Essais de Montaigne (self-édition) - Volume IV
1, Seruice.—L’or et l’argent, en raison de leur peu de dureté relative, ne sont, en effet, employés à l’état pur, ni dans les monnaies, ni dans l’orfèvrerie, mais alliés au cuivre à raison de 9/10 de métal fin (or ou argent) et 1/10 de cuivre pour les monnaies; pour les pièces d’orfèvrerie la proportion de l’alliage (du cuivre) est un peu plus forte.
4, Aristippique.—Telle que la conçoit l’école cyrénaïque fondée par Aristippe. V. N. II, 240: Cyrenaiques.
12, Morbidezza.—Terme de peinture et de sculpture; mollesse et délicatesse des chairs, en particulier chez la femme et chez l’enfant.
17, Donnent.—C’est là une pensée d’Épicharme, conservée par Xénophon, dans ses Mémoires sur Socrate, II, 1, 20. Elle a été reproduite par Voiture: «Pour l’ordinaire, la fortune nous vend bien chèrement ce qu’on croit qu’elle nous donne.» Elle se retrouve chez La Fontaine, qui dans son poème de «Philémon et Baucis» semble l’avoir imitée de Voiture:
De son côté, Voltaire dit:
21, Socrates.—Dans le Phédon de Platon.
23, Metrodorus.—Sénèque, Epist. 99.
29, Melancholie.—La Fontaine, dans Psyché, II, exprime la même pensée:
32, Seneque.—Epist. 63.
34, Veteris.—L’ex. de Bordeaux porte vetuli, et aussi le texte de Catulle.
3, Fondre.—S’enfoncer, s’effondrer, succomber.
7, Enfondrer.—Où il ne peut se fixer et où il craint de s’embourber.
16, Platon.—Telle n’est pas la pensée beaucoup plus restrictive émise par Platon, République, IV, 5, qui dit que si au préalable on ne fait pas l’éducation de la jeunesse et qu’on ne la dresse pas à respecter les lois, elles deviennent inutiles, parce qu’il n’y en a pas de parfaites, et quelque amendement qu’on y apporte, on ne pare à un inconvénient qu’en en substituant d’autres, si bien que quelles qu’elles soient, elles sont toujours en défaut dans un cas donné. Naigeon.
17, Hydra.—L’hydre de Lerne, serpent monstrueux qui, d’après la Fable, séjournait dans le lac de Lerne en Argolide (Grèce ancienne); il avait sept têtes, et chacune repoussait à mesure qu’on la coupait; Hercule en délivra la terre. Le monstre, transporté au ciel, forme la constellation australe de l’Hydre. Myth.
26, Pourtant.—C’est pour cela que...
6, Verité.—Cicéron, De Nat. deor., I, 22; Bayle, Simonide.—Le roi Hiéron avait prié Simonide de lui dire ce que c’est que Dieu; celui-ci lui répondit qu’il avait besoin d’un jour pour examiner la question. Le lendemain, le roi ayant renouvelé sa question, le poète demanda encore deux jours pour faire réponse; et, chaque fois, il alla doublant le nombre de jours demandés. Cicéron, rapportant le fait, dit: «Je crois que Simonide, après avoir promené son esprit d’opinions en opinions, toutes plus subtiles les unes que les autres, et cherché vainement la plus probable, désespéra finalement de trouver la vérité.»
6, Qui.—Cet alinéa fait suite à l’avant-dernier de ceux qui précèdent; entre les deux a été intercalé l’incident de Simonide, qui n’existe pas dans les éditions précédentes, d’où un peu d’obscurité dans le texte.
8, Engin.—Un esprit ordinaire, de moyenne capacité; vient du mot latin ingenium, esprit.
12, Mesnage.—D’économies, de savoir-faire.
18, Conte.—Probablement Henri III; ce fut aussi le caractère de Louis XV.
CHAPITRE XXI.
23, Debout.—Suétone, Vespasien, 24.
25, Propos.—Spartien, Verus, 6. «Un empereur doit mourir dans la plénitude de ses facultés physiques et morales et non affaibli par l’âge ou les maladies.» On peut du reste en dire autant de tous ceux qui ont à commander ou à administrer, toutefois l’application de ce principe augmente d’autant plus d’importance que la fonction occupée en a elle-même davantage.
30, Appoltronny.—Proprement accoutumé au lit; viendrait de poltroniser, dérivé lui-même de poltro qui, en italien, signifie lit, couche, oreiller, coussin; d’où, par extension, s’accoutumer à la paresse, rendu lâche, énervé; c’est là une étymologie de notre mot poltron, quelque peu différente de celle qu’on lui attribue généralement (V. N. II, 568: Voyage).
32, Nonchalant.—Si peu soucieux.
13, Absence.—Henri de Navarre, devenu Henri IV.
13, Selym I.—Plein de courage et de fermeté, mais ambitieux, perfide et cruel, Sélim Ier détrôna et fit périr son père, ordonna la mort de plusieurs de ses frères, soumit la Syrie et prit le titre de calife (vicaire de Mahomet), dont il déposséda le dernier calife Abbasside de Bagdad et que ses successeurs à Constantinople ont conservé depuis; conquit l’Égypte sur les Mamelouks, la Mecque et Alger.
15, Completes.—Cela est exact; mais, par contre, tout aussi vrai quand au lieu de victoires que l’on remporte, ce sont des défaites que l’on éprouve: François Ier, à Pavie; Philippe de Valois, à Crécy; Jean le Bon, à Poitiers; Charles XII, à Pultawa; Napoléon, à Waterloo, etc.—C’est là du reste une question qui n’est pas d’actualité en France où de parti pris le chef de l’État n’a guère chance d’être un soldat; il semble d’ailleurs devoir en être de même dans un avenir prochain du Ministre de la guerre. Les gens politiques n’ont-ils pas toute science infuse, et qu’y aura-t-il de changé sauf que les bureaux dirigeront au lieu d’être dirigés, et que le personnel sera bouleversé au gré des influences et passions politiques du moment? Aussi, ce qu’en semblable situation on peut espérer de mieux pour notre état militaire c’est l’existence d’un Conseil supérieur de la guerre, comprenant tous ceux désignés pour, en cas de guerre, exercer le commandement de nos armées, dont les avis en toute question militaire de quelque importance soient d’obligation et toujours communiqués in extenso à qui il appartient de décider; l’établissement des tableaux d’avancement et l’initiative des nominations à tous les hauts grades et emplois de l’armée devraient également lui être attribués. La guerre éclatant, le Ministre, qu’il soit civil ou militaire, demeurerait, continuant à pourvoir aux besoins de tous, avec l’assistance de l’un des sous-chefs de l’État-Major général du temps de paix, toujours prêt à remplacer son chef, devenant, ipso facto, le Major général des armées opérant sur le principal théâtre d’opérations. Une fois les hostilités commencées, ce sont les événements qui décident de ce qui suit, toute prévision à cet égard est sans objet, toute idée préconçue peut être une entrave; il faut et il suffit que les hommes appelés à y pourvoir aient été choisis à hauteur de la tâche qui peut leur incomber, qu’ils soient au fait de la situation et aient du caractère.
17, Pensée.—Cela n’a jamais été d’une absolue vérité, l’action dirigeante du chef en dehors du combat ayant toujours eu quelque influence sur le résultat, bien qu’incomparablement moindre qu’aujourd’hui, comparée à sa conduite pendant le combat proprement dit. D’abord on ne manœuvrait guère autrefois, on se bornait généralement à se porter à la rencontre les uns des autres; et, d’autre part, le combat se livrait sur une étendue peu considérable, si élevés que fussent les effectifs en présence; tout ce qui s’y passait, était vu d’un grand nombre et, transmis à la voix, était à l’instant su de tous; l’effet en était immédiat, et dans ces conditions l’attitude du chef était d’importance capitale.—De nos jours, c’est tout autre: Dès le principe et longtemps avant qu’on n’en vienne aux mains, le chef manœuvre en vue d’acquérir la supériorité morale, d’avoir toute liberté de mouvements et d’entraver celle de l’adversaire, et de faire que, tout en ne se compromettant pas trop lui-même, un succès de sa part, quand le heurt se produira, soit aussi désastreux que possible pour son ennemi. Quand approche le moment de l’action, il prend, dans la mesure du possible, les dispositions que commande la situation. Quand elle s’engage, il observe, mais de loin pour mieux juger de l’ensemble sans être distrait par les détails, et n’intervient que par l’envoi en ligne de ses réserves quand il le juge utile. Lorsqu’elle prend fin, c’est lui qui, s’il a le dessus, s’applique à faire que la poursuite transforme la défaite de l’adversaire en déroute, ou à le contenir s’il a le dessous. Du commencement à la fin, sa pensée est toujours en action, et moins il engage sa personne, mieux il fait; sur une zone aussi étendue que celle sur laquelle se livrent les combats actuels, à moins qu’il ne s’agisse d’un engagement insignifiant par le nombre des combattants, l’intervention personnelle d’un chef, dans la mêlée, ne saurait guère excéder en résultat physique celle du moindre de ses soldats, elle a toute chance d’être sans effet réellement utile, et risque fort de compromettre la direction.—Cette dernière partie de l’assertion de Montaigne qui, de fait, est on ne peut plus vraie, doit donc s’entendre du chef qui, présent sur le théâtre de l’action, exerce le commandement effectif des troupes engagées, à l’encontre de celui qui, à distance, prétend gouverner les événements et dicter des ordres à ceux qui, sur place, sont aux prises avec les difficultés dont il ne peut juger.
20, Ferme.—«Ayant les pieds sur la terre ferme», comme un planteur de choux. Coste.
21, Hottomane.—Branche de la race turcomane (race dominante dans le Turkestan, en Perse et en Asie Mineure), du nom d’Othman I, fondateur de l’empire turc (XIIIe siècle).
25, Ammurath.—Vainquit les Perses et les Hongrois, enlevant aux premiers trois provinces, aux seconds, l’importante place de Raab; avait débuté en faisant étrangler ses cinq frères, tous en bas âge.
27, Edouard.—Prétendant à la couronne de France, du chef de sa mère, sœur de Charles le Bel, gagnait contre Philippe de Valois la bataille de Crécy (1346), prit Calais (1347) et plusieurs autres villes; son fils le prince de Galles gagnait sur le roi Jean, successeur de Philippe, la bataille de Poitiers (1356); mais moins heureux contre Charles V, il perdait peu à peu toutes ses conquêtes et ne possédait plus que quelques places maritimes en France, quand il mourut.
28, Charles.—Fit avec succès la guerre à Edouard III d’Angleterre qui avait envahi la France, au roi de Castille, et réunit à la couronne le Poitou, la Saintonge, le Rouergue, une partie du Limousin, le comté de Ponthieu et la Guyenne. Il eut pour généraux Olivier de Clisson, Bertrand du Guesclin, Boucicaut; témoin des malheurs causés par la captivité de son père Jean le Bon, fait prisonnier à la bataille de Poitiers, il s’était fait une loi de ne point commander ses troupes en personne et dirigeait tout du fond de son cabinet.
33, Castille.—Montaigne fait ici allusion à la découverte et à la conquête du Mexique, du Pérou, de la Nouvelle-Grenade, du Chili et de Buenos-Ayres, réalisées à cette époque, au nom des rois de Castille, par les Christophe Colomb, les Fernand Cortez, les Pizarre, etc.
33, Portugal.—Par les expéditions de Diaz, de Vasco de Gama, de Cabral, les conquêtes d’Albuquerque, le Portugal, au XVIe siècle, était maître, en Asie, des Indes, des Moluques, et en Amérique, du Brésil.
35, Facteurs.—Agents des grandes compagnies par lesquelles, jadis, les états européens exploitaient leurs colonies.
39, Respirer.—Zonaras, d’où ceci est tiré, dit: «Julien se démontra si sobre, que presque il ne rotait ni ne crachait et allait jusqu’à dire que, s’il était possible, un philosophe devrait même se garder de respirer.»
3, Persienne.—Xénophon, Cyropédie, I, 2, 16, ne parle pas plus de la sueur à propos des Perses, que Zonaras à propos de Julien; il dit seulement qu’il était déshonnête parmi eux de cracher, de se moucher et de paraître plein de vents.
5, Seneque.—Epist. 88.
10, Fortune.—«Venez voir mourir un maréchal de France,» disait Ney faisant à Waterloo (1815) un dernier effort, avec la brigade Brue, contre les lignes anglaises prenant l’offensive pour seconder l’action de Blücher. «Je ne rentrerai à Paris que mort ou victorieux,» disait de son côté le général Ducrot, en sortant pour livrer la bataille de Champigny (1871). Et tous deux, bien que demeurés constamment exposés aux coups des ennemis, se retrouvaient vivants en fin d’action, malgré ce qu’ils avaient dit et espéré.
17, Gradiuum.—Porteur de glaive, surnom du dieu Mars.
18, Deos.—En 479. Les Romains, en guerre avec les Èques, avaient vu échouer leurs efforts par l’insubordination de leurs soldats, motivée par une loi agraire en discussion à Rome. Redoutant la même mauvaise volonté l’année suivante, alors qu’on était en présence des Étrusques, qui venaient les insulter jusque dans leur camp, les consuls refusèrent quand même d’en venir aux mains, jusqu’à ce que leurs soldats eussent juré de vaincre ou de mourir, ce qu’ils firent, et tinrent parole, à l’encontre de ce qu’en dit Montaigne.—Celui-ci semble confondre cet épisode avec celui des Fabiens, guerriers à l’effectif de 306, tous de la famille Fabia, qui, deux ans après (477), ayant à leur tête le consul Fabius Vibulanus, se chargèrent à eux seuls de combattre les Véiens, qu’ils battirent en diverses rencontres; mais étant tombés dans une embuscade, ils périrent tous, accablés par le nombre.
