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Avis au peuple sur sa santé: ou traité des maladies les plus fréquentes

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CHAPITRE XXVII.
Avis pour les enfans.

§. 355. Les maladies des enfans, & tout ce qui regarde leur conduite sont des objets qui ont été généralement trop négligés, par les Medecins; l'on en confioit la direction aux personnes les moins propres à s'en charger. Leur santé est cependant bien importante; il faut les conserver, si l'on veut avoir des hommes; & leur médecine est susceptible d'un assez grand degré de perfection. Elle a un avantage sur celle des adultes, c'est que l'on ne trouve pas des complications de maux aussi fréquentes. L'on dit qu'ils ne savent pas se faire entendre; cela est vrai jusques à un certain point; mais cela ne l'est pas exactement. Il est vrai qu'ils ne parlent pas notre langage; mais ils en ont un, qu'il faut étudier. Chaque maladie a proprement le sien, qu'un Medecin attentif apprend; il doit donner tous ses soins à comprendre celui des enfans, & à en profiter pour perfectionner les moyens de les rendre sains & vigoureux, & de les guérir des différens maux auxquels ils sont exposés. Je ne me propose point de remplir cette tâche actuellement; mais j'indiquerai les principales causes de leurs maux, & la façon générale de les traiter. Je leur épargnerai au moins par-là, une partie du mal qu'on leur fait, & l'épargne des maux artificiels est un des grands buts de cet ouvrage.

§. 356. L'estomac & les intestins de l'enfant, sont remplis, quand il vient au monde, d'une matiere noire, médiocrement épaisse & assez gluante, qu'on appelle meconium. Il faut que cette matiere sorte, avant que l'enfant prenne du lait; sans quoi elle le corromproit, & devenant elle-même extrêmement âcre, il en résulteroit une double source de maux, auxquels l'enfant ne résisteroit point.

La maladie qui les tue à cet âge, c'est les convulsions. Leurs nerfs sont extrêmement sensibles, & dès que quelque chose les irrite, les convulsions naissent. L'on prévient le mal en ôtant la cause. On ne leur donne point de lait les vingt-quatre premieres heures; mais on leur fait boire de l'eau dans laquelle on met un peu de sucre ou de miel; ce qui délaie ce meconium, & en facilite l'évacuation; mais pour être plus sûr qu'elle s'opere, il faut leur donner une once de syrop de chicorée composé, qu'on délaie avec un peu d'eau, & qu'on leur fait boire dans l'espace de quatre ou cinq heures. Cette pratique a les plus grands avantages, & il est à souhaiter qu'elle devienne générale. Le syrop que j'indique est à préférer de beaucoup à tous les autres, & surtout à l'huile d'amandes douces.

S'ils avoient besoin de quelque aliment, il n'y a point d'inconvénient à leur donner un peu de biscuit dans l'eau, comme on fait ordinairement, ou un peu de panade très claire.

§. 357. Quoiqu'ils aient été bien évacués d'abord après leur naissance, très souvent le lait s'aigrit, & produit des coliques violentes, des convulsions, la diarrhée, la mort. Il n'y a que deux choses à faire; évacuer ces matieres, & leur donner des absorbans. Le syrop de chicorée est encore dans ce cas, le meilleur remede. On donne ensuite, trois prises par jour de la poudre No. 60, & on leur fait boire un thé de mélisse & de tilleul. L'on est dans l'usage de donner aux enfans beaucoup d'huile d'amandes douces dès qu'ils ont quelques tranchées, c'est une habitude pernicieuse, & dont les conséquences sont très dangereuses. Il est vrai que l'huile appaise quelquefois d'abord les douleurs, en envelopant les acides, & en émoussant la sensibilité des nerfs; mais c'est un remede palliatif, qui, loin d'enlever la cause, l'augmente, aussi le mal revient bientôt; & plus on donne d'huile, plus l'enfant devient sujet aux tranchées. J'en ai guéri, sans autre remede, que la privation de l'huile, qui leur affoiblit l'estomac; par là-même, le lait se digere moins bien, moins vîte, & s'aigrit plus aisément. Cet affoiblissement que l'estomac reçoit à cette époque, a quelquefois des influences sur le tempérament de l'enfant pour le reste de ses jours. Il importe aux enfans d'avoir le ventre très libre, & il est certain que très souvent l'huile les resserre, en diminuant les forces des intestins: il n'y a personne qui ne puisse remarquer ces inconvéniens; on continue cependant à l'ordonner, dans un but contraire: telle est la force du préjugé, dans ce cas & dans tant d'autres. On est dans l'idée que tel remede doit produire tel effet; il a beau ne le produire jamais, la prévention subsiste, & l'on attribue son efficacité à de trop petites doses. On les double; le mauvais effet augmente, & ne fait point finir l'aveuglement. L'abus de l'huile dispose aussi à la noueure ou rachitis, & enfin il devient souvent la cause premiere des maladies de peau, qui sont extrêmement difficiles à guérir. Ainsi l'on ne doit l'employer que très rarement, & on l'ordonne toujours très mal à propos, dans les coliques qui viennent d'un principe d'aigreur dans l'estomac, ou les intestins.

