Eldorado : $b roman
IV
Dès le lendemain, le temps se remit tout à fait au beau, la mer redevint aussi tranquille qu’au départ. Tout compte fait, en rationnant les vivres, on pouvait tenir deux mois, davantage même, grâce à la pêche. D’ici là le salut était possible. On se trouvait loin de la ligne des grands courriers de Bordeaux à Buenos-Ayres, mais l’Atlantique était aujourd’hui sillonné en tous sens par les navires. L’Eldorado lui-même avait laissé des épaves sur son parcours, qui aideraient à sa découverte. Tout espoir enfin n’était pas perdu.
Cependant, la nécessité d’une discipline s’imposant à tous, chacun, d’instinct, avait repris sa place. Seul, Marzouk avait déserté le quartier des émigrants et s’était installé aux premières, dans la meilleure cabine. Et d’abord, il se montra assez bon prince, prit les humbles sous sa protection, manifesta des sentiments de sociabilité, se créa même des partisans. Toute une petite cour s’organisa autour de lui : les garçons, les trois cuisiniers, les deux cambusiers, le boulanger, le boucher, le pâtissier-glacier, enfin à peu près tout le personnel qui, en temps normal, se trouvait placé sous les ordres directs du commissaire.
Ce dernier, qui n’était point né pour le commandement, n’avait pas tenté de maintenir son autorité, jugeant d’ailleurs toute résistance inutile autant que dangereuse. Admirable fonctionnaire, il continuait à tenir son livre de bord, jour par jour, avec une régularité et un abrutissement exemplaires.
Marzouk eut bientôt ses favoris : des intrigants et des flatteurs, ceux qui savaient le prendre. Le mulâtre devint son bras droit, en brute docile et dévouée, respectueuse de la force. Sur un signe du maître, il eût évidemment tout massacré, doué lui-même d’une musculature herculéenne.
Les deux maîtres d’hôtel gagnèrent également les bonnes grâces du despote ; ils avaient découvert son faible : l’amour-propre. Avant d’être champion des luttes à mains plates, Marzouk avait dompté des fauves dans les foires, et il montrait complaisamment deux blessures, la morsure d’un lion, le coup de griffe d’un tigre : deux animaux terribles que nul autre, à l’en croire, n’avait osé affronter. Un dur métier, affirmait-il, mais qui donnait des satisfactions, car il avait été l’amant de cœur de bien des dames, même d’une comtesse authentique, sans compter les petites grues de Montmartre qui lui offraient gentîment leurs modestes économies, toujours acceptées, sans reconnaissance. Et il en avait défloré des tas, de ces gigolettes faubouriennes, qui, depuis, avaient mal tourné. Les femmes aimaient les muscles puissants. Et il montrait ses biceps, qui avaient soulevé jusqu’à trois cents kilos. Quant au nègre, champion des luttes à mains plates dans le Nouveau Monde, qui l’avait provoqué, Marzouk en souriait de pitié, en faisant un simple geste du pouce pour montrer qu’il l’eût écrasé comme une punaise.
Telle était, en face du danger, sa confiance de brute habituée à vaincre, qu’il ne semblait pas avoir conscience de la situation présente. Ou plutôt quelque chose l’avertissait que son heure n’était pas venue, qu’il se tirerait encore d’affaire. Comment ? Il ne savait pas, ne cherchait pas ; il sentait ça, voilà tout.
Aussi, il engouffrait, d’un appétit effrayant, excité, disait-il, par l’air de la mer, et s’adjugeait les meilleurs morceaux, la part du lion. Dix bouches comme la sienne, les vivres eussent été épuisés en moins de huit jours. D’ailleurs, il n’acceptait à cet égard aucune observation malveillante. A chacun selon ses besoins.
