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Essais de Montaigne (self-édition) - Volume IV

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108,

1, Escriture.—«J’ai reconnu que rien ne vaut mieux que de se réjouir et de se donner du bien-être pendant la vie.»  Ecclésiaste, III, 12.

10, Mesme.—«La vertu est la disposition ferme et continue de l’âme à faire le bien et à fuir le mal; mais de même que le soleil a des taches, la vertu a des défaillances, ce qui justifie ce mot prêté à Brutus, se tuant de désespoir: O vertu, tu n’es qu’un mot!... Vertu et vice sont deux mots dont ne se sert jamais l’Écriture sainte (l’assertion n’est pas tout à fait exacte, car le ch. XXVI de l’Ecclésiastique débute ainsi: «Heureux est le mari d’une femme vertueuse»); elle dit partout et toujours: les bons et les méchants. C’est que c’est là la vraie division. Combien sont bons, malgré leurs fautes, et quelquefois à cause de leurs fautes, et trouveront là-haut le père souriant. Combien sont méchants et mauvais, malgré leur vertu, et quelquefois à cause de leur vertu, et trouveront là-haut le juge sévère.» Victor Hugo.

11, Volupté.—«Le plaisir est la vertu sous un nom plus gai.»  Young.

33, Fruict.—C.-à-d. qui calcule si les avantages de la vertu peuvent dédommager des peines qu’il en coûte pour devenir vertueux; autrement dit, qui met en balance, d’un côté ce qu’elle coûte à acquérir, de l’autre les avantages qu’elle procure, n’est pas de ses adeptes.

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14, Regles.—Var. des éditions antérieures: sectes des Philosophes, au lieu de: «regles».

22, Santé.—«Ignorant toutes les incommodités de l’humanité, il mourut dans des conditions telles qu’on ne saurait en souhaiter de meilleures», dit Valère Maxime, VIII, 13, en parlant de Xénophyle de Chalcis, philosophe pythagoricien, que Montaigne qualifie musicien.

24, Broche.—Couper broche, c’est mettre fin, interrompre. V. N. III, 444: Broche.

33, Tantale.—Tantale, roi de Lydie, ayant reçu la visite des dieux, leur fit servir, pour éprouver leur divinité, les membres de son propre fils. Pour ce forfait, il fut précipité dans le Tartare et condamné à une soif et à une faim inextinguibles; on le représente au milieu d’un fleuve dont l’eau s’abaisse dès qu’il en approche les lèvres, et sous des arbres dont les branches s’élèvent dès qu’il veut en détacher les fruits.—Cicéron et Montaigne, avec lui, le confondent ici avec Sisyphe, roi de Corinthe, qui, en punition de ses brigandages et de ses cruautés, fut condamné, après sa mort, à rouler dans les Enfers, au sommet d’une montagne, un rocher qui redescendait sans cesse au bas des pentes, dès qu’il atteignait le faîte.  Mythologie.

35, Commis.—Ceci se pratique encore fréquemment en France; l’acte de condamnation porte toujours où se fera l’exécution.

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3, Mort.—«La mort est bien le bout, non pourtant le but de la vie,» dit ailleurs Montaigne avec beaucoup plus de raison. V. N. III, 574: But.

4, Comme.—Comment. Corneille l’emploie parfois aussi dans ce sens, il dit dans Horace:

J’ai su par son rapport...
Comme de vos deux fils vous portez le trépas.

8, Queuë.—Brider l’âne par la queue, c’est s’arranger mal, mal prendre ses mesures, un âne ne se bridant pas de la sorte.

12, Seignent.—Font le signe de la croix.

19, Vescu.—Plutarque, Vie de Cicéron, 12.

20, Consolent.—Ils disaient de même et pour le même motif: semianimis (à demi vivant), tandis que nous disons: «à demi-mort».

21, Feu.—Défunt, se dit de quelqu’un récemment décédé; semble venir du latin fuit (il a été); cette étymologie assez naturelle est cependant contestée.

21, Maistre Iehan.—Appellation qui se donnait aux pédants, aux savants et aux docteurs. V. N. II, 478: Maistre-Iean.

22, L’argent.—Proverbe; quand on a du temps devant soi, on a possibilité de se procurer de quoi se tirer d’embarras. Les Anglais disent avec un sens analogue: Time is money (le temps, c’est de l’argent).

25, Ianuier.—En France, l’année a eu différents points de départ: le 1er mars, sous les rois de la première race; le jour de Noël, sous ceux de la deuxième; le jour de Pâques, sous ceux de la troisième jusqu’à Charles IX qui, par une ordonnance rendue en 1563, en fixa le commencement au 1er janvier. Par suite, le 1er janvier 1563 devint le premier jour de l’an 1564; le parlement ne se conforma à cette ordonnance que trois ans après, en 1567.—Ajoutons qu’en 1793, le début de l’année fut fixé au 22 septembre, en même temps que cette même année était dénommée an 2 de la République; cette manière de compter prit fin le 1er janvier 1806.

26, Autant.—Montaigne ayant trente-neuf ans à ce moment, devait à son compte aller jusqu’à soixante-dix-huit; c’est beaucoup. D’après les tables de mortalité établies par Déparcieux en 1746, les premières, croyons-nous, qui aient été faites, il pouvait espérer arriver à l’âge de soixante à soixante-cinq ans; de fait cette probabilité s’est réalisée, puisqu’il est mort en 1592, dans sa soixantième année. V. N. I, 596: Esperable.

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1, Terme.—Les éditions antérieures à 1588 ajoutent: «et ce fameux Mahumet aussi.» Ce membre de phrase a disparu, Montaigne s’étant vraisemblablement aperçu de l’inexactitude qu’il commettait, Mahomet n’ayant commencé à prêcher qu’à quarante ans et étant mort à soixante-deux.

6, Lyon.—En 1305. Le pape Clément V (Bertrand de Got), que Montaigne appelle son voisin parce qu’il était gascon et qu’il avait été archevêque de Bordeaux, venait d’être couronné à Lyon. Après la cérémonie, retournant à son logis, il traversait la ville à cheval, la tiare sur la tête. Le roi (Philippe le Bel) et successivement ses deux frères avaient tenu la bride de sa monture, et cet honneur venait d’échoir au duc Jean II de Bretagne, quand passant près d’un mur surchargé de spectateurs, le mur s’écroula, le pape fut renversé de cheval, sa tiare tomba; il y eut douze morts, dont le duc de Bretagne, et un grand nombre de blessés, dont le duc de Lorraine qui eut un bras et une cuisse cassés.

7, Iouant.—Henri II, blessé à mort, en 1559, dans un tournoi, par le comte de Montgommery, capitaine de ses gardes.

8, Pourceau.—En 1131. Philippe, fils aîné de Louis le Gros, âgé de seize ans, qui avait été couronné du vivant de son père, comme il était de règle à cette époque, pour mieux assurer l’hérédité. Se promenant à cheval, un pourceau vint à se jeter dans les jambes de l’animal qui s’abattit, brisant la tête de son cavalier contre une borne et l’étouffant de son poids.

9, L’airte.—Sur ses gardes. On écrit aujourd’hui «alerte»; les Italiens disent encore «fare all’erta», être alerte, être au guet, prendre garde à soi. Le Clerc.

10, L’air.—En 406. D’après la tradition, il avait été prédit à Eschyle qu’il périrait en plein air.  Valère Maxime, IX, 12, 2.

11, Raisin.—Anacréon suçant le jus d’un grain de raisin, un pépin s’arrêta dans sa gorge et il en mourut.  Valère Maxime, IX, 12, 8.

13, Huis.—Pline, Hist. nat., VII, 33; les deux exemples qui suivent se trouvent aussi en cet endroit.

14, Conseil.—Ce fut un accident analogue qui causa la mort du roi de France Charles VIII; se rendant à une partie de jeu de paume, il se heurta le front contre le haut d’une porte basse, et quelques heures après n’était plus (1498).

16, Mantoue.—Guy de Gonzague, père de ce Ludovic, avait été condamné par ses concitoyens à perdre la tête sur l’échafaud, pour cause d’adultère (1382).

17, Platonicien.—Tertullien (Apologétique, 46) rapporte le fait, mais seulement comme un on-dit. Diogène Laërce conte au contraire que Speusippus, perclus depuis déjà quelques années par suite de paralysie, et accablé de douleurs, se donna la mort dans un âge avancé, version que Montaigne reproduit, I, 632.

18, Papes.—Le pape Jean XII fut, dit-on, assassiné dans les bras de sa maîtresse (964).

21, Siens.—Cet exemple et le précédent sont tirés de Pline, VII, 33.

22, Frere.—Montaigne eut quatre frères et trois sœurs.—Ses frères étaient: Thomas, seigneur de Beauregard, qui épousa Mademoiselle Carle, belle-fille de la Boétie, qui était mort depuis quelques années quand le mariage eut lieu; Mademoiselle Carle possédait la propriété d’Arsac en Médoc, dont son mari prit le nom. Pierre, seigneur de la Brousse, propriété de la famille, non loin de Montaigne. Arnaud, dit le capitaine Saint-Martin, dont il est question ici. Bertrand, seigneur de Mattecoulom, petite propriété près de Bordeaux.—Ses sœurs: Jeanne, mariée à Richard de Lestonna, conseiller au parlement de Bordeaux. Léonor, mariée à Thiébaud de Camain, également conseiller. Marie, mariée à Bernard de Cazalis. V. N. III, 32: Mere.

24, Esteuf.—Balle dont il était et est encore fait usage pour jouer à la paume.

27, Causa.—Les cas de mort subite sont journaliers et se produisent en toutes circonstances; Rabelais en cite plusieurs, en outre de quelques-unes des précédentes: Spurius Saufeius mourut, dit-il, en humant un œuf mollet en sortant du bain; Fabius, préteur romain, fut suffoqué par un poil de chèvre en buvant une tasse de lait; Philomènes, par un fou rire que lui causa la vue d’un âne mangeant des figues nouvelles qu’on avait apportées pour lui-même; Zeuxis, le peintre, en se pâmant de rire, en considérant le minois d’une vieille dont il venait de faire le portrait, et autres.—De nos jours en 1904, la mère d’un cardinal mourait à la nouvelle que son fils venait d’être promu patriarche de Venise; une servante du Limousin, en apprenant qu’elle venait de gagner 25.000 fr. à une loterie; en Champagne, un candidat à la députation, à l’annonce de son élection.—La plupart du temps cependant, les circonstances extérieures dans lesquelles les morts subites se produisent et qui font qu’on les remarque, n’y sont pour rien.

34, Veau.—Niais; cette qualification de veau était souvent appliquée aux gens par trop simples d’esprit.

44, Dessoude.—Soudainement, du latin de subito, à l’imprévu, comme portent les éditions antérieures.

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17, Accoustumons-le.—«Il n’est point d’objet si effrayant qu’on ne puisse envisager sans crainte, quand on s’est familiarisé avec lui; plus on s’occupe de la mort, moins on la redoute.» De Ségur.—«C’est un accident si banal, si inévitable, si peu à redouter pour qui a la conscience tranquille, que ce n’est vraiment pas la peine d’y penser, si on a mis ordre à ses affaires et si rien de particulier ne vous porte à désirer une prolongation d’existence.» G. M.

27, Egyptiens.—Hérodote, II, 78.

29, Seche.—Un squelette.

32, Attende.

«C’est un arrêt du ciel, il faut que l’homme meure.
Tel est son partage et son sort.
Rien n’est plus certain que la mort,
Et rien plus incertain que cette dernière heure.» Abbé Testu.

36, Mal.—«Le jour de la mort vaut mieux que le jour de la naissance; mieux vaut la fin d’une chose que son commencement.»  Ecclésiaste, VII, 1 et 8.

40, Mesme.—Persée, qui n’eut pas le courage, en se tuant, de suivre le conseil qui lui était implicitement donné et qu’on fit mourir dans sa prison, de faim, disent les uns, en le privant de sommeil, disent les autres, après avoir servi d’ornement au triomphe de son vainqueur. Plutarque, Paul Émile, 17; Cicéron, Tusc., V, 40.

118,

3, Ageret.—Mademoiselle de Gournay a donné de ce vers de Catulle la traduction suivante: «Quand mon âge fleuri roulait son gai printemps», qui mérite d’être conservée pour sa grâce et la fidélité originale de la traduction. Le Clerc.

11, Non plus.—Pas davantage. On trouve dans l’Horace de Corneille cette expression avec la même signification:

«...... Quel malheur si l’amour de sa femme
Ne peut non plus sur lui, que le mien sur ton âme.»

26, Pres.—Le 6e paragraphe du ch. XXIII du liv. I de l’Imitation de Jésus-Christ résume, ainsi que l’a fait Montaigne, ici et ailleurs, les divers genres de mort qui nous menacent continuellement; Corneille le traduit ainsi:

«Combien de fois entends-tu dire:
Celui-ci vient d’être égorgé;
Celui-là d’être submergé;
Cet autre, dans les fers, expire.
L’un, écrasé subitement,
Dans les débris d’un bâtiment
A fini ses jours et ses vices;
L’autre au milieu d’un bon repas,
L’autre parmi d’autres délices
Se sont vus surpris du trépas.»

37, Mort.

«Que l’homme connaît peu la mort qu’il appréhende,
Quand il dit qu’elle le surprend!
Elle naît avec lui; sans cesse lui demande
Un tribut dont en vain son orgueil se défend;
Il commence à mourir, longtemps avant qu’il meure,
Et périt en détail imperceptiblement;
Le nom de mort qu’on donne à notre heure dernière,
N’en est que l’accomplissement.» Mme Deshoulières.
120,

5, Estre.—Dans sa fable «La mort et le mourant», La Fontaine a développé cette même pensée de Montaigne, si bien résumée par le dernier vers de cette fable: «Le plus semblable aux morts, meurt le plus à regret.» Cette fable se retrouve du reste dans Abstemius, fabuliste italien du XVe siècle.

10, Mortes morts.—Les morts où tout meurt à la fois chez l’homme, par opposition à celles où il s’éteint graduellement, perdant tout ou partie de ses facultés avant de perdre la vie.

13, Manent.—Le texte de Virgile porte Pendent.

19, Agir.—Les éditions antérieures ajoutent: Et ie suis d’aduis que non seulement vn Empereur, comme disoit Vespasien, mais que tout gallant homme doit mourir debout.

32, Lycurgus.—Plutarque, Vie de Lycurgue, 20.

