Essais de Montaigne (self-édition) - Volume IV
5, Païs.—En 1497. Ce revirement chez Emmanuel fut dû à la reine, fille d’Isabelle de Castille, qui en avait fait une condition absolue de son mariage; la persécution qui s’ensuivit fut une des principales causes des troubles et divisions qui ont agité le Portugal pendant trois siècles.
20, Religion.—Le P. Jésuite Marianna dit, dans son Histoire d’Espagne, XXVI, 13, qu’en vertu de cet édit, les enfants devaient être baptisés de force, et il ajoute: «édit cruel, tout à fait contraire aux lois et maximes chrétiennes».
27, Prefix.—Qu’il leur avait fixé; du latin præfixere, déterminer.
34, Opinions.—En 1225. L’hérésie des Albigeois, dérivée de celle des Manichéens, repoussait entre autres choses l’autorité du pape et des prêtres. Née dans le XIe siècle, elle embrasa tout le midi de la France, que les persécutions dirigées contre elle mirent à feu et à sang. Cette guerre ne prit fin que vers 1229; mais aux croisades auxquelles elle avait donné lieu, se substituèrent alors, dans la région, pour y consolider la foi, l’Inquisition et toutes ses horreurs.
2, Mort.—Il en est de même aujourd’hui: En France, du 1er janvier 1895 au 1er janvier 1905, on n’a pas relevé moins de 695 enfants de 16 ans et au-dessous qui se sont donné la mort, et voici quelques-unes des raisons alléguées dans les billets laissés par certains d’entre eux:—«Je me noye, mon père m’a grondé.»—«Je me suicide parce que je n’ai pas eu de prix.»—«Je me tue parce que j’ai trois dents cassés.»—Il en est qui se tuent par simple imitation ou bravade: «Tiens, dit l’un, en apercevant un pendu, il faut que je me pende aussi»; et il le fait séance tenante.—«Je me suis brûlé la cervelle exprès», écrit un autre qui se tue pour montrer qu’il est capable d’agir comme un homme.—En janvier 1907, à Paris, un collégien de dix-neuf ans se noyait dans la Seine de dépit d’une réprimande; un autre, de même âge, se tuait par chagrin d’amour.
3, Ancien.—Le fond de cette pensée est dans Sénèque, Epist. 70.
16, Orage.—Diogène Laerce, IX, 68.
29, Dernier.—Var. des éd. ant.: souuerain.
30, Effect.—Cicéron, Tusc., II, 13.
2, Mal.—Cicéron, Tusc., II, 25, raconte le fait un peu différemment: Pompée venant de Syrie à Rhodes, où se trouvait Posidonius, désirait l’entendre et lui exprimait ses regrets de ne le pouvoir pas, le voyant affecté de douleurs aiguës: «L’état de souffrance où vous me trouvez, lui répondit le philosophe, ne m’empêchera pas de satisfaire à votre désir; il ne sera pas dit qu’un aussi grand homme soit venu inutilement honorer ma retraite de sa présence.» Réponse, ajoute Cicéron, qui fut suivi d’un discours, aussi grave qu’éloquent, sur cette question qu’il n’y a rien de bon que ce qui est honnête.
17, Instant.—Louis Racine fait dire à ce propos à un épicurien:
19, Habet.—C’est là une des assez fréquentes citations qui se rencontrent dans les Essais, composées d’auteurs différents et que ne distingue même pas la ponctuation: le premier de ces deux vers est de La Boétie, le second d’Ovide.
21, Craindre.—Les éd. ant. port.: Et à la vérité, ce que les Sages craignent, au lieu de: «Aussi... craindre».
34, Homicide.—Cela est vrai du mal de dents, mais non de la goutte qui finit fort souvent par devenir mortelle.
39, Estre.—Observer, pour la compréhension du texte, que, dans ce qui précède, Montaigne a fait parler ceux qui disent que la douleur est un mal; et que, maintenant, il va répondre à leurs arguments, en s’efforçant de prouver qu’il est en nous, sinon de faire que nous ne la ressentions pas, du moins d’en réduire notablement la sensation.
6, Trampe.—Var. de 80 et 88: ie ne le croy pas.
13, Vulgaire.—Cette phrase est encore une de celles qui témoignent le plus que Montaigne a été aux armées et considérait comme sienne la profession des armes.
32, L’ame.—Les éd. ant. aj.: c’est d’auoir eu trop de commerce auec le corps.
34, Attendre.—De ne pas compter assez sur elle.—Certaines éditions portent: fonder. Attendre est employé ici dans le même sens que dans ces vers de La Fontaine: «Ne t’attends qu’à toi seul, c’est un commun proverbe» (L’alouette et ses petits avec le maître d’un champ).—«T’attendre aux yeux d’autrui, quand tu dors, c’est erreur» (Le fermier, le chien et le renard).
23, Craint.—dans le Phédon.
25, Desclouë.—Une très violente douleur, de même qu’une volupté excessive, détache l’âme du corps, en ce qu’elle s’en empare en entier et ne laisse plus à celle-là aucune action sur celui-ci, comme s’il n’existait plus aucune liaison entre eux.
33, Doluerunt.—Add. des éd. ant.: dict S. Augustin.
37, Inseruerunt.—Montaigne détourne ici le sens de ce passage de saint Augustin.
40, Grandes.—«Tu engendreras tes fils dans la douleur,» dit la Genèse, III, 16.
4, Ægyptiennes.—Que nous appelons aujourd’hui Bohémiennes, nom qui varie suivant les pays, et qui se donnent elles-mêmes comme étant de celui des Pharaons.—Les Bohémiens sont des bandes nomades d’aventuriers qui se trouvent un peu partout et dont la véritable origine est inconnue; les premiers qui vinrent en France, arrivaient de Bohême, d’où leur nom. Ils ont une physionomie particulière, parlent entre eux un argot spécial, vivent de petits métiers, disent la bonne aventure; on ne sait trop quelle est leur religion; leur morale est très relâchée et ils pratiquent volontiers le vol.
7, Garces.—Jeunes filles. Du temps de Montaigne, on disait une jeune garce pour dire une jeune fille, et garçon pour jeune homme; aujourd’hui ce mot garce est injurieux et ne se donne qu’aux filles publiques, tandis que celui de garçon s’est maintenu dans la langue avec sa signification primitive.
11, Iumeaux.—Plutarque, De l’Amour, 34.—En 78, Sabinus, seigneur gaulois, prit le titre de César, au commencement du règne de Vespasien, et fut vaincu. Proscrit, il se fit passer pour mort et vécut caché dans les ruines de sa maison, à laquelle il avait mis le feu. Éponine, sa femme, vint l’y rejoindre et y mit au monde deux jumeaux. Découvert au bout de plusieurs années, sa femme implora vainement sa grâce; ne pouvant l’obtenir, elle se mit à invectiver l’empereur, demandant à partager le supplice de son mari, ce à quoi Vespasien eut la cruauté d’accéder.
12 (Car ils... malice).—Var. des éd. ant.: (car le larreçin y estoit action de vertu, mais par tel si, qu’il estoit plus vilain qu’entre nous d’y estre surpris).
15, Descouurir.—Plutarque, Lycurgue, 14.
18, Mystere.—Valère Maxime, III, 3, qui cite le fait, l’attribue à un jeune Macédonien.
21, Cicero.—Dans les Tusculanes, V, 27.
34, Brasier.—Tite-Live, II, 12.—En 503. Porsenna, roi des Étrusques, avait pris en main la cause des Tarquins chassés de Rome qu’il assiégeait. L’acte de Mucius Scevola, par la crainte de le voir se renouveler, le décida à lever le siège et à faire la paix.
36, Incisoit.—Sénèque, Epist. 78.
40, Philosophe.—Sénèque, Epist. 78.—Il semble être question ici d’Anaxarque, que Nicocréon, tyran de Chypre, fit torturer et finalement broyer dans un mortier, sans pouvoir vaincre sa constance (IVe siècle). V. I, 626.
4, Peau.—Les éd. ant. à 88 aj.: et l’en surnommoit on Madame l’escorchée.
14, Espagnolé.—Pour avoir une taille élégante et svelte, comme l’ont les Espagnoles.
16, Mourir.—Catherine de Médicis, dans le commencement de son séjour en France, avait inventé de nouvelles parures, entre autres le corset, «sorte de gaîne qui emboîtait la poitrine depuis le dessous des mamelles jusqu’au défaut des côtes et qui finissait en pointe sur le ventre» (Galerie des femmes célèbres, 1827). On ne faisait pas encore usage pour cet ajustement de fanons de baleine, qu’on remplace aujourd’hui par des lamelles d’acier; on se servait d’éclisses en bois qui, pressées fortement, rendaient à la longue la chair insensible et aussi dure que la corne ou le cal qui vient aux mains de certains ouvriers.
20, Luy mesme.—Lorsque Henri III, qui était roi de Pologne, la quitta secrètement pour venir occuper le trône de France à la mort de Charles IX (1574), le grand chambellan de sa cour le suivit et l’atteignit sur les frontières d’Autriche. N’ayant pu le déterminer à revenir, au moment de se séparer de lui, il lui promit une fidélité inviolable et, au grand étonnement du roi, il se donna un coup de poignard dans le bras et suça le sang de la plaie, voulant par là attester son dévouement et la sincérité de ses paroles.
21, Blois.—Ces États généraux, tenus à Blois en 1576, y avaient été convoqués par Henri III, pour en obtenir la condamnation du Protestantisme et des subsides pour le combattre, ce à quoi ils se refusèrent d’une façon absolue.
24, Poinçon.—Longue épingle à cheveux dont usent les femmes, encore actuellement, pour maintenir l’échafaudage de leur chevelure.
30, Aspres.—Monnaie turque qui vaut environ un sou.
35, Croix.—Lorsque l’empereur Honorius rapporta à Jérusalem la vraie croix que les Perses lui avaient rendue et que leur roi Chosroès II avait enlevée quatorze ans auparavant, il la porta lui-même sur ses épaules jusqu’au haut du Calvaire (622).
36, Foy.—Le sire de Joinville, dans ses Mémoires, II.
40, Nuict.—On montre encore à Notre-Dame de Paris la discipline de saint Louis.
42, Angleterre.—Mariée d’abord avec Louis VII (1137), Éléonore de Guyenne lui apportait en dot le duché de ce nom et d’importantes annexes. Répudiée pour son inconduite (1152), elle épousa peu après Henri, comte d’Anjou et duc de Normandie, qui, en 1154, devenait roi d’Angleterre et, tant par lui-même que par son mariage, se trouvait déjà avoir sur le continent une puissance territoriale surpassant notablement en étendue les domaines directs de son suzerain le roi de France. Cette situation a été le point de départ de la rivalité qui, depuis, n’a cessé d’exister entre la France et l’Angleterre et qui s’est traduite de la part de cette dernière par une opposition constante à notre endroit, et à maintes reprises par des guerres de plus ou moins longue durée; notamment:
En 1159, 1160, 1173, 1177, 1188, 1194, 1198;—de 1202 à 1206;—de 1213 à 1217, de connivence, marquée par la bataille de Bouvines;—de 1328 à 1340, bataille navale de l’Ecluse;—de 1345 à 1348, bataille de Crécy, prise de Calais;—de 1350 à 1360, bataille de Poitiers, traité de Brétigny;—de 1369 à 1375;—de 1378 à 1453, bataille d’Azincourt, Jeanne d’Arc, combat de Castillon;—de 1521 à 1525 et de 1544 à 1546, de connivence avec Charles-Quint;—de 1557 à 1559, de connivence avec Philippe II, roi d’Espagne, marquée par la reprise de Calais;—de 1627 à 1629, pendant la guerre de Trente Ans, marquée par le siège de la Rochelle;—de 1678 à 1679, jointe à la Hollande, à l’Espagne, à l’empereur d’Allemagne et à l’électeur de Brandebourg;—de 1692 à 1697, faisant partie de la ligue d’Augsbourg, durant laquelle eurent lieu les batailles navales de la Hougue et du cap Saint-Vincent;—de 1701 à 1712, unie à l’Autriche, la Hollande, le Portugal, la Savoie, et où elle s’empara de Gibraltar sur l’Espagne notre alliée;—de 1742 à 1748, où, alliée de l’Autriche, elle ruina notre marine et notre commerce;—de 1755 à 1763, où, alliée à la Prusse, elle nous enleva à peu près toutes nos colonies dont les Indes et le Canada;—de 1778 à 1783, qui aboutit à l’indépendance des États-Unis d’Amérique, est la seule où nous ayons été agresseurs vis-à-vis d’elle;—1793 à 1802, coalisée avec l’Autriche, la Russie et les divers États d’Italie, marquée par la prise de Toulon, le combat de Quiberon, la bataille navale d’Aboukir, le siège de Saint-Jean d’Acre, la convention d’El-Arisch;—de 1803 à 1815, avec la coopération successive des diverses puissances européennes, marquée par la bataille de Trafalgar, le bombardement de Copenhague, les batailles de Vittoria, de Toulouse, de Waterloo, et enfin les traités de 1815.
