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La nouvelle Cythère

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IX

Une noce dans le district. — Abondance de pseudonymes. — La famille à Tahiti. — De la virginité. — Les enfants, les femmes, les vieillards et les morts.

Une noce dans le district, c’est une noce au village, avec des discours et des chansons, et quelles chansons ! Sans parler du repas colossal qui couronne la fête et où les viandes s’accumulent en montagnes à lasser Rabelais si fertile en énumérations fantastiques.

Mon ami Poroï, conseiller privé, a marié son fils avec une jeune fille dont la famille habite le district de Mataiéa. La veille du jour fixé pour la cérémonie, les parents du marié et les parents de la mariée sont arrivés, quelques-uns à cheval, d’autres en voiture, la plupart en pirogue ou en baleinière, et une véritable flottille a mouillé dans la jolie baie de Papeuriri. A bord se trouvaient les cadeaux destinés aux futurs époux, c’est-à-dire des vivres, cochons, volailles, taros, huru, feï, patates douces, etc.

A peine à terre, le plus âgé de chaque camp (car chaque famille forme un camp distinct dans une occasion pareille) s’avance vers Poroï et lui adresse un discours véhément : « Nous venons, avertis par le message que tu nous as envoyé, marier notre enfant et participer à cette fête de famille. Ce que nous vous apportons, ces cochons, ces poulets, ces taros, ces feï, ces huru, ces patates, nous vous l’offrons de bon cœur. C’est tout ce que nous avons ; nous ne pouvons pas donner davantage ! »

Poroï répond à chacun : « Je vous remercie d’avoir entendu mon appel et d’avoir maintenu les liens de la famille en venant assister au mariage de notre enfant. »

Ces quatre discours échangés, on va se coucher après avoir tout préparé pour le repas du lendemain, tué les cochons et les poulets, et surtout après avoir pris soin de séparer les cadeaux qui sont apportés au marié de ceux qui sont apportés à la mariée.

Il faut se garder de n’omettre personne dans les invitations. Si un parent est oublié, il vient demander des explications. Est-ce un malentendu ? Est-ce une offense ? Est-on fâché ? Dans ce dernier cas, après quelques paroles on se réconcilie. Généralement les noces sont l’occasion de ces réconciliations.

Le matin, les choses se passent comme à Pontoise ! Le cortège des époux et des parents se rend à la chefferie où le mariage civil est célébré, puis au temple où le pasteur procède au mariage religieux. Il y a quelques années, on étendait sur les mariés une sorte de poële, une grande natte ; mais cet usage est aujourd’hui abandonné.

Dès que le cortège a regagné la maison où doit se faire le repas, les parents reviennent avec les cadeaux de la veille. Cette fois tout est cuit et c’est un défilé à réjouir la panse de Gargantua que celui de ces monceaux de victuailles appétissantes.

Nouveaux discours. L’orateur s’adresse à la mariée : « Nous voici au terme de cette belle cérémonie. En unissant nos enfants, nous avons uni nos deux familles. Nous vous offrons ce que nous avons. Prenez et vivez. Le feï de ces vallées est à vous ; le poisson de ces rivières est à vous. Le mariage de nos deux enfants nous donne l’espérance que bientôt à leur tour ils auront des enfants. Donnons maintenant des noms à chaque époux. »

C’est la coutume à Tahiti de donner ou de recevoir un nom nouveau à chaque événement important de la vie, une coutume qui nuit quelque peu à la bonne tenue des registres de l’état civil : une naissance, un baptême, un mariage, un deuil sont des occasions pour s’offrir mutuellement des pseudonymes variés. C’est ainsi que le fils de Poroï s’est entendu appeler Teriitanaroa par les parents de son père et Tetirimatai par ceux de sa femme. Poroï a déjà pour sa part six noms. Chacun des parrains ne connaît son filleul que par le nom dont il l’a gratifié. Tetirimatai signifie : « Jeté çà et là par le vent. » Quant à Teriitanaroa, c’est un peu plus difficile à expliquer. Teriitanaroa est le nom d’un ancien héros de Moorea. Ce héros eut pour père Manea, et pour mère Tetuanuanua. Il naquit pendant le mois de Tematanaroa d’où la finale de son nom « tanaroa ». La partie initiale « terii » est une abréviation de « Tearii », le roi. Tematanaroa était le mois de la disette pendant lequel on attendait, non sans souffrance, le temps de la récolte. Alors, pour supporter moins péniblement les douleurs de la faim, on se serrait le ventre avec une ceinture appelée : « tanaroa ». Se serrer le ventre n’est donc pas seulement une image à Tahiti.