31, Philistus.—Plutarque, Dion, 8. Philistus défait fut, suivant les uns, pris et tué par les ennemis; selon d’autres, il se tua pour ne pas tomber entre leurs mains.
38, Frustratoirement.—Inutilement, en vain. Frustratoire est encore en usage au palais; frustratoirement n’est plus français.
4, Castille.—De Thou, LXV.—Bataille d’El-Ksar el-Kebir, au Maroc, en 1578. Y périrent: Sébastien, roi de Portugal, qui disparut dans le combat; le vainqueur Muley Abd el-Melek, roi de Fez et de Maroc, terrassé par la maladie dans le cours même de la bataille; Muley Mohammed, son neveu, qu’il avait détrôné et à l’instigation duquel était venu Sébastien, auquel il s’était joint, se noya dans sa fuite; de la sorte périrent par la maladie, le fer et l’eau, trois rois dans cette même journée.—Sébastien ne laissant pas d’enfants, le cardinal Henri, son oncle, lui succéda; et, à la mort de celui-ci (1580), Philippe II, roi d’Espagne, s’empara de la couronne du Portugal.
34, Tracasser.—Mener çà et là, malgré les souffrances qu’il éprouvait.
2, Nouuelle.—De Thou, LXV, raconte qu’on prêtait le même fait à Charles de Bourbon, l’ancien connétable, tombant expirant au pied des murailles de Rome, à laquelle il donnait l’assaut avec les bandes à la tête desquelles il s’était mis (1527).—Nelson, en 1805, à Trafalgar, en agit de même: blessé à mort sur le pont de son vaisseau amiral, et transporté dans sa chambre, il se fit couvrir la figure et ses décorations de son mouchoir, afin de n’être pas remarqué de l’équipage et de ne pas l’impressionner défavorablement.
10, Main.—V. N. II, 430: Premier.—Une fois sa résolution arrêtée, dit Plutarque qui raconte cette mort avec grands détails, ayant près de lui l’épée avec laquelle il était décidé à se tuer, il s’endormit lisant le Phédon et alternativement prenant un peu de repos.
CHAPITRE XXII.
13, Essaye.—Éprouve, fatigue.
13, Lisois.—Dans la Cyropédie de Xénophon, VIII, 6, 9.
20, Gruës.—Les empereurs du Mexique avaient des courriers à pied, qui atteignaient à peu près à la même vitesse; ils étaient dressés à la course et leurs exercices, à Mexico, avaient comme but final les pieds d’une idole auxquels on arrivait en montant 120 marches.
20, Cæsar.—De Bello civili, III, 11.
24, Mille.—Suétone, César, 57. Le mille romain valait environ 1500m (exactement 1481); cent milles font donc à peu près cent cinquante kilomètres.
27, Tiberius Nero.—Pline, Nat. Hist., VII, 20. Tibère, le même qui devint plus tard empereur. Le fait se passait en l’an 9; son frère Drusus, après de nombreux succès en Gaule, opérait en Germanie, quand il tomba malade et mourut. Tibère prit la conduite des opérations et acheva la déroute des Germains, 8.
3, Peruenit.—Tite-Live, XXXVII, 7.—En 190; l’armée romaine, en marche contre Antiochus, devait traverser la Thrace; Sempronius Gracchus fut député à Philippe de Macédoine dont elle dépendait, pour pénétrer ses sentiments et savoir si on l’aurait pour ou contre soi.—La distance d’Amphise à Pella est d’environ trois cents kilomètres.
3, Postes assises.—Relais permanents, d’usage habituel.—Louis XI, en France, fut le premier qui établit un service de poste régulier; les relais étaient placés de deux en deux lieues (8 kilomètres).—Qu’est-ce que la vitesse de ces moyens de transport auprès de celles réalisées de nos jours par les moyens de locomotion qui sont venus s’ajouter aux anciens; alors que sur hippodrome, la plus grande vitesse obtenue à pied a été de cinq kilomètres en seize minutes et celle à cheval de 3.000m en 3m 15 (réalisée en 1903, par Quo Vadis, au Grand Prix de Paris), déjà avec le vélocipède, dont aujourd’hui tout le monde use, on fait aisément d’une façon suivie sur une bonne route 25 à 30 kil. à l’heure; tandis qu’en mer on arrive à des vitesses de 33 nœuds (60 kil. à l’heure) par des torpilleurs; l’Angleterre a même actuellement sur chantier un croiseur qui doit marcher à 36 nœuds (65 kil. 400); des trains de chemin de fer vont couramment à la vitesse de 100 kil. à l’heure, le dépassant même; des automobiles ont atteint jusqu’à 120.
5, Cecinna.—Il avait, dit Pline, Nat. Hist., X, 24, des quadriges (chars attelés à quatre chevaux de front) qu’il faisait courir; et, pour annoncer à ses amis le résultat, il lâchait celles de ses hirondelles qu’il emportait avec lui à Rome, teintes de la couleur du parti qui avait remporté la victoire.—La vitesse des hirondelles semble notablement supérieure à celle des pigeons: récemment, une hirondelle avait été amenée d’Anvers à Compiègne et, en même temps, 250 pigeons de même provenance. Lâchés ensemble, l’hirondelle aurait regagné son nid en une heure sept minutes, ce qui donne 207 kilomètres à l’heure, tandis que les premiers pigeons arrivés auraient mis quatre heures et deux minutes pour franchir cette même distance de 235 kilomètres.
10, Rome.—Les théâtres, dans l’antiquité, étaient à ciel ouvert. Indépendamment des représentations théâtrales, ils servaient, à Rome, aux combats de gladiateurs, aux courses, etc., lesquels étaient l’objet de paris dont il importait de connaître les résultats qui se transmettaient ainsi.
13, D. Brutus.—Pline, Nat. Hist., X, 77.—Assiégé dans Mutine (Modène), D. Brutus fit parvenir au camp des consuls des lettres attachées aux pattes de pigeons, et déjoua ainsi la vigilance d’Antoine, malgré les filets tendus par celui-ci en travers du fleuve pour intercepter toute communication (43).
14, Ailleurs.—Cet emploi des pigeons pour les communications rapides est très ancien. Les Grecs en usaient aux jeux olympiques pour signaler les vainqueurs, les Romains aux jeux du cirque; les Chinois s’en servaient; en Égypte, on annonçait de la sorte à l’intérieur l’arrivée des bateaux à Alexandrie. Leur usage à la guerre est plus récent, Montaigne en cite le premier exemple connu; pendant les croisades, les Sarrasins en firent grand usage et les Croisés les imitèrent dans des proportions plus restreintes. En Europe, il ne remonte guère qu’au milieu du siècle dernier, mais il s’est depuis considérablement étendu, nonobstant le télégraphe et l’invention de la télégraphie sans fil. La vitesse des pigeons bien entraînés est estimée de 60 à 80 kil. à l’heure, et les traites fournies atteindre 4 à 500 kil., cela toutefois semblant des maxima.—Les anciens, comme tous les peuples primitifs, ont souvent usé, pour communiquer à distance, de feux allumés sur des points élevés dont, de jour la fumée, de nuit la lueur, marquaient qu’un événement attendu venait de se produire. C’est à cela que servaient, au moyen âge, les nombreuses tours dont les ruines s’aperçoivent encore sur notre rivage méditerranéen; elles signalaient par leurs feux l’apparition au large des navires suspects et invitaient les populations éparses dans les campagnes à se mettre en sûreté dans les bourgs.—Citons encore comme moyen de communication rapide en usage au temps jadis les cris répétés de distance en distance; c’est ainsi, dit César, dans ses Commentaires, que le massacre des Romains qui avait été fait à Orléans au lever du soleil, fut connu à neuf heures du soir en Auvergne à cinquante lieues de distance.—Le télégraphe aérien, inventé sous la Révolution, outre sa permanence, réalisait le grand avantage, par son code de signaux, de pouvoir transmettre à peu près tout; mais son fonctionnement était interrompu par la nuit et le brouillard. La télégraphie électrique qui s’est substituée à lui, presque instantanée, puis le téléphone semblaient le nec plus ultra, et voici que la télégraphie sans fil va encore au delà de ce que l’on pouvait concevoir; née d’hier, elle a déjà donné possibilité de communiquer à des distances de deux cents kilomètres.
20, Chemin.—Il en était de même chez les Romains, où, comme on l’a vu plus haut, ce service comportait aussi des coches. Le cas échéant, chevaux de selle, bêtes de trait et véhicules pouvaient être réquisitionnés par les courriers dans l’embarras; cette servitude fut abolie par l’empereur Adrien.
22, Seiour.—Soulagement.
23, Vsage.—C’est cependant d’un effet salutaire pour les longues courses, se répétant plusieurs jours de suite, qu’on les fasse à pied ou à cheval, mais il faut y être habitué.—Les sultans entretenaient également des courriers à pied, auxquels, dit-on, par une opération chirurgicale, on enlevait la rate pour les rendre plus dispos et plus agiles. Payen.
CHAPITRE XXIII.
11, Atletes.—En dehors de l’entraînement continu auquel de nos jours sont soumis les jockeys qui prennent part aux courses, on leur fait suivre un régime spécial et, entre autres choses, on provoque pareillement, chez eux, d’abondantes transpirations pour les rendre plus légers, avant qu’ils ne montent à cheval pour courir.
20, Marée.—Foule; comme on dit «les flots de la multitude».
22, Grece.—Les Turcs; mais cette situation a pris fin en 1830, époque à laquelle une insurrection datant de 1821 et la bataille navale de Navarin, gagnée en 1827 par les flottes combinées de France, d’Angleterre et de Russie, rendirent à la Grèce son indépendance.
32, Inconuenient.—C’est actuellement encore, en Europe, une des causes de guerre des plus à redouter que de servir de palliatif à des difficultés économiques, ou de dérivatif à des difficultés de politique intérieure, qui vont croissant sans cesse par suite de l’aveuglement, de l’inertie et de la division des conservateurs et, d’autre part, de l’esprit de plus en plus entreprenant et des exigences de plus en plus grandes des socialistes.
39, Carthaginois.—Carthage, située non loin de l’emplacement où se trouve actuellement Tunis, devenue la capitale d’une république maritime très puissante, et la rivale de Rome, eut à soutenir contre celle-ci de longues luttes connues sous le nom de «guerres puniques», qui se terminèrent par la prise et la destruction de la cité africaine (146).
39, Bretigny.—Froissart, I, 213.—Le traité de Brétigny (1359), par lequel le roi Jean le Bon, fait prisonnier à la bataille de Poitiers, abandonnait à l’Angleterre, pour racheter sa liberté, toutes les conquêtes faites par ses prédécesseurs, ne fut pas reconnu par les États généraux convoqués à cet effet par le Dauphin. La guerre reprit alors de plus belle, pour ne se terminer qu’en 1453, par la bataille de Castillon; elle avait duré cent quinze ans.
2, Outre-mer.—Allusion à une expédition en Angleterre, méditée vers 1338 par Philippe IV de Valois, pour laquelle il avait réuni vingt à trente mille hommes, et que devait commander son fils Jean, duc de Normandie, depuis Jean le Bon, alors âgé de 20 ans; cette expédition n’eut pas lieu, le roi d’Angleterre ayant pris lui-même l’offensive et envahi la France.
10, Ruine.—C’était l’avis de l’amiral de Coligny; et, s’il se trouvait à Paris lors de la S.-Barthélemy, c’est qu’il était question, à ce moment, entre le roi et lui, d’une guerre dans les Pays-Bas devant servir de dérivatif à nos troubles intérieurs d’alors, guerre dans laquelle il eût exercé un commandement.
13, Commodité.—«La guerre n’est qu’un instrument de la politique.» Clausewitz.
14, Virgo.—Némésis, déesse de la vengeance, chargée de punir le crime et de renverser une insolente prospérité; surnommée Rhamnusia, de ce qu’elle avait un temple à Rhamnus, bourg de l’Attique.
20, Elotes.—Plutarque, Lycurgue, 21.—Elotes ou Ilotes; à l’origine ce nom désignait les habitants d’Hélos, ville de Laconie (Grèce anc.), prise et détruite en 1059 par les Lacédémoniens qui les réduisirent en esclavage. Il fut ensuite étendu à tous leurs esclaves indistinctement, qu’ils traitaient avec une extrême dureté, les entretenant soigneusement dans l’état le plus abject.
27, Art.—Celse dit à cet égard: «Ceux qui pratiquent la médecine rationnelle, estiment qu’Hérophile et Erasistrate agissaient bien, en obtenant des rois que les criminels leur fussent livrés pour être disséqués vivants, et qu’on pût observer, alors qu’ils étaient encore pleins de vie et avant qu’ils eussent rendu l’âme, la disposition, la couleur, la forme, les dimensions des organes»; mais il ajoute: «disséquer ainsi des hommes vivants, est aussi cruel qu’inutile».
35, L’empereur.—Ce ne fut qu’en 403 que les combats de gladiateurs furent abolis par l’empereur Honorius, après que les spectateurs eurent tué à coups de pierre un anachorète, nommé Télémaque, qui, venu exprès de l’Orient à Rome, s’était jeté entre les combattants pour les séparer.
17, Rumpi.—Dans les combats de gladiateurs, le vaincu devait mettre bas les armes et était égorgé, à moins que les spectateurs ne voulussent lui sauver la vie; le vainqueur les consultait du regard: le bras étendu, le poing fermé, le pouce détaché et en dessus, marquait qu’il eût à achever son adversaire; le poing renversé, le pouce en dessous, qu’on faisait grâce.
30, Interest.—Le fait était assez fréquent jadis: le landgrave de Hesse, le duc de Brunswick en Allemagne vendaient leurs sujets aux recruteurs anglais; le prince de Waldeck, aux Hollandais; les Suisses se vendaient eux-mêmes. A la bataille de S.-Quentin, il y avait des Allemands des deux côtés; de même des Suisses, à la bataille de Fontenoy, etc.
