Avis au peuple sur sa santé: ou traité des maladies les plus fréquentes
QUESTIONS
Auxquelles il est absolument nécessaire de
savoir répondre quand on va consulter
un Médecin.
§. 574. Il faut beaucoup d'attention & d'habitude pour bien juger de l'état d'un malade qu'on ne voit pas, lors même qu'on est instruit aussi exactement qu'on peut l'être de loin. Mais cette difficulté est fort augmentée, & même changée en impossibilité, quand l'information n'est pas exacte. Il m'arrive souvent qu'après avoir questionné des paysans, qui viennent du dehors, je n'ose rien leur ordonner, parcequ'ils n'ont pas pû m'instruire assez pour me mettre à même de juger de la maladie. C'est pour prévoir cet inconvénient, que je joins ici une liste des questions auxquelles il faut pouvoir répondre.
Questions communes.
Quel âge a le malade?
Jouissoit-il d'une bonne santé?
Quel étoit son genre de vie?
Depuis quand est-il malade?
Comment a commencé son mal?
A-t-il de la fiévre?
Son pouls est-il dur ou mou?
Est-ce qu'il a encore des forces, ou est-il foible?
Se tient-il tout le jour au lit, ou se leve-t-il?
Son état est-il le même à toutes les heures du jour?
Est-il inquiet ou tranquille?
A-t-il chaud ou froid?
A-t-il des douleurs de tête, de gorge, de poitrine, d'estomac, de ventre, de reins, de membres?
A-t-il la langue séche, de l'altération, mauvais goût à la bouche, des envies de vomir, du dégoût ou de l'appétit?
Va-t-il du ventre souvent, ou rarement?
Comment sont ses selles?
Urine-t-il beaucoup? Comment sont ses urines?
Est-ce qu'il sue?
Est-ce qu'il crache?
Dort-il?
Respire-t-il aisément?
Quel régime suit-il?
Quels remedes a-t-il employés?
Quel effet ont-ils produit?
Est-ce qu'il n'a jamais eu la même maladie?
Etoit-il sujet à quelque hémorrhagie?
A-t-il eu quelque maladie de peau?
§. 575. Il se trouve dans les maladies des femmes & des enfans, des circonstances particulieres; ainsi quand on consulte pour eux, il faut pouvoir répondre non seulement aux questions ci-dessus communes à tous les malades; mais aussi à celles qui leur sont propres.
Questions relatives aux femmes.
A-t-elle ses regles, & sont-elles régulieres?
Est-elle enceinte? Depuis quand?
Est-elle en couche?
La couche a-t-elle été heureuse?
La malade perd-elle suffisamment?
Est-ce qu'elle a du lait?
Nourrit-elle elle-même?
N'est-elle point sujette aux pertes blanches?
Questions relatives aux enfans.
Quel est très exactement son âge?
Combien a-t-il de dents?
Souffre-t-il lorsqu'elles percent?
N'est-il point noué?
Est-ce qu'il a eu la petite vérole?
Rend-il des vers?
Son ventre est-il gros?
Son sommeil est-il tranquille?
Outre ces questions générales pour toutes les maladies, il faut pouvoir répondre à celles qui ont un rapport plus précis avec le mal actuel.
Dans l'esquinancie, par exemple, il faut être instruit exactement de l'état de la gorge. Dans les maux de poitrine, il faut pouvoir rendre raison des douleurs, de la toux, de l'oppression, des crachats. Je n'entrerai pas dans un plus long détail; il ne faut que du bon sens pour saisir tout ce plan; & quoique les questions paroissent nombreuses, il sera toujours très aisé d'écrire les réponses dans aussi peu d'espace que les questions en occupent. Il seroit à souhaiter que les personnes de tout ordre, qui écrivent pour consulter, voulussent bien, dans leurs lettres, observer un plan à peu près semblable; elles se procureroient souvent par là des réponses plus satisfaisantes, & s'épargneroient la peine d'écrire de nouvelles lettres, pour servir d'éclaircissement aux premieres.
Le succès des remedes dépend de l'exacte connoissance de la maladie; & cette connoissance, de l'information qu'on donne au Médecin.