A table, Marzouk occupait carrément la place d’honneur, celle du commandant. Un vrai coup d’État. Il ne causait guère, mais se livrait de temps à autre à quelque incongruité, pour embêter les bourgeois. Il eût aisément rivalisé de lyrisme avec un certain personnage d’un roman célèbre que, par hasard, il avait lu : La Terre. Les exercices éoliens de Jésus-Christ n’eussent paru, en comparaison, qu’un souffle léger, un zéphyr dérisoire.
Devant Mme Larderet seule, Marzouk contenait respectueusement le tumulte de ses entrailles. Il avait pour la vénérable veuve un petit grain de sentiment, roulait vers elle des regards de tendresse, lui pinçait parfois la taille. Mais elle se sauvait en jetant des cris éperdus.
— Il veut me violer ! Défendez-moi, défendez-moi !
Dans une minute d’égarement, elle avait imploré la protection du colosse ; maintenant, elle en avait peur, se cachait partout, passait des heures à fond de cale, pour qu’il ne la découvrît pas.
Personne, parmi ces Français chevaleresques, ne venait à son secours, ni Danglar, ni Conseil, ni M. Gallerand lui-même, encore étourdi par la tragique confession de sa femme et plongé dans une sorte de sommeil magnétique. Par moments, ses yeux troubles vacillaient dans son visage blême. C’était la fin de sa longue illusion, la banqueroute de toutes ses idées anciennes. Le monde, la vie lui étaient apparus brusquement sous un autre jour, et il sentait que quelque chose s’effondrait en lui, car il avait cru à tout, à la fidélité, à la reconnaissance, au désintéressement, doué d’un robuste optimisme, d’une candeur extraordinaire, sous sa rude écorce de vieux soldat. Ah ! de quelle fange était pétri le cœur humain ? Sa grande terreur à lui était d’exister encore, de n’être point déjà, avec ce navire, au fond de l’abîme et de l’oubli.
Un soir qu’il se trouvait à l’avant du pont, en proie à ces pensées sombres, il s’arrêta devant Si-Mohamed, cet être singulier qu’il avait considéré jusqu’alors comme inférieur, un barbare, une sorte d’inconscient ; et, surpris de sa sérénité, pressentant tout à coup qu’il y avait dans ce crâne une conception particulière des choses, peut-être juste, il rompit le silence farouche qu’il gardait depuis trois jours et entreprit d’interroger l’Arabe :
— Comment fais-tu pour être heureux ? lui demanda-t-il. Quel est donc le secret de ton insouciance et de ta tranquillité ? Pénètre-moi de ta philosophie consolante, qui ne regrette rien, qui pardonne tout, qui chasse la douleur et le remords, puisque, selon toi, tout est fatalité, puisqu’il n’y a ni libre arbitre, ni responsabilité humaine, ni coupable, ni crime, puisque tout ce qui advient est nécessaire… Apprends-moi à me soumettre, à tout excuser, à me résigner, à ne plus souffrir !
Mais Si-Mohamed n’entendait pas le français, il comprit pourtant que cet homme l’implorait et répéta ces deux mots : « Mektoub ! Rabbi Gibou ! » Puis, il fit un geste qui signifiait : va-t’en, laisse-moi. M. Gallerand s’éloigna lentement, avec un branle sénile de la tête.
Les autres passagers ne se souciaient pas davantage de protéger Mme Larderet contre les assiduités de Marzouk. Même, les dames n’en étaient point fâchées, car, pendant ce temps, l’ignoble brute ne les poursuivait pas. Danglar prétendait que Mme Larderet exagérait ses frayeurs et les brutalités dont elle se disait victime :
— Voyons, madame, il vous a à peine touchée.
— Je voudrais vous y voir ! riposta la veuve. Quand il vous touche, il vous broie les os… Il a des doigts de fer, des mains larges comme des épaules de mouton.
