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Essais de Montaigne (self-édition) - Volume IV

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556,

6, Estranger.—Les mercenaires étrangers, Allemands, Suisses, Italiens, Espagnols, qu’appelaient indifféremment à leur aide les Catholiques et les Protestants. C’est ici la seule allusion que Montaigne fasse à l’intrusion de l’étranger dans nos affaires politiques; quelque las qu’il soit des guerres civiles, il ne parle jamais, soit dit à sa louange, de recourir pour y mettre fin à l’appui que l’on pourrait recevoir du dehors.

9, Chef.—Non à la discrétion du chef, mais chacun...

23, Prohibete.—Virgile dit cela d’Octave, qui plus tard devint Auguste. Montaigne en fait vraisemblablement application ici à Henri de Navarre qui avait sauvé l’État par l’assistance qu’il avait prêtée à Henri III, dont, au moment où Montaigne écrivait, il était devenu le successeur naturel par la mort du duc d’Alençon, frère de ce dernier.

24, Precepte.—Il est de Cléarque, général lacédémonien, et rapporté par Valère Maxime, II, 7, ext. 2.

26, Pourpris.—Enceinte, clos.

29, Delicieuses.—Fait rapporté par Frontin, Stratagèmes, IV, 3, 13, au sujet de l’armée de M. Scaurus en Illyrie, vers l’an 122—Ce Scaurus, qui s’illustra par ses services militaires et qui obtint les honneurs du triomphe, devint prince du Sénat et, comme tel, eut, pendant un certain temps, la direction de toutes les affaires de Rome; mort en 97.

30, Peregrinations.—Voyages; du latin peregrinatio.

32, Rhodes.—Les chevaliers de Rhodes qui, dans leur hiérarchie, comprenaient le titre de commandeur, avaient été particulièrement sur mer, pendant plusieurs siècles, la terreur des pirates musulmans. Du temps de Montaigne, on les appelait encore de ce nom, bien qu’après la prise de Rhodes par les Turcs (1522), ils fussent devenus chevaliers de Malte, cette île leur ayant été donnée comme refuge par Charles-Quint.

38, Prefix.—Déterminé, arrêté, fixe.

40, Empale.—Supplice en usage chez les Turcs, consistant à enfoncer dans le fondement du condamné un pieu ou pal, fixé verticalement, qui lui traverse les entrailles et le laisser ainsi jusqu’à ce que la mort s’ensuive, ce qui peut se faire attendre huit à dix heures; ce fut le supplice infligé en 1800 à l’assassin de Kléber.

40, Deport.—Sans délai, sur-le-champ.

558,

1, Damas.—Le fait se passait en 1516; Selim I, sultan ottoman, était d’une cruauté égale à son courage et à sa fermeté; il avait détrôné et fait périr son père et ordonné la mort de plusieurs de ses frères; c’est lui qui obtint du dernier calife abbasside, dont déjà les sultans ottomans avaient absorbé toute l’autorité, de lui résigner cette qualité de calife, qui lui donnait l’investiture religieuse et le mettait au-dessus de tous les princes musulmans.

5, Mortelle.—La guerre civile.—S. Thomas blâme la sédition; mais il approuve l’insurrection consistant à renverser un pouvoir injuste et tyrannique; alors, selon lui, elle est plus qu’un droit, elle est un devoir. Il se rencontre sur ce point avec un tout autre individu que lui, Robespierre, qui, lui aussi, a dit que lorsque la loi devient oppressive, l’insurrection devenait le plus sacré des devoirs.

5, Fauonius.—Plutarque, M. Brutus, 3.

7, Mesme.—Epist. 7, à Perdiccas.

9, Citoyens.—«Dans les séditions, les méchants seuls gouvernent.»  Homère.

15, Consorce.—De notre société, c.-à-d. de la société chrétienne.—Consorce est le mot latin consortium qui a cette signification et auquel Montaigne a donné une désinence française.

27, Colloqué.—Add. de l’ex. de Bord que l’on a cru devoir conserver dans la traduction: Desmembrant sa mere et donnant à ronger les pièces à ses antiens ennemis.

37, Platon.—République, II, 4; Pensées de Platon.

560,

14, Pelaudé.—Maltraité, écorché, dépouillé.

14, Gibelin.—Guelphe et Gibelin, noms de deux partis politiques qui, pendant près de quatre siècles, divisèrent l’Allemagne, puis l’Italie. Ces dissensions eurent pour point de départ les prétentions, en 1158, à la couronne impériale de Conrad, seigneur de Wiblingen (d’où par corruption Gibelin), et de Welf (dont on a fait Guelfe), duc de Bavière; mais elles ne tardèrent pas à se modifier dans leur esprit, et, d’une façon générale, les Gibelins en tenaient pour la domination impériale et la hiérarchie féodale, les Guelfes pour la domination de l’Église et l’indépendance nationale. Ces querelles cessèrent par lassitude de part et d’autre et surtout par la diversion qu’occasionna l’invasion des Français en Italie, en 1495.

17, Voisinage.—Montaigne, qui lui-même était catholique, habitait en plein pays protestant; en outre, sa mère Antoinette de Louppes était protestante et deux de ses enfants, le sieur de Beauregard et Jeanne de Lestonna, avaient adopté la même religion.

19, Desempare.—Abandonne, quitte, transgresse.

20, Recherché.—Je ne m’écarte jamais des lois et qui eût fait l’examen de ma conduite...

20, Muettes.—Add. de 88: et desrobées.

36, Demise.—Soumise; du latin demissa.

562,

8, Commettre.—Confier le soin d’une vieillesse...

10, Pourpoint.—Presque nu, avec mon seul pourpoint; ou encore, réduit à la dernière extrémité, ne sachant quel parti prendre.—«Mettre un homme en pourpoint», c’est à proprement parler le dépouiller complètement, le réduire à la besace, dit Nicot, ce qui ressort nettement de ce quatrain attribué à Charles IX, où il est question de François Ier:

«Le roy François ne faillit point,
Lorsqu’il prédit que ceulx de Guise
Mettroient ses enfants en pourpoinct,
Et tous ses subiects en chemise.»

32, Mail.—Maillet.

564,

8, Temps.—Var. de 88: estat.

30, Vie.—Combien peu il en a coûté au repos et à la tranquillité de ma vie, quoique j’en aie vu s’écouler plus de la moitié, pendant que s’opérait la ruine de mon pays.

35, Escheuer.—Éviter, esquiver. V. N. III, 508.

36, Guignent.—Qui nous visent, nous guettent, s’adressent à nous.

566,

3, Qu’à.—Mais seulement par comparaison.

5, Office.—La corruption des grands et des hommes dans les plus hautes situations.

22, Mains.—«Cedo et manum tollo, je cède et tends la main.» Cicéron, fragm. Consolat. ap. Lactant., III, 28.

24, Tastonner.—Flatter, amadouer. On disait: tastonner doucement les chevaux de la main pour les adoucir, les calmer.

31, Peste.—La peste, au XVIe s., ravagea presque toute l’Europe. A l’époque où Montaigne écrivait, en 1585, elle venait de sévir à Bordeaux et dans les régions environnantes, s’étendant jusque chez lui; dans la ville seule où elle régna six mois, de juin à décembre 1585, elle fit 16.000 victimes sur 42.000 habitants.

36, Estranges.—Add. de 88: et inouys.

568,

1, Plaisante.—Singulière, étrange, surprenante. «Plaisante» est mis ici par antiphrase.

32, Compromis.—Eussent admis d’une commune entente cette nécessité.

36, Diuerse.—Ou le goust tout diuers, comme porte l’éd. de 88.

570,

6, Descouppent.—Se répartissent, se partagent en différentes formes.

6, Neorites.—Diodore de Sicile, XVII, 105.

9, Fosse.—A cette époque, le service des inhumations n’était pas partout, surtout dans les campagnes, un service public; on enterrait fréquemment de ci, de là, dans les propriétés particulières, ce qui se pratiqua jusqu’au moment de la Révolution, à l’égard des Protestants qui n’étaient pas admis dans les cimetières catholiques là où il en existait et qui encore à l’heure actuelle y sont enterrés à part. C’est à cela qu’est dû ce grand nombre de terrains, de quelques mètres carrés de superficie, abandonnés aujourd’hui, qui existent dans certaines régions, notamment dans le Périgord, où il en subsiste encore entourés de leurs murs de clôture et que signalent des arbres funéraires.

12, Aucunement.—Presque.

15, Suffoquant.—Des soldats romains, dit Tite-Live, XXII, 51, furent, le lendemain de la bataille de Cannes, trouvés morts en cette situation; il est à croire que blessés grièvement et hors d’état de mettre fin autrement à leurs souffrances, ils en avaient agi ainsi de désespoir.

572,

10, Filiere.—En terme de fauconnerie, on appelle filière une cordelette d’une vingtaine de mètres de long, que l’on tenait attachée à l’un des pieds de l’oiseau pendant ses exercices de dressage.

16, Frappe.—«Le coup ne nous surexcite pas tant que le bruit.»  Sénèque, Epist. 74.

20, Noel.—Dès l’été, sous prétexte que vous en aurez besoin en hiver, la St-Jean étant en juin et Noël en décembre.

25, Main.—Par avance.

28, Dure.—Sénèque, qui appartenait à la secte des Stoïciens, dans ses Épîtres 13 et 98.

34, Volontiers.—Vraiment; ceci dit sans nul doute par ironie.

574,

10, Chaille.—Ne vous en mettez pas en peine.

14, Incertam.—Le texte de Properce porte: At vos incertam.

30, Total.—C’est à tort qu’on veut nous apprendre à mourir, et à changer la forme de notre vie, alors que nous touchons à sa fin.

34, But.—«Le but de nostre carriere c’est la mort», dit ailleurs (I, 112) Montaigne, en contradiction ici avec lui-même.

35, Visée.—Le but où elle vise.

576,

11, Deschargée.—Et la plus légère.—Suétone, César, 87.

19, Presens.—Var. de 88: plus grande que nous n’auons.

20, Futurs.—Add. de 88: et de la mort à venir.

