L'Empire Japonais et sa vie économique
CHAPITRE XVI
I. Mines, dans l’antiquité ; au XVe siècle ; époque moderne. — II. Géologie, terrains. — III. Mines en exploitation. — IV. Quelques mines de charbon. — V. Pétrole. — VI. Divers, graphite, soufre. — VII. Les mineurs, les règlements miniers. — VIII. Administration des mines. — IX. Les mines en 1908 ; le socialisme parmi les ouvriers. — X. Rendement du cuivre et du charbon.
I. — En même temps que se développait le trafic maritime, les voies de chemins de fer et l’industrie en général, l’industrie spéciale des mines devenait, elle aussi, un des facteurs importants de la richesse nationale.
On ne sait rien d’exact en ce qui concerne l’origine de l’industrie minière au Japon, mais l’histoire rapporte que, dès le VIIe ou le VIIIe siècle, l’or, l’argent, le cuivre, le charbon et le pétrole étaient connus et retirés du sol. Au commencement du IXe siècle, les mines d’or d’Ikuno, la mine d’argent de Handa, la mine de plomb argentifère de Hosokura et les deux mines de cuivre de Yoshioka et Osaruzawa furent ouvertes. Au XVe siècle, et au temps des Shôgun Tokugawa, d’importantes mines furent également livrées à l’exploitation, parmi lesquelles sont comprises les mines d’or et d’argent de Sado, Innai, Kamioka, Mozumi, Serigano, Yamagano et Shikakago ; la mine d’argent et de cuivre de Kosaka ; les mines de cuivre d’Ashio, Besshi, Ani, Arakawa, Hibira et Omodani ; la mine d’antimoine d’Ichinokawa ; la mine de plomb argentifère de Kuratani ; la mine d’étain de Taniyama ; la mine de fer de Kamaishi ; et les mines de charbon de Miike, Takashima et Akaike. Bien entendu, à ces époques reculées, le travail des mines était fait d’une façon tout à fait rudimentaire et personne ne s’en occupait avec méthode. Ce n’est qu’après la restauration impériale de 1868 que l’industrie minière a fait de réels progrès au Japon.
Le Gouvernement, en effet, songeant avec raison de quelle utilité et de quel profit pourrait être pour le pays l’extraction des richesses de son sous-sol, protégea et encouragea le développement de l’industrie minière ; et, en conséquence, il engagea, à l’étranger, des ingénieurs des mines, des géologues, des professeurs. En même temps, il prenait à son compte le travail des principales mines et il appliqua à cette œuvre les méthodes occidentales, avec l’idée de faire de ces mines des modèles sur lesquels pourraient se baser ceux qui voudraient entreprendre l’industrie minière à leur compte. Depuis ce temps des progrès importants ont été accomplis et le rendement des mines n’a cessé d’augmenter, notamment pour les mines d’or et d’argent de Sado et d’Ikuno et la mine d’argent d’Innai. Lorsque les sociétés privées prirent un développement suffisant, le Gouvernement leur passa au fur et à mesure les mines qu’il exploitait lui-même, se réservant seulement celles dont il jugeait avoir besoin pour les entreprises nationales. Enfin il édicta des lois et réglements qui, mis en pratique en 1892, définirent nettement les droits des propriétaires et exploiteurs de mines et leur assurèrent aide et protection ; de jeunes ingénieurs revenus d’Europe avec les connaissances spéciales en ces matières furent mis à la tête des différents services miniers, et ils provoquèrent de rapides progrès dans cette branche de l’industrie japonaise.
II. — La formation géologique du Japon peut être indiquée comme suit, en prenant 100 comme total.
I.
FORMATION DES TERRAINS | |
| Période azoïque | 3.78 |
| Période paléozoïque | 10.24 |
| Période secondaire | 7.95 |
| Période tertiaire | 45.84 |
II.
ROCHES IGNÉES | |
| Période ancienne | 11.27 |
| Période moderne | 20.92 |
—— | |
Total |
100.00 |
En d’autres termes, la proportion des terrains sédimentaires par rapport aux roches ignées est de 2 à 1 pour la superficie totale, tandis que dans les formations sédimentaires, celles qui appartiennent à la période tertiaire, sont dans la proportion de 1 à 2.