Et depuis, si aucune guerre ouverte n’a plus eu lieu, parce que toujours nous avons cédé, soit par faiblesse, soit par duperie, ayant la trop généreuse habitude de traiter les affaires sans arrière-pensée comme sans méfiance, que d’humiliations ne nous a-t-elle pas imposées, que d’entraves ne nous a-t-elle pas créées?—En 1823, elle nous contraint à aller combattre en Espagne les principes mêmes de notre Révolution;—en 1830, elle nous oblige à presser notre expédition d’Alger, pour qu’elle ne l’empêche pas;—Plus tard, elle est contre nous dans l’affaire dite des «mariages espagnols»;—en 1854-56, elle se sert de nous pour contenir la Russie, et cette alliance lui pèse tant, qu’au lendemain d’Inkermann, dans un conseil tenu par ses généraux, l’un d’eux émet l’avis que «l’armée anglaise se rembarque, laissant les Français recourir à la miséricordieuse générosité de l’empereur Nicolas»!—En 1860, en Syrie, elle paralyse notre action et fait qu’elle n’aboutit à aucun résultat utile;—Puis elle nous évince de la direction des douanes chinoises;—au Mexique, elle nous abandonne;—elle nous élimine de l’accord primitivement conclu pour la gestion des finances de l’Égypte en vue du paiement de sa dette;—elle accapare les actions du canal de l’isthme de Suez, construit par nous en dépit de son opposition et dont elle se rend ainsi maîtresse;—elle nous immobilise en Extrême-Orient, durant la guerre Russo-Japonaise, par le traité qu’elle conclut dans ce but avec le Japon;—elle nous humilie au plus haut point dans l’affaire de Fachoda et par ses prétentions et l’arrogant procédé qu’elle emploie pour les faire triompher, qui n’a d’égal que la facilité avec laquelle nous obtempérons à sa volonté et à ses menaces;—nos difficultés continues avec le Siam sont son œuvre;—enfin, elle nous pousse dans le guêpier d’Algésiras avec la pensée, d’une part, que nous nous userons au Maroc, et de l’autre, nous faisant miroiter une alliance sans grande valeur réelle dans la circonstance, que nous finirons, sous l’effet de ses excitations, à en venir aux prises avec l’Allemagne, et que s’entre-détruiront pour son plus grand avantage les deux seules puissances qui, pour le moment, comptent pour elle en Europe, l’une qu’elle jalouse et exècre depuis des siècles, l’autre qu’elle redoute par l’extension que prennent son commerce et sa marine.
Si longue que soit cette énumération sommaire des manifestations des dispositions de l’Angleterre à notre égard, qui ne relate que ce que tout le monde connaît, elle serait bien autre si elle était dressée en toute conscience par notre ministère des Affaires étrangères!
Et cependant, se laissant prendre à des démonstrations qui seraient flatteuses, si elles n’étaient aussi intéressées, si on pouvait oublier que toujours dans ses alliances l’Angleterre n’a en vue que de tirer de ses alliés le maximum de services possibles et s’évertue à leur persuader qu’elle leur fait grand honneur en leur accordant sa confiance et les faisant se battre pour elle, nos gouvernants méconnaissant ces leçons de l’histoire, hypnotisés par l’orage qui peut venir de l’autre rive du Rhin et qu’ils provoquent sans cesse, au lieu de s’appliquer à le conjurer, donnent en plein dans le piège, ruinant la France en entretenant un état militaire qui l’écrase et qui ne se justifierait que s’ils étaient résolus à en user à bref délai, tandis qu’au contraire, ils espèrent bien n’en jamais venir là! Au lieu de maugréer et de surexciter les populations par l’idée d’une revanche qui n’est pas dans leur pensée, que ne se résignent-ils, tout en réservant l’avenir, ce qui est dans l’ordre naturel, et n’imitent-ils l’Autriche après Sadowa? L’Allemagne détient l’Alsace-Lorraine, mais n’oublions pas pour cela en quelles mains sont le Canada, nos anciennes colonies des Antilles, des Indes et les îles dites Anglo-Normandes!
4, Seigneur.—Ce pèlerinage fut entrepris par Foulques en expiation de ses fautes; traîné sur une claie, il criait pendant qu’on le flagellait: «Seigneur, ayez pitié de Foulques, traître et parjure.»
14, Deuil.—Cicéron, Tusc., III, 28.
19, Nourrice.—Pendant l’allaitement fait hors de chez moi. De son mariage avec Françoise de Chassagne, Montaigne eut six filles, dont cinq moururent toutes âgées de moins de trois mois; une seule survécut, Léonor, pour laquelle il n’était pas sans tendresse.—Cette phrase lui a été vivement et souvent reprochée, et probablement à tort. Elle ne figure pas dans les éditions antérieures; et l’exemplaire de Bordeaux porte: «i’en ay perdu, mais en nourrice, deux ou trois», au lieu de: «mais i’en ai perdu en nourrice deux ou trois». Elle est donc postérieure à 1588. Or, à ce moment il avait perdu ses cinq enfants en bas âge; par suite ces mots «deux ou trois» ne s’appliquent qu’au nombre de ceux qui avaient été mis en nourrice, ce placement en nourrice n’étant qu’un détail auquel, avec raison, il n’attache pas d’importance; si toutefois il le mentionne, c’est pour expliquer que le regret de leur perte a été atténué, ce qui s’explique assez naturellement, par ce fait qu’ils n’étaient pas élevés sous ses yeux.
31, Pallefrenier.—Plutarque, Apophth.
35, Esse.—Tite-Live, XXXIV, 17.—Cette mesure fut appliquée à tout le pays entre les Pyrénées et l’Èbre dont Caton, allant entrer en opérations dans le midi de l’Espagne, redoutait les soulèvements sur ses derrières.
38, Vilité.—Bassesse, du latin vilitas qui a cette même signification et d’où dérive notre adjectif vil.
40, Desbauche.—Sous-entendu: qui régnait autour de lui.
40, Conuioyt.—Ce verbe est au singulier, bien qu’ayant quatre sujets, dont un au pluriel; ce mode est fréquent dans Montaigne, il se rencontre souvent aussi dans Racan.
12, Mortelle.—Origène se fit eunuque, prenant à la lettre ce passage de l’Écriture: «Beati qui se castraverunt propter regnum cœli (Heureux ceux qui se réduisent à l’impuissance pour l’amour du ciel)». Matth., XIX, 12.
14, Creua.—Démocrite, qui, a-t-on dit, se serait rendu aveugle en se crevant les yeux par la réflexion des rayons solaires à l’aide d’un miroir; mais le fait est controuvé. Tertullien l’accepte et dit que c’était pour se défendre de l’attrait des femmes; Plutarque le nie et donne comme probable que la cécité a été causée par l’âge et qu’il a fait de nécessité vertu; d’autre part, S. Jérôme, écrivant à Abigans pour le consoler d’être devenu aveugle, lui dit que «quelques philosophes se sont arraché les yeux, afin que leur esprit, dégagé de tous les objets sensibles, pût former des idées de plus en plus pures».—En Chine, fréquemment des anachorètes agiraient ainsi, «fermant de la sorte, disent-ils, deux portes à l’amour, pour en ouvrir mille à la sagesse».—D’après la légende, Somona Codom, le législateur des Siamois, aurait eu recours à ce même moyen, pour être moins distrait par les objets extérieurs.
18, Soy.—Au dire de Diogène Laerce, I, 26, la réponse de Thalès aurait été: «C’est que j’aime les enfants»; laquelle prête à double interprétation, étant donné ce que les anciens entendaient par aimer les enfants.
19, Choses.—Non moins que la coutume (V. I, 170).—L’opinion est reine du monde, elle l’est si bien que «lorsque la raison veut la combattre, elle est condamnée à mort; il faut qu’elle renaisse vingt fois de ses cendres, pour arriver peu à peu à chasser l’usurpatrice» (Voltaire).—«Qui dispense la réputation, donne le respect et la vénération aux personnes, aux grands, sinon l’opinion? Elle dispose de tout» (Bossuet).
27, Fret.—C.-à-d. nous prêtons toujours aux choses une valeur en rapport avec ce qu’elles nous coûtent.—Le fret d’un navire, c’est son prix de location et son chargement; courir à faux fret, c’est naviguer avec un chargement au-dessous de ce qu’il pourrait transporter et par extension à perte.
29, Tel.—Aristippe.—Diogène Laerce, II, 77; Horace, Sat., II, 3, 100.
31, Dit.—Sénèque, Epist. 17.
1, Soulagement.—«Grande fortune, grande servitude»;—«Qui n’a guère, n’a guerre»;—«Il n’est richesse que de science et de santé», disent des adages bien répandus.
15, Piperesse.—C.-à-d. de manière que par loyauté, je devenais économe et inspirais ainsi plus de confiance à mes créanciers. Coste.
21, Iniurieusement.—Injustement; du latin injuria, qui signifie contre le droit, tort, injustice.
32, Sens.—C-à-d. à ma prévoyance et à ma raison.
33, Cæsar.—Avant d’occuper aucune charge publique, César était endetté de 1.300 talents, près de six millions et demi de notre monnaie; et lorsqu’en qualité de préteur il reçut le gouvernement de l’Espagne, il devait 8.000 talents, soit environ trente-huit millions (Plutarque).
4, Rente.—C’est probablement à cela que s’élevaient ses revenus.—Deux mille écus, c’est six mille francs, l’écu étant de trois livres, quand il n’est pas spécifié qu’il est de six; mais la valeur de l’argent, à cette époque, était environ le double de ce qu’elle est aujourd’hui.
8, Frangitur.—Godeau, évêque de Grasse, a donné de ce vers la traduction suivante, que Corneille a transportée dans Polyeucte:
9, Poincte.—Renverser, bouleverser, mettre sens dessus dessous.—Cette expression «cul sur poincte» vient de ce qu’anciennement on appelait «cul», dans l’aiguille, la partie opposée à la pointe, qu’actuellement nous appelons «tête».
21, De l’argent... prins.—Var. de 88: des biens, ausquels ie me prins si chaudement, que.
24, Ordinaire.—C.-à-d. si on n’avait une avance d’une année de revenu.
13, Bion.—Sénèque, De la Tranquillité de l’âme, 8.
20, Enuis.—C.-à-d. «et moins à contre-cœur», tournure latine minus invitus.
27, Part.—«L’argent est un bon serviteur, mais un mauvais maître» (Bacon).
30, Platon.—Des Lois, I, 1.
33, Fils.—Plutarque, Apophth.—Le fait y est attribué à Denys l’Ancien.
33, Eut.—Add. de 88: sur ce propos.
40, Quelques.—L’éd. de 88 aj.: quatre ou cinq.
1, Despence.—Probablement celui qu’il fit en Allemagne en 1580-81.
12, Faict.—C.-à-d. précisément au moment où nous en aurons le plus besoin.
16, Terres.—Pourtant il en acheta; il existe trace, à cet égard, de deux acquisitions assez importantes.
20, Vieux.—Add. de 88: laquelle i’ai tousiours tenu la moins excusable.
21, Folies.—Il ne faudrait pas en conclure que Montaigne ait dilapidé son patrimoine, il l’a plutôt accru; à son décès, sa succession a été estimée 90.000 livres et l’argent avait alors une valeur bien autrement grande que de nos jours.
31, Amy.—Xénophon, Cyropédie, VIII, 3.—Chateaubriand écrivait à Joubert: «Je suis ennuyé de toujours courir pour mon compte les chances de la vie; et si quelqu’un voulait se charger de me nourrir, de me vêtir et de m’aimer, cela me ferait grand plaisir.»
10, Trouue.
12, Vérité.—Qu’importe, en effet, que l’on soit fondé ou non à se plaindre de son sort? Du moment qu’on se trouve malheureux dans une position heureuse ou agréable, on l’est réellement; le bonheur ou le malheur sont choses purement relatives, et il est aussi absurde d’en vouloir juger chez autrui, que du degré de sensation de froid et chaud qu’il peut éprouver.
28, Eau.—Tycho-Brahé (astrologue suédois du XVIe siècle) est, dit-on, le premier qui ait bien connu et expliqué la réfraction.
29, Voye.—Depuis ces mots: «Certes, tout en la maniere», jusqu’ici, Montaigne traduit Sénèque, Epist. 81.
35, Abstersiue.—Du latin abstergere, dissiper, faire disparaître, nettoyer.
7, De se reietter... reliques.—Var. des éd. ant.: nous donner en paiement cecy.
8, Necessité.—Sénèque, Epist. 12.
CHAPITRE XLI.
23, Autre.—«La passion de la gloire est la dernière dont les sages eux-mêmes se dépouillent.» Tacite, Hist., IV, 6.
30, L’encontre.—C.-à-d. que vous ne pouvez guère lui résister.
30, Cicero.—Dans le Plaidoyer pour Archias, II.—Cette pensée est reproduite aussi par Pascal.
9, D’autruy.—Plutarque, Marius.—En 102. Les Cimbres descendant d’Allemagne par la vallée de l’Adige, Luctatius qui leur était opposé abandonna la région montagneuse pour se retirer sur le cours inférieur de ce fleuve, sur lequel il construisit un pont lui permettant de passer à volonté d’une rive sur l’autre et de conserver ainsi sa liberté de manœuvres; mais les barbares obstruèrent le cours d’eau, le franchirent; les Romains effrayés s’enfuirent. Le consul fit alors lever l’aigle, ce qui était le signal de la retraite, et, courant aux premiers rangs, se mit à leur tête, aimant mieux que la honte de ce mouvement rétrograde tombât sur lui, plutôt que sur sa patrie, et que les soldats eussent l’air non de prendre la fuite, mais de suivre leur général. Marius, son collègue, qui venait d’exterminer les Teutons, alliés des Cimbres, qui avaient essayé de pénétrer par la Ligurie, en suivant le bord de la mer, l’ayant rejoint, ils vainquirent et exterminèrent les Cimbres à leur tour, à Verceil.
17, Despens.—Antoine de Lèves, le plus habile des généraux de Charles-Quint, qui de simple soldat s’était élevé aux plus hautes dignités militaires, croyait tellement cette entreprise immanquable, dit Brantôme, Vies des hommes illustres, qu’il disait à l’empereur qu’il espérait bien que cela le mènerait à Paris, et demandait pour récompense d’être enterré à Saint-Denys. Son vœu fut exaucé, en ce qu’il mourut de chagrin, dit-on, de voir cette expédition échouer, et qu’il fut enterré à Saint-Denys, mais non près Paris, dans une église de Milan, placée sous ce vocable.—D’autres assurent, au contraire, que ce général fut entièrement opposé à ce dessein qui devait réussir si mal, et qu’il alla jusqu’à se jeter aux pieds de Charles-Quint pour le détourner de franchir les Alpes.
22, N’estoit.—Plutarque, Apophth. des Lacédémoniens.
34, Exploit.—En 1346. «Quoi qu’il arrive, aurait, au dire de Froissart, I, 30, ajouté le roi, ne vous adressez plus à moi de la journée, tant que mon fils sera vivant.» Ce fait est d’autant plus remarquable, qu’on ne saurait nier que, chez les princes, la jalousie contre leurs fils ou leurs frères, et, en général, contre ceux qui doivent leur succéder, ne soit un mal très fréquent.
37, Sienne.—Plutarque, Instructions pour ceux qui manient les affaires d’État.
41, Obeyr.—Plutarque, Apophth. des Lacédémoniens.