Les enfans sont ordinairement plus sujets à ces coliques pendant les premiers mois: ensuite elles diminuent, parceque leur estomac se fortifie. On les soulage en leur donnant des lavemens avec une décoction de fleurs de camomille, & la grosseur d'une noisette de savon. Une flanelle trempée dans une décoction de camomille avec un peu de thériaque, appliquée chaude sur l'estomac & le ventre, les soulage aussi beaucoup.

Un des plus sûrs moyens de dissiper ces coliques, qui viennent de ce que le lait ne se digere pas, c'est de leur donner autant de mouvement qu'il est possible, vu leur âge.

On ne peut pas toujours leur donner des lavemens; cela auroit son danger. Chacun connoit la méthode d'y suppléer par des suppositoires, avec quelques côtes de plantes, ou du savon, ou du miel cuit.

§. 358. Tout le corps de l'enfant qui nait, est couvert d'une crasse, qui vient de la liqueur dans laquelle il a vécu. Il est important de le nettoyer d'abord, & il n'y a rien d'aussi bon, que le mélange d'un tiers de vin avec deux tiers d'eau. On peut réitérer quelques jours de suite; mais c'est une très mauvaise coutume, que de continuer à les laver ainsi tiedement. La base de la santé, c'est la régularité avec laquelle se fait la transpiration; pour obtenir cette regularité, il faut fortifier la peau, & les lavages tiedes l'affoiblissent. On augmente encore le mal en y mettant du beurre. Quand la peau a la force nécessaire elle fait toujours ses fonctions, & la transpiration ne se dérange pas à tous les changemens de tems. Pour parvenir à ce point important, il faut laver les enfans, peu de jours après leur naissance, avec de l'eau froide, telle qu'on l'apporte de la fontaine.

On se sert d'une éponge, & l'on commence par le visage, les oreilles, le derriere de la tête, (on évite la fontanelle), le col, les reins, tout le corps, les cuisses, les jambes, les bras, en un mot partout. Cette méthode usitée il y a tant de siecles, & pratiquée de nos jours, par plusieurs peuples qui s'en trouvent très bien, paroîtra révoltante à nombre de meres; elles croiront tuer leurs enfans, & elles n'auront point le courage, surtout de résister aux cris qu'ils font souvent pendant les premieres fois qu'on les lave. Mais si elles les aiment véritablement, elles ne peuvent pas leur donner une marque plus réelle de cette tendresse, qu'en surmontant, en leur faveur, cette répugnance. Les enfans les plus foibles sont ceux qui en ont le plus besoin; ceux qui sont très robustes peuvent s'en passer, & l'on ne peut croire, qu'après l'avoir vu souvent, combien cette méthode contribue à leur donner promptement des forces. J'ai le plaisir de voir, depuis que j'ai cherché à l'introduire ici que plusieurs meres, les plus tendres & les plus raisonnables, l'ont employée avec les plus grands succès. Les sages femmes qui en ont été les exécuteurs la répandent, & si elle peut devenir générale, je suis pleinement persuadé, qu'en conservant un très grand nombre d'enfans, elle contribuera à arrêter les progrès de la dépopulation. Il faut les laver très régulierement tous les jours, quelque tems, & quelque saison qu'il fasse; & dans la belle saison, les plonger dans des seaux, dans des bassins de fontaine, dans des ruisseaux, dans des rivieres.

Après quelques jours de pleurs, ils s'accoutument tous si bien à cet exercice, qu'il devient un de leurs plaisirs, & qu'ils rient pendant toute l'opération.

Le premier avantage de cette méthode, c'est comme je l'ai dit, d'entretenir la transpiration, & de rendre moins sensible aux impressions de l'air, mais de ce premier avantage, il résulte, qu'on les préserve d'un grand nombre de maux, surtout de la noueure, des obstructions, des maladies de la peau, & des convulsions; & on leur assure une santé ferme & robuste.