Conseil, cependant, crut devoir intervenir, un jour, par galanterie, et faire entendre à Marzouk, en emmiellant sa voix et avec des raisonnements subtils, qu’il se comportait d’une façon inconvenante. Le littérateur-conférencier ne manquait pas de séduction, ni de prestige. Dans la bonne société, il donnait le ton, exerçait une façon de royauté spirituelle. C’était un écrivain jeune encore, dans tout l’éclat du snobisme, homme du monde, bien pensant, très beurré. Ses livres pouvaient être mis dans toutes les mains. Entouré des dames, il parlait bien, le geste arrondi, la bouche en cœur. « Charmant, charmant », répétait-on. Et les salons l’avaient lancé. A bord, il avait un moment éclipsé le beau Danglar lui-même, toujours victorieux dans leurs assauts d’intellectualité, l’obligeant à s’en tirer par un fin sourire. Enfin, suivant l’exemple d’illustres devanciers, il s’était embarqué pour répandre sa belle réputation d’abord, le goût des belles-lettres ensuite, en Amérique. Irrésistible, l’illustre écrivain se flattait d’adoucir Marzouk. Mais, dès les premiers mots, celui-ci l’interrompit.
— Toi, va-t’en voir si j’y suis, là-bas, et un peu plus vite que ça.
Et vlan ! il lui lança à toute volée son pied dans le derrière.
Puis, il le rappela :
— Écoute ici… ramène-toi, j’ai à te parler.
Conseil s’avança comme un chien qu’on va fouetter.
— Comment t’appelles-tu ?… Ah ! réponds, si tu ne veux pas que je te corrige !
Le conférencier déclina son nom.
— Qu’est-ce que tu fais de ton métier ?
— Homme de lettres… rédacteur à la Revue des Deux Mondes.
Marzouk ricana.
— C’est pas un métier, ça, fit-il. Je crois que tu te fous de moi, sans que ça paraisse… Eh bien, ici, il n’y a plus de bourgeois, plus de fainéant. Faut que tout le monde travaille. A partir de maintenant, tu iras tous les jours à la cuisine, tu nettoieras les casseroles et tu éplucheras les pommes de terre… C’est compris ?… Réponds, nom de Dieu ! Ah ! je vois que ça va mal finir.
— Bien, bien, balbutia Conseil en se sauvant.
— J’irai voir tout à l’heure à la cuisine si tu y es, lui cria Marzouk.
Le pouvoir absolu commençait à le griser, il devenait un tyran intolérable. Certaines têtes lui déplaisaient, celle de M. Rolande, entre autres ; et, un matin, sans raison, il le chassa des premières, avec défense expresse d’y remettre les pieds. Puis, il leur distribua à tous des besognes, les plus sales corvées, ordonnant aux uns de nettoyer le pont à grande eau, aux autres de balayer le salon ou de laver la vaisselle. D’un Anglais très digne, qui portait de beaux favoris, il prétendit faire un maître d’hôtel spécialement attaché à son service.
D’ailleurs, méfiant et soupçonneux comme tous les despotes, il avait organisé l’espionnage pour déjouer les complots. La nuit, le mulâtre couchait à la porte de sa cabine, et lui-même dormait avec un revolver chargé, à ses côtés.
Les matelots ne se liguaient pas contre lui ; il ne les gênait point, n’exerçant son empire que sur les bourgeois. Même, il était au mieux avec tous les hommes de l’équipage, les favorisait dans la distribution des vivres. Et c’était aussi pour eux le repos. Puisque les passagers de première faisaient tout le travail, les autres n’avaient plus qu’à se croiser les bras. La paix, l’ordre, la discipline régnaient à bord. Marzouk s’était presque rendu populaire. Tous ces bourgeois si fiers, si dédaigneux, quand ils étaient les maîtres, il les avait tout de même rudement matés. Aucun n’osait broncher, et rien n’était comique comme de les voir turbiner. Les pauvres bougres, qui avaient toujours pâti, se régalaient de ce spectacle. Le peuple était vengé. Et la confiance même renaissait, Marzouk communiquant à tous son optimisme, assurant qu’on serait sauvé. Par son ordre, un bourgeois se trouvait posté là-haut, de l’aube au crépuscule, pour surveiller l’horizon et signaler le premier navire qui apparaîtrait.
