Étude sur la Franc-Maçonnerie
CONCLUSION
I
CONDAMNATION DE LA FRANC-MAÇONNERIE PAR L’ÉGLISE
Peut-on s’étonner après tout cela que les Papes et les Évêques aient condamné la Franc-Maçonnerie ? Et n’est-ce pas un grand devoir qu’ils ont rempli, un grand service qu’ils ont rendu à l’humanité ?
Depuis deux siècles déjà que la Franc-Maçonnerie s’est, je ne dis pas fondée, mais développée en Europe, les Papes n’ont pas cessé d’y être attentifs ; et, au XVIIIe siècle, deux Souverains-Pontifes, Clément XII et le savant Benoît XIV ; au XIXe, Pie VII, Léon XII, Grégoire XVI, et enfin Pie IX, ont prononcé contre cette association les condamnations les plus motivées et les plus solennelles.
Qu’il me suffise de citer ici quelques passages de la célèbre Bulle, Quo graviora, de Léon XII, et d’une récente allocution de Pie IX.
Le Pape Léon XII, dans cette Bulle, rappelle d’abord les condamnations portées contre la Franc-Maçonnerie, depuis Clément XII, déclare cette institution ouvertement ennemie de l’Église catholique, rappelle enfin la Bulle de Pie VII, son prédécesseur immédiat ; puis, il renouvelle lui-même toutes ces condamnations :
« Gardez-vous des séductions et des discours flatteurs qu’on emploie pour vous faire entrer dans ces sociétés. Soyez convaincus que personne ne peut y entrer sans se rendre coupable d’un péché très-grave. »
Léon XII ajoutait, à l’adresse de ceux qui s’étaient fait illusion, les paroles suivantes :
« Quoique l’on n’ait pas coutume de dévoiler ce qu’il y a là de plus blâmable à ceux qui ne sont pas parvenus aux grades éminents, il est cependant manifeste que la force de ces sociétés, si dangereuses à la Religion, s’accroît du nombre de ceux qui en font partie. »
Ensuite, avec les accents de la plus vive charité, il conjurait ceux qui s’étaient laissé séduire, de s’éloigner au plus tôt des loges, et il défendait, sous les peines portées par ses prédécesseurs, de se faire initier à la Franc-Maçonnerie.
Enfin Pie IX, pilote vigilant du vaisseau de l’Église, malgré les tempêtes qui l’assaillent lui-même, a parlé à son tour, et rappelant, dans son allocution du 25 septembre 1865, les avertissements donnés à la Franc-Maçonnerie par ses prédécesseurs, il poursuivait ainsi : « Malheureusement, ces avertissements n’ont pas eu le succès espéré, et Nous avons regardé comme un devoir de condamner de nouveau cette société ; attendu que, par ignorance peut-être, pourrait surgir l’opinion fausse qu’elle est inoffensive, qu’elle n’a de but que la bienfaisance, et ne saurait, par conséquent, être un péril pour l’Église de Dieu. »
C’est là, en effet, dans cette illusion, que se trouve le piége et l’appât de la Maçonnerie. Le Saint Père après l’avoir signalé, ajoute :
« Nous condamnons cette société maçonnique — et les autres sociétés du même genre qui, tout en étant de forme différente, tendent au même but — sous les mêmes peines que celles spécifiées dans les constitutions de nos prédécesseurs ; et cela regarde tous les chrétiens, de toute condition, de tout rang, de toute dignité, et par toute la terre. »
C’est pourquoi tous les évêques de Belgique, dans une circulaire collective sur la Franc-Maçonnerie, faisaient la déclaration suivante :
« Il est rigoureusement défendu d’y prendre part, et ceux qui le font sont indignes de recevoir l’absolution, aussi longtemps qu’ils n’y ont pas sincèrement renoncé[147]. »
[147] Circulaire de l’Épiscopat belge, décembre 1837.
C’est pourquoi encore les Évêques d’Irlande, réunis à Dublin, en avril 1861, dans une lettre pastorale adressée au clergé et aux fidèles de leurs diocèses, signalaient, entre autres périls contemporains, la franc-maçonnerie, et disaient : « C’est pour nous un devoir sacré de vous éloigner de ces sociétés funestes, et nommément de celle des francs-maçons. »
C’est pourquoi enfin, car ces citations suffisent, les Évêques de la libre Amérique du Nord, réunis en Concile à Baltimore, signalèrent aussi et condamnèrent, dans une lettre pastorale adressée à leurs diocésains, la société maçonnique.
En France, combien de fois l’Épiscopat n’a-t-il pas élevé la voix pour redire les condamnations pontificales et dévoiler l’incompatibilité de la Maçonnerie, avec le Christianisme !
Ce que les Évêques pensent de la Franc-Maçonnerie en France, en Belgique, en Angleterre, en Amérique, ils le pensent également en Allemagne. J’ai sous les yeux, en ce moment, l’écrit publié par Mgr de Ketteler. La conclusion de cette calme et savante discussion est celle-ci :
« Voilà donc d’un côté l’Église catholique, et de l’autre la moderne Franc-Maçonnerie. Ici, l’œuvre de Dieu, l’œuvre du Christ, et de tous ceux qui croient en Jésus-Christ ; là, l’œuvre des hommes qui renient Dieu et son Christ, ou du moins les abandonnent. Un catholique qui devient franc-maçon déserte le temple du Dieu vivant pour travailler au temple d’une idole. »
Au reste, il y a des francs-maçons eux-mêmes qui en conviennent ; ainsi le Monde-Maçonnique cite ces paroles de Mgr l’Évêque d’Autun : « Si l’on veut rester franchement chrétien, on ne saurait être en même temps franc-maçon. » Puis le journal franc-maçon ajoute nettement et avec sincérité : « Le prélat A RAISON de parler ainsi. C’est son droit, c’est son devoir[148]. »
[148] Le Monde-Maçonnique, mai 1866, p. 2.