§. 359. Mais il ne faut pas détruire le bien qu'on leur fait en les lavant, par la mauvaise habitude de les tenir trop au chaud; il n'y en a point de plus pernicieuse, & qui tue plus d'enfans, il faut les accoutumer à être très peu habillés, tant le jour que la nuit, à avoir surtout la tête très peu couverte, & point du tout, depuis l'âge de deux ans; éviter qu'ils ne soient dans des chambres trop chaudes, & les faire vivre au grand air, soit l'été soit l'hyver, le plus qu'il est possible. Les enfans élevés au chaud, sont souvent enrhumés, foibles, pâles, languissans, bouffis, tristes, meurent, ou tombent dans la noueure &c. Ceux qu'on éleve, à l'eau froide sont l'opposé.

§. 360. Je crois devoir ajouter, que l'enfance n'est pas le seul tems de la vie, dans le quel les bains froids soient utiles. Je les ai employés, avec un succès marqué, pour des personnes de tout âge; & il y a deux especes de maladies, plus fréquentes, il est vrai, à la ville qu'à la campagne, dans lesquelles ils réussissent très bien; c'est dans les foiblesses de nerfs, & quand la transpiration se fait mal, qu'on craint l'air, qu'on est fluxionnaire, foible, languissant. Le bain froid rétablit la transpiration, redonne de la force aux nerfs, & dissipe par là, tous les dérangemens que ces deux causes occasionnoient dans l'œconomie animale. On doit les prendre avant diner. Mais autant les bains froids sont utiles, autant l'usage habituel des bains chauds est pernicieux; ils disposent à l'apoplexie, à l'hydropisie, aux vapeurs, & l'on voit les villes où l'usage en est fréquent, désolées par toutes ces maladies.

§. 361. La sortie des dents coute souvent beaucoup aux enfans, & quelques-uns succombent aux maux qu'elles occasionnent. L'on doit à cette époque, si elle est douloureuse, 1. leur tenir le ventre libre par des lavemens, faits avec une décoction de mauve sans y rien ajouter; mais ils ne sont point nécessaires si l'enfant a en même-tems la diarrhée. 2. Leur diminuer un peu la quantité des alimens; par deux raisons; l'une, c'est que l'estomac est foible; l'autre, c'est qu'il y a quelquefois un peu de fiévre. 3. Leur augmenter un peu la quantité de la boisson; la meilleure pour eux, c'est sans contredit, l'infusion des fleurs de tilleul, qu'on blanchit avec un peu de lait. 4. On leur frotte souvent les gencives, avec un mélange d'autant de miel que de mucilage de pepins de coins, & on leur donne à mâcher une racine d'althea, ou de reglisse. C'est souvent dans le tems de la sortie des dents que les enfans se nouent.

§. 362. Le meconium, l'aigreur du lait, & les dents, sont trois grandes causes des maladies des enfans: il y en a une quatrieme, les vers, qui leur fait aussi très souvent du mal; mais qui n'est point cependant, à beaucoup près, la cause générale de leurs maux, comme on est généralement porté à le croire, dès qu'on voit un enfant, de plus de deux ans malade. Il y a un grand nombre de symptomes, qui font juger qu'un enfant a des vers. Il n'y en a qu'un seul, c'est leur sortie par haut ou par bas, qui le démontre évidemment. Il y a d'ailleurs, à cet égard, beaucoup de variétés; quelques enfans ayant beaucoup de vers, sans en être incommodés; d'autres étant réellement malades avec un petit nombre. Les vers nuisent, 1. en obstruant les intestins, & en comprimant les parties voisines par leur volume. 2. En suçant le chile destiné à nourrir le malade, & le privant par-là même de sa subsistance. 3. En irritant les intestins & même en les rongeant. Les signes qui les font connoître sont, de legeres coliques; une abondance de salive à jeun; une odeur désagréable, d'une espece singuliere, dans l'haleine, surtout le matin; des démangeaisons dans les narines, qui font qu'ils les grattent souvent; un appétit très irrégulier, ayant quelquefois un appetit vorace, d'autrefois point du tout; des maux de cœur, des vomissemens; quelquefois de la constipation; plus souvent une diarrhée de matieres mal cuites, le ventre assez gros, le reste du corps maigre. Une soif, que la boisson ne diminue pas; souvent beaucoup de foiblesse; de la tristesse; le visage est assez ordinairement mauvais, & change d'un quart d'heure à l'autre; les yeux sont souvent éteints, & entourés d'un cercle livide: on en voit souvent le blanc pendant le tems du sommeil, qui est quelquefois accompagné de rêves effrayans, de sursauts continuels, de grincemens de dents. Quelques enfans sont dans l'impossibilité d'être un seul moment tranquilles. Les urines sont souvent blanches, je les ai vues comme du lait. Ils ont des palpitations, des évanouissemens, des convulsions, des assoupissemens longs & profonds, des sueurs froides tout-à-coup; des fiévres, qui ont des caracteres de malignité; des pertes de la vue & de la voix, qui durent long-tems. Des paralysies ou des mains, ou des bras, ou des jambes. Les gencives sont en mauvais état, & comme rongées. Ils ont souvent le hoquet, un pouls petit & irrégulier, des rêveries, & ce qui est un des symptomes les moins équivoques, fréquemment une petite toux seche; souvent une espece de mucosité, dans les selles; quelquefois de très longues & violentes coliques, qui se terminent par un abcès à l'extérieur du ventre, dont il sort des vers.