26, Socrates.—Socrate était fils d’un sculpteur, profession qu’il exerça d’abord, puis abandonna vers 30 ans pour s’adonner aux sciences, Criton, un riche Athénien, lui ayant assuré à cet effet des moyens d’existence.—Dès lors, Socrate se donna la mission de réformer ses concitoyens et sa vie fut un véritable apostolat qu’il exerça uniquement par la parole, conversant avec les uns et les autres, procédant généralement par des interrogations qui, de réponses en réponses, amenaient ses adversaires à de ridicules absurdités, et ses disciples à découvrir par eux-mêmes les vérités qu’il voulait leur inculquer. Il ne tenait pas d’école proprement dite; on le rencontrait partout où se portait la foule, dans les assemblées du peuple, les fêtes, les gymnases, et tout servait de prétexte à son enseignement dans lequel il s’appliquait à faire ressortir les vertus (la prudence, la tempérance, la force, la justice), l’existence d’un Dieu, d’une Providence, l’immortalité de l’âme; à combattre les sophistes qui prétendaient tout savoir, leur opposant que quant à lui tout ce qu’il savait, c’est qu’il ne savait rien; à recommander la pratique du bien comme le plus sûr moyen d’arriver au bonheur, le respect des lois et leur observation comme un impérieux devoir.—Sa vie fut conforme à sa doctrine; il ne cessa de donner l’exemple de toutes les vertus publiques et privées, se signala par son désintéressement, sa générosité, son égalité d’humeur. Ses mœurs furent toujours irréprochables, et rien dans les accusations que ses ennemis portèrent contre lui n’en laisse soupçonner la pureté. Jamais il ne se départit d’une simplicité vraiment stoïque; il menait une vie frugale, allait toujours nu-pieds et ne se couvrait pas plus en hiver qu’en été.—Exact à remplir tous ses devoirs de citoyen aussi bien en guerre qu’en paix, Socrate se distingua par son courage en diverses occasions. Il avait 36 ans, quand Potidée se révolta et, réduite par la famine, fut prise après un siège de deux ans (434); il s’y fit remarquer par ses actions d’éclat, et céda à Alcibiade, qu’il avait arraché des mains de l’ennemi, le prix de la vaillance que lui-même avait mérité. Pendant ce siège, il demeura un jour et une nuit dans la même attitude, comme en extase, ce qui lui arrivait quelquefois. A la bataille de Délium, que les Athéniens perdirent contre les Thébains (424), il soutint pied à pied la retraite avec Lachez, jusqu’à ce que Xénophon, harassé de fatigue, étant tombé de cheval, il le prit sur ses épaules et le porta en lieu sûr. Il prit également part, en 422, à une expédition ayant pour objet de secourir Amphipolis, qui appartenait à Athènes et qu’assiégeait Brasidas, général de Lacédémone, qui y fut tué. De même en paix, notamment à l’occasion des affaires de Diomédon (V. N. I, 38: Supplices), et de Théramène (V. N. III, 544). Par sa vie tout entière, Socrate mérita d’être proclamé le plus sage des hommes. Il se disait inspiré par un génie familier, qu’on a appelé «le Démon de Socrate», qui dirigeait sa conduite. Il ne semble pas que ce fût là une assertion ayant pour objet de donner plus de poids à ses conseils; ce devait être cette sensation intérieure qui chez l’homme à l’esprit juste et pénétrant, lui communique comme un pressentiment de ce qui doit arriver, avant même que son esprit ait pu saisir la justesse de cette inspiration.—La hardiesse et la continuité de ses censures indisposèrent à la longue ses concitoyens; dès l’an 424, Aristophane, dans sa comédie des «Nuées», l’avait vivement attaqué. Il finit par être accusé de corrompre la jeunesse, de ne pas admettre les divinités et de chercher à introduire des divinités nouvelles; en réalité il était poursuivi surtout parce qu’il était opposé au pouvoir démocratique. Devant ses juges, il garda l’attitude la plus fière et fut condamné à boire la ciguë; et vit l’exécution de la sentence différée durant trente jours, par suite du départ pour Délos de la galère y transportant la députation sacrée que les Athéniens envoyaient chaque année et jusqu’au retour de laquelle aucune exécution capitale ne devait avoir lieu. Pendant cette longue agonie il conserva un calme, une lucidité d’esprit, une égalité d’humeur inaltérables, et, le moment venu, subit son sort avec un courage et une sérénité admirables. Peu après, un revirement dans l’opinion se produisit: son principal accusateur fut condamné à mort et lapidé; les autres, condamnés à un bannissement perpétuel, se pendirent; un deuil universel fut ordonné et une statue lui fut érigée.—Socrate s’était marié à l’âge de cinquante ans; Xantippe, sa femme, passe pour avoir mis plus d’une fois, par son humeur acariâtre, sa patience à rude épreuve; on lui prête une seconde femme Mirto, mais l’accord n’existe pas sur ce point. Il semble avoir eu trois enfants, dont l’un, Lamproclès, pouvait avoir 17 à 18 ans quand il mourut, tandis que les deux autres, Sophroniscus et Menexanus, étaient encore en bas âge.—Parmi ses disciples et avec une foule d’autres, Socrate compte: Xénophon, Platon, Antisthène, Aristippe, Phédon, Euclide, Criton, pour ne nommer que ceux qui ont acquis le plus de notoriété.—Voir en outre le concernant: III, 690; I, 78; I, 124 et N. Mort; N. I, 254: Vtilité; N. II, 118: Chrestiens; II, 222 et N. Sages; II, 242 et N. D’autrui; II, 244 et N. Fantasies; II, 426; III, 134 et N. Accoustumé.

27, Vie.—Tout le passage commençant par ces mots: «I’ay peur, Messieurs», et se terminant par ceux-ci: «craindre des Dieux», qui, dans la traduction, est mis entre guillemets, est extrait de l’Apologie de Socrate, dans Platon, ch. 17, 26, 32, etc., traduite par fragments par Cicéron dans les Tusc., I, 41.

30, Cachée.—Var. de 88: interne.

578,

19, Prytanée.—Édifice où, à Athènes, les Prytanes (magistrats chargés des affaires politiques et judiciaires) tenaient leurs séances; on y emmagasinait, en outre, des approvisionnements de blé et autres grains, et là également prenaient leurs repas certains citoyens nourris aux frais du trésor public.

23, Homere.—Odyssée, XIX, 163.

28, Desmettre.—Soumettre, abaisser.

580,

3, Dieux.—L’éd. de 88 aj.: Vous en ordonnerez doncq comme il vous plaira, membre de phrase qui dans l’éd. de 95 se lit à la page précédente, lig. 10.

3, Puerile.—Témoignant de sentiments d’une naïveté enfantine.

6, Luy.—Cicéron, De Oratione, I, 54.

7, Calé.—Se fût-elle abaissée...

13, Incorruptible.—Sénèque, Epist. 31.

27, Eux-mesmes.—Ces dernières phrases sont copiées du traité de Plutarque, intitulé De l’envie et de la haine, 3.

582,

1, Ignorance.—Var. de 88: fantasie, au lieu de «impression et ignorance».

8, D’augmentation.—Elle fait naître plus d’animaux de toutes espèces qu’elle n’en enlève.

10, Dedit.—La traduction de ce vers d’Ovide est donnée dans la ligne qui suit.

19, Chantent.—Il y a longtemps que le chant du cygne à l’approche de la mort, est regardé comme une fable.

36, Iours.—J’augmente tous les jours le nombre de mes citations, contre ce que, tout d’abord, je m’étais proposé de faire et le plan que je m’étais tracé en commençant mon livre.—On peut dire que les Essais ont paru en trois fois: dans la première édition (1580), les citations sont assez rares; elles sont plus nombreuses dans la seconde (1588); elles foisonnent dans la troisième (1595); Montaigne en a fait, ainsi qu’il le dit, l’amusement de son oisiveté pendant les quatre dernières années de sa vie.—«Il y a quelque modestie, qui sied bien, d’appuyer sa pensée de quelque autorité étrangère, ou de recourir à l’expression d’un autre en défiance de la sienne propre; mais c’est un usage qui peut dégénérer en abus, et c’est ce qui en est de cette farcissure d’exemples, comme l’appelle leur auteur, que l’on trouve dans les Essais.»  Ch. Nodier.

584,

7, Liminaire.—Qui se met en tête d’un livre; on a dit depuis épître préliminaire, et aujourd’hui préface.

12, Exagite.—Critique; une des acceptions du verbe latin exagitare. Cicéron, Orat., 13, dit aussi en parlant des dialogues de Platon où Socrate prend à partie les Sophistes: «Plato exagitator omnium rhetorum (Platon, ce critique de tous les rhéteurs).»

26, Seruice.—Et le détournent de son vrai sens, pour en faire une application nouvelle.

30, Conte.—Et les racontent, les avouent.

31, Moy.—Leur pardonne-t-on plus qu’à moi?—Add. de 88: Comme ceux qui desrobent les cheuaux, ie leur peins le crin et la queue et par fois ie les eborgne: si le premier maistre s’en seruoit à bestes d’amble, ie les mets au trot, et au bats s’ils seruoyent à la selle.

31, Naturalistes.—Qui aimons, qui suivons la nature, qui sommes partisans des choses naturelles et vraies.

586,

5, Perdre.—L’auteur fait probablement allusion ici aux sentiments que la lecture de son livre avait inspirés pour lui à Mademoiselle de Gournay.

8, Soixante.—Var. de 88: septante.

11, Espreindre.—En exprimer.

22, Deslogeant.—Projet qui n’a pas été réalisé.

22, Parfaict.—Var. de 88: patron admirable, au lieu de «exemplaire parfaict».

35, Predicament.—Était de cette catégorie.

37, Hommes.—C.-à-d. et est une preuve très incertaine de la laideur de l’âme.

588,

2, Pied.—Add. de 88: Il n’est pas à croire que cette dissonance aduienne sans quelque accident qui a interrompu le cours ordinaire.

2, Sienne.—De sa laideur.

4, Institution.—Cicéron, Tusc., IV, 37; De Fato, 5.