35, Condition.—Actuellement, par mesure d’hygiène, les cimetières sont établis loin des groupes d’habitations; le souvenir et le culte des morts y ont perdu. Être inhumé au pied de son clocher, au centre même du lieu où l’on avait vécu, de ses affections, avait autrement de poésie que d’être, comme aujourd’hui, relégué au loin et à l’écart.

42, Tel.—Cette exhibition, au dire même d’Hérodote qui la rapporte, n’avait nullement pour objet, comme Montaigne le donne à entendre, une pensée morale, mais, au contraire, celui de s’exciter à boire et à mener joyeuse vie, bannissant peines et soucis, se rappelant le peu de temps durant lequel il est donné à l’homme d’en jouir.

122,

4, Diuerses.—Ce registre, à la vérité non commenté, et c’est là le point essentiel de l’idée de Montaigne, existait de son temps, établi par de Ravisi (Bâle, 1552); d’autres depuis, toujours sans commentaires, en ont pareillement donné des relevés. Parmi les auteurs mêmes qu’il avait dans sa bibliothèque, Pline, Valère Maxime, Boccace y ont consacré des chapitres entiers de leurs ouvrages.

7, Fin.—Cicéron, De Off., II, 5. Dicearchus, dans son livre, énumère tout ce qui concourt à la destruction de l’homme: épidémies, cataclysmes de toutes sortes, et termine en montrant que les guerres, les séditions, en un mot la fureur de l’homme contre ses semblables, en fait périr plus que toutes les autres calamités réunies.

23, César.—De Bello Gallico, VII, 81.

30, Mort.—Montaigne mourut, comme il en manifeste l’espoir, avec courage et résignation. Il s’éteignit lentement le 13 septembre 1592. «Depuis trois jours déjà, il ne pouvait plus parler, mais était plein d’entendement. Sentant sa fin approcher, il fit mander à quelques gentilshommes ses voisins de venir, pour qu’il prit congé d’eux; et, alors qu’on était réuni et tandis qu’on disait la messe dans sa chambre, à l’élévation, par un effort suprême il joignit les mains, tenta de se dresser sur son séant et rendit l’âme.»  Pasquier.

33, Manet!—Citation tirée de Pseudo-Gallus. Gallus, contemporain d’Auguste, prit part aux grandes affaires de l’État, et composa des élégies qui ne nous sont pas parvenues. Il en a été, nonobstant, publié sous son nom, en 1501; elles semblent lui avoir été faussement attribuées et être d’un poète inconnu du VIe siècle que certains dénomment Maximianus et que l’on a pris le parti de désigner sous l’appellation de Pseudo-Gallus.

37, Vie.—Sénèque, Epist. 76.

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5, Vieillesse.—Curius Dentatus, rapporte Sénèque, disait «préférer être mort que vivre mort».

21, Figue.—«Faire la figue», expression italienne. C’est se moquer de quelqu’un en lui faisant un geste indécent avec les doigts, lui montrant le bout du pouce entre l’index et le médius. En 1162, Frédéric Barberousse, empereur d’Allemagne, pour se venger des Milanais, qui avaient promené ignominieusement sa femme sur une mule, les ayant battus, fit placer une figue dans les parties génitales de la mule et chacun de ses prisonniers dut, à tour de rôle, sous peine de mort, la retirer avec les dents, d’où ce geste et cette expression, rappelant cette aventure aux Milanais et tenu par eux comme une injure.

34, Mort.—Diogène Laerce, II, 15; Cicéron, Tusc., I, 40.—Socrate ne fut pas condamné à mort par les trente tyrans, mais après leur expulsion, par les Athéniens eux-mêmes (400), ou mieux par le conseil des Héliastes. Ce conseil, ainsi nommé parce qu’il siégeait en plein air, et dont le nombre des membres variait de 200 à 600, était composé de sénateurs. Pour Socrate, 556 membres étaient présents; il fut déclaré coupable à la majorité de 3 voix, et condamné à mort à celle de 33; il est vraisemblable que la hardiesse de sa défense indisposa d’un scrutin à l’autre quelques-uns de ceux qui, de prime abord, s’étaient prononcés pour la non-culpabilité. V. N. III, 576: L’vn.

40, Ans.—Allusion au sentiment éprouvé par Xerxès voyant défiler son armée et songeant que, dans cent ans, de tous ces êtres humains, pas un ne demeurerait, fait mentionné ci-après, I, 408.—Un jour, en présence du peuple romain auquel il donnait des jeux, Titus versa des larmes provoquées par de semblables réflexions.

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7, Decrepitude.—Cicéron, Tusc., I, 39.

10, Eternité.-«L’éternité commencée tout à l’heure, est aussi ancienne que l’éternité datée de la première mort, du meurtre d’Abel.»  Chateaubriand.

11, Arbres.—Il existerait au Mexique, encore actuellement en 1907, près d’un village appelé Chepultepec, un cyprès qui aurait trente-cinq mètres de tour et qui, d’après les botanistes, serait âgé de plus de six mille ans. On trouve également en Amérique, notamment en Californie, des séquoias qui auraient de 3000 à 3500 ans d’existence; en Judée, au jardin de Gethsémani, sont nombreux les oliviers qui ont été témoins de l’agonie de Jésus-Christ; en Angleterre existe un chêne de toute beauté auquel on attribue une existence de douze siècles. Il y a en Normandie un chêne qui serait contemporain de Guillaume le Conquérant; en Sardaigne se trouveraient des orangers qui auraient sept cents ans; à l’orangerie de Versailles en existe un, en fort bon état, planté au XVe siècle par Éléonore de Castille.  Larousse.

11, Animaux.—L’éléphant serait de tous les animaux celui qui vivrait le plus longtemps; on en cite un qui, pris par Alexandre le Grand, lors de la défaite de Porus, pouvant avoir à ce moment une cinquantaine d’années, existait encore à Alexandrie trois siècles après. La tortue, la corneille, le perroquet atteindraient cent ans; l’aigle, cent cinquante ans. Les esturgeons, les squales, passent pour vivre plusieurs siècles; on prétend que dans les pièces d’eau du château de Fontainebleau, se trouvent des carpes datant de la fondation par François Ier, il y a quatre cents ans.  Larousse.

12, Ridicule.—Sénèque, Consol. ad Marciam, 20.

16, Monde.—«Il est aussi naturel de mourir que de naître.»  Bacon.

20, Creation.

«Homme, contre la mort, quoi que l’art te promette,
Il ne saurait te secourir.
Prépares-y ton cœur; dis-toi: C’est une dette
Qu’en recevant le jour j’ai faite;
Nous ne naissons que pour mourir.» Mme Deshoulières.

«L’enfant naît pour mourir, la maison s’élève pour tomber.» Adage arabe.

23, Viure.

«... Tout passe et tout meurt: tel est l’arrêt du sort.
L’instant où nous naissons est un pas vers la mort.»
Voltaire, Exhortation villageoise du Curé de C.

25, Pendet.—Add. de 80: Et ne mourés iamais trop tost.

27, Mort.—«Nous allons sans cesse au tombeau, ainsi que des eaux qui se perdent sans retour.»  Bossuet, Oraison funèbre de Madame la duchesse d’Orléans.

«Le moment où je parle est déjà loin de moi.» Boileau.
«Dans tout berceau germe une tombe.» Victor Hugo.
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3, Disposition.—Terme d’astronomie; c’est l’état des astres et leur aspect.

11, Mesme.—«Ce qui a été, c’est ce qui sera, et ce qui s’est fait, c’est ce qui se fera; il n’y a rien de nouveau sous le soleil.»  Ecclésiaste, I, 9.

38, Videmus.—La phrase qui précède est la traduction de ces deux vers.

45, Vsage.—«La durée de la vie se compte réellement, non par le nombre des années, mais par celui des pensées et des actions.»  De Ségur.

46, Vescu.—«Quelque jeune qu’on soit, quand on a bien su vivre, on a toujours assez vécu.»  Mme Deshoulières.»

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1, Issue.—A Saint-Antoine de Padoue (Italie), on voit dans le cloître une tombe française, datant de 1595, dont l’épitaphe se termine par ce vers:

«Car il n’est si beau jour qui n’amène sa nuit.»

23, Donnée.—«Si Dieu avait donné le choix, ou de mourir, ou de toujours vivre; après avoir médité profondément ce que c’est, que de ne voir nulle fin à la pauvreté, à la dépendance, à l’ennui, à la maladie; ou de n’essayer des richesses, des plaisirs et de la santé que pour les voir changer inévitablement en leurs contraires par la révolution du temps, et être ainsi le jouet des biens et des maux, l’on ne saurait guère à quoi se résoudre. La nature nous fixe et nous ôte l’embarras de choisir; et la mort qu’elle nous rend nécessaire, est encore adoucie par la religion.» La Bruyère.—«Si nous étions immortels, nous serions des êtres très misérables. Il est dur, sans doute, de mourir; mais il est doux d’espérer qu’on ne vivra pas toujours et qu’une meilleure vie finira les peines de celle-ci. Si on nous offrait l’immortalité sur la terre, qui est-ce qui voudrait accepter ce triste présent? quelles ressources, quels espoirs, quelles consolations nous resteraient contre les rigueurs du sort et les injustices des hommes?»  J.-J. Rousseau, Émile, II.

24, Priué.—Le Tasse, près de rendre le dernier soupir, disait: «Si la mort n’était pas, il n’y aurait au monde rien de plus misérable que l’homme.»

«La vie n’est qu’un amas de craintes, de douleurs,
De travaux, de soucis, de peines;
Pour qui connaît les misères humaines,
Mourir n’est pas le plus grand des malheurs.» Mme Deshoulières.

«Celui-là qui meurt jeune, est aimé des dieux.»—«J’aurais bien aimé à mourir entre les bras de ma nourrice, cela m’aurait ôté bien des ennuis et m’aurait donné le ciel bien sûrement et bien aisément»  (Mme de Sévigné).

30, Indifférent.—Diogène Laerce, I, 35.

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1, Arriue.—C’est de cette même idée que s’inspire cette inscription qui se lit fréquemment sur les cadrans solaires: «Vulnerant omnes, ultima necat (Toutes les heures nous blessent, la dernière nous tue)», que certains trouveraient plus juste si elle était rédigée: «Vulnerant omnes, ultima sanat (la dernière guérit)», puisque cette dernière met fin à nos maux.

2, Nature.—Tout ce discours de la nature est imité de Lucrèce, III, du vers 945 jusqu’à la fin du livre. Les deux dernières phrases sont traduites de Sénèque, Epist. 20; le traité de ce même philosophe, De brevitate vitæ, a aussi fourni à Montaigne quelques imitations.  Le Clerc.

14, Prescheurs.—«Qui demandent: Où voulez-vous, Monsieur, qu’on vous enterre?»  Voltaire, La Pucelle.

17, Nous.—Cette idée et celle de la phrase suivante appartiennent à Sénèque, Epist. 24.—«C’est moins la mort qui est horrible, que le fantôme sous lequel on nous la fait envisager.»  Chilon.

17, Masque.—«La mort est belle; elle est notre amie. Néanmoins, nous ne la reconnaissons pas, parce qu’elle se présente à nous masquée et que son masque nous épouvante.»  Chateaubriand.

20, Mort.—Les éd. ant. aj.: et heureuse trois fois.

21, Equipage.—«Mon ami, je mourrai aujourd’hui. Quand on en est là, il ne reste plus qu’une chose à faire, c’est de se parfumer, de se couronner de fleurs, de s’environner de musique, afin d’entrer agréablement dans ce sommeil dont on ne se réveille plus.» Paroles de Mirabeau à Cabanis, le jour de sa mort.—«Le dernier plaisir de la vie, a dit César, est de mourir sans y penser.»

CHAPITRE XX.

Ce chapitre porte le no XXI dans les éd. ant. et l’ex. de Bordeaux.

23, L’imagination.—Charron a puisé dans ce chapitre la plupart des idées qu’il exprime au ch. 17 du liv. I de son Traité sur la Sagesse.

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18, Sagesse.—Ce Vibius Gallus était rhétoricien de profession. Il s’imagina que les emportements de la raison, représentés devant ses auditeurs, captiveraient leur esprit; et, par le soin qu’il prit à contrefaire le fou, il le devint effectivement. «C’est le seul homme que je sache, dit Sénèque le Rhéteur, Controv., II, 9, à qui il est arrivé de devenir fou, non par accident, mais par acte de jugement.»

21, Imagination.—On a vu maintes fois des patients mourir sur la table d’opération, avant même que le chirurgien eût commencé.—En 1794, Hébert, ce terroriste qui avait envoyé de si nombreuses victimes à l’échafaud, appelé à son tour à y monter, fut si faible devant la mort que ses jambes ne le portaient plus; il fallut, lorsqu’on le descendit de la charrette, l’asseoir sur le pavé. A la vue de la fatale machine, il s’évanouit; il était sans vie, lorsqu’on l’attacha sur la bascule; on ne guillotina qu’un mort.—Au collège royal d’Aberdeen, en Angleterre, des étudiants ayant à se plaindre du portier, s’en saisissent et lui annoncent qu’ils vont lui trancher la tête; ils l’agenouillent les yeux bandés et le frappent à la nuque avec une serviette mouillée; quand on le relève, il a cessé de vivre.—Lors du cataclysme qui, en 1902, ravagea la Martinique et détruisit la ville de Saint-Pierre, tous les navires qui étaient dans la rade périrent consumés par les flammes. Un seul, le «Roddus», parvint à s’échapper indemne; on n’y découvrit pas moins, une fois en sûreté, dans le salon du bord, les cadavres de plusieurs matelots qui, effrayés par la soudaineté de l’éruption et la pluie de feu, avaient dû se réfugier en toute hâte dans cette pièce et y étaient morts de peur, car ils ne portaient aucune trace de blessure.  Fulbert Dumonteil.

28, Cruentent.—Montaigne a rendu lui-même, avant de les citer, l’idée exprimée dans ces deux vers de Lucrèce, dont la traduction textuelle est la suivante: «Semblables aux flots tumultueux d’un fleuve franchissant toute limite, les amoureux inondent leurs vêtements.»

31, Italie.—Valère Maxime, V, 6, qualifie Cippus de préteur et dit qu’étant sorti de Rome en habit de général et l’accident dont parle Montaigne lui étant arrivé, les devins déclarèrent qu’il serait roi, s’il retournait à Rome; sur quoi, il se condamna volontairement à un exil éternel. V. aussi  Pline, XI, 58.