CHAPITRE XXIV.
31, Romaine.—Ce qui a le plus contribué à rendre les Romains les maîtres du monde, c’est qu’ayant combattu successivement tous les peuples, ils ont toujours renoncé à leurs usages, sitôt qu’ils en ont trouvé de meilleurs. Montesquieu.
4, Suetone.—César, 56.
10, Moy.—Cicéron, Epist. fam., VII, 5.—La lettre en question porte M. Orfius.—Quelques-uns ont regardé l’offre de César comme un badinage, Montaigne la prend au sérieux et il a probablement raison; ces chefs de peuplade étaient de fait des lieutenants de la république romaine et il n’y a pas à s’étonner qu’elle pourvût à leur nomination.
12, Deiotarus.—Cicéron, De Divinat., II, 37.—Déjotarus était allié de Rome; malgré ses traités avec elle, César lui enleva son royaume parce qu’il avait suivi le parti de Pompée auquel il s’était lié d’amitié; plus tard, il le reçut en grâce.
13, Gentil-homme.—Les éd. ant. à 88 ajoutent: sien amy.
16, Escus.—Suétone, César, 54, indique comme se montant à six mille talents (27.900.000 fr.) la contribution que versa Pompée.
19, Marcus Antonius.—Plutarque, Antoine, 8.
34, Immortels.—En 170. Tite-Live, XLV, 12 et 13.
5, Reges.—Citation que Montaigne a traduite, avant de la donner.—C’est le régime qui, de nos jours, subsiste dans la partie de l’Hindoustan soumise à la domination de l’Angleterre, qui en a absorbé une portion, en administre une autre directement et a laissé le reste à ses princes indigènes respectifs à titre de tributaires, vassaux ou alliés. C’est ce qu’elle est en train d’appliquer à l’Égypte; et ce que nous-mêmes pratiquons en Tunisie, sous le nom de protectorat.
10, Acquis.—En 1526, Jean Zapoly disputait à Ferdinand d’Autriche (le frère de Charles-Quint) le trône de Hongrie: battu par son compétiteur, il s’adressa à Soliman dont il se reconnut le vassal, et en obtint, en retour, l’investiture d’une partie de ce royaume et des secours.
CHAPITRE XXV.
21, Appian.—Guerres civiles, IV.
29, Hebetée.—Affaiblie.
34, Liaisons.—Bandages.
1, Froissard.—Mémoires, 1, 29.
8, Bicles.—Ceux qui louchent.
11, Mot.—C’est ce qui arrive fréquemment quand, pour se moquer, les enfants contrefont un tic, un défaut de prononciation: c’est ce qui leur fait contracter si facilement et d’une façon inconsciente l’accent des pays où ils séjournent; c’est également un effet analogue qui fait qu’entendre tousser, voir bâiller nous provoque à le faire nous-mêmes. Cela avait donné lieu chez les Grecs à un proverbe que rapporte Plutarque: «Si tu fréquentes un boiteux, tu apprendras à clocher»; et à ce propos, Montaigne dit encore au chap. XX du livre I des Essais (I, 132): «Vn tousseur continuel irrite mon poulmon.»
15, Seiourner.—Et de me reposer dessus.
19, Pline.—Nat. Hist., VII, 50.
22, Ailleurs.—«Fortis imaginatio generat casum, disent les clercs»; entrée en matière du ch. XX du liv. I (I, 132).
28, Lucilius.—Sénèque, Epist. 50.
CHAPITRE XXVI.
20, Barbares.—Tacite, Ann., XII, 47.—Cette coutume était en usage chez les peuples de l’Asie septentrionale: les Ibériens, les Arméniens, les Parthes.
26, Pollere.—Les éd. ant. aj.: qui signifie exceller sur les autres.
6, Populariter.—V. N. II, 558: Rumpi.
11, Armées.—Suétone, Auguste, 24.
12, Italique.—Ou sociale; guerre entre les Romains et leurs alliés les peuples d’Italie, qui réclamaient, pour prix de leurs services, le droit de bourgeoisie et les privilèges attachés au titre de citoyen romain (91 à 87).
15, Voyage.—Les éd. ant. portent: cette guerre, au lieu de: «ce voyage».—Valère Maxime, V, 3, 3.—On croit que c’est de là (a pollice trunco, de ce qu’on se mutilait le pouce pour se dispenser du service militaire) que vient le mot poltron (V. N. II, 542: Appoltronny).—En 367, l’empereur Valentinien condamna à être brûlés vifs ceux qui se coupaient les doigts pour se soustraire à la milice. De nos jours, en France, ceux qui se rendent coupables de faits semblables ou analogues, ce qui arrive de temps à autre, sont punis judiciairement et, à l’expiration de leur peine, envoyés dans des corps de discipline où ils accomplissent leur temps de service.
15, Quelqu’vn.—Ce quelqu’un c’est Philoclès, un des généraux d’Athènes, dans la guerre du Péloponnèse, qui, lui-même fait prisonnier un peu plus tard à la bataille d’Ægos Potamos (404), fut mis à mort avec 3.000 autres prisonniers. Plutarque, Lysandre, 5; Xénophon, Hist. Gr., II; etc.
18, Æginetes.—En 458. Cicéron, De Off., III, 11; Valère Maxime, IX, 2; mais Elien, Plutarque et Xénophon, qui relatent également le fait, disent que ce fut pour les mettre hors d’état de manier la lance, sans les rendre incapables de ramer. Peut-être est-ce en retour que fut rendue à Égine cette loi qui ordonnait de mettre à mort tout Athénien qui aborderait dans l’île, loi dont faillit être victime Platon quand il y fut déporté par ordre de Denys le Tyran; il n’aurait dû son salut qu’à ce que quelqu’un aurait dit par dérision que ce n’était qu’un philosophe, sur quoi on se borna à l’agréer comme esclave.—A certains moments de l’empire romain, on coupa aussi les jarrets aux prisonniers de guerre pour les empêcher de servir plus tard.
19, Lacedemone.—Plutarque, Lycurgue, 14.
CHAPITRE XXVII.
21, Couardise.—Lâcheté, poltronnerie.
25, Friuoles.—Robespierre, au plus fort de la Terreur, voyant pêcher, après un repas qu’il avait fait à la campagne, s’apitoyait, dit-on, sur les souffrances des poissons qui, une fois pris, mouraient hors de l’eau. Mme Campan.
28, Andromache.—Hécube, pendant la guerre de Troie, perdit presque tous ses enfants au nombre de dix-neuf, vit massacrer sous ses yeux son mari, sa fille Polyxène, son petit-fils Astyanax, fils d’Hector, et devint l’esclave d’Ulysse, tandis que sa fille Andromaque devenait celle de Pyrrhus, fils d’Achille, qui l’épousa. Les malheurs de l’une et de l’autre ont fait le sujet de tragédies grecques et aussi de tragédies françaises.
29, Iours.—Plutarque, Pélopidas, 15.—Alexandre de Phères, assistant à une représentation des Troades d’Euripide, sortit brusquement du théâtre et fit dire à l’acteur de ne pas s’inquiéter et de continuer à bien jouer son rôle; que s’il était sorti, ce n’était pas qu’il fût mécontent de son jeu, mais qu’il avait honte que lui, qui sans pitié envoyait tant de gens à la mort, on le vît s’attendrir sur les malheurs d’Hécube et d’Andromaque.
2, Voir.—S’arrête, dès qu’elle voit.
8, Gendarme.—S’accoutume au meurtre et devient cruel par l’habitude de plonger, jusqu’aux coudes, ses mains et ses bras dans le sang.—«Se gendarmer», c’est se mettre en humeur, en posture d’homme qui veut combattre.
20, Bouquer.—«Faire bouquer quelqu’un», c’est lui causer du dépit, le mortifier, le faire enrager, l’obliger à céder. Au propre, c’est, en se jouant, donner sur les joues du patient, qui les tient gonflées, deux petites tapes, du plat et du revers de la main, qui l’obligent à desserrer et à laisser échapper l’air qui sort avec un bruit semblable à celui d’un petit coup de baguette sur un tambour.
29, Commise.—Plutarque, Des délais de la Justice divine, 2.—Montaigne se trompe en disant que Bias plaignait les Orchoméniens; c’est Patrocle, un des interlocuteurs de ce dialogue de Plutarque, qui cite cet exemple de la vengeance trop tardive des dieux, sans indiquer en quoi a consisté cet acte de trahison, ni à quelle époque il a été commis, mais seulement que de ce fait les Orchoméniens auraient perdu enfants, parents et amis, et que ce ne serait que longtemps après que Lyciscus aurait été atteint d’une maladie par suite de laquelle son corps tombait en décomposition et que lui-même considérait comme une punition du ciel.
37, Pistolade.—Coup de pistolet.
16, Vertu.—Courage.
19, Vaincre.—Les éd. ant. portent: mais lâchement, sans combat et sans hazard; au lieu de: «plus seurement qu’honorablement».
24, Aueugle.—«Faire la figue à quelqu’un», c’est lui faire la nique, lui tirer la langue, lui rire au nez, en un mot se moquer de lui en lui faisant quelque grimace (V. N. I, 124: Figue).
24, Sourd.—«Dire des pouilles à quelqu’un», c’est lui dire des injures, des paroles méprisantes.
27, Morts.—Pline, dans sa Préface à Vespasien. C’est Plancus lui-même qui fit la réponse donnée par Montaigne comme exprimée en son nom.
29, Noisif.—Querelleur; dérive de noise que l’on retrouve encore dans cette expression souvent employée: «chercher noise».
29, Aristote.—Diogène Laerce, IX, 18.
32, Coup.—Les éd. ant. ajoutent: de baton.
8, Combat.—C’est ce à quoi on est revenu de nos jours.
33, Henry.—Chroniques de Monstrelet, I, 9.—En 1371; le duc d’Orléans, frère de Charles VII et père de Dunois, accusé d’avoir contribué à la maladie du roi devenu fou, et de le tenir en chartre privée, avait provoqué Henry IV roi d’Angleterre, qui avait tenu ce propos; chacun devait être accompagné de cent chevaliers. Henry n’accepta pas le défi, disant qu’il n’était pas dans les usages de ses prédécesseurs que le roi se mesurât avec quelqu’un qui n’était pas de son sang (de moindre état qu’il n’était lui-même).
34, Lacedemoniens.—Hérodote, I, 82; Pausanias, X, 9; Athénée, XV, 6; etc.—Les Argiens et les Lacédémoniens, en querelle au sujet du territoire de Thyrée, convinrent de remettre leurs intérêts à trois cents de chaque parti. Le combat eut lieu; il ne demeura que deux Argiens et un Lacédémonien du nom d’Othryadès; la nuit les sépara; les deux Argiens se retirèrent; Othryadès, resté seul, érigea un trophée avec les armes des ennemis, y traça de son propre sang une inscription qui attribuait la victoire à son pays et se donna la mort pour ne pas survivre à ses compagnons. Mais cela ne servit de rien; on ne s’entendit pas sur le vainqueur; les deux armées en vinrent aux mains et la victoire demeura à Sparte (VIe siècle).
35, Curiatiens.—Le combat eut lieu à la vue des deux armées, pour décider à laquelle, de Rome ou d’Albe, appartiendrait la suprématie. Trois frères de part et d’autre, les Horaces pour Rome, les Curiaces pour sa rivale, étaient en présence: au premier choc deux Horaces tombèrent, les trois Curiaces étaient blessés. Le survivant des Horaces, craignant de succomber contre ses trois adversaires réunis, feignit de prendre la fuite afin de les diviser, persuadé qu’ils le suivraient plus ou moins vite suivant la gravité de leurs blessures. Sa prévision se réalisa; revenant alors impétueusement sur ses pas, il immola successivement ses trois adversaires et assura ainsi le triomphe de sa patrie (667).—En citant ce fait, Plutarque en conte un autre, à peu près identique dans ses détails, survenu lors d’une guerre entre les habitants de Tégée et de Phenée (Grèce); des deux côtés, les champions étaient trois frères jumeaux.
39, Meslé.—A ajouter à cette nomenclature le combat des Trente, célèbre défi porté en 1351 par Jean, sire de Beaumanoir, au châtelain anglais de Ploërmel. Trente chevaliers bretons et autant d’anglais en vinrent aux mains au pied du chêne Mi-voie (Bretagne); huit anglais furent tués, les autres se rendirent. Dans l’ardeur de l’action Beaumanoir blessé, épuisé de fatigue et de la perte de son sang, faiblissait: «Bois ton sang, Beaumanoir!» lui cria son frère qui était au nombre des combattants. Bouillet.
39, Domestique.—De famille.—Ce duel, dont il va être parlé, Montaigne n’en fait pas mention dans son journal de voyage, ce qui donne à penser qu’il a dû avoir lieu après son départ d’Italie, où son frère l’avait accompagné et où il demeura après lui; on peut voir tout le détail de cette affaire dans les Mémoires de Brantôme, touchant les duels.
29, Theorique.—Nous disons aujourd’hui théorie, quoique nous ayons conservé pratique; c’est une bizarrerie de l’usage.—Rabelais, I, 5, dit comme Montaigne: «Ie n’entends point la théorique; la practique, ie m’en aide quelque peu.»—Brantôme, parlant des duels, dit pareillement: «Les Italiens en ont tres bien sceu les théoriques et practiques.»
34, Germains.—Tite-Live, XXVIII, 21.—Tous deux se disputaient la succession à une principauté; ils résolurent de s’en remettre au sort des armes. Ils se battirent en présence de l’armée romaine, dans l’arène des gladiateurs à Carthage (et non en Espagne), alors qu’on y célébrait des jeux funèbres à l’occasion de la mort des deux Scipion (206).