11, Phryné.—Une des courtisanes les plus célèbres de la Grèce ancienne; elle eut pour amant le sculpteur Praxitèle et lui servit de modèle pour ses statues de Vénus. Elle était si riche qu’elle offrit, dit-on, de rebâtir Thèbes à ses frais, mais à condition qu’on placerait sur les murs cette inscription: «Alexandre a détruit Thèbes, Phryné l’a rebâtie»; son offre fut refusée.—Accusée d’impiété et défendue par Hypéride, elle allait être condamnée quand, dit Sextus Empiricus, Adv. Math., II, 65, arrachant son vêtement, la poitrine nue, elle se précipita aux pieds des juges; elle avait trouvé pour les gagner à sa cause un argument plus puissant que ceux de son avocat. Athénée, XIII, fait, au contraire, honneur de cette idée à Hypéride. Quintilien, II, 15, la reporte à elle-même et commente en outre le fait de la façon suivante: «Ce n’est pas à la plaidoirie d’Hypéride, tout admirable qu’elle était, que Phryné dut son salut; mais à sa beauté dont elle acheva le triomphe en découvrant son sein,» voulant montrer que non seulement le talent oratoire et le bon droit peuvent faire avoir gain de cause, mais que tout a le don de persuader: l’argent, la faveur, l’autorité de celui qui parle, jusqu’à la présence muette de la vertu, de l’infortune ou de la beauté.—Après cet acquittement, l’Aréopage rendit un décret qui défendait d’exciter le moindre sentiment de pitié chez les juges et de juger un accusé, soit homme, soit femme, en sa présence.

16, Pas.—Pas plus que le premier Scipion ne l’a lui-même oublié.

17, Bon.—Dans le Jardin des racines grecques de Lancelot si en faveur dans les études il y a trois quarts de siècle, on trouve: «ἀγαθός, bon, brave à la guerre»; et cette indication est ainsi complétée: «prudent, excellent, expert, propre à, utile», mais il n’y est pas question de beauté. Cependant on rencontre quelquefois dans les textes le mot καλοκᾄγαθος, «bel et bon», mis pour καλὸς καὶ ἀγαθός, d’où nous est venue cette même expression, en usage en français, aujourd’hui encore, dans le style familier.

19, Platon.—Dans le Gorgias.

20, Aristote.—Politique, I, 3.

25, Fait-il.—Diogène Laerce, V, 20.

590,

8, Foyter.—Fouetter.—Et si j’étais chargé de punir les hommes je châtierais plus rudement les méchants...

592,

6, Fauorable.—J’ai un visage avantageux.

10, Socrates.—S.-ent.: qui était de mine très ingrate. V. III, 586.

11, Presence.—Prestance.—Var. de 88: mon port, au lieu de «ma presence».

25, Esperons.—L’avait poursuivi de très près.

28, Prins.—L’éd. de 88 port.: et desfaicts; et aj.: ayant esté rencontrez en desordre et fort ecartez les vns des autres.

35, Enuiée.—Add. de 88: et nonobstant ce vain interualle de guerre auquel lors nous estions.

594,

31, Chatouilleux.—Ce guet-apens se produisit en 1588 dans la forêt de Villebois, près d’Orléans, alors que Montaigne se rendait à Paris, probablement pour la réimpression des Essais.

34, Masquez.—L’éd. de 88 aj.: bien montez et bien armez.

34, Argoulets.—Arquebusiers, comme il les nomme plus bas. V. N. I, 252.

596,

10, Implorata.—On dit dans le même sens, en français: «M’étant déjà voué à tous les saints du Paradis».

12, Chef.—Add. de 88: non plus auec ses menasses, mais.

19, Pourpensée.—Mûrement réfléchie; pourpenser est un augmentatif de penser.

23, Non.—Add. de 88: (I’essayerois volontiers à mon tour quelle mine il feroit en vn pareil accident).

26, Pareille.—Et me fit promettre de lui rendre la pareille, s’il venait à se trouver dans le même cas.

34, Droict.—A tort ou à raison; ou encore ici «à tort et à travers».

598,

2, Offenser.—Et je suis si peu enclin à offenser qui que ce soit...

4, Criminelles.—Alors qu’il était conseiller au parlement.

6, Aristote.—Diogène Laerce, V, 17.

13, Trefles.—A moi qui ne suis qu’un valet de trèfle (qu’un personnage de peu d’importance), peut s’appliquer...

15, Plutarque.—Add. de 88: mesme.

17, Mesme.—De ces deux mots cités par Plutarque, l’un se trouve dans ses traités: Sur la différence entre le flatteur et l’ami, 10, et De l’envie et de la haine, 3; l’autre, dans la Vie de Lycurgue, 4.

CHAPITRE XIII.
600,

10, L’œuf.—Cicéron, Acad., II, 18, d’où le fait semble tiré, le place à Délos.

17, Celuy-là.—Justinien Ier, empereur d’Orient (527 à 565), qui fit reviser toutes les constitutions et ordonnances de ses prédécesseurs et en forma le code qui porte son nom, qui fut suivi des Pandectes, des Institutes et des Novelles; tous ces ouvrages réunis constituent le Corpus juris civilis (code civil).

602,

10, Montaignes.—C’était un usage assez répandu au XIIIe siècle, dans les républiques de Lombardie, de confier à des juges étrangers l’administration de la justice; cet usage existait ailleurs, notamment dans la petite république de St-Marin en Italie, où il se serait maintenu jusqu’à son absorption, en 1870, par le royaume d’Italie actuel; on le retrouve encore dans la république d’Andorre (petit état sur les confins de la France et de l’Espagne), qui est administrée par deux viguiers, nommés l’un par l’évêque d’Urgel (Espagne), l’autre par la France, dont les jugements, quand ils sont frappés d’appel, sont déférés au Président du tribunal civil de Perpignan.

11, Procez.—«Il est peu de nations où les lois criminelles soient assez bonnes pour qu’on ne préférât pas à leur tribunal celui d’un seul homme de probité et de sens.»  Servan.

18, Platon.—République, III.

22, Testament.—Et en général, en matière judiciaire de quelque nature que ce soit.—Il est actuellement question de la rendre plus compréhensible et aussi conforme à ce que l’on veut dire, car il faut réellement être initié pour comprendre. Vous recevez, par exemple, une «assignation à comparaître, à trois jours francs, à dix heures du matin». Cela signifie, ce dont vous ne vous doutiez probablement pas, qu’il est inutile de vous déranger, mais que vous devez vous adresser à un avoué qui aura à se présenter en votre lieu et place le cinquième jour à midi.

26, Artistes.—Arrangées avec art.

27, Primement.—Exactement.

28, Enfrasquez.—Embarrassés, égarés, perdus; de l’italien enfrascarsi, s’embarrasser dans les branches des arbres.

32, Vif.—De mercure, communément appelé encore du «vif-argent».

604,

8, Esmiée.—Divisée, émiettée, du latin mittas, qui signifie miettes.

8, Doctrina.—Ce sont bien les propres termes de l’auteur latin, mais pris dans un sens tout différent de celui qu’il leur a donné.

24, Choppent.—Bronchent.

27, Difficulté.—On dit en proverbe: «La glose d’Orléans est pire que le texte».

«Mais à quoi s’attacha ta savante malice?
Ce fut surtout à faire ignorer la justice.
Dans les plus claires lois, ton ambiguïté
Répandant son adroite et fine obscurité,
Aux yeux embarrassés des juges les plus sages
Tout sens devint douteux, tout mot eut deux visages.
Plus on crut pénétrer, moins on fut éclairci.
Le texte fut souvent par la glose obscurci.» Boileau.
606,

4, Pice.—Proverbe grec passé dans la langue latine. C’est aller s’embarrassant de plus en plus, telle une souris dans de la poix qui va s’engluant d’autant plus qu’elle fait plus d’effort, se donne plus de mouvement pour se dépêtrer.

10, Estoufferent.—Fable imitée par La Fontaine, sous le titre de «Les deux chiens et l’âne mort»; et, avant lui, par Marie de France, dans celle intitulée «Le loup qui prend la lune pour un fromage», où un loup voyant la lune se refléter dans une mare, boit tant d’eau de la mare pour atteindre ce qu’il croit être un fromage, qu’il en crève comme les chiens d’Esope.

11, Crates.—Ou plutôt Socrate.  Diogène Laerce, II, 22.

25, Admiration, chasse.—Var. de 88: doubte.

27, Obliquement.—Les oracles d’Apollon, comme du reste tous les oracles, étaient toujours rendus en termes obscurs et ambigus, permettant diverses interprétations souvent contradictoires.

38, Diuerse.—Ces vers sont de La Boétie, et se trouvent dans une traduction de Roland le furieux faite à la demande de Marguerite de Carles qui devait devenir et devint sa femme.

608,

5, Grain.—Que de bien peu. Métaphore tirée du sorite du tas de blé. Le sorite est un raisonnement tendant à démontrer qu’une quantité est par elle-même chose indéterminée, c’est-à-dire qu’elle est à la fois petite et grande: Qu’on se figure un tas de blé, qu’on en enlève un seul grain, puis un autre ensuite, et qu’on continue de la sorte; en n’enlevant chaque fois qu’un grain, on ne détruit pas le tas et cependant il arrive finalement à être réduit à un seul grain.

13, Aristote.—Morale à Nicomaque, IV, 13.

17, Soy.—Mon sujet veut que je revienne souvent à parler de moi.

21, Verbale.—Nos discussions ne portent que sur des mots.

24, Substance.—Locke a démontré que nous n’avons aucune idée claire et précise de ce que nous appelons substance. V. son Essai philosophique concernant l’entendement humain, liv. I, ch. 4, § 18; liv. II, ch. 23, § 2, etc.

29, Hydra.—De l’hydre de Lerne. Cette hydre était, selon la fable, un serpent monstrueux à sept têtes, qui repoussaient à mesure qu’on les coupait, si on ne les abattait toutes d’un seul coup. La destruction de ce monstre fut un des douze travaux d’Hercule (V. N. III, 544: Hercules). La plupart des fictions mythologiques recouvrant une vérité, on pense que l’hydre de Lerne n’était autre qu’un marais d’où s’échappaient des miasmes pestilentiels et que les habitants parvinrent à dessécher. Au figuré, on désigne de ce nom toute difficulté sans cesse renaissante et Montaigne en fait ici application aux discussions auxquelles prêtent les mots.

29, Memnon.—Ici et à la ligne suivante, il faut lire Menon, suivant le dialogue de ce nom de Platon. Cette erreur subsiste également dans toutes les éd. ant., comme aussi dans l’ex. de Bord.

34, Ruchée.—«Qui ajoute à sa science, accroît aussi son travail.» Ecclésiaste.

610,

9, Ethiques.—Morales.

