Avis au peuple sur sa santé: ou traité des maladies les plus fréquentes
ADDITIONS[16]
FAITES A LA PRESENTE ÉDITION.
[16] Voyez l'Avertissement sur cette nouvelle édition.
Anasarque, Bouffissure, Hydropisie générale.
§. 441. On donne ces noms à la maladie dans laquelle tout le corps, ou la plus grande partie du corps étant enflé, on sent, en touchant les parties enflées, qu'elles sont molles & froides, qu'elles cedent sous le doigt, & on voit que l'impression, ou le creux que l'on a fait en appuyant le doigt, subsiste encore quelque tems après qu'on l'a retiré. Dans cette maladie le tissu cellulaire, qui est cette membrane qui unit & enveloppe toutes les parties du corps, contient dans les cavités ou cellules dont elle est formée, de l'eau, ou la sérosité qui se sépare du sang.
§. 442. L'enflure commence ordinairement aux pieds, jambes, cuisses, & elle est toujours plus considérable dans ces parties, proportion gardée, que dans les autres; elle s'étend de proche en proche, & gagne en plus ou moins de tems tout le reste du corps. On remarque aux reins une espece de bourlet; le ventre grossit, les bourses acquerrent un volume considérable; toute, ou presque toute la peau du corps est pâle, peu sensible, froide, un peu luisante; le visage est blême, les yeux sont languissans; la respiration se fait difficilement, surtout après le repas & le soir: le malade perd les forces & l'appétit; il tousse plus ou moins fréquemment; il est assoupi; il ne sue point, ou très rarement; son pouls est petit, enfoncé, fréquent, inégal; ses urines sont crues, claires & en petite quantité; les selles sont crues, quelquefois mêlées de sang, elles changent presque tous les jours de qualité: le malade est foible, sent toujours de la lassitude; sa soif est continuelle & pressante; il a souvent la langue séche, il éprouve des feux passagers; bientôt il survient de la fiévre causée par l'eau qui se corrompt; alors son haleine, ses crachats, ses urines répandent une mauvaise odeur. Tous les accidens augmentent le soir, & sont moins forts le matin.
Ils ne se trouvent pas toujours réunis dans le même sujet; mais plus il y en a, plus ils sont considérables & marqués, plus aussi la maladie est fâcheuse; tantôt ses progrès sont très lents, tantôt ils sont très prompts, ce qui est de mauvais augure.
§. 443. Les causes de l'Anasarque sont un air humide & froid, tel que celui des lieux marécageux, des habitations plus basses que le sol; les alimens de mauvaise qualité, l'excès de l'eau, de la bierre, & de toutes boissons relachantes & froides, surtout si on les prend dans un lieu froid, ayant fort chaud; l'abus du vin & des liqueurs spiritueuses; un tempérament pituiteux; les obstructions des visceres du bas ventre, des fiévres intermittentes mal traitées ou dans des sujets mal constitués, l'asthme, les évacuations excessives par les saignées, les pertes ou hémorrhagies, diarrhées, dyssenteries excessives, les purgations trop fortes ou continuées trop long-tems; les évacuations supprimées ou arrêtées trop tôt, comme les hémorrhoïdes, le dévoiement; les éruptions comme dartres, galle, &c. que l'on a fait rentrer mal-à-propos. Toutes ces causes, en produisant un abord considérable de la partie aqueuse du sang dans toutes les petites cavités du tissu cellulaire, ou en empêchant que lorsqu'elle y est amassée, elle ne soit reprise par les vaisseaux qui sont destinés à cela; toutes ces causes, dis je, donnent lieu à l'anasarque.
§. 444. Il y a quelques cas où l'anasarque est facile à guérir, mais ils sont rares, & on doit généralement regarder cette maladie, comme une des plus funestes & des plus opiniâtres; cela n'étonnera point ceux qui ayant quelque connoissance de l'œconomie animale, verront combien il y a de parties importantes qui ne sont plus dans leur état naturel, & de fonctions qui ne se font plus, ou se font mal.
§. 445. On sait qu'il est très nécessaire de consulter la nature pour guérir les maladies; mais ce n'est qu'après avoir vu un grand nombre d'hydropisies, qu'on peut se former une idée de la différence des méthodes qu'il faut employer pour les guérir, le nombre des causes étant aussi grand qu'il l'est. Il n'est peut-être point de cas où il soit aussi nécessaire de savoir varier les traitemens, les tenter successivement, & insister sur les remedes qui réussissent. On ne s'attend point après cet aveu, que nous donnions une méthode générale, & que nous répondions de son succès: heureux sont ceux qui peuvent avoir les conseils & les soins d'un Médecin habile; mais comme il y a bien des circonstances où le malade ne le peut point, & que cette maladie est assez commune, nous allons exposer, suivant le plan & le but de cet ouvrage, les moyens les plus aisés, les moins couteux & les plus utiles pour guérir, ou du moins soulager les hydropiques. Si la cause n'est point incurable, ou la maladie très ancienne, il y a tout lieu d'espérer de procurer l'évacuation de l'eau par le traitement qui suit.
§. 446. Il faut 1o. régler le régime du malade. Il est important qu'il soit toujours dans un air chaud & sec, qualités qu'on lui procurera avec le feu, s'il ne les a pas naturellement, & alors il vaudroit encore mieux changer d'habitation, du moins pour quelque tems. On garantira surtout de la fraîcheur de la nuit, ce qui demande souvent beaucoup de soins, le malade se tenant sur son séant hors des couvertures. Il fera sa nourriture d'alimens secs, comme du pain rassis ou dur, grillé, de viandes ou poissons rotis & grillés. On assaisonnera ces alimens avec un peu d'acide, comme jus de citron, verjus, vinaigre, pour prévenir ou corriger la corruption des humeurs, qui est funeste dans les hydropisies. Il fera tout son possible pour s'abstenir de boire; & afin de tromper pour ainsi dire la soif, il tiendra dans sa bouche, & se gargarisera avec quelques gouttes de liqueurs acides seules ou mêlées, dans un peu d'eau; s'il ne peut résister à la soif, il boira le moins qu'il lui sera possible, & la meilleure boisson est celle qui fait couler les urines; du vin pur, & principalement du blanc, de la bierre dans lesquels on aura fait infuser quelques plantes aromatiques ameres. Le malade fera autant d'exercice que ses forces lui permettront, à pied, à cheval, en voiture, en bon air. Les frictions sur les parties enflées, répétées le plus souvent qu'il se pourra, seront très utiles: on les fera avec une brosse, avec une grosse toile, &, ce qui est préférable, avec de la flanelle chaude ou autre étoffe de laine claire, & propre à absorber l'humidité: il seroit même avantageux que le malade eût tout le corps couvert immédiatement de cette étoffe. Une douce compression faite par des habits étroits ou des bandes, empêche que les fibres ne cedent ou ne s'étendent trop, prévient des ruptures, & facilite le rétablissement de l'élasticité. Je viens aux médicamens.
§. 447. «On fera prendre le matin au malade une cuillerée du remede No. 75, après lequel il survient quelquefois un vomissement, alors il ne faut plus en donner qu'une demi-cuillerée; une simple nausée en est cependant la suite la plus ordinaire. Les urines sont après cela très abondantes, & procurent beaucoup de soulagement. Il est rare que ce remede purge: si néanmoins ce cas arrive, il ne s'ensuit aucun mal. L'on continue tous les jours l'usage de ce remede, jusqu'à ce que les sérosités soient évacuées, & que le corps désenfle absolument. Si la dose que l'on donne fait peu d'effet dans des corps robustes, on doit l'augmenter insensiblement jusqu'à ce que les urines sortent en abondance». Alors si l'enflure diminue, on observera scrupuleusement ce qui a été dit à l'article du régime, surtout au sujet de la compression, pour prévenir la rechute & favoriser la guérison; & on fera prendre au malade, une heure avant dîner & avant souper, deux onces du vin No. 77. Quand avec l'évacuation des eaux les accidens diminuent, il y a beaucoup à espérer; il faut continuer le remede No. 75, jusqu'à parfaite guérison, & le vin No. 77, encore long-tems après.
§. 448. Si l'anasarque succede à une longue fiévre intermittente, «les évacuations ne sont pas extrêmement nécessaires»; mais on la guérit d'ordinaire en faisant observer au malade ce qui est dit §. 446, 447, «& en donnant le matin à jeun, puis une heure avant le dîner & une heure avant le souper, deux onces du vin No. 77».
§. 449. On traite aussi cette maladie par les purgatifs & les sudorifiques; mais outre qu'ils réussissent peu, il y a bien des cas où ils font beaucoup de mal: l'usage des setons, des scarifications est encore plus dangereux; enfin de tous les moyens que l'on connoît de procurer l'évacuation de l'eau dans l'anasarque, celui que nous avons proposé est, selon le célebre Van Swieten, le plus sûr & le plus efficace: il est aussi le plus aisé à pratiquer par ceux pour qui ce Livre est fait. S'il ne réussit pas, il faut s'adresser à un Médecin.
Aphtes.
§. 450. Les Aphtes sont de petites pustules blanches ou jaunâtres, qui deviennent des ulceres ronds, superficiels, & bordés d'un cercle rouge, qui occupent en plus ou moins grande quantité l'intérieur de la bouche, le gosier, l'œsophage, & s'étendent quelquefois, en suivant les conduits de l'air & des alimens, jusqu'aux poulmons & aux derniers intestins. Cette maladie est assez commune parmi les enfans & les vieillards: elle est quelquefois épidémique parmi les adultes, dans les saisons chaudes, humides, & les lieux marécageux.
§. 451. Quelquefois les Aphtes se dissipent sans qu'on ait besoin d'employer de remedes; mais elles sont souvent accompagnées d'ardeur, de douleur, de rougeur, d'inflammation, de la perte du goût, d'inquiétudes, d'insomnie, quelquefois de fiévre. Les enfans crient & ne veulent point tetter, la suction étant douloureuse & la déglutition difficile, soit à cause de la sensibilité des parties ulcérées, soit à cause de leur enflure, qui est assez ordinaire.
§. 452. Si la fiévre, la douleur, l'inflammation, la difficulté d'avaler sont considérables, on fera une saignée du bras. On donnera 1o. pour nourriture de la panade, ou une décoction d'orge ou de ris. 2o. Très souvent quelques gorgées de thé de fleurs de sureau nitré. 3o. Quatre prises par jour du No. 60, dans une cuillerée de thé de sureau. 4o. Tous les deux ou trois jours on purgera avec du syrop de chicorée composé, ou le No. 62. Ce traitement suffira presque toujours pour dissiper les Aphtes des enfans.
§. 453. Il est à propos d'examiner si l'âcreté du lait de la nourrice, n'est pas la cause de la maladie des enfans, si elle n'a point de boutons, de dartres, d'érésipelles; s'il n'y a ni haleine mauvaise, ni dérangemens dans les digestions qui indiquent qu'elle n'est pas parfaitement saine; & quand même on ne découvriroit rien, on peut la faire user, pendant que l'enfant ne tette point, de boissons délayantes, rafraîchissantes, adoucissantes, & d'alimens farineux.
§. 454. Si le malade n'est point un enfant qui tette, on le mettra au régime; on saignera dans le cas où la douleur, l'inflammation & la fiévre seront considérables; il usera des boissons No. 2, ou 4, du gargarisme No. 19, & il sera purgé avec le No. 22.
§. 455. Lorsque les aphtes ne tombent point, l'humeur qu'elles renferment devient âcre & rongeante, alors il faudra faire son possible pour toucher les aphtes des enfans avec un pinceau ou un linge attaché à un bâton, trempés dans le No. 81, dans du suc de sedum ou joubarbe, ou dans l'huile d'olive chaude. On fera de même pour les autres malades. Si les aphtes sont accompagnées de symptômes plus fâcheux, ou viennent à la suite d'une maladie, voyez ce qui suit.