Les formations géologiques des îles japonaises peuvent être définies par un arc de cercle s’étendant de l’île de Yézo au Nord-Ouest jusqu’à Kiushu au Sud-Ouest ; par la chaîne du Riukiu et le système montagneux de Formose. Cet arc de cercle Nord-Sud et la chaîne du Riukiu sont inclinés vers le Sud-Ouest. Le côté extérieur de l’arc, celui qui fait face à l’Est, est comparativement parfait au point de vue de la formation géologique, les terrains qui le composent étant répartis d’une manière symétrique.
Le côté intérieur de l’arc, celui qui fait face à l’Ouest, est très compliqué dans sa formation géologique et abonde en crevasses, en dislocation des couches et en roches éruptives. Dans ces circonstances, la distribution des minerais de valeur et la condition et l’état des dépôts sont spéciales à chacun des côtés de l’arc. Généralement, on trouve les veines minérales dans la région située dans l’arc intérieur et aussi dans les roches éruptives ou les couches traversées par lui ; tandis que les couches minérales se rencontrent en plus grand nombre dans la région extérieure de l’arc. A Formose l’extérieur de l’arc fait face à l’Est et la formation est relativement symétrique, sauf au Nord, cependant, où elle est très diffuse par suite d’une coupe brusque qui la sépare des Riukiu ; c’est dans ce district Nord qu’on trouve beaucoup de veines de minerais.
Quelques couches de minerais se sont montrées bien formées dans certains terrains au niveau de la mer.
III. — Les principales mines, actuellement en exploitation, sont :
Mines d’or : Hashidate dans l’Echigo ; Yamagano à Satsuma ; Zuihô et Kinkwaseki à Formose.
Mines d’argent aurifères : Aikawa à Sado ; Ikuno à Tajima ; Innai à Ugo ; Ponshikaribetsu dans l’île de Yezo ;
Mines de cuivre : Ashio dans Shimodzuke ; Osaruzawa, Ani et Arakawa dans Ugo ; Okoya à Koga ; Obiye à Bitchu ;
Mines de plomb : Hosokura à Rikuzen ; Kamioka à Hida ;
Mines d’antimoine : Ichinokawa à Iyo ;
Mines d’étain : Taniyama à Satsuma.
De toutes les mines productrices de métaux existant au Japon, les mines de cuivre sont les plus riches, et on en découvre assez souvent de nouvelles ; le cuivre japonais est, paraît-il, spécial en ce sens qu’il renferme plus ou moins d’or et d’argent.
Les principales mines, autres que les mines productrices de métaux, sont celles de charbon et de pétrole. Le charbon japonais est généralement bitumineux ; les principales veines se trouvent dans le terrain tertiaire. Cependant quelques anthracites sont extraits des terrains secondaires dans les provinces de Nagato, Kii et Higo, mais ils sont insignifiants comme quantité et comme valeur. C’est dans les couches récentes du terrain tertiaire que se montrent les riches dépôts de charbon. Les principaux sont : ceux de l’île de Kiushu et de l’île de Yezo et aussi ceux des provinces de Hitachi et d’Iwaki. Les dépôts carbonifères de Kiushu comprennent les provinces de Chikuzen et Buzen, Chikugo (Miike) et Hizen.
IV. — Hokkaido (île de Yezo). Les mines de charbon de Sorachi furent les premières découvertes dans le bassin de l’Ishikari. Dans les mémoires de Matsura qui fit une exploration complète du Hokkaido, et des autres régions du Nord du Japon vers 1855, il est fait mention d’une trace houillère sur les rives de la rivière Sorachi. Environ trois ans plus tard, un individu nommé Kimura découvrit un autre gisement carbonifère à Poronai, alors qu’il était occupé à couper des arbres. Mais ce fut un Américain, M. Lyman, qui fut chargé de la prospection définitive. En 1876, la Direction de la colonisation du Hokkaido confia à cet ingénieur le travail de prospection dans les terrains houillers de Sorachi, Poronai et des environs. Son rapport signala la présence de la houille dans le district de Yubari. En 1879 on creusa un puits à Poronai, mais ce ne fut qu’à la fin de 1883 que l’extraction commença régulièrement. De ce moment jusqu’à 1890, le Gouvernement exploita la mine à son compte ; mais cette année-là même il vendit les mines de Sorachi, Ikushumbetsu et Yubari à la Compagnie du chemin de fer et charbonnages du Hokkaido (Hokkaido Tankô Tetsudo Kaisha), qui venait de se constituer. Depuis lors c’est cette Compagnie qui continue l’exploitation.