18, Iustice.—«Montaigne mérite vraiment d’être compté parmi ceux qui ont contribué à l’élaboration de nos lois, pour avoir concouru au triomphe de deux idées qui font leur sagesse et leur force: la modération dans le droit pénal et l’équité dans le droit privé.»  Galles, avocat général à la cour d’Orléans, 1865.

29, Iuges.—Au nombre des progrès réalisés par la Révolution, la publicité des débats judiciaires est sans contredit l’un des plus importants. Elle protège quelque peu contre l’arbitraire des juges, le sans-gêne, la partialité du président à l’audience, l’inattention de ses assesseurs, et les dénis de justice par trop flagrants dans les jugements rendus. Et voilà qu’à propos du divorce, on s’avise aujourd’hui de vouloir que le huis clos soit de règle, comme si toute affaire de quelque nature qu’elle soit ne pouvait donner matière devant les tribunaux aux révélations intimes les plus cruelles, aux scandales les plus éhontés et les moins attendus que l’on cherche de la sorte à éviter. C’est un inconvénient regrettable qui frappe à première vue, mais en y réfléchissant, il n’est pas à mettre en parallèle avec ceux, bien autrement préjudiciables, que présente le huis clos; l’accepter dans ce cas, c’est donner de l’extension à l’abus; Dreyfus, lors de son premier jugement, eût-il été condamné, s’il n’eût été jugé à huis clos!

38, Accrocher.—Retarder, annuler.

612,

1, Repentance.—Non responsables.

2, Consacrez.—Sont sacrifiés, immolés aux formes...

2, Autre.—C’est bien à Philippe de Macédoine, père d’Alexandre le Grand, que le fait se rapporte. Plutarque, en le citant, dit que l’individu que ce roi venait de condamner, s’étant aperçu que pendant qu’il plaidait sa cause, le prince sommeillait, en appela aussitôt: «Et à qui?» dit Philippe hors de lui. «A Philippe éveillé!» Ce reproche le fit réfléchir sur sa sentence, dont il reconnut l’injustice et qu’il répara de son propre argent. Plutarque, Apophth. des rois.

9, Condamné.—Le préjudice qu’il avait causé au condamné.

12, Crime.—Elles sont nombreuses et de toutes les époques, par exemple celle du chevalier de la Barre en 1765, supplicié à l’âge de 19 ans pour ne pas s’être découvert au passage d’une procession et avoir tenu des propos anti-religieux.

12, Opinions.—Plutarque, Instr. pour ceux qui manient affaires d’État, 21.

13, Gros.

«Tout désordre apparent est un ordre réel,
Tout mal particulier un bien universel.» Pope.

19, Cyrenaiques.—Diogène Laerce, II, 92.

20, Theodoriens.—Diogène Laerce, I, 99.—Théodore, surnommé d’abord l’Athée, ensuite Théos (Dieu), semble avoir vécu en Égypte et à Cyrène, du temps des premiers successeurs d’Alexandre le Grand. Il posait en principe que le sage se suffit à lui-même, que le monde est sa patrie, que rien n’est honteux en soi, mais seulement quant à l’opinion qui en a été établie pour mettre un frein à la multitude; en outre, il niait l’existence des dieux. En conséquence, il considérait comme indigne du sage l’amitié, l’amour de la patrie; et, comme lui étant permis: le vol, l’adultère, le sacrilège, pourvu qu’il choisisse bien son temps.

26, Innocence.—Plutarque, Alcibiade, 23.—Alcibiade disait qu’en pareil cas, il ne s’en fierait à personne, pas même à sa mère. C’est cette même idée qu’exprimait encore, en d’autres termes, je ne sais quel Président de cour, disant que si on l’accusait d’avoir volé les tours de Notre-Dame de Paris, il commencerait par prendre la fuite et gagner la frontière.

27, Faict.—A même de me récompenser d’une bonne action, comme il a pouvoir de me punir d’une mauvaise.

29, Point.—Var. de 88: les autres, au lieu de: «de ne faillir point».

31, Perte.—C’est la morale de la fable de  La Fontaine, «L’huître et les plaideurs».

614,

9, Receu.—Ceci figure dans l’éd. de 88; c’était donc écrit lorsque, au mois de juillet de cette année, il fut, ainsi qu’il est consigné dans ses éphémérides, par l’autorité des chefs de la Ligue et à la sollicitation du duc d’Elbeuf, en représailles de ce qu’un parent de ce duc était retenu prisonnier par le roi à Rouen, enfermé à la Bastille, où il ne resta que quelques heures, ayant été presque aussitôt remis en liberté, sur l’intervention, dit-il, de la reine-mère.

11, Affady.—Je me languis tellement de la liberté, comme on dit dans certaines parties de la France; j’en suis tellement avide, tellement fou.

12, Aucunement.—En quelque sorte, quelque peu.

18, Loix.—Montaigne parle ici de la résidence forcée et de l’interdiction de séjour des repris de justice, un des abus de notre législation, qui de la sorte ajoute, pour les malheureux qui en sont frappés, aux difficultés de l’existence et les incite à poursuivre dans la voie du mal. Elle ne fait que changer le péril qu’elle veut prévenir en les rejetant sur certains points, sur certaines professions où ils se retrouvent et s’excitent réciproquement contre la société, et en crée d’autres non moins dangereux: beaucoup, par exemple, se rejettent sur les travaux des ports et c’est en partie à leur influence que sont dues ces grèves répétées qui en ce moment compromettent si gravement notre commerce maritime.

23, Iustes.—«Il est difficile de dire au peuple que les lois ne sont pas justes, car il n’obéit que parce qu’il les croit telles: il serait bon qu’il comprît qu’on ne leur obéit que parce qu’elles sont lois et que c’est là ce qui les rend justes.»  Pascal.

25, Sert.—Et cela leur suffit.—Jubeat lex, non suadeat. «La loi ordonne, elle ne persuade pas,» a dit le chancelier de l’Hospital.

26, Equité.—Il est curieux de rapprocher cette appréciation de ce que pensaient à cet égard les révolutionnaires de 1793. Déjà la Déclaration des droits de l’homme inscrite en tête de la Constitution du 3 septembre 1791 avait posé que le but de toute association politique est la conservation de ces droits, dont la liberté, la propriété, la sûreté, la résistance à l’oppression, qui sont naturels et imprescriptibles.—Le 24 avril 1793, la Convention discutant un projet nouveau de Constitution, Robespierre proposait d’y introduire les articles ci-après:—Toute loi qui viole les droits imprescriptibles de l’homme, est essentiellement injuste et tyrannique et n’est point loi.—Tout acte contre la sûreté ou contre la propriété d’un homme, exercé par qui que ce soit même au nom de la loi, hors des cas déterminés par elle et des formes qu’elle prescrit, est arbitraire et nul; le respect même de la loi défend de s’y soumettre et, si l’on veut l’exécuter par la violence, il est permis de le repousser par la force.—La résistance à l’oppression est la conséquence des autres droits de l’homme et du citoyen.—Lorsque le gouvernement viole les droits du peuple, l’insurrection est pour le peuple, et pour chaque portion du peuple, le plus sacré des droits et le plus indispensable des devoirs.—Quand la garantie sociale manque à un citoyen, il rentre dans le droit naturel de défendre lui-même tous ses droits.—Et le 4 novembre 1848, la seconde République proclamait à son tour qu’il y a des droits antérieurs et supérieurs aux lois positives.—Cette légitimité de la résistance à des lois injustes a été fréquemment affirmée, notamment par Sophocle, Cicéron, Victor Hugo, Eugène Pelletan, Léon XIII, Pie X.

28, Ordinairement.—V. N. III, 602: Procez.

30, Doit.—«Rien de si fautif que ces lois qui redressent les fautes; qui leur obéit parce qu’elles sont justes, obéit à la justice qu’il imagine, mais non à l’essence de la loi.» Pascal.Cicéron n’estimait pas davantage que tout ce qui est légal, soit juste; et lui qui reconnaissait en droit la souveraineté du peuple, n’admettait pas que sa volonté fût légitime en tout ce qu’il prescrit.

35, Obseruation.—Ne dirait-on pas ceci écrit de nos jours, où la plupart de nos lois actuellement édictées, le sont par un gouvernement et des chambres où le socialisme est en progrès constant et devant lequel s’inclinent autant par veulerie que par intérêt personnel nombre de législateurs, rééditant «les crapauds du marais» de la Convention, qui ne sont inféodés à ces idées ni par leur origine, ni par leurs convictions. Pour une utile, on en compte dix qui ne le sont pas et ne tendent qu’à restreindre, en haine de la religion, de la bourgeoisie et du capital, le peu de liberté dont nous jouissons. Telles, pour ne parler que des plus récentes: la loi sur les congrégations, qui les a si arbitrairement expulsées; la loi sur l’enseignement, qui tend chaque jour de plus en plus à la suppression des écoles libres; celles sur les syndicats et le droit de grève, qui, par leurs exagérations, ont allumé la guerre entre les patrons et ceux qu’ils emploient, et qui ont déjà produit tant de ruines; celle sur le repos hebdomadaire, que l’on n’arrive pas à appliquer et qui, comme les précédentes, condamne au chômage bien des gens qui ont besoin de travailler et le voudraient; celle de la séparation de l’Église et de l’État, excellente en principe, autant qu’impolitique, mais surtout spoliatrice au suprême degré, comme l’est celle contre les congrégations; enfin la loi en préparation sur le revenu, parfaitement rationnelle aussi en principe, mais inquisitoriale au premier chef et qui, dans la réalité, ne sera qu’un instrument de persécution et d’iniquité en donnant toute facilité de taxer chacun selon ses opinions et les sympathies dont il sera l’objet.

616,

5, Physique.—C.-à-d. c’est l’unique science à laquelle je m’adonne, à l’exclusion de toute autre, qu’elle porte sur l’étude des idées ou sur celle des choses.

22, Vie.—«Savoir ce qu’il faut fuir et ce qu’il faut suivre, voilà ce qui constitue le vrai sage... De même que la nature nous a fournis de pieds pour marcher, de même elle nous a munis de prudence pour nous conduire.» Charron.

34, Faicte.—Diderot, dans l’entretien d’un père avec ses enfants, lui fait dire: «Mon fils, c’est un bon oreiller que celui de la raison, mais je trouve que ma tête repose plus doucement encore sur celui de la religion et des lois.»