§. 363. L'on a une foule de remedes pour les vers. La grenette, ou semen contra, ou poudre aux vers, qui est un des plus ordinaires, est très bon. L'on se sert aussi, avec succès, de celui No. 61. La poudre No. 14, est un des meilleurs. La fleur de soufre, le jus de cresson, les acides, l'eau de miel, ont souvent réussi. Mais les trois premiers que j'ai indiqués, suivis d'un purgatif, sont les meilleurs. L'on trouvera No. 62, un remede purgatif, qu'on peut faire prendre aisément aux enfans les plus difficiles. Quand malgré ces remedes, les vers subsistent, il convient de consulter quelqu'un pour en employer de plus efficaces; ce qui est très important; puisque, quoique peut-être la moitié des enfans ait des vers, & que plusieurs se portent très bien, il y en a cependant, que les vers tuent très réellement, après leur avoir fait des maux cruels pendant plusieurs années.

Cette disposition à avoir des vers, prouve toujours des digestions imparfaites; ainsi, il faut éviter de donner aux enfans, qui sont dans ce cas, des choses difficiles à digérer. Il faut surtout bien se garder de leur donner comme remede, des huiles, qui, supposé même qu'elles détruisissent quelques vers d'abord, augmentent la cause qui en laisse reproduire de nouveaux. Un long usage de limaille de fer, est ce qui détruit le mieux cette disposition vermineuse.

§. 364. Les convulsions sont une des maladies les plus fréquentes des enfans. L'on sera surpris que je n'en parle pas particulierement; mais si l'on fait attention, qu'elles dépendent presque toujours, ou du meconium, ou des aigres, ou des dents, ou des vers, on comprendra, qu'en traitant ces quatre articles, j'ai traité des convulsions, qu'on ne guérit qu'en combattant la cause qui les produit. La plus fréquente de ces causes, c'est les mauvaises matieres qui irritent l'estomac ou les intestins, & qui sont le produit du trop d'alimens, ou des alimens indigestes, qu'on a donnés aux enfans, dont une grande partie périt par cette cause. Vouloir calmer le mal en les faisant encore manger, c'est jetter de l'huile sur le feu. Il ne faut que les purger doucement; tous les remedes qui ne produisent point cet effet sont nuisibles; & il n'y a rien de si pernicieux, que plusieurs remedes chauds, qu'on emploie indistinctement dans toutes les convulsions, & qui tuent d'autant plus surement les enfans, qu'ils sont plus jeunes; tel est surtout l'huile d'ambre jaune ou d'agathe, qu'on emploie très souvent. La thériaque & les autres préparations de ce genre nuisent aussi au moins aux neuf dixiemes des enfans auxquels on les donne: & en général les remedes tirés de l'opium, qui souvent cependant leur sont d'une absolue nécessité, ne doivent être ordonnés que très sobrement, parcequ'ils détruisent l'estomac, jettent dans la constipation, qui est pernicieuse aux enfans, & émoussant le sentiment, laissent former sourdement des engorgemens, qu'une plus grande sensibilité auroit fait connoître dès leur commencement.