Les charbonnages existent dans les deux districts de Yubari et Sorachi, dans la province d’Ishikari ; les veines sont plus considérables à Yubari ; elles s’étendent sur une longueur de 8 kilomètres, avec une profondeur variant de 6 à 25 pieds.
A Sorachi on constata la présence de 13 veines, chacune mesurant 6 pieds de profondeur.
A Poronai on a découvert une vingtaine de veines de différentes longueurs et épaisseurs, mais on ne peut en exploiter que cinq. Les produits sont bons, et ceux de Sorachi et Yubari peuvent être employés pour faire du gaz et du coke.
Ces mines sont exploitées à l’européenne, et emploient environ 4.000 ouvriers. Le charbon est amené aux ports de Otaru et Mororan où quatre vapeurs appartenant à la Compagnie le transportent à destination.
Chiku Hô. — Les charbonnages de Chiku Hô produisent plus de la moitié des charbons de tout l’Empire ; les houilles sont de qualité moyenne et bitumineuses. En certains endroits, par suite de la présence de dépôts volcaniques, la houille a été changée naturellement en coke. Bien qu’on ignore la date exacte de la découverte de ces mines, il est fort probable qu’elles étaient déjà connues il y a au moins deux cents ans ; mais ce n’est qu’au milieu du XIXe siècle qu’on a commencé à exploiter le charbon. A cette époque on se bornait à enlever la couche supérieure, et ce n’est qu’en 1881 qu’une machine à vapeur fut installée à la mine de Katsuno et que l’extraction commença à la manière européenne. Cette méthode fut successivement appliquée aux mines de Namazada, Shin nin, Meiji, Akaike.
Vers 1889 certaines parties des houillères furent réservées à l’État à Tagawa et à Kurate ; puis le ministère de l’Agriculture et du Commerce, de qui dépendait le service des mines, émit des règlements pour encourager la formation de grandes Compagnies d’exploitation. Enfin le réseau de voies ferrées, à travers l’île de Kiushu, apporta des facilités considérables pour diriger la houille vers les ports de Moji et de Wakamatsu.
Les charbonnages de Chiku Hô s’étendent sur les cinq districts de Tagawa, Kurate, Kaho, Onga, Kasuya et mesurent 45 kilomètres du Nord au Sud et de 15 à 25 kilomètres de l’Ouest à l’Est. Mais les charbons extraits ne sont pas de qualité supérieure.
Miike. — La découverte de ces charbonnages remonte à 400 ans. De 1873 à 1887 ce fut le Gouvernement qui entreprit l’exploitation ; mais, en 1890, la Compagnie Mitsui en obtint la concession et travailla la mine avec une activité qui ne s’est pas démentie jusqu’à ce jour. Cette dernière s’étend sur une longueur de 15 kilomètres Nord-Sud et de 5 kilomètres Est-Ouest, dans les deux préfectures de Fukuoka et Kumamoto.
Le charbon est un peu meilleur que le précédent et peut servir à faire du gaz et du coke. La mine emploie 6.000 ouvriers, et elle arrive à fournir 4.000 tonnes dans les vingt-quatre heures.
Takashima. — Il y a déjà deux siècles que le dépôt carbonifère de Takashima est connu ; en 1817, la mine se trouvait aux mains du daïmio de Saga, mais, à cette époque, personne ne se souciait des mines de charbon, puisqu’on en ignorait l’usage. Ce n’est donc qu’en 1867 qu’on essaya pour la première fois l’exploitation en règle. Six ans après le Gouvernement reprit la mine, puis la repassa au comte Goto, et en 1881 elle fut achetée par la Compagnie Mitsubishi qui la détient encore actuellement. Elle débuta par un rendement de 1.200 tonnes, puis commença à décliner, lorsqu’on découvrit, en 1898, de nouvelles veines à Hajima.