§. 456. Les fiévres continues, aigües, intermittentes; celles qui sont avec dyssenteries & diarrhées, les fiévres putrides & malignes, sont assez souvent accompagnées d'aphtes, surtout dans les pays froids & humides; & si on a donné au malade des remédes échauffans, ou qu'on lui ait fait suivre un régime de cette nature. Pour l'ordinaire ces aphtes sont des pustules blanches ou vessies remplies d'une humeur âcre qui souleve la surpeau dans plusieurs points de l'intérieur de la bouche, sans intéresser la peau, puisque quand la croûte blanche qui les forme vient à tomber, il n'en reste point de vestige; ce qui établit une différence entre ces aphtes & celles des enfans dont on a parlé ci-dessus.
§. 457. Les aphtes paroissent d'abord au palais en petit nombre & séparées; on est heureux si elles n'augmentent pas; mais souvent s'étendant de proche en proche, elles occupent toute la bouche intérieurement, & descendent même dans la poitrine & les intestins: il survient alors de la toux, de la difficulté de respirer, des nausées, vomissemens, anxiétés, foiblesses, pesanteur & douleur d'estomac, assoupissement, difficulté d'avaler, douleurs & ulceres au gosier, hoquets, diarrhée, dyssenteries, des selles noires, sanguinolentes, sanieuses, & qui infectent.
§. 458. Souvent ces accidens précedent & amenent les aphtes; elles ne sont pas de mauvais augure, blanchâtres & jaunes; mais quand elles sont noires ou recouvertes d'une croûte dure, épaisse comme du lard, ou excessivement blanches, elles sont souvent funestes. Lorsqu'elles ont subsisté quelques jours, elles tombent par parties & en différens tems, quelquefois de nouvelles succedent aux premieres & rendent la maladie plus longue: si les aphtes subsistent long-tems, il se forme autant d'ulceres, & la gangrene s'y met.
§. 459. Tant que la fiévre est médiocre, & les autres symptômes modérés, on doit regarder les aphtes comme une crise, comme un dépôt de l'humeur de la maladie, opéré par la nature, surtout si l'on voit alors quelque diminution dans les accidens depuis l'éruption des aphtes, il faudra l'entretenir par des boissons chaudes & délayantes No. 7, ou une décoction de raves, de ris, gruaux: on usera du gargarisme détersif No. 19, ou 81. Lorsque les aphtes deviennent brunes ou noires, que le pouls est foible, petit; qu'il y a nausées, angoisses, hoquets, & que les croûtes sont dures & épaisses, ou qu'elles subsistent long-tems, & se renouvellent; on donnera une ou deux fois le jour une prise du No. 14, ou No. 82, & les mêmes boissons serviront de gargarismes; on touchera les aphtes avec le No. 81, ou avec les autres liqueurs §. 455, comme il est dit dans ce §. Lorsque les croûtes tomberont, s'il n'y a point de dyssenterie, on purgera avec le No. 22, pour faire sortir de l'estomac & du canal intestinal les croûtes qui se détachent encore plutôt que celles de la bouche, & qui augmenteroient la corruption par leur séjour, on usera d'une boisson adoucissante comme le petit lait, ou les No. 12, 13, qui serviront pour gargariser souvent, si la bouche est douloureuse & brûlante.
Quelquefois il survient alors une salivation considérable: on fera usage du No. 14, & du No. 19 ou 82, en gargarisme.
S'il y a de la diarrhée, de la dyssenterie, on mêlera à la boisson adoucissante No. 17, du syrop de pavot, ou du moins on y fera bouillir une tête de pavot, & on traitera ces maladies avec les remedes prescrits aux articles qui en parlent: on recommandera au malade de se gargariser souvent.
§. 460. Le régime doit être celui des maladies aigües, ou celui de la maladie à laquelle les aphtes se seront jointes, modifié suivant les accidens; le meilleur aliment est une décoction de pain, avec du miel & du vin.
Si le passage des alimens est tellement embarrassé & bouché par les aphtes, que ni les solides, ni les fluides ne puissent passer, on emploiera le lait coupé avec l'eau, en bains, fomentations, lavemens.
Nous n'avons point parlé de saigner ni de purger pendant la maladie, parceque ces secours seroient dangereux alors; mais il est très avantageux qu'ils aient été mis en usage au commencement de la maladie; cela fait souvent la différence des aphtes benignes ou malignes.
Ascite, Hydropisie du bas ventre.
§. 461. Lorsqu'il y a dans le bas ventre de l'eau amassée en assez grande quantité pour former une enflure ou grosseur considérable, on nomme cette maladie Ascite, ou hydropisie du bas ventre. L'enflure commence par la partie inférieure du ventre, d'où en augmentant elle gagne les parties supérieures & inférieures. Quand le malade est debout ou assis, la partie du ventre qui est au-dessous du nombril, forme tumeur. Si étant couché il se tourne ou se panche seulement à droite ou à gauche, la tumeur se porte & se fait voir de ce côté, & le malade sent le mouvement des eaux agitées & leur déplacement: lorsqu'il est couché sur le dos & étendu, si on appuie une main sur un des côtés du ventre, & que l'on frappe sur l'autre côté, avec le plat de l'autre main, le coup se fait sentir à la premiere, & on sent distinctement la fluctuation: la peau du ventre est pâle, luisante, molle, & elle conserve quelque tems l'impression des doigts qu'on y a appuyés; le pouls est petit, fréquent & un peu dur, les urines sont en petite quantité d'un rouge brun, & très chargées, la soif est continuelle & pressante, tout le corps maigrit, s'exténue presque dans la même proportion que le ventre grossit, la respiration devient difficile quand on est couché; & avec les progrès de la maladie, il survient nombre d'accidens qui rendent le mal plus opiniâtre, comme foiblesse, toux, fiévre lente, & les autres rapportés §. 442.
Quant aux causes de cette maladie, on en trouvera plusieurs §. 443, elles sont les mêmes dans presque toutes les hydropisies; on y ajoutera l'anasarque, comme cause de l'ascite.
§. 462. «Quand le mal est récent, on le guérit assez souvent par le seul usage du remede No. 75, donné comme il est dit §. 447». Si dans quelques jours le flux des urines ne survient point, & que l'enflure du ventre ne diminue point, on prendra chaque jour la ptisane No. 74, & tous les matins à jeun, & le soir en se couchant une prise du No. 23; au bout de six jours on purgera avec le No. 76, & si le malade est foible, avec le No. 21; on répétera la purgation six jours après.
Le régime doit être celui qui est prescrit dans l'hydropisie générale ou anasarque §. 446. Dans le cas où l'un des traitemens réussira, & où les eaux s'évacueront, on fera prendre pour redonner du ressort aux fibres relâchées, le vin No. 77, d'abord une fois le jour, puis deux, & même trois.
§. 463. Lorsque ces tentatives seront sans succès, que les urines ne seront pas plus abondantes, & que le ventre ne désenflera pas par les évacuations que procurent le No. 75 & les purgatifs, il faut se hâter de faire la ponction qui réussit dans les ascites peu anciennes; mais elle est dangereuse dans celles qui sont invétérées; cependant dans ces cas même elle soulage le malade en lui rendant la facilité de respirer: souvent cette opération que l'on employoit comme un palliatif, a disposé à la guérison parfaite, & a laissé aux remedes la liberté d'agir; c'est alors surtout que le vin No. 77, est utile; ainsi que tout ce qui a été prescrit dans le régime §. 446.
§. 464. Je ne parle point de la paracenthese ou ponction du ventre, parcequ'on doit s'adresser à un Chirurgien qui sache la faire. «Il est très convenable de tirer autant qu'il est possible, en une seule fois & tout de suite, toute la lymphe ou l'eau: on peut le faire avec sureté, en serrant le ventre du malade par des bandes, & cela petit à petit & de plus en plus, à mesure que l'eau sort; on évitera par-là les foiblesses & les autres accidens»: si le ventre enfle de nouveau, il faut dans ce cas répéter la ponction: il y a des exemples de personnes guéries après plusieurs ponctions; au moins cette opération prolongera la vie, la rendra supportable, & peut-être même mettra-t-elle le malade en état de vaquer à ses affaires pendant un assez long-tems. Après l'opération, on ne manquera point de donner le vin No. 77, comme il a été dit §. 447.
Asthme, courte-haleine, accès d'Asthme.
§. 465. L'accès de l'Asthme est une difficulté de respirer, périodique, irréguliere, & quelquefois réguliere, accompagnée d'anxiétés, de sifflement ou rallement, de pesanteur ou resserrement de la poitrine, & de violens mouvemens du diaphragme & des muscles de la poitrine, du bas ventre, & des omoplates. Il semble que le malade est près d'être suffoqué, les urines deviennent claires & abondantes; le pouls est fréquent & inégal; il y a soif, insomnie; il survient de la chaleur, de la fiévre, & des palpitations de cœur; cet état dure plusieurs heures, & quelquefois plusieurs jours. Mais ceux qui y sont sujets ne se trouvent pas toujours dans cet état violent, ils n'y résisteroient point. Les poulmons sont le siege de ce mal.
§. 466. On distingue plusieurs dégrés et especes d'Asthmes, qui ont des causes, des signes & des effets particuliers; mais nous n'entrerons dans ce détail, qu'autant qu'il sera nécessaire pour instruire de ce qu'il faut faire dans les momens où ceux qui ont l'Asthme ont besoin d'un prompt secours; je veux dire dans l'accès: cette maladie étant longue & ayant des intervalles où l'on peut consulter, il faut le faire. Je rapporterai cependant ce qui arrive hors de l'accès, à ceux qui ont cette maladie, afin qu'on reconnoisse plus aisément l'accès de l'Asthme, étant prévenu que ceux qui sont sujets aux accidens suivans, le sont aussi aux accès d'Asthme ou à la courte-haleine.
§. 467. Chez les asthmatiques la respiration est grande, laborieuse & fréquente, surtout lorsque leur sang est agité par quelque cause, comme l'exercice un peu fort, les passions, les excès dans le boire & le manger: cette difficulté de respirer augmente encore lorsqu'ils montent, qu'ils sont couchés horisontalement, pendant la nuit, dans les tems humides & froids, & dans des chambres très chaudes ou très petites. La situation où ils respirent plus aisément, est celle où le corps est un peu penché en devant. L'Asthme est souvent accompagné de toux, de ronflement, d'un bruit semblable à celui d'un fluide agité, de douleurs à l'intérieur & à l'extérieur de la poitrine.
§. 468. Dans l'accès ou attaque d'Asthme, on mettra le malade dans une situation où la moitié supérieure du corps se trouve droite, dans un lieu où l'air du dehors ait un accès libre, & surtout l'air froid, où il n'y ait point de feu, d'animaux, ou beaucoup de personnes qui l'échauffent, il ne fera aucun mouvement qui puisse accélérer la circulation du sang, on évitera d'exciter les passions qui agitent le sang, & font impression sur les nerfs. Plus la difficulté de respirer est grande, plus il faut se hâter de saigner, & on répétera la saignée suivant les forces du malade, celle des accidens, & l'opiniâtreté du mal. On ne doit point être arrêté par la petitesse & la foiblesse apparentes du pouls, la saignée faite, il sera plus fort: au reste, si on a quelque crainte à ce sujet, on fera les saignées petites: ce remede guérira seul l'accès de l'asthme, s'il vient de plénitude, comme cela arrive souvent, voyez les signes de cet état[17]; on donnera des lavemens, qui ne seront que moitié des lavemens ordinaires, & le malade les recevra debout: si les lavemens simples, comme No. 6, n'ont aucun effet, on se servira des purgatifs.
§. 469. Lorsque le malade est d'un tempérament pituiteux, humide & crache beaucoup, que pendant l'accès on entende un rallement, un bruit comme d'un fluide agité dans la poitrine, qu'il crache beaucoup, qu'il sent une douleur sourde, une pesanteur à la poitrine, on donnera pour boisson la ptisane No. 7, ou le No. 12, & d'heure en heure une cuillerée de la potion No. 72. S'il y a pesanteur d'estomac, & que l'accès ait été précédé d'excès de table, ou qu'il y ait eu des signes de bile ou d'humeurs abondantes[18], on fera bien de donner un vomitif No. 34, avec les précautions recommandées §. sur les vomitifs, ou du moins la potion No. 11.