35, Refusée.—En 546, Crésus, roi de Lydie (Asie Mineure), avait un fils muet de naissance. Lors de la prise de sa capitale par les Perses, l’un d’eux allait tuer le roi qu’il ne connaissait pas, lorsque son fils qui était à ses côtés, saisi d’effroi, fit un effort qui lui rendit la voix: «Soldat, se serait-il écrié, ne tue pas Crésus!» et, pour le reste de sa vie, il conserva la faculté de parler.  Hérodote, I, 85.

37, Ame.—Antiochus, fils de Séleucus Nicator roi de Syrie, dépérissait. Erasistrate, son médecin, ne pouvant en pénétrer la cause, pensa qu’il se mourait d’amour, et, pour connaître l’objet de sa passion, imagina de mettre la main sur le cœur du malade et de faire défiler devant lui toutes les personnes de son entourage. A l’entrée de chacune, le jeune homme resta parfaitement calme, jusqu’à l’arrivée de Stratonice, sa belle-mère; à ce moment, il change de couleur, une sueur froide l’envahit, un frisson s’empare de lui, son cœur palpite; ces mouvements révèlent au médecin ce qu’il voulait connaître et il déclare au roi que le seul moyen de sauver son fils est de l’unir à la princesse; Séleucus consentit à la lui céder.  Lucien, Traité de la déesse de Syrie.

38, Nopces.—Outre cet exemple de changement de sexe, Pline, Hist. nat., VII, 4, en cite plusieurs autres, mais aucun en sens inverse d’homme changé en femme; Ausone leur consacre une de ses épigrammes.—Le fait se présente de temps à autre, mais plus apparent que réel, ne tenant en quoi que ce soit du merveilleux; chez la plupart, il n’est que le fait de fausses déclarations, faites à la naissance par les parents qui espèrent de la sorte éviter à leur fils le service militaire. Cependant, en dehors de toute supercherie, il naît parfois des hermaphrodites; les Romains avaient pour principe de les détruire; de nos jours, on les admet à l’existence comme tous autres. Cette année même (1906), à Charlottenbourg (Prusse), un nouveau-né aurait été inscrit à l’état civil sans indication de sexe, l’accord n’ayant pu se faire sur sa détermination, et l’on aurait remis à l’avenir de décider la question.

41, Iphis.—Lors de la naissance d’Iphis, son père, partant en voyage, avait ordonné que si c’était une fille, ce qui arriva, elle fût exposée. Sa mère, pour la sauver, déguisa son sexe et l’éleva comme un garçon. Quand vint le moment de la marier, durant la cérémonie nuptiale, les dieux, cédant à ses prières et à celles de sa mère, la changèrent en garçon; et, par reconnaissance, Iphis offrit un sacrifice à Isis (une des divinités principales de l’Égypte, personnification de la nature), inscrivant sur un ex-voto le vers que cite Montaigne.  Myth.

136,

1, François.—Vitry-le-François s’écrit et se prononce encore avec un O. Cette ville a été bâtie par François Ier, pour recevoir les habitants de Vitry-le-Brûlé, bourg distant d’environ 5 kil., que Charles-Quint venait de détruire (1554).

2, Soissons.—En 1580. Dans son journal de voyage, Montaigne écrit: «Nous ne le sceumes voir, parce qu’il estoit au village». Il y est dit aussi que ce fut l’évêque de Châlons, et non de Soissons, le cardinal de Lenoncourt, qui lui donna ce nom de Germain.  Le Clerc.

9, Marie Germain.—Le fait est mentionné par Ambroise Paré; c’était, dit-il, une jeune paysanne du nom de Marie Garnier qui, à l’âge de quinze ans, gardant les moutons et ayant sauté un fossé, éprouva une vive douleur et se trouva avoir changé de sexe; on lui donna alors le nom de Germain. Ce devait être, ajoute le célèbre chirurgien de l’époque, un véritable garçon, dont les organes étaient jusque-là demeurés à l’intérieur. Cuvier.—En 1907, à Savia (Italie), est né un enfant hermaphrodite, chez lequel les médecins n’ont pas été d’accord sur le sexe prédominant.—La duchesse d’Orléans, mère du Régent, sous Louis XV, parle dans ses Mémoires de Marie Germain, et avoue avoir, dans l’espoir de devenir homme comme elle, fait, elle aussi, des sauts si terribles que c’est miracle si, cent fois, elle ne s’est pas rompu le cou.

16, Dagobert.—Ce roi, dit la légende, était couvert de lèpre; s’étant dévotieusement frictionné avec la rosée de certain lieu d’une vénération particulière, il en fut miraculeusement guéri, ne conservant que les cicatrices de ses plaies.

16, Saint François.—Deux ans avant sa mort (1224), saint François d’Assise étant en prière, tomba en extase; le Christ sur la croix lui apparut, et, en même temps, il se sentit comme percé de trous dans tous les membres où les clous avaient été enfoncés dans ceux de Notre-Seigneur; et depuis il en conserva les cicatrices.—Ce fait de stigmates a été relevé à diverses reprises; en des temps rapprochés, en 1843, il a été assez longuement question d’un cas semblable, chez trois vierges, dans le Tyrol. En ce qui touche saint François d’Assise, le fait a été accepté par l’Église qui a institué une fête en cet honneur; ce qui n’a pas empêché un incrédule d’avancer qu’au dire des Jacobins, adversaires des Cordeliers dont saint François est le fondateur, ces stigmates avaient été produits par saint Dominique armé d’une broche, lors d’un différend survenu entre eux.

19, Autre.—Cet autre, c’est Restitutus. Cité de Dieu, XIV, 24.

22, Haleine.—Les extases, plus ou moins prolongées, sont un fait courant que la science explique dans une certaine mesure et qu’on arrive même assez aisément à provoquer chez certaines personnes, par le magnétisme.

27, Visions.—«Des miracles», ajoutent toutes les éd. ant. et l’ex. de Bordeaux.

32, Liaisons.—«Des mariages», ajoutent les éditions antérieures. Il s’agit ici de nouement d’éguillettes, ou impuissance momentanée empêchant la consommation du mariage, attribuée alors à des maléfices et qui jadis était l’objet de bien des préoccupations: Virgile semble y faire allusion; l’Écriture sainte relate la peine de mort contre ceux se livrant à des enchantements pour les produire; la loi salique leur inflige une amende de quarante sous d’or.

138,

16 à 22, On n’a pas... préseruer.—Var. des éd. ant.: A qui a assez de loisir pour se rauoir et se remettre de ce trouble, mon conseil est qu’il diuertisse ailleurs son pensement ou qu’on luy persuade, qu’on luy fournira des contrenchantemens d’vn effect merueilleux et certain.

31, Test.—A la base du crâne.

140,

1, Resueillon.—Collation faite au milieu de la nuit, quand on veillait, fréquemment pratiquée alors, le souper ayant lieu d’ordinaire à 5 heures du soir; est encore, de nos jours, de pratique courante la nuit de Noël, mais avec en plus une idée de divertissement qui à l’époque n’en faisait pas partie intégrante.

32, Sacrifices.—Hérodote, II, 81, d’où le fait est tiré, dit que ce fut Laodice qui s’avisa de faire vœu à Vénus de lui ériger une statue, ce dont elle s’acquitta très fidèlement.

34, Mineuses.—Qui font des mines, des manières; minaudières.

35, Allumant.—Var. des éd. ant.: «Mais il faut aussi que celles, à qui legitimement on le peut demander, ostent ces façons ceremonieuses et affectées de rigueur et de refus, et qu’elles se contraignent vn peu, pour s’accommoder à la necessité de ce siecle malheureux», au lieu de: «Or elles ont... allumant».

35, Cotte.—Ce propos émane de Théano. Cf.  Hérodote, I, 8.

142,

4 à 5, Qui luy... suiuantes.—Var. des éd. ant.: que cette frayeur s’en augmente et redouble à toutes les occasions suiuantes: et sans quelque contremine on n’en vient pas aisement à bout.

144,

13, Saint Augustin.—Dans la Cité de Dieu, XIV, 24; voir aussi le commentaire de Vivès sur ce passage.—Il y a vingt ou trente ans, un individu, tirant parti de cette même affection, affublé de la qualité de Pétomane, se donnait en spectacle à Paris; il en était arrivé à jouer certains airs.

25, Pouuoir.—Claude, empereur romain. Suétone (Claude, 32) dit seulement: Il méditait, assure-t-on, de rendre un édit «pour permettre de lâcher des vents à sa table», parce qu’il avait appris qu’un de ses convives avait pensé mourir pour s’être retenu devant lui. «Ne vous étonnez pas davantage, dit Rabelais, de celui-ci qui, pour retenir son vent et défaut de péter un mauvais coup, mourut subitement en présence de Claudius», origine probable de cette intention.

146,

12, Espaigne.—Les écrouelles, affection chronique des glandes du cou, vulgairement appelées «humeurs froides».—Les rois de France passaient jadis pour avoir le don de guérir cette maladie. A cet effet, ils faisaient sur la face du malade un signe de croix, en le touchant du front au menton et d’une oreille à l’autre, en disant: «Le roi te touche, Dieu te guérit.» Ils procédaient à cette opération, plus particulièrement le jour de leur sacre et à différentes fêtes annoncées à l’avance, pour que ceux qui le voulaient pussent se présenter. Le jour de son sacre, Louis XIV en toucha près de 2.000. Les étrangers se présentaient en grand nombre, notamment les Espagnols, chez lesquels cette maladie était, paraît-il, assez répandue; ce seraient eux qui, pour cacher ce mal, auraient inventé ces grandes fraises, en usage autrefois, particulièrement au XVIe siècle.—L’antiquité est fertile en superstitions de ce genre: Pyrrhus, roi d’Épire, guérissait les gens malades de la rate en leur touchant le flanc gauche avec son orteil droit; ils devaient au préalable avoir sacrifié un coq blanc. Montaigne, d’après Plutarque, cite ailleurs le fait de Vespasien rendant la vue à deux aveugles en leur humectant la paupière avec sa salive.

17, Aposéme.—Apozème, terme de médecine; potion faite d’une décoction d’herbes.

37, Façon.—Ce trait est, après Montaigne, rapporté dans les anecdotes de médecine de Dumonchau.—De cet effet d’imagination vrai ou faux, on peut rapprocher celui bien réel qui se produit journellement quand on souffre des dents et qu’on se décide à s’en faire arracher; l’appréhension de la douleur fait que très fréquemment le mal disparaît, quand le dentiste se dispose à opérer.

148,

7, Douleur.—Des faits semblables sont assez fréquents dans les annales médicales.—L’illustre chirurgien Velpeau eut jadis à traiter un malade persuadé qu’il avait avalé une couleuvre et le guérit en procédant de la même façon.—Tout récemment le docteur Richelot, à l’hôpital Cochin, à Paris, avait affaire à une femme prétendant avoir avalé, en buvant à un ruisseau, il y avait une quarantaine d’années, un œuf de lézard, qui avait éclos en elle et produit un lézard qui la gênait de plus en plus et était devenu intolérable. Il l’endormit, lui fit une incision superficielle et, à son réveil, lui produisit un magnifique lézard vert, d’une trentaine de centimètres de long, dont il s’était nanti au préalable. La femme fut convaincue et guérie, jusqu’à ce que quelque temps après, apprenant la supercherie par les journaux, les mêmes effets se reproduisirent en elle.—Ces effets sont le résultat de troubles nerveux très connus aujourd’hui, qui affectent parfois une forme plus curieuse encore dans le cas de la grossesse nerveuse, où la femme se figure être enceinte, en présente tous les symptômes, a dès les premiers mois des vomissements, s’imagine plus tard sentir remuer l’enfant qui n’existe pas, jusqu’à ce que vers le neuvième mois tout rentre insensiblement de soi-même dans l’ordre.

29, Regard.—C’est la croyance au mauvais œil, dont, quelques lignes plus loin, Montaigne gratifie les sorciers. La Scythie n’était pas le seul pays où pareille croyance existait, et nous la trouvons encore aujourd’hui dans bien des pays se disant civilisés, notamment en Italie, où le «jettatore» (jeteur de sorts) est un être redouté, faisant le mal sans même en avoir l’intention. Aussi, s’en garde-t-on avec grand soin; heureusement, il est facile à reconnaître; du reste, pour s’en protéger, il existe des préservatifs: pour conjurer le mauvais sort les dames romaines portaient à cet effet, dans l’antiquité, des priapes de bronze d’or, que les modernes remplacent par des cornes en corail ou en jais; les Orientaux donnent la préférence à des mains en argent, assez grossièrement imitées, les cinq doigts ouverts; à la rigueur, si on est surpris, la main ainsi étendue, les doigts écartés et dirigés vers celui qui vous menace ainsi, d’une façon consciente ou inconsciente, suffit pour vous en défendre.

37, More.—Ludovic Sforza, duc de Milan, dont il a été question, I, 104, dit le More ou le Maure, en raison de son teint basané.

150,

2, Iacob.—Jacob était convenu avec Laban, son beau-père, qu’il garderait ses troupeaux et que comme salaire tout agneau ou chevreau tacheté serait sa propriété. Il prit alors, dit la Genèse, XXX, 37, des baguettes vertes de peuplier, d’amandier et de platane, il y pela des bandes en mettant à nu le blanc des baguettes, et plaça ces baguettes dans les abreuvoirs, et quand les brebis s’accouplaient devant les baguettes, elles faisaient des petits rayés, tachetés et marqués; et comme en outre il prenait la précaution d’agir ainsi à l’égard des brebis les plus vigoureuses, Laban n’avait que des agneaux peu nombreux et chétifs, tandis que les siens étaient en bien plus grand nombre et vigoureux, et de la sorte, ajoute l’Écriture sainte, il devint extrêmement riche.

17, Moy.—De nombreuses éditions postérieures à celle de 1595, portent «conte», au lieu de «comme», indicatif du verbe commer (faire application); le sens ne justifie pas cette modification.

152,

13, Partis.—Quoique catholique et partisan de l’autorité royale, Montaigne conserva toujours de bonnes relations avec les chefs de tous les partis, la politique n’eut jamais très grande action sur lui.

23, Punissables.—Montaigne cherche plus en effet dans les contes et anecdotes qu’il présente, des occasions d’exprimer sa façon de penser, que d’en tirer des déductions, ce qui le porte à se préoccuper fort peu de leur exactitude qui souvent laisse fort à désirer.