Les galeries se trouvent, pour la plupart, au-dessous du lit de la mer, ce qui demande une ventilation constante ; aussi le ventilateur de Takashima fournit-il 50.000 pieds cubes d’air à la seconde, et celui de Hajima 120.000 pieds cubes. La mine est placée dans le district de Nagasaki et comprend les trois petites îles de Takashima, Hajima, Nakanoshima situées à sept milles marins du port de Nagasaki. Depuis 1881 elle a fourni plus de 7.000.000 de tonnes de charbon.
V. — Le pétrole existe au Japon presque exclusivement dans les terrains de formation tertiaire : on le trouve au Hokkaido, dans le nord du Honshu, et dans les provinces de Echigo, Shinano et Totomi. Le principal centre de production est la province d’Echigo qui renferme les cinq puits principaux de Higashiyama, Nishiyama, Amaze, Niitsu et Kubiki, dont les deux premiers sont les plus importants. A Higashiyama, l’huile est généralement trouvée depuis 20 jusqu’à 300 mètres de profondeur. Le puits d’Amaze va jusqu’à 854 mètres de profondeur, et la qualité de l’huile de ce puits est la meilleure ; malheureusement il commence à fournir beaucoup moins. Nishiyama produit une huile inférieure à celle d’Amaze, et la couche de pétrole se rencontre à 200 mètres de profondeur.
C’est dans la septième année de l’Empereur Tenchi (668 ap. J.-C.) que le pétrole fut découvert dans la province d’Echigo. Les chroniques rapportent, en effet, qu’à cette époque, de la terre brûlante et de l’eau brûlante furent présentées à la cour impériale ; mais on ne sut qu’en faire. Ce n’est qu’en 1875 que les mines de Kubiki et de Niitsu prirent une importance commerciale. La Compagnie japonaise des pétroles commença en 1890 à extraire l’huile par les procédés européens, et elle découvrit ensuite les couches schisteuses de Nagamine, Kamada, Hire et Urase, ce qui lui permit de développer son entreprise et d’arriver à fournir en 1902 environ 500.000 barils de pétrole.
VI. — Le graphite existe au Japon dans les rocs schisteux, en lames, ou bien dans les rocs stratifiés, en blocs ; bien qu’il y en ait une grande quantité on l’a jusqu’à présent à peu près négligé.
Le Japon, étant un pays essentiellement volcanique, est très riche en soufre et on en rencontre des dépôts très considérables. Les principales mines de soufre se trouvent dans la province de Rikuchu, à Tsurugizan ; et, dans le Hokkaido, à Iwaonobori et Ransu. Les dépôts alluvionnaires sont de deux sortes : d’or dans le district de Yesashi au Hokkaido et de fer à Chûgoku. Les premiers sont détachés de roches de quartz aurifère appartenant à la période secondaire et déposés dans les lits des rivières, les seconds sont la décomposition du minerai de fer.
VII. — Il peut y avoir aujourd’hui, approximativement, 250.000 mineurs au Japon. Ce nombre comprend les mineurs, les porteurs, les piocheurs, les fondeurs, les hommes employés aux machines, aux foyers et aux pompes. La plupart d’entre eux sont satisfaits de leur sort ; ils appartiennent généralement au district où la mine est située : cependant nombre d’entre eux viennent des provinces éloignées avec leurs familles et s’installent là jusqu’à leur mort. Avec l’accroissement incessant de la population au Japon, la main-d’œuvre ne manque jamais. Ces mineurs vivent généralement dans des maisons fournies par les employeurs ; ceux qui ont leurs familles, dans des chambres séparées, et les célibataires dans des espèces de grands dortoirs. Inutile de dire que ces installations sont très sommaires et que les ouvriers et ouvrières sont excessivement mal logés et encore plus mal nourris. La nourriture leur est vendue par la mine ; une nourriture insuffisante, à des prix très faibles, il est vrai, mais avec défense d’aller se nourrir ailleurs. Ceci a pour but de les empêcher de réclamer des augmentations de salaires, ce qui ne manquerait pas d’arriver si les ouvriers se nourrissaient convenablement au dehors ; car leurs gages actuels n’y suffiraient pas. Ici comme dans l’industrie, le sweating system est appliqué en grand et il faut que le peuple japonais meure littéralement de faim pour s’y soumettre sans murmurer. Il finira, d’ailleurs, probablement par se révolter, et l’explosion de colère qui s’est manifestée dans les mines d’Ashio, il y a deux ou trois ans, et où le directeur fut assommé, n’est sans doute que le commencement d’une protestation générale contre le régime employé vis-à-vis des ouvriers.