34, Ciceron.—L’éd. de 88 port. Platon.

618,

6, Populaire.—Et la vie d’un empereur, aussi bien que celle d’un homme du peuple, est toujours...

27, N’estoit.—Add. de 88: que ie ne voy que mentir et.

34, Prinsault.—D’un premier saut.

620,

3, Temple.—Apollon, au temple de Delphes. V. N. III, 482: Delphes.

10, Subtilité.—Platon, Menon.

16, Socrates.—Xénophon, Mémoires sur Socrate, IV, 2, 24.

26, Loix.—Ils débitent des inepties, du même ton, avec le même sérieux, que s’ils devisaient des lois ou des dogmes sacrés; avec le style, le langage d’un prophète ou d’un législateur.

27, Aristarchus.—Plutarque, De l’Amour fraternel, 1.

31, Exprez.—Var. de 88: ordinaires.

35, Terre.—Antée, fils de Neptune et de la Terre. Il habitait les sables de la Libye; arrêtait et massacrait tous les passants, parce qu’il avait fait vœu d’élever un temple à Neptune avec des crânes humains. Hercule le terrassa trois fois, mais en vain: la Terre, sa mère, ranimait ses forces, chaque fois qu’il la touchait; s’en étant aperçu, le héros le souleva en l’air et l’étouffa. Myth.

45, Ignorance.—Var. de 88: bestise.

622,

2, Maistres.—Var. de 88: le plus sage qui fut oncques, au tesmoignage des dieux et des hommes, au lieu de: «le maistre des maistres».

3, Antisthenes.—Diogène Laerce, IV, 2.

11, Conditions.—Les qualités bonnes et mauvaises.

23, Numerus.—Virgile parle ici des raisins, dont les espèces sont si nombreuses, dit-il, qu’on ne saurait ni les nommer, ni même les compter.

30, Basses.—Var. de 88: viles.

624,

3, Perseus.—Tite-Live, XLI, 20.

4, Essorées.—Si libres en leur essor.—Essorer est un terme de fauconnerie qui se dit du faucon lorsque, prenant son vol, grisé par la liberté qu’on lui rend, il y met tant d’impétuosité, qu’il se laisse entraîner au point qu’il a peine à revenir.

7, Autre.—Cet autre, c’est probablement l’auteur lui-même.

11, Simple.—Nulle faculté exclusivement bonne ou exclusivement mauvaise, de sorte que...

16, Morsure.—Add. de 88: et sans amertume.

20, Platon.—Dans le Gorgias.

33, Flatteurs.

«Détestables flatteurs, présent le plus funeste
Que puisse faire aux rois la colère céleste.»
(Racine, Phèdre.)

«Les flatteurs du peuple sont aussi funestes à la société, que le sont les flatteurs des rois.»  De Frauendorf.

35, Corrompu.—Var. de 88: trahy et pipé.

35, Canaille.—Var. de 88: race.

35, Comment.—Comment pourrions-nous échapper à semblable danger, puisque Alexandre...

626,

1, Nom.—Ce contrôle de ses actions serait une charge de la maison du prince ou du maître, à laquelle ne serait attachée aucune qualification officielle.

10, Forme.—Montaigne blâme ici les remontrances adressées aux rois du haut de la chaire, par les prédicateurs, assez fréquentes à cette époque où la Sainte Ligue était en lutte ouverte contre la royauté; le fait suivant donne une idée des écarts de parole auxquels ils s’abandonnaient parfois: A l’occasion d’une de ces orgies scandaleuses par lesquelles se terminaient le plus souvent les exercices religieux de la confrérie des pénitents qu’avait organisée Henri III, à la cour même, et auxquels lui-même participait, un prédicateur fameux, du nom de Poncet, dit un jour en chaire: «J’ai été averti de bon lieu, qu’hier au soir, qui était le vendredi de leurs processions, la broche tournait pour ces gros pénitents; et qu’après avoir mangé le gras chapon, ils eurent pour collation de nuit le petit tendron qu’on leur tenait tout prêt. Ah! malheureux hypocrites, vous vous moquez donc de Dieu, sous le masque, et portez par contenance un fouet à votre ceinture? Ce n’est pas là, de par Dieu, où il faudrait le porter; c’est sur votre dos et sur vos épaules et vous en étriller très fort, il n’y a pas un de vous qui ne l’ait bien gagné.»

29, Route.—Tout ce qui pourrait les faire changer de conduite et de résolution.

31, Interest.—Sans détriment pour...

32, Qui.—Si on les en eût.—Ce sont les journaux qui, dans nos sociétés modernes, jouent ce rôle de conseiller avertisseur, mais il faut, pour que le remède ne soit pas pire que le mal, qu’ils soient libres et sincères, ce qui est rare et difficile à discerner, et que les gouvernants sachent et aient possibilité de profiter de ces avertissements.

33, Bon.—Et cela leur réussit.

35, Essay.—Tacite, Hist., I, 15.

38, Vie.—Des expériences morales et physiques auxquelles je me suis livré.—Explication probable du titre donné par Montaigne à son ouvrage. V. N. I, titre: Essais.

628,

2, Contrepoil.—C.-à-d. ce registre de ma vie peut être un assez bon guide pour régler la santé de l’âme, pourvu qu’on prenne la peinture que je fais ici de mes mœurs, non comme un modèle à imiter, mais au contraire comme exemple à éviter.

«Des défauts du prochain sachons donc profiter.
Il n’est guère moins nécessaire
De voir ce qu’il faut éviter
Que de savoir ce qu’il faut faire.»
(Mme Deshoulières.)

8, Medecine.—Tacite, Ann., VI, 46, dit que Tibère croyait peu à l’art des médecins et plaisantait souvent ceux qui, passé trente ans, avaient besoin que d’autres leur apprissent ce qui était nuisible ou contraire à leur tempérament; Suétone ajoute que lui-même, dès cet âge, cessa de les consulter; et Plutarque, qu’il avait coutume de dire qu’un homme de soixante ans mérite qu’on se moque de lui, quand il tend la main à un médecin pour se faire tâter le pouls.

13, Mauuais.—Xénophon, Mémoires sur Socrate, IV, 7, 9.

15, Platon.—République, III.

36, Dire.—Add. de 88: à les voir et ceux qui se gouuernent par eux.

38, Eschançon.—C.-à-d. comme si j’avais été son échanson, comme si j’avais été attaché au service personnel de cet art de la médecine; ou encore: à qui en voudra goûter, en ayant fait l’essai, je m’y connais et suis à même de lui servir d’échanson.

630,

5, Destourbier.—Sans trouble.

19, Auguste.—Augsbourg, ville de Bavière; Montaigne y passa en 1580 lorsqu’il fit son voyage en Italie.

33, Seneque.—Epist. 90.

33, Cettuy-ci.—L’Allemand dont il a été question plus haut.

40, Euenus.—Plutarque, Questions platoniques, 8.

632,

2, Bas.—On dit que le vin est «au bas», quand, touchant à sa fin, le tonneau est presque vide; le vin qu’on en soutire, acquiert alors un goût plus prononcé en raison de son contact plus immédiat avec la lie.

22, Plus.—Comme s’il était préférable, plus probant. L’éd. de 88 porte: comme s’il estoit plus noble.

34, Lybie.—Diogène Laerce, Pyrrhus, IV, 81.—Athénée parle également d’un certain Magon, de Carthage, qui trois fois avait traversé ce désert, vivant uniquement de farine et sans boire.

634,

1, Lisbonne.—La distance entre ces deux villes est d’environ 650 kil.—Le gentilhomme en question était le marquis de Pisani, ambassadeur de France en Espagne, puis à Rome.

10, Tabut.—Vacarme.

11, Seneque.—Dans sa Lettre 56e.

18, Socrates.—Diogène Laerce, II, 36.

21, L’eau.—Des norias. Ces appareils composés jadis de pots en terre, aujourd’hui de godets articulés, formant dans l’un et l’autre cas une chaîne sans fin, montée sur une roue que meut un manège actionné le plus souvent par un cheval, sont employés en grand nombre, de tout temps et avec plus ou moins de perfectionnements, dans le midi de l’Europe.

23, Seneque.—Epist. 108.

24, Sextius.—Il estimait qu’il existe assez d’aliments pour l’homme, sans qu’il se nourrisse d’êtres vivants qu’il tue à cet effet, ce qui développe en lui son penchant à la cruauté; en outre, selon lui, la variété des mets serait contraire à la santé.—Ce même Sextius avait refusé la dignité de sénateur que César lui offrait, disant que ce qui se donnait ainsi, pouvait de même se retirer.

29, Loudiers.—Couvertures ou matelas suivant leur épaisseur, constitués par une enveloppe remplie de laine, de bourre, de crin, parfois de duvet et piquée, servant à garnir les lits.

29, Enfondrent.—Qui enfoncent sous le poids du corps.

636,

2, Voluptez.

«Les gueux, les gueux
Sont les gens heureux.» Béranger.
«Car en quelque façon les malheurs sont propices,
Et les gueux, en gueusant, trouvent mille délices.» Béranger.

3, Politiques.—Les gueux, nom générique donné à l’ensemble des misérables, infirmes, mendiants, voleurs et tous autres composant les bas-fonds de la Société ou en rupture de ban avec elle, formaient jadis à Paris une véritable corporation, qui avait une hiérarchie véritable. Au XVIIe siècle, leur repaire principal, appelé la cour des Miracles, était établi près de l’église S.-Eustache; les rues de la Grande-Truanderie, de Vide-Gousset lui doivent leurs noms; c’était un quartier formé d’un dédale de ruelles infectes et tortueuses où grouillait pêle-mêle une population hétéroclite et où de fait régnait le droit d’asile, un peu par tolérance, un peu par impuissance; le guet n’y apparaissait jamais qu’à contrecœur et presque toujours ses recherches étaient vaines; un roi électif y gouvernait; cela dura des siècles. En 1656 le nombre de ces individus s’élevait à 40.000; quand on se décida à mettre fin à cet état de choses, les infirmes furent recueillis à l’hôpital général qui venait d’être achevé, et les autres, de gré ou de force, durent se disperser.—En l’an de grâce 1907 nous en sommes à peu près revenus, à Paris, à ce qui s’y passait il y a trois siècles: les Gueux sont devenus les Apaches, comme ils se sont baptisés eux-mêmes; comme eux ils ont une organisation, forment des bandes qui ont des chefs auxquels ils obéissent aveuglément; pour eux la vie du prochain ne compte pas; la nuit, ils sont les maîtres de Paris et de sa banlieue, sans pour cela être toujours inactifs de jour. La police redoute de se commettre avec eux et les évite autant qu’elle peut le faire décemment; le parquet les relâche le plus souvent, quand on n’a pu faire autrement que de les arrêter, et les tribunaux, quand par extraordinaire ils ont à les juger, se montrent à leur égard d’une faiblesse qui tient en partie à des raisons budgétaires et n’a d’égale que le peu de rigueur des moyens de répression que nos lois édictent contre les malfaiteurs et qu’on a chaque jour tendance à rendre plus anodins, alors que déjà ils sont sans efficacité sur eux.

