← Retour

Aphorismes du temps présent

16px
100%

LIVRE PREMIER
La Vie Affective

I
LE CARACTÈRE ET LA PERSONNALITÉ

On ne se conduit pas avec son intelligence mais avec son caractère.


Le moi se compose d’un agrégat d’éléments ancestraux souvent hétérogènes. Son unité est aussi fictive que celle d’une armée.


La psychologie de chaque individu est formée de psychologies superposées : psychologie de sa race, de sa famille, de son groupe. Un homme peut rarement se soustraire à cette addition de forces accablantes.


Les transformations brusques du caractère tiennent à ce que certains événements, font surgir une des nombreuses personnalités qui sommeillent en nous.


Il est impossible de juger les sentiments d’un être par sa conduite dans un cas déterminé. L’homme d’une circonstance n’est pas celui de toutes les circonstances.


Pour connaître un homme il faut l’étudier en temps de grandes crises, notamment de révolutions. Alors seulement se révèlent ses diverses possibilités de caractère.


La constance du caractère représente surtout la constance du milieu.


Les raisons attribuées par nous à nos actes constituent rarement leurs vrais mobiles. Elles servent surtout à justifier les impulsions sentimentales et mystiques qui nous ont fait agir.


Les contradictions de la conduite tiennent souvent aux dissemblances de la volonté consciente et de la volonté inconsciente.


L’intelligence et la volonté inconscientes, étant quelquefois supérieures à l’intelligence et à la volonté conscientes, des hommes raisonnant fort mal peuvent agir très bien.


Supposer chez les autres des sentiments identiques à ceux qui nous mènent, est se condamner à ne jamais les comprendre.


Grâce aux suggestions de l’habitude, les hommes savent chaque jour ce qu’il faut dire, faire et penser.


L’être irrésolu n’est pas guidé par ses véritables désirs, mais par ceux qu’il se suppose au moment où il est forcé d’agir.


Quand on ne gêne pas par sa volonté, on nuit souvent par son inertie.


Les héros populaires n’ont pas toujours le caractère qu’on leur attribue, mais ils finissent souvent par le prendre.


Les œuvres importantes résultent plus rarement d’un grand effort, que d’une accumulation de petits efforts.


Le proverbe : Qui peut le plus peut le moins, n’est pas toujours exact. Les esprits supérieurs réussissent parfois mieux les choses difficiles que les choses faciles.


La vanité est pour les imbéciles une puissante source de satisfaction. Elle leur permet de substituer aux qualités qu’ils n’acquerront jamais, la conviction de les avoir toujours possédées.


Nul besoin d’être loué quand on est sûr de soi. Qui recherche la louange doute de sa propre valeur.


Appartenir à une école, c’est perdre sa personnalité ; ne pas appartenir à une école, c’est abdiquer toute possibilité de prestige.


Les grandes pensées viennent de l’esprit et non du cœur comme on l’a soutenu, mais c’est du cœur qu’elles tirent leur force.


Le caractère et l’intelligence étant rarement réunis, il faut se résigner à choisir ses amis pour leur caractère et ses relations pour leur intelligence.


Chez les natures sensibles, l’âme est une mer changeante, sur laquelle la lumière des choses se reflète chaque jour avec des nuances différentes.


Les grandes supériorités mentales sont un peu comparables aux monstruosités botaniques artificiellement créées. Leur descendance retourne toujours au type moyen de l’espèce.


On n’est pas maître de ses désirs, on l’est souvent de sa volonté.


Rien ne résiste à une volonté forte et continue : ni la nature, ni les hommes, ni la fatalité même.


Une volonté forte a le plus souvent un désir fort pour soutien. Le désir est l’âme de la volonté.

Chargement de la publicité...