28, Ainsi.—Les poètes de cette époque écrivaient «ainsin» pour éviter des hiatus, quand le mot suivant commençait par une voyelle, ce dont ce passage semble une critique.

CHAPITRE XXI.

Ce chapitre porte le no XXII dans les éd. ant. et l’ex. de Bordeaux.

154,

1, Demades.—Sénèque, De Beneficiis, VI, d’où presque tout ce chapitre a été pris.

6, D’autruy.—«C’est ce qui fait qu’il est si difficile de détruire les abus; il n’y en a pas qui ne profitent à quelques-uns.»

8, Guain.—Ceci a été et sera de tous temps, et l’on peut ajouter que chacun cherche à vendre le plus cher possible et à acheter au prix le moins élevé; c’est ce que de nos jours on appelle «la lutte pour la vie», d’autant plus ardente que la civilisation va sans cesse augmentant les appétits, créant de nouveaux besoins. C’est ce qui fait que le patron veut la journée de travail la plus longue et l’ouvrier la moins longue possible; que les comptables, les professeurs réclament contre les employés des ministères qui, à temps perdu, et Dieu sait s’ils en ont, s’occupent de travaux de comptabilité, donnent des leçons; que les tailleurs et cordonniers réclament contre les maîtres ouvriers des corps de troupe, qui travaillent pour le dehors, etc.; et aussi que les produits similaires de l’étranger sont frappés de droits protecteurs pour permettre à nos producteurs de mieux écouler leurs produits, à notre détriment à nous consommateurs; l’acharnement des médecins contre les rebouteurs, des pharmaciens contre les herboristes dont pâtissent les malades n’a pas d’autre cause.—Mais ce qui se justifie moins encore, c’est l’exagération apportée dans la pratique de cette loi de «l’offre et de la demande» qui n’est autre qu’une variante de la loi du plus fort aussi inique qu’elle et qui fait que souvent le gain d’un homme occupé durant la journée entière ne suffit pas à le faire vivre, parce que l’employeur abuse des facilités qu’il trouve à faire exécuter ce travail pour le rémunérer d’une façon insuffisante; cela a lieu surtout à l’égard de la femme dont le travail est souvent payé d’un prix dérisoire, notamment celles que font travailler à domicile les grands magasins, dont la fortune est faite de leur misère. C’est cette même loi qui fait que dès qu’une plus grande affluence de monde par suite d’une circonstance quelconque survient dans une localité, on voit du même coup s’élever le prix de toutes les denrées de première nécessité.—Dans ce même ordre d’idées rentre la question du repos hebdomadaire dans laquelle il a fallu que la loi intervienne, pour que ceux qui l’accordent ne pâtissent pas de ce que d’autres refusent à l’accorder. En bonne conscience il devrait, sauf le cas de nécessité absolue, avoir lieu le dimanche parce que c’est dans les habitudes que, ce jour-là, les échéances soient prorogées, les grandes administrations fermées; les enfants ne vont pas à l’école; c’est le jour habituel des grandes manifestations de la vie sociale et politique; certainement il peut y avoir inconvénient pour quelques-uns, mais c’est l’avantage du plus grand nombre. Quant au salaire, il ne saurait actuellement être payé par le patron pour les journées où l’on chôme, mais forcément le prix de la journée de travail s’élèvera d’autant, ce qui reviendra au même pour l’ouvrier ou l’employé, l’employeur tout naturellement aussi se rattrapera en surélevant d’autant ses prix; finalement ce sera le consommateur qui paiera, et il ne saurait en être autrement.

13, Grec.—Ce comique, c’est Philémon, poète du IVe siècle, qui mourut, dit-on, dans un accès de rire, à 97 ans.—Un autre auteur grec, abondant dans le même sens, raconte que quelqu’un, rencontrant son médecin, lui demanda pardon de la bonne santé dont il jouissait depuis longtemps.

13, Reste.—«Le précepte de ne jamais nuire à autrui, emporte celui de tenir à la société humaine le moins qu’il est possible; car, dans l’état social, le bien de l’un fait nécessairement le mal de l’autre.» J.-J. Rousseau, Émile, III.—«Ce qui nuit à l’un, duit à l’autre.» (Proverbe ancien).

16, D’autruy.—La Rochefoucauld fait de l’amour-propre et de l’intérêt personnel la base de toutes nos actions, et chacune de ses maximes n’est que le développement de ce principe, dont il a pu trouver dans Montaigne l’idée première.

CHAPITRE XXII.

Ce chapitre porte le no XXIII dans les éd. ant. et l’ex. de Bordeaux.

23, Receüe.—Ce chapitre est un de ceux méritant le plus d’attention; il offre un champ très vaste aux réflexions et renferme un assez grand nombre d’idées fortes et peu communes. On y trouve entre autres des observations très judicieuses sur la nécessité de corriger de bonne heure, chez les enfants, plusieurs vices, défauts ou penchants qui prennent racine en eux dès la plus tendre enfance.  Naigeon.

156,

2, Encore.—Chez les Romains, ce conte avait donné lieu à un proverbe que Pétrone, XXV, exprime ainsi: «Qui l’a pu porter veau, peut le porter bœuf.» On le trouve aussi dans Stobée qui le cite d’après Favorinus et dans les Adages d’Erasme.

3, Coutume.—Le fait cité est plus ici une question d’habitude que de coutume; la conclusion émise n’en est pas moins juste pour l’une comme pour l’autre: «En amour notamment le lien de l’habitude est bien fort; pour s’en apercevoir, il faut être sur le point de rompre; combien de gens vivent ensemble comme s’ils s’aimaient, faute de pouvoir se passer l’un de l’autre.» Mme de Rieux.—«Le mariage doit combattre sans trêve, ni repos, ce monstre qui dévore tout, l’habitude.»  Balzac.

10, République.—Cet antre est aux Enfers, un lieu où, selon Platon, République, VII, toutes les âmes séjournaient après la mort, en attendant qu’il fût statué sur leur sort. Celles d’entre elles appelées à retourner sur la terre, libres de choisir tel ou tel genre de vie, choisissaient toujours immanquablement, et c’est ce à quoi il est fait ici allusion, d’après leurs anciennes habitudes.

12, Poison.—Mithridate, roi du Pont, s’était habitué au poison, en en prenant régulièrement à petites doses, dans le but de déjouer les tentatives d’empoisonnement, si bien que, dans sa vieillesse, réduit par les circonstances à se tuer, il essaya en vain de ce moyen.—C’est sur un principe analogue que repose la vaccination, dont la découverte fut due au hasard, et aussi l’emploi de tous les sérums que la science de Pasteur a par déductions créés contre la rage, le croup, etc., ouvrant un champ aux recherches de ses élèves et successeurs, méritant par là d’être considéré comme l’un des bienfaiteurs de l’humanité.—Cette accoutumance toutefois ne s’applique pas à tout, et le czar Pierre le Grand voulut en vain habituer les enfants de ses matelots à ne boire que de l’eau de mer; tous moururent.

14, Indes Nouuelles.—Dénomination sous laquelle ou désigna tout d’abord l’Amérique.—Ici et dans tout le cours des Essais, Montaigne se fait l’écho des contes de toute nature, et pour la plupart faux ou exagérés, qui circulaient alors sur cette partie du monde, qu’on venait de découvrir (1492), il n’y avait pas encore un siècle.

17, Viures.—En certaines circonstances, les choses n’ont plus de prix.—En 1871, lors du premier siège de Paris, les stocks de denrées alimentaires s’épuisant de plus en plus, le dernier jour du siège, un poulet se vendait 50 fr.; un lapin, 45 fr.; les œufs, 2 fr. 50 pièce; les haricots, 8 fr. le litre. Depuis six semaines, on était rationné à 300 gr. de pain fait partie de farines de toute nature et de toutes qualités, partie de toutes autres substances plus ou moins comestibles, telles que la paille, etc.; et, depuis quinze jours, à 30 gr. de viande de cheval; de chiens, de chats, il n’en existait plus dans Paris et sa banlieue; le rat d’égout même avait presque complètement disparu.

23, Essayons.—C.-à-d. nous éprouvons. Montaigne emploie souvent le mot «essayer» dans ce sens: «Comme essayent les voysins des clochiers», dit-il quelques lignes plus bas.

25, Nil.—La cataracte du Niagara (Amérique du Nord) qui, à la vérité, passe pour la plus belle et la plus grande du globe (la largeur du cours d’eau, qui est de 4 kil. en amont, s’y réduit à un, et la hauteur de la chute est de 50m), s’entend à 70 ou 80 kil. de distance; ceux qui, habitant aux environs, sont faits au bruit qu’elle produit, n’y prennent pas garde.

30, Carolles.—Vieux mot qui signifie «danse en rond», et, dans le cas présent: mouvement de révolution des astres.

33, Soit.—Tout ce passage, depuis l’exemple des «cataractes du Nil», est imité de  Cicéron, Songe de Scipion.

35, Fleurs.—Ce qu’on a appelé plus tard «collet de senteur», espèce de pourpoint de peau parfumée, à petites basques et sans manches.  Coste.

41, Diane.—A la pointe du jour. Vient du latin dies, jour; en espagnol día; c’était le temps de la dernière veillée de la sentinelle de nuit et le signal de l’heure où cette veillée prenait fin, donné par le tambour, le fifre ou la trompette; aujourd’hui c’est, aux armées, le signal du réveil sonné ou battu au point du jour.

158,

1, Aue Maria.—On dit aujourd’hui l’Angelus.—Cette prière se récitait déjà chaque soir, au coucher du soleil, depuis le XIe siècle, quand Louis XI introduisit à Paris l’usage de la dire en outre le matin et à midi, et de sonner les cloches pour en avertir les fidèles.

6, Peu.—Diogène Laerce, III, 38, d’où cette anecdote est tirée, met en scène, au lieu d’un enfant jouant aux noix, un homme jouant aux dés, ce qui donne plus de portée à l’observation de Platon.

8, Nourrices.—«Au moral, l’homme est déjà formé à dix ans, il se forme sur les genoux de sa mère.»  Joseph de Maistre.

26, Escutz.—Locution proverbiale dont l’explication est donnée par la phrase qui précède. Le dicton populaire «Qui vole un œuf, vole un bœuf» traduit la même manière de voir que Montaigne, à laquelle se range également Racine, estimant que l’un mène à l’autre:

«Quelques crimes toujours précèdent les grands crimes.»
«Ainsi que la vertu, le crime a ses degrés.»

31, Duict.—Accoutumé dès mon enfance.

38, Doubles.—Le double était une petite monnaie qui ne valait qu’un double denier (un peu moins qu’un centime). Le doublon était une monnaie d’Espagne, de la valeur d’une double pistole (environ vingt francs); le double doublon représentait par suite environ quarante francs.

160,

8, Donné.—Car il gaigne sa vie à se faire voir. Add. des éditions antérieures.

13, France.—En 1773, on a vu à Paris un maître d’école liégeois, né sans bras, qui, avec le pied, écrivait et taillait ses plumes (on faisait alors usage de plumes d’oie).—En 1840, à Paris, un peintre, César Ducornet, également sans bras, peignait avec le pied et a exposé des tableaux au salon, alors qu’à cette époque il fallait notablement plus de talent qu’aujourd’hui pour y être admis.

25, Veritatis.—Le texte latin porte petere, au lieu de quærere.

27, Public.—C’est ce qui fait que, même de nos jours, des usages très dissemblables, dus aux mœurs et coutumes d’antan, subsistent souvent entre deux localités parfois très rapprochées, particulièrement si elles sont de nationalités différentes. Prenons par exemple Londres et Paris pourtant voisines et en rapports continus:

Londres est individualiste, Paris collectiviste; Londres respire, Paris étouffe; Londres est bâti en briques, Paris en pierres; les maisons de Londres sont basses, celles de Paris sont hautes; Londres fixe les persiennes à l’intérieur, Paris à l’extérieur; Londres a des fenêtres à guillotine, Paris à espagnolette; à Paris les rues ont des arbres, celles de Londres en sont dépourvues.

A une heure du matin Paris est dans l’obscurité, Londres est inondé de lumière; Londres a son trousseau de clefs, Paris son concierge; Londres quitte son lit très tard, Paris se lève de bon matin; Londres s’embrasse sur la bouche, Paris sur les joues; Londres s’amuse le samedi après-midi, Paris travaille; le dimanche, Londres reste chez lui, prie ou boit, Paris s’amuse et se promène; Londres a des bars intérieurs ou l’on boit du whisky, Paris a des cafés qui débordent sur les trottoirs et où l’on cause.

Le dimanche, Londres dîne pendant que Paris déjeune. Londres mange peu de pain, Paris beaucoup; Londres boit de l’eau, Paris du vin.

A Londres la nourriture est mauvaise, à Paris elle est excellente; Londres fume la pipe, Paris la cigarette.

Londres est triste, Paris est gai; Londres voit le brouillard, Paris le soleil; Londres est toujours pressé, Paris jamais; Londres est commerçant, Paris industriel; Londres a peu de soldats, Paris en a trop; à Londres les soldats portent la tunique rouge et le pantalon noir, à Paris ils portent la tunique bleue et le pantalon rouge. A Londres la Tamise est un bras de mer, à Paris la Seine est une simple rivière; à Londres la Tamise est toujours sale, à Paris la Seine est souvent propre; à Londres, dans les piscines ou dans la rivière, on se baigne souvent nu, à Paris toujours en caleçon.

A Londres les cochers conduisent à gauche, à Paris à droite. L’automédon à Londres prend place sur le derrière de son véhicule, celui de Paris sur le devant. A Londres le «hooligan» se bat à coups de poing, à Paris l’«apache» se bat à coups de couteau et de revolver. A Londres le mont-de-piété s’appelle «mon oncle», et à Paris «ma tante». Londres a le système duodécimal, Paris a le système décimal. La femme à Londres aime la politique, à Paris elle s’en désintéresse. A Londres c’est le père qui lève et couche ses enfants, à Paris c’est la mère.

Londres ferme ses théâtres le dimanche, Paris les laisse ouverts. A Londres le derby est un mercredi, à Paris le grand prix est un dimanche.

A Londres la femme salue la première, à Paris c’est l’homme qui commence. A Paris le mariage donne à la femme la liberté, à Londres le mariage la lui enlève. A Londres les clergymen se marient, à Paris les prêtres se contentent de célébrer les mariages des autres.

Et cette énumération humouristique pourrait être notablement allongée.