Plusieurs jours s’écoulèrent. Les masques tombaient des visages. Plus d’attitude, de politesse, de minauderie décente, de convenance sociale. On ne se gênait plus vis-à-vis les uns des autres. Chacun se révélait dans la vérité de sa nature, et l’arrière-boutique des âmes commençait à exhaler une odeur forte.
Une énorme ménagerie où se mêlaient toutes les variétés de la bête humaine : il y avait des tigres, des hyènes, de pauvres moutons résignés, quelques bons chiens fidèles et suiveurs, des chats qui se tapissaient dans leur petit coin, des taupes qui se cachaient dans les flancs du navire, des oiseaux nocturnes, invisibles tout le jour, et des porcs en grand nombre. Enfin, toutes sortes d’animaux sauvages, féroces et domestiques, de tous pays et de toutes races, vivant ensemble sous la trique implacable de Marzouk.
Malgré les pessimistes et les pleureurs, la plupart espéraient toujours, ou se familiarisaient avec l’idée de la mort, à force de l’envisager. On se faisait une philosophie. Peu à peu, après l’abattement, la consternation des premières heures, toutes les puissances vitales reprenaient possession des âmes et s’exaspéraient au seuil du néant. C’était une rage charnelle, un rut formidable. La vie prenait sa revanche sur la mort.
Marzouk, à cet égard, se montrait plein de tolérance, à une seule condition : lui d’abord, les autres après. Quelques couples pourtant lui échappaient, ou il les épargnait, soit par indifférence, soit qu’il craignît une résistance désespérée, soit par bonté pure. André et Myrrha passaient sous ses regards attendris et protecteurs. Les deux amants inséparables avaient l’air de ne plus connaître de l’univers que le goût de leurs lèvres ; ils répandaient autour d’eux des bouffées de jeunesse, d’insouciance et de fraîcheur. Marzouk lui-même aimait à respirer ce parfum. Partout ailleurs, dans son empire, c’était une étrange odeur d’auge et d’étable mal tenue, car les bourgeois mêmes se négligeaient. Des dames du meilleur monde renonçaient aux premiers soins de la toilette. Des adultères étaient déjà consommés. Mme Denain ouvrait ses bras à M. Darel ; Mme Avelard glissait, soutenue par M. Dantec, sur la voie des curiosités sensuelles ; Mme Carigues, une hystérique, éprouvait le frisson nouveau sous les puissantes caresses de Marzouk. Dans trois mois, si on vivait encore, on commencerait à voir des ventres s’arrondir. Des maris, sévères en d’autres temps, en venaient insensiblement à une conception indulgente et résignée des choses. Qu’importaient maintenant l’opinion, les préjugés, la morale, puisqu’il n’y avait plus de sanction ? Plus rien n’existait, que l’épouvante de la mort, pour ceux qui ne croyaient pas à l’au-delà ou qu’une conscience très haute, rare parmi les hommes, ne préservait point du vertige, au bord du gouffre. Si l’on était perdu, pourquoi garder encore la camisole de force des conventions sociales ? Si, par miracle, on se sauvait, on mettrait tout au compte de la folie. Vaguement, ce dilemme se posait au fond des âmes. Et, tandis que les épaules pliaient sous l’écrasant destin, les yeux luisaient de luxure, pareils à des charbons, sous des fronts livides de condamnés à mort, trahissant la fièvre de vivre, de savourer les dernières voluptés, d’étancher toutes les soifs, la soif brûlante des passions inassouvies.