15, Butes.—C’étaient des tirs organisés pour l’arc et l’arbalète, avec ou sans banquette pour le tireur d’une part; et de l’autre, à distance convenable, une levée de terre contre laquelle se plaçait le but à atteindre comme il en existe encore beaucoup dans le Nord de la France. Le mot «butes» signifie ici ce genre de tir, plutôt que son aménagement.
Tous les exercices concourant au développement de la force et de l’adresse, sont à pratiquer, et notamment ceux qui sont d’utilité immédiate à la guerre. A ce titre le tir à l’arme de guerre est particulièrement à encourager, car la défense nationale y est intéressée: les efforts individuels de quelques-uns à cet égard sont insuffisants, il faut que cela devienne une institution d’État. Pour ce faire, et c’est possible, facile même, il faudrait que ces tirs à la cible pussent s’effectuer au centre même des populations, et nonobstant n’offrir aucun danger; être gratuits dans une certaine mesure, pour tout individu de nationalité française, de l’âge des enrôlements volontaires à celui du passage dans l’armée territoriale. On peut satisfaire aux deux premières conditions, en établissant ces tirs souterrainement, dans les villes, sous les promenades publiques ou les principales artères (à Paris par exemple sous l’esplanade des Invalides, aux Tuileries sous la terrasse du bord de l’eau, etc.), et dans les localités moindres, dans le voisinage immédiat, à l’instar des tirs forains. On emploierait à cet effet des tuyaux métalliques de 2 à 5m de longueur, s’ajoutant les uns aux autres, de forme appropriée, de 1m de hauteur sur 0.60 de largeur, d’épaisseur variable suivant qu’ils seraient en acier ou en fonte, suffisante pour n’être pas perforés par la balle; leur longueur totale permettant le tir à 200m. A l’origine du tir serait, pour le personnel et les tireurs, une construction également souterraine analogue à celle qui vient d’être édifiée pour un tout autre usage, à Paris, près de l’église de la Madeleine; l’autre extrémité serait aménagée pour les marqueurs; un fil électrique les relierait. Des organisations analogues ont déjà fonctionné à Lisieux, à Bergerac, et donnent les meilleurs résultats.—Le tir aurait lieu les dimanches et jours de fête. Le nombre des cartouches allouées annuellement à titre gratuit aux seuls individus dont il a été question ci-dessus, pourrait être de 36 à chaque ayant-droit, qui aurait la faculté de les tirer quand bon lui semblerait par série de six, en trois séances au moins: l’État trouverait là un heureux moyen de renouveler ses approvisionnements de mobilisation; on intéresserait les tireurs, en leur tenant compte des résultats lors de l’appel sous les drapeaux ou des périodes d’instruction. L’installation de ces tirs, et il devrait en être créé un au moins par canton, serait peu considérable: 3.000 fr. environ; elle serait à la charge des communes du canton. L’État pourrait leur venir en aide par des subventions, cela constituant au premier chef une dépense d’utilité publique indispensable pour que le tir, qui importe à un si haut degré à notre sécurité et à notre indépendance, pénètre dans les mœurs.
15, Tournois.—Sorte de fête publique, très en faveur au moyen âge, où les chevaliers se mesuraient entre eux à cheval, armés de pied en cap, mais à armes courtoises. Ces jeux, qui souvent entraînaient mort d’homme, prirent fin en France en 1559, à la suite d’un accident survenu au cours de l’un d’eux et qui causa la mort du roi Henri II.
15, Barrieres.—C’était une variante de ce qui se pratiquait dans les tournois: au lieu d’avoir liberté entière de mouvements, les deux adversaires étaient séparés par des barrières qui empêchaient le combat corps à corps.
19, Dommageables.—Par ce qu’il a dit du duel et ce qu’il dit ici de l’escrime—qui en est l’exercice préparatoire—on voit que Montaigne réprouve à la fois l’un et l’autre. En ce qui touche le duel proprement dit, cette réprobation est parfaitement justifiée, c’est un reste d’institutions barbares où le bon droit n’entre pour rien et a trop souvent le dessous, mais il est dans les mœurs et par cela même difficile à déraciner, au point que la peine de mort édictée contre les duellistes, et appliquée à certains moments, n’a pu en avoir raison. De nos jours, où les lois, à cet égard, sont absolument lettre morte, il est surtout cultivé par de faux braves auxquels il sert à faire de la réclame. Il n’en serait pas ainsi si on ridiculisait comme elles le méritent ces rencontres sans motifs sérieux, aboutissant à des résultats qui ne le sont pas davantage. Si, chaque fois, elles devaient se poursuivre jusqu’à la mise hors de combat de l’un des deux adversaires et n’étaient pas arrêtées à la moindre égratignure, ou à la première balle tirée même perdue, leur nombre s’en réduirait déjà considérablement; et bien plus encore si chaque fois aussi la justice, comme c’est son devoir, citait devant elle sans exception et non à sa fantaisie tous ceux ayant soit comme adversaires, soit comme témoins participé à un duel, quel qu’en ait été le résultat, et frappait impitoyablement pour fait ou tentative d’homicide ou de coups et blessures celui qui serait reconnu avoir à sa charge les torts ayant rendu le duel indispensable ou l’ayant amené abusivement. Dans ces conditions, on se respecterait davantage les uns les autres, tout en n’allant sur le terrain que pour des raisons en valant la peine, si toutefois il en existe qui justifient que, quelle que soit l’inégalité que crée entre les adversaires la pratique des armes, se faire tuer ou blesser répare une injure dont on a été victime. Cela est tellement absurde qu’il serait tout aussi efficace et bien plus logique de la part de ceux qui sont d’accord pour régler leurs querelles de la sorte, de fixer d’abord à l’amiable, par l’intermédiaire de leurs témoins, la réparation jugée nécessaire: la mort, une balle ou un coup de poignard dans la poitrine, dans un membre, ou encore payer une amende, accomplir tel ou tel acte, satisfaire à telle convention, suivant ce qui aurait été ainsi décidé, et tirer au sort auquel des deux il échéerait de s’exécuter. De cette façon, les chances seraient égales, le but ne serait pas dépassé, et la justice n’aurait pas à intervenir; sans compter que si hétéroclite que cela paraisse, ce mode de réglement a parfois été déjà employé.
Quoi qu’il en soit, le duel est et restera toujours une institution qui n’a pas le sens commun:—Tandis qu’il est permis aux personnes soi-disant distinguées de se faire justice à coups d’épée ou de pistolet, il est défendu à l’homme du peuple de se la faire à coups de bâton (Colonel Perron).—On rougit dans le monde honorable de ruiner un joueur qui ne sait pas jouer, on ne rougit pas d’ôter la vie à qui ne sait pas se défendre.—Ces rencontres sont tout à l’avantage de l’homme immoral qui, parce qu’il sait manier une arme, se croit tout permis; elles ne prouvent même pas la véritable bravoure, s’allient souvent aux vices les plus dégoûtants et même avec la lâcheté militaire; les plus hardis bretteurs ne sont parfois que de mauvais soldats (le journal l’Eclair).
22, Confus.—Erreur évidente; il faut lire «consul», comme le porte du reste l’ex. de Bordeaux.—Le fait est rapporté par Valère Maxime, II, 3, 2.
28, Pharsale.—Plutarque, César, 12.—La recommandation faite par César à ses troupes, de frapper leurs adversaires plutôt au visage, tenait à ce que la cavalerie de Pompée était recrutée en majeure partie parmi les jeunes patriciens, qui appréhendaient surtout de se voir défigurés. Ce qu’avait prévu César, arriva: détournant la vue, se couvrant la tête pour se préserver la face, ils ne tardèrent pas à prendre honteusement la fuite, ce qui causa la perte du reste de leur armée.
31, Philopœmen.—Plutarque, Philopœmen, 12.
1, Cape.—En habit de guerre.
2, Sachez.—Platon, dans le dialogue de ce nom.
8, Platon.—Traité des Lois, VII.
9, Cecyo.—L’ex. de Bord. porte Epicius, au lieu d’«Epeius», et Cercyo au lieu de «Cecyo».
11, Conferent.—Contribuent. «Conférer», dans ce sens, est purement latin.
12, Maurice.—Philippe est désigné sous le nom de Philippicus et indiqué comme beau-frère et non comme gendre de l’empereur Maurice, par Zonaras et Cedrenus.—Phocas, avant de tuer l’empereur qu’il avait fait prisonnier, fit égorger, en présence de sa victime, ses cinq enfants. La nourrice du plus jeune, pour le sauver, lui avait substitué le sien; Phocas l’apprit et le fit livrer au bourreau.
26, Macedoine.—Tite-Live, XL, 3 et 4.—Ce Philippe est celui qui, à deux reprises, fit la guerre aux Romains, et, en dernier lieu, subit à Cynoscéphales, en Thessalie (Grèce), une défaite qui fut suivie d’un traité honteux; il allait reprendre les hostilités, quand il mourut. De naturel très soupçonneux, il alla, sur de faux rapports, jusqu’à faire mettre à mort son propre fils.
28, Resoudre.—Se rassurer.
37, Propos.—Ce passage «Les belles matieres... à mon propos», ne figure pas dans l’ex. de Bord. Son intercalation coupe assez inopportunément le récit, qui est tiré de Tite-Live, XL, 4, que toutefois Montaigne ne s’est pas astreint à traduire bien fidèlement.
8, Roy.—Qui ordonnait de saisir les enfants de tous ceux qu’il avait fait tuer.
19, Ioindre.—Comme ces gardes étaient sur le point de les atteindre.
24, Traictes.—Tirées du fourreau, mises à nu; du latin tractus.
26, Forte.—Plus noble, plus courageuse.
34, Maistres.—Le fait se passait en 185.
38, Vengeance.—Allusion au mot de Caligula: «Je veux qu’il se sente mourir.» Suétone, Caligula, 30.
1, Engins.—C.-à-d. les voilà forcés de trouver des moyens par lesquels ils puissent savourer, à la fois, complètement et lentement le plaisir de la vengeance.
4, Cruauté.—Cette même pensée se trouve déjà exprimée dans les mêmes termes, liv. II, ch. II (II, 102), et ce fut un des passages des Essais dont la censure, à Rome, fit reproche à son auteur.—Là se borne l’appréciation de Montaigne sur la peine de mort, et les philanthropes de nos jours qui en poursuivent l’abolition ne sauraient s’appuyer sur lui. Cette peine n’est pas à supprimer, même à l’égard des criminels ne jouissant pas de la plénitude de leurs facultés; ils ont montré qu’ils sont un danger public, comme l’est un chien enragé, la société a le devoir de se débarrasser d’eux comme de lui. Quant à son efficacité préventive, elle n’est pas niable, pas plus que celle des châtiments corporels si malencontreusement supprimés en France. Ce qui restreint l’effroi salutaire qu’elle inspire c’est surtout l’espoir d’y échapper, depuis que les jurys et le chef de l’État ont exigé en principe, les uns les circonstances atténuantes lors même qu’il n’y en a pas, l’autre la grâce octroyée lors même qu’elle est le moins justifiée. Par trop de sensiblerie pour les mauvais, on en est arrivé à compromettre la sécurité des bons: l’assassinat, les attaques nocturnes sont devenus en France de pratique courante; à Londres, qui a six millions d’habitants, on ne compte en moyenne par an que seize à vingt assassinats, tandis qu’à Paris, où la population est moitié moindre, il y en a dix fois plus. C’est qu’aussi chez nos voisins d’outre-Manche tout assassin est pendu: il n’y a ni circonstances atténuantes, ni distinction de sexe; toute attaque nocturne est punie du «Chat à neuf queues», sorte de knout, sans préjudice du «hard labour» (travaux forcés), et celui qui en a goûté une fois, ne s’expose guère à le recevoir une seconde.—Quant à la publicité des exécutions, elle est sans utilité et a même des inconvénients, dont le plus grave est de diminuer la crainte qu’elle inspire, en montrant combien c’est peu de chose; l’abus qu’on en fit sous la Terreur n’avait-il pas enlevé à la plupart des prisonniers déférés au Tribunal révolutionnaire, certains dès le premier moment du sort qui les attendait, et familiarisés avec cette idée, les préoccupations inhérentes d’ordinaire à ceux qui sont sous le coup d’accusations capitales!
10, Iosephe.—Dans l’Histoire de sa vie, vers la fin.
16, Mechmed.—Chalcondyle, Hist. des Turcs, liv. X.—Mahomet II; s’empara de Constantinople dont il fit sa capitale et subjugua la presque totalité des provinces qui font partie ou relèvent encore actuellement de la Turquie d’Europe; à la gloire des armes, joignit celle des lettres; l’histoire lui reproche cependant des actes d’une cruauté révoltante.
10, Simeterre.—Ou mieux cimeterre; sabre à lame fort large et recourbée dont faisaient particulièrement usage les Turcs.
27, Cræsus.—Hérodote, I, 92; Plutarque, De la malignité d’Hérodote.
29, Foullon.—Artisan qui fabriquait le drap.
30, Cardes.—Sorte de peignes formés de pointes de fer très fines, disposées sur un grand nombre de rangées, servant à démêler la laine, la bourre ou la soie dont on fait les étoffes.
33, Vayuode.—Titre porté autrefois par les princes des principautés danubiennes.
38, L’enuie.—Toute la haine qu’inspiraient les méfaits de l’un et de l’autre. Du latin invidia qui a cette signification; exemple, parmi tant d’autres, de la propension de Montaigne à écrire le français en latin, y transposant et adaptant tous mots, expressions et tournures de phrase lui semblant propres à mieux rendre sa pensée.