§. 470. Lorsqu'avant & pendant l'accès, le malade a une toux fréquente & séche; que dans l'accès le visage devient rouge, que les veines se gonflent, que le malade sent un serrement à la poitrine ou à la gorge, on donnera pour boisson la ptisane No. 12, dans l'intervalle des saignées qui seront répétées comme il a été dit, suivant l'opiniâtreté du mal, ainsi que les lavemens simples & purgatifs, le malade prendra dans les accès de toux, ou plus souvent, s'ils sont rares, la potion No. 10, ou le petit lait No. 17, par cuillerées. On lui fera respirer la vapeur de l'eau chaude, & mettre les pieds dans l'eau chaude; les frictions legeres sur les extrémités, l'application de vessies remplies de lait sur la poitrine, sont aussi fort utiles.
Lorsque l'accès est très long & opiniâtre, & qu'il y a lieu de croire qu'il est l'effet d'une goutte remontée, de maladies de peau, ou éruptions rentrées, d'ulceres trop tôt fermés, on fera usage de sinapismes, de vésicatoires, qui dans ces cas feront bientôt disparoître le mal.
§. 471. Pendant le tems de l'accès d'Asthme, on doit tenir le malade au régime, c'est-à-dire ne lui donner aucune nourriture solide, on ne lui accordera même celles No. 35, que dans le cas où l'accès sera long, & qu'il ne sera pas de la plus grande violence; les viandes augmentent & prolongent beaucoup l'accès. On évitera de donner les boissons chaudes, & on les rendra un peu acides, comme celles No. 1, 2.
§. 472. Pour prévenir les accès, ou les éloigner jusqu'à ce qu'on puisse consulter un Médecin, on évitera de faire aucun excès dans le boire, le manger, l'exercice, &c. On se garantira du froid avec le plus grand soin, & surtout de celui qui est joint à l'humidité. On fera un exercice modéré. On prendra dans l'Asthme où l'on crache beaucoup, la poudre No. 14, une demi-prise à chaque repas, & tous les matins à jeun trois pillules No. 73, avec deux verres de 12, immédiatement après: il faut aussi se purger de tems en tems avec le No. 21. Si c'est un Asthme où on ne crache pas, on usera tous les jours des boissons délayantes, & on se fera saigner lorsque les premiers symptômes de plénitude[19], l'augmentation dans la difficulté de respirer, ou le serrement de poitrine se feront sentir: dans les deux especes les eaux minérales chaudes prises dans leurs saisons, la saignée faite en Printems & dans les grandes chaleurs; & les purgations en Automne & en hyver; sont des secours très utiles pour prévenir ou retarder les accès.
Lorsqu'un Goutteux dont la goutte est vague, ou ne se fait pas sentir au lieu & au tems ordinaires, est attaqué de difficulté de respirer, voyez ce qui est dit article de la goutte remontée.
Carreau.
§. 473. On trouve souvent dans la campagne parmi le peuple, des enfans qui ont le ventre plus gros qu'ils ne doivent l'avoir, il est dur, & la peau est tendue; ils sont pâles, tristes, paresseux, sans appétit; ils sentent des douleurs vers le nombril, dorment peu; & ils ont beaucoup d'ardeur, de la soif, & souvent de la fievre le soir. Dans le commencement, ils vont difficilement à la selle; mais au bout de quelque tems il survient un dévoiement; ils dépérissent à vue d'œil, tombent en chartre, maigrissent très vîte, le ventre seul est fort gros. Le carreau vient d'obstructions & d'embarras dans une ou plusieurs des parties contenues dans le bas du ventre, & ce qui souvent y a donné lieu, sont des alimens indigestes, visqueux, les fruits cruds non mûrs, le laitage dans quelques constitutions auxquelles il est contraire, les vers, la malpropreté, la transpiration long-tems retenue, une disposition écrouelleuse, des éruptions rentrées, ou qui n'ont pas sorti entierement.
§. 474. Pour guérir cette maladie, il faut interdire les mauvaises nourritures & leur en substituer de bonnes, aisées à digérer, point visqueuses, ni qui s'aigrissent aisément: les panades, les fruits cuits, les œufs, un peu de viandes blanches & legeres, les plantes ou légumes fondantes & apéritives, laitue, chicorée, épinars, cardes, &c. on mettra le malade dans un lieu où l'air soit sec & sain, on lui fera faire le plus d'exercice qu'on pourra, à pied ou en voiture, il boira un peu de bon vin vieux avec de l'eau de chiendent, ou une eau de rhubarbe legere. On lui fera des frictions sur tout le corps avec la flanelle, on appliquera sur le ventre les topiques No. 9.
§. 475. On lui fera prendre tous les jours des sucs exprimés des plantes apéritives No. 7, dans du petit lait, ou au moins des décoctions de ces mêmes plantes. Ce remede manque rarement d'avoir son effet, surtout si on le prend dans le Printems; les vertus fondantes & apéritives sont alors à un plus haut degré dans les plantes, que dans les autres saisons: lorsqu'on manque de ces plantes fraîches, on doit faire des décoctions de racines de chiendent, d'asperges, d'oseille, de patience, de chelidoine, que l'enfant prendra de trois en trois heures par verrées; on mettra dans le premier verre du matin pris à jeun, un gros de sel de glauber, ou de sel de duobus, ou une prise du No. 23. L'extrait de cigüe No. 55, est un remede excellent, & qu'il sera aisé de faire prendre aux enfans. On purgera tous les dix à douze jours avec la poudre No. 37, ou le syrop de chicorée composé. Lorsque le ventre sera désenflé & mollet, on fera prendre quelque tems une eau minérale legere, naturelle, comme celles de Passy, de Forges, ou artificielle comme No. 83.
Catharre suffocant.
§. 476. Dans cette maladie, une des plus vives qu'il y ait, qui attaque subitement surtout les vieillards, les enfans, & ceux qui ont un tempérament humide & pituiteux, & qui est quelquefois épidémique, la respiration se fait si difficilement, & l'oppression est si grande, que le danger de la suffocation est des plus pressans, & que le malade meurt quelquefois dans le moment de l'attaque, ou peu d'heures après.
Je ne parle point de la suffocation causée par l'ouverture d'un abcès dans la poitrine (voyez §. 64), ni de celui qui est une suite de la paralysie des organes de la respiration; mais seulement de catharres qui viennent d'une abondance de sérosités plus ou moins acres, qui remplissent la poitrine, ou se jettant sur les nerfs, les mettent en convulsion; ou de l'humeur de la petite vérole, de la rougeole, ou d'une autre éruption qui n'est pas sortie, ni n'a pas été évacuée entiérement, & qui se porte sur les organes de la respiration; ou d'une grande quantité de sang qui remplit plus qu'il ne faut les vaisseaux de la poitrine, ou s'y coagule, toutes choses qui interceptent la respiration.
§. 477. Dans le catharre suffoquant, outre la difficulté de respirer, il y a douleur de poitrine, sentiment de pesanteur, voix entrecoupée, sueur surtout au visage, gonflement des vaisseaux de la tête, anxiétés ou angoisses; agitation continuelle, effort pour tousser, ronflement, sifflement ou rallement, les battemens du pouls sont foibles, éloignés, quelquefois fréquens, & souvent inégaux. Le malade est sans force, il sue, une pituite visqueuse ou une écume lui sort de la bouche; il faut, sans perdre un moment, le saigner une, deux & trois fois, jusqu'à ce que la respiration devienne plus facile, dans les intervalles des saignées, on lui donnera des lavemens d'abord simples, puis purgatifs, il mettra ses pieds dans l'eau chaude, on lui fera des frictions sur les extrémités inférieures avec la flanelle.
§. 478. Lorsque ces secours ne suffisent pas, si le malade est pituiteux, sujet aux catharres, aux fluxions, ou qu'il ait eu quelque maladie de peau maltraitée, ou une éruption rentrée ou qui n'a pas sorti suffisamment, on lui fera prendre un vomitif No. 34, ou un purgatif No. 21, & on appliquera une emplâtre vésicatoire No. 35, au bras ou à la nuque. Si c'est un enfant, aussi tôt après la premiere saignée, on appliquera l'emplâtre vésicatoire; on donnera toutes les demi-heures une cuillerée de la potion No. 8, & dans les intervalles, la ptisane No. 2. Lorsque la violence des accidens diminue; mais que les crachats sortent rarement en petite quantité & visqueux, & que l'on entend un rallement dans la poitrine, on donnera de trois en trois heures une cuillerée du No. 8, auquel on ajoutera hypecacuana, iris de Florence & Kermes minéral, de chaque trois grains. Quand le catharre traine en longueur, on doit suivre le régime §. 35 & suiv. en ajoutant seulement un peu de vin ou d'élixir de propriété, comme cordiaux nécessaires pour ranimer les forces.
Colique néphrétique.
§. 479. La douleur est aigüe & fixe dans les reins & leurs environs; elle se fait sentir continuellement, ou par intervalles dans tout le trajet oblique que font les vaisseaux destinés à conduire l'urine depuis les reins jusqu'à sa sortie. Chez les hommes, les testicules se retirent, & il y a douleur: chez les femmes, la douleur est dans l'aine.
Au commencement, les urines sont en petite quantité, claires, puis elles sont sanglantes & chargées de gravier. Il y a nausée, vomissemens, douleur d'estomac, défaillances, sueurs, constipation, envie d'uriner: on sent de l'engourdissement à la jambe du côté où est la douleur; la fiévre survient, elle est irréguliere & le pouls inégal.
§. 480. Les moyens de calmer cette colique, sont les saignées répétées deux, trois fois en douze heures, & plus si le mal est toujours le même: les lavemens fréquens No. 6, la ptisane No. 1, ou le petit lait No. 17; la poudre No. 20; du savon en pilules, ou fondu dans la ptisane, jusqu'à trois gros par jour; les fomentations sur les reins No. 9, les demi-bains, les bains où le malade restera long-tems. On aura soin de ne pas le laisser coucher sur la plume, & dans un lit où ses reins soient trop échauffés: on donnera deux & trois onces de syrop diacode par demi-cuillerées dans le jour, si les douleurs sont excessives & avec convulsions. Cette colique étant sujette à retour, on consultera un Médecin pour la prévenir.
§. 481. On suivra le même traitement dans l'inflammation des reins, qui a tous les symptômes de la colique, mais beaucoup plus de chaleur aux reins & aux lombes, de fiévre, des douleurs plus aigües, des urines aqueuses ou très rouges, en petite quantité, & sans sédiment. Dans le cas où les saignées n'auront pas été faites assez tôt, & où le mal sera insurmontable par sa nature; il se formera un abcès (voyez §. 283); alors il faut avoir recours au Médecin & au Chirurgien.
Coqueluche.
§. 482. La coqueluche est cette toux redoublée, pressée, opiniâtre, qui se renouvelle à des intervalles plus ou moins éloignés. On appelle ces accès des quintes: la toux est tantôt forte & rauque, tantôt aigre & glapissante, presque continue pendant la quinte, avec des sifflemens ou heurlemens; la respiration se fait très difficilement, sur tout le mouvement qu'on appelle inspiration, par lequel l'air entre dans la poitrine; alors le malade est prêt d'être suffoqué. Il ne sort presque rien pendant la plus grande partie du tems que dure la toux, ou tout au plus un peu de pituite claire; mais vers la fin de la quinte le malade rejette une matiere visqueuse, glaireuse, si gluante qu'il faut la lui tirer de la bouche avec les doigts; il y a des mouvemens convulsifs, violens dans tout le corps; le malade vomit, surtout s'il n'y a pas long-tems qu'il a mangé, & les repas sont ordinairement suivis de quintes violentes. Le sang s'accumule dans les vaisseaux de la tête, les gonfle, rend tout le visage rouge, violet, & même noir. Il y a irritation, douleur au creux de l'estomac avant la toux & après. Le plus souvent la coqueluche est sans fievre, surtout dans les commencemens. Cette maladie attaque principalement les enfans, quelquefois les adultes; souvent elle est épidémique parmi les premiers, & quelquefois parmi les seconds. Elle est causée par les dérangemens de la digestion, joints à la transpiration supprimée.
