Les Aspirans de marine, volume 1
Note 4.
On trouvera peut-être que je retrace ici avec un peu trop de complaisance, les détails qui se rattachent à la vie que menaient à terre les aspirans de marine. Mais en me laissant aller au plaisir de raviver quelques-uns des souvenirs de ma jeunesse, j’ai cru qu’il pourrait devenir agréable à la plupart de mes lecteurs, d’apprendre quelle était l’existence de ces jeunes marins, abandonnés, loin de leur famille, aux mœurs qu’ils contractaient dans les habitudes du service de mer. Le motif qui m’a guidé expliquera et suffira pour justifier probablement la longueur des premiers chapitres de mon nouveau roman. Dans les œuvres maritimes que j’ai publiées jusqu’ici, on a pu voir, au surplus, que, pour me faire pardonner la forme frivole de ces sortes d’ouvrages, j’avais toujours cherché à mêler quelque chose de philosophique aux peintures en apparence les plus futiles ; car, à mon avis, dire ce que sont les hommes dont l’habitation de la mer a modifié le caractère et les passions, c’est faire de la philosophie, non pas comme il est convenu d’en bâcler aujourd’hui, mais comme il était encore permis d’en faire il y a quelques années.
Les aspirans d’autrefois sont, au surplus, ce qu’on pourrait appeler pour nous une espèce perdue, aujourd’hui que les élèves de la marine, disciplinés par l’esprit du siècle, ont pris dans toutes leurs habitudes une autre direction morale que leurs prédécesseurs, dominés, comme ils l’étaient au temps de l’empire, par les idées de cette époque célèbre. Ainsi donc, retracer maintenant la physionomie dont tout un corps d’officiers porta naguère l’empreinte, c’est écrire, selon moi, un peu d’histoire, et un peu d’histoire est toujours quelque chose de bon à trouver, même dans un roman maritime.