30, Honorer.—Dans le midi de la France, notamment en Périgord, on se dit «Adieu» quand on se rencontre ou qu’on arrive en visite, ce qui ailleurs ne se dit généralement que lorsqu’on se sépare.

162,

16, Sarbatane.—On dit aujourd’hui sarbacane: long bâton percé d’un bout à l’autre avec lequel on projette, en soufflant, de petites balles contre les oiseaux; par extension, parler par sarbatane, c’est parler par personnes interposées.

18, Soigneusement.—En Guinée, à la Côte-d’Or notamment, pays qui, il est vrai, sont sous l’équateur, les deux sexes vont complètement nus jusqu’à l’âge de neuf à dix ans. Dans plusieurs cantons, les filles n’y portent même pas de pagne (morceau d’étoffe dont les nègres et les Indiens se couvrent de la ceinture aux genoux), jusqu’au jour de leur mariage; celles qui ne trouvent pas de maris sont aussi nues à trente ans qu’à quinze.  Payen.

21, Poste.—A leur gré, à leur fantaisie, selon leur goût.—Dans l’île de Chypre, dit Justin, c’était une coutume d’envoyer sur le bord de la mer, à certains jours fixes, les jeunes filles nubiles, sans dot, en gagner une, en sacrifiant à Vénus leur virginité; cet usage, d’après Valère Maxime, aurait également existé à Carthage, et aussi chez les Lydiens et les Babyloniens, au dire d’Hérodote.

28, Faire.—Dans nombre de pays d’Europe, au moyen âge, princes, seigneurs et même abbés et chanoines, entre autres les chanoines de Lyon, avaient, sur leurs vassaux, le droit de se substituer au marié, la première nuit des noces, droit dénommé «Jus luxanda cosà (droit d’effraction)». Ce droit existait notamment en Écosse, où il avait été établi par le roi Evenus III, au début de l’ère chrétienne; «de telle sorte, dit Buchanan, que le roi ne ménageant pas plus la chasteté des femmes de ses nobles que ceux-ci celle des femmes de ses serfs, les uns et les autres se trouvaient à cet égard sur un pied d’égalité absolue»; il y subsistait encore dans la deuxième moitié du XIe siècle, époque à laquelle Malcolm III, aux pieuses sollicitations de sa femme Marguerite, l’abolit et lui substitua une redevance d’un demi-marc d’argent qui fut payée jusqu’au XVIe siècle.—Aux îles Canaries, on offrait aux chefs les prémices de toutes les vierges qui se mariaient et celles qui se trouvaient acceptées, en étaient très honorées.

32, Guerre.—J.-J. Rousseau, dans une lettre à d’Alembert, n’émet-il pas l’idée d’envoyer les femmes à la guerre et de les faire entrer dans les contingents à fournir aux armées, dans la même proportion que les hommes dont le nombre serait de la sorte réduit de moitié?

164,

5, Vieillarts.—Coutume de certains peuples de Thrace.

6, Femmes.—Au moyen âge, en France, on faisait usage de couches et de couchettes. Les couchettes étaient des lits de proportions égales aux nôtres à deux places; les couches avaient dix à onze pieds (3m ½ environ), dans les deux sens, sorte de lits de camp où l’on couchait sur deux rangs, les pieds de chaque rang vers le milieu du lit; on en trouvait encore de la sorte, il y a un siècle, dans quelques vieux châteaux de province. Le châtelain, sa dame, ses frères d’armes, ses hôtes, ses chiens de chasse y couchaient tous ensemble. Souvent, en outre, on faisait coucher ses serviteurs dans ses chambres et cela encore aux XVIe et XVIIe siècles; c’est ainsi que le soir de la Saint-Barthélemy, Charles IX, qui voulait sauver Coligny, le garda longtemps au Louvre, et comme il s’en allait, cherchant à le retenir, lui dit: «Reste donc ce soir, tu coucheras avec mon valet de chambre.»—«Ma foi non, il est trop tard, je m’en vais,» reprit Coligny.

10, Besoing.—Les Cosaques Zaporogues, qui habitaient les îles du Dniéper, n’admettaient parmi eux aucune femme; pour se reproduire, ils usaient de captives qu’ils reléguaient hors de leur camp; ils en élevaient les enfants mâles, et chassaient les filles. Payen.—En Mongolie, se trouve une ville sans femmes «Maïtmachin», dont le nom signifie marché; elle compte 70.000 habitants, est située sur le chemin des caravanes, sur les confins de la Sibérie, et n’est peuplée que de commerçants; le gouvernement chinois en interdit l’accès aux femmes, pour empêcher ses sujets de s’établir à peu de distance de la frontière.  Gal Niox.

16, Oyseaux.—Chez les Guèbres ou Parsis, dans les Indes, les cimetières sont des tours à ciel ouvert de douze à quinze pieds (4 à 5m de haut), sans ouvertures latérales; la partie supérieure est garnie de barres de fer qui forment une sorte de grille horizontale sur laquelle on place les corps pour y servir de pâture aux oiseaux de proie, jusqu’à ce que les os tombent d’eux-mêmes sur le sol, où ils s’accumulent, constituant un véritable charnier.

21, Roy.—Il en est, encore aujourd’hui, de même dans les mosquées; on n’y entre qu’après avoir ôté ses sandales, si on est musulman, ou chaussé de babouches par-dessus ses chaussures, si on est chrétien et qu’on soit autorisé à y pénétrer. Dans les synagogues, les Juifs ne se découvrent pas, et il est malséant de le faire. A Rome, ceux auxquels il est accordé d’assister à la messe du Pape, à la chapelle Sixtine, le font les hommes en habit, les femmes en mantille, les uns et les autres sans gants.

22, Eunuques.—De εὐνή, lit, et ἔχω, je garde. Nom donné aux hommes auxquels on a ôté la faculté d’engendrer et dont on se sert en Orient pour garder les femmes dans les sérails; cette opération rend l’homme imberbe, modifie sa voix, lui donne des allures féminines et généralement porte à l’embonpoint. Elle se pratique également sur la femme, en Hindoustan, en vue du même rôle, et s’effectue en piquant les ovaires avec une aiguille trempée dans un liquide caustique, ce qui amène l’atrophie de cet organe et aussi des transformations physiques, dit-on, qui font que ces femmes ressemblent à des hommes.

23, A dire.—Vieille locution qui subsiste encore dans le midi et signifie: de moins, manquer, faire défaut; de là vient le mot «adiré», une pièce adirée, c.-à.-d. perdue, employé dans le langage du palais. V. N. III, 230: Adiré.

24, Démons.—Se rendre les démons favorables. Accointer, c’est rechercher quelqu’un pour se le concilier, le gagner à soi.

25, Lyon.—Les Hottentots (Afrique australe) adoraient le lion.

31, Leze-maiesté.—Cet usage existait en Pologne, et aussi en d’autres pays du Nord.

166,

1, Police.—Du gouvernement; cette acception du mot «police» est presque constante dans les Essais.

9, Effroy.—Cette facilité dans l’accouchement n’est pas rare, chez nous, parmi les femmes de la campagne; elle a été signalée comme habituelle chez les négresses et aussi chez les indiennes de l’Amérique du Nord.

10, Greues.—Des jambières ou armures de jambe.

15, Accroupis.—Dans les pays musulmans, les deux sexes généralement urinent accroupis; en Guinée, dit Suidas, il est défendu aux hommes, sous peine d’amende, d’uriner debout.

20, Douze.—Les Hurons, les Hottentots passent pour nourrir les enfants au sein pendant quatre ou cinq ans; les femmes sauvages de la Louisiane, jusqu’à six ou sept ans; les Mexicaines, plus encore. Suivant Amundsen, explorateur du pôle arctique de 1900 à 1903, chez les Esquimaux les femmes donneraient le sein à leurs enfants jusqu’à dix ans.

25, Senteur.—Il en était ainsi chez les Mexicains, d’après Gomara; les Chinois, dit-on, sont également peu délicats sous ce rapport.

30, Ongle.—En Chine, les lettrés et les docteurs, surtout ceux qui sont de basse extraction, ne se coupent jamais les ongles; ils affectent de les laisser croître jusqu’à la longueur d’un pouce. Du Halde.—Les négresses de la Côte-d’Or les laissent croître jusqu’à les avoir quelquefois aussi longs qu’une phalange; elles les entretiennent fort propres et s’en servent, le cas échéant, pour prendre de la poudre d’or.  Artus.

32, Gentillesse.—De nos jours, certains font de même, laissant croître par coquetterie, par snobisme pour parler l’argot de nos gens à la mode, d’un centimètre à un centimètre et demi l’ongle du petit doigt de la main droite.

38, Fils.—Au Gabon, la mère reçoit ouvertement les caresses de son fils, et les filles celles de leurs pères.  Artus.

168,

2, Humaine.—Les Munbos, tribu de l’Afrique équatoriale, mangeaient de la chair humaine. Fario.—Les Anzikos, autre tribu africaine, tuaient et mangeaient tous les prisonniers qu’ils faisaient à la guerre; ils se mangeaient même les uns les autres, sans en excepter leurs propres parents; la chair humaine se vendait sur leurs marchés, comme le bœuf dans les boucheries d’Europe.  Pigafetta.

3, Aage.—«Que la lie de l’esprit et du corps est humiliante à supporter; j’aimerais les pays où par amitié on tue ses vieux parents, si cela pouvait s’accommoder avec le Christianisme»  (Mme de Sévigné).

5, Tuez.—A Sparte notamment.

7, Seruir.—Lycurgue, à Sparte, avait admis qu’un mari ayant des enfants, prêtât sa femme à un autre qui n’en pouvait avoir de la sienne.

9, Masles.—On lit dans Hérodote, à propos des Guidanes, peuplade de Libye: «On dit que leurs femmes portent chacune autour de la cheville du pied autant de bandes de peau qu’elles ont connu d’hommes; celle qui en a davantage est la plus estimée, comme ayant été aimée d’un plus grand nombre.»—Hérodote, du reste, dit bien d’autres choses: «Dans la Babylonie, les mariages se font à la criée: Une fois l’an, dans chaque bourgade, toutes les filles nubiles sont réunies et on en forme deux groupes, les belles et celles qui ne le sont pas. Les premières sont alors mises aux enchères, en commençant par la plus belle; on passe ensuite aux autres en commençant par la plus laide. Les prix d’adjudication des filles du premier groupe sont payés par les acheteurs; pour celles du second, ils le sont aux acquéreurs sur l’argent qui vient d’être versé pour celles-là, qui sert de la sorte à constituer la dot de celles-ci.

11, Main.—Les Amazones, peuplade fabuleuse de la Scythie, qui se perpétuaient, dit-on, par un commerce passager avec les habitants des pays voisins, et exposaient leurs enfants mâles.—En Bohême, au VIIIe siècle, il a existé de véritables Amazones qui, pendant plusieurs années, répandirent la terreur dans la région, et qui ne purent être exterminées qu’à grand’peine.

12, Et ce que.—Add. des éd. ant. à 88: la raison et.

15, Festoyée.—Les Thraces, d’après Valère Maxime; on ne peut que louer, dit cet auteur, la sagesse de ce peuple qui accueille par des pleurs la naissance de l’homme, et célèbre ses funérailles par des réjouissances, ayant, sans les leçons des philosophes, deviné notre véritable condition.—Les éditions antérieures présentent la variante ci-après: L’horreur de la mort estoit mesprisée, mais l’heure de sa venüe, à l’endroit des plus cheres personnes qu’on eut, festoyée auec grande allegresse: et quant à la douleur, nous en sçauons d’autres où les enfans de sept ans souffroyent pour l’essay de leur constance, à estre foëttez iusques à la mort sans changer de demarche ny de visage.

17, Visage.—A Lacédémone, d’après  Plutarque.

21, Nasitort.—Nom du cresson alénois (à feuilles découpées).

21, Eau.—En Perse, au temps de Cyrus, suivant  Xénophon.

22, Cio.—Auj. Céos; les habitants de cette île étaient réputés par leur moralité, autant que ceux de Chio (île de l’Archipel, auj. Scio) passaient pour être de mœurs dissolues.

23, Honneur.—Ces nombreux exemples, dont pour quelques-uns nous avons indiqué la source, sont empruntés d’Hérodote, de Xénophon, de Plutarque, de Sextus Empiricus, de Valère Maxime et des ouvrages publiés alors sur l’Asie, l’Afrique et l’Amérique.

26, Monde.—Pindare dit cela de la loi νόμος; mais Hérodote, III, 38, en citant ses paroles, donne à νόμος le sens de coutume.—On en dit autant, et avec non moins de raison, de l’opinion.

34, Famille.—Les Hottentots, une fois reçus hommes en cérémonie publique, peuvent, sans scandale, maltraiter et battre leur mère.  Kolba.

34, Aristote.—Morale à Nicomaque, VII, 6.

170,

1, Coustume.—On ne saurait disconvenir de cette assertion. Le milieu ambiant, la mentalité du moment exercent une action prépondérante sur la façon dont on envisage toutes choses. A la guerre, l’homme le moins rapace trouve parfois tout naturel de s’emparer du bien d’autrui; le plus sensible, de tuer sans nécessité. Les moins cruels, les plus délicats finissent par prendre goût aux courses de taureaux et voient sans dégoût éventrer les malheureux chevaux sans défense qu’on y sacrifie. Tout Rome assistait avec transports aux combats de gladiateurs. Ne voit-on pas journellement, dans les pays non civilisés, les gens de nations tenant la tête de la civilisation, qui y résident, commettre ou voir exercer sans en être révoltés les pires cruautés sur les indigènes? Sous la Terreur, familiarisé avec la guillotine, on n’y prêtait plus attention; on n’était plus guère émotionné par le passage des charrettes de condamnés; parmi les victimes elles-mêmes destinées à y monter le lendemain, la plupart n’en étaient pas autrement troublées, pas plus qu’en temps d’épidémie, où la mort est l’affaire de quelques heures, on ne se tourmente outre mesure. Il en est de même a fortiori de la coutume et ce sont bien en réalité les lois de la société, du pays et du moment, c’est-à-dire les mœurs, qui créent les notions éminemment relatives et variables du bien et du mal, et font que tels ou tels actes sont aujourd’hui vice ou vertu, caractère qu’ils n’avaient pas hier, au moins au même degré et qui se modifiera probablement demain.

4, Crete.—Valère Maxime, VII.