§. 483. Lorsque le malade est un enfant qui tette, on examinera le lait de la nourrice; s'il n'est pas bon, on lui en donnera une autre, ou on le nourrira de panade, d'eau de ris, d'eau d'orge, de gruaux, de bouillons. Il ne mangera point de bouillie. On mettra tout autre malade au régime des convalescens, & on le garantira surtout du froid & de l'humidité. L'exercice est très bon, mais il doit être modéré, pour ne point exciter des quintes. Lorsque les symptômes, comme la toux, la difficulté de respirer, la couleur du visage, le tempérament sec & sanguin du malade, font craindre pour sa vie, & qu'il ne se rompe des vaisseaux dans la poitrine par les efforts de la toux, on fera bien de le saigner; ce qui ne seroit pas nécessaire, si les accidens étoient moins grands ou moins pressans. On donnera pour boisson la ptisane No. 12; on tiendra le ventre libre, avec des lavemens donnés tous les jours No. 6; on fera vomir avec les poudres No. 33 ou 34; puis on purgera avec le No. 22, ou le syrop de chicorée composé. Après ces évacuations, si la coqueluche n'est pas totalement passée, on donnera de trois en trois heures, une cuillerée de la potion No. 8, auquel on ajoutera kermes minéral, No. 24, six grains, & autant de poudre d'iris de Florence. S'il y a insomnie, on mettra dans la ptisane une ou deux têtes de pavot, ou deux pincées de feuilles de coquelicot. C'est un usage pernicieux, que celui de l'huile dans la coqueluche, voyez §. 357. Pour rétablir les digestions; on donnera la poudre No. 14: & si la maladie étant totalement guérie, il reste une petite toux ou de la foiblesse, le lait de vache coupé avec une décoction d'orge ou de ris, les dissipera.
Dartres.
§. 484. On donne ce nom à des pustules ou boutons de différentes grosseurs, & quelquefois presque imperceptibles, séparés ou réunis en tas, avec douleur & demangeaison. Ces boutons s'étendent de proche en proche, & y portent la douleur & la démangeaison, qui cessent quelquefois où elles avoient commencé. Quand on les gratte, il en sort une eau visqueuse et âcre, qui, en séchant, forme une croûte. Toutes les parties du corps, mais surtout le visage, les cuisses, les parties de la génération sont sujettes à ce mal, qui le plus souvent forme des plaques assez grandes, de différentes figures.
§. 485. On saignera le malade du bras; il fera usage de ptisane de racine de chicorée amere, ou de celle No. 25; & si le mal est opiniâtre, de la ptisane No. 74, à laquelle on ajoutera, dans leurs saisons, les jus d'herbes No. 7, & du petit lait rendu laxatif avec le sel de duobus, ou la crême de tartre No. 23, alternativement pendant une douzaine de jours. Ce mal n'empêchant point de vaquer à ses affaires, il est inutile de prescrire au peuple d'autres remedes qui ne seroient pas faits. On purgera avec le No. 21, tous les huit jours. Il faut se garantir du froid, de l'humidité, ne point manger d'alimens salés & âcres, boire peu de vin, se nourrir de lait, d'alimens farineux, de légumes, de fruits.
§. 486. Les topiques font souvent du mal dans les dartres. En général, il faut s'en abstenir jusqu'à ce qu'on ait pris pendant quelque tems des remedes internes; alors on se contentera, dans les dartres rongeantes, vives & douloureuses, d'appliquer une toile trempée dans un jaune d'œuf délayé avec une eau de safran, ou de morelle, ou de cigüe: les dartres séches peuvent être humectées avec de la salive, ou de l'eau de sel marin, ou de l'eau avec un peu de vinaigre: on les couvrira du sparadrap No. 64: si la dartre est maligne ou rebelle, on appliquera le No. 51. On peut substituer à ce traitement, celui qui est marqué §. 261 & suiv.
On emploiera les mêmes remedes dans les cas d'ébullitions, échauboulures, boutons, rougeurs au visage.
Ecrouelles, Humeurs froides.
§. 487. Les écrouelles sont des tumeurs situées sous la peau; elles sont fort long-tems sans douleur, sans chaleur, ordinairement mobiles, lisses & unies; tantôt cedant un peu, & seulement pour un moment, à l'impression des doigts, tantôt très dures. Ces tumeurs sont des glandes grossies & enflées par le séjour de la lymphe, qui est l'humeur qui s'y prépare & s'y conserve. Toutes les glandes sont le siege de cette maladie. Les causes de cette maladie, sont un vice héréditaire de la lymphe qui produit son épaississement, le virus vérolique des peres & meres, la mauvaise nourriture de quelque genre que ce soit, lait, eau, fruits non mûrs, &c. le froid, surtout s'il frappe les glandes du cou; c'est pourquoi ces glandes sont le plus souvent attaquées dans les enfans de la campagne, qui ordinairement n'ont point le cou couvert: les coups & contusions des glandes, qui détruisent leur organisation; la mauvaise conformation de ces glandes. Les tumeurs écrouelleuses sont d'abord petites, paroissent dans peu d'endroits, ne changent point la couleur de la peau; le plus souvent les glandes du col, des aisselles, sont les premieres affectées; mais de quelque côté qu'elles commencent, si on n'y remédie dès qu'elles se manifestent, elles s'étendent à toutes les glandes dont elles sont proches, & ensuite l'humeur écrouelleuse gagne celles qui sont répandues par tout le corps, internes & externes, & toutes les articulations.
§. 488. Cette maladie est ordinairement très longue, difficile à guérir, surtout si elle est héréditaire, ou dans un sujet foible & mal constitué, & dans les adultes; mais il y a beaucoup à esperer, si elle se trouve dans des enfans, depuis peu de tems, dans des sujets bien constitués, qui ont peu de glandes écrouelleuses, & qui n'ont point encore atteint l'âge de puberté, tems où la nature est souvent venue à bout de les dissiper sans aucun secours. C'est pourquoi il importe de faire de bonne-heure tout ce qu'il est possible pour guérir une maladie si opiniâtre, & qui d'ailleurs peut avoir des suites très funestes, si elle subsiste long-tems. Le traitement de cette maladie est très long; le malade comme le Médecin doivent s'armer de patience, & ne s'attendre qu'à des progrès presque insensibles.
§. 489. Si le malade est d'un tempérament sanguin, & dans l'état décrit §. 537, il sera saigné: s'il est dans celui qui est décrit §. 544, il sera purgé avec la potion No. 46, ou la poudre No. 21; ou même on le fera vomir avec un des remedes No. 33 ou 34; puis on le mettra à l'usage de la ptisane laxative No. 79, dont il prendra deux verres le matin, à deux heures de distance, & un le soir. On ajoutera dans le Printems & l'Eté, à chaque verre de cette boisson, deux onces des sucs de plantes fondantes No. 7; on fera prendre tous les matins à jeun, deux pilules No. 80, ou l'extrait de cigüe No. 55, & on purgera tous les douze jours avec la poudre No. 21.
§. 490. Cette maladie étant fort longue, il faut, au bout de quelque tems changer de médicamens, tant à cause du malade qui prendroit du dégoût, & peut-être de l'aversion, que parceque le corps s'habituant aux remedes, ils ont beaucoup moins d'effet. Ainsi on pourra substituer à la ptisane, deux bouillons par jour faits avec le veau, les racines de patience, chicorée sauvage, oseille, fraisier, pissenlit, polypode. Un moment avant de retirer le pot du feu, on ajoutera une demi-poignée de quatre des plantes suivantes, bourrache, buglose, chicorée sauvage, aigremoine, cresson, poirée, pourpier, laitue, pimprenelle, ortie, cerfeuil; on fera fondre un gros de sel de glauber dans chaque; on préparera de la même façon un apozeme, en retranchant le veau, & l'usage sera le même. On pourra aussi faire boire de tems en tems, pendant une huitaine de jours, la ptisane des bois No. 71; ou du petit lait, en y mêlant les jus d'herbes ci-dessus, ou les y faisant infuser, ou en y faisant fondre quelque sel, comme de glauber, de duobus, de sedlitz, terre foliée de tartre. On peut substituer aux pilules celles No. 18, en observant, quelque remede qu'on donne, de purger tous les dix à douze jours avec la poudre No. 21, ou autre purgatif. Si l'estomac du malade se dérange, on donnera la poudre No. 14; s'il vient du dévoiement, on purgera avec le No. 50, en s'abstenant pendant quelques jours des autres remedes. Ceux qui se trouveront près de la mer, doivent boire de cette eau environ une chopine par jour; c'est un très bon fondant. L'usage des eaux thermales ou chaudes, savoneuses, sulphureuses, comme celles de Bareges, de Cauterets, de Bourbonne, de Balaruc, de Bourbon, &c. ne peut être trop recommandé à ceux qui en sont proches.
§. 491. On appliquera sur les tumeurs écrouelleuses, les emplâtres de vigo cum mercurio, de ranis cum mercurio, de savon, de cigüe, diabotanum, diachilum, cum gummi; mais s'ils causent de la démangeaison, chaleur ou inflammation, il faut les ôter.
§. 492. On doit favoriser l'action des remedes par le régime; souvent on lui doit la guérison des maladies chroniques ou longues; un air pur, serein, sec; les lieux élevés; l'exercice à pied, à cheval, en voiture un peu rude; le ventre libre naturellement, ou par l'effet des remedes ou des lavemens; une nourriture saine, aisée à digérer, prise avec modération; du pain bien cuit, des viandes rôties, grillées; des fruits cuits; les eaux legeres, douces, du vin vieux & bon; un sommeil modéré; la tranquillité de l'ame, le contentement, la gaieté, la dissipation prêtent des forces à la nature, pour vaincre le mal conjointement avec les remedes.
§. 492. Lorsque l'on a à traiter des écrouelles devenues rouges, douloureuses & enflammées d'elles-mêmes, ou par des topiques trop actifs, on saignera une ou deux fois; on mettra au régime §. 29; on emploiera les topiques émolliens No. 9, le No. 59, ou l'emplâtre de mucilages, jusqu'à ce qu'on ait calmé & dissipé l'inflammation.
§. 493. Quand, à la suite de l'inflammation qu'on n'a pas pu résoudre, ou sans inflammation sensible & sans qu'on s'en soit apperçu, il s'est fait une suppuration dans la tumeur: dès que l'on en sera certain, on appliquera des cataplasmes, de pulpes d'oseille, d'oignon de lys, de vieux levain, de basilicum, d'escargots, jusqu'à ce que la glande paroisse parfaitement fondue; si elle ne s'ouvre pas d'elle-même à l'extérieur, on l'ouvrira avec la pierre à cauterre ou avec le fer, de peur que le pus ne fasse du ravage intérieurement, en cariant les os, & détruisant les chairs voisines; mais il faut dès-lors avoir recours à un bon chirurgien.
Lorsque la tumeur est ouverte ou suppure, il en sort une matiere purulente, visqueuse, blanchâtre ou jaune, sans mauvaise odeur. On pressera un peu la tumeur dans tous les sens, pour qu'il ne reste point de pus; on injectera une legere infusion de ciguë pour nettoyer la plaie, après quoi il faut appliquer un plumaceau enduit de l'onguent No. 68, & recouvrir avec une compresse pliée en plusieurs doubles, trempée dans la liqueur No. 69: on change le plumaceau deux fois le jour, & la compresse trois fois.
S'il survient des callosités, des chairs fongueuses; s'il y a des fistules, carie, on doit avoir recours au Chirurgien, qui agira suivant l'état du mal.
Enflure des Jambes.
