Le chalet dans la montagne : $b voyages vrais et imaginaires
V
La nuit suivante, nous quittâmes Barcelone par mer.
Raymond avait à la fin trouvé quelque apaisement chez la dame bien élevée que nous avions visitée l’autre soir.
Le bateau se mit en mouvement à quatre heures ; l’aube blanchissait le ciel. Je m’étais réveillé en sentant que nous n’étions plus immobiles, dressé sur ma couchette je regardais par le hublot les quais défiler lentement le long de l’eau livide et morte. Le port entouré de ses portiques passait devant moi ; les lourds navires, amarrés à côté les uns des autres, se succédaient. La colonne de Christophe-Colomb parut, triomphale, se détachant sur le ciel clair. Puis ce fut Montjuich, dressant sa masse énorme au-dessus de la ville. Enfin, ayant longé les jetées, nous passâmes le phare et nous entrâmes dans la mer libre… Alors, ne voyant plus par mon hublot qu’une plaine glauque et mouvante, je me rallongeai sur ma couchette.
Août-septembre 1903.