En Grève, ut supra ès autres nopces.
Nota que pour ce qu’ils[759] estoient vefves, ils espousèrent bien matin en leurs robes noires et puis se vestirent d’autres.
Nota des mises extraordinaires pour les nopces Jehan du Chesne. Au queux quatre francs et demi, et aides et portages, un franc: pour tout, cinq francs et demi. Au concierge de Beauvais, quatre francs: pour tables tréteaulx et similia, cinq francs. A la chappellière, quinze frans. Eaue, vint sols. Menestrels huit francs, sans les cuillers et autres courtoisies[760]; et feront le regart{v. 2, p.124}[761] et les acrebades[762]. Sergens deux frans. Herbe vert, huit sols. Flambeaux et torches, dix frans. Vaisselle de cuisine, nappes, touailles et voirres, sept frans. Pots d’estain, quatre frans.