33, Maistrise.—Le cas est fréquent. Il n’en est guère de plus caractéristique dans les temps modernes que celui des Anglais mettant à mort leur roi Charles Ier parce qu’il voulait, disaient-ils, attenter à leur liberté et à leurs privilèges et qui se rangèrent, au même moment, aux lois autrement dures et tyranniques de Cromwell, dont ils portèrent le joug patiemment et, après lui, supportèrent sans se plaindre celui presque aussi despotique de Charles II.—Chez nous, la période de Louis XVI, la Révolution, Napoléon, Louis XVIII, nous représentent quelque chose d’analogue. En 1815, nous nous sommes retrouvés presque exactement au même point qu’en 1789, après être passés par les phases les plus aiguës; et ce n’est qu’en 1830 qu’un nouvel à-coup de protestation s’est produit. Tout régime succédant à un autre emporté par le flot populaire, peut, sous une autre forme, reprendre les mêmes errements, avec grande chance de ne pas voir se renouveler d’un certain temps semblable manifestation; toutefois, moins que par le passé ces à-coups interrompent l’évolution de l’humanité: le suffrage universel, les progrès de l’instruction, l’émancipation des masses de plus en plus avides de libéralisme, de socialisme, l’instantanéité des communications, la rapidité et la facilité des transports, l’action continue et pénétrante de la presse, font que chacun a une part beaucoup plus effective, bien qu’encore souvent inconsciente et passive, aux questions d’ordre politique dont la généralité se désintéressait jadis. A l’autorité d’un seul, s’est substituée celle non moins intolérable, ni plus stable, des groupes; les transformations s’opèrent par la force même des choses, mais sous le couvert de la légalité; elles sont peut-être moins apparentes, mais tout aussi réelles que par le passé et acheminent fatalement aux mêmes revirements.

35, Ecosse.—Les Highlanders, ou Montagnards, ainsi qu’on les appelle aujourd’hui.

39, Eux-mesmes.—Ceci est tiré d’Hérodote, III, 38. «Chez les Padéens, dit-il, peuplade de l’Inde, ses plus proches parents et ses meilleurs amis tuent quiconque tombe malade, donnant pour raison que la maladie le ferait maigrir et que sa chair serait moins bonne; il a beau nier qu’il soit malade, ils l’égorgent impitoyablement et se régalent de sa chair. Ils tuent de même et mangent ceux arrivés à un grand âge; mais il s’en trouve peu dans ce cas, en raison des risques d’un sort semblable que chacun court dès qu’il est malade.» V. N. II, 376: Coustume.

172,

4, Horreur.—Nous voyons se reproduire ce même fait pour la même cause, c’est-à-dire la force de l’habitude, et aussi quelque peu à la réprobation dont, on ne sait pourquoi, la frappe l’Église catholique, qu’il faut attribuer le peu de progrès que fait en France la crémation, en dépit des appréhensions qu’inspirent les inhumations précipitées. Ces appréhensions sont cependant des plus justifiées; en Angleterre, rien que par le fait des exhumations pratiquées de 1900 à 1905, dans les cimetières, il aurait été relevé que 149 personnes ainsi exhumées avaient été enterrées vivantes.—La crémation est aujourd’hui admise à peu près partout en Europe, mais pourtant encore peu en faveur surtout par les raisons sus-indiquées. En France, il existe des fours crématoires à Paris, Lyon, Rouen, Reims; d’autres sont en construction ou en projet à Marseille, Dijon, Nîmes, Nice. A Paris, de 1889 à la fin de 1905, 3.825 incinérations ont été effectuées; en cette dernière année, il y en a eu 341. La durée de l’opération est d’une heure environ, la redevance de 50 fr., le poids des cendres recueillies à peu près le douzième de celui des corps incinérés.

15, Platon.—Lois, VIII, 6.

16, Preposteres.—A rebours, à contre-sens; par extension: autrement qu’il ne faut, contre nature.

23, Enfants.—Un oracle avait prédit à Thyeste, frère du roi d’Argos, qu’il aurait un fils de sa propre fille; pour éviter ce crime, Thyeste, à la naissance de celle-ci, la fit élever loin de lui. Dans la suite, l’ayant rencontrée dans un bois sans la connaître, il lui fit violence et la rendit mère.—Une prédiction avait été faite à Laïus, roi de Thèbes, que l’enfant qu’il attendait de Jocaste, sa femme, lui donnerait la mort. Pour échapper à ce sort, dès la naissance de l’enfant, il le fit exposer. Un berger de Corinthe l’ayant trouvé, le porta à la reine, qui le nomma Œdipe et le fit élever. Devenu grand, Œdipe consulta l’oracle sur sa destinée et apprit qu’il serait le meurtrier de son père et époux de sa mère. Se croyant fils de la reine de Corinthe, pour déjouer la fatalité il s’expatria. Chemin faisant, il fit rencontre de Laïus, se prit de querelle avec lui et le tua. Quelque temps après, il arriva à Thèbes, et trouva la ville désolée par le Sphinx; il le vainquit et, pour prix de sa victoire, obtint la main de Jocaste, promise à qui délivrerait la ville de ce monstre, et réalisa ainsi, sans le savoir, la prédiction dont il avait été l’objet.—Macareus eut un fils de sa propre sœur; leur père, instruit de cet inceste, envoya à sa fille une épée avec laquelle elle se tua; son frère échappa par la fuite au châtiment qui l’attendait, et se réfugia à Delphes, où il fut admis au nombre des prêtres d’Apollon. Myth.

32, Chrysippus.—Sextus Empiricus, Pyrrh. hypot., I, 14.

35, Preiudice.—Signifie ici préjugé.

174,

3, Etat.—Certains ont pensé voir, nonobstant ce qui suit, une allusion aux préjugés religieux; il est hors de doute que telle n’a pas été l’intention de Montaigne qui, de parti pris, s’en tient sans discussion aux enseignements de l’Église.

6, Oncques.—Le droit romain qui était d’application courante et qui alors n’existait écrit qu’en latin.

8, Langue.—Au moyen âge, il était fait usage du latin pour la rédaction des actes judiciaires et notariés. En 1539, une ordonnance de François Ier, datée de Villers-Cotterets, prescrivit que dorénavant tout acte, etc. serait prononcé, enregistré et délivré aux parties en leur langue maternelle. Depuis, cette langue s’est transformée, mais les grimoires de la Basoche, continuant à être écrits dans le langage d’il y a quatre siècles, sont redevenus presque incompréhensibles pour la génération actuelle en attendant qu’une nouvelle ordonnance intervienne.

9, Isocrates.—Discours à Nicoclès.

17, Impériales.—Peut-être Waifre ou Hunold, ducs d’Aquitaine à l’époque de Charlemagne... Paul Émile, historien latin du XVe siècle, dit: «Charlemagne projetait de donner une nouvelle législation à ses peuples, en commençant par ceux de France; un de ceux, gascon, qui l’avaient suivi en Espagne, se prononça et devant l’opposition des conseils tenus à cet effet, ce projet fut abandonné.»

19, Vende.—La vénalité des charges de juge, introduite en France en 1526, sous François Ier, par le chancelier Duprat, comme moyen de subvenir à la pénurie du Trésor, a subsisté jusqu’à la Révolution.—Sans demander que ces errements soient rétablis, les juges s’en trouvaient incontestablement plus indépendants, et il serait à désirer aujourd’hui que par mode de recrutement et d’avancement, ils fussent à nouveau affranchis des pouvoirs publics et des pressions que trop souvent ceux-ci exercent sur eux, cherchent à exercer ou passent pour le faire; l’inamovibilité qui leur avait été donnée comme garantie est insuffisante à cet effet, d’autant qu’on ne la respecte même plus. Il faudrait que, du haut en bas de la hiérarchie, le corps judiciaire se recrutât exclusivement par lui-même dans des conditions déterminées par la loi; peut-être alors cours et tribunaux en reviendraient, comme jadis, à ne rendre que des arrêts et non plus des services, alors que les parlements tenaient tête à l’occasion à l’autorité royale et qu’en dépit de la prison et de l’exil, ils se refusaient à l’enregistrement de ses édits quand ils estimaient qu’il y avait abus ou déni de justice.

20, Payer.—Nous n’en sommes plus tout à fait là, mais pas loin. Dans les procès civils, les deux parties ne sont-elles pas condamnées fréquemment aux frais, celle qui gagne comme celle qui perd, la première ayant simplement recours sur l’autre?—Ce n’est pas là du reste le seul grief que dans les temps actuels on articule contre la magistrature, en voici quelques-uns:

L’omnipotence, le sans-gêne et l’arbitraire des juges d’instruction qui prolongent la détention préventive au delà de toute raison; n’a-t-on pas cité, en l’an 1906, un honorable négociant, accusé d’avoir soustrait la valeur d’une lettre chargée, détenu ainsi pendant treize mois, sans qu’il fût procédé à l’examen de l’affaire?

La lenteur avec laquelle se jugent les affaires civiles. C’est ainsi que, dans le ressort de Paris, de simples procès en séparation attendent de longs mois avant d’être appelés. A cela on objecte le grand nombre d’affaires; mais si, quand l’encombrement le comporte, les audiences commençaient plus tôt et finissaient plus tard, si elles avaient lieu tous les jours au lieu de trois fois par semaine, si les tribunaux ne prenaient pas chaque année de si longues vacances et même s’en passaient quand le service l’exige, les retards seraient infiniment moins considérables. On pourrait encore augmenter leur nombre, ou mieux les réduire à un juge unique, comme en Angleterre, aux États-Unis, ce qui permettrait avec le même personnel de faire triple besogne et aurait en outre l’immense avantage de substituer une responsabilité individuelle à une trinité anonyme, d’où une plus grande attention apportée à l’étude des affaires et plus d’équité dans le jugement à intervenir.

Les ajournements fréquents à huit, quinze jours pour le prononcé du jugement dans les affaires correctionnelles, ce qui prolonge les angoisses des inculpés et prête à ce que dans l’intervalle les juges prennent langue au dehors; le jugement devrait toujours être rendu séance tenante comme aux assises, et seule sa rédaction être ajournée quand cela est nécessité par les considérants à exposer.

De ne pas chercher à s’éclairer suffisamment et de trop s’en rapporter à la parole des divers agents qui portent l’accusation, alors que leurs témoignages sont contestés, sous prétexte qu’ils sont assermentés, ce n’est pas toujours une garantie suffisante.

Enfin d’avoir intérêt à la multiplication des affaires, ce qui porte à exercer des poursuites pour des vétilles qui n’en valent pas la peine, pour donner plus d’importance au ressort.

27, Contraires.—Une distinction analogue, non moins farouche, comme dit Montaigne, subsiste, suivant que le dommage causé à autrui, l’est par un fonctionnaire dans l’exercice de ses fonctions, ou par tout autre. Sans parler des pouvoirs exorbitants dévolus en France, par le code lui-même, aux préfets qui ont qualité pour pratiquer des actes qui devraient être l’apanage exclusif de l’autorité judiciaire, dans toutes les branches de l’administration, les abus, quels qu’ils soient, échappent à toute répression.—Outre que ceux qui les commettent ne font souvent qu’appliquer les instructions de leurs supérieurs, les uns et les autres n’ont à répondre en dernier ressort de leurs faits et gestes que vis-à-vis du Ministre dont ils relèvent, lequel est toujours prêt à les couvrir de sa responsabilité, chose illusoire entre toutes. Seule la justice, unique pour tous, devrait connaître de ces abus et des dommages en résultant, comme de tous autres; la tâche des fonctionnaires en deviendrait assurément plus difficile et plus délicate, mais en somme ils sont faits pour le public, et devant une responsabilité effective, ils s’observeraient davantage.

36, Vertu.—La vertu militaire, le courage.

176,

1, Partage.—Jusqu’au XVIIe siècle, robe longue s’est dit de la magistrature et du clergé, robe courte de l’armée.

11, Commun.—Dans le ch. III du liv. III, Montaigne revient sur ces idées et les développe.

16, Receües.—Saint Augustin était de cet avis lorsqu’il répondait à un prêtre qui lui demandait s’il valait mieux suivre la liturgie de Rome ou celle de Milan: «A Rome, suivez la liturgie de Rome; à Milan, celle de Milan.» Par contre, La Bruyère dit à ce sujet: «Il faut faire comme les autres,» maxime suspecte qui signifie presque toujours: «Il faut mal faire», dès qu’elle s’applique au delà de ces choses purement extérieures, qui n’ont point de suites et dépendent de l’usage, de la mode ou de la bienséance.—«Différence complète au dedans, dit Sénèque à ce même propos, mais ressemblance entière au dehors.»—«Pour ne pas rompre l’harmonie, le sage doit parler la langue des fous.»  Abbé des Fontaines.

23, Est.—En disant que la première loi est de se conformer à celles du pays dans lequel on se trouve, Montaigne l’entend sous tous rapports, sous celui des usages tout aussi bien que des lois proprement dites; de fait, pour ne parler que de l’hygiène, de l’alimentation, de l’habillement, la plupart de ceux qui, en pays étranger, ont voulu faire mieux que les indigènes, ont eu à s’en repentir.

26, Remuer.—S’il en était ainsi, toute réforme, tout progrès seraient impossibles et les abus se perpétueraient. Il est des cas où l’expérience révèle des inconvénients sérieux pour les intérêts généraux, à s’en tenir aux anciennes pratiques. Quand le fait est bien démontré, il n’y a pas d’hésitation à avoir: ce qui existe, est à modifier, sans avoir égard aux intérêts de moindre importance qui s’en trouveront lésés; car, comme le disait Caton, il n’y a aucune bonne loi qui soit avantageuse à tout le monde. Il est incontestable, en outre, qu’il y a des circonstances où la nécessité presse au point qu’il faut que les lois lui fassent place. Mais de là à tout bouleverser, comme cela avait lieu à l’époque où écrivait Montaigne, et ainsi que cela existe, de parti pris, en ce moment en France, à l’effet d’y introduire le socialisme d’État, il y a un abîme.

29, Thuriens.—Charondas.  Diodore de Sicile, XII, 24.

34, Ordonnances.—Lycurgue qui, après avoir donné à sa patrie une législation à laquelle longtemps elle dut sa gloire et sa force, fit jurer à ses concitoyens de n’y rien changer pendant son absence, puis entreprit un long voyage duquel, de propos délibéré, il ne revint jamais.  Plutarque, Lycurgue, 22.