3, Suitte.—Chronique de Carion et Annales de Silésie.—En 1514. A l’occasion d’une croisade projetée en Hongrie contre les Turcs, un soulèvement de gens sans aveu éclata. Ils prirent pour chef Georges Sechel, qui commit à l’égard de la noblesse les actes les plus horribles. Vaincu en diverses rencontres et en dernier lieu à Temesvar, Sechel expia ses forfaits par le supplice qu’indique Montaigne: nu et enchaîné sur un chevalet, on lui mit sur la tête une couronne de fer ardent; on le saigna et on fit boire son sang à son frère; puis après lui avoir refermé les veines, on fit dévorer à belles dents son corps par vingt de ses complices et ce qui demeura de son corps fut haché, bouilli et rôti, et on le leur fit manger; eux-mêmes, on les fit périr ensuite dans d’affreux supplices.
CHAPITRE XXVIII.
4, Caton le Censeur.—Fut préteur; consul, obtint par ses succès en Grèce les honneurs du triomphe; enfin censeur, fonctions qu’il exerça avec une grande sévérité. Dans ses dernières années, redoutant la rivalité de Carthage, il terminait tous ses discours au Sénat, quel qu’en fût l’objet, en disant qu’il fallait la détruire. On lui a reproché son avarice (V. N. I, 564: Dehors; N. II, 110: Seruy) et trop de penchant pour le vin (V. N. I, 616: Virtus).
4, Ieune Caton.—Montra de bonne heure une âme ferme et courageuse qui ne se démentit jamais. Lors de la rivalité de César et de Pompée, il se déclara pour ce dernier; du reste bien avant déjà il s’était prononcé contre César dont il redoutait l’ambition et qui avait été l’amant de sa sœur. Après la défaite de Pompée, il rallia son armée et passa en Afrique pour continuer la résistance; la bataille de Thapsus anéantit ses espérances; enfermé dans Utique, il s’y donna la mort, et de ce fait a été appelé Caton d’Utique pour le distinguer de son grand-oncle Caton le Censeur (V. I, 502 et N. Escarmouche; N. II, 430: Premier; N. II, 434: Autre; N. I, 404: Catoni).
5, Apparient.—Les éd. ant. portent: font à mon opinion grand honneur au premier: car ie les trouue eslongnez d’vne extreme distance; au lieu de: «apparient... siecle».
6, Visages.—C.-à-d. le premier montra son beau naturel sous plus d’aspects différents.
6, Precelle.—L’emporte; du latin præcellere, surpasser, vaincre.
11, Scipion.—L’animosité de Caton le Censeur contre Scipion l’Africain ne prit jamais fin. Non content de l’attaquer lui-même, il lui suscita des accusateurs (V. I, 660); et, ne parvenant pas à l’atteindre à cause de son illustration, il poursuivit son frère Lucius qu’il fit condamner à une amende excédant ses ressources et plus tard, lorsque lui-même fut censeur, il alla jusqu’à le priver de son cheval, pour insulter à la mémoire de son frère.
13, Dit.—Plutarque, Caton le Censeur, 1.
14, Grecque.—Caton avait quatre-vingts ans quand il commença à se livrer à l’étude de cette langue.
17, Enfantillage.—En enfance. Cette expression de Montaigne est de celles que Pasquier lui reproche d’avoir employées dans un sens inaccoutumé.
17, Et tout.—Aussi. On dit encore dans certaines parties de la France, notamment en Sologne, «itout», pour aussi.
18, Patenostre.—L’oraison dominicale, le Pater noster, comme l’on dit quelquefois, ou simplement le Pater, expression d’usage courant. Patenostre, au dire de Pasquier, était à l’époque une expression purement gasconne: «Dieu nous garde des patenostres de M. le Connétable», disait-on alors, en parlant du connétable de Montmorency qui, dévot autant que sévère, marmottait toujours Pater, Credo et Ave Maria, ne s’interrompait que pour ordonner des mesures de rigueur et reprendre aussitôt ses oraisons.
21, Gaigna.—Plutarque, Parallèle de Flaminius avec Philopœmen.—En 197; à la bataille de Cynoscéphales, où il défit Philippe V, roi de Macédoine.
22, Honestis.—Dans Juvénal, d’où elle est tirée, cette phrase a un sens tout autre que celui dans lequel elle est employée ici.
24, Encore?—Plutarque, Apophth. des Lacédémoniens. Xénocrate, dit-il, venait à l’école d’Eudeminondas pour y apprendre la vertu: «Quand en usera-t-il, s’il en est encore à la chercher?» aurait observé celui-ci. Le fait ainsi présenté semble douteux, Xénocrate ayant été des disciples de Platon, au nombre desquels comptait également Eudeminondas, et ayant dirigé l’Académie, après Speusippe, pendant vingt-cinq ans; mais il se peut que Xénocrate qui, lui aussi, l’avait eu pour auditeur, allât parfois l’entendre quand il en vint lui-même à professer.
25, Philopœmen.—Plutarque, Philopœmen, 12.
1, Sages.—Cette maxime est tirée de Sénèque, Epist. 36.
20, Cettuy-cy.—Caton le Censeur.
23, Abecedaire.—Sénèque, Epist. 36.
40, Nuict.—Sénèque, Epist. 71 et 104. Le jour où Caton échoua dans l’obtention de la préture, dit l’auteur latin, il alla jouer à la paume; Montaigne parle à cette occasion de la nuit au lieu du jour, probablement par licence littéraire, pour mieux établir le parallèle entre ce fait et celui de sa mort.
CHAPITRE XXIX.
6, Quelqu’vn.—Sénèque, Epist. 73, et De Providentia, 5.—Cela rappelle ces vers de Sylvain Maréchal, un des chantres de la Liberté et de la déesse Raison (1750 à 1803):
8, Imbecillité.—La faiblesse; du latin imbecillitas, qui a même signification.
9, Dieu.—Cette même pensée a été bien souvent exprimée.—Cicéron: «Il n’est point de puissance que la force ou le fer ne viennent à bout de briser ou de détruire; mais se vaincre soi-même, étouffer son ressentiment, modérer sa victoire..., c’est là un héroïsme qui vous élève au-dessus des plus grands hommes ou plutôt vous assimile aux dieux eux-mêmes.»—P. Syrus: «On vainc deux fois quand, victorieux, on se vainc soi-même.»—Salomon: «Qui se domine est plus grand qu’un conquérant.»—Sénèque: «Il n’y a pas plus puissant, que celui qui se possède.»—Th. Corneille:
La Fontaine: «La plus belle victoire est de vaincre son cœur.»
26, Manque.—Défectueux, imparfait, faible.
28, Iours.—Les actes de la vie ordinaire et sa manière d’être habituelle.
6, Conte.—Diogène Laerce, 62 et 63.
11, Amis.—Montaigne a dit précédemment (liv. II, ch. XII, vol. II, p. 236) que ceux qui dépeignent ainsi Pyrrhon, enchérissent sur sa doctrine.
27, Discours.—Diogène Laerce, 66.
28, D’icy.—Du manoir de Montaigne.
31, Bien-veignant.—L’accueillant, en manière de bienvenue.
35, Nostres.—Un fait semblable, chez un jeune gentilhomme de la Sologne, est relaté par Henry Estienne, dans son Apologie pour Hérodote, I, et se serait passé au milieu du XVIe siècle; peut-être est-ce le même auquel Montaigne fait allusion.
40, Extulerat.—Le texte de Tibulle porte extulit.
3, Cibele.—Les Galles, prêtres de Cybèle, se mutilaient eux-mêmes, en se faisant initier, coutume que l’on fait remonter à Atys leur fondateur qui, aimé de Cybèle et commis par elle à son culte, après lui avoir juré de garder la chasteté, ayant manqué à son serment, fut inspiré par la déesse d’une telle fureur qu’il se mutila lui-même.
28, Iours.—Peut-être Marco Polo, vénitien, dont les voyages en Asie, notamment en Tartarie, où cette coutume semble avoir existé, bien qu’effectués à la fin du XIIIe siècle, n’ont été publiés qu’au commencement du XVIe.
1, Baller.—Danser, de l’italien ballare qui a même signification.
17, Tristesse.—L’usage de se jeter dans les flammes à la mort du mari existe encore dans l’Inde; dans la partie soumise aux Anglais, il faut en obtenir la permission, et le nombre de ces sacrifices qu’ils ont tolérés s’est, de 1817 à 1821, en cinq ans, élevé à 3.402 (trois mille quatre cent deux)!
26, Gymnosophistes.—Quinte-Curce, VIII, 9; Strabon, XV.—Ils allaient toujours nu-tête et nu-pieds, d’où leur nom; faisaient profession de vivre dans la retraite, de fuir le mariage et de mépriser la douleur. Montaigne mentionne ici d’après Plutarque, Alexandre, 21, la mort de l’un d’eux; trois siècles plus tard, un autre nommé Zarmenochegas en agissait de même, dans Athènes, devant Auguste.
28, Façon.—Usage, coutume.
39, Fatum.—Le destin, la fatalité. Allusion aux querelles suscitées à maintes reprises, dans l’Église même, par le don de prescience attribué à Dieu, qui enlèverait à l’homme son libre arbitre, son arbitrage, comme dit Montaigne quelques lignes plus loin.
26, Sarrazins.—Cette appellation donnée au moyen âge aux armées musulmanes, viendrait de ce qu’au début certaines tribus pillardes de l’Arabie (Serrak, en arabe, signifie voleur) constituaient leur force principale.
27, S. Louys.—Atteint d’une maladie dangereuse, fit vœu d’aller combattre les infidèles. Il débarqua en Égypte où, après quelques succès, il fut battu et fait prisonnier à la bataille de Mansourah; ayant racheté sa liberté, il passa en Palestine, où il demeura quatre ans sans grands résultats. En 1270, il s’embarqua pour une seconde guerre sainte, et aborda près de Tunis; mais la peste se mit peu après dans son armée, lui-même en fut atteint et mourut.
34, Mort.—Mémoires de Joinville.
42, Improuueu.—En 1498. Savonarole, moine jacobin et partisan de la France à Florence, était accusé d’hérésie, de paillardise et de tromper le peuple dans ses prédications. Un cordelier, adversaire politique et religieux des Jacobins, offrit de démentir ses impostures et ses fausses doctrines par l’épreuve du feu: tous deux devaient ensemble monter sur un même bûcher; il ne doutait pas d’y rester, mais avec lui son adversaire qui se disait certain d’y échapper. Savonarole se présenta ayant en main le Corpus Domini (une hostie consacrée), prétendant que c’était là sa sauvegarde; le cordelier protesta, mais en vain, disant qu’il était impie d’exposer l’hostie à être brûlée, et, de ce fait, l’épreuve n’eut pas lieu. Quelques jours après, condamné par le représentant du pape, Savonarole périt dans les flammes.—Mémoires de Ph. de Comines, VIII, 19; Sismondi, Républiques italiennes du Moyen Age, XII, 98.
2, L’Huniade.—En 1448, lors de la bataille de Crassovie, où, pendant trois jours, les Hongrois résistèrent à l’armée ottomane quatre fois plus nombreuse qu’eux.
2, Donner.—«A se livrer» ou «à se choquer», batailles ayant ici le sens d’«armées».
7, Forme.—«Au gîte», terme de chasse.
29, Espaule.—Henri de Navarre, depuis Henri IV, qui par son activité, et quelquefois par sa témérité, suppléait aux ressources qui lui manquaient.
31, D’Orange.—Guillaume de Nassau, chef des Pays-Bas révoltés contre la domination des Espagnols qui avaient mis sa tête à prix. Assassiné en 1584 par un fanatique qui le tua d’un coup de pistolet, il avait déjà été, deux ans auparavant, l’objet d’une semblable tentative de meurtre.
3, Troublé.—Actuellement le poignard est bien délaissé dans le cas où ces attentats sont inspirés par la politique ou la question sociale qui sont devenues tout un; au pistolet s’est substitué le révolver; mais c’est aux explosifs que l’on a recours de préférence. Les facilités d’exécution et les chances d’échapper soi-même sont beaucoup plus grandes; le nombre des victimes étrangères à la cause est à la vérité plus considérable, mais de cela n’ont cure ceux qui, à l’abri de tout danger, ont préparé le forfait.
11, Pareil.—En 1563, par Poltrot de Méré, lequel assassina le duc de Guise qui, venant de mettre le siège devant Orléans, revenait à cheval à son logis. Contrairement à ce que dit Montaigne, l’assassin était à pied, embusqué derrière un buisson, et tira à six pas de distance; son arrestation n’eut lieu que le lendemain; après jugement, il fut écartelé. Mémoires de Brantôme, à l’art. M. de Guise, tome III.
23, L’aultre.—Balthazar Gérard, l’assassin du prince d’Orange; il fut pareillement écartelé.
25, Assassins.—Assassiniens. Peuplade de Phénicie; leur chef n’était connu des croisés que sous le nom de «Vieux de la Montagne»; l’obéissance absolue des initiés à ses ordres le faisait redouter de tous; nul n’était à l’abri des arrêts de mort qu’il prononçait.—On a beaucoup discuté sur leur nom, d’où nous avons fait assassins et qui est passé dans notre langue: les uns le font dériver du pays qu’ils occupaient et qui se serait appelé Haschischa; d’autres de ce que c’étaient des fumeurs de «haschisch» (sorte de préparation enivrante du chanvre); d’autres, de ce que leur arme de prédilection était un poignard appelé Sahs, etc.; pour nous, nous estimons qu’il vient du mot arabe asses (gardes), encore actuellement usité, parce qu’ils étaient les gardes de leur chef et que leur rôle actif en avait fait la terreur des contrées environnantes.—Consulter à ce sujet Sylvestre de Sacy.
34, Saincte.—En 1151; ce crime fut le fait d’un fanatique religieux.
34, Montferrat.—En 1192, à Tyr; Conrad qui en était seigneur y fut assassiné pour n’avoir pas fait droit à une réclamation du Vieux de la Montagne qui revendiquait, comme lui appartenant, un vaisseau dont les Tyriens s’étaient emparé.