Les noms donnés, les parents se jettent sur les vivres entassés. Du côté de la famille de la mariée on s’empare de ce que la famille du marié a donné, et vice versa. C’est un échange de bons procédés et à qui en prendra le plus.

Le repas est pris par terre, les convives placés sur deux rangées le long de la cloison de bambous, une famille à droite et l’autre à gauche. A une extrémité, les mariés sont seuls, servis par les plus proches parents. Puis viennent de nouveaux discours et les chants de circonstance.

La muse libertine du poëte tahitien est incohérente. Elle associe des invocations à la patrie et les pensées religieuses aux images les plus licencieuses. Un chant commence ainsi :

Ne remarquez pas les défauts de mon corps…
. . . . . . . . . . . . . . . .
Sur une branche de mayoré nous nous étreindrons
. . . . . . . . . . . . . . . .
De la maison de Tohotahi sort une odeur de vase.
Partons pour les Pomotu où les femmes ont les flancs bombés.
La montagne Papoto est haute à notre vue,
Prenez-garde à la mort
Ma patrie est éclairée ; le ciel est couleur de sang !
Courez Tumavaï ; Porionu est le refuge
La petite passe du roi, quel merveilleux duel au bâton entre Tanekau Kevaitu et Faarahia !
. . . . . . . . . . . . . . . .

Poroï est intervenu pour mettre un terme à ces chansons, et les époux se sont dérobés. A eux deux ils avaient bien trente ans. Ils formaient un joli couple d’adolescents dont la vue évoquait le souvenir charmant de Daphnis et de Chloé, innocents et amoureux, dans la grâce de leur juvénilité, si beaux et si chastes dans le naïf abandon de leurs premières étreintes.

La famille n’est pas encore constituée à Tahiti en dépit de l’état civil et de ses registres plus ou moins mal tenus. L’indigène ne comprend pas grand’chose à nos conventions sociales à en juger par le dialogue qu’on va lire.

Je pénètre dans une case en bambou où il n’y a pas moins de trois ou quatre lits ou nattes, autant de malles, des instruments de pêche, quelques écuelles de bois. J’interroge le maître du lieu.

— « Es-tu marié ? »

— « Oui ! »

Je désigne une vahiné qui tient dans ses bras un enfant.

— « C’est ta femme ? »

— « C’est la femme avec laquelle je dors ! »

— « Tu n’es donc pas marié ? »

— « Si ! »

— « Où est la femme avec laquelle tu es marié ? »

Avec un sourire qui dénote la plus parfaite insouciance, l’homme répond :

— « Dans les districts ! »

J’ai déjà parlé de la promiscuité qui règne dans les cases tahitiennes et de ses conséquences sur les mœurs. Il faut ajouter que la virginité n’est nullement en honneur. Bien au contraire, elle est considérée comme un état contre nature, comme une preuve de faiblesse. Les missionnaires catholiques et les instituteurs appartenant à des ordres religieux ont eu fort à faire au début pour réagir contre ce préjugé qui ne nuisait en rien, d’ailleurs, au respect dont on les entourait, préjugé qui n’a pas aussi complètement disparu qu’on pourrait le croire.