4, Personne.—En 1591, Grégoire XIV promulgua un bref, à l’occasion de la Réforme, qui permettait à tous les ecclésiastiques de porter les armes contre les hérétiques.
8, Raison.—C.-à-d. les fit lui-même prisonniers.
11, Salsberi.—Le comte de Salisbury commandait les Anglais; c’était un frère bâtard de Jean Sans-Terre, roi d’Angleterre à ce moment.
12, Autre.—C.-à-d. c’était une subtilité de conscience à celle dont il va être parlé, car il s’agit de ce même évêque à la même bataille.
14, Masse.—De la sorte il mettait les gens hors de combat en les assommant, mais sans verser le sang, ce qu’interdisait aux ecclésiastiques un concile tenu à Trente en 1163, dont il respectait la décision en la tournant. Antoine Guerara parle d’un prêtre espagnol qui, lors de la conquête de l’Amérique, armé d’une arquebuse, tirait sur les Indiens, les bénissant au préalable en faisant un signe de croix avec son instrument de mort.—La masse d’armes tenait de la massue et du casse-tête; elle se composait d’une tige de fer, d’environ 0m,80 de long, terminée par une masse de même métal, soit sphérique, soit ovoïde, de la dimension d’une grosse orange, soit unie, soit garnie de pointes.
CHAPITRE XLII.
16, Entre nous.—Montaigne ne traite cette question qu’en ce qui touche l’individu; elle se pose aujourd’hui, autrement sérieuse, au point de vue des collectivités.
L’idée de remédier aux injustices du sort, en mettant en commun tout ce qui constitue les richesses d’un pays, en les confisquant ou les rachetant au profit de l’État, avec charge de les exploiter, chacun y participant sous son contrôle, et d’en répartir les revenus, n’est pas nouvelle; elle était la base de la législation à Sparte, et les Gracques cherchèrent à la faire triompher à Rome; aujourd’hui elle prend corps de plus en plus en France.
C’est là le principe fondamental du socialisme qui, avec l’accaparement par l’État de toutes les entreprises et de toutes les industries, vise à faire disparaître les fortunes grandes et moyennes par l’impôt progressif sur le revenu, l’élévation des droits de succession; tarissant du même coup tout ce qui stimule l’homme, le porte aux inventions, aux entreprises hardies et de longue haleine, en l’éloignant de toute préoccupation d’avenir et d’ambition; nivelant toutes les intelligences par une éducation identique, gratuite et obligatoire; enfin, par la puissance du nombre, dépouillant les classes actuellement dirigeantes de tout pouvoir politique: idéal qui n’est autre que celui d’une basse égalité et humiliante servitude.
Le socialisme répugne à reconnaître la supériorité intellectuelle, à laquelle l’humanité doit tous les progrès, et est ennemi du capital qui n’est en somme que le résultat du travail soit matériel, soit intellectuel, accumulé, qui seul permet les grandes entreprises; en Russie il a un champ d’expérience, le collectivisme agraire règne dans certaines régions et, de ce fait, le perfectionnement de la culture y est entravé, le rendement est moindre et le paysan russe n’aspire qu’à être libéré de ce joug et à voir se constituer la propriété individuelle, au rebours de ce que chez nous rêve le socialisme!
C’est surtout parmi les manœuvres, les ouvriers de la plus infime catégorie, mais qui sont aussi les plus nombreux, et les déclassés, qu’il recrute ses adeptes; les artisans, les populations agricoles, chez lesquels prévaut l’instinct de la propriété, y sont moins accessibles. Les plus ardents sont le produit dégénéré de nos universités et de nos écoles, cette cohue de licenciés et de bacheliers sans emploi, d’instituteurs mécontents de leur sort, professeurs dont le mérite est méconnu. A ces épaves des concours que l’État n’a pu caser, viennent se joindre quelques âmes candides autant que peu clairvoyantes qui, par un sentiment non raisonné, accepté par contagion, voient dans la réalisation de ce programme le règne de la justice et de la félicité universelles, comme si elles étaient de ce monde; enfin il a pour lui, et c’est là sa plus sûre chance de réussite, la peur et l’indifférence, ces deux grandes infirmités de la bourgeoisie moderne; sans compter qu’il se trouve en terrain tout préparé par la prédominance que l’État occupe en France, où chacun recherche sa tutelle.
Ce concours de circonstances fait que le Socialisme progresse chez nous à grands pas; déjà, il a gangrené les sphères parlementaires, a pris place dans le gouvernement, si bien qu’il n’est pas chimérique de prévoir qu’il en arrivera à ses fins à assez bref délai. Mais, vraisemblablement aussi, l’heure de son avènement sera aussi celle de son déclin; il se heurtera alors à des nécessités économiques et psychologiques qui amèneront de sanglants cataclysmes, et la foule déçue et si versatile se jettera, en l’acclamant, aux pieds d’un César quelconque qui sera parvenu à rétablir l’ordre intérieur, au prix de la liberté et peut-être au risque des pires aventures, continuant ainsi le cycle perpétuel des événements auxquels est assujettie l’humanité.
Ce socialisme d’État est présenté par tous ses partisans comme l’unique solution à la lutte entre le travail et le capital qui, avec les progrès de l’industrie, acquiert d’autant plus d’acuité, que, du fait de l’énorme extension donnée aux affaires, patrons et ouvriers deviennent de plus en plus étrangers les uns aux autres, que n’existe plus l’affection familiale d’antan née de leurs rapports continus, lutte qui, au grand préjudice de leurs intérêts communs, se traduit par des grèves répétées de plus en plus longues comme durée, donnant lieu à des incidents de plus en plus graves.—Il est indéniable que les revendications ainsi poursuivies, qui ne sont autres qu’une amélioration du sort des travailleurs, proportionnée aux bénéfices qu’ils contribuent à réaliser, sont des plus légitimes. Depuis longtemps elles ont reçu un commencement de satisfaction dans bien des cas et sous bien des formes: caisses de retraites, assurances diverses, sociétés de secours mutuels, sociétés coopératives d’alimentation, maisons ouvrières, etc...; mais toutes ces institutions, quoique d’efficacité réelle, ne sont que des palliatifs entachés d’un vice originel: l’intrusion du patron. Seules sont susceptibles d’être acceptées sans froissement d’amour-propre celles qui, affranchies de tout caractère de dépendance, mettent l’employé sur un pied d’égalité avec celui qui l’emploie et créent au premier les mêmes droits qu’il réclame sur un ton d’autant plus élevé que la loi, en autorisant des syndicats irresponsables et des grèves sans garantie effective contre la violence, sans sauvegarde réelle pour ceux qui veulent continuer le travail, lui donne une force dont, excité par des meneurs soudoyés souvent par l’étranger qui a intérêt à voir ruiner les industries similaires du voisin, soutenu parfois de ses subsides, il ne se fait pas faute d’abuser.
Au premier abord, la participation aux bénéfices semble réaliser cet accord si désirable pour l’un comme pour l’autre, entre l’ouvrier et le patron; mais la pratique n’a pas confirmé la théorie; l’accord existe quand il y a bénéfice et disparaît quand il y a perte. Le seul mode qui a donné le moins de mécomptes, est l’exploitation en commun, dont il existe quelques exemples de différents genres, tous ceux y attachés en étant copropriétaires par le moyen d’actions de prix peu élevé, 25 fr. par exemple, facilement acquises par chacun au moyen d’un léger prélèvement obligatoire sur son salaire journalier récupéré à la longue par la participation au dividende (G. Lebon).
17, Lieu.—Dans son traité Que les bêtes usent de raison, vers la fin.
18, Internes.—Add. de l’éd. de 80: Car quant à la forme corporelle, il est bien euident que les especes des bestes sont distinguées de bien plus apparente difference que nous ne sommes les vns des autres.
20, Commun.—Add. de l’éd. de 80: (car les folz et les insensez par accidents ne sont pas hommes entiers).
22, Beste.—Add. des éd. ant.: c’est-à-dire que le plus excellent animal est plus approchant de l’homme de la plus basse marche, que n’est cet homme d’vn autre grand et excellent.
35, Brasses.—Longueur de l’étendue des deux bras, y compris le travers du corps, d’où son nom; exactement cinq pieds de 0m,33, soit 1m,65. Est encore employée dans la marine comme mesure de profondeur d’eau et de la longueur des cordages.
41, Circo.—Ce passage de Juvénal a été imité par Boileau:
2, Oyseau.—Un oiseau de fauconnerie.
2, Longes.—Terme de fauconnerie; laisse de cuir à l’aide de laquelle on portait et maintenait l’oiseau sur le poing.
5, Poche.—«Acheter chat en poche», c’est acheter une chose sans la voir, s’engager sans se rendre compte de ce qu’on fait; on disait jadis «chat en sac», de ce que pour dissimuler le gibier, on l’enfermait dans un sac, et que, vendu de la sorte, le lièvre ou lapin qui était censé s’y trouver, n’était souvent qu’un chat.
6, Cheual.—Sénèque, Epist. 80.
6, Bardes.—Ornements, caparaçons.
22, Quatrain.—Ancienne monnaie valant un liard (un peu plus d’un centime); du latin quadrans, également pièce de monnaie qui était le quart de l’as romain.
24, Ancien.—Sénèque, Epist. 76.
31, Traictes.—Nues, tirées du fourreau; du latin destrictus.
32, Equale.—Égal; du latin æqualis. Mot forgé par Montaigne.
42, Empire.—Add. des éd. ant.: et ses richesses: il vit satisfait, content et allegre.
3, Stupide... seruile.—Var. des éd. ant.: ignorante, stupide et endormie, basse, seruile, pleine de fiebure et de fraieur.
8, Vilain.—Roturier; un vilain, c’était à proprement parler un serf; ce mot dérive du latin villanus, qui lui-même vient de villa, métairie. Il est à remarquer que ce nom de villa, ville, qui était autrefois uniquement attribué aux habitations d’exploitation en pleine campagne, a reçu une acception opposée à son étymologie en s’étendant aux agglomérations importantes.
11, Chausses.—On désignait sous ce nom la partie du vêtement de l’homme depuis la ceinture jusqu’aux genoux.—Ce passage a été pris à partie par Pascal: «Cela est admirable, dit-il: on ne veut pas que j’honore un homme vêtu de brocatelle et suivi de sept à huit laquais! Eh quoi! il me fera donner les étrivières, si je ne le salue. Cet habit, c’est une force, il n’en est pas de même d’un cheval bien harnaché à l’égard d’un autre. Montaigne est plaisant de ne pas voir quelle différence il y a, d’admirer qu’on y en trouve et d’en demander la raison.»—Cette critique a aujourd’hui bien perdu de sa valeur; on ne risque plus d’être battu, à ne pas saluer qui que ce soit; et la presse notamment respecte aussi peu les gens que la vérité; elle en est arrivée, en effet, à un degré de licence d’autant plus grand que la protection de la justice contre ses écarts est aussi insignifiante dans la répression que douteuse, difficile et coûteuse à obtenir; c’est bien elle qu’Ésope qualifierait maintenant la meilleure et la pire de toutes les choses.
15, Diane.—Hérodote, V, 7, d’où cette assertion est tirée, dit que les rois de Thrace adoraient Mercure à l’exclusion de tout autre dieu et se croyaient descendus de lui, mais il n’ajoute pas qu’ils méprisaient les autres.
15, Peintures.—Montaigne en revient à son idée que les rois et les grands ne sont différents des autres hommes que par les habits.
29, Lictor.—Licteur, sorte d’appariteur, qui, dans l’ancienne Rome, marchait devant les premiers magistrats; il portait une hache entourée d’un faisceau de verges. Le préteur en avait six, le consul 12, le dictateur 24; la vestale, quand elle sortait, était également précédée d’un licteur.
2, Bonnetades.—Salutations en ôtant son bonnet, sa coiffure.
4, Colique.—Dans les lettres attribuées à Diogène le Cynique, on lui fait dire: «Les murailles ne te défendront pas, les maux sautent par-dessus; la fièvre n’est pas arrêtée par un mur, ni le catarrhe par une armée d’alliés.»
12, Dieux.—Plutarque, Apophth., Alexandre.—Ce fut dans un combat contre les Assacéniens, peuplade du cours supérieur de l’Indus, qu’Alexandre, atteint par un trait au talon, tint ce propos. Toujours avec ses troupes, nul ne se prodigua davantage, et nombreuses furent ses blessures: En Illyrie, il faillit être assommé d’une pierre et reçut un coup de pilon sur la nuque; au passage du Granique, il eut son casque fendu; à la bataille d’Issus, la cuisse traversée d’un coup d’épée que lui porta Darius lui-même; au siège de Tyr, il fut blessé assez grièvement à la poitrine; à celui de Gaza, un trait le frappa au pied, un autre lui transperça l’épaule; en Hyrcanie, sur les bords de la mer Caspienne, une pierre l’atteignit à la figure et faillit lui faire perdre la vue; au pays des Maracandiens, dans la Sogdiane, il fut blessé à la jambe; il a été question plus haut de la blessure qu’il reçut chez les Assacéniens; chez les Malliens, nation du cours moyen de l’Indus, un trait l’atteignit à la poitrine.
15, Rien.—Plutarque, Apophth., Antigone.
20, Cela.—C.-à-d. qu’importe.
33, Podagram.—Les éd. ant. aj. cet autre vers d’Horace, que l’édition de 1595 reporte à III, 684: Sincerum est nisi vas, quodcunque infundis, acescit (dans un vase impur, tout ce que vous y versez se corrompt).
36, Paré.—C’est là une observation qui, tout au moins, comporte des exceptions. Pour ma part, j’ai longtemps possédé un cheval d’armes qui, lorsqu’on lui mettait son harnachement de grande tenue, devenait tout autre; il piaffait pendant qu’on le sellait et, une fois monté, arrondissait son encolure, relevait ses allures et ne souffrait qu’impatiemment de se voir précédé par un autre, habitué qu’il était en pareil cas à tenir la tête.
36, Platon.—Lois, II.
1, Strette.—Pincement, élancement; du latin strettus, serré, pressé.
4, Grandeurs.—Dans Don Quichotte, Sancho Pança dit qu’«un pape enterré ne tient pas plus de place qu’un sacristain».—Un dicton populaire: «Mieux vaut goujat debout, qu’empereur enterré.»—Et Malherbe:
10, Biffe.—De l’italien beffa, pierre fausse, et par extension niche, moquerie; signifie ici: dehors trompeurs, fausse apparence.