5, Sages.—Pythagore, dans Stobée, Serm. 29. Cette maxime est ainsi formulée dans Plutarque, De l’Exil, 7: «Choisis la voie qui est la meilleure, l’accoutumance te la rendra facile et plaisante.»

26, Philopœmen.—Ou plutôt, «comme on disait à Philopœmen».  Plutarque, Phil., I.

34, Iour.—C.-à-d. à la belle étoile, à l’air du temps, comme il se dit en style familier.

638,

11, Marius.—Plutarque, Comment il faut refréner la colère, 13.

15, Transparante.—On voit communément des gens auxquels il répugne de boire du lait dans des récipients à parois transparentes, des verres par exemple; pour qu’ils soient à l’aise, il faut qu’ils le boivent dans des tasses ou des bols. Nombre d’autres ne peuvent souffrir la vaisselle en métal, aussi bien la vaisselle plate que celle en étain, et toutes deux ont à peu près disparu, celle-ci devant la faïence, celle-là devant la porcelaine: affaire de goût autant que de prix.

21, Serein.—Vapeur humide et froide qui se dépose, en été, après le coucher du soleil.

33, Sentiment.—Non pas tant son opinion que sa sensation.

34, Imagination.—C.-à-d.: Quoi! serait-il donc vrai que le doute même et le soin que nous mettons à nous enquérir de ce qui est vrai ou ne l’est pas, frappe notre imagination, et...—L’éd. de 88 port.: inquisition de l’imagination nous frappe, au lieu de: «l’inquisition (la recherche) frappe nostre imagination».

37, Chartre.—Se sont mis à des régimes particuliers.—D’autres traduisent: sont tombés dans le marasme; chartre désignant jadis, paraît-il, une maladie de langueur amenant le dépérissement.

640,

3, Haut mal.—César, au dire de Plutarque, César, 5, était sujet à des attaques d’épilepsie, dont il avait ressenti les premiers accès en Espagne, alors qu’il y était comme préteur.

7, Aussi.—Add. de 88: les autres ont pour leur part la discretion et la suffisance, moy l’ingenuité et la liberté.

8, Obscure.—Var. de 88: cachée.

34, Est.—Les premiers mots: An viuere tanti est, ne se trouvent pas dans le texte de Pseudo-Gallus.

642,

10, Plaisir.—Voltaire a dit dans le même sens:

«Et puisqu’il faut que nous soyons damnés,
Damnons-nous donc pour des fautes aimables.»

28, Vices.—Ovide se vante même de quelque chose de plus.

30, Ans.—En quel âge tendre; combien j’étais jeune encore, quand...

31, Rencontre.—Ce fut bien un hasard.

33, Quartilla.—Pétrone, 25.

644,

5, Resolue.—Si nettement fondé sur des principes précis et déterminés.

7, Fernel.—Commença par s’adonner aux mathématiques et à l’astronomie; se livra ensuite à la médecine et acquit une telle célébrité que Henri II lui donna le titre de son premier médecin; a écrit de nombreux ouvrages qui réunissent l’élégance du style et la solidité de la doctrine.

8, L’Escale.—Prétendait descendre de la famille della Scala, d’où le nom qu’il prit. La mode étant alors que tout savant se respectant, donnât à son nom un air latin ou grec. Après avoir beaucoup voyagé, il se fixa en France; fut, comme médecin, d’une science très réelle; visait au renom d’homme universel et effectivement savait de tout et a beaucoup écrit en tous genres, mais c’est principalement comme grammairien qu’il mérite sa célébrité.

23, Diuertir.—Que je m’écarte un moment de mon sujet.

33, Quelqu’vn.—Carnéade.  Diogène Laerce, Vie de ce philosophe, IV, 63.

646,

7, Desmarche.—Se recule, se retire; en latin pedem referre, porter le pied en arrière.

13, Iours.—Et leur durée déterminée.

21, Tenaces.—L’éd. de 88 port.: tenants.

25, Cul.—L’éd. de 88 dit plus décemment costé.

25, Vague.—Var. de 88: patron libre, au lieu de «miroüer vague».

648,

11, Platon.—République, III.

13, Imbecille.—Affaibli par l’âge.

17, Sçauroit.—Add. de 88: plus.

32, Ctesiphon.—Plutarque, Comment il faut refréner la colère, 8.

32, Faire.—Lutter, se battre.

34, Auantageux.—Ces gens-là, les médecins, sont hautains, impérieux, altiers.

37, Troigne.—Var. de 88: contenance; le changement n’est pas flatteur.

650,

3, Pipper.—Et tromper, pour qui le peut.

20, Eringium.—Appelé aussi «panicaut» ou «chardon roland»; plante dont la racine est apéritive.

20, Herbe du Turc.—Ou «turquette», nom vulgaire de la herniaire, plante astringente à laquelle on attribuait la propriété de guérir la hernie.

25, Profluuion.—Écoulement; du latin profluvium, qui a même signification.

29, Dit-il.—Dit mon esprit.

36, Ainsin.—Qui, d’une manière ou d’une autre.

652,

2, Discours.—Ta raison.

11, Pauses.—Plaisantant, riant de temps en temps.

11, Gens.—Var. de 88: raillant à pauses auec les dames, au lieu de: «bouffonant... tes gens».

654,

5, Paume.—Tu lui donnes la main...

9, Inopinement.—C.-à-d. on t’aura, avec ta sécurité et ta confiance, fait passer un matin de vie à trépas.—Passer l’eau, c’est passer dans l’autre monde, par allusion aux idées anciennement en cours chez les Grecs que les âmes des morts, pour se rendre aux Enfers, passaient l’Achéron, transportées dans la barque à Caron. V. N. III, 516: Acheron.

18, Sybillines.—Une vieille femme proposa un jour à Tarquin le Superbe (vers l’an 510) d’acheter neuf livres qu’elle lui présentait; rebuté par le prix qu’elle en voulait, il refusa. Elle en jeta trois au feu, et renouvela son offre de vente, demandant le même prix des six autres; nouveau refus, à la suite duquel elle en jeta à nouveau trois au feu. Tarquin lui demanda alors ce qu’elle voulait de ceux qui lui restaient: «Autant que des neuf,» répondit-elle. Sa fermeté fit juger à Tarquin que ces livres devaient être d’une extrême importance et il en donna le prix exigé. C’étaient les livres sibyllins contenant l’avenir de Rome qu’était venue lui offrir la sibylle de Cumes. Ces livres furent déposés au Capitole qui venait d’être achevé; ils étaient consultés dans les grandes circonstances et brûlèrent en 62, lors de l’incendie de cet édifice; on chercha aussitôt à les reconstituer, mais le peu d’authenticité d’un grand nombre des prédictions ainsi recueillies firent qu’ils tombèrent dans le discrédit.

20, Experience.—C’est le recueil des feuillets composant son journal de voyage en 1580-81; on s’aperçoit aisément en les parcourant qu’il ne les avait dictés ou écrits que pour lui-même.

28, Vn aage.—Var. de 88: quarante ans.

29, Vn autre.—Var. de 88: quatorze.

656,

8, Contrecarre.—Opposition.

9, Vertu.—Ce sentiment est expressément combattu par Plutarque, dans le traité Des communes conceptions contre les Stoïques, 10 et suivants.

16, Tours.—Si bien que tour à tour...

18, Fable.—Platon, Phédon.

658,

24, Coulpe.—C’est sa faute.

35, Cicero.—Comme Cicéron tâche d’adoucir et d’amuser le mal de sa vieillesse (dans son livre De Senectute), j’essaie d’endormir...

660,

1, Espreignent.—Expriment, tirent, font sortir.

20, Corps.—Sans que le corps souffre réellement.

40, Heures.—A cette époque, on dînait ordinairement à onze heures du matin et soupait à six heures du soir. V. N. III, 432: Partir.

662,

2, Platon.—Diogène Laerce, Platon, III, 39;  Platon, Lois, VII, 13.

6, Scipion.—Plutarque, S’il est requis qu’un prince soit savant, 6.

30, Pays.—La profession militaire est aujourd’hui ce qu’elle était du temps de Montaigne, ce qu’elle a été et ce qu’elle sera de tous temps, la plus belle et la plus noble de toutes, parce que son idéal est la gloire et l’intérêt de la patrie, sa vertu essentielle l’abnégation et qu’elle a pour base la discipline. Quoique exclue avec juste raison de la politique et, quoi qu’en disent ses ennemis, n’en faisant pas, quand le Gouvernement lui-même ne l’y incite pas, celle-ci n’en réagit pas moins sur elle, parce qu’elle émane de la Nation, qu’elle participe de sa vie et ressent le contre-coup des passions qui l’agitent. En ce moment où les théories les plus subversives ont accès dans les sphères gouvernementales et vont gagnant de jour en jour, l’armée, il faut en convenir, traverse une phase difficile; ses ennemis, et elle n’en manque pas: les intellectuels qui la jalousent, les gens de désordre auxquels elle fait obstacle, jusqu’aux pouvoirs publics qui tout en la cajolant, l’exaltant, l’ont en suspicion, s’efforcent à qui mieux mieux de l’affaiblir; seul le pays, sans arrière-pensée, lui demeure sincèrement attaché. Mais le mal fait son œuvre, l’antimilitarisme étale ses idées au grand jour et fait de la propagande, on y fomente les rivalités, favorise l’intrigue, ses institutions les plus tutélaires sont battues en brèche, ses garanties foulées aux pieds, on la dégrade en en usant pour des œuvres de police, on en abuse en la contraignant à subir sans riposter les injures et les coups de ceux contre lesquels on l’emploie, on laisse dire à un ancien ministre sorti de ses rangs, qui cinq ans durant a travaillé à sa désorganisation, qu’elle est en révolte permanente contre les idées du jour, si bien qu’on en est arrivé à ce que les caractères y sont diminués au point que ce système d’illégalité et d’arbitraire dicté par la haine des uns, la crainte et la faiblesse des autres, ne soulève que de bien faibles protestations émanant de ceux qui en sont directement atteints; quant à ses grands chefs, qui pourraient être frappés mais dont la voix serait entendue et dont le devoir serait de parler, à peu d’exceptions près, par peur de se compromettre, ils se taisent et se bornent à gémir.