Ce qui s’oppose et s’opposera de longtemps encore à la constitution régulière de la famille c’est la fréquence des adoptions. Le Tahitien a plus que l’amour de l’enfant ; il en a le culte. Les derniers et touchants poèmes de Victor Hugo sur l’enfance et sur ce qu’elle a de béni, de mystérieux et de sacré, sont vécus par ces hommes robustes qui entourent de tant de soins l’être chétif et nu dont les premiers cris et les premiers sourires sont écoutés et accueillis avec une sorte de religion. On ne peut faire à un Tahitien de don plus précieux que celui d’un enfant. Les parents usent de leur influence, le chef de la famille abuse de son autorité pour se faire remettre dès leur naissance des enfants à qui ils donnent immédiatement un nom et des biens et qu’ils ont parfois adoptés avant même qu’ils aient vu le jour. Et cet enfant, ce nourrisson, ce pupille qui mange dans la maison, se trouve avoir autant de droits à l’héritage que s’il était né du légitime mariage de l’homme qui l’a pris. N’arrive-t-il pas que des Tahitiens après avoir adopté des enfants donnent les leurs à d’autres parents qui n’en auront pas moins soin ?

Le cas s’est présenté pourtant où le sentiment maternel s’est révolté, où une mère a tenté de refuser son enfant au fetii, parent, qui venait le lui prendre, mais c’est une exception. D’ailleurs, le chef du district a parlé impérativement. Il voulait cet enfant, il l’avait retenu comme on peut retenir le petit d’une chatte ou d’une chienne : il fallut le lui donner. La pauvre mère ne s’en est jamais consolée. L’enfant était une jolie petite fille. Cette mère, les autres méritent-elles ce nom ? est une demi-blanche. Les physiologistes, disposés à confondre les sentiments avec les sensations et les qualités affectives avec les aptitudes cérébrales, peuvent ici se donner carrière, et mettre en avant la théorie de l’hérédité. Je leur livre ce petit fait qui peut mener à de grosses conséquences.

On se doute bien qu’en ce pays les enfants naturels n’ont pas à subir les affronts et les épreuves que notre société civilisée ne leur épargne pas. Les thèses éloquentes et passablement déclamatoires que la recherche de la paternité a inspirées à quelques dramaturges et à quelques démagogues seraient ici sans écho. A quoi bon se préoccuper de trouver un père quand plusieurs sollicitent la faveur de se charger de ce bébé dont la peau presque blanche révèle la naissance irrégulière ? Les enfants naturels ne sont pas les moins choyés ; on s’honore même, dans le district, de voir grandir sous son toit ce jeune garçon ou cette jeune fille aux traits adoucis, à la voix moins rude, aux formes moins belles mais plus souples.

Comme ils sont jolis ces enfants tahitiens ! Comme ils ont une mine éveillée et malicieuse ! Ils se sentent les maîtres et le font bien voir. Quels tyrans !

— « Dis à ton garçon d’apporter ce vase ? »

— « Il veut pas ! » répond le père adoptif ou véritable, du même air insouciant dont il parlait tout à l’heure de sa femme partie pour les districts.

Quand le premier-né vient au monde, le père voit en lui le propriétaire de tous ses biens et ne se considère plus que comme l’hôte de son enfant. C’est à ce point que dès qu’il peut parler (je n’ai pas dit dès qu’il peut comprendre) l’enfant est consulté sur les affaires de la famille. On discutait sur le prix d’une terre et l’on ne parvenait point à s’entendre. On interroge un petit garçon de six ou sept ans. Il déclare que l’on doit vendre cette terre tel prix, son fetii étant l’acquéreur. Et il fut fait comme il le demandait. Il en est toujours ainsi. L’enfant n’a qu’à former un souhait, qu’à manifester un désir pour être obéi. Il exprime sa volonté sans irritation, habitué qu’il est à la voir satisfaire. Il avise un objet de toilette dans un magasin, fait un geste et on le lui achète. Il est le maître. Pourquoi ? Peut-être parce qu’il est l’avenir, la force de demain.

Une observation curieuse. Les enfants n’interpellent point leurs parents par le signe même de cette parenté. Les mots « papa » et « maman » n’ont pas d’équivalents.