12, Terre.—Plutarque, Si l’homme sage doit se mêler d’affaires d’État.
13, Roy.—Depuis Montaigne des changements radicaux se sont produits en France à cet égard. A l’autorité effective des rois, s’est d’abord substituée l’action dirigeante des classes moyennes, au profit surtout desquelles s’était faite la Révolution de 1789. Celles-ci, abstraction faite de quelques rares individualités, par le manque de caractère qui leur est propre, méconnaissant dans leur vue courte et inconsciente les devoirs que cette situation leur imposait, plus préoccupées de ce qui, sur le moment, les touche personnellement que de l’avenir et de l’intérêt général, ont laissé s’implanter le parlementarisme. A ce régime, de chute en chute et aidés dans cette évolution par l’affaiblissement des croyances religieuses et les conditions nouvelles d’existence et d’idées, suite des découvertes modernes dans les sciences et l’industrie, nous devons d’en être arrivés à l’avènement des classes populaires à la vie politique, et à leur aspiration à la direction des affaires publiques; à ce que Le Bon appelle l’ère des foules.
Ce n’est plus, dit-il avec bien juste raison, dans les conseils des princes, mais dans l’âme des foules que se préparent les destinées des nations. Leur voix est devenue prépondérante; par leur organisation actuelle, maintenant surtout que des mains imprévoyantes ont successivement renversé toutes les barrières qui pouvaient les contenir et que déjà une partie des pouvoirs publics est à elles, elles constituent une puissance avec laquelle il faut compter, et leurs revendications qui portent sur l’augmentation de plus en plus grande des salaires, concurremment avec la limitation des heures de travail, l’expropriation de toutes les sources de revenus, des chemins de fer, des mines, du sol, le partage égal de tous les produits, l’élimination de toute supériorité, tendent à la destruction de la société actuelle et à un retour au communisme primitif des groupes humains.
En analysant l’esprit qui les anime, on constate que les foules ont pour caractéristiques essentielles: l’irréflexion; souvent les mots les plus vides de sens, frappant leur imagination, suffisent à les conduire; une crédulité excessive, l’invraisemblance n’existe pas pour elles; l’exagération, la soudaineté de leurs résolutions; une intolérance qui fait qu’elles ne supportent aucune objection, ne se laissant arrêter par aucune considération; le sentiment de leur force qui est devenue immense en raison de leur nombre et de ce qu’elles échappent à toute responsabilité; l’inconscience de leurs actes. Très difficiles à gouverner, elles veulent les choses avec frénésie et sont surtout propres à détruire; la justice et la raison sont sans prise sur elles; la force seule leur en impose, pour elles la bonté n’est qu’un signe de faiblesse: «Il n’est rien moins esperable de ce monstre... que l’humanité et la douceur; il receura bien plustost la reuerance et la crainte» (I, 198).
L’individu en foule diffère essentiellement de l’individu isolé; du moment qu’il est en foule, il acquiert le sentiment d’une puissance irrésistible, s’imagine irresponsable et cède à des instincts que seul il eût forcément refrénés, car par une sorte d’hypnotisme produit par les effluves qui émanent du milieu dans lequel il se trouve, sa mentalité s’altère, le plus intelligent, le plus savant descend au niveau de ceux qui le sont le moins: il n’a plus de volonté, sa raison cesse de le guider, il devient inconscient et capable d’obéir à toutes les suggestions, «l’ardeur de la societé rauissant les particuliers iugements» (I, 648). Cet effet se produit que la foule soit homogène ou non, qu’elle soit composée d’éléments quelconques ou choisis; c’est à cela qu’on voit des jurys rendre des verdicts que désapprouvent chaque juré individuellement, des assemblées parlementaires adopter des lois et des mesures que réprouvent en particulier chacun de ses membres; sous ces influences ambiantes l’avare se transforme instantanément en prodigue, le sceptique en croyant, l’honnête homme en criminel, le héros en poltron; «la contagion est tres dangereuse en la presse» (I, 410).
Les foules ne sauraient se passer de meneurs. Ce sont le plus souvent des rhéteurs subtils ne poursuivant que des intérêts personnels, cherchant à persuader en flattant de bas instincts, agissant fréquemment en sous-main, et s’esquivant quand il pourrait y avoir danger. Leur autorité très despotique, ne s’imposant la plupart du temps que par ce despotisme, peut à un moment être très grande, et de plus en plus ils tendent à remplacer les pouvoirs publics au fur et à mesure que ceux-ci se laissent discuter, sans cependant que pour eux la Roche Tarpéienne soit toujours très proche du Capitole.—Parmi les meneurs, il en est parfois qui ont foi et sacrifient tout, intérêts, famille, à leurs convictions, toujours prêts à l’action; leur parole en acquiert d’autant plus de puissance; mais ceux-là sont rares et presque toujours c’est pour d’autres qu’ils retirent les marrons du feu.
Les foules sont au plus haut degré impressionnables, et qui connaît l’art de les impressionner, connaît aussi celui de les gouverner. Ce qui frappe leur imagination affecte toujours une forme simple, nette, c’est-à-dire dégagée de toute interprétation, de tout commentaire accessoires, en même temps que très exagérée, tels: une grande victoire, un grand miracle, un grand accident, un grand crime, un grand espoir. L’orateur qui veut les séduire, doit s’imprégner de ces idées et affirmer, exagérer, répéter, sans se laisser aller à produire de preuve ou tenter de démontrer quoi que ce soit par le raisonnement.—Pour acquérir sur elles une action prolongée, il faut la foi, ou le prestige, qu’il vienne du nom, de la situation; et encore faut-il dans l’un ou l’autre cas que l’occasion se produise et que les circonstances s’y prêtent.
16, Imbecillité.—Faiblesse, du latin imbecillitas qui a cette même signification atténuée. C’est dans ce sens que ce mot est constamment employé dans les Essais.
25, Xenophon.—Dans le traité intitulé Hiéron ou de la condition des rois.
32, Ennuyeuse.
1, Démettre.—Rabaisser, descendre; du latin demittere qui a ce sens.
14, Butte.—C.-à-d. les princes sont trop en vue et trop observés.
21, Mesme.—Cicéron, De Legibus, III, 14.
30, Maiesté.—Sémélé, mère de Bacchus qu’elle tenait de Jupiter, cédant aux conseils insidieux de Junon qui, jalouse d’elle, avait pris les traits de sa nourrice pour la perdre, demanda au maître des dieux de se montrer à elle dans tout l’éclat de sa puissance. Après avoir longtemps résisté, Jupiter céda et lui apparut au milieu des foudres et des éclairs; le palais s’embrasa, et Sémélé périt dans les flammes. Myth.
33, Païs.—Les lois fondamentales de certains pays interdisaient aux rois de sortir de leurs États. Les temps sont bien changés, les souverains de nos jours passent leur temps à voyager, et Paris ayant l’honneur de leur visite qui fréquemment leur est rendue dans leur propre pays, ce ne serait pas une minime économie budgétaire que d’établir en principe que, sauf circonstances toutes particulières, l’incognito est de rigueur pour tout souverain qui met le pied sur le sol français et que, comme jadis aux doges de Venise, il est interdit au Président de la République, pendant la durée de ses fonctions, de sortir du territoire; sans compter que, s’il en eût été ainsi, ne se serait pas produite, lors d’une visite rendue à Rome au roi d’Italie, cette grossièreté (qu’il eût été si facile d’éviter, si elle n’avait été intentionnelle, en choisissant une autre ville comme lieu de rencontre) faite au Pape, de ne pas aller le voir, de sembler l’ignorer, alors que la religion catholique, dont il est le chef, était encore reconnue par le Gouvernement, auprès duquel il n’avait cessé d’avoir un représentant attitré; la question de la séparation de l’Église et de l’État était déjà à la vérité dans l’esprit de quelques-uns, cet incident a pu la précipiter parce qu’on en veut toujours à ceux envers lesquels on a des torts; on reconnaîtra qu’il n’était cependant pas indispensable pour y arriver.
42, Percée.—Louis XIV, à Versailles, en 1685, avait sur l’état de sa maison un office de cette nature qui y figurait pour une dépense de 15.000 livres.
6, Temps.—César, De Bello Gallico, VI, 23, dit simplement que chez les Germains, et non en Gaule, «en paix il n’y a pas de magistrats dont l’action s’étende sur l’ensemble; ce sont les chefs qui, dans chaque territoire et dans chaque localité, rendent la justice et veillent au bon ordre». Mais peut-être Montaigne a-t-il une réminiscence d’un passage de Cicéron, Ep. fam., VII, 5, qui reproduit ici une lettre de César qui écrit: «Quant à M. Orfius que tu me recommandes, j’en ferai un roi des Gaules, on l’enverrait quelque part autre avec une délégation.»
20, Venise.—Nous disons aujourd’hui le Doge de Venise; quant à être libre, il ne l’était guère, quoi qu’en dise Montaigne.
32, L’autre.—Idée déjà émise liv. I, ch. III (I, 30).
7, Plus tost... la leur.—Var. des éd. ant.: pour en tirer leurs agrandissemens et commodités particulieres.
7, Fortune.—Montaigne semble s’être inspiré ici du souvenir de Tacite qui fait dire par l’empereur Galba à Pison qu’il vient d’associer à l’empire: «Toi et moi, nous nous parlons aujourd’hui en toute franchise; les autres parlent à notre fortune plus qu’à nous-mêmes»; et il ajoute: «Ce qui coûte, c’est conseiller aux princes de faire leur devoir; les approuver dans tout ce qu’ils font, ce n’est pas les aimer.»
14, Seroient.—Ammien Marcellin, XXII, 10.
25, Semez.—Aurel. Victor, Dioclétien.—L’empereur Dioclétien avait abdiqué. Les affaires de l’empire s’aggravant, Maximien, auquel il avait cédé le pouvoir, l’envoya solliciter de les reprendre; pour toute réponse celui-ci l’invita à venir voir ses jardins à Salone.
25, Anacharsis.—Plutarque, Banquet des sept sages, 13.
28, Precedence.—Supériorité; du latin præcedere, précéder, exceller, surpasser.
29, Italie.—Plutarque, Pyrrhus.—En 280. Pyrrhus, roi d’Épire, avait des talents, mais ambitieux et inconstant, il n’a laissé que la réputation d’un aventurier; il conquit la Macédoine qu’il ne put conserver, combattit les Romains, guerroya en Sicile et fut tué à Argos.—Dans sa première Épître, Boileau a imité ce passage.—V. N. I, 46: Médecin; 352: Italie; 404: Pleurer; 524: Iournée.
4, Deux.—En 1815, Blücher, le vainqueur de Waterloo, bivouaquant quelques jours après dans le château de S.-Cloud, disait, en en admirant les richesses: «Faut-il qu’un homme soit fou, pour avoir été courir à Moscou, quand il avait toutes ces belles choses en sa possession!»
CHAPITRE XLIII.
12, Fin.—Philippe le Bel fit des lois pour réprimer le luxe qui devenait excessif: les ducs, les comtes et les barons ne pouvaient donner à leurs femmes que quatre robes par an; les dames moins riches ne devaient en avoir qu’une; il n’y avait que les femmes de grands seigneurs qui pouvaient employer des étoffes à 30 sols l’aune (lm,20); les bourgeoises ne pouvaient y mettre que dix sols, ce qui équivalait à 20 sous de notre monnaie. Ces ordonnances tombèrent bien vite en désuétude.
16, Choses.—Les éd. ant. port.: vanitez.
23, Degrez.—C.-à-d. nous et le rang que nous occupons.
1, Ville.—Les éd. ant. port.: que vous en faisiez soudain argument que c’estoit un homme de néant (éd. ant. à 88), peu (éd. de 88).
6, Pollisseure.—Propreté, du latin politura qui a même signification; et par extension, éclat.
7, Roys.—Les éd. ant. aj.: et les princes.
12, Locriens.—Diodore de Sicile, XII, 20.—Une des lois de Zéleucus portait que l’adultère aurait les yeux crevés; son fils ayant été convaincu de ce crime, il voulut lui appliquer la loi; le peuple demanda grâce. Zéleucus condescendit à ses instances, en ne lui faisant crever qu’un œil, dit-on, mais en s’en faisant crever un à lui-même.
17, Putain.—Le roi saint Louis ne permettait qu’aux courtisanes de porter des ceintures dorées, d’où le proverbe: «Bonne renommée vaut mieux que ceinture dorée.»
17, Ruffiens.—Entremetteur, proxénète, de l’italien ruffians.
20, Diuertissoit.—Détourner, du latin divertere qui a même sens.
25, Cour.—L’éd. de 88 aj.: ces façons vitieuses naissent pres d’eux.—«Les citoyens d’une république sont tels que ceux qui les gouvernent.» Platon. Toutefois on dit plutôt aujourd’hui et avec juste raison: «On a le gouvernement que l’on mérite.»—«A l’exemple des rois, un chacun se gouverne.» Lacroix de Maine. Longtemps avant lui, Claudien avait écrit cet hémistiche passé en proverbe: Regis ad exemplar (à l’exemple du roi).—«Les exemples des rois nous font ce que nous sommes.» S. Didier.—«L’exemple du monarque est la loi de la terre.» La Harpe.—Louis XI ne voulait pas que son fils sût un mot de latin; toute la cour de son temps méprisa les belles-lettres; François Ier les fait enseigner à ses enfants, toute la cour s’y remet. Henri III aime la débauche, le luxe, toute la cour s’y livre.—De nos jours, un président de la Chambre des députés (un des rois du moment en France) se marie en redingote, voilà l’habit de cérémonie démodé. Le roi d’Angleterre arbore un chapeau melon, le chapeau haut de forme est menacé.—Le roi Alphonse comparait ses sujets aux plantes qui, toutes, se tournent toujours vers le soleil.
26, Chaussure.—On comprenait sous cette appellation le vêtement de la partie inférieure du corps, qui parfois n’était que d’une seule pièce, mais qui plus communément se subdivisait en haut-de-chausses, culotte s’arrêtant au genou, et bas-de-chausses ou simplement bas. Le reproche que lui fait ici Montaigne de dessiner la forme des membres occultes, il l’a déjà formulé I, 176.