36, Honneur.—Add. de 88: et noblesse.

664,

9, Asseure.—Donne de l’assurance, enhardit.

13, Galleux.—La gale était alors une affection très répandue, dont la cause était inconnue et dont on ne guérissait pas aisément. Aujourd’hui elle se contracte beaucoup moins; on sait qu’elle est due à un animalcule qui s’introduit sous l’épiderme, y chemine et y pullule, et en vingt-quatre heures on s’en débarrasse.

21, Pruantes.—Sujettes à des démangeaisons; expression gasconne.

21, Sens.—Add. de 88: corporels.

24, L’aage.—Var. de l’ex. de Bord.: tantost de six ans, le cinquantieme.

28, Ieunesse.—Il y a peu à dire de ma santé au temps de ma jeunesse qui n’a guère connu la douleur.—Indolence est employé ici conformément à son étymologie (in privatif, et dolor, douleur); son sens aujourd’hui est tout autre.

666,

12, Temperature.—Modération (de son âme).

16, Non.—Non seulement, comme le porte l’éd. de 88.

21, Tient.—Add. de 88: aux talons.

22, Guttur.—Le goitre est une tumeur spongieuse, susceptible de devenir très volumineuse, qui vient à la gorge; elle est très fréquente dans certaines vallées des Alpes.

35, Platon.—Dans le Timée.

39, Histoires.—Hérodote, IV, 184;  Pomponius Mela, I, 8.

668,

3, Propos.—Cicéron, De Divinat., II, 58.

6, Songeant.—Galien dit qu’ayant ouï dire qu’il arrivait à certaines gens de marcher tout endormis, il n’en avait rien cru, jusqu’à ce qu’ayant eu à voyager à pied toute une nuit, il fut forcé de le croire, par l’expérience qu’il en fit lui-même.—Le fait est fréquent chez le soldat, dans les marches de nuit.

7, Maison.—Diogène Laerce, Pyrrhon, IX, 82.

11, Fauorinus.—Ou plutôt ce qu’il condamne, ainsi qu’il résulte d’un passage d’Aulu-Gelle, Nuits att., XV, 8.

30, Faict.—C.-à-d. ne pas faire bonne chère avec des mets dont les autres se délectent...

670,

1, Galeres.—Ce parent devait être vraisemblablement officier du corps des galères du roi, lequel, en 1748, a été réuni à celui de la marine.

5, Village.—Au village de Papessus, agglomération de quelques maisons à environ 3 kil. N. du manoir paternel, suivant une tradition locale.

19, Attacher.—C’est probablement en mémoire de ce parrain inconnu qu’il reçut le prénom de Michel; c’était parfois l’usage de donner des gens de peu pour parrains à de jeunes nobles, afin de leur enseigner à ne pas rougir plus tard de leurs inférieurs. Un arrière-petit-fils de Montaigne, Charles-François de Lur-Saluces, fut, comme son bisaïeul, tenu sur les fonts baptismaux par des pauvres; il en a été de même un siècle plus tard de Montaigne en Guyenne, comme de Buffon en Bourgogne, qui eurent pour parrains des mendiants de la paroisse, dont les prénoms leur furent donnés, «afin que toute leur vie ils se rappelassent que les pauvres sont frères». Bonnefon.

25, Chelonis.—Léonidas II, son père, roi de Sparte concurremment avec Agis III, était poursuivi et contraint de quitter Sparte et remplacé sur le trône par son gendre Cléombrote parce qu’il s’opposait aux réformes entreprises par Agis pour mettre fin aux abus qui s’y étaient introduits et la ramener à l’austérité de Lycurgue (243); au bout d’un certain temps, les partisans de Léonidas reprirent le dessus (239), Agis fut mis à mort et Cléombrote mari de Chélonis détrôné dut à son tour prendre le chemin de l’exil.—Le récit des faits de cette généreuse princesse est à lire dans Plutarque, Agis et Cléomènes, 5.

34, Flaminius.—Dans sa Vie par Plutarque, c. 1.

36, Pyrrhus.—Dans sa Vie par Plutarque, c. 2.

672,

5, Auguste.—Dans sa Vie par Suétone, c. 74.

674,

12, Naturelles.—C.-à-d. à l’âge auquel je suis arrivé, ma mort est juste et naturelle; et je ne puis désormais ni demander ni espérer de la destinée une prolongation de vie, qui serait une faveur contraire aux règles et au cours ordinaire de la nature.

15, Solon.—Hérodote, I, 32.

18, Passé.—C’est l’aurea mediocritas (l’excellente médiocrité) d’Horace, tant prônée avant lui, dans l’antiquité par Cléobule, un des sept sages de la Grèce, comme une des plus sûres conditions d’une vie heureuse.  Diogène Laerce, I, 93.

«Si le bonheur nous est permis,
Il n’est point sous le chaume, il n’est point sur le trône;
Voulons-nous l’obtenir, amis?
La «médiocrité» le donne.»

C’est également Cléobule qui recommandait de la mesure en tout: «Faites, disait-il encore, du bien à vos amis pour vous les attacher davantage, et à vos ennemis pour vous en faire des amis.»

23, Platon.—Dans le Timée.

28, Heure.—C.-à-d. le déclin de nos facultés anticipe sur le moment où la mort doit arriver, et augmente à mesure que nous avançons vers l’heure fatale.

33, Tracasser.—Var. de 88: trainer.

676,

6, Refors.—Raifort. V. N. III, 36.

10, Blanc.—V. N. III, 64: Clairet.—Sur ce point, Montaigne s’en remettait du reste, le cas échéant, aux médecins: «Ils pensent, dit-il (liv. II, ch. XXXVII, III, 64), m’ordonner le blanc ou le clairet.»

20, Abondance.—Sénèque, Epist. 18.

25, Liqueur.—Vénus et Bacchus.

26, Propre.—C.-à-d. ou parce que je n’avais pour manger avec moi, aucune personne dont la société me convînt.

28, Mange.—Sénèque, Epist. 91.

28, Chilon.—Plutarque, Banquet des Sept Sages, 3.

678,

7, Ieusne.—Par loix de jeusne, il faut, ce nous semble, entendre ici les régimes de toutes sortes que les médecins nous conseillent dans le cas de telles ou telles affections et qui tous aboutissent à des interdictions qu’ils nous imposent. D’autres ont pensé qu’il s’agissait simplement du jeûne que l’Église prescrit à ses fidèles et en concluent que son observation, d’après ce qui suit, aurait été chez Montaigne beaucoup plus une question hygiénique qu’une mortification; c’est bien, en effet, l’idée qui, à l’origine, le fit prescrire par la religion; et il faut reconnaître qu’aujourd’hui avec tous les tempéraments qu’elle y a apportés pour suivre nos estomacs devenus plus exigeants en raison de la vie plus intensive que nous menons, d’une débilité qui va croissant par suite de la sophistication de toutes denrées alimentaires et de la place de plus en plus grande qu’un accroissement dans le bien-être général a fait occuper à la viande dans notre alimentation, le jeûne n’est plus guère, dans l’Église catholique, qu’une marque d’obéissance qu’elle demande à ses adhérents.

18, Galbe.—De parure, d’apparat.

680,

4, Auguste.—Dans sa Vie par Suétone, c. 77.

5, Democritus.—Pline, Hist. nat., XXVIII, 6.—Le texte latin porte Démétrius; Montaigne a mis Démocritus, probablement parce qu’il a relevé le fait dans Erasme qui a commis la même erreur.

7, Demysetiers.—Le demi-setier, mesure de capacité ancienne, représentait environ un quart de litre. Ce n’était pas, comme son nom semble l’indiquer, la moitié du setier; celui-ci valait près de huit litres. Trois demi-setiers faisaient donc trois quarts de litre, c’est à peu près la contenance de la bouteille de Bordeaux.

13, Sommelerie.—Pièce où dans une maison sont en dépôt les provisions de consommation immédiate, et où se font les opérations qu’elles comportent.

15, Vin.—D’eau, aj. l’éd. de 88.—D’autres attribuent cet usage à Amphictyon, successeur de Cranaüs.  Athénée, II, 2.

24, Difficultez.—Var. de 88: aspretez.

35, Soulagé.—C’est la raison qui fait que, de nos jours, soit pour écrire, soit pour l’impression, on emploie fréquemment des papiers très légèrement teintés, de couleur crème plutôt que blancs.

35, Present.—Montaigne avait alors cinquante-quatre ans, ainsi qu’il l’indique ici même, dans l’éd. de 88.

682,

5, Coïement.—Tranquillement. L’adjectif coi, au masculin, est encore en usage dans le style familier: «Il est resté coi.»

16, Certains.—Immobiles.

18, Rassis.—Add. de 88: et pour la gesticulation, ne me trouue guiere sans baguette à la main, soit à cheual ou à pied.

18, Chrysippus.—Diogène Laerce, VII, 183.

27, Diogenes.—Plutarque, Que la vertu se peut enseigner, 2.

36, Platon.—Dans le dialogue intitulé Protagoras.

684,

1, Conuiue.—S.-ent.: pour qu’un repas ait lieu dans les meilleures conditions. Aulu-Gelle, XIII, II.

10, Forclost.—M’en exclut.

13, Manie.—Qui vais toujours terre à terre.

14, Culture.—Add. de 88: et plaisir.

16, Xerxes.—Cicéron, Tusc., V, 7.

35, Critolaüs.—Ce philosophe estimait que si dans l’un des plateaux d’une balance on mettait les biens de l’âme, dans l’autre les biens du corps et, en général, tous les biens matériels, les premiers l’emporteraient, même si on ajoutait aux autres la terre et les mers. Cicéron, Tusc., V, 17.—Montaigne en fait ici application à un usage fort différent.