§. 494. Les pieds & les jambes ont plus de grosseur qu'ils ne doivent en avoir comparés au reste du corps, ils sont dans l'état décrit §. 441. Il y a engourdissement & difficulté dans le mouvement de ces parties; je ne parle point de l'enflure des jambes, qui précede & accompagne l'anasarque, l'ascite; on ne peut la guérir qu'en dissipant ces maladies. On voit très souvent des jambes enflées à la suite des fiévres intermittentes & continues, de l'asthme, des érésipelles, de la dyssenterie, du dévoiement, de la plûpart des longues maladies aigües ou chroniques, des grandes évacuations, & des longues veilles. Les Femmes grosses, celles dont les regles sont supprimées, ou beaucoup diminuées, ou prêtes à finir, y sont fort sujettes. Dans tous ces cas, l'enflure est ordinairement sans danger; souvent elle se dissipe pendant la nuit, & recommence le matin pour augmenter jusqu'au soir.
§. 495. L'enflure des jambes diminue souvent sans faire aucun remede, à mesure que la convalescence s'affermit, & que les forces reviennent après l'accouchement & l'apparition des regles. Si cela n'arrive pas, il faut faire un peu plus d'exercice, employer les frictions avec la flanelle chaude, les fomentations aromatiques & spiritueuses, des sachets de sel, de cendres, des bandes qui serrent un peu: on prendra des alimens secs, on boira peu, & seulement du vin vieux pur. On donnera matin & soir, une prise du No. 20, dans une tasse d'infusion de fleurs de sureau; & si les digestions ne se font pas parfaitement bien, on donnera une prise de No. 14. Enfin cela ne suffisant pas, on aura recours à la potion No. 8, dont on prendra deux ou trois cuillerées par jour. Il y a des personnes très grasses, de grands mangeurs ou buveurs, des gens âgés, hommes & femmes, qui ont presque toujours les jambes enflées. Le plus souvent il seroit difficile de l'empêcher, & quelquefois dangereux.
§. 496. Il se fait quelquefois des crevasses, des ouvertures, par lesquelles il sort une eau, rousse âcre; cette évacuation peut être utile; mais ces plaies sont souvent long tems sans se fermer: la gangrene même s'y met quelquefois. Le malade doit se tenir couché, ou au moins la jambe doit être soutenue horisontalement, & tenue chaudement: sa nourriture sera celle des convalescens. Il sera purgé de tems en tems avec la poudre No. 21. Il prendra une fois le jour une prise du No. 14: on mettra sur la jambe un plumaceau couvert de l'onguent No. 63.
Les mains & le visage enflent aussi dans les mêmes cas que les jambes, mais beaucoup plus rarement, & se guérissent plus promptement: s'il y a gangrene, on appellera un Chirurgien.
Engelures.
§. 497. Il vient aux doigts des mains, des pieds, aux oreilles, aux talons, aux levres, au nez, des enfans surtout, & principalement en Hiver, quand ces extrémités sont exposées au froid, & passent subitement du chaud au froid, & du froid au chaud, une enflure ou un gonflement qui dans les commencemens paroit blanc avec peu de chaleur & de douleur; mais si l'on expose le mal au froid, il est bien-tôt accompagné de rougeur, douleur, chaleur, demangeaison, picotement, difficulté de remuer les parties attaquées, ou engourdissement. Souvent ces tumeurs se guérissent sans remedes: mais quelquefois, ou par la nature du mal, ou par la mauvaise méthode qu'on aura suivie, soit en les exposant au feu, soit en y appliquant des topiques irritans; quelquefois, dis-je, la rougeur, la chaleur augmentent, l'enflure s'enflamme, devient livide, il s'amasse une sérosité âcre, qui forme, sous la surpeau, des cloches ou vessies, & qui après avoir rongé la surpeau, paroît au-dehors; ces gersures ou crevasses dégénerent souvent en ulceres, dont il ne sort d'abord qu'une sérosité, & ensuite une espece de pus séreux en assez grande abondance.
§. 498. Ceux qui ont des engelures, ou qui y sont sujets, doivent apporter toute leur attention à se garantir du froid, & surtout à en défendre les parties affectées, ou sujettes à l'être. Il faut éviter de passer subitement du froid au chaud, & du chaud au froid. Lorsque les engelures ne seront encore que des tumeurs blanches, ou peu douloureuses & peu enflammées, on fera mettre la partie malade dans une décoction de plantes aromatiques, comme sauge, romarin, lavande, &c. faite dans le vin rouge; on répétera ce bain une ou deux fois le jour, ou la fomentation aromatique No. 67; l'urine, le savon, la lessive de sarment peuvent servir au même usage. On couvrira l'engelure avec les emplâtres de mucilages, de savon, de Nuremberg, ou la toile préparée No. 64.
Lorsqu'il survient aux engelures douleur, rougeur, demangeaison considérable & inflammation, on appliquera les topiques No. 9, ou ceux No. 58, 59, ou le baume tranquille; on ne fera point agir la partie malade; on usera des boissons délayantes & rafraichissantes No. 1, 2.
§. 499. Si les engelures se crevent ou se fendent, si elles rendent du pus & dégénerent en ulceres, on emploiera les fomentations ou bains ci-dessus; on lavera l'ulcere avec une infusion de ciguë; on appliquera un plumaceau enduit de l'onguent No. 68, ou celui de céruse, & on recouvrira avec la toile No. 64. Les eaux minérales chaudes peuvent être employées en bains & fomentations répétées dans tous les états des engelures. Si les accidens des engelures étoient au point qu'ils causassent de la fiévre, il faudroit saigner une ou deux fois, & mettre le malade au régime §. 30.
Lorsqu'il y a des os cariés ou de la gangrene, il faut avoir recours au Chirurgien.
Epilepsie, Mal-caduc, tomber du Haut-mal.
§. 500. Je ne parlerai de cette maladie, que pour faire connoître ce qu'on appelle accès ou attaque d'épilepsie, & pour dire ce qu'il faut faire alors. Il n'y a point de maladie plus difficile à guérir, & très souvent elle est incurable. Ceux qui en sont atteints, doivent consulter les plus habiles Médecins dès qu'ils s'en apperçoivent, les accès ne fussent-ils que très legers. L'épilepsie attaque plus les hommes que les femmes, & plutôt avant l'âge de puberté qu'après.
§. 501. Les accès se reconnoissent facilement aux signes suivans: Une personne tombe subitement privée de sentiment & de connoissance, avec des convulsions violentes de toutes les parties du corps, ou de quelques-unes seulement. Elle se roule par terre avec des tremblemens des pieds, des bras, de la tête; elle tient les poings fermés, se frappe la poitrine, le ventre, & donne de la tête, des pieds & des mains contre la terre, & tous les corps qu'elle rencontre; la plûpart jettent un grand cri en tombant; la peau du front, celle de la tête, qui est couverte de cheveux, sont agitées; les cheveux se dressent, les sourcils sont dans un mouvement continuel, ils se froncent; les yeux sont fixes & hagards, ils sortent de l'orbite; les paupieres sont dans l'agitation, elles s'ouvrent & ferment alternativement; les globes des yeux roulent, ils se tournent de façon à ne laisser voir que le blanc; tous les muscles de la face étant dans un mouvement perpétuel, expriment les différentes passions; les lévres se resserrent, s'allongent; la bouche s'agrandit; la machoire inférieure s'éloigne de la supérieure, jusqu'à se déboîter; la langue s'enfle, s'allonge hors de la bouche, elle est souvent serrée entre les dents, & coupée, le grincement de dents se fait entendre; tantôt la tête se tourne, s'agite en tous sens, tantôt elle demeure immobile, droite ou penchée en devant, en arriere, sur les côtés. Les parties internes sont également agitées de convulsions; les symptômes suivants en sont des preuves. Il y a dans l'accès, vomissemens, rots, borborigmes, écoulement des urines, des excrémens, de la semence; oppression, soupirs, palpitations de cœur, salivation abondante, ronflement ou siflement, difficulté de respirer; le sang circulant très difficilement, ou étant arrêté dans le poulmon, toutes les veines qui sont apparentes grossissent, & surtout celles du cou, de la langue & du front; le visage rougit, s'enfle, devient livide & même noir; & ce qui rend le spectacle encore plus horrible, on voit sortir par la bouche & les narines, une écume très visqueuse, & sanglante assez souvent, parceque le malade a blessé sa langue avec les dents. La sortie de l'écume termine ordinairement l'accès: dès-lors tous les autres accidens diminuent, la respiration devient libre, quoique toujours bruyante; il survient un profond assoupissement qui est plus ou moins long; & lorsque le malade s'éveille, il est las, foible, triste; il ne se ressouvient point du tout de tout ce qui s'est passé pendant l'accès, mais seulement de ce qu'il faisoit immédiatement avant. Au commencement de l'attaque, le pouls est fréquent & petit; vers le milieu, il est fort, plein, dur; sur la fin, il est très foible, rare & presque insensible; en tout tems il est inégal.
§. 502. Tous les épileptiques n'ont pas dans l'accès tous les symptômes que nous venons de rapporter; il y en a en qui ces symptômes sont de la derniere violence, & d'autres qui les ont bien moins forts. Les accès sont aussi plus ou moins longs, plus ou moins fréquens: on ne sauroit dire combien il y a de variété dans cette maladie. Nous avons donné la description des accès violens, parceque c'est à ceux-là seuls dans lesquels on périt, ou qui produisent de grands dérangemens, & laissent des impressions fâcheuses, ou enfin qui sont si fréquens, qu'on a à craindre l'apoplexie, qu'on est obligé de porter du secours: on n'emploie point de remede dans les autres. Voici les précautions qu'on doit prendre dans tous les accès, & ce qu'on doit faire dans ceux qui sont très violens.
§. 503. On étendra le malade sur le dos, la tête & la poitrine un peu élevés, dans un lieu airé & éclairé. Pour éviter qu'il ne se frappe & ne se blesse, on le tiendra, en laissant cependant un peu de liberté pour les mouvemens convulsifs; les empêcher tout-à-fait, seroit un moyen de les redoubler. On garantira la langue d'être mordue, dans les convulsions de la machoire, en mettant entre les dents un tampon de linge ou de peau, ou un morceau de liege, auxquels on attachera un fil pour le retirer, s'il entroit dans la bouche. On fera des frictions sur le corps & les membres, on donnera, s'il est possible, des lavemens avec le sel marin ou les purgatifs, comme le sené, la gratiole ou herbe à pauvre-homme, le vin émétique, &c. On essaiera les ligatures des extrémités; on fera sentir de mauvaises odeurs, des odeurs fortes & spiritueuses. On fera mettre les pieds dans l'eau. Si le malade a le visage plombé ou noir, si ses membres se tordent, s'il est prêt d'être suffoqué, il faut faire une ou deux saignées du pied. La saignée, dit-on sans preuves, rend la maladie plus opiniâtre; mais dans plusieurs maux inévitables, il faut choisir le moindre, & dans ce cas c'est un moyen d'empêcher la rupture des vaisseaux, l'apoplexie, les inflammations, la gangrene, les fractures des membres, &c. S'il y a des foiblesses, on donnera du vin ou quelque autre cordial, & on fera respirer du vinaigre, ou des eaux spiritueuses & des odeurs fortes.
Epreintes, ou Tenesme.
§. 504. On donne ces noms aux envies continuelles, ou du moins très fréquentes, d'aller à la selle, qui ne sont point suivies des évacuations, ou dans lesquelles on ne rend que des glaires, ou une mucosité, & quelquefois du sang & même du pus. Les épreintes sont le symptôme de plusieurs maladies, comme la diarrhée, la dyssenterie, la pierre de la vessie, les vers, les hémorrhoïdes, l'abcès au fondement. En guérissant ces maux les épreintes se dissiperont, mais elles sont quelquefois maladie principale. Alors il faudra prendre plusieurs fois le jour le lavement No. 6, ou celui de tripes, dans lequel on aura ajouté deux têtes de pavot, faire des fomentations avec le lait, les décoctions des plantes émollientes, les infusions de la cigüe, de fleurs de sureau, la vapeur de l'eau chaude, les linimens avec le cerat, le populeum, le baume tranquille.
On prendra pour boisson du petit lait, des eaux de ris, d'orge, la ptisane No. 2, ou le lait d'amandes No. 4. On purgera avec le No. 31, ou le No. 37.