— Ia ora na Tihoni ! » (Bonjour, Jean !) dit un petit garçon de cinq ans à son père. Et en lui demandant quelque chose, ce n’est pas une prière qu’il lui fait, mais un ordre qu’il lui donne, ordre aussitôt exécuté que reçu.

Il va sans dire que cette éducation mène à une grande indépendance et que l’amour filial est à peu près inconnu du Tahitien. Dès qu’il peut aller au feï, l’enfant se sent homme. La fille dès qu’elle est nubile suit l’homme qui l’appelle ou le provoque même, avant de prendre le chemin de Papeete.

Point de querelles entre les enfants pas plus que de rixes entre les hommes. Les jeux accoutumés sont la natation et l’équitation. A trois ou quatre ans, un enfant tahitien nage comme un requin et monte à cheval comme feu M. d’Aure. Il faut le voir galoper dans les rues de Papeete ou conduire sa bête à la mer, sans selle et sans étriers, le cavalier presque aussi nu que le cheval. D’une agilité merveilleuse, certains conduisent des bœufs pris dans la montagne au moyen d’un lasso, et, caracolant, riant d’un rire qui découvre leurs belles dents blanches, ils font ce qu’ils veulent du ruminant le plus obstiné et du cheval le plus fougueux.

Les familles sont peu nombreuses. Il est rare d’en rencontrer de plus de quatre enfants. Hélas ! combien qui viennent au monde avec le germe de maladies mortelles. Rien de triste comme de voir une jolie fillette de trois ou quatre ans avec des plaies aux jambes, des boutons, des coutures au cou. Pauvres bébés ! On sait la cause de cette infection générale.

J’ai cherché à connaître la nature des rapports de l’homme et de la femme. Celle-ci n’est ni esclave ni souveraine. Elle est obéie quand elle est jeune, dédaignée quand elle est vieille, et elle a pour son mari une considération mesurée à sa vigueur. Si l’homme invite la femme à faire quelque ouvrage un peu fatigant : « N’as-tu pas des mains ? N’as-tu pas des pieds ? » répond-elle tranquillement. Sans se faire prier, comme une chose toute naturelle, le mari vaque à la cuisine. Il rassemble les bouts de bois et les grosses pierres dont se constitue le four tahitien et fait cuire les aliments tandis que la femme accroupie à la façon indienne le regarde. Elle l’estime, j’allais dire elle l’aime, en raison de la quantité de feï qu’il rapporte de la vallée lointaine. Lui est-elle fidèle ? Je n’ose répondre. Ce qui, est certain, c’est que le mari n’est pas jaloux. L’indifférence est au fond de la nature de l’indigène. Pourquoi se tourmenter et s’agiter comme ces « papâa » nerveux qui ne peuvent tenir en place et passent leur vie à chercher midi à quatorze heures ?

La jalousie se montre seulement chez les demi-blanches qui ont la main prompte et surveillent étroitement l’homme qu’elles aiment. Il est arrivé plus d’une fois, au sortir d’un bal officiel, qu’un fonctionnaire en puissance de vahiné a reçu de celle-ci un joli soufflet pour s’être permis de danser plusieurs fois avec Madame Z. ou Mademoiselle X…

L’adoration de l’enfance a pour contre-partie le mépris de la vieillesse. C’est ici peut-être le point où s’accuse avec le plus de force ce qui sépare cette race de la nôtre. Beaux vieillards à cheveux blancs, bonnes grand’mères au visage ridé comme une pomme au printemps, vous à qui notre respect fait une auréole et que nous imaginons plus saints que nous parce que vous avez plus vécu et plus souffert, vous en qui se sont apaisées mais non pas évanouies les ardeurs et les passions qui nous dévorent, ne venez point sur cette terre que le soleil pare d’une splendeur immuable ! Restez assis, l’été sur le banc de pierre devant la maison des champs, blottis l’hiver dans le fauteuil qu’un enfant a rapproché de l’âtre où flambe le sarment desséché !