6, Loix.—Liv. VIII.
CHAPITRE XLIV.
6, Pressant.—Plutarque, Alexandre, 7.—Dans la nuit qui précéda la bataille d’Arbelles (331), et contrairement à ses habitudes en pareil cas.—Le grand Condé dormit également la veille de la bataille de Rocroy (1643). «Le lendemain à l’heure marquée, il fallut réveiller d’un profond sommeil cet autre Alexandre.» Bossuet.—Napoléon disait que ce n’était pas là une preuve de grandeur d’esprit, mais de lassitude; lui-même dormit de la sorte la nuit qui précéda Austerlitz (1805).
12, Ronfler.—Plutarque, Othon, 8.—Vaincu à Bébriac (69), Othon, quoiqu’il n’eût pas encore lieu de désespérer, se sacrifia, contre le sentiment de ses soldats qui lui étaient tout dévoués, dans la pensée, qui ne se réalisa pas, de ramener la paix et l’union dans l’empire.—Louis XVI dormit paisiblement la nuit qui précéda son supplice (1793); de même le général Biron, en 1794, le maréchal Ney, en 1815.
22, Partement.—Départ.—Plutarque, Caton d’Utique, 19. V. N. II, 586: Ieune Caton.
31, Outrance.—Vraisemblablement des gladiateurs; gens qui se louaient pour combattre à l’épée, jusqu’à ce que mort s’ensuive, pour le plaisir du peuple, et aussi pour tous autres qui les prenaient à leur service, sans souci de leur propre vie, non plus que de celle de leur adversaire.
40, Escarmouche.—Plutarque, Caton d’Utique, 8.—Métellus proposait de rappeler à Rome, sous prétexte de la protéger, Pompée et ses troupes alors en Asie; c’était en réalité pour lui donner la dictature. Caton, collègue de Métellus au tribunat, s’y opposa; et, après une lutte de plusieurs jours où il eut à résister à la foule qui faillit le lapider, il parvint à empêcher que la loi ne passât (63). V. N. II, 586: Ieune Caton.
41, Cet homme.—Les éd. ant. port.: ces trois hommes, et modifient en conséquence la contexture de la phrase.
2, Ordinaires.—Le sommeil répare le corps, l’espérance répare l’esprit, ce qui faisait dire à Platon: «L’espérance est le sommeil de l’homme qui veille.»
3, Combat.—Suétone, Auguste, 16.
10, Ennemis.—En 36. Montaigne, comme Suétone d’après lequel il cite ce fait, dissimule la lâcheté d’Auguste, dont toutes les victoires qui l’élevèrent à l’empire furent l’œuvre d’autrui; celle de Philippes fut due à Antoine seul; celle d’Actium, comme la défaite de Sextus Pompée dont il est question ici, furent le fait d’Agrippa; nonobstant, il s’acquit l’affection des soldats, qui faisaient plus de cas de la libéralité de leur général que de son courage.
17, Plus.—Plutarque, Sylla, 13.—En 82, près de Préneste; Marius le Jeune, battu, se tua.
20, Sommeil.—En 186. Suivant les uns, Persée se laissa mourir de faim dans sa prison. Suivant d’autres, ayant mécontenté ses gardiens, ceux-ci pour se venger, épiant le moment où le sommeil le prenait, employaient toutes sortes de moyens de le tenir éveillé; il finit par mourir de cette insomnie continue.
21, Dormir.—Mécènes, agité d’une fièvre continue, ne dormit pas un seul moment durant les trois dernières années de sa vie. Pline, Hist. nat., VII, 52; c’est le seul exemple qu’il en donne.
23, Années.—Hérodote, IV; il dit n’en parler que par ouï dire et ne pas y croire; cela s’applique probablement aux peuples habitant les régions polaires, dont l’année, disait-on, était composée d’un jour de six mois et d’une nuit de même durée, ce qui déjà ne voudrait pas dire que les gens y demeureraient éveillés ce jour entier et dormiraient d’un seul trait toute la nuit qui la suit; en réalité pendant six mois les jours y sont excessivement courts, tandis que pendant les autres six mois ce sont les nuits dont la durée y est de plus en plus réduite.
24, Suitte.—Diogène Laerce, I; Pline, VII, 52.
CHAPITRE XLV.
25, Dreux.—Livrée en 1562, sous Charles IX, et gagnée par les catholiques sous le commandement du connétable de Montmorency et le duc de Guise, contre les protestants ayant à leur tête le prince de Condé.
4, Machanidas.—En 206, à Mantinée; bataille autre que celle livrée en ce même lieu par Epaminondas. Celle dont il est ici question se termina par une sorte de combat singulier entre Philopœmen et Machanidas, celui-ci cherchant à fuir, celui-là à l’arrêter, et dans lequel Machanidas fut tué. Plutarque, Philopœmen, 6.
18, Bœotiens.—En 394, à Coronée. Plutarque, Agésilas.
30, Route.—En pleine déroute; comme si, précipité du haut d’une montagne, il était contraint à une descente rapide, s’exécutant en désordre et sans arrêt possible. V. N. I, 366: Routes.
CHAPITRE XLVI.
3, Galimafrée.—Terme de cuisine: sauce rapidement faite, dans laquelle il entre de la moutarde et de la poudre de gingembre; par extension, assemblage, mélange, galimatias.
5, Benoist.—Jehan était souvent, au moyen âge, employé comme synonyme de sot, innocent, badaud; on dit encore de nos jours, dans le même sens: «Jeanjean»;—Guillaume se disait parfois, comme terme de mépris, des gens dont on ne faisait pas grand cas;—Benoist et Benêt se prononçaient de même façon et avaient même signification, qu’a conservée l’épithète de «benêt», niais ridicule.
8, Guillaumes.—Quatorze rois d’Égypte portèrent le nom de Ptolémée; huit rois d’Angleterre celui de Henri; neuf rois de France, à l’époque de Montaigne, s’étaient appelés Charles; la Flandre a eu neuf de ses comtes du nom de Baudoin; l’Aquitaine, dix de ses ducs du nom de Guillaume.
10, Venu.—Guienne ne vient pas de Guillaume, mais de l’ancien nom romain du pays, Aquitania, dont on a fait d’abord Aquienne, et ensuite la Guyenne.
18, Nom.—Guillaume le Breton (conseiller intime de Philippe-Auguste), étant venu à Rouen, invita à manger chez lui, le jour de la fête de son saint patron, tous les chevaliers portant ce nom; il s’en trouva trois cents.
19, Seruiteurs.—C’est la très grande affluence de gens du même nom, se distinguant parfois, mais pas toujours, par des surnoms ou des sobriquets, qui, lors des croisades, au XIIe siècle, introduisit en France, pour permettre de s’y reconnaître, l’usage des noms de famille. Chez les anciens, ce nom n’existait pas davantage, toutefois, dans les grandes familles, le nom de l’un des ancêtres qui avait marqué était quelquefois conservé, et si ses descendants ne le portaient pas toujours, il servait néanmoins à indiquer qu’il en faisait partie, tels les Séleucides en Grèce, la gens Fabia à Rome, et même les Mérovingiens, les Carlovingiens dans l’ancienne France. Cela se retrouve encore chez les Orientaux; mais, en outre, au nom de chacun s’accole d’une façon indissoluble l’indication de qui il est fils: Atman ben Mohamed (Atman fils de Mohamed).
22, Viandes.—Spartien, Géta, 5.
25, Reputation.—«Les noms ont une très grande vertu.» Platon.—«Il faut donner de beaux noms aux enfants; un beau nom vaut mieux qu’une fortune.» Pline.
26, Nom.—Add. des éd. ant.: beau et.
31, Droit.—C.-à-d. ne pouvoir, à cause de son nom, nommer à un grade ou à une place un gentilhomme, bien qu’il y eût droit.
1, Gascongne.—Philippe II, roi d’Espagne, ne voulut jamais rien faire pour un ecclésiastique, parce qu’il s’appelait Luther, du même nom que le célèbre réformateur.
4, Enfants.—Il importe, en effet, de ne pas donner aux enfants des noms, c’est-à-dire des prénoms ridicules qui dans leur jeune âge leur attirent des railleries de leurs camarades (cet âge est sans pitié), ce qui peut les rendre malheureux, leur aigrir le caractère, créer des inimitiés. De même de ceux qui sont susceptibles de donner lieu dans l’avenir à des contrastes trop saillants; combien de Blanche sont brunes, de Rose sont pâles.—On conte à ce propos l’anecdote des deux filles du roi d’Espagne Alphonse IX. L’une s’appelait Urraca et l’autre Blanca. Des envoyés de Philippe, roi de France, vinrent demander en mariage, pour leur maître, l’une ou l’autre de ces princesses. Urraca était l’aînée et beaucoup plus belle que sa sœur; celle-ci fut pourtant préférée parce que le nom d’Urraca avait moins bonne grâce et eût été moins bien accueilli en France. L’auteur qui rapporte ce fait, ajoute: «Qui ignore qu’en France le nom de Henri est considéré comme néfaste, en raison de la fin tragique des rois qui l’ont porté: Henri II, tué dans un tournoi; Henri III et Henri IV, assassinés»; toujours est-il qu’il n’a pas porté bonheur à celui de leurs descendants qui a pris le nom de Henri V et n’est jamais monté sur le trône.—On cite encore à ce sujet une remarque assez piquante du maréchal Pélissier: «Voyez quelle bizarrerie, dit-il, en parlant de quelques maréchaux ses compagnons d’armes: Canrobert s’appelle Certain (il était au contraire de peu de décision); Vaillant, Alexandre, et Randon, César (tous deux, administrateurs estimés, ne passaient pas pour des foudres de guerre); et moi, je m’appelle Aimable (ce qu’il était fort peu)!—Quant à l’importance des noms patronymiques, elle est bien autrement grande; ne voit-on pas, en effet, journellement, même à notre époque, nombre de grandes familles de France redorer leurs blasons et revivifier leur race par des alliances avec les filles de financiers, d’industriels et de commerçants auxquels la fortune a souri, comme du reste leurs pères avec les filles de fermiers généraux, alliances dans lesquelles le nom qu’ils tiennent d’illustres aïeux est leur seul apport!
14, Voyons.—Bouchet, de qui le fait semble tiré, dit que le jeune homme, presque un enfant, était le neveu du doyen de Notre-Dame la Grande qui s’appelait alors Saint-Nicolas. Couché avec une fille de joie, ce jeune homme apprit d’elle qu’elle se nommait Marie. Saisi de honte, il s’abstint de la toucher et eut une si grande contrition de son péché qu’il en mourut sur l’heure. En raison de la circonstance, il fut inhumé en terre profane; mais quelques jours après apparut sur sa tombe «une rose blanche sur branche verte nouvellement venue», bien que ce ne fût pas la saison. En raison de ce prodige, on exhuma le corps et l’on trouva dans la bouche un papier portant en lettres d’or le nom de Marie. On informa et ayant acquis la conviction qu’il était décédé de douleur et de repentir, on le mit en terre sainte, et en commémoration on changea le vocable de l’église, qui devint Notre-Dame.
14, Voyelle.—Vocale, orale.
16, Pythagoras.—Sextus Empiricus, Adversus Mathem., IV.
19, Spondaïque.—Monotone; ce qualificatif de spondaïque s’appliquait à un genre de musique, usité dans l’antiquité, composé de notes longues et d’égale durée.
22, Foy.—Tout ceci est dit par ironie contre les Calvinistes qui affectaient une piété excessive et donnaient à leurs enfants des prénoms tirés de l’Ancien Testament, au lieu de ceux en usage chez les catholiques.
2, Cognoissance.—Il est bien regrettable que ce souhait exprimé par Montaigne, bien souvent renouvelé depuis lui, soit encore à l’état de desideratum, et qu’on continue à franciser les noms propres étrangers, aussi bien les noms d’hommes que les noms de lieux, tandis que par contre on a une tendance prononcée à employer dans le langage courant nombre de mots exotiques pour désigner des choses qui souvent ont leur nom en français. Pourquoi nous obstiner à dire Londres au lieu de London, Rome au lieu de Roma; à appeler Guillaume, Charles, au lieu de Wilhelm, de Carle, les souverains de l’Allemagne, du Portugal! Cette manie de dénaturer les noms propres n’a-t-elle pas transformé en «Pas des lanciers» un lieu dit de Provence «Pas de l’ansie» dont l’appellation, par sa signification, «pas de l’angoisse, passage difficile», en expliquait la nature, et combien d’autres dans le même cas.
12, Eschappé.—La maison régnante de France était celle des Valois qui prit fin avec Henri III et descendait de Charles de Valois, fils cadet de Philippe III, petit-fils par conséquent de saint Louis, branche indirecte des Capétiens dont le point de départ, remontant déjà à trois siècles, était certainement ignoré alors de beaucoup. Et il en était de même en ce qui concernait Henri IV qui allait succéder à Henri III et tenait également ses droits de saint Louis d’une façon tout aussi indirecte du fait de son sixième fils Robert de Clermont, sire de Bourbon. On connaissait les Valois et les Bourbons, on n’avait plus guère souvenir de la manière dont ils se rattachaient aux Capétiens.
20, D’autres.—Elles sont nombreuses, en effet, les familles qui se croient ou se disent issues de sang royal: rien qu’en Gascogne, les Montesquiou, les Montlezun, les Pardailhan, les Comminges se font descendre de la première race. Mais il y en a ailleurs en France, et un peu partout: les de Croy se disent venir des rois de Hongrie; les Carrion Nisas, des rois d’Aragon; les Commène, les Lascaris, des empereurs d’Orient; les Montmorency ont une tradition mérovingienne; plusieurs princes russes, d’origine tartare, se donnent comme descendants de Gengis Khan, etc., etc..., car ils sont légion. Qu’ils soient ou non de bonne foi, en dehors des origines qu’ils avouent et de celles qu’ils n’avouent pas, de combien d’autres non moins illustres, tout comme un chacun du reste, ne seraient-ils pas en droit de se targuer, s’ils les connaissaient? Le calcul ne démontre-t-il pas qu’en France, à raison de trois générations par siècle, tous nous avons dans les veines le sang de vingt millions de contemporains de l’an mil; à qui donc à ce compte peut-on dénier d’avoir au moins un prince dans ses alliances, tout en laissant de côté les liens de parenté que nous pouvons revendiquer du fait d’Adam et Ève, nos ancêtres communs?
