Œuvres de P. Corneille, Tome 06
PERTHARITE
ROI DES LOMBARDS
TRAGÉDIE
1652
NOTICE.
Par suite d'une erreur bien surprenante, Voltaire donne cette pièce comme jouée en 1659 [1], quoique l'Achevé d'imprimer de l'édition originale soit du 30 avril 1653 et le privilége du 24 décembre 1651 [2], quoique Voltaire lui-même, au titre de l'avis Au lecteur, ajoute ces mots: «imprimé en 1653,» et que les premières lignes de cet avis nous apprennent que la représentation a précédé l'impression. Les frères Parfait, qui analysent huit ouvrages représentés en cette même année 1653, placent Pertharite à l'avant-dernier rang. La date de l'Achevé d'imprimer et l'avis Au lecteur suffisaient encore à prouver que ce classement était défectueux, car ces deux pièces établissaient que Pertharite ne pouvait appartenir qu'au premier quart de l'année. Quoi qu'il en soit, cette date de 1653, adoptée par tous les historiens de notre théâtre [3], paraissait vraisemblable, et nous avions même pensé qu'elle se trouvait confirmée par un témoignage de Chapelain, qu'on ne connaît malheureusement que d'une manière incomplète et détournée [4]: mais toutes les hypothèses disparaissent devant un passage formel de Tallemant des Réaux, dont on n'avait pas encore tiré parti pour l'histoire des ouvrages de Corneille, et qui recule de plus d'un an la date de la première représentation de Pertharite.
«Au carnaval de 1652, dit Tallemant [5], Mme de Montglas fit une plaisante extravagance chez la présidente de Pommereuil. On y devoit jouer Pertharite, roi des Lombards, pièce de Corneille, qui n'a pas réussi. Mlle de Rambouillet dit à Segrais, garçon d'esprit qui est à cette heure à Mademoiselle, qu'elle n'avoit point vu l'Amour à la mode, et qu'elle l'aimeroit bien mieux: «Dites-le à la comtesse de Fiesque.» La comtesse le dit à Hippolyte: c'est le fils du président de Pommereuil du premier lit, un benêt qu'on appeloit ainsi parce qu'on lui faisoit la guerre qu'il étoit amoureux de sa belle-mère. Hippolyte, qui étoit épris de la comtesse, alla dire aux comédiens que, quoi qu'il en coûtât, il falloit absolument jouer l'Amour à la mode [6], et les envoya changer d'habits.» L'Historiette, qui ne contient plus rien d'intéressant pour nous, se termine par le récit des réclamations et de la brusque retraite de Mme de Montglas.
Malgré le peu de succès de Pertharite, il y avait, on le voit, des personnes curieuses d'assister à des représentations particulières de cet ouvrage, qui avait si vite disparu de la scène de l'hôtel de Bourgogne [7]: il ne s'y était montré qu'une fois d'après Voltaire [8], que deux suivant la plus commune opinion.
Cette pièce forme un volume in-12 de 6 feuillets et 71 pages, qui a pour titre: PERTHARITE, DES LOMBARDS, tragédie. A Rouen, chez Laurens Maurry, près le Palais. Auec priuilege du Roy. M.DC.LIII. Et se vend à Paris, chez Guillaume de Luyne, au Palais.
Dans l'avis Au lecteur, Corneille se montre tout prêt à renoncer au théâtre; nous verrons dans la Notice d'Œdipe quelles furent les circonstances qui changèrent ses dispositions.