CHAPITRE XXX.
29, Teste.—Montaigne parle ici d’un être né viable à deux corps et une seule tête. Ce cas est moins fréquent que celui de jumeaux unis tangentiellement par une membrane qu’aujourd’hui on tente parfois de disjoindre par une opération chirurgicale: tels les frères Siamois, dans la première moitié du siècle dernier, qui arrivèrent à âge d’homme et demeurèrent ainsi unis jusqu’à leur mort; celle de l’un entraîna celle de l’autre.—En Suisse, les sœurs Marie-Adèle, opérées en 1882 et qui succombèrent toutes deux.—En 1886, les filles du docteur allemand Bœhm, opérées par leur père quelques jours après leur naissance; l’une d’elles mourut.—Les sœurs brésiliennes Rosalina-Maria, opérées en 1900 et dont l’une mourut six jours après.—Les sœurs hindoues Radica-Doodica, fillettes de 8 à 9 ans, toutes deux tuberculeuses, opérées en 1902, qui moururent l’une six jours, l’autre douze à quinze mois après.—Les sœurs Rosa-Josepha, nées en 1877, dans les environs de Prague, opérées en Amérique, en 1906, avec succès, semble-t-il.—Deux jeunes Chinois, encore indemnes, que l’on exhibe à travers le monde dans les fêtes foraines.
30, Roy.—Henri III, sous lequel s’agitaient trois partis puissants: les Catholiques, la Ligue et les Protestants.
35, Reculons.—La remarque est d’Aristote qui, dans sa Rhétorique, III, 12, dit qu’Épiménide n’exerçait point sa faculté divinatrice sur les choses à venir, mais sur celles qui étaient passées et encore inconnues.
7, Homme.—«Cette opinion de Montaigne: «Ce que nous appelons monstres, etc...», résume admirablement l’opinion qui prévaut de nos jours, et la science d’aujourd’hui ne saurait rendre d’une manière plus concise et plus énergique l’opinion à laquelle elle s’est arrêtée et qui est bien plus sage que celle qui consiste à dire que la monstruosité est l’absence de quelque cause finale.» Chateaubriand.—Le même dit encore: «Les monstruosités nous sont envoyées pour nous montrer ce que serait la création, si Dieu retirait sa main.»—«L’univers, pour qui saurait l’embrasser d’un seul coup d’œil, serait un fait unique, une grande vérité.» D’Alembert.—«Ce qui est hasard à l’égard de nos conseils incertains est un dessein concerté dans un conseil plus haut.» Bossuet.
12, Soit.—«Cela est absolument vrai au physique comme au moral; tout est dans la nature, le vice comme la vertu; et il est impropre de dire, par exemple, que tel crime est contre nature, il n’y en a point de tel.» Naigeon.
CHAPITRE XXXI.
20, Aristote.—Morale à Nicomaque, X, 9, où se trouve cité le passage d’Homère sur les Cyclopes, Odyssée, IX, 114.
21, Cyclopes.—Suivant la fable, étaient des géants monstrueux n’ayant qu’un œil au milieu du front et forgeant dans l’Etna, sous les ordres de Vulcain, les foudres de Jupiter; suivant l’Histoire, ce furent les premiers habitants de la Sicile, hardis pirates, toujours sur la côte à épier s’il ne passait pas quelque navire pour le piller.
7, A tout.—«Avec», comme on l’a déjà vu plusieurs fois.
7, Esclatante.—Avec une voix aiguë, des éclats de voix.
10, Eslochements.—Synonyme d’esboittements et qui, tous deux, signifient dislocations.
15, Sincerité.—Pureté, netteté de jugement; c’est le sens propre du mot latin sinceritas.
18, Pedantes.—Aux maîtres d’école.
29, R’accoisez.—Apaisés, tranquillisés, revenus de notre emportement. Vient de l’ancien mot «coi», qui ne se retrouve plus que dans les expressions «se tenir coi», «demeurer coi», et qui dérive lui-même du latin quietus, qui a même signification.
29, Brouillas.—Brouillards.—Ce passage est emprunté de Plutarque, Comment il faut refréner la colère, et dans les mêmes termes que ceux employés par Amyot son traducteur.
39, Gorgoneo.—Gorgones.—C’étaient trois sœurs hideuses à voir, qui n’avaient qu’un œil en commun et changeaient en pierre tous ceux qui les regardaient; Persée en délivra la terre et parvint, avec le secours de Minerve, à trancher la tête de Méduse, l’une d’elles, que la déesse fixa sur son égide ou bouclier. Myth.
40, Rabirius.—Les éd. ant. et l’ex. de Bord. portent: Lucius Saturninus, ce en quoi il y a confusion.—Rabirius avait été un des sénateurs les plus opposés à Saturninus lorsque, 37 ans auparavant, ce tribun du peuple, chaud partisan de Marius, dont César était le neveu, avait été assassiné; et c’est de cet assassinat commis non par lui, mais par un esclave, qu’en la circonstance, il était accusé.
1, Faire.—«Bien dire fait rire, bien faire fait taire.»
2, Ceux-là.—Les Protestants.
7, Croit pas.—Il n’est en effet que trop vrai que les mœurs ne sont pas toujours en concordance avec les principes religieux; on ne saurait nier cependant, en ce qui touche le Christianisme, que leur action ne peut être que favorable.
11, Eudamidas.—Plutarque, Apophth. des Lacédémoniens, porte Eudemonidas.
14, Cleomenes.—Plutarque, ibid.
19, Viuement.—C.-à-d. le fait entre plus avant dans l’âme, frappe plus fortement l’esprit de ceux qui le lisent ou l’écoutent.—Les éd. ant. ajoutent: et presse bien autrement.
30, Bien.—L’éd. de 88 porte: d’honneur, au lieu de: «de bien».
31, Proposer.—Aulu-Gelle, XVIII, 3.
35, Aul. Gellius.—Aulu-Gelle, I, 26; on a de lui un ouvrage qui ne nous est pas parvenu en entier, intitulé «Nuits attiques», où l’on trouve de précieux renseignements sur l’antiquité et beaucoup de fragments d’auteurs anciens perdus.
3, Vantoit.—Cet esclave de Plutarque lui reprochait non de n’être pas philosophe, mais de ne pas agir en philosophe.
16, Disputons.—«La valeur ne se connaît que dans la guerre, l’amitié dans le besoin, la sagesse dans la colère.» Prov. oriental.
16, Archytas.—Cicéron, Tusc., IV, 36; De Republica, I, 38; Valère Maxime, IV, 1; Lactance, De ira Dei, 18; etc.
20, Bien.—Les éd. ant. portent: comme tu mérites, au lieu de: «bien».
21, Platon.—Sénèque, De Ira, III, 12.
23, Charillus.—Plutarque, Apophth. des Lacédémoniens.
32, Vertu.—Sénèque, De Ira, I, 16, d’où le fait est tiré, est moins favorable à Pison: «C’était, dit-il, un homme exempt de plusieurs vices, mais mauvais et dans l’esprit duquel la sévérité était la fermeté d’âme.» Il passait pour avoir, à l’instigation de Tibère, empoisonné Germanicus; accusé de ce crime par Agrippine et craignant de n’être pas soutenu par l’empereur, il se donna la mort.
5, Negotier.—Qui ont affaire à des femmes têtues.
8, Celius.—Sénèque, De Ira, III, 8.
15, Phocion.—Plutarque, Instructions pour ceux qui manient affaires d’État.—Phocion, aussi redoutable à la tribune que sur le champ de bataille, fut le rival de Démosthène qui l’appelait la «hache de ses discours»; il était célèbre par son désintéressement et sa rigidité de principes; injustement accusé de trahison, fut condamné par ses concitoyens à boire la ciguë.
3, Dehors.—Peut-être le duc d’Anjou, devenu Henri III.
4, Diogenes.—Diogène Laerce, IV, 34.—Diogène, venu de bonne heure à Athènes, y étudia la philosophie, et, adhérant aux principes de l’école des Cyniques, outra leur austérité, vivant dans la plus grande misère, habitant, dit-on, dans un tonneau et ne subsistant que d’aumônes; faisait surtout consister la sagesse dans les privations volontaires. On cite de lui nombre d’anecdotes dont l’authenticité est douteuse.
7, Buffe.—Soufflet.—L’éd. de 88 porte: nazarde à son valet à peu, au lieu de: «buffe... peu».
14, Famille.—Cet alinéa semble avoir été écrit par Montaigne à l’adresse de sa femme, qu’il ne met du reste presque jamais ostensiblement en cause.
29, Partie.—Sans partie adverse, sans antagoniste.
30, Portent.—C.-à-d. pour en user là seulement, où elles peuvent produire quelque effet.
6, Mesme.—La chute des corps graves abandonnés à eux-mêmes est, en effet, accélérée au fur et à mesure qu’ils descendent; cela est vrai au moral comme au physique.
7, Paye.—Ce qui me satisfait, me dédommage, c’est que lorsque les occasions sont d’importance.
10, Ceruelle.—En inquiétude.
28, Aristote.—Morale à Nicomaque, III, 8.
29, Contredisent.—Sénèque, De Ira, I, 16.
CHAPITRE XXXII.
9, Neufuiesme.—Le règne de Charles IX fut déchiré par les guerres des Catholiques et des Protestants; et la paix étant conclue, déshonoré par le massacre de ces derniers, ordonné à l’instigation de la reine mère Catherine de Médicis et pratiqué à la fois sur tous les points de la France, dans la nuit de la S.-Barthélemy (24 août 1572).
15, Esprit.—Les éd. ant. portent: sa viuacité, au lieu de: «son esprit».
22, Seneque.—Sénèque a compté, de tous temps, des partisans très décidés et de très violents adversaires: Montaigne, Balzac, le comte de Maistre sont au nombre des premiers; Diderot en fait un éloge outré; Dryden et La Harpe le déprécient outre mesure.
24, Dion.—A écrit une histoire romaine depuis Énée jusqu’aux temps où lui-même vivait. Il est en général exact; on lui reproche cependant de la partialité envers certains, entre autres contre Sénèque.
5, Mort.—Tacite, Annales, XIII, 11; XIV, 53, 54, 55; XV, 60, 64. Il faut reconnaître cependant qu’il y a dans Tacite même de terribles imputations contre lui, notamment quand il le représente (XIV, 7) demandant à Burrhus s’il faut ordonner aux soldats le meurtre d’Agrippine, et se chargeant ensuite (XIV, 11) de l’apologie de ce parricide.
23, Hannibal.—Cette appréciation d’Annibal aurait été émise par lui dans une rencontre qu’il aurait eue à Éphèse avec Scipion, lorsque le premier était réfugié auprès d’Antiochus et que le second était en ambassade auprès de ce prince (190). Elle est relatée par Plutarque dans les vies de Pyrrhus et de Flaminius. Dans la première Annibal aurait assigné à Pyrrhus le premier rang, à Scipion le second et s’attribuait à lui-même le troisième. Dans la seconde, il donnait la prééminence à Alexandre, le second rang à Pyrrhus, le troisième à lui-même. A quoi Scipion lui ayant dit: «Et comment jugeriez-vous, si vous m’aviez vaincu?» Annibal aurait répondu: «Je me placerais au-dessus de tous les autres capitaines du monde.»—Tite-Live relate également cette conversation, comme le fait Plutarque dans la vie de Flaminius; néanmoins, elle est généralement considérée comme apocryphe, on ne croit même pas qu’Annibal et Scipion se soient rencontrés nulle part après Zama.
23, Autrement.—Les éd. ant. ajoutent: recité.
30, Larecin.—Plutarque, Lycurgue, 14.—Montaigne a déjà mentionné ce fait, I, 458.
33, Loy.—Plus de moyen, de faculté, de liberté.
36, Pyrrhus.—Plutarque, Pyrrhus, 12.
9, Ailleurs.—Immédiatement après l’exemple de cet enfant dont il est question plus haut, qui se laissa dévorer le ventre par un jeune renard qu’il avait dérobé.
12, Cicero.—Tusc., II, 14; V, 27.
18, Tesmoins.—Valère Maxime, III, 3, cite aussi le fait, mais en attribuant ce trait de courage à un enfant macédonien qui assistait à un sacrifice offert par Alexandre.
29, Recite.—Liv. XXII, vers la fin du ch. 16.
40, Tua.—Tacite, Annales, IV, 45.—L’an 25, sous le règne de Tibère. L. Pison était gouverneur de l’Espagne citérieure; ce meurtre fut attribué à la sévérité avec laquelle il poursuivait les rentrées au trésor public.
40, Epicharis.—Tacite, Annales, XV, 57.
10, Argoulets.—Auprès de nos soldats, de nos gens d’armes.
17, Pistole.—Avec le chien d’un pistolet. Les chiens des armes à feu de l’époque se composaient de deux plaquettes en fer ou mâchoires reliées par une vis et formant étau, pour tenir soit la mèche, soit la pierre servant à mettre ou à produire le feu.
20, Rançon.—Prix payé pour se racheter de captivité ou de mauvais traitements auxquels on se trouvait exposé.
23, Dague.—Sorte de poignard.
4, Ailleurs.—Ch. XXVI du premier livre (I, 288 et suivantes).
14, Insupportable.—L’ex. de Bord. porte: Quelle bestiale stupidité! au lieu de «O... insupportable?»
14, Considere.—Les éd. ant. portent: aucunes de ces armes anciennes esleuées iusqu’au ciel au pris de la mienne, au lieu de: «aucuns... anciens».
21, Celles-là.—En introduisant la variante qui précède, Montaigne, ayant substitué «hommes» à «âmes», aurait dû pareillement remplacer «celles-là» par «ceux-là».
26, Mulcté.—Mis à l’amende; du latin mulctatus qui a ce même sens. Le fait est tiré de Plutarque, Agésilas, 1.