4, Face.—Voir pour la signification de ce langage héraldique la notice sur les illustrations.—Montaigne était fort épris de ses armoiries; il les laissa, ainsi qu’il le relate dans le Journal de ses voyages, à Plombières, Augsbourg et dans plusieurs autres villes; à Pise, il les fit «blasonner et dorer avec de belles et vives couleurs», les encadra et les cloua au mur de sa chambre «sous la condition qu’elles y resteraient; son hôte le lui promit et en fit serment». A sa mort, n’ayant point d’héritier mâle, il les légua à Charron, devenu son ami.
23, Procez.—Allusion au Jugement des voyelles de Lucien, où la consonne grecque Σ (sigma) porte plainte, devant les sept voyelles, contre Τ (tau), autre consonne, pour vol et violence, cette dernière la dépouillant de nombre de mots dans lesquels Τ s’est introduite, alors qu’ils se prononcent comme si c’était elle, Σ, qui entrait dans leur composition, ce qui se retrouve, du reste, dans notre langue où, fréquemment, t se prononce comme c, s ou z, ce qui est même une des modifications que poursuivent ceux qui, de nos jours, préconisent la réforme de l’orthographe.
26, Bon.—C.-à-d. ceci est important.
28, Connestable.—Ce nom que nous écrivons Guesclin, se trouve écrit dans les actes publics de l’époque: Glecquin, Gléaquin, Glayaquin, Glesquin, Gleyquin, Claikin, etc... Michelet.—En dehors des formes que signale Montaigne, Ménage en a relevé nombre d’autres: Guéclin, Gayaquin, Guesquinius, Guesclinius, Guesquinas, etc...—Dans ses Mémoires, III, 70, Froissart rapporte, sur l’origine de Duguesclin et de son nom, qu’un chevalier breton lui conta qu’au temps où Charlemagne combattait en Espagne les rois maures qui en étaient les maîtres, l’un de ces rois, du nom d’Aquin, passa par mer en Bretagne, débarqua à Vannes, conquit le pays et, pour affermir sa conquête et au besoin assurer sa retraite, construisit non loin de là, sur le bord de la mer, une tour «moult belle», qu’on appela le Glay. Charlemagne, de retour de son expédition, se porta contre Aquin qui, vaincu, s’enfuit en si grande hâte, qu’en se rembarquant, il oublia un de ses enfants qui dormait dans la tour. L’enfant fut porté à Charlemagne qui le fit baptiser; Roland et Olivier furent ses parrains; et, en souvenir de ces diverses circonstances, il reçut le nom d’Olivier du Glay-Aquin et de lui serait issu Bertrand du Guesclin. V. N. I, 32: Auuergne.
30, D’Alsinois.—François Ier avait fait à son sujet cet assez mauvais jeu de mots: «Pauvre comte qui ne possède que six noix.»
34, Escrits.—Le surnom de Lenis (doux) que Suétone, Othon, 10, semble donner à son père, paraît résulter d’une erreur de la part de ceux qui ont lu de la sorte. Le manuscrit où cela se lit, est avarié en cet endroit et certains estiment que ce qui s’y lit n’est que la fin du mot Paulinus, dont la première syllabe a disparu; de fait un Suétone Paulinus, personnage cité par d’autres écrivains, se trouve dans les conditions à être le père de l’auteur des Douze Césars.—Quant au surnom de Tranquillus, c’était bien effectivement celui de Suétone; Pline le Jeune, dans ses lettres, suivant l’usage des Romains, le désigne souvent par ce seul surnom.
16, Laconum.—Ce vers, traduit du grec par Cicéron, est le premier de quatre vers élégiaques qui furent gravés au bas de la statue d’Épaminondas. V. N. III, 18: Epaminondas.
19, Queat.—Fragment, également rapporté par Cicéron, de l’épitaphe que fit Ennius pour le grand Scipion, le premier, l’Africain, dont il était le familier.
CHAPITRE XLVII.
3, Parler.—C.-à-d. on a toute liberté de parler, ou, on peut parler à son aise.
9, Sainct Quentin.—En 1577; bataille livrée par le connétable de Montmorency aux Espagnols assiégeant Saint-Quentin. Le connétable y fut battu et fait prisonnier avec une foule de seigneurs, toute son artillerie et 4.000 hommes; pareil nombre demeura, en outre, sur le champ de bataille. Le duc de Savoie, qui commandait l’armée ennemie, voulait marcher sur Paris. Philippe II s’y opposa et fit continuer le siège. La ville, défendue par l’amiral de Coligny avec fort peu de moyens, fit une défense admirable et fut prise d’assaut après dix-sept jours d’attaque, alors que son enceinte était percée de onze brèches. En retenant aussi longtemps l’adversaire, elle sauva le royaume en permettant de reconstituer la résistance.
24, Guerre.—C’est cette même idée qui faisait dire à quelqu’un qu’«un général qui remporte des victoires dont tout le fruit est pour ceux qui vendent des crêpes et du drap noir, n’a pas grand mérite et ne rend pas grand service».
27, Vaincre.—Plutarque, César, 11.—En 48. César et Pompée s’y trouvaient en présence, mais dans des conditions bien différentes: Pompée, avec toute son armée et dans la plus complète abondance, parce qu’il était maître de la mer; César, avec peu de monde et en proie à la disette, parce que, pour atteindre son adversaire et le fixer, il avait fait diligence, devançant le gros de ses troupes demeuré à Brindisi, de l’autre côté de l’Adriatique, prêt à s’embarquer pour le joindre, mais attardé par le mauvais temps et le manque de bateaux.
35, Sociale.—Cette guerre (91 à 87) eut lieu entre Rome et ses alliés d’Italie, et en particulier les Marses, qui revendiquaient le bénéfice de leur alliance et entre autres le droit de cité qu’ils obtinrent. Tout en les combattant, Marius était avec eux de cœur et les épargnait dans la mesure du possible pour se les concilier, car déjà sa rivalité avec Sylla avait commencé.
5, Mort.—En 1512. Bataille gagnée sur les Espagnols et les troupes du Pape, par les Français commandés par Gaston de Foix qui y périt en dirigeant une charge contre l’infanterie espagnole qui se retirait en bon ordre; elle fut une des plus sanglantes de cette époque en Italie. Outre leur général, les vainqueurs y perdirent 6.000 hommes; les vaincus 12.000, leur artillerie et leurs bagages. Ses résultats furent nuls en raison de la désorganisation qui régnait dans notre armée, en proie, faute de solde, à l’indiscipline et à la désertion.
7, Serizolles.—En 1544. Cette bataille gagnée avec des forces inférieures par les Français, commandés par le duc d’Enghien sur les Impériaux sous les ordres du marquis du Guast, qui y perdirent 12.000 hommes, leurs canons et leurs bagages, n’aboutit qu’à une trêve de trois mois, l’invasion de nos frontières de Champagne et de Picardie ayant obligé au prélèvement d’un fort contingent sur notre armée de Piémont.
10, Necessitatis.—C’est ce que Montaigne vient de dire en français.
17, Malheur.—L’an 419; Agis Ier était roi de Lacédémone et Pharax, un des membres du conseil de Sparte, l’assistait plutôt pour lui dicter sa conduite dans les cas graves que pour émettre de simples avis. Diodore de Sicile, XIII, 25.
20, Mourut.—En 528. Lancé à la poursuite de son adversaire en fuite, Clodomir ne s’aperçut pas qu’il était bien en avant des siens, et, entendant à quelque distance retentir son cri de guerre, il y alla; c’était un piège, il tomba au milieu d’ennemis qui le massacrèrent sur place.
24, Cæsar.—Suétone, César, 67.
27, Xenophon.—Cyropédie, IV, 4.
29, Cheres.—Justin dit des Scythes qu’ils ne faisaient usage de l’or et de l’argent que pour en ornementer leurs armes.—Cet usage des Asiatiques, notamment des Perses, de se faire ainsi accompagner de leurs familles et de leurs serviteurs à la guerre, grossissait considérablement leurs armées, où le nombre des non combattants excédait souvent de beaucoup celui des combattants, ainsi que ce fut également le cas lors des invasions des Barbares dans les derniers siècles de l’Empire romain. Cela ralentissait leur marche, compliquait leur ravitaillement, mais n’influait guère sur le gain ou la perte de la bataille, parce qu’on combattait toujours de front, sans jamais manœuvrer; aujourd’hui la chose serait impossible. Par contre toute défaite sérieuse se transformait alors en un véritable désastre, ainsi qu’il arriverait immanquablement aussi en ces temps-ci, à qui se ferait suivre de pareils impedimenta.
34, Samnites.—De 343 à 290. Ces peuples ne se faisaient cependant pas remarquer par leur luxe et l’affirmation de Montaigne à leur sujet est hasardée; ils étaient surtout adonnés à la vie pastorale et à la guerre; comme caractéristique, les filles les plus belles, les plus vertueuses et les plus riches étaient chez eux le prix de services rendus à la patrie.
35, Antiochus.—Aulu-Gelle, V, 5. Après avoir repris aux Égyptiens des provinces perdues par ses prédécesseurs et conquis l’Asie Mineure, Antiochus le Grand, roi de Syrie, était passé en Grèce, quand les Romains, qu’il avait indisposés en donnant asile à Annibal, appelés par les vaincus à leur secours, le battirent aux Thermophyles (191) et, l’année suivante, à Magnésie (Asie Mineure).
3, Battaille.—Plutarque, Apophth. des Lacédémoniens.
10, Vitellius.—Plutarque, Othon, 3. Ou plutôt à ses lieutenants Cecina et Valens qui commandaient en son absence et gagnèrent pour lui la bataille de Bébriac (69), que les troupes de son adversaire s’étaient difficilement décidées à accepter et après laquelle Othon se donna la mort. C’est en visitant ce champ de bataille, quelques jours après le combat, qu’il prononça ces horribles paroles: «Le corps d’un ennemi mort sent toujours bon.»
26, Meslée.—Cette question qui pouvait avoir sa raison d’être jadis, alors que le corps à corps était à peu près l’unique mode de combat, ne se pose plus aujourd’hui où l’action se livre la plupart du temps à des distances telles que l’on se distingue à peine, si bien que parfois amis et ennemis se prennent les uns pour les autres, agissent en conséquence et n’arrivent à se reconnaître que lorsque le mal est fait.
1, Iournée.—Plutarque, Pyrrhus, 8; le texte grec porte Mégaclès.—En 278, à la bataille d’Asculum. Ayant observé qu’il était l’objet d’attaques personnelles de l’ennemi, Pyrrhus avait donné son manteau et ses armes à Mégaclès, un de ses amis, dont lui-même avait pris l’armure. Ces attaques se poursuivant, Mégaclès, qu’on prenait pour le roi, finit par succomber, et la nouvelle de la mort du roi se répandant, faillit compromettre le succès de la journée: l’ardeur des Romains s’en accrut, tandis que les siens s’en trouvaient découragés, ce qui amena Pyrrhus à se multiplier en combattant à découvert pour que chacun fût à même de constater qu’il existait encore. V. I, 494 et N. Italie.
3, Particuliere.—Nelson, au combat de Trafalgar (1805), paré de toutes ses décorations, était facilement reconnaissable.—Henri IV se distinguait également bien au milieu des siens: «Si vous perdez vos enseignes, cornettes ou guidons, ralliez-vous à mon panache blanc, leur disait-il, à la bataille d’Ivry (1590); vous le trouverez toujours au chemin de l’honneur et de la victoire.»
4, Gilippus.—Diodore de Sicile, XIII, 33.—Ce qualificatif de grand attribué à Gylippe ne s’explique guère, à moins que ce ne soit par ironie. A la vérité, il battit les Athéniens à Syracuse, mais condamné à mort pour s’être approprié une partie des contributions de guerre qu’il devait transporter à Sparte, il fut contraint de s’expatrier pour échapper au supplice. Son père, Cléarque, s’était trouvé dans le même cas. En dehors de cela, dit Plutarque, tenus tous deux pour d’excellents hommes (Ve siècle).
5, Pharsale.—Plutarque, Pompée, 19.—L’an 48. César y remporta sur Pompée une victoire décisive qui fut bientôt suivie du meurtre de ce dernier en Égypte, où il allait chercher asile.—César, De Bello civ., III, 17, blâme aussi Pompée de la faute qui lui est reprochée ici.
21, Haleine.—A l’époque actuelle où l’armement est tout autre et où, au combat, on manœuvre beaucoup plus que par le passé, l’offensive surexcite le soldat, accroît son moral, lui masque ses pertes, est dans le cas de surprendre l’ennemi, de faire que ses réserves immobilisées ou retardées n’arrivent pas à temps, l’empêchent de modifier, comme il conviendrait, son ordre de bataille.—La défensive-offensive qui consiste à laisser venir l’adversaire se briser contre une position favorable, dont les avantages naturels ont pu encore être accrus par les travaux qu’on a pu exécuter, puis à prendre à son tour l’offensive contre lui, quand il est épuisé, est théoriquement ce qu’il y aurait de mieux, si, à la guerre, on était maître des événements. Mais l’attaque se produit si souvent dans une direction autre que celle où on l’attend, l’offensive est si difficile à reprendre au moment précis où il faudrait qu’elle se produise, que ce procédé est inférieur à l’offensive pure et simple.—Quant à la défensive de parti pris, sans la ferme résolution de passer à l’offensive en cours d’action, elle a grande chance d’insuccès, et, dans les cas les plus favorables, ne mène à rien.
Bien des facteurs, du reste, entrent en ligne de compte pour décider de l’attitude à prendre, alors même qu’elle n’est pas imposée, entre autres par les effectifs dont on dispose, l’état moral des troupes, les conditions de réapprovisionnement; d’une façon générale, le mauvais temps favorise la défensive et est préjudiciable à l’offensive: un terrain facile et découvert également, c’est l’inverse si le terrain est coupé et couvert, sous réserve cependant qu’il ne soit pas tellement difficile qu’on ne puisse s’y mouvoir et que la défense n’ait eu le temps d’atténuer les inconvénients qu’il présente pour elle, par des travaux appropriés.
