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Le Témoin: 1914-1916
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XXVII
— « La mort, dit Le vieux sage, est un feu dans la nuit ;
C’est dans l’obscurité, qu’une étoile éblouit ;
Plus s’épaissit l’obscur, mieux on voit toute flamme ;
Nuit pour la chair, la mort est lumière pour l’âme.
A peine est-il tombé, que le reître germain,
Qui marchait contre vous, torche ou fusil en main,
Mort, entre frissonnant dans la vérité même,
O France ! et c’est alors toi qu’il sert, toi qu’il aime !
Mais toi, France au grand cœur, ce qui fait ton cœur fort,
C’est la fidélité de tes fils dans la mort.
Le lourd crâne carré, que surmonte une pique,
Subit aveuglément son maître satanique,
Mais, cadavre, il le juge ; il maudit, plein d’horreur,
L’Antéchrist reconnu dans ce rouge empereur ;
Et Guillaume le Fauve à tout moment tressaille,
Quand il passe aujourd’hui sur un champ de bataille,
Car il y voit tous les cadavres allemands,
Le suivre du regard avec des yeux tournants.
Et ce regard, où désespère l’âme humaine,
Pour lui n’a plus d’humain qu’une implacable haine.
« Le soldat français, lui, mort pour la vérité,
Ne donne à son bourreau qu’un regard contristé…
C’est alors que, sentant l’horreur de sa tuerie,
Le roi rouge, croyant mentir à Dieu, s’écrie :
— « Je ne l’ai pas voulue ! »
« A ce mot, l’œil des morts
Jette des feux qui vont, comme autant de remords,
Fouiller cette âme obscure, éperdue, exécrée,
Où s’allume un enfer d’épouvante sacrée. »
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