Eruptions rentrées, Ecoulemens supprimés.
§. 505. On voit tous les jours dans le peuple des exemples du danger qui accompagne la rentrée des éruptions & la suppression des écoulemens qui duroient depuis quelque tems; il n'est presque point de maladie que ces accidens ne produisent; elles deviennent très difficiles à guérir, parcequ'on ne demande le plus souvent du secours que lorsqu'elles sont invétérées, qu'on fait trop peu d'attention à ces deux genres de causes, & qu'on les attribue à des choses beaucoup plus récentes; c'est pourquoi dans presque toutes les maladies, il faut demander si le malade n'étoit point sujet à quelque écoulement, n'a point eu quelque maladie de peau.
§. 506. Lorsque quelque éruption, comme croûtes de lait, galles, rougeole, petite vérole, dartres, érésypelles, boutons, abcès, suintemens aux oreilles, au nez; sueurs abondantes aux aisselles, aux pieds, à la tête; en un mot, toute éruption ou écoulement habituel, lors, dis je, que ces éruptions rentrent avant que toute l'humeur que la nature préparoit à chasser par-là soit sortie, & que ces écoulemens s'arrêtent, soit que la nature n'ait plus assez de force pour continuer l'éruption & l'écoulement, ou que par un mauvais régime, ou des remedes faits mal-à-propos, on la repousse, on l'arrête; ce qui sortoit par ces moyens, se jette sur quelque partie interne du corps, & elle y produit souvent des desordres irréparables, avant qu'on s'en soit apperçu. De-là les phtisies ou suppurations au poulmon si fréquentes, les convulsions dans les enfans & les adultes, l'épilepsie, l'asthme, la difficulté de respirer, les coliques, les douleurs vagues, les dépôts dans toutes les parties du corps.
§. 507. Il faut avertir tous ceux qui ont quelque éruption ou écoulement; de le favoriser, de ne rien faire qui puisse l'arrêter; & si après que cela sera arrivé naturellement, §. 418, ils se sentent quelque mal, de demander du secours; alors il faudra se tenir chaudement pour favoriser le retour de l'éruption, l'écoulement ou la transpiration; boire abondamment du thé de sureau avec le nitre; prendre deux prises par jour de la thériaque des pauvres, suivre les traitemens marqués aux articles érésypelles & dartres; se purger souvent, user d'alimens farineux, faire des frictions, employer les bains de pieds, faire sa boisson ordinaire de la ptisane No. 71 seule, ou coupée avec du lait; de celles No. 25, 74, 79; se mettre au lait de vache ou de chevre. Si le danger est prochain, on appliquera des sinapismes, ou une emplâtre vésicatoire, le plus près du mal qu'on pourra, à la nuque, entre les épaules, aux bras, aux jambes, aux pieds, ou à la partie qui étoit le siege du mal, si cela est possible. Dans le cas de galle rentrée, le plus sûr est de la redonner. Lorsque tous les remedes seront insuffisans, on emploiera les sinapismes & vésicatoires comme ci-dessus.
Etouffement, Suffocation.
§. 508. On voit tous les jours des gens sans respiration, sans pouls, sans mouvement, sans sentiment, pâles, froids, prêts à être suffoqués pour avoir respiré la vapeur du vin dans des celiers, celle du charbon allumé dans des chambres où l'air n'a pas assez de communication avec celui du dehors pour se renouveller, celle des cloaques & autres endroits où l'on remue des immondices, fumiers, eaux croupies, &c. ou qui ont été long-tems fermés. Il faut se hâter de faire respirer l'air libre, faire sentir & même avaler quelque liqueur forte, spiritueuse, ou un peu de vinaigre, secouer un peu, jetter de l'eau froide sur le visage, souffler dans la bouche en serrant le nez. Si cela ne les rappelle pas, il faut saigner au plutôt du bras, puis du pied, donner des lavemens âcres avec du tabac, de la gratiole, ou herbe au pauvre homme, faire des frictions, exciter le vomissement en chatouillant le gosier avec une plume, envelopper très chaudement les parties froides. Toutes les fois que l'on est obligé d'ouvrir un cloaque qui est resté long-tems fermé, il faut éviter de recevoir la premiere vapeur qui en sortira: elle est mortelle; & lorsqu'il est ouvert, il faut y jetter de la paille enflammée à plusieurs reprises avant d'y entrer.
Goutte remontée.
§. 509. Quoique cette maladie ne soit pas commune parmi le peuple; cependant comme on l'y rencontre quelquefois, & qu'il est des cas où elle demande les secours les plus prompts, il est à propos de savoir ce qu'il faut faire alors. Lorsqu'une personne qui a la goutte aux pieds ou aux mains, ou à quelque autre articulation, a une goutte vague, c'est-à-dire qui se fait sentir tantôt dans une partie, tantôt dans une autre; ou qui est sujette à avoir dans certain tems des accès, se trouve presque subitement attaquée de léthargie, apoplexie, mal de gorge, asthme, catharre suffoquant, douleur d'estomac, néphrétique, colique, ou autre maladie; car il n'est presque point de parties du corps sur lesquelles l'humeur de la goutte ne se jette, & elle y occasionne alors des accidens d'autant plus fâcheux, & auxquels on doit d'autant plus se hâter de porter remede que la partie affectée est plus nécessaire à la vie.
§. 510. Il faut 1o. si l'on a le tems, faire mettre les pieds dans l'eau chaude plusieurs fois le jour. 2o. Faire des frictions très fréquentes. 3o. Saigner du pied. 4o. Appliquer des sinapismes No. 35. On appliquera le sinapisme à la partie qui étoit anciennement le siege de la goutte; & si elle étoit fixée auparavant sur quelque partie interne, ou qu'elle fût vague, on le mettra aux pieds, à moins qu'il n'y ait un danger pressant pour la vie; dans ce cas on l'appliqueroit le plus près que l'on pourroit de la partie attaquée, afin de soulager promptement, après quoi le sinapisme appliqué aux mains, aux pieds ou à la partie anciennement attaquée, y rappelleroit la goutte. On connoîtra que la goutte a quitté le lieu où elle étoit par la cessation des douleurs, des accidens & des symptômes qui auront donné lieu d'employer les remedes & par le renouvellement de la douleur, rougeur, tumeur à la partie anciennement affectée, ou à laquelle on l'aura attirée par les sinapismes. Pendant le tems des accidens, on tiendra le malade au régime; on lui donnera pour boisson un thé de sureau fort & nitré, & deux ou trois fois le jour une prise de thériaque No. 41, délayée dans le thé. Il faut garantir le malade du froid, & tenir bien chaudement la partie où l'on veut que la goutte revienne.
Hemorragies.
§. 511. On nomme hémorragie, la sortie du sang par quelque partie du corps que ce soit, en plus ou moins grande quantité. La cause est externe, lorsqu'un coup, une blessure, un effort, un vomitif, ou autre cause qui agit extérieurement, l'a produit; autrement elle est interne. Le plus souvent les hémorragies s'arrêtent d'elles-mêmes sans secours étrangers; il est même à propos de ne point arrêter qu'au bout d'un certain tems les hémorragies du nez, de la matrice, des hémorrhoïdes; ces évacuations sont souvent salutaires, étant ordinairement produites par la nature pour se débarrasser d'une trop grande quantité de sang; mais lorsqu'elles sont trop abondantes, qu'elles durent trop long tems, que les retours sont trop fréquens; lorsque le pouls commence à être vaillant; lorsque le visage & les lévres sont pâles & les extrémités froides, il faut diminuer l'écoulement & l'arrêter par dégrés. Quant aux hémorragies de la poitrine ou crachement de sang, pissement de sang, vomissement de sang, on ne doit pas différer à faire les remedes. Je ne parle point ici des hémorragies qui surviennent dans les fiévres aigües, surtout quand on n'a pas saigné suffisamment, ou qu'on use des remedes échauffans, ni de celles qui arrivent dans la fluxion de poitrine, dyssenterie, les plaies externes, &c. il en est parlé dans ces articles; il n'y a que le cas où elles sont extrêmes dans ces maladies, où on doive les arrêter par les moyens que je rapporterai.
§. 512. Dans toutes les hémorragies, on mettra le malade au régime; on lui donnera des boissons adoucissantes, délayantes, rafraîchissantes comme le petit lait, les ptisanes No. 1, 2, 4, des décoctions de ris, de gruaux; elles seront au plus tiédes. Si le malade est jeune & fort échauffé, le lait d'amandes No. 4; la poudre No. 20, deux ou trois fois le jour; s'il prend des alimens, ce sera des crêmes de ris, d'orge, de gruaux & autres farineux; on tiendra le ventre libre par des lavemens simples; l'air que respirera le malade sera temperé, ou même un peu au-dessous. Il gardera le lit; il ne fera que le moins de mouvement qu'il pourra; on évitera tout ce qui peut frapper vivement ses sens & exciter quelque passion, on purgera avec le No. 31. Pour peu que l'hémorragie dure, il faut employer la saignée, que l'on répétera suivant l'abondance & la fréquence de l'hémorragie, observant l'état du malade que l'on saignera plusieurs fois coup-sur-coup; s'il est dans l'état décrit §. 537; si l'hémorragie actuelle a succedé à une hémorragie habituelle supprimée, & seulement dans les cas excessifs; s'il est foible, languissant, & d'une mauvaise santé; si l'hémorragie est si considérable qu'il y ait des foiblesses & danger éminent pour la vie, on donnera l'eau de Rabel depuis un gros jusqu'à deux gros, sur une pinte de ptisane.
§. 513. Lorsque les hémorragies seront cessees, on demandera à un Médecin les moyens de les prévenir, ce mal étant très sujet à retour. Dans le cas où une hémorragie actuelle aura succedé à une habituelle supprimée, il est à propos, si l'écoulement supprimé étoit des hémorrhoïdes ou de la matrice, de faire la saignée au pied, à moins que ce ne fût une femme donc les regles dussent cesser §. 340. Le crachement, le vomissement de sang, les hémorrhoïdes fluantes ou non, arrivent assez souvent chez les femmes grosses, il est alors à propos de faire une saignée du bras. Nous ne dirons dans les articles des hémorragies particulieres que ce qui leur est propre, ainsi il faudra toujours relire ces généralités.
Crachement de sang.
§. 514. Le sang sort par la bouche, en toussant, seul, ou mêlé avec des crachats; il est d'un beau rouge, & souvent écumeux. Il y a chaleur, douleur, picotement à l'intérieur de la poitrine, difficulté de respirer, toux plus ou moins fréquente; le sang vient alors de vaisseaux ouverts dans les poulmons, & il faut d'autant plus se hâter d'arrêter l'hémorragie, qu'elle est abondante & fréquente. Il n'est pas nécessaire de laisser sortir autant de sang que dans quelques autres hémorrhagies. La saignée répétée coup-sur-coup, est le moyen le plus sûr: on se conduira du reste comme il est dit §. 512 & suiv. Le malade se tiendra au lit sur son séant, dans une chambre où l'air soit modérément sec & chaud; les excès de chaud & froid, de sec & d'humide, sont très nuisibles, ainsi que le passage de l'un à l'autre; il ne parlera point, voyez §. 512. Le crachement de sang étant cessé, on fera usage du lait coupé avec une infusion legere de vulnéraire Suisse, de sanicle, ou d'ortie morte.
Hémorrhoïdes.