Enfin, il est à observer qu’aujourd’hui, avec la puissance et la vitesse du feu de l’infanterie, il est presque impossible de donner, en ayant chance de succès, l’assaut à une ligne ennemie qui déjà n’a pas été notablement désorganisée par celui auquel elle-même a été en but, pendant un temps plus ou moins long, en vue de la préparation de l’attaque.
25, Perses.—A la bataille de Cunaxa (401), entre Artaxerxès II dit Memnon, roi des Perses, et Cyrus le Jeune, son frère, qui voulait le détrôner et qui y périt, tué de sa propre main, tandis que les Grecs, qu’il avait pour auxiliaires, remportaient pour lui la victoire, que sa mort rendit stérile, les obligeant, pour rentrer, dans leur pays, à cette retraite célèbre connue sous le nom de retraite des Dix mille. V. N. I, 396: Païs.
31, Trait.—Xénophon, Anabase, I, 8.
33, Sus.—Plutarque, Préceptes du mariage, 34.—Ce principe est encore vrai, mais son application délicate; et seul peut espérer réussir qui sait apprécier sainement le pour et le contre au moment même de l’exécution.
1, D’eslire.—C.-à-d. dans le cas de choisir.
2, Terres.—C’est à ce dernier parti qu’il s’arrêta. Charles-Quint revenait d’Afrique, et François Ier avait profité de son éloignement pour renouveler ses tentatives sur le Milanais. L’empereur entra en Provence avec 50.000 h. Le connétable de Montmorency, chargé de lui résister, fit le vide autour de lui, détruisant tout dans le pays, attaquant ses convois, si bien que l’armée impériale, en proie à la famine, dut lever le siège de Marseille et repasser la frontière; son état d’épuisement fut tel, qu’arrivé à Nice, Charles-Quint conclut une trêve de dix ans, qui, de fait, n’en dura que six (1536).
6, Gast.—Desgast, comme portent les éditions antérieures à 1588.
7, Paisant.—L’habitant du pays, la population.
23, Est-ce.—Quoi qu’il en soit, toujours est-il que le roi se décida à rappeler.—Tout ce qui suit est tiré presque mot pour mot d’un discours que François Ier tint en conseil et qui est rapporté par du Bellay, VI.
26, Planté.—Abondance, du latin plenitas, d’où viennent plein, plénitude.
4, Party.—Attendre l’ennemi chez soi, peut être avantageux quand le territoire qu’on cède ainsi est pauvre et vaste, que l’ennemi ne pourra y trouver facilement à vivre, que ses lignes de communication s’allongeront outre mesure, comme en Russie en 1812, ou encore que, de peu de ressources, la population y est par surcroît fanatisée comme en Espagne en 1808; dans le cas contraire c’est presque toujours une faute. En 1536, la Provence était peu riche, et en outre elle ne mène à rien; de plus, à cette époque toutes ses villes étaient fortifiées et en état de résister aux moyens d’attaque d’alors.—Mais on n’est pas toujours libre d’agir comme on le voudrait. Aujourd’hui, il faut s’attendre plus que jamais à voir les hostilités éclater sans déclaration de guerre préalable, comme ont eu lieu en février 1904 les attaques simultanées des Japonais contre Port-Arthur et Tchemulpo; et, étant donné la rapidité avec laquelle on peut entrer en opérations, on est exposé d’un moment à l’autre, en pleine paix, à une invasion que rien ne faisait prévoir alors que déjà elle s’est produite. En présence de l’intérêt qu’il y a à n’être point surpris de la sorte, à rendre impossible toute tentative de cette nature qui trouble la mobilisation, stérilise une partie de vos ressources en hommes et vous enlève toutes autres que présente le territoire envahi, causant en outre un effet moral désastreux dans le pays tout entier; quand on a une frontière, comme notre frontière de l’Est, ainsi menacée de l’irruption soudaine de 111.000 hommes, 10.000 sabres, 888 pièces d’artillerie dont plus de 150 de grosse artillerie (obusiers de 150 et mortiers de 210) capables d’avoir raison de nos forts les plus solidement construits, à laquelle nous ne pouvons opposer que 52.000 hommes, 8.000 sabres et 388 pièces d’artillerie de petit calibre (165 bataillons, 72 escadrons, 148 batteries à effectifs renforcés contre 104 bataillons, 68 escadrons, 89 batteries à effectifs réduits), au total moitié moins; que de plus la forme de notre gouvernement ne nous permet pas de la prévenir et qu’elle ferait tomber, sans coup férir, dès la première heure entre les mains de l’adversaire une ville aussi considérable que Nancy et un territoire aussi populeux et riche que ce qui nous reste de la Lorraine, semblable éventualité est à prévoir et le devoir est de parer à cette situation, en augmentant le nombre des unités de combat que nous avons sur cette frontière, en portant et maintenant constamment ces unités à leurs effectifs de guerre, et construisant autour de Nancy quelques ouvrages non pour en faire une place forte, mais pour la mettre, vu la proximité de la frontière, à l’abri d’un coup de main.—Pour Nancy, c’est uniquement affaire d’argent; pour le relèvement de nos forces, il faudrait supprimer nombre de nos garnisons de l’Ouest et du Sud-Ouest et réorganiser en partie notre état militaire en réduisant à deux dans les régiments d’infanterie des corps d’armée de l’intérieur le nombre des bataillons, en substituant aux brigades de cavalerie de corps de simples régiments, réduisant d’un groupe les régiments d’artillerie de corps, et, avec les économies en hommes, chevaux, bataillons, escadrons et batteries ainsi réalisées, renforcer les effectifs des troupes de l’Est et augmenter le nombre de leurs unités de combat. Il faut, en un mot, placer à demeure sur cette frontière le tiers, la moitié si le tiers ne suffit pas, de notre armée du temps de paix, ne laissant à l’intérieur que des embryons qui ne prendront corps qu’à la mobilisation, par l’incorporation des réserves. Le fera-t-on? Jamais, nous sommes trop veules pour cela; des raisons de politique intérieure interviendront encore, comme toujours: on fera sonner bien haut les dépenses résultant de la construction de nouveaux casernements; les engagements pris vis-à-vis des localités auxquelles on enlèverait ou dont on diminuerait les garnisons; on redoutera leur mécontentement et les conséquences que cela peut avoir pour leurs élus du moment. Ce sera comme pour les sous-préfectures: tout le monde est d’accord sur l’inutilité d’un aussi grand nombre, mais personne ne concède que la sienne soit de celles qui sont à supprimer et toutes demeurent.
9, Sien.—Pour obliger Annibal à évacuer l’Italie méridionale qu’il occupait depuis quatorze ans, Scipion l’Africain passa en Afrique. Carthage menacée rappela ses troupes d’Italie, et bientôt après, la deuxième guerre punique se terminait par la victoire de Zama que Scipion remportait sur Annibal (202).
11, Contraire.—La Sicile était peuplée de colonies grecques de race dorienne et ionienne, les unes clientes de Sparte, les autres d’Athènes. Pendant la guerre du Péloponnèse, les premières profitèrent des embarras de celle-ci pour opprimer les secondes; aussi les Athéniens, qui avaient l’arrière-pensée de s’annexer la Sicile, n’hésitèrent-ils pas à intervenir quand, en 421, venant de signer avec Sparte une trêve de cinquante ans, ils eurent leurs coudées franches; mais cela ne leur réussit pas. V. N. I, 524: Gilippus; N. II, 424: Sicile.
12, Soy.—Agathocle, assiégé dans Syracuse par les Carthaginois, équipa une flotte, en déroba la sortie à ses ennemis, aborda en Afrique, brûla ses vaisseaux pour mettre ses soldats dans la nécessité de vaincre, et, par cette diversion, obligea Carthage à rappeler ses troupes de Sicile (310).—Héraclius, empereur d’Orient, se trouva également bien de quitter Constantinople menacé par les Perses, pour aller porter la guerre chez eux (622).
28, Engage... aussi.—Var. des éd. ant.: n’est pas plus incertaine et temeraire que.
CHAPITRE XLVIII.
4, Romans.—C.-à-d. les auteurs qui écrivent en roman. La langue romane a pris naissance au moyen âge; elle était alors dénommée «le nouveau langage», et est, à proprement parler, l’origine de la langue française.
5, Equos.—Les chars romains s’attelaient généralement à trois chevaux de front: un dans les brancards, funalis ou d’attelage, les deux autres en dehors, à droite et à gauche; ces deux derniers, ou l’un d’eux seulement, étaient parfois montés. Montaigne appelle celui de droite dextrarius; ce mot ne se trouve que chez certains auteurs du moyen âge.—Les desultorii étaient des chevaux de selle accouplés, desquels on passait, on sautait, comme l’indique leur nom, de l’un sur l’autre.
9, Gendarmes.—Le gendarme était anciennement l’homme de guerre, à cheval, armé de toutes pièces et accompagné de ses suivants; ici ce mot désigne les cavaliers numides.
23, Coustillier.—Valet qui portait la coustille (sorte d’épée ou de long poignard) et se tenait près de l’homme d’armes.
24, Maistre.—Hérodote, V.—La manière de faire du cheval d’Artibius était connue, et l’écuyer d’Onésilus l’avait rassuré en lui disant qu’il se chargeait de l’animal. Le fait se passait en 493, au début de la première guerre médique; Artibius fut tué, mais dans ce même combat périt Onésilus.
28, Vray.—Ce cheval s’appelait Savoye; c’était, dit Philippe de Comines, le plus beau cheval de son temps; il avait 29 ans; un poète de l’époque lui a consacré des vers. A cette même bataille de Fornoue (1495), le cardinal archevêque de Lyon demeura constamment près du roi, à cheval, la mitre en tête et la croix à la main.
35, Bons hommes de.—Var. de 80: bien à.
2, Carriere.—Faire prendre carrière à un cheval, c’était, en langage des gens de cheval du temps, le faire galoper à toute vitesse.—Plutarque, César, 5.
7, Toreau.—D’où son nom «Tête de taureau». Alexandre était de première jeunesse quand ce cheval vint en sa possession, lui-même le dompta et dressa; l’animal ne se laissait monter que par lui et à plusieurs reprises il sauva la vie à son maître en le tirant de la mêlée; il mourut vers 17 ou 18 ans, de fatigue suivant les uns, suivant d’autres de blessures reçues à la bataille livrée contre Porus. Alexandre le fit enterrer et sur l’emplacement éleva une ville qu’il appela Bucéphalie. Bucéphale avait été acheté treize talents (65.000 fr.); on peut rapprocher ce prix de ceux payés de nos jours pour un cheval de course, Gladiateur, et un taureau, Duke of Connaught, vendus aux enchères le premier 200.000 fr., le second 118.125 fr. Disons encore qu’il y a un siècle et demi, en 1764, d’Eclipse, le père de tous les chevaux pur sang anglais, il a été refusé 300.000.
12, Venus.—Suétone, César, 61.
15, Platon.—Lois, VII.
15, Pline.—Liv. XXVIII, 4.
17, Xenophon.—Cyropédie, IV, 3.
17, Loy.—Add. des éd. ant.: de Cyrus.
18, Iustinus.—Liv. XLI.
29, Combat.—Quand le sort des armes était douteux, dit Suétone, César, 60, il renvoyait tous les chevaux, à commencer par le sien, afin d’imposer à ses soldats l’obligation de vaincre, en leur ôtant les moyens de fuir.—Dans les temps modernes, les régiments de dragons ont été créés dans ce double but de pouvoir combattre soit à cheval, soit à pied; actuellement, toute la cavalerie (les cuirassiers exceptés, qui n’ont d’autre raison d’être que la gloriole des potentats du jour de les voir leur servir d’escorte) est dressée en vue de semblable utilité.
29, Tite-Liue.—Liv. IX, 22.
33, Grand Seigneur.—Appellation sous laquelle on désignait le sultan de Constantinople.
1, Anglois.—La guerre de Cent Ans, commencée en 1337 sous Philippe VI de Valois, à l’occasion de la protection accordée par Édouard III, roi d’Angleterre, à Robert, comte d’Artois, condamné par les Pairs de France à la perte de son comté, entremêlée de trêves, et terminée après de nombreux combats et fortunes diverses par l’expulsion hors de France, en 1453, des Anglais qui, au début, y possédaient de nombreux fiefs, l’Anjou, la Guyenne, etc., représentant à un moment beaucoup plus que ce qui demeurait à la France elle-même.
1, Assignées.—Ayant lieu pour ainsi dire de commun accord, d’où le nom de batailles rangées où chacun des adversaires avait pris ses dispositions essentielles de combat avant le commencement de l’action; la guerre de Cent Ans en fournit de nombreux exemples cités par Froissart. Ce qui jadis était presque de règle, est devenu aujourd’hui l’exception; on cherche surtout maintenant à surprendre l’ennemi, et la victoire s’obtient plus par les mouvements subséquents opérés une fois l’action engagée, que par suite des dispositions préliminaires conduites fréquemment davantage en vue de tirer profit de la victoire que de la remporter.
5, Xenophon.—Cyropédie, IV, 3.—Chrysanthe, seigneur perse, fut, auprès de Cyrus, le promoteur de l’usage qui s’établit chez ce peuple, de ne se déplacer qu’à cheval, au point de trouver déshonorant d’aller à pied, sauf le cas de force majeure.
19, Respondre.—C.-à-d. les armes les plus courtes sont les meilleures, ce que corroborait cet adage du temps: «A vaillant homme, courte épée.» Cette assertion n’est vraie que pour le combat corps à corps; exacte pour les guerres anciennes, elle ne l’est plus pour les guerres actuelles, où cette sorte de combat se fait de plus en plus rare.
22, Rouët.—L’un des moyens employés à cette époque pour l’inflammation de la poudre dans les armes à feu portatives, consistait en un silex (pierre à fusil), dont on tirait des étincelles par l’action d’une roue en acier, dite rouet.
29, Nostres.—L’auteur avait vraisemblablement l’intention de traiter ultérieurement en détail cette question des armes; il ne l’a pas fait et s’est borné à cette addition insérée dans l’édition de 1595 qu’on trouve quelques lignes plus bas, commençant à ces mots: «Celle de quoy les Italiens» pour se terminer à ceux-ci: «representoient de bien pres nos inuentions».
