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Une bibliothèque: L'art d'acheter les livres, de les classer, de les conserver et de s'en servir

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V.—SIGNES TYPOGRAPHIQUES

— Tiret ou moins.

Le tiret, appelé moins dans les imprimeries, n'était originairement qu'un signe de mathématiques opposé au plus +. Il remplit en typographie différentes fonctions, dont la principale est de marquer, dans les conversations écrites, le changement d'interlocuteur, et de dispenser ainsi de répéter les expressions: dit-il, répondit-il, reprit-il, etc. C'est Marmontel, assure-t-on, qui a fait le premier un emploi fréquent du tiret dans les dialogues.

Le tiret sert aussi à éviter, dans les tables et nomenclatures, la répétition des mots sous lesquels on le place, ou l'emploi des termes idem ou dito—il s'emploie également pour séparer les matières dans les sommaires ou dans certains textes;—placé après une virgule, un point-virgule ou un point, il renforce, pour ainsi dire, ce signe de ponctuation et accentue le changement de sens, la transition d'idées;—enfin, très souvent maintenant, il remplace la parenthèse. Ces deux derniers modes d'emploi nous viennent des typographes anglais. (Cf. Th. Lefevre, loc. cit., t. I, pp. 49-50; et Daupeley-Gouverneur, loc. cit., pp. 30-31.)

- Trait d'union ou division.

Par une singulière fortune, le trait d'union porte en typographie le nom, à première vue contradictoire, de division. C'est que ce petit signe servant à la fois, selon les règles grammaticales aussi bien que typographiques, à unir certains mots et à indiquer en fin de ligne les coupures des mots par syllabes, on n'a envisagé, en grammaire, que le premier rôle, d'où le nom de trait d'union, et, en typographie, que le second, d'où le nom de division.

Sans relater tous les cas grammaticaux où l'on fait usage du trait d'union, nous remarquerons qu'on l'emploie en français: 1o entre les prénoms ou les initiales des prénoms d'une même personne: Jean-Jacques Rousseau; le jurisconsulte Jean-Baptiste-Victor Proudhon, et l'économiste socialiste Proudhon (P.-J.); les bibliographes Jacques-Charles Brunet, Techener (Jacques-Joseph), J.-M. Quérard, Renouard (A.-A.), etc.;—2o entre les noms du mari et de la femme, les noms propres composés, etc.: Bussy-Rabutin, Royer-Collard, Garnier-Pagès, etc.;—3o entre les mots désignant une ville, un département, une rue, une place, etc.[711]: Pont-à-Mousson (Meurthe-et-Moselle), Brie-Comte-Robert (Seine-et-Marne), rue du Pré-aux-Clercs, rue Pierre-Charron, place Victor-Hugo, avenue Louis-Blanc. Mais cette règle n'est pas applicable aux prénoms étrangers ni à leurs initiales, ni, en général, d'après certaines marches d'imprimerie, aux expressions géographiques ou topographiques non françaises, et l'on écrit sans trait d'union: Ebert (Friedrich Adolf), bibliographe allemand; John S. Billings, bibliographe américain; E. F. Taylor et Tedder (H. R.), bibliographes anglais; etc.[712];—et Civita Vecchia, New York, Oil City, Vera Cruz, San Francisco, San José del Morro, Santo Domingo, São Paulo, etc. (Cf. Leclerc, loc. cit., p. 136; Reclus, Géogr. univ., index alphabétiques à la fin des volumes; etc.) Il est bien entendu que si les noms de Pierre Charron, Victor Hugo, Louis Blanc, au lieu de désigner une rue, une place, etc., s'appliquent à ces écrivains eux-mêmes, ils ne prennent pas de trait d'union.

Contrairement à un usage assez répandu, on ne met pas de traits d'union entre les noms propres composés d'un nom et d'un surnom: Julien l'Apostat, Jean sans Peur, Louis le Grand, etc.; à moins que ces noms ne désignent un monument, une rue, une place, etc.: la tour de Jean-sans-Peur, le lycée et la rue Louis-le-Grand, etc.

On emploie encore le trait d'union entre les mots exprimant des nombres inférieurs à cent: dix-sept, dix-huit, soixante-dix-neuf, deux cent quatre-vingt-quinze, etc.; excepté entre les noms de nombre unis par la conjonction et: vingt et un, soixante et onze, etc.

Placé entre deux chiffres ou nombres, le trait d'union tient lieu de la préposition à ou de la conjonction et: pp. 12-19 (c'est-à-dire de la page 12 à la page 19 inclusivement); années 1862-69 (de l'année 1862 à l'année 1869 inclusivement); pp. 8-9 (pages 8 et 9); années 1896-97 (1896 et 1897). (Cf. Leclerc, loc. cit., pp. 149-150.)

Ajoutons, à propos de la division typographique, qu'on s'est jadis quelquefois servi d'un double trait (=) pour indiquer les coupures de mot en fin de ligue.

« » Guillemets.

On place entre guillemets les citations, les dialogues, les locutions que l'on ne veut pas mettre en italique, mais sur lesquelles on désire néanmoins appeler l'attention, etc. «Nous ne saurions trop protester, en passant, contre l'introduction des informes guillemets anglais consistant en virgules retournées et apostrophes (“ ”): c'est simplement affreux, surtout dans les gros caractères. Nombre d'idées anglaises, qu'il est de bon genre d'adopter, sont dans ce cas.» (Leclerc, loc. cit., p. 148.) La protestation est des plus justifiées. Comme nous l'avons noté, dès la préface de ce livre, et avec attestation à l'appui, «rien ne réussit mieux en France que ce qui n'est pas français».