§. 515. On a donné ce nom au gonflement des vaisseaux sanguins, qui se trouvent au bord de l'anus ou du fondement. Les hémorrhoïdes forment une ou plusieurs tumeurs plus ou moins grosses. Quand elles sont cachées dans l'intestin, & qu'elles ne paroissent qu'en allant à la selle, on les nomme internes; & on les appelle externes, lorsqu'elles sont apparentes & ne rentrent point. Les hémorrhoïdes sont ordinairement précédées de pesanteur, de douleur dans le bas ventre, de maux de tête, & accompagnées d'épreintes, de douleurs plus ou moins vives, quelquefois d'inflammation, surtout quand on marche beaucoup, qu'on va à cheval, qu'on suit un régime échauffant. Deux causes principalement donnent lieu à cette incommodité. 1o. L'obstruction du foie, & tout ce qui empêche la circulation libre du sang dans le bas ventre. Alors le malade est jaune, constipé, digere mal; dans ce cas, on suivra ce qui est dit au mot jaunisse. 2o. Un sang trop épais, trop abondant, trop échauffé par quelque cause que ce soit; tempérament ou régime, voyez §. 537, No. 1; il faut alors se faire saigner, user de la ptisane No. 2, de la poudre No. 20. Ces remedes deviennent indispensables pour prévenir les fistules & ulceres, quand l'on est obligé de marcher beaucoup ou de monter à cheval: quand il y a inflammation dans le cas où les hémorrhoïdes sont externes, on emploiera les topiques No. 19: le baume tranquille, l'onguent populeum, le cérat No. 64, les lavemens adoucissans en petite quantité à la fois. Les hémorroïdes que nous venons de décrire se nomment aveugles; mais très souvent elles se crevent & répandent le sang en plus ou moins grande quantité; on les appelle alors hémorrhoïdes ouvertes. Cette évacuation est presque toujours salutaire & dissipe le mal; mais si elle est excessive ou trop fréquente, voyez les signes §. 511. On fera ce qui est prescrit §. 512.
Pissement de Sang.
§. 516. Il sort du sang par la voie des urines, avec ou sans douleur; il est pur ou mêlé avec l'urine; il est fluide ou en grumeaux. Il y a très peu de cas où on ne doive chercher à arrêter cette hémorrhagie; & si on excepte quelques vieillards auxquels elle est habituelle ou périodique, & auxquels elle est salutaire, puisqu'ils se trouvent soulagés par-là de pesanteur & de douleur dans le bas ventre; il faut dans les autres cas chercher à arrêter cette hémorragie par les moyens prescrits §. 512. Si cet accident survient après la suppression des regles ou des hémorrhoïdes habituelles, il faut de tems en tems, surtout quand on sent de la douleur dans le bas-ventre, & quand on a des signes de plénitude §. 537, se faire saigner ou appliquer des sangsues aux hémorrhoïdes.
Saignement de Nez.
§. 517. Le saignement de nez qui vient soit d'une cause externe, soit d'une cause interne, s'arrête ordinairement de lui-même. Il est très ordinaire aux jeunes gens, surtout à ceux qui sont sanguins & dans l'état §. 537; alors il leur est très salutaire & les préserve de maladies inflammatoires: il n'y a que quelques cas rares où il est si abondant, & où il a des retours & si fréquens, qu'on est obligé de le faire cesser, voyez §. 511. On peut appliquer dans le tems de l'hémorrhagie des bandes aux bras & aux cuisses: si elle s'arrête, on relâchera les bandes successivement; de façon qu'on mette un quart d'heure d'intervalle entre chaque bande qu'on relâche. Ce moyen étant insuffisant, on appliquera à la nuque, au front, aux tempes, aux poignets, aux mains des linges imbibés de vinaigre. Si ces tentatives ne réussissent point, on emploiera les moyens prescrits §. 512.
Vomissement de Sang.
§. 518. On rejette, par le vomissement, du sang seul, ou mêlé avec les alimens, fluide ou en grumeaux, souvent noir, quelquefois très fétide, sans toux. Il y a douleur, pesanteur d'estomac, défaillances, inquiétudes, nausées, les selles sont ordinairement mêlées de sang. Il faut arrêter cette hémorrhagie par les moyens prescrits §. 512. on ajoutera aux boissons les sucs d'ortie, de millefeuille. Le vomissement cessé, il est à propos de donner la potion No. 31, pour évacuer le sang qui se corrompt dans les intestins. Cette hémorrhagie n'est pas rare dans les femmes dont les regles sont supprimées ou retardées, alors la saignée du pied est nécessaire.
Hémorragies supprimées.
§. 519. Les hémorrhagies on écoulemens sanguins, surtout ceux qui sont habituels étant arrêtés plutôt qu'ils n'auroient dû l'être, soit par la nature, soit par les remedes, soit par la faute du malade, donnent lieu à beaucoup de maladies des plus fâcheuses. On voit tous les jours après les suppressions des regles, du saignemens de nez, des hémorroïdes, survenir des inflammations au cerveau, à la gorge, à la poitrine, au bas ventre, des hémorrhagies excessives; c'est pourquoi il est nécessaire de questionner les malades sur ce sujet: s'ils sont dans le cas de la suppression, on doit saigner promptement coup sur coup, chercher à faire reparoître les hémorrhoïdes par les sangsues, les frictions, les lavemens de pieds; & les regles, par les moyens conseillés §. 337. C'est rendre un très grand service à ceux qui ont quelques écoulemens sanguins habituels de les avertir, que dans le cas de leurs suppressions, & lorsqu'ils ne se rétablissent pas bientôt, il faut de tems en tems se faire saigner, surtout s'ils se sentent dans l'état de plénitude §. 537.
Jaunisse.
§. 520. Cette maladie existe chez ceux qui ont une couleur jaune plus ou moins foncée répandue sur tout le corps, & principalement remarquable à ce qu'on nomme le blanc de l'œil, un goût d'amertume dans la bouche, du dégoût, des urines jaunes qui teignent les linges qu'on y trempe comme feroit une teinture de saffran, des selles blanchâtres ou noires, des vomissemens bilieux. Lorsque la jaunisse a été précédée de douleurs vives surtout au foie, d'inflammation de cette partie, de passions violentes, de mouvemens convulsifs, de purgatifs, d'émétiques très violens, de poisons, de colique bilieuse, on mettra le malade au régime; on lui donnera la poudre No. 20 quatre fois le jour, & pour boisson beaucoup de petit lait, de lait d'amandes, des ptisanes No. 1, 2. On fera prendre fréquemment le lavement No. 6. On purgera avec le No. 46, de trois en trois jours. Si la jaunisse se trouve dans une personne qui a fait excès ou usé long-tems de boissons très aigres, fort acides, astringentes, de liqueurs fortes & spiritueuses; on fera usage pendant très long tems du petit lait, de lait d'amandes, d'eau de veau; on purgera de tems en tems. Si la jaunisse est venue à la suite des fievres intermittentes, ou d'autres maladies aigües ou chroniques, on donnera fréquemment un purgatif doux comme No. 46, la boisson sera le No. 3. On a parlé de la jaunisse des filles, ou pâles couleurs, §. 332.
§. 521. Souvent la jaunisse est causée par des obstructions dans les vaisseaux de la bile; si cette maladie est ancienne, elle est très difficile à guérir. L'hypocondre se tend, le foie se durcit en tout ou en partie, il y a pesanteur, serrement à la région du foie, souvent une douleur sourde, quelquefois des élancemens surtout après un exercice un peu fort, après le repas, principalement quand on a beaucoup mangé & pris des choses échauffantes, on se couche difficilement sur le côté droit, l'appétit se perd, la bouche devient amere. Voyez les autres symptômes §. 520. Lorsque la maladie est venue par degrés, il faut beaucoup de tems & de remedes pour la détruire. On saignera le malade une fois, ou même deux s'il est fort & sanguin, ou dans le cas §. 537; on le mettra à l'usage du petit lait No. 17, des pilules No. 18, & de la poudre No. 23. On purgera avec le No. 46, on emploiera dans leurs saisons les sucs de plantes, & on les ordonnera, comme il est dit §. 489, 490, avec le petit lait dans des bouillons, en aposemes, en ptisanes. Les eaux de Vichy, de Plombieres, de Balaruc, seront très utiles dans cette maladie.
Inflammations.
§. 522. On a traité dans cet ouvrage de plusieurs maladies inflammatoires les plus fréquentes; il n'est pas moins nécessaire de savoir ce qu'il faut faire dans toutes les autres inflammations; leur progrès est si rapide, & le mal si difficile à réparer, que dès le moment où il y a quelques signes d'inflammations internes, & lorsqu'on ne peut avoir aussitôt le Médecin, on doit, en attendant, agir pour soulager le malade, cela est d'autant plus aisé, qu'on se trompe difficilement sur l'existence de la maladie, & que les secours sont presque toujours près des malades. Toute inflammation interne est accompagnée des symptômes suivans: une fievre aigüe & continuelle, des douleurs plus ou moins vives, suivant la sensibilité de la partie malade, & qui augmentent beaucoup lorsqu'on la touche; beaucoup de chaleur à cette partie; le pouls est dur, fréquent, pour l'ordinaire, petit & inégal, il y a souvent une tumeur, les urines sont très rouges & claires. Le malade se plaint de maux de tête, de frissons, de soif, d'insomnie, d'anxiété, de foiblesse; il sent dans le lieu du mal des battemens qui répondent aux battemens du pouls: il y a des symptômes particuliers qui caractérisent pour l'ordinaire le lieu de l'inflammation; la douleur, la chaleur y sont très grandes, & font que le malade l'indique assez exactement: si la gorge est attaquée, voyez §. 97: si c'est la poitrine, voyez §. 45, 54: si c'est l'estomac ou les intestins, voyez §. 279: si c'est la matrice, voyez §. 348: si ce sont les reins, voyez §. 479. Ce ne sont pas-là les seules inflammations internes que l'on ait occasion de voir, presque toutes les parties du corps peuvent être attaquées de ce mal.
§. 523. Mais quelque soit le lieu de l'inflammation, on doit suivre à peu de chose près la même conduite dans le traitement, & on ne peut pas employer des remedes plus puissans dans toutes les inflammations, que ceux dont nous allons parler. On mettra le malade au régime §. 30; sa boisson sera le No. 1, 2, dont il prendra un verre toutes les demi-heures; on saignera le plutôt qu'il sera possible, coup sur coup, deux, trois fois en douze heures, & plus, si le mal est opiniâtre & ne diminue pas beaucoup. On fera prendre les lavemens No. 5, 6, tous les trois ou quatre heures; on appliquera les topiques No. 19, sur la partie qui est douloureuse & brûlante, & on les renouvellera souvent. Lorsque ces secours ont calmé le mal, on doit tenir encore trois ou quatre jours le malade au régime, crainte de rechûte. S'ils sont insuffisans par la nature du mal, ou employés trop tard, il se forme un abcès dans la partie malade, ou la gangrene s'y met. Voyez §. 60, 80, 283.
Incontinence d'urine. Diabetes.
§. 524. Les urines sortent involontairement & sans se faire sentir: cette incommodité est continuelle ou intermittente. Les enfans, les vieillards, les femmes grosses, celles qui ont été blessées dans l'accouchement, y sont sujettes. Il n'y a presque point de guérison à espérer dans les cas de paralysie ou de relâchement excessif; si la maladie est ancienne, voyez un Médecin; si on a été blessé on doit voir un Chirurgien.
§. 525. Les urines qui sont si abondantes, qu'elles semblent surpasser la boisson qu'on a prise, qui ressemblent à ce que l'on a bu, qui sont crües, claires, un peu huileuses, font une autre maladie appellée diabetes. Il y a envie d'uriner continuelle, foiblesse, chaleur interne, sécheresse, fievre lente.
On doit remédier à ces maux le plutôt qu'il est possible: on donnera des purgatifs doux répétés No. 11, 37, des boissons un peu adstringentes, telles que l'eau où l'on a éteint un fer ou une brique rouge; les vins très hauts en couleur; le cachou, le mastic, à la dose d'un gros dans une pinte d'eau réduite à chopine; la poudre No. 14.
Maladies Epidémiques.
La Suete.