32, Petalisme.—L’ostracisme était, à Athènes, une sentence de bannissement politique pour dix ans qui, lors du vote, s’inscrivait sur une coquille, d’où son nom.—Le pétalisme était à Syracuse et à Corinthe ce que l’ostracisme était à Athènes; mais sa durée n’était que de cinq ans et le vote s’exprimait sur une feuille d’olivier, d’où aussi le nom qu’il portait.
36, Cicero.—Fut successivement préteur, édile et consul. Mérita le nom de «Père de la patrie», en déjouant la conjuration de Catilina; embrassa le parti de Pompée, après Pharsale se rallia à César. Ce dernier mort, il opposa Octave, neveu de César, à Antoine qu’il attaqua vivement et dont l’influence le fit proscrire; il périt égorgé comme il cherchait à fuir. V. N. II, 72.
36, Aristides.—Célèbre par ses vertus civiles et militaires; son intégrité le fit surnommer «le Juste»; il était de ceux qui commandaient à la bataille de Marathon, contribua au succès de celles de Salamine et de Platée, fut frappé d’ostracisme par crainte de son crédit, chargé d’administrer le trésor commun des Grecs destiné à pourvoir aux guerres futures contre les Perses, et mourut si pauvre que l’État fut obligé de pourvoir à ses funérailles et de doter ses filles.
36, Sylla.—Lieutenant, puis collègue et enfin rival de Marius contre lequel il représentait l’oligarchie; vainqueur de Mithridate roi du Pont, il parvint après quelques alternatives à triompher des partisans de Marius qui était mort dans l’intervalle, et, maître absolu de Rome, élu dictateur perpétuel, ensanglanta ses succès par d’horribles cruautés et de nombreuses proscriptions. Deux ans après, sans crainte des haines qu’il avait suscitées, il abdiquait et rentrait dans la vie privée; il mourut l’année suivante. V. II, 156 et N. Sylla.
36, Lysander.—Remporta sur les Athéniens la victoire navale d’Ægos-Potamos qui mit fin à la guerre du Péloponnèse (405), fut tué dix ans après dans un combat livré contre les Thébains.
36, Marcellus.—Fut cinq fois consul; battit les Gaulois (222); envoyé contre Annibal après la bataille de Cannes, il releva les affaires des Romains à Nole, puis à Syracuse dont il s’empara après un siège de trois ans; Archimède périt dans le sac de cette ville, malgré l’ordre qu’il avait donné de l’épargner (112); vainqueur d’Annibal à Canusium (210), il périt deux ans après dans une embuscade. On l’avait surnommé «l’épée de Rome», comme Fabius Cunctator en était «le bouclier».
37, Pelopidas.—Ami d’Epaminondas; contribua puissamment à l’expulsion des Spartiates de Thèbes (379); fut tué en 364 à Cynoscéphales (Thessalie), dans un combat contre Alexandre de Phères.
37, Pompeius.—Général romain, surnommé le Grand. Embrassa le parti de Sylla; reprit la Sicile et l’Afrique aux partisans de Marius. Sylla mort, il reprend la Narbonnaise et l’Espagne à ses adversaires politiques à la suite de la défaite et la mort de Sertorius (78). Il triomphe en Italie d’une révolte des esclaves; extermine les pirates de la Méditerranée, achève la guerre de Mithridate, conquiert une partie de l’Asie et forme le premier triumvirat (60), avec Crassus et César dont il a épousé la fille. A la mort de cette dernière et Crassus ayant été tué chez les Parthes, il rompt avec César; dans la lutte qui s’ensuit, soutenu par le Sénat, il n’en est pas moins chassé d’Italie, passe en Grèce, tient un instant son ennemi en échec à Dyrrachium, mais battu à Pharsale, il va demander asile en Égypte, où à son débarquement il est assassiné par ordre du roi. Pompée parvint au faîte des grandeurs, il le dut surtout à sa bonne fortune; il avait de l’ambition, de la morgue, des talents, mais le génie lui faisait défaut.
37, Agesilaus.—Roi de Sparte; vainquit les Perses en Asie et conquit l’Asie Mineure; gagna la bataille de Coronée sur les Grecs coalisés, et fut lui-même vaincu à Mantinée par Epaminondas; il se distinguait par son courage et sa grandeur d’âme; à l’âge de quatre-vingts ans il guerroyait encore.—Au nombre des recommandations expresses faites par Lycurgue, était celle de ne pas combattre trop fréquemment contre les mêmes ennemis, afin qu’ils n’arrivassent point à acquérir l’expérience de la guerre; c’est le reproche qu’on a fait à Agésilas, d’avoir, par ses expéditions répétées en Béotie, rendu les Thébains aussi experts en cet art que les Lacédémoniens et avoir fini par être battu par eux. C’est aussi ce qui est arrivé à Napoléon qui, après avoir vaincu l’Europe si souvent, a été vaincu par elle, autant parce qu’au jeu de la guerre, comme en tout autre, on ne gagne pas toujours, que parce qu’en battant sans cesse ses adversaires, il avait laissé pénétrer par quelques-uns, partie des secrets de son génie.
4, Œuures.—V. II, 70 et N. Profitable.
6, Vertu.—Ce même esprit d’équité que Montaigne relève dans les «Vies illustres» de Plutarque et notamment dans les Parallèles qui s’y trouvent insérés, se retrouve dans la «Collation d’aucunes histoires romaines avec les autres semblables grecques», de ce même auteur ou parues sous son nom. On y voit d’un côté Posthumius livrant au supplice son fils, bien que vainqueur, pour avoir combattu contre son ordre; et, de l’autre, Epaminondas en agir de même. Là c’est Agamemnon sacrifiant sa fille pour obtenir des vents favorables; ici c’est la fille de Métellus qu’atteint la même infortune. De même à propos du dévouement de Décius, de l’héroïsme de Mucius Scevola, de la trahison du roi Pausanias de Sparte et de la manière dont elle fut punie, etc... Il cite des faits analogues chez la partie adverse, s’appliquant d’une façon indéniable à tenir la balance égale entre les Grecs et les Romains.
25, Labienus.—L’un des plus habiles lieutenants de César en Gaule; se sépara de lui quand celui-ci, franchissant le Rubicon, marcha sur Rome; embrassa alors le parti de Pompée et prit part à la bataille de Munda (Espagne) qui mit fin à la guerre civile.
25, Ventidius.—César lui confia quelques affaires importantes en Gaule; après la mort du dictateur, il seconda Antoine contre ses meurtriers; postérieurement opposé aux Parthes, il les chassa de l’Asie Mineure (35).
28, Agis.—Agis III tenta de remettre en vigueur les lois de Lycurgue, d’abolir les dettes, de faire un nouveau partage des terres, mais il échoua et fut mis à mort par l’influence de ceux dont il menaçait les intérêts (244 à 239).
28, Cleomenes.—Cleomène III, poursuivant l’œuvre d’Agis III son prédécesseur, opéra une révolution à Sparte, égorgea les éphores qui s’y opposaient, détruisit le Sénat, abolit les dettes, effectua un nouveau partage des terres et bannit le luxe. Ayant à combattre les Achéens, d’abord vainqueur, il finit par être vaincu; il passa alors en Égypte pour y chercher des secours, mais déçu dans ses espérances, et peu après menacé dans sa liberté, il fut réduit à se donner la mort.
29, Lycurgus.—Les éd. ant. ajoutent: et Scipion encore à Epaminondas qui estoyent aussi de son rolle.
32, Parangonner.—Comparer; mot d’étymologie grecque, que les Italiens ont conservé avec le sens qu’il a ici; en français, n’est plus employé que comme terme d’imprimerie.
35, Dit-il.—Dans son Parallèle de Pompée avec Agésilas.
37, Conferer.—Comparer, du latin conferre; Montaigne en fait un fréquent usage dans cette acception.
38, Dit-il.—Dans son Parallèle entre ces deux personnages.
4, Separement.—Ainsi que l’auteur l’observe, Plutarque, dans ses Parallèles, ne porte pas d’appréciation d’ensemble sur les deux hommes qu’il met en comparaison; il fait ressortir pour chacun, sur quelques points caractéristiques, ce qu’il y a de plus particulier à retenir, et il est assez difficile de conclure pour lui:
Entre Démosthène et Cicéron, il donne le prix de l’éloquence au premier et insiste sur la supériorité des mœurs du second. Il apprécie le désintéressement et la réserve d’Aristide, et constate que Caton l’Ancien, dont il ne méconnaît pas le caractère, occupe une beaucoup plus grande place. Sylla, dit-il, a fait de plus grandes actions, Lysandre de moins grandes fautes; celui-ci a été plus tempérant et plus sage, l’autre a témoigné de plus de capacité et de valeur militaires. Entre Marcellus et Pélopidas, la balance est à peu près égale: leur vie comme leur mort a bien de l’analogie; le premier a plus fait, toutefois la délivrance de Thèbes par le second a été admirablement conçue et exécutée. Pompée se distingue par l’éclat de ses succès et sa probité politique; Agésilas a plus de valeur militaire réelle. Les exploits de Camille, sa droiture, le différencient de Thémistocle qui avait incontestablement plus d’adresse. Entre les Gracques et Agis et Cléomène, Tibérius Gracchus lui semble l’emporter par sa vertu. La législation de Numa est plus douce que celle de Lycurgue; il l’a imposée par la persuasion, Lycurgue par la force; les Romains ont obtenu d’autant plus de succès qu’ils se sont éloignés des institutions du premier, les Spartiates ont perdu leur supériorité pour avoir abandonné les lois du second.
CHAPITRE XXXIII.
8, Spurina.—Ce n’est que dans le deuxième avant-dernier alinéa de ce chapitre qui porte sur le rôle essentiel de l’âme et des particularités afférentes à César, avec lesquels l’histoire de Spurina n’a aucun rapport, qu’il est question de lui qui, à en juger par le titre, devrait en être le sujet principal.
9, Portent.—Montaigne joue ici sur les mots: haire, cilice, chemise de crin, et hère, homme de peu, sans vigueur, sans bien, sans mérite ou sans crédit.
9, Xenocrates.—Diogène Laerce, IV, 7.—Laïs reçut les hommages de tout ce que la Grèce renfermait d’illustre et fut la maîtresse d’Alcibiade; on dit qu’ayant suivi en Thessalie un jeune homme dont elle était éprise, les femmes de cette contrée, jalouses de sa beauté, l’assassinèrent.
12, Beauté.—Les éd. ant. ajoutent: de ses mignardises.
19, Satieté.—Montaigne avait oublié cette phrase, lorsqu’il écrivait vers la fin du ch. suivant, pag. 658: «Il y peut auoir quelque iuste moderation en ce desir de gloire, et quelque sacieté en cet appetit comme aux autres».
25, Pinceter.—Épiler.—Suétone, César, 45.
30, Fois.—César eut quatre femmes légitimes: Cossutia, issue d’une famille équestre, possédant une grande fortune, qu’il répudia pour épouser Cornelia, fille de Cinna lieutenant de Marius. Celle-ci étant morte, il épousa Pompeia nièce de Sylla, avec laquelle il divorça parce qu’elle était soupçonnée d’adultère. Enfin, Calpurnie, nièce de Pison.—Lors de sa mort, une loi avait été préparée, et devait être présentée en son absence, qui, pour lui permettre d’avoir des enfants, l’autoriserait à épouser autant de femmes qu’il voudrait.
31, Nicomedes.—Quand, à Rome, leurs généraux recevaient les honneurs du triomphe, les soldats avaient coutume d’égayer par des chants la marche du triomphateur; lorsque César célébra son triomphe sur les Gaules, parmi les couplets qui se répétèrent en chœur ce jour-là, figurait celui-ci:
allusion au commerce intime auquel il s’était prêté dans son enfance avec ce roi de Bythinie et dont il rejaillit sur lui un opprobre qui de son vivant a servi de texte à une foule de railleries. V. N. I, 550: Nicomedis.
32, Cleopatra.—Non moins remarquable par son esprit que par sa beauté, fut la maîtresse de César, puis celle d’Antoine qui, pour l’épouser, répudia Octavie sœur d’Octave. Après la défaite et la mort d’Antoine et après avoir en vain cherché à séduire le vainqueur, afin de ne pas tomber vivante en son pouvoir, elle se donna la mort, en se faisant piquer au bras par un aspic.
33, Cæsarion.—Plutarque, César, 13.—Cet enfant fut déclaré roi d’Égypte en 42 par les triumvirs Antoine, Octave et Lépide, sous le nom de Ptolémée XIV et la tutelle de sa mère. En 32, il recevait le vain titre de Roi des rois et l’an 30, peu après la mort de sa mère, il périssait par ordre d’Auguste.
34, L’amour.—Suétone, César, 50, 52, etc.
39, Cæsar.—Julie, qui par sa douceur empêcha longtemps la discorde entre le beau-père et le gendre; sa mort, survenue en 55, fit disparaître la principale cause à laquelle on devait que la guerre civile n’eût point encore éclaté entre eux.
2, Ægisthus.—Egisthe, fils incestueux de Thyeste et de sa fille Pélopée, était à la fois le frère et le fils de sa mère; Pompée, en épousant la fille de César qui avait été l’amant de sa femme, se trouvait être à la fois pseudo-beau-frère et gendre de son beau-père.
8, Amoureuse.—Lorsqu’il rentra dans Rome, sur son char de triomphe, après la conquête des Gaules, les soldats, auxquels en pareille circonstance était laissée une grande licence, chantaient: «Bourgeois, cachez vos femmes, nous amenons le galant au crâne dénudé.» Suétone, César, 51.
10, Place.—Salluste dit de même de Sylla: «D’une grande intelligence, assoiffé de volupté, il l’était plus encore de gloire, car, si plongé qu’il fût dans la luxure, jamais elle ne lui fit perdre de vue les affaires.»