178,

1, Façon.—Phrynis ajouta deux cordes à la cithare qui n’en avait alors que sept. Aristophane, dans sa comédie des Nuées, lui reproche d’avoir substitué à la musique noble et mâle de ce temps, des airs mous et efféminés.

5, Marseille.—Cette épée, suivant Valère Maxime, II, 6, 7, avait servi à trancher la tête aux criminels; elle existait depuis la fondation de la ville, était rongée de rouille et presque hors de service.

7, Dommageables.—Que dirait aujourd’hui Montaigne, en voyant l’action inconsciente des foules se substituant de plus en plus dans le domaine social et politique à l’activité consciente des individus? «nouuelleté», l’une des caractéristiques principales de l’âge actuel, absolument en dehors de celles auxquelles il fait allusion, et qui, nous conduisant insensiblement au socialisme, dépasse si fort ses prévisions les plus pessimistes.

8, Ans.—La réforme, qui avait été introduite en France vingt-cinq ou trente ans auparavant, comme le porte l’éd. de 88.

11, Nez.—S’en prendre au nez; ne pouvoir s’en prendre qu’à soi. Cette locution viendrait, dit-on, d’une ancienne coutume qui obligeait celui qui avait accusé quelqu’un à faux, à lui faire réparation publique, en se tenant soi-même le nez.

20, Fons.—Charles Ier d’Angleterre, Louis XVI et en général la chute de tous les souverains victimes de révolution, témoignent de la justesse de cette assertion.—Chez ceux auxquels l’ambition fait concevoir l’idée de déposséder un roi pour prendre sa place, c’est plutôt, d’après l’auteur même des Essais, l’inverse qui se produit: «Michel Montaigne me dit un jour, rapporte d’Aubigné dans son Histoire universelle, que les prétendants à la couronne trouvent, jusqu’au marchepied du trône, tous les échelons petits et aisés, mais que le dernier ne peut se franchir, en raison de sa hauteur.» «Cromwell lui-même, ajoute d’Aubigné, n’osa se parer du titre de roi.» Nombreux en effet sont ceux qui, comme les maires du palais, à la fin de la race mérovingienne, s’étant emparés du pouvoir, l’ont exercé en demeurant au second plan. Napoléon, dans les temps modernes, a montré moins d’hésitation.

22, Mal.—Allusion aux excès des catholiques tombant dans la rébellion, à l’imitation des protestants.

25, Heureusement.—Facilement, sans peine.

29, Thucydides.—Liv. III, 52.

35, Est.—Tite-Live, XXXIV, 54, dit cela à propos d’un règlement nouveau prescrivant que, dans certains spectacles, le peuple devait être séparé des Sénateurs, qui jusqu’alors avaient été assis avec lui sans aucune distinction, et il ajoute: «Les hommes aiment mieux qu’on s’en tienne aux anciennes pratiques, si l’on en excepte celles où l’expérience fait voir des inconvénients palpables.»

180,

13, Polluantur.—En 301. Le peuple romain réclamait que des pontifes et des augures qui étaient à nommer, fussent pris parmi les plébéiens, ce à quoi le Sénat se refusait, ne voulant pas abandonner le privilège de remplir les fonctions sacerdotales, les seules auxquelles le peuple n’eût pas accès à cette époque.  Tite-Live, X, 6.

18, Propre.—Hérodote, VIII, 36.

25, Politique.—Il est assez curieux de voir ici Montaigne donner le pas au pouvoir temporel sur le spirituel, et mettre l’autorité politique quelle qu’elle soit, au-dessus de l’autorité ecclésiastique; il y a là en germe la doctrine de l’église gallicane.

182,

1, Isocrates.—Discours à Nicoclès.

2, Party.—Le passage qui suit, «car qui... sequor (lig. 2 à 30)», ne figure pas sur la majeure partie des exemplaires de l’édition originale de 1595; il a été ajouté seulement sur les derniers tirés, Mlle de Gournay s’étant probablement aperçue de l’omission en cours de tirage.

184,

13, Inequalité.—Il est certain qu’un homme placé dans une circonstance critique se trouve dans le cas du chien de La Fontaine qui porte à son cou le dîner de son maître, qui après l’avoir défendu de son mieux, trop faible contre ceux qui l’attaquaient, voulut au moins en avoir sa part et fut le premier à prendre un morceau; du reste c’est toujours l’homme que peint notre fabuliste, quand il fait parler ou agir ses animaux.

24, Remuer.—Tiberius Gracchus proposait aux Patriciens de se dessaisir en faveur des citoyens pauvres, et moyennant indemnité, de terres qu’ils détenaient contrairement à la loi; Octavius son collègue au tribunat, usant de son droit, mit opposition à cette proposition, ce qui conduisit T. Gracchus à en formuler de plus dures, accentua la division entre l’oligarchie et le peuple et amena les désordres qui conduisirent à la guerre civile entre Marius et Sylla et à la dictature de ce dernier.—Caton le Jeune, par son opposition à la loi qui rappelait à Rome Pompée et son armée, et cela par crainte de l’influence que celui-ci en retirerait, le porta à s’unir à César, ce qui les rendit tout-puissants, puis rivaux, et engendra entre eux la guerre civile qui mit fin à la République romaine.—De nos jours, en France, la résistance du Pape Pie X à la constitution des associations cultuelles de la loi de séparation de 1905 de l’Église et de l’État, que beaucoup de bons esprits et excellents catholiques de France, y compris nombre de membres de tous rangs du clergé, estimaient acceptable, donna lieu en 1906 à une nouvelle loi qui enleva au clergé les immeubles dont la jouissance lui avait été conservée et lui fit une situation beaucoup plus précaire, dont en ces temps d’indifférence religieuse il est plus difficile de prévoir l’issue.

28, Veulent.—«Il faut vouloir ce qu’on ne peut empêcher», dit le proverbe.

29, Heures.—Après la bataille de Leuctres, 371, qui enleva à tout jamais aux Spartiates la prééminence en Grèce, le nombre des fuyards fut considérable, et les lois de Lacédémone les notaient d’infamie; devant l’inconvénient d’avoir un aussi grand nombre de citoyens frappés d’incapacité, alors qu’on avait tant besoin de soldats, Agésilas proposa et fit adopter de laisser dormir les lois ce jour-là, et de leur rendre toute leur autorité le lendemain. Plutarque, Agésilas et Apophth. des Lacédémoniens. C’était en fait l’amnistie que nous appliquons si fréquemment à tout propos et souvent hors de propos, accommodée suivant les convenances du parti au pouvoir.

30, Calendrier.—Alexandre assiégeait Tyr, 332. Le devin Aristandre lui annonça à la suite d’un sacrifice que, d’après l’examen des entrailles des victimes, la ville tomberait, dans le mois, en son pouvoir. On était au dernier jour du mois, et les assistants se moquaient de cette impossibilité flagrante. Alexandre, ne voulant pas que la science du devin, dont il usait fréquemment pour faire accepter ses projets par son armée, se trouvât en défaut, ordonna que ce jour, qui était le trentième du mois, fût compté comme seulement le vingt-septième, et sur l’heure il fit sonner les trompettes et donner l’assaut; la ville, assiégée depuis sept mois, fut emportée le jour même.  Plutarque, Alexandre.

31, May.—Cet autre, c’est encore Alexandre. Les Grecs et les Perses se trouvaient en présence sur les bords du Granique; on était au mois de juin (en grec Daisios), et un ancien usage voulait que les rois de Macédoine n’ouvrissent pas les hostilités ce mois-là. Alexandre, pour n’être pas arrêté par cette superstition, déclara qu’à l’avenir ce mois serait appelé «second mai» (en grec Artemisios), et, passant outre, livra sa première grande bataille contre les Perses, 334. Plutarque, Alexandre.—Une superstition analogue, qui ne leur permettait pas de se mettre en marche avant la pleine lune, avait empêché les Spartiates de prendre part à la bataille de Marathon, 490.

36, Marine.—Vers la fin de la guerre du Péloponnèse, 431 à 404, les alliés de Lacédémone redoutant de voir le commandement de la flotte confédérée, alors exercé par Lysandre, en lequel ils avaient toute confiance, passer en d’autres mains, députèrent à Sparte, pour qu’il lui fût maintenu. Les lois ne permettant pas de lui continuer une seconde année la charge d’amiral, les Lacédémoniens, pour satisfaire aux désirs de leurs alliés, en investirent un certain Aracus, auquel Lysandre fut adjoint à titre de lieutenant, mais ayant seul toute l’autorité.  Plutarque, Lysandre, 4.

186,

2, Deffendu.—Ces ambassadeurs, en vue de rétablir la bonne harmonie entre les Athéniens et les Mégariens, poursuivaient l’annulation d’un décret rendu par les premiers contre les seconds; malgré l’ingéniosité de la réplique, ils n’obtinrent pas satisfaction.  Plutarque, Périclès, 18.

2, Plutarque.—Parallèle de Flaminius avec Philopœmen, vers la fin.

5, Requeroit.—C’est presque toujours en se retranchant derrière la légalité, devenue injuste ou oppressive, et ne la faisant pas fléchir en temps opportun, que les gouvernements provoquent les émeutes, et parfois les révolutions.

CHAPITRE XXIII.

7, Nostres.—En 1562; François de Guise, surnommé le Balafré, de la maison de Lorraine. V. N. I, 24: Nostres.

31, Propos.—Récit tiré de La Fortune de la Cour, par de Dampmartin, courtisan du règne de Henri III.

188,

8, Tuer.—Les éd. ant. et l’ex. de Bordeaux portent: homicider.

9, Raison.—Voltaire a mis en vers cette pensée dans sa tragédie d’Alzire, et Guzman, par la bouche de qui il l’exprime, est en même situation que le duc de Guise:

«Des dieux que nous servons, connais la différence.
Les tiens t’ont commandé le meurtre et la vengeance,
Et le mien, quand ton bras vient de m’assassiner,
M’ordonne de te plaindre et de te pardonner.»

11, Auguste.—Le récit qui suit est traduit, presque mot pour mot, de Sénèque, De la Clémence, I, 9; il a été reproduit presque textuellement par Corneille dans sa tragédie de Cinna; le fait se passait en l’an 4.

35, Cæpio.—Ces conspirations eurent lieu: celle de Lépide en 28 (ce Lépide était fils du triumvir et neveu de Brutus); celle de Murena (celui-ci était beau-frère de Mécènes) et de Cæpio en 21; celle d’Egnatius en 18. Eux et leurs complices furent mis à mort.

190,

20, Libertin.—Affranchi, du latin libertus ou libertinus; l’affranchi était l’esclave rendu à la liberté.

38, Trahison.—Ce même duc de Guise dont il est parlé au commencement du chapitre et qui, après avoir échappé à l’attentat médité contre lui à Rouen, fut assassiné l’année suivante, 1563, au siège d’Orléans.

192,

6, Euenemens.—Comme contre-partie de ce qui advint entre Auguste et Cinna, et pour confirmer l’intitulé que Montaigne a donné à ce chapitre, on peut en rapprocher le récit ci-après qu’on trouve dans Luitprand, relatif à l’empereur Béranger I, roi d’Italie, arrière-petit-fils de Charlemagne: «Dans l’enceinte même de Vérone, cette ville jusque-là si fidèle à Béranger, des traîtres complotèrent sa mort. Leur chef était Flambert, comblé de bienfaits par Béranger, qui avait même voulu être le parrain de son fils. Le vieil empereur (Il avait déjà 36 ans de règne) eut connaissance de la conspiration et voulut cette fois encore pardonner. Il fit venir Flambert, lui rappela en termes pathétiques tout ce qu’il avait fait pour lui: «On m’a pourtant dit, ajouta-t-il, que tu en voulais à ma vie; c’est impossible! Tu me dois tout, dignités et richesses; j’ai fait pour toi ce que je n’avais fait pour personne, et ne m’en tiendrai pas là, si tu persistes dans la fidélité que tu m’as jurée.» Puis, lui présentant une coupe d’or, pleine d’un vin précieux: «Bois à ma santé, lui dit-il, et garde la coupe pour l’amour de moi.» Cette magnanimité fut sans effet sur l’âme du traître, qui ne profita de la clémence du roi que pour hâter sa mort, 924.

22, Part.—Dans le domaine de l’électricité, par exemple, cette fée des temps modernes, que de découvertes primordiales dues au hasard, mais observées par des hommes de génie!—C’est ainsi, pour ne relever que les principales, qu’une grenouille dépouillée pour en étudier la structure anatomique, suspendue à un balcon par un fil de cuivre et dont les cuisses éprouvent un mouvement de contraction chaque fois que le balancement produit par le vent, lui fait toucher le fer du balcon, observée par Galvani, étudiée par Volta, amène ce dernier à imaginer la pile électrique.—Œrstedt démontrant que le courant d’une pile peut faire rougir un fil de platine, remarque que toutes les fois qu’il ouvre ou ferme le circuit, une aiguille aimantée qui se trouve dans le voisinage est actionnée; Arago laissant traîner le conducteur d’une pile sur de la limaille de fer, s’aperçoit qu’elle s’y attache, et voilà l’électro-magnétisme découvert.—Le hasard fait constater par Rœtgen que certains corps, considérés jusqu’ici comme absolument opaques, se laissent dans certaines conditions traverser par des effluves électriques qui ont reçu le nom de rayons X, d’où la radiographie.—C’est par le dépôt de cuivre qu’il aperçoit se former sur le zinc d’une pile, que Jacobi doit d’avoir inventé la galvanoplastie.—La constatation accidentelle par Branly des ondes électriques sur une poudre métallique, dont elles agglutinent passagèrement les molécules, rendant ainsi momentanément continu un circuit dont les extrémités y aboutissent, est le départ de la télégraphie sans fil.—Et il en est ainsi de la genèse de la plupart des découvertes et progrès tant soit peu importants, dans toutes les sciences humaines à tous les âges.

34, Intention.—Les éd. ant. port.: invention.

194,

1, Militaires.—Cornélius Nepos affirme que dans l’attribution de la gloire militaire, la part de la fortune est prédominante.—Quinte-Curce dit nettement que les conquêtes d’Alexandre sont moins l’ouvrage de la valeur que celui de la fortune.—Timoléon avouait que ses grands succès étaient l’œuvre des dieux, une grâce de la fortune, du bonheur, bien plus que le fait de sa prudence.—La victoire de Marengo (1800), un instant perdue, fut due à l’arrivée inopinée de Desaix; la défaite de Waterloo (1815), l’une des batailles les mieux ordonnées de Napoléon, au mauvais temps et à l’arrivée imprévue de Bulow, puis à celle de Blücher; à Gravelotte, 1870, sans l’inaction de parti pris et injustifiable de Bazaine, les Allemands eussent éprouvé un désastre irréparable, qui dès le début de la campagne eût changé du tout au tout l’issue de la guerre.