§. 526. Cette maladie se déclare ordinairement la nuit: les malades, en se réveillant, se trouvent dans des sueurs abondantes, une chaleur très grande & un accablement universel, il y a douleur de tête, d'estomac, difficulté de respirer, soif ardente, angoisse, démangeaison, le visage & tout le reste du corps sont rouges & enflammés, les yeux sont étincelans, la langue est blanche, le pouls est fréquent, plein, dur. Vers le troisieme ou quatrieme jour, la fievre augmente, il survient du délire, qui très souvent est suivi d'une éruption miliaire générale plus ou moins nombreuse; quelquefois ce sont des taches rouges si pressées, qu'on croit voir une érésypelle sur tout le corps. Lorsque la maladie est plus avancée, il paroit encore des taches pourprées semblables à des morsures de puces; d'autres fois il s'éleve sur le col, le devant de la poitrine & du bas ventre, de petites pustules transparentes remplies d'une humeur corrosive, qui sont d'un mauvais augure. Cette maladie inflammatoire emporte la plus grande partie de ceux qu'elle attaque dans les campagnes, parcequ'on augmente encore l'inflammation par le régime & les remedes échauffans, tandis qu'on doit employer les remedes & le régime rafraîchissans, sinon la gangrene se met dans les parties internes, ou des vaisseaux s'y rompent, & le malade périt ordinairement du quatrieme au cinquieme jour de sa maladie.]
§. 527. Il faut mettre au régime dès le moment où la maladie s'annonce, faire une saignée ample que l'on répétera de trois en trois heures, jusqu'à ce que la fiévre, la dureté du pouls, l'ardeur, la sueur soient beaucoup diminués; on donnera quatre lavemens par jour. Le malade doit boire toutes les demi heures un verre de petit lait, dans lequel on mettra quatre fois le jour une prise du No. 23. Lorsque les symptômes seront en partie dissipés, on donnera le No. 33 pour évacuer l'estomac, après quoi on donnera tous les jours, pour entretenir le ventre libre, le No. 31; ou on mettra trois grains du No. 33, dans une pinte de petit lait, pour boisson ordinaire, au lieu du petit lait simple; en suivant ce traitement, on guérira presque tous les malades. Lorsque la fiévre sera cessée, on se conduira comme il est dit §. 223. Il n'est pas de maladies dans lesquelles il soit plus nécessaire d'observer ce qui est recommandé §. 33, 34, & il ne peut être que très utile, lorsque la foiblesse n'est pas extrême, de tenir le malade hors du lit, tous les jours une heure ou deux soir & matin.
Ergot.
§. 528. On voit très souvent regner dans les campagnes des fiévres malignes & putrides, occasionnées par la mauvaise nourriture, mais il est un mal encore plus terrible, produit par cette cause c'est la gangrene, qui dans le Berry, le Blaisois, la Sologne est épidémique lorsque l'on y mange du seigle ergoté, ou qui a l'ergot; cette altération du seigle qui n'est pas rare dans les années humides, paroit être l'effet d'une piquure d'insectes, qui forme sur le grain une petite corne ou un ergot; d'autres la regardent comme une maladie du seigle; quoi qu'il en soit, voici les accidens qui arrivent à beaucoup de ceux qui ont mangé pendant quelque tems du seigle ergoté; ils sont stupides ou hebêtés, & dans une espece d'engourdissement, leur ventre devient gonflé & tendu, ils maigrissent, ils sont jaunes & si foibles, qu'ils ne peuvent se soutenir, ils ressentent de très grandes douleurs dans les jambes jusqu'au bout des pieds, & quelquefois dans les bras; la jambe ou le bras s'engourdissent, deviennent violets, la peau est froide & la gangrene paroit aux doigts des pieds ou des mains, elle commence au centre de la partie malade, car si on ouvre à l'endroit où il y a douleur, on y trouve la gangrene qui ne paroit à la peau que lorsque tout le corps en est infecté; si l'on ne remedie promptement, le mal s'étend et tue le malade en peu de tems; souvent les membres se détâchent à l'articulation & tombent sans qu'il arrive d'hémorragie; quand le mal a été à ce point, il est rare que l'on recouvre une santé parfaite. Il s'éleve dans différens endroits du corps de petites pustules ou vessies qui se remplissent d'une eau approchante du pus très clair, le pouls est concentré ou petit, & souvent difficile à sentir, le sang que l'on tire est couenneux.
§. 529. On doit recommander aux gens qui sont dans le cas d'avoir ce mal, de demander du secours aussitôt qu'ils se sentent attaqués. On fait dès-lors une ou deux saignées, elles diminuent les douleurs & les dissipent quelquefois tout-à-fait; on enveloppe la partie malade dans un linge trempé dans de l'eau de vie & du beurre frais, jusqu'à ce que la chaleur revienne, ce qui arrive ordinairement au bout de deux jours, alors on frotte cette partie avec un baume composé de trois livres d'huile d'olives, trois demi-septiers de vins, une de térébenthine, une demi livre de cire jaune, & deux onces de santal rouge; on purge ensuite, & la cure est terminée: s'il y a un commencement de gangrene, les os & les nerfs n'étant point encore endommagés, on l'arrêtera en trois ou quatre jours avec une eau composée de quatre onces d'alun calciné, trois onces de vitriol romain, & trois onces de sel, le tout dans deux pintes d'eau réduites à une; l'escare se fait aussi promptement qu'avec un bistouri, après quoi on panse avec le baume ci-dessus jusqu'à parfaite guérison. Lorsque les doigts des pieds & des mains sont gâtés & morts, l'eau ci-dessus les découvre & les détache dans les jointures, il faut alors les séparer sans attendre que la nature du mal, le fasse, & panser comme ci-dessus; dans tous les états on fera usage avec beaucoup d'avantage du No. 14.
Ophtalmie, inflammation des Yeux.
§. 530. Dans cette maladie, la partie de l'œil, qui est ordinairement blanche, devient rouge, enflammée, brulante, avec douleur & picotement, l'œil grossit, il en sort une liqueur épaisse, ou il est très sec, la lumiere & les corps brillans lui font mal.
Quand le malade est un enfant, on lui lave souvent les yeux avec une infusion de sureau ou de safran, ou l'eau dans laquelle on a mis un peu de vinaigre; on le purge deux ou trois fois; si c'est un adulte, la saignée est souvent nécessaire & presque toujours très utile; quand le mal vient de trop de sang, voyez les signes §. 534; alors la saignée est le remede. Mais si le malade est dans l'état décrit §. 544, la purgation est souvent aussi efficace que la saignée dans le précédent pour dissiper le mal; la boisson sera la ptisane No. 1, 2. Il est à propos de se tenir au régime des convalescens, de ne point s'exposer au grand air, surtout s'il fait froid ou humide, & s'il y a du vent; on prendra garde que pendant la nuit l'air froid ne donne sur l'œil.
Poisons.
§. 531. On appelle poisons tour ce qui étant pris intérieurement ou appliqué à l'extérieur, produit un tel effet sur le corps humain, que l'on craint les maladies ou la mort, ou des impressions qui subsistent toute la vie. Le nombre des poisons est trop grand pour les nommer ici tous, d'ailleurs c'est souvent la dose qui les rend tels. Les symptomes de poison, sont les nausées, les vomissemens, la foiblesse, les défaillances, le vertige, le tremblement, les convulsions, le hoquet, les douleurs vives de l'estomac & des intestins, le gonflement, la tension du bas ventre, les taches noires sur tout le corps, l'engourdissement, la perte de la vue, la léthargie, les sueurs froides, les extrêmités, le pouls serré, dur, fréquent, inégal, quelquefois petit & à peine sensible. Lorsqu'il n'y a que peu de tems que le poison a été avalé, il faut essayer de le faire sortir par en haut, par le vomissement que l'on excitera en chatouillant le gosier, ou en faisant boire de l'eau chaude mêlée avec de l'huile ou du beurre. S'il y a plusieurs heures, le poison peut être descendu dans les intestins: on employera alors les lavemens addoucissans, ensuite les lavemens purgatifs faits avec les décoctions No. 11, 22; on fera boire beaucoup d'eau de veau ou de poulet, de petit lait, de décoction de ris, d'orge, de gruaux, de miel, de graine de lin, des émulsions: lorsque le poison est assoupissant comme l'opium & ses préparations, la cigüe, le solanum, la jusquiame; on mêlera à la boisson un acide, le verjus, le jus de citron, de limon, ou le vinaigre qui est très bon & facile à trouver. Si les symptomes font craindre l'inflammation de quelque partie ou l'apoplexie, il est nécessaire de faire une ou deux saignées. Lorsque le poison pris est du sublimé corrosif on donnera le No. 70.
§. 532. On doit mettre au nombre des personnes empoisonées celles qui ont la maladie appellée colique de peintres ou de plombiers, mais l'expérience a appris qu'il y avoit un traitement à suivre dans cette occasion bien différent de celui que l'on observe dans les autres cas de poison; le plomb, le cuivre, leurs préparations, avalés ou respirés[20] long-tems, l'usage de la bierre, du cidre, des vins très aigres sont les causes les plus communes, de cette colique. Les boissons aigres & celles qui étoient adoucies avec de la litharge ont fait voir cette cruelle maladie dans les campagnes, les premieres l'y ont rendu quelquefois épidémique: quoiqu'elle ne doive pas être comptée au nombre de celles qui sont fréquentes, le mal est si pressant & si funeste quand on n'y remedie pas de bonne-heure, & les moyens de secourir le malade si différens de ce que l'on peut imaginer, que l'on a cru devoir faire connoître cette maladie & les moyens de la guérir; [on sent une douleur gravative à la région de l'estomac, cette douleur devient ensuite fort vive & poignante, occupe toute l'étendue du bas ventre, & se répand dans la poitrine, les épaules, les lombes et l'épine du dos, il survient des envies de vomir, des vomissemens même, le ventre est souvent constipé plutôt retiré vers l'épine du dos & enfoncé que prominent ou saillant en devant, cette colique a cela de particulier, qu'une paralysie saisit par degrés les extrêmités supérieures, & quelquefois les inférieures à proportion que les douleurs diminuent, il survient souvent des convulsions & des accès d'épilepsie, la plûpart des malades n'ont point de fiévre, ou s'ils en ont, elle ressemble plutôt à une fievre lente qu'à une fiévre aigüe].
[20] Un Jardinier ayant employé de vieux bois d'un treillage peint en verd à chauffer le four où l'on cuisoit le pain, à faire le feu pour cuire le potage & autres nourritures, & à bruler dans un poèle dont on levoit le couvercle pour mettre le bois, & qui échauffoit une chambre basse habitée tout le jour par les personnes de la maison. La ceruse & le verd de gris qui furent reçus dans l'estomac avec les nourritures & dans la poitrine par la respiration produisirent plusieurs coliques de cette nature.
§. 533. On donnera 1o. un lavement fait avec une décoction de quatre gros de sené & trois onces de vin émétique trouble. 2o. Sept ou huit heures après on fera prendre un autre lavement de parties égales d'huile de noix & de vin. 3o. Le lendemain on donnera le vomitif No. 34. 4o. Le soir après l'opération du vomitif on fait prendre un calmant composé d'un demi gros & même un gros de thériaque & un grain de laudanum. 5o. Le jour suivant on répétera le lavement & on purgera le lendemain, avec une potion composée de trois onces de sené infusés pendant douze heures dans un verre d'eau bouillante, & de deux onces de syrop de nerprun. 6o. On répétera le soir le calmant. 7o. On donne pour boisson la ptisane des bois No. 71. 8o. S'il y a des douleurs, si le malade est menacé de paralysie, par l'engourdissement ou difficulté dans le mouvement, on donnera des cordiaux comme l'élixir de propriété, celui de Garus, la thériaque No. 41, la confection hiacinthe, si ces remedes n'operent point la guérison en huit jours au plus tard, on recommencera le même traitement.
Vomissement.
§. 534. Tout le monde connoît le vomissement qui est un mouvement convulsif de l'estomac, par lequel ce qui s'y trouve en est chassé par la bouche; le plus souvent il est salutaire, parcequ'il est produit par des amas d'humeurs qui causeroient des maladies si elles restoient dans le corps, c'est pourquoi lorsqu'il y a vomissement, ou seulement nausées, on doit le faciliter en faisant boire beaucoup d'eau tiede. Lorsqu'après le vomissement il reste encore des nausées de l'amertume dans la bouche, la langue est chargée, voyez ce qu'il faut faire §. 545.