Parfois, la nuit, deux ombres mélancoliques glissaient le long du navire. C’étaient Armand Reboul et Mme Rolande. On ne les entendait pas, ils ne parlaient pas, soit qu’ils n’eussent rien à se dire, soit que leur silence fût chargé de plus de sentiments que n’en peuvent exprimer les paroles, soit que celles-ci eussent troublé la confidence muette de leurs âmes, soit qu’il y eût entre eux déjà des choses qu’ils ne voulaient point s’avouer. Ils allaient et venaient ainsi, avec des souplesses de fantômes, d’un bout à l’autre du pont, dans la torpeur accablante de ces nuits équatoriales, où pas un souffle ne faisait frissonner l’atmosphère. Tout le jour, ils restaient enfermés dans leur cabine, par crainte et par dégoût, ne se risquaient dehors qu’à l’heure où les ténèbres envahissaient cette humanité misérable, apaisant la furie, cachant la honte et l’abjection. Il y avait alors dans la nature, sous le ciel impassible et criblé d’étoiles, quelque chose de mystérieux et de très doux, venu de l’infini, qui les pénétrait d’une langueur ineffable. Parfois, vers le milieu de la nuit, la lune, versant çà et là son crépuscule errant et ses pâleurs, éclairait leurs visages. Ils n’avaient pas changé, intenses tous deux et comme chargés de tout ce que l’existence laisse derrière elle de rêves irréalisés. Les yeux de l’amant disaient un idéal inaccessible ; ceux de Mme Rolande songeaient, profonds comme ces sentiments qu’on ne se déclare pas à soi-même. Leurs lèvres se rencontraient encore, mais leurs baisers étaient aussi loin du secret de leur être que la volupté du bonheur.
Une nuit, un bruit vague, à peine distinct, comme le vol velouté d’une chauve-souris qui vous frôle, les fit se retourner.
M. Rolande était devant eux.
— Je vous dérange ? dit-il.
Les deux amants demeurèrent muets. Deux fois déjà, M. Rolande les avait surpris dans leurs étreintes, et il n’avait rien dit, il s’en était allé, feignant de n’avoir rien vu, avec le détachement d’un homme qui, devant la mort, oppose à la fatalité une conscience profonde de l’inanité de toutes choses. Son ombre se traînait dans les ténèbres, indécise et lente, tel un spectre revenu d’un monde où l’on ignore les passions humaines, les tourments de la jalousie et la trahison. Pourquoi donc intervenait-il, à présent ?
Mme Rolande s’étonna de n’éprouver qu’une faible émotion. Elle avait vécu quinze ans avec cet homme et se sentait plus éloignée de lui que s’ils avaient habité l’un et l’autre aux deux extrémités de la terre.
— Que nous voulez-vous ? dit enfin Armand, comme parlant à un étranger qui s’insinue indiscrètement dans des affaires privées.
Mais M. Rolande ne lui fit aucune réponse. Il avait l’air de ne pas le connaître, de ne pas l’entendre, de ne pas le voir. Il s’adressa à sa femme, et sa voix était lointaine, d’un accent tout autre, sans colère, sans amertume, sans regret, sans ironie ; on eût dit qu’elle avait peine à franchir les espaces qui séparaient son âme ancienne de son âme présente.
— Je ne vous reproche rien, lui dit-il, puisque je n’avais pas su vous rendre heureuse. J’ai expié toute une vie de malechance. Ne craignez rien de moi désormais, je ne viendrai plus vous troubler, car j’appartiens à un monde d’où l’on ne ressuscite pas : celui du renoncement. Mon esprit a déserté le corps que j’habitais, en y laissant les convoitises et les passions qui font de l’existence une lutte et un tourment sans trêve. Le mauvais rêve de la vie s’est dissipé pour moi. Je ne souhaite plus rien, tout le mal dont j’ai souffert, venant d’avoir trop souhaité. N’ayez donc aucun remords à mon sujet, car j’ai atteint au repos et à la sérénité définitive.
Mme Rolande avait baissé les paupières. Quand elle les rouvrit, n’entendant plus la voix, l’ombre avait disparu. Elle éprouva alors, en levant les yeux au ciel, un sentiment nouveau ; il lui sembla que tous les désirs de la terre étaient comme le reflet des astres qui brillaient à travers ses larmes.
— Peut-être, murmura-t-elle, avons-nous eu tort de mépriser cet homme.