10, Fortune.—«Sylla désarma l’envie en se louant souvent de sa bonne fortune, et finalement en prenant le nom de Faustus (heureux). Plutarque, Comment on peut se louer soi-même.—D’autres estiment qu’en ajoutant cette épithète à son nom, Sylla avait plutôt en vue d’inspirer plus de hardiesse à ses partisans et de crainte à ses adversaires, la fortune étant un don de la Providence dont les effets sont sans limites.

11, Discours.—Sylla, dit Plutarque, a écrit dans ses commentaires que les entreprises qu’il hasardait selon l’occasion, s’y lançant à corps perdu alors qu’auparavant ses résolutions étaient contraires, étaient celles qui lui réussissaient le mieux.

31, Humanité.—L’éd. de 88 porte: si notable bonté.

196,

2, Autruy.—Sénèque, Epist. 4.—C’est ce que prouva d’une façon bien énergique ce major prussien dont parle J.-J. Rousseau, qui, bâtonné à la tête de son bataillon par Frédéric-Guillaume Ier, déchargea l’un de ses pistolets aux pieds du roi et de l’autre se brûla la cervelle.

7, Amis.—Cette confiance de Dion ne lui réussit pas. Calippus, dont il avait été l’hôte à Athènes et qui l’avait suivi en Sicile, mit à exécution contre lui les mauvais desseins qu’on lui prêtait, 354Plutarque, Apophth.

12, Presente.—Quinte-Curce, III, 6.

14, Faire.—L’éd. de 88 aj.: La vaillance n’est pas seulement à la guerre.

20, Vn.—Henri III.

26, Contraire.—Henri de Navarre, plus tard Henri IV.

38, Esperances.—Syphax, roi de la Numidie occidentale, était hésitant entre l’alliance de Rome et celle de Carthage; Scipion, qui venait d’expulser les Carthaginois de l’Espagne, au risque de tomber entre leurs mains ou d’être retenu prisonnier par Syphax, franchit la mer, avec deux vaisseaux seulement, pour avoir une entrevue avec lui et le décider en sa faveur, ce à quoi il réussit, 207. Tite-Live, XXVIII, 17.—On raconte un fait analogue du général russe Skobelew: En 1881, après la prise de Geok-Tépé, réduit de la résistance du Turkestan, faisant une reconnaissance avec une sotnia de cosaques, il tomba sur un parti de cavaliers Turkmènes; ceux-ci protestant de leur soumission, Skobelew renvoya ses cosaques et les prit pour escorte, acte d’audace et de confiance qui acheva ce qu’avait commencé la force des armes.  Gal Niox.

40, Rebours.—Au rebours se rapporte à ces mots: «La prudence si tendre et circonspecte...»; Montaigne eût dû l’effacer, lorsque postérieurement il a ajouté le trait relatif à Scipion qui ne se trouve pas dans les éditions antérieures. Ces intercalations nombreuses dans les Essais, sont une des causes de la difficulté qu’on a parfois à comprendre.

198,

3, Luy.—Louis XI, qui, en 1468, se mit en grand danger, ainsi que le rapporte, en l’en blâmant, Philippe de Comines, son historien, dans ses Mémoires, II, 5 à 7. Lors de son entrevue avec Charles le Téméraire, duc de Bourgogne, à Péronne, place appartenant à ce dernier, la ville de Liège s’étant révoltée contre le duc, à l’instigation du roi qui ne pensait pas que l’événement fût si prompt, Louis XI, retenu prisonnier par son vassal irrité, courut risque de la vie, et, pour sortir de ce mauvais pas, dut subir de très humiliantes conditions, grâce auxquelles, sur le moment, il réussit à tromper son adversaire par la confiance qu’il lui témoigna, et en arriva à le détacher de ses ennemis comme c’était son dessein. Une fois hors de danger, en fin renard qu’il était, il éluda peu à peu toutes les concessions qui lui avaient été arrachées.

4, Cæsar.—Il est souvent question de César dans les Essais, c’est pourquoi nous résumons ici la partie la plus saillante de la vie de ce grand capitaine.—Après quelques succès en Espagne, il conquiert la Gaule (58 à 49) et pénètre jusque dans la Bretagne (auj. l’Angleterre). Arrivé au terme de son commandement, Pompée, jusqu’alors son allié, jaloux de ses succès, empêche qu’il lui soit continué. Irrité de ce qu’il considère comme une injustice, César passe les Alpes avec son armée, franchit avec elle le Rubicon, ce que les lois interdisaient, et marche sur Rome, d’où Pompée s’enfuit avec le Sénat, 49. César entre à Rome, se fait décerner la dictature, bat en Italie et en Espagne les lieutenants de Pompée, l’atteint lui-même en Macédoine et remporte sur lui une bataille décisive dans les plaines de Pharsale, 48. Pompée s’enfuit en Égypte où il est assassiné. César y arrive après lui; de là il va en Asie où, en trois jours, il détrône le roi du Pont qui s’était révolté; passe en Afrique, y détruit à Thapsus l’armée républicaine commandée par Métellus, Scipion et Caton, 46; puis en Espagne où, battant à Munda, 45, le fils de Pompée, il achève d’anéantir le parti. Revenu à Rome, il se fait décerner la dictature à vie, et, maître du pouvoir absolu, n’en use que pour le bien. Accusé par ses ennemis d’aspirer à la royauté, il est assassiné en plein Sénat, 44.—Grand guerrier et grand homme d’État, César était aussi un excellent orateur et un écrivain élégant; de ses écrits, il ne nous reste que ses Commentaires sur la guerre des Gaules et les guerres civiles, simples souvenirs d’un soldat, qui, par le mouvement, la netteté, la concision, sont un modèle du genre des mémoires historiques.

10, Metuens.—En 48, à Plaisance. Les soldats accusaient leurs chefs de traîner la guerre en longueur; César, alors à Marseille, revenant d’Espagne, accourut en hâte. Ayant apaisé la sédition, il livra au supplice douze des plus mutins tirés au sort sur 120 des plus coupables; un d’eux prouva son innocence, le centurion qui l’avait dénoncé fut exécuté sur place. Dans ses Commentaires, César ne mentionne pas cette mutinerie.

20, Scrupule.—«De toute marque de crainte et de défiance.»

25, Tué.—En 1548, à Bordeaux, lors d’un soulèvement occasionné par l’impôt de la gabelle (impôt sur le sel, dont chacun était tenu d’acheter une quantité déterminée), imposé à la ville qui, jusqu’alors, n’y avait pas été soumise. Tristan de Monnaisis, qui en était gouverneur et dont il est question ici, périt dans cette émeute.

27, Soubsmission.—88 port.: d’humilité.

28, Suyuant qu’en guidant.—Var. de 88: flattant que commandant.

30, Vne gracieuse... confiance.—Var. de 88: la fermeté, l’authorité et vne contenance de paroles.

34, Bienseance.—Autrement dit: «Il n’y a rien qu’on ne puisse moins attendre d’une populace surexcitée que l’humanité et la douceur: elle est bien plutôt susceptible de respect et de crainte»; ce qui est de toute vérité, les foules étant aussi lâches que cruelles.

38, Aualer toute.—Soutenir jusqu’au bout sa première résolution.

40, Demise.—Soumise, du latin demissus.

40, De saigner... sur soy.—Var. de 88: de se remplir l’âme et le front de repentance, n’ayant plus autre soing que de sa conseruation; si qu’abandonnant son premier rolle de regler et de guider, et cédant plustôt que s’opposant, il attira cet orage sur soy, employant tous les moyens de le fuir et eschaper.

200,

1, Conniller.—Esquiver, se dérober. Ce terme, jadis d’usage courant dans le S.-O. de la France, a tendance à disparaître; vient de connil, nom du lapereau, dérivé du latin. Le connil, peu enclin à la bravoure, va, à la moindre alerte, se cachant dans les haies ou dans ses terriers appelés également de ce nom, connilières.

2, Soy.—Le triomphe des révoltés fut de courte durée; le connétable de Montmorency, dirigé sur Bordeaux, les contraignit à rentrer dans le devoir; plusieurs exécutions suivirent et la ville se vit enlever nombre de ses privilèges.—Parlementer avec l’émeute, et par surcroît le faire en personne, ne réussit jamais. Le fait du général de Bréa, à Paris, en juin 1848, assassiné pareillement par les insurgés, en est encore une preuve, outre bien d’autres; seule une attitude résolue en impose aux foules en délire, tout le reste est pris pour de la faiblesse. Faire tirer à blanc, ou tirer en l’air notamment, ne fait que les surexciter; ce n’est qu’en inspirant de la crainte qu’on empêche le désordre de prendre de l’extension, qu’on en triomphe, en prévient le retour et évite de plus grands malheurs; et cela, sans que le plus souvent on soit contraint d’en venir aux pires extrémités devant lesquelles toutefois il ne faut pas reculer mais qu’il est presque toujours possible d’atténuer en prenant quelques précautions. Les difficultés ne proviennent guère, en pareil cas, que de ce que les émeutiers espèrent que la loi sur les attroupements, demeurée si fréquemment à l’état de lettre morte, le sera une fois de plus en la circonstance.

2, Montre générale.—Une grande revue. Le fait se passait en 1583. Le commandant du Château Trompette à Bordeaux, Vaillac, avait promis au duc de Guise de le lui livrer; le maréchal de Matignon, lieutenant du roi en Guyenne, déjoua ce projet, en contraignant Vaillac à cesser ses fonctions. Mais celui-ci, demeuré à Bordeaux, continua ses menées; et, le maréchal s’étant absenté, il crut le moment favorable pour y faire se prononcer un mouvement en faveur de la Ligue. C’est à ce propos que Montaigne, qui était alors maire de la ville, fit faire, pour tenir les suspects en crainte, cette revue qui rassura la population.

14, Poudre.—Salves d’artillerie ou de mousqueterie tirées en manière d’honneurs militaires dans des circonstances particulières, et notamment lors d’une revue passée par un haut personnage, à son arrivée devant les troupes, ainsi que cela se pratique encore.

16, Confidence.—Confiance, ainsi que portent plusieurs éditions postérieures. C’est là l’attitude constante des hommes politiques de tous les partis au pouvoir, vis-à-vis de l’armée: «Vous êtes admirables de dévouement, lui disent-ils sur tous les tons et à tous propos, vous avez notre sympathie, notre confiance, et toute notre bienveillance vous est acquise.» La première de ces assertions est constamment vraie, la seconde l’est beaucoup plus rarement, quelle que soit l’emphase de l’expression; seul le peuple, quand il est libre de toutes suggestions, l’acclame toujours sans restriction mentale, parce qu’elle émane de lui et le personnifie en ce qu’il y a de plus généreux en lui.

18, Clemence.—Add. des éd. ant.: et douceur.

33, Escus.—Plutarque, Apophth.

202,

5, Monopoles.—Conjurations, conspirations.—Rabelais, I, 17, s’est servi de ce mot dans le même sens: «Plût à Dieu, dit-il en parlant des mutineries du peuple de Paris, que ie susse l’officine en laquelle sont formés ces schismes et monopoles pour les mettre en évidence ès confrairies de ma paroisse.»

8, Domination.—Gauthier de Brienne, duc d’Athènes, descendant d’anciens croisés auxquels avait été donné ce duché qui, en 1312, fut enlevé à son père au profit des rois de Sicile. Gauthier, ayant pris du service dans l’armée de Florence et s’étant fait remarquer contre les Pisans, avait acquis une grande autorité; profitant de la lutte des factions qui se disputaient le pouvoir, il s’attribua lui-même la seigneurie à vie (1342); mais son despotisme et ses cruautés soulevèrent la population contre lui, et, l’année suivante, il dut se dérober, par la fuite, au mécontentement général.

9, Autrefois.—Appien, liv. IV des Guerres civiles.

22, Gaillard.—Add. des éd. ant.: et hardy.

CHAPITRE XXIV.

Ce chapitre est numéroté XXV dans les éd. ant. et l’ex. de Bordeaux.

28, Pedantisme.—Ce chapitre contient des observations très judicieuses sur la mauvaise manière d’enseigner et d’élever les enfants, et forme avec le suivant un traité presque complet d’éducation, très supérieur à l’Émile de J.-J. Rousseau, qui en a tiré ce qu’il a dit de mieux sur la matière.—A proprement parler, le pédantisme consiste dans une haute opinion de son savoir et un ridicule étalage de science empruntée.  Naigeon.

30, Italiennes.—En fait de comédies de ce genre, on peut citer: El Pedante, de F. Balo, 1538; mais comme le dit Montaigne, on trouve des rôles de pédant dans une foule de pièces du théâtre italien du XVIe siècle.

30, Pedante.—N’est pas le féminin de pédant, mais le nom italien, qui est à prononcer: Pédanté, avec un accent sur l’e final.

30, Badin.—Aujourd’hui adjectif; était un personnage ridicule de l’ancienne farce française, tels actuellement Jocrisse, Polichinelle, etc.

204,

7, Dit.—Plutarque, Cicéron, 2.—Longtemps à Rome, les pédagogues furent pour la plupart des Grecs.

11, Sapientes.—C’est une sentence que Rabelais, Gargantua, I, 39, met dans la bouche de Frère Jean, fidèle portrait des moines de ce temps et qui s’excuse de la sorte de son ignorance, ce que Regnier, Sat. III, a traduit par ce vers: «Pardieu, les plus grands clercs ne sont pas les plus fins».—Il y a dans ce chapitre quelques autres imitations de Rabelais.  Le Clerc.

17, Princesses.—Probablement Marguerite de Valois, fille de Henri II, dont Montaigne parle souvent et qui n’étant pas encore mariée était, de par son rang, la première des princesses de France.

31, Temps.—Allusion aux comédies d’Aristophane, dans lesquelles Socrate notamment était cruellement ridiculisé.—Les éd. ant. aj.: mais au rebours des nostres.

33, Prests.—Est dit ici par ironie, il faut entendre: «Ils en sont bien loin.»

34, C’est.—Cette façon de parler était encore d’usage du temps de Corneille, où, dans Horace, il est dit: «Le roi ne sait que c’est d’honorer à demi.» Aujourd’hui nous disons: «ce que c’est».

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