Il y en a qui ont reçu une constitution très susceptible de convulsions, & qui en sont attaqués pour la plus legere cause. Cet état demande une très sérieuse attention; & si on le néglige, il peut dégénérer en maladies très fâcheuses. Il est très aisé de l'empirer par des remedes mal indiqués; ainsi l'on doit être circonspect. Les bains froids & la poudre No. 14, sont très efficaces.

§. 365. Je finirai par cet avis général. L'on peut préserver les enfans d'un très grand nombre de maux, & les rendre sains & robustes, 1o. En évitant de leur donner trop à manger, & les réglant pour les heures du manger; ce qui est possible, même dès leur bas-âge, quand la mere ou la nourrice le veulent. En ne leur donnant pas des nourritures trop fortes pour leur estomac, & surtout en évitant les mélanges. Je ne sais par quelle tendresse pernicieuse & insensée l'on croit que le comble du bonheur pour les enfans, c'est de beaucoup manger. L'on s'imagine que plus ils mangent, plus ils se fortifient: il n'y a point de préjugé qui détruise plus d'enfans. Ces alimens qu'ils ne digerent pas, ruinent leur estomac, produisent des obstructions, les affoiblissent, & les jettent dans une fiévre lente qui les conduit à la mort. Les mélanges ou les alimens indigestes, ont les mêmes inconvéniens. Il faut, dit-on, accoûtumer leur estomac à tout; c'est une sottise. Il faut leur faire l'estomac bon, alors ils supporteront tout, & on ne le rend point bon en leur causant de fréquentes indigestions. Pour rendre un poulain robuste, on le laisse quatre ans sans en exiger aucun travail; & alors il est capable des plus pénibles, sans en être incommodé. Si, pour l'accoûtumer à la fatigue, on l'avoit, dès sa naissance, obligé à porter des fardeaux au-dessus de ses forces, il n'auroit jamais été qu'une rosse incapable d'aucun travail. C'est l'histoire de l'estomac. J'ajouterai une observation très importante; c'est que le travail précoce, auquel l'enfant du paysan est astreint, est un mal réel pour le pays. Par-là même que les familles sont moins nombreuses, & que plusieurs enfans sont tirés très jeunes de la maison paternelle, ceux qui restent sont obligés de travailler, & même à des ouvrages pénibles, dans un âge où ils ne devroient être occupés que des jeux de l'enfance. Ils s'usent avant l'âge; ils ne deviennent pas aussi forts qu'ils auroient pû l'être; leur corps ne se développe pas autant qu'il auroit fait sans ces fatigues prématurées; & l'on voit réunies des physionomies de vingt ans, & des tailles de douze ou treize; souvent même ils succombent à ces travaux forcés, ils tombent dans une espece de consomption & de desséchement qui les tue. 2o. Il faut les laver ou les baigner à l'eau froide. 3o. Leur donner le plus de mouvement qu'il est possible, dès qu'ils ont quelques semaines; car les premiers jours de leur vie paroissent consacrés par la nature à un repos presque total, & le trop de mouvement pourroit avoir, dans cet âge si tendre, des suites funestes. Mais dès que les organes ont pris un peu de consistance, plus on leur donne de mouvement, moyennant qu'on ne prenne rien sur le tems de leur sommeil, qui doit être très long, plus on leur fait de bien; & en allant par dégrés, on les accoûtume très vîte & sans danger à des exercices assez forts. L'exercice qu'ils prennent dans des voitures un peu rudes, ou par le moyen de quelques autres machines destinées à leur usage, leur est plus salutaire que celui qu'ils prennent aux bras, parcequ'ils sont dans une meilleure attitude, & en été on les échauffe moins, ce qui est important, la chaleur & la sueur étant des causes de noueure. 4o. Les faire vivre au grand air. Si les enfans ont le malheur d'avoir été négligés, & qu'ils paroissent foibles, maigres, languissans, obstrués, noués (ce qu'on appelle rachitique, ou être en chartre), ces quatre secours les tirent souvent de cet état, moyennant qu'on n'attende pas trop tard.

5o. S'ils ont quelque écoulement naturel par la peau, ou quelque éruption, il faut bien se garder de les arrêter par quelques remedes gras ou adstringens. Il n'y a pas d'années qu'on ne voie plusieurs enfans que des imprudences de ce genre tuent, ou jettent dans les maux de langueur les plus cruels.

J'ai vu les exemples les plus fâcheux des remedes extérieurs employés pour la rache & les croûtes de lait, qui, quelques horribles qu'elles paroissent, ne sont jamais dangereuses, moyennant qu'on n'applique rien dessus sans l'avis d'une personne entendue.

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