Ce n’est pas que les patrons ne garantissent les risques d’accident et de maladie, et ne se chargent de payer les funérailles en cas de décès ; mais c’est là un minimum de responsabilité auquel il leur serait bien difficile de se soustraire. Quant à l’ouvrier et à l’ouvrière bien portants, ils sont pressurés abominablement et reçoivent à peine de quoi se suffire.
Jusqu’en 1890 le Gouvernement japonais se réservait soit le droit d’exploiter lui-même, soit le droit d’accorder une concession minière à un individu moyennant une redevance annuelle ; depuis, le système des concessions permanentes a prévalu et c’est ainsi que, grâce à la formation de grandes Compagnies minières, le développement de l’exploitation a été de plus en plus considérable.
Au début, il était interdit à un étranger d’exploiter une mine au Japon ; il ne pouvait même pas faire partie d’une société minière japonaise, de sorte que le privilège d’exploitation était uniquement réservé aux sujets de l’Empire. En 1900 la loi fut modifiée, et elle permit à un étranger de mettre en valeur une mine, soit seul, soit de concert avec des Japonais, pourvu, naturellement, que la société, formée en vue de l’exploitation, fût soumise aux lois et règlements japonais. Je ne crois pas que des Européens aient jamais profité de cette latitude.
La législation japonaise ne reconnaît pas le droit de priorité de découverte ; et le droit de faire des essais de forage est accordé au premier qui en a présenté la demande. Il est valable un an, il est renouvelable pour une autre année si cela est reconnu nécessaire. Enfin le droit d’essai ne peut être ni cédé ni hypothéqué ; seule la concession permanente peut être vendue ou hypothéquée.
Autrefois la concession n’était accordée que pour une durée de quinze ans ; cette circonstance, ajoutée à l’impossibilité, alors existante, d’hypothéquer la mine, a été, pendant longtemps, une entrave au développement de l’industrie minière ; aujourd’hui que ces deux défauts de la législation ont été supprimés, les concessionnaires et les capitalistes ont pu engager de fortes sommes dans l’exploitation du sous-sol.
La superficie d’une concession minière est de 10.000 tsubo (1 tsubo = 3,30 m. q.) pour le charbon et de 3.000 tsubo pour les autres minerais ; et elle peut atteindre jusqu’à 600.000 tsubo dans les deux cas. Dans le cas où plus de deux concessionnaires s’associent, la limite maxima peut dépasser 600.000 tsubo.
Le concessionnaire est obligé, avant de commencer le forage, de soumettre ses plans au chef du bureau de l’inspection des mines ; la concession peut être retirée par le ministre de l’Agriculture et du Commerce si le travail y est suspendu pendant plus d’une année ; tous les six mois le concessionnaire est obligé de fournir un état de la situation de la mine ; toute association ou tout partage de concession doit recevoir l’approbation de l’inspecteur du bureau des mines.