32, L’vsage.—On ne prévoyait pas à ce moment à quel degré de puissance et de rapidité de tir en arriveraient canons et fusils; nul doute qu’aujourd’hui Montaigne ne penserait pas ce qu’il dit de leurs effets et de leur abandon.
32, Italiens.—Les Italiens des temps anciens, avant même la fondation de Rome, ainsi qu’il ressort de la citation de Virgile, qui se rapporte à des événements antérieurs à cette fondation et fait expressément mention de cet engin de guerre.
34, Iaueline.—Sorte de trait pouvant être lancé à la main, qui se distinguait du javelot par une plus grande longueur de hampe ou hante, comme on disait et écrivait alors.
14, Destinassent.—Cette adresse évoque le souvenir d’Aster, habile archer qui, au siège de Méthone (Macédoine), creva l’œil droit de Philippe de Macédoine avec une flèche sur laquelle était écrit, dit-on: «Aster, à l’œil droit de Philippe.» A quoi le roi répondit en en faisant lancer dans la place une autre portant: «Si Philippe prend la ville, Aster sera pendu»; ce qui eut lieu (353).—Ou encore, celle de Guillaume Tell abattant d’une flèche une pomme placée sur la tête de son fils (1307), fait discuté qui se retrouve également dans les légendes du Danemark.
17, Asie.—Les Galates, mélange de Gaulois et de Grecs qui, en l’an 278, envahirent l’Asie et s’établirent dans la partie N. de l’Asie Mineure.
24, Retraitte.—Effectuée après la bataille de Cunaxa. V. N. I, 396: Païs; I, 524: Perses.
28, Armé.—Xénophon, Anabase, V, 2.
28, Engeins.—Catapultes qui lançaient des pierres énormes et des pièces de bois dont la tête était armée de fer et dont la longueur atteignait jusqu’à 15 pieds (5 mètres). Elien, Var. Hist., VI, 12, en attribue l’invention à Denys; Diodore de Sicile, XIV, 42, se borne à dire qu’elle fut inventée de son temps à Syracuse; Pline, VII, 56, dit que ce furent les Syro-Phéniciens qui s’en servirent les premiers.
31, Inuentions.—Au temps de Montaigne, les armes à feu commençaient à faire leur apparition. L’arquebuse n’excédait guère en portée l’arbalète, une centaine de mètres, sa justesse était moindre, elle lui était encore plus inférieure sous le rapport de la rapidité du tir; le canon avait un effet notablement supérieur aux balistes et ses boulets de pierre portaient à plusieurs centaines de mètres, un kilomètre, tandis que les quartiers de roche que lançaient celles-ci allaient à peine à cent ou cent cinquante mètres.—Aujourd’hui le fusil, sous un angle de 32°, porte à 3.600m; avec la hausse de 400m, il atteint de 0m à 400m tout homme debout ou à genou; l’écart à cette distance n’est que de 0m,12 (à 800m, de 0m,30); sa balle, à cette même distance de 400m, pénètre de 0m,60 dans de la terre, traverse une lambourde de sapin de même épaisseur et une plaque de fer de 0m,005; la vitesse du tir peut atteindre 12 coups par minute... Le canon de campagne, du calibre de 0m,075, a sous un angle de 17 une portée de 6 kilomètres; son écart à 2 k. est de 10m; à la même distance son obus à mitraille traverse sans se rompre un mur de maçonnerie de 0m,50 d’épaisseur; indépendamment de ses fragments d’enveloppe, il projette en éclatant 180 balles qui, à 200m du point d’éclatement, sont encore meurtrières; sa vitesse de tir peut atteindre seize coups par minute. Les pièces de la marine, pour ne prendre que le canon de 0,305, et il en est de calibre supérieur, ont une portée qui atteint 12 kilomètres; le Variag, lors de la guerre russo-japonaise, a été coulé à la distance de 6 kilomètres; leurs projectiles percent des cuirasses d’acier de 0m,28 d’épaisseur et ils peuvent tirer jusqu’à trois coups en cinq minutes.—Quant aux effets de destruction des engins dont usèrent les anciens, si ingénieusement conçus et si puissants qu’ils aient été, peuvent-ils être comparés pour leurs effets aux énormes projectiles incendiaires de nos jours, qui, chargés de cent à cent cinquante kilos de mélinite (la mélinite est six à huit fois plus brisante que la poudre), qui écrasent les voûtes de maçonnerie de plusieurs mètres d’épaisseur les plus solidement construites, formant en éclatant des entonnoirs qui ont jusqu’à cinq ou six mètres de profondeur et dix ou douze de diamètre; ou à ces torpilles dont une seule suffit pour anéantir en quelques minutes ces colosses que sont les cuirassés d’escadre dont quelques-uns jaugent jusqu’à 18.000 tonneaux, portent un millier d’hommes et coûtent trente millions et au delà!
32, Sur sa mule.—Var. des éd. ant.: à cheual.
33, Paris.—Et ailleurs, aj. les éd. ant.
1, Gascons.—Monstrelet, I, 66; il y joint les Lombards.
4, Mots.—Add. des éd. ant.: Ie ne sçay quel maniement ce pouuoit estre, si ce n’est celuy de noz passades (les carrousels de nos jours).
4, Suede.—César, De Bello Gall., IV, 1.—Il s’agit des Suèves, peuple de Germanie, devenus plus tard les Souabes. Les Bretons, dit César quelques lignes plus bas, avaient un usage semblable.
11, Autresfois.—Dans son voyage en Italie, en 1581, à Rome, du fait d’un Italien qui avait été longtemps esclave en Turquie.
19, Alphonce.—Alphonse XI, roi de Léon et de Castille.
22, D’argent.—Le marc de Castille était de 230 gr., d’une valeur par suite de 46 fr. de notre monnaie, abstraction faite de la plus-value de l’argent à cette époque.
28, Mules.—En Judée, au temps des Hébreux, l’âne servait de monture aux personnages les plus considérés, c’était d’ailleurs la mieux appropriée à la configuration accidentée du pays; c’est sur un âne que Notre-Seigneur fit à Jérusalem l’entrée triomphale que l’Église célèbre le dimanche des Rameaux.—Par contre, dans les pays musulmans où le Juif est un objet de mépris, monter un cheval ou un mulet lui sont interdits; l’âne est la seule monture qui lui soit tolérée. Dans ces mêmes pays, il n’y a pas longtemps encore, un chrétien ne pouvait davantage aller à cheval.
28, Xenophon.—Cyropédie, III, 3.
2, Metellus.—En 118. «Boire leur urine et celle de leurs chevaux ne leur réussit pas; ils excitaient par là leur soif plus qu’ils ne l’apaisaient, et cela leur occasionna des souffrances que le vainqueur lui-même ne les eût pas contraints à endurer.» Valère Maxime, VII, 6.
9, Indes.—Les Indes occidentales; nom donné à l’Amérique lors de sa découverte.
13, Viandes.—Vivres, du latin vivandus, qui sert à vivre. V. N. III, 550.
16, Deçà.—Les Indes orientales; l’Hindoustan actuel.
20, Seul.—Arrien, Hist. Ind., 17.
23, Rutilianus.—Ou plutôt Rullianus, Tite-Live, VII, 30.—En 322, Papirius Cursor étant dictateur. L’idée première d’enlever leurs brides aux chevaux vint de L. Cominius, tribun militaire. Ce combat, où les Romains eurent l’avantage et où périt, dit-on, 20.000 ennemis, fut livré par Fabius, maître de la cavalerie, en l’absence et contre les ordres de Papirius Cursor qui, à l’exemple de Manlius, voulut punir cette désobéissance; et, malgré son nom et sa victoire, Fabius eût payé de mort ce succès, si Rome, toute entière, ne s’était employée à fléchir le dictateur.
34, Transcurrerunt.—Tite-Live, XL, 40.—L’an 180; cette mesure procura cette fois encore le résultat attendu, la cavalerie romaine rompit les Celtibériens contre lesquels s’était brisée l’infanterie et fixa la victoire en faveur de Rome.—A Waterloo, en 1815, la cavalerie anglaise chargeant la nôtre lors de notre première attaque du plateau de Mont Saint-Jean, avait aussi enlevé, dit-on, les gourmettes à ses chevaux.
1, Delices.—Les Tartares font, avec le lait de jument fermenté, une boisson enivrante appelée kumisse, qu’on a employée parfois en Europe comme médicament.
3, Langue.—Cette servitude, qui avait commencé vers le milieu du XIIIe siècle, se maintint jusque vers la fin du XVe.
7, Vitale.—Dans la campagne de Russie de 1812, on a vu des blessés se réfugier dans l’intérieur de chevaux morts.
8, Tamburlan.—En 1402, à la bataille d’Ancyre (auj. Angora), en Asie Mineure, où Bajazet, sultan de Constantinople, fut battu et fait prisonnier par Tamerlan Mogol qui, dit-on, mais le fait semble controuvé, l’enferma dans une cage de fer et le traîna ainsi à la suite de ses hordes. Dans cette bataille, qui dura trois jours et deux nuits, un million d’hommes se combattirent et 240.000 furent mis hors de combat.—Bajazet était borgne; Tamerlan, par suite de blessures reçues à la main et au pied, était manchot et boiteux.
8, Belle erre.—En grande hâte; on retrouve ce mot avec ce sens dans une ballade de La Fontaine:
16, Prodige.—Un mauvais présage pour lui. Hérodote, I, 78.
18, Oreille.—Montaigne ne parle que des crins et de la queue; contre son habitude, il se tient sur la réserve; pour être exact, il eût dû ajouter: et est propre à la reproduction.
18, Montre.—C.-à-d. et on n’en admet pas d’autres dans les montres ou revues.
21, Triomphe.—Plutarque, Nicias, 10. V. N. I, 528: Contraire.
24, L’autre.—Quinte-Curce, VII, 7.
30, Second.—Premier écuyer du roi; Montaigne, lors de son premier voyage à Paris, vers 1555, a pu le voir, dans l’exercice de ses fonctions, donnant aux fils de Henri II leur leçon d’équitation, et peut-être est-ce le souvenir qu’il en a conservé qui lui a fait écrire au ch. VII du liv. III (III, 326): «Vn cheual qui n’est ny flateur ny courtisan, verse le fils du Roy par terre, comme il feroit le fils d’vn crocheteur.»
35, Estrier.—Vers 1840, en Algérie, le commandant de Bonnemain, alors sous-officier de spahis, accomplit un tour de force équestre analogue, mais plus étonnant encore. Élevé depuis l’âge de onze ans parmi les indigènes, même aux yeux des Arabes, c’était un cavalier émérite. Cheminant un jour, avec une troupe nombreuse, dans la plaine des Haractas, un lièvre fut aperçu. Si Mustapha, c’était le nom qu’il avait reçu des indigènes, se lança à sa poursuite, le suivit dans tous ses tours et détours, le força à la course et sans s’arrêter ni descendre de cheval, vidant d’un pied l’étrier et y conservant l’autre, il le saisit et l’enleva à la main.
36, Viuoit.—C’est ce même Italien dont il est question plus haut. V. N. I, 538: Autresfois.
38, A tours.—Tour à tour.
8, Reales.—Petite pièce de monnaie d’Espagne, en argent, valant environ 25 centimes.
CHAPITRE XLIX.
14, Lælius.—Les éd. ant. port.: Scipion.
16, Sagos.—Rétablir cette citation ainsi qu’il suit: Sinistras sagis...—Le sagum était l’habit militaire des Romains; en paix, ils portaient la toge. Chez les Gaulois, c’était le vêtement de tout temps; nos paysans le portent encore sous le nom de saye ou blouse.
18, Respondre.—César, De Bello Gall., IV, 5, dit que les Gaulois arrêtaient ceux qu’ils rencontraient, non pour leur demander qui ils étaient, mais pour s’enquérir des nouvelles;—on peut ajouter que cela leur était et est encore commun avec bien d’autres; ce qui l’était moins et explique cette remarque de César, c’est que chez eux il était interdit de répandre des nouvelles dans le public, et cependant le journal n’était pas chose inconnue à ce moment. Il existe trace de journaux, en quelque sorte officiels, en Égypte, 2000 ans avant notre ère; ils publiaient également tous les faits intéressants et notamment les scandales. Les Romains eurent d’abord les Annales tenues par les pontifes, et qui, du temps de César, firent place aux Actes diurnes ou Journaux, lesquels comprenaient à peu près tout ce qu’on trouve dans les feuilles publiques de nos jours, partie officielle et chronique. Ils prirent fin avec l’empire, pour renaître au quinzième siècle, en Italie, où ils se vendaient une «gazetta», petite pièce de monnaie, d’où le nom que Théophile Renaudot donna à sa feuille quand il la créa en 1631. V. N. I, 390: Necessité.
21, Iambes.—Sénèque, Epist. 86.
28, Front.—Les femmes du temps de Montaigne s’épilaient probablement le front, afin d’en augmenter la hauteur.
30, Propres à cela.—Add. des éd. ant.: qui seruoyent à cela de faire tomber le poil.—L’éd. de 88 aj.: qu’ils appelloient «psilotrum».
37, Caton.—Plutarque, Caton d’Utique, 15.
39, Assis.—Les Grecs et les Romains dînaient assis, parce que ce repas était fort court. Au souper, qu’ils prolongeaient beaucoup, étant alors débarrassés de leurs affaires, à l’exception des femmes qui étaient toujours assises, ils mangeaient ordinairement étendus sur des sortes de divans, lesquels, lorsqu’on était nombreux, étaient juxtaposés autour de la table, dont un côté demeurait libre pour le service. Sur chacun de ces lits ou divans, prenaient généralement place trois personnes; on s’y étendait la tête du côté de la table, la poitrine surélevée par des coussins, les pieds à l’opposé, en contrebas. On s’appuyait sur le coude gauche et on se servait avec la main droite; on pouvait ainsi facilement poser la tête sur la poitrine de son voisin de gauche, ainsi que fit saint Jean sur le sein de Jésus-Christ lors de la cène. De nos jours, les Arabes en agissent encore ainsi, sauf que, les divans n’existant pas, on s’étend à même le sol sur des tapis ou des nattes et que l’élévation de la table est réduite en conséquence.