( ) Parenthèses.

[ ] Crochets.

Les parenthèses servent à enfermer, au milieu d'une phrase, «les mots formant un sens distinct et séparé, les incidences qui peuvent être supprimées sans nuire au sens général, les dates, renvois, sources diverses, indications, explications, réflexions, etc., les mots et phrases venant en sous-titre.» (Leclerc, loc. cit., p. 145.)

Les crochets s'emploient pour enclore une restitution de texte; pour enfermer, au début d'un article, soit une note, soit une introduction de plus ou moins d'étendue et généralement composée en caractère différent; soit encore pour placer une intercalation dans une autre déjà mise entre parenthèses. On emploie aussi un crochet dans la composition des vers pour rattacher le mot ou la fraction de mot excédant la justification.

… Points suspensifs.

Voir Astérisque.

(?) Point d'interrogation entre parenthèses.

Placé après un mot ou une phrase, ce point d'interrogation indique que ce mot est douteux, que cette phrase suggère une incertitude dans l'esprit de l'auteur, comme s'il s'interrogeait et se demandait: Est-ce bien cela?

(!) Point d'exclamation entre parenthèses.

Indique une chose bizarre, déraisonnable ou grotesque, digne de provoquer l'étonnement, le rire ou la moquerie.

§ § Paragraphe.

Signe abréviatif des parties d'un chapitre, d'un article, d'un titre, etc.: Chap. XV, § 5.

* * Astérisque.

L'astérisque (petit astre, petite étoile), qui, dans les anciens manuscrits, servait à indiquer quelque défectuosité dans le texte, s'emploie aujourd'hui comme appel de note ou désignation conventionnelle, pour séparer les deux parties d'un verset. Il s'emploie aussi, au nombre de trois, comme abréviation d'un nom propre: Le comte de M***; Arouet de V***. Au lieu de trois astérisques, on peut en mettre autant qu'il y a de lettres supprimées: Arouet de Voltaire, par exemple, s'écrirait: Arouet de V*******. Dans ce dernier cas, on remplace souvent maintenant les astérisques par des points placés en pied de ligne: Arouet de V…….. Il va sans dire qu'ici le dernier point—point final de la phrase—est en plus et ne compte pas. Lorsqu'on veut indiquer une suppression dans un texte, dans un titre de livre, etc., on se sert également de ces points, dits points de suspension ou points suspensifs. Quelle que soit l'étendue de la suppression, trois points suffisent pour l'indiquer, ainsi que nous l'avons dit[713]; mais, ici comme tout à l'heure, la ponctuation exigée par le sens de la phrase s'ajoute et n'entre pas en compte.

Les astérisques, disposés en triangle (⁂) à la fin d'un paragraphe, au milieu d'une ligne de blanc, tiennent lieu de filet de séparation ou de cabochon (petit fleuron, figurine ou vignette, qu'on emploie en typographie, surtout dans la composition des journaux, pour les séparations de texte et les en-tête d'alinéas). Si cette fin de paragraphe tombe au bas de la page ou de la colonne, la ligne de blanc, c'est-à-dire les astérisques ou le cabochon, est mieux placée en tête de la page ou de la colonne suivantes. (Cf. Leclerc, loc. cit., p. 151.)

† Croix.

La croix, appelée aussi poignard ou obélisque et anciennement obèle (ὀβελός, broche, épieu), s'emploie dans les livres d'église et dans les dictionnaires avec une valeur conventionnelle. Dans une biographie, placé devant un millésime, ce signe indique que le décès du personnage a eu lieu à cette date. La croix sert aussi (servait surtout) de renvoi à des notes marginales. Dans les ouvrages de géographie, elle sert à indiquer un évêché, tandis que l'archevêché a pour signe ☨.

¶ Pied-de-mouche.

S'employait autrefois, ainsi que la croix et l'astérisque, pour marquer un renvoi, comme appel de note. Servait aussi à signaler dans un texte des passages spéciaux, à indiquer des séparations et à accentuer, en quelque sorte, certains alinéas.

℣ Verset.

℟ Répons.

Ces deux signes sont employés dans les livres d'église (paroissiens, missels, bréviaires, etc.) pour indiquer, le premier, les versets de l'Écriture sainte qui se disent ou se chantent aux offices, et forment leçons ou chapitres; et l'autre, les paroles (réponses ou répons), ordinairement tirées aussi de l'Écriture sainte, qui se disent ou se chantent après les leçons ou chapitres. (Cf. Littré, Dictionn.)

&, & Et (conjonction).

☞ Index.

C'est-à-dire: Voyez, remarquez.

| ou || / ou // Trait ou double trait vertical ou oblique.

Dans la copie d'un texte imprimé et particulièrement d'un titre, ces traits servent à indiquer les divisions des lignes, les fins de lignes. (Voir supra, chap. VIII, pp. 249-252.)

Dans certains incunables, les traits obliques / ou // remplacent les virgules et les alinéas. (Voir Encyclop. britannica, t. III, p. 653, col. 2.)

[¶]

Dans les incunables, ce signe indique des alinéas qu'on désire caractériser, des phrases qu'on veut détacher du texte davantage. Le signe typographique actuel [C carré], employé dans la correction des épreuves et indiquant l'alinéa ordinaire, en est dérivé. (Voir supra, chap. VIII, p. 250, 2e ligne du bas.)

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