Quant au propriétaire du terrain sur lequel est située la mine, il doit recevoir une juste compensation en loyer pour la terre et des dommages-intérêts pour l’installation des puits, des machines, des tramways, voies ferrées, etc. ; il peut exiger le rachat de sa terre au bout de trois ans ; s’il s’élève des différends entre lui et le concessionnaire, la question est portée d’abord devant l’inspecteur du bureau des mines, puis devant le ministre de l’Agriculture et du Commerce, enfin devant les tribunaux. En vue de la protection des intérêts publics et privés, des règlements spéciaux sur la police des mines ont été édictés, et sont rendus applicables par l’inspection du bureau des mines et par le ministère de l’Agriculture et du Commerce. Voici les principaux articles :
Sécurité des constructions dans la mine et hors de la mine ;
Protection de la vie et de la santé des ouvriers ;
Protection de la surface et des intérêts publics ;
Tout ce qui serait nuisible à l’intérêt public peut être supprimé par ordre de l’inspecteur sous peine de suspension ;
L’usage des explosifs, les dispositions pour la ventilation, les ouvrages souterrains, la construction des cheminées, des chaudières, des fonderies, etc., sont soumis à des règles strictes pour éviter les accidents. En outre une protection spéciale est accordée aux ouvriers ; la nature du travail, les heures de travail, le travail des femmes et des mineurs, tout est réglé minutieusement ; et le concessionnaire est, (du moins sur le papier), obligé de se conformer aux décisions de l’inspecteur du bureau des mines.
Les taxes à payer sur les concessions minières sont de deux sortes : taxe sur la concession et taxe sur le rendement brut ; la première est de 30 sen par 1.000 tsubo et la deuxième de 1 pour 100 de la valeur du rendement. Cette dernière est fixée d’après les prix des principaux marchés. Il y a toutefois une quote officielle pour l’or, l’argent, le cuivre, le plomb, l’antimoine, le charbon et le pétrole.
Les recherches des minerais dans les sables d’alluvions sont soumises à un régime un peu différent ; ici, en effet, le droit de priorité est accordé au propriétaire de la terre où se trouvent les minerais. Mais, si le propriétaire ne veut pas travailler le minerai, il est obligé de donner la permission à celui qui veut le faire ; à condition naturellement d’être rémunéré d’une façon convenable. Les recherches dans les terrains alluvionnaires ne sont permises qu’aux sujets japonais ; aucun Européen, soit pour son compte, soit pour le compte d’une société, n’est autorisé à entreprendre ce travail.
VIII. — L’administration des mines présente, cela va de soi, des caractères spéciaux et elle est forcément différente de l’administration générale des autres industries. Les fonctionnaires chargés des affaires de la direction des mines doivent posséder des connaissances spéciales et particulières sur toutes les questions qui s’y rapportent. Ils doivent en effet savoir :
Les règlements concernant l’établissement d’une concession ; son retrait ; le droit de transfert ; l’obligation pécuniaire pour le concessionnaire ;
Les règlements relatifs au forage d’essai ; à l’approbation des plans ; à l’affermage de la surface ; à l’association de plusieurs concessionnaires ou à la division d’une concession en plusieurs sociétés ;
Les règlements de police spéciaux aux mines, tels que ceux relatifs aux intérêts du public, aux intérêts des ouvriers ; à la sécurité des mines et à la solidité des constructions ;
Ils doivent aussi être prêts à juger équitablement tous les différends qui peuvent se produire entre les propriétaires du terrain et les concessionnaires des mines.
L’administration des affaires minières est divisée en deux sections :
1o La direction centrale des mines, rattachée au ministère de l’Agriculture et du Commerce ;
2o Cinq directions locales à la tête desquelles se trouvent cinq inspecteurs nommés par le même ministère. Les directions locales ont le pouvoir de surveiller toutes les affaires minières dans leur juridiction et, suivant la gravité des cas, elles traitent les questions soit sous leur responsabilité, soit en en référant au département de l’Agriculture et du Commerce.
IX. — Le nombre total des demandes de concessions minières pour 1908 a été de 4.663 ; c’est beaucoup moins que les années précédentes ; et, dans le nombre, il y a une quantité de demandes pour concessions qui n’aboutiront jamais. Le chiffre total de production minière a été, pour cette même année, de 103.167.395 yen, en diminution de 3.659.626 yen sur l’année précédente.