On voit peu les vieillards à Tahiti. Dès qu’ils ont atteint un certain âge, hommes et femmes se murent pour ainsi dire dans un angle de la case. Ils sont paru-paru, inutiles, faibles, et nul ne songe plus à eux. Quelquefois l’enfant qu’ils voudraient caresser se venge de leur étreinte désagréable par un coup de pierre. On approche d’eux quelques vivres, juste ce qu’il en faut pour qu’ils ne meurent point de faim. Nulle révolte de leur part. C’est ainsi qu’ils ont traité les vieillards eux-mêmes et ils subissent sans étonnement et sans colère le sort qu’ils ont fait subir à d’autres.

Il arrive que des Tahitiens sous l’influence du christianisme veulent montrer à leurs ascendants de la déférence, une affection respectueuse. Ils s’attirent des quolibets. L’un d’eux, à un repas de noce, avait mis à la table d’honneur sa grand’mère, une bonne femme à la tête branlante, à la bouche édentée : « Pourquoi as-tu placé ta vieille là ? » lui ont demandé les convives non sans quelque ironie. On peut dénombrer ceux qui prennent un soin assidu de l’aïeul ou de l’aïeule.

Quand la mort visite une case, il se joue une comédie funèbre qui n’est pas sans analogie avec ce qui se passait autrefois chez les Israélites. Les membres de la famille restent accroupis près de celui ou de celle qui n’est plus. Ils poussent des cris de douleur, font entendre des sanglots déchirants, puis ils se taisent tout à coup. Survient un parent, le chef, le pasteur, nouvelle explosion. Les larmes s’essuient subitement encore et du ton le plus naturel une conversation s’engage sur le premier sujet venu, conversation que vient interrompre de temps en temps une visite qui provoque de nouveau les transports extravagants d’une affliction que l’on croirait éternelle. On ne sait que penser devant ces manifestations insolites et contradictoires ou plutôt l’on en vient à donner raison à ceux qui croient que ces pauvres gens ne sentent pas aussi profondément que nous et qu’en dernière analyse ils sont et demeurent de vrais enfants.

On enterre les morts un peu partout, à Tahiti, la plupart des districts ne possédant pas de cimetière. Autrefois, pour lieu de sépulture on choisissait une anfractuosité, une grotte dans la montagne, et l’on y portait les morts après leur avoir fait subir une préparation qui retardait la corruption si elle ne l’empêchait pas tout à fait. Le corps était enveloppé et lié dans des tissus végétaux enduits d’une sorte de gomme extraite de l’arbre à pain. Ainsi soustrait à l’action de l’air, il se conservait éternellement. Il était bon cependant de lui donner de temps à autre quelques soins. Un serviteur de la famille était chargé du vernissage périodique des cadavres. La famille Tati, l’une des principales de Tahiti, la rivale souvent victorieuse des Pomaré, possède encore, dans le district de Papara, une sépulture de ce genre placée à une altitude qui défierait les jarrets des alpinistes les plus convaincus de Tarascon et d’ailleurs. Le Tahitien chargé de l’entretien de cette grotte de famille se fait vieux. Il a plus de quatre-vingts ans et voilà près de six ans bientôt qu’il n’est monté là haut donner une couche aux Tati dont la dépouille mortelle repose dans le silence des solitudes funèbres.

Il est possible que les Tahitiens n’aient eu la pensée de placer leurs morts à de pareilles distances que pour éviter les persécutions des tupapau dont j’ai parlé plus haut. Il n’en est pas moins singulier de retrouver chez les peuples de l’Océanie cet usage de l’embaumement. Les momies couchées des Polynésiens n’ont rien à envier aux momies accroupies des Indiens du Sud-Amérique. Les partisans de l’unité d’origine de l’espèce humaine peuvent tirer parti de cette similitude dans les habitudes funéraires. Ces peuples ont le culte des morts puisqu’ils attachent une telle importance à leur conservation. Ils l’ont à un bien autre degré que nous qui jetons les cadavres à la terre en faisant des vœux pour qu’ils pourrissent très vite, et croyons nous acquitter envers ceux que nous avons perdus en déposant sur leur tombeau quelques couronnes de verroterie.

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