14, Soldat.—Aussi vigoureux et infatigable athlète en amour qu’à la guerre.
20, Ladislaus.—Sismondi, Histoire des républiques italiennes, tome VIII, raconte la mort de Ladislas d’une manière un peu différente: il aurait été atteint à Pérouse d’une maladie que ses débauches excessives auraient occasionnée; et une de ses maîtresses, qu’on accusait de l’avoir empoisonné et qui était fille d’un médecin de cette ville, serait morte peu de jours après, emportée par la même maladie.
24, Destroict.—Ayant réduit, par un siège rigoureux, la ville de Florence en telle détresse.
31, Attournoit.—Orner, parer; est d’étymologie grecque. D’attourner vient atours, qui est fort en usage.
10, Escrit.—En dehors de ses Commentaires sur la guerre des Gaules et la guerre civile qui seuls nous restent, de ses lettres au Sénat, à Cicéron, à ses amis, César aurait écrit sur la grammaire, l’éloquence, l’histoire, et encore des poèmes, une tragédie d’Œdipe et des recueils de faits mémorables qu’Auguste défendit de publier; on lui attribuait aussi des livres sur les Augures et une Cosmographie qui ne furent probablement composés que sur ses ordres.
15, Actiue.—Suétone dit qu’il faisait au besoin cent milles par jour (150 kil.), passait les rivières à la nage ou sur des outres, arrivait souvent avant qu’on ne fût instruit de son départ. Florus le compare à la foudre; et Cicéron, dans le temps même où il parlait de lui en ennemi, le regardait comme un prodige de promptitude et de vigilance.
16, Labeur.—Dur au travail; c’est une expression toute latine.
19, Oppius.—Suétone, César, 53.—Oppius, lieutenant et ami de César, est regardé comme le véritable auteur des guerres d’Alexandrie, d’Afrique et d’Espagne, attribuées à César. Plutarque estime qu’il ne saurait être cru qu’avec réserve dans tout ce qu’il rapporte des amis et des ennemis de celui-ci, dont lui-même était le familier.
22, Boulenger.—Chez les Romains, tous les artisans étaient des esclaves.
25, Pays.—Suétone, César, 53.
28, Catilina.—Perdu de dettes, Catilina entreprit de rétablir sa fortune par le sac de Rome. Sa conjuration, ourdie parmi ses compagnons de débauche et tous les libertins de la ville, fut déjouée par Cicéron; lui-même mourut les armes à la main, en combattant les troupes envoyées contre lui.
29, Cachetes.—Une lettre, un billet doux qui se remettent en cachette, à la dérobée.
34, Yurongne.—Plutarque, Caton d’Utique, 7.
10, Douceur.—Montaigne, liv. II, ch. II (II, 100), se montre moins indulgent qu’ici vis-à-vis de César. Parmi les actes qui lui sont reprochés est l’exil à perpétuité, en un lieu déterminé avec privation de tous leurs droits de citoyens, de nombre de ses adversaires politiques, les Plancius, les Nigidius, les Cecina, etc., qui n’avaient d’autres torts que d’avoir défendu contre lui le Sénat et les lois.
17, Liberté.—Cn. Magius, L. Vibullius Rufus, etc. César, De Bello civili, I, 24; III, 10, etc.
20, Luy.—Suétone, César, 75.
27, Romains.—Id., ibid., 75.
32, Conduire.—Ce ne fut que durant la guerre civile et seulement envers ceux qui avaient qualité de citoyens romains que César en agit ainsi; ailleurs et contre tous autres il agit bien différemment, souvent avec la plus grande inhumanité: il ne faisait d’ordinaire aucun quartier à l’ennemi; ordonnait fréquemment, après une victoire, qu’on tuât «toute la durée d’un jour». A Uxellodunum (que l’on croit être Cahors), il fit couper les mains à tous ceux qui avaient porté les armes. Il lui est arrivé de faire fermer les ouvertures de cavernes où s’étaient réfugiées des populations inoffensives et de les faire de la sorte mourir de faim et d’incendier des forêts pour faire périr les restes d’armées en déroute. Quant à sa conduite à l’égard de Vercingétorix vaincu (II, 656), pour être de pratique fréquente chez les Romains, on ne saurait certes pas la qualifier de magnanime.
37, Feindre.—«La modération, a dit Montesquieu, en parlant de César, que l’on montre après qu’on a tout usurpé, ne mérite pas de grandes louanges.»
40, Consul.—Suétone, César, 73.
1, Testonner.—Piquer, satiriser (V. N. II, 524); ce mot peut être traduit ici presque littéralement, en y employant le langage familier où l’on dit de quelqu’un vivement critiqué, qu’il a été habillé de bonne façon.
2, Mamurra.—Chevalier romain qui acquit de prodigieuses richesses dans les Gaules où, en qualité d’Intendant de l’armée, il avait accompagné César dont il était un des compagnons de débauche. Catulle, carmen 29.
3, Table.—Suétone, César, 73.
5, Aduerty.—Id., ibid., 75.
9, Autheurs.—Id., ibid., 75.
12, Descouuert.—Id., ibid., 72.
15, Plaignist.—Id., ibid., 48.
22, Largesse.—Dion Cassius relate que le soin extrême qu’avait César d’accumuler des richesses et de se faire donner de l’argent sous quelque prétexte que ce fût, provenait des dépenses excessives qu’il avait à faire pour arriver à la domination, s’y maintenir et l’agrandir, disant lui-même que pour parvenir à ce but, on avait besoin de deux choses qui se soutenaient l’une par l’autre: de l’argent et des troupes.
26, Bien.—Suétone, César, 72.
26, L’enyura.—Cette furieuse passion l’enivra.
28, Nom.—L’éd. de 88 aj.: vain.
29, Loix.—Suétone, César, 77.
30, Luy.—Ce corps politique lui apportait un décret qu’il venait de rendre pour augmenter les honneurs qui lui étaient décernés; César était alors assis dans le vestibule du temple de Vénus, où il était demeuré afin qu’on ne pût dire qu’il avait, par sa présence, ôté aux Sénateurs la liberté d’opiner comme bon leur semblait; il ne se leva pas en voyant venir le Sénat et écouta assis ce qu’on avait à lui dire, ce qui irrita tellement les sénateurs et les autres Romains, que ce fut l’un des principaux prétextes de ceux qui conspirèrent contre sa vie. Dion Cassius.
39, Autres.—Notamment Henri IV qui laissa perdre tous les avantages de sa victoire de Coutras (1587) afin de courir après sa maîtresse, la belle Corisande d’Andouins, si chère à Montaigne. Mézerai.
16, Continents.—L’éd. de 80 porte: des dames les plus continentes, au lieu de: «plus continents».
23, Visage.—Ce fait, rapporté par Valère Maxime, IV, 5, remonte à une époque où l’Étrurie (nom ancien de la Toscane) ne jouissait pas encore du droit de bourgeoisie romaine et par conséquent est antérieur au Ier siècle av. J.-C.
10, Scipion.—Allusion à l’acte de Scipion, premier Africain, auquel, après la prise de Carthagène (Espagne), une femme d’une grande beauté, faite prisonnière, fut amenée. Respectant son honneur, Scipion fit rechercher un jeune prince celtibérien dont elle était la fiancée et la lui remit; lui-même n’avait alors que vingt-cinq ans.
CHAPITRE XXXIV.
15, Recommandation.—On ne saurait dire que les Essais aient été la lecture favorite de Napoléon: toutefois dans le volume 23 de sa correspondance, pag. 399, on le voit faire écrire à son secrétaire, le 7 mai 1812, au moment de partir pour la campagne de Russie: «Un Montaigne, petit format, serait peut-être bon à mettre dans la petite bibliothèque.»
16, Aphricain.—Scipion sauva la vie à son père blessé à la bataille du Tessin, il n’avait encore que 17 ans; préteur en Espagne en 211, il s’empara de Carthagène tombée au pouvoir des Carthaginois, battit Asdrubal et reconquit en quatre ans cette province. De retour en Italie, envoyé contre Annibal, il fit triompher l’idée de transporter la guerre aux portes de Carthage, et chargé de son exécution, gagna sur Annibal, rappelé par ses concitoyens alarmés, la bataille de Zama, qui mit fin à la deuxième guerre punique (202). En 190, comme lieutenant de son frère, il accompagna celui-ci en Asie, et l’aida à triompher d’Antiochus le Grand, roi de Syrie, qu’ils contraignirent à la paix. A leur rentrée à Rome, injustement accusés par le parti populaire auquel sa hauteur et sa partialité pour les patriciens le rendaient odieux, il fut condamné à l’exil où il mourut, tandis que son frère, frappé d’une amende considérable qu’il ne put payer, était jeté en prison. Scipion réunissait au génie militaire, tous les genres de vertu: l’humanité, la tempérance, le désintéressement, etc.
16, Brutus.—Lors de la guerre civile entre César et Pompée, embrassa le parti de ce dernier et combattit à Pharsale; néanmoins César qui l’aimait et qui, pensait-on, était son père, l’attira à lui et le combla de caresses; mais l’éducation stoïcienne qu’il avait reçue de son oncle et son nom même l’armèrent contre lui, quand le dictateur aspira au pouvoir suprême, et il participa à sa mort (44). Après ce meurtre, poursuivi par Antoine, et vaincu dans les plaines de Philippes, désespérant alors du salut de la république, il se tua. V. N. I, 638: L’occasion.
16, Polybius.—Combattit avec Philopœmen et, envoyé en otage à Rome où il demeura 17 ans, se lia avec Scipion Émilien qu’il accompagna au siège de Carthage; voyagea en Afrique, en Espagne, en Gaule, et écrivit divers ouvrages qui sont perdus et dont le plus considérable était une histoire en 40 livres de Rome et des autres états contemporains, ouvrage dont il ne reste que cinq livres entiers. L’exactitude, le jugement, l’impartialité, sont ses qualités maîtresses; il scrute les événements, les analyse, ce qui en fait l’historien des hommes d’état, des hommes de guerre et des penseurs.
17, Cinquiesme.—Charles-Quint, déjà roi d’Espagne en 1516, fut élu empereur d’Allemagne trois ans après, succédant à Maximilien son aïeul. Il avait comme compétiteur à l’empire François Ier, roi de France, avec lequel il fut en guerre pendant la majeure partie de son règne; il remporta sur lui la victoire de Pavie (1525); échoua dans une expédition contre Marseille (1536), fut défait à Cérisoles (1544) et assiégea inutilement Metz (1552). Il fit avec des alternatives de succès et de revers plusieurs expéditions contre l’Afrique. Il fut l’adversaire de la Réforme, mais n’en fut pas moins obligé d’accorder la liberté du culte aux Protestants (1552). En 1556, affaibli par les maladies, aigri par les revers, il abdiqua et céda l’empire à son frère; déjà l’année précédente, il avait remis l’Espagne à son fils, et il se retira au monastère de S.-Just en Estramadure où il mourut; on dit qu’il regretta vivement le pouvoir dont il s’était démis; il était d’un caractère très dissimulé.
18, Ailleurs.—Semble désigner la reine Catherine de Médicis qui passait pour s’en inspirer et qui, en tout cas, y conformait ses actes et sa politique.
22, Militaire.—Montaigne possédait un exemplaire des Commentaires de César (V. N. II, 82: Lisant), sur lequel, suivant son habitude, il a consigné l’impression que la lecture de cet ouvrage lui laissait; on y lit: «C’est un livre qu’un Général d’armée devrait avoir continuellement sous les yeux, comme patron, ainsi que faisait le maréchal Strozzi qui le savait quasi par cœur et l’a traduit; et non je ne sais quel Philippe de Comines que Charles Cinq avait en pareille recommandation; de même que le grand Alexandre avait les œuvres d’Homère, etc...» Ce dédain que dans ces annotations marque Montaigne pour Philippe de Comines témoigne qu’elles ont dû être écrites avant les Essais, où l’auteur ne laisse pas de lui témoigner beaucoup plus de considération, notamment dans son chapitre «des livres» où il rapporte le jugement qu’il a porté après lecture sur les Mémoires de cet historien et aussi au chapitre VIII du livre III.
1, Iuba.—Juba Ier; embrassa le parti de Pompée, accueillit après la bataille de Pharsale les restes de l’armée vaincue; joint à eux, il livra à César la bataille de Thapsus (46); vaincu, il se fit tuer par un de ses serviteurs.
9, Armée.—Suétone, César, 66.—Sur son exemplaire annoté des Commentaires de César, Montaigne a inscrit: «On craint souvent l’ennemi plus par réputation que par l’effet.»
16, Execution.—Suétone, César, 65.—«Une armée ne se doit enquérir des desseins de son général» (annotation de Montaigne sur son ex. des Commentaires de César).—A cela, on serait tenté d’opposer ce mot de Napoléon: «A la guerre, chacun doit connaître sa manœuvre»; mais la contradiction n’est qu’apparente: Napoléon ne veut parler que du mouvement en exécution, dont la divulgation n’offre plus d’inconvénient dès que l’ordre d’exécution est donné, parce que le temps faisant défaut à l’ennemi, il ne peut prendre pour y parer de nouvelles dispositions et en est réduit à celles en lesquelles il se trouve.
20, Souisses.—César, De Bello Gallico, I, 7.—En 58; ils avaient quitté leur pays en masse, pour venir s’établir en Gaule; les uns furent exterminés, les autres refoulés sur la contrée d’où ils étaient partis.
31, D’accord.—Souvent, en effet, il lui est arrivé de n’accorder des trêves que pour les violer.
33, Desobeyssance.—«César estimait plus encore l’obéissance que la vaillance» (annotation de Montaigne sur son ex. des Commentaires de César).
38, Combat.—Suétone, César, 67.