Charbon : 14.468.669 tonnes, pour une valeur de 61.963.500 yen ;
Cuivre : 67.805.639 livres, pour une valeur de 2.242.983 yen ;
Pétrole : 1.639.357 koku, pour une valeur de 6.475.460 yen ;
Argent : 31.259 kwamme pour une valeur de 4.265.717 yen ;
Or : 829 kwamme, pour une valeur de 4.147.485 yen ;
Fer : Saumons : 39.938 tonnes, et acier 1.668 tonnes, pour une valeur de 1.927.245 yen ;
Soufre : 53.815.077 livres, pour une valeur de 766.816 yen ;
Le nombre des Compagnies minières, à la fin de 1908, était de 205, avec un capital total de 175.809.650 yen ; (capital versé : 119.390.800 yen).
Il y a eu un commencement de grève dans les mines de charbon de Takashima et aussi dans quelques autres mines ; mais cela a été sans gravité ; il est cependant incontestable que l’ouvrier des mines, actuellement, commence à vouloir imiter ses confrères d’Europe, et réclame, avec de plus hauts salaires, d’autres conditions de vie.
« Le socialisme en est à ses débuts au Japon, et ils ne sont pas encore très brillants ; mais il est hors de doute que le peuple, en général, et l’ouvrier, en particulier, souffrent des résultats onéreux, au point de vue financier, des deux guerres soutenues en dix ans. La gloire coûte cher et le Japon n’est pas riche. L’ouvrier, le premier, a essayé des grèves ; son sort est en effet lamentable, et les Japonais, qui ne veulent pas fermer les yeux quand même, sont les premiers à le déclarer, témoin le directeur de l’École industrielle de Tokio qui ne craint pas, dans un long article publié par la Revue Chu ô kô ron, de réclamer plus de bienveillance, plus d’hygiène, plus de moralité envers la classe ouvrière. Dans deux cents corporations d’ouvriers qu’il a examinées, il a trouvé une corruption effrayante et des mœurs lamentables ; la protection des mineurs, principalement des jeunes filles, n’existe pas. Tout le monde vit pêle-mêle comme des bêtes ; les ouvrières sont parquées dans de grandes salles, souvent avec défense de sortir plus d’une fois par semaine ; dans d’autres salles vivent entassés des ouvriers ; tout ce monde est traité comme un vil troupeau et vit en conséquence.
« Les ouvriers mariés, et qui habitent en ville, ont l’air de se soucier fort peu de leur propre famille.
« D’ailleurs, le socialisme a déjà pénétré l’armée. Trouvant un terrain tout préparé chez les ouvriers si miséreux, il gagne la caserne où l’on commence à distribuer aux conscrits des brochures subversives ; il est arrivé même à des soldats de déserter en groupes.
« Devenant de plus en plus un pays industriel, le Japon possèdera bientôt une classe ouvrière considérable avec laquelle il faudra compter. Ce qui manque maintenant à cette foule c’est un chef ; tout est encore en formation ; mais le jour où ils auront pris conscience de leurs forces et où ils auront un chef intelligent et pratique, les ouvriers pourront imposer leurs conditions. Seront-ils sages et calmes à ce moment ? ou bien, grisés, comme tant d’autres en Europe, par de vaines et fallacieuses promesses, aideront-ils par la violence à l’arrivée de l’âge d’or qu’on leur a promis ? » (Avenir du Tonkin, 1909.)
X. — En 1907, dernière année pour laquelle nous ayons des statistiques complètes, le rendement des mines de cuivre et de charbon, les deux catégories de mines que l’on peut considérer comme les plus importantes du Japon, se répartit de la façon suivante :
Cuivre :
Mines : |
Appartenant à : |
Rendement en livre japonaise de 600 grammes. |
| Arakawa (Akitaken) | Mitsubishi | 1.256.428 |
| Ani — | Furukawa | 2.089.321 |
| Ashio (Tochigi) | — | 10.666.029 |
| Beshi (Ehime) | Sumitomo | 8.911.895 |
| Dôgamaru (Shimane) | Hori | 307.943 |
| Furogura (Akita) | Furukawa | 772.552 |
| Hibira (Miyazaki) | Naito | 1.435.755 |
| Hidate (Ibaraki) | Kuhara | 1.355.280 |
| Hiragama (Gifu) | Yokoyama | 1.050.331 |
| Hisaichi (Akita) | Mitsubishi | 1.201.908 |
| Homansan (Shimane) | Hori | 528.933 |
| Ikuno (Hiogo) | Mitsubishi | 1.511.289 |
| Innai (Akita) | Furukawa | 433.954 |
| Itsuki (Kumamoto) | Itsuki | 249.820 |
| Kano (Fukushima) | Kano | 720.167 |
| Komaki (Akita) | Mitsubishi | 101.443 |
| Kosaka — | Fujita | 12.041.857 |
| Kusakura (Niigata) | Furukawa | 501.445 |
| Nidzusawa (Iwate) | — | 350.036 |
| Nagamatsu (Yamagata) | — | 460.698 |
| Oharasawa (Iwate) | Saito | 200.025 |
| Obie (Okayama) | Sakamoto | 1.176.951 |
| Okoya (Ishikawa) | Yokoyama | 1.078.402 |
| Omodami (Fukui) | Mitsubishi | 383.459 |
| Omori (Shimane) | Furukawa | 390.396 |
| Otori (Yamagata) | — | 199.925 |
| Osaruzawa (Akita) | Mitsubishi | 1.937.183 |
| Sasagaya (Shimane) | Hori | 235.388 |
| Takane (Gifu) | Asada | 175.377 |
| Takura (Yamaguchi) | Mitsubishi | 249.821 |
| Tsubaki (Akita) | Takeda | 270.882 |
| Yakuki (Fukushima) | Yakuki | 298.328 |
| Yoshioka (Okayama) | Mitsubishi | 1.435.755 |
| Yusenji (Ishikawa) | Takenouchi | 718.264 |
Ainsi donc le Japon a produit, en 1907, 54.697.242 livres japonaises de cuivre, soit : 32.818.342 kilogrammes. C’est, après celui des États-Unis d’Amérique, le plus grand rendement connu sur notre globe, et le cuivre est l’un des principaux produits d’exportation du Japon.
Charbon :
Mines : |
Propriétaires. |
Production en tonnes métriques. | |
| Poronai (Hokkaido) | Hokkaido Co | 163.013 | |
| Yubari | — |
— |
480.803 |
| Sorachi | — |
— |
202.930 |
| Iriyama (Fukushima) | Iriyama Co | 204.537 | |
| Uchigo | — |
Iwaki Co | 145.515 |
| Onoda | — |
— |
188.951 |
| Ojô | — |
Ojô Co | 86.289 |
| Takashima (Nagasaki) | Mitsubishi | 183.816 | |
| Akasakaguchi (Saga) | Takatori | 139.273 | |
| Wochi | — |
Mitsubishi | 163.013 |
| Yoshitani | — |
Yoshitani Co | 219.858 |
| Kitakara | — |
Koga | 86.840 |
| Kamiyamada (Fukuoka) | Mitsubishi | 90.186 | |
| Otsuji | — |
Kayejima | 212.629 |
| Miike | — |
Mitsui | 1.482.451 |
| Onoura | — |
Kayejima | 593.154 |
| Shin iri | — |
Mitsubishi | 438.572 |
| Fujidana | — |
Mitsui | 96.321 |
| Mannoura | — |
Kayejima | 207.372 |
| Yoshio | — |
Aso | 216.207 |
| Namadzuda | — |
Mitsubishi | 244.463 |
| Yamano | — |
Mitsui | 138.850 |
| Meiji | — |
Yosukawa | 416.421 |
| Tadakuma | — |
Sumitomo | 67.195 |
| Kaneda | — |
Mori | 271.328 |
| Hokoku | — |
Hiraoka | 161.920 |
| Tagawa | — |
Mitsui | 486.478 |
| Akaike | — |
Yasukawa | 182.469 |
| Otô | — |
Hara | 179.130 |
| Futase | — |
Gouvernement | 366.128 |
| Furukawa | — |
Furukawa | 376.681 |
Je ne donne ici que le rendement des principales mines, de celles qui produisent au-dessus de 100.000 tonnes métriques. Le charbon japonais est très inférieur, comme qualité, à tous les autres charbons connus et la consommation sera toujours limitée aux mers de Chine ; elle finirait même par cesser tout à fait si on trouvait, (comme il est probable que cela se produira), des mines de charbon supérieur dans les territoires chinois et indo-chinois.