686,

4, Cyrenaïques.—Diogène Laerce, II, 90.

6, Aristote.—Morale à Nicomaque, II, 7.

12, Bacchus.—Add. de 88: Ces humeurs vanteuses se peuuent forger quelque contentement, car que ne peut sur nous la fantasie? mais sagesse, elles n’en tiennent tache. Ie hay...

13, Cercle.—La quadrature du cercle, ou transformation d’un cercle en un carré de surface équivalente, est un problème insoluble.

688,

2, Vescu.—C’est le mot de La Fayette à quelqu’un lui demandant ce qu’il avait fait pendant la Terreur, durant laquelle, membre de la Convention, il s’était effacé de son mieux et avait réussi à passer inaperçu: «J’ai vécu,» répondit-il.

4, Si.—S.-ent.: Mais, me direz-vous encore, si...

14, Adminicules.—C.-à-d. n’en sont que d’infimes accessoires et superfétations. Appendicules et adminicules sont deux mots latins que l’on rencontre, avec le sens ici indiqué, dans Cicéron et autres, et que Montaigne a francisés.

16, Deliure.—Libre, dégagé de tout autre soin.

17, Brutus.—Plutarque, M. Brutus, 1.

19, Breueter.—Annoter, prendre des notes.

26, Certes.—Que ce soit en plaisantant ou sérieusement qu’on dise...

26, Theologal.—Jadis, ecclésiastiques et moines passaient pour faire bonne chère, et, la malice populaire tenant comme vin de choix celui qu’ils buvaient, qualifiait de vin théologal celui qui sortait de l’ordinaire. L’épithète de sorbonique ne fait que renforcer cette même idée. La Sorbonne, simple établissement d’éducation ecclésiastique dans le principe, était à cette époque, et depuis près de trois siècles, devenue une faculté de théologie, dont les doctrines faisaient loi en matière de foi.

27, Sorbonique.—Var. de 88: doctoral.

31, Condiment.—Assaisonnement. Le mot est encore dans la langue et vient du latin condimentum, qui a le même sens; on le trouve ainsi employé dans Cicéron: «Socrate disait que la faim est l’assaisonnement (condimentum) de tous mets, et la soif celui de toute boisson, quels qu’ils soient.»

35, Bacchus.—Add. de l’ex. de Bord: Illis est indulgendum, non seruiendum (il faut le leur pardonner, et ne pas leur en faire un grief).

37, Vie.—V. N. I, 616: Virtus.

690,

5, Luy.—Épaminondas pouvait d’autant mieux être porté à en agir ainsi que Cornélius Népos, Épaminondas, 2, le représente comme ayant si bien appris à chanter, à danser et à sonner (du latin sonare, jouer des instruments; on dit encore «sonner du cor»), qu’aucun Thébain ne lui était supérieur dans ces différents exercices. V. N. III, 18: Epaminondas.

5, L’ayeul.—Il y a là confusion entre Scipion, le premier Africain, le vainqueur de Zama, et son petit-fils adoptif Scipion Émilien, le second Africain, qui prit Carthage; sur ce point, l’éd. de 88 présente la var. suivante: du ieune Scipion (tout compté, le premier homme des Romains), au lieu de: «de Scipion... celeste». Le premier a vaincu Annibal et ce qui a trait à la Sicile se rapporte à lui; mais la liaison avec Lælius et la collaboration à des comédies s’appliquent nettement au second. Toutefois, il est à observer que tous deux se sont illustrés au même degré, ont été victimes de l’envie, ont fini dans un exil plus ou moins volontaire; qu’il y a eu deux Lælius, comme il y a eu deux Scipion, qui respectivement les ont suivis chacun sur le théâtre de leur gloire et leur sont restés fidèles dans l’adversité; qu’enfin si Térence fut le familier de Scipion Émilien, Ennius avait été celui de son aïeul.

7, Celeste.—Aulu-Gelle, VII, 1.

8, Baguenaudant.—Musant, jouant.—Baguenauder semble venir de baguenaudier, nom d’un arbuste de nos contrées dont le fruit est enveloppé d’une membrane enflée comme une vessie que les enfants s’amusent à faire claquer. Ce nom, mais dérivant du verbe, est aussi celui d’un jeu de bagues, sorte de jeu de patience assez répandu.

9, Coquilles.—Cicéron, De Orat., II, 6, qui le dit du premier Scipion, mais non du second.

10, Cornichon va deuant.—On a beaucoup ergoté sur ce que ce jeu pouvait être. Les uns estimèrent que c’était faire des ricochets sur la mer avec les galets de la plage; d’autres, aller à qui ira le plus vite, tout en ramassant, chemin faisant, quelque chose à terre; ce serait encore le jeu de boules où on en lance tout d’abord une plus petite pour servir de but; ou enfin le jeu d’enfants que nous connaissons sous le nom de sabot et que l’on appelle aussi corniche.

10, Lælius.—«Quand ils pouvaient s’échapper de Rome, Lælius avait coutume d’accompagner Scipion à la campagne et là, comme des captifs ayant rompu leurs chaînes, tous deux redevenaient enfants...; souvent ils ramassaient des coquillages et des galets sur les rivages de Gaète et de Laurente, et, libres de toute préoccupation, s’amusaient aux jeux les plus puérils.» Cicéron.—«Quand, loin du monde et des bruyantes scènes, la vertu de Scipion et la douce sagesse de Lælius s’étaient réfugiées à la campagne, tous deux, dénouant leur ceinture, jouaient avec Lucile et s’amusaient avec lui comme des enfants, en attendant que les légumes du souper fussent cuits.» Horace.—«Scipion, dit Sénèque, pratiquait aussi la danse à la mode des héros anciens, qui s’y adonnaient de telle sorte qu’ils pouvaient être vus sans que cela portât atteinte à leur considération.»

12, Comedies.—Ces comédies sont celles de Térence auxquelles Scipion Émilien et Lælius eurent beaucoup de part, au dire de Suétone dans la Vie de ce poète, de quoi Montaigne était si fort persuadé qu’il dit (liv. I, 39, I, 432): «et me feroit on desplaisir de me desloger de cette creance».

13, Hommes.—Add. de 88: Ie suis extremement despit dequoy le plus beau couple de vies qui fut dans Plutarque, de ces deux grands hommes (Épaminondas et Scipion premier Africain), se rencontre des premiers à estre perdu.

16, Rome.—Allusion à l’hostilité intransigeante que durant sa vie entière Caton l’Ancien et autres (V. les discours de Q. Fabius, Tite-Live, XXIX, 19) témoignèrent au premier Scipion. Montaigne commet encore ici une méprise; ce même historien ne dit pas que Scipion, en Sicile, visitait des écoles et écoutait des philosophes, mais qu’il allait se promener au Gymnasium, lieu destiné aux exercices physiques, auxquels parfois il prenait part.

18, Baller.—Danser.

27, Recourir.—Secourir.

30, Tout.—V. N. III, 544: Theramenez.

32, Abstinence.—Cette beauté, c’est Alcibiade au début de leur connaissance, d’après le propre dire de celui-ci; il y avait entre eux une différence d’âge d’une vingtaine d’années.

39, Boire à lut.—Bien boire. Expression venue de l’Allemagne: boire all-aufs (all signifiant tout, complètement, et aufs, au mieux); d’où on a fait allus, puis à lut, voulant dire: «Continuer à boire durant tout le repas, sans cesser de faire raison à tous ceux qui vous provoquent»; c.-à-d. vider chaque fois son verre jusqu’à la dernière goutte, aussi souvent qu’on vous le remplit.

692,

1, Grace.—Socrate ne rougissait pas de jouer avec les enfants, Sénèque. V. N. III, 26: Gestes.

4, Perfection.—Tout ce que dit ici Montaigne, concernant Socrate, est tiré presque mot pour mot du Banquet de Platon, II, 16, dialogue dans lequel ce philosophe introduit Alcibiade qui fait de son maître l’éloge le plus beau et le plus délicat; c’est le chef-d’œuvre de Platon, et dans ce discours d’Alcibiade, il y a un art et un goût infinis.  Naigeon.

7, Ply.—C.-à-d. des exemples faibles et défectueux, à peine bons à suivre sous un rapport.

18, Mespriser.—Var. de 88: hayr et desdaigner.

25, Volupté.—«Les plaisirs sont amers, d’abord qu’on en abuse.»  Mme Deshoulières.

29, Exemplaire.—Diogène Laerce, VIII, 88.—Dans sa Morale à Nicomaque, X, 2, Aristote réfute cette théorie d’Eudoxe sur le plaisir en quoi il faisait consister le souverain bien, et dit positivement que lui-même se distinguait par une tempérance extraordinaire.—Eudoxe, qui fut l’ami de Platon, était du reste un philosophe d’éminente sagesse; astronome renommé de son temps, il avait apprécié l’année solaire à 365 jours un quart, ce qui fut adopté plus tard, sous César, par Sosigène pour l’établissement du calendrier Julien; géomètre, on lui doit une théorie des lignes courbes; il était aussi médecin.

694,

1, Platon.—Lois, I.

4, Volupté.—Des attraits excessifs et enchanteurs de la volupté.—Blandices vient du mot latin blanditiæ (caresses, flatteries, attraits) que Montaigne a francisé en en changeant la terminaison.

7, Escharsement.—Modérément. V. N. I, 446.

10, Elle.—Elles se subordonnent à elle, c’est là la vertu.

19, Decours.—Var. de 88: sa decadence, au lieu de: «son... decours».

23, Compose.—Je me prépare...

25, Moleste.—Fâcheuse, du latin molestus, qui a même sens. Comme adjectif, ce mot n’est pas d’usage; au contraire le verbe molester, qui a même étymologie, est d’emploi courant.

34, Pleine.—Moncrif a rendu ainsi, en vers, cette même idée:

«Plus inconstant que l’onde et le nuage,
Le temps s’enfuit; pourquoi le regretter?
Malgré la pente volage
Qui l’oblige à nous quitter,
C’est l’arrêter, d’en faire usage.
Goûtons mille douceurs;
Et si la vie est un passage,
Sur ce passage au moins semons les fleurs.»
696,

1, Condignes.—Absolument mérités. Du latin condignus, même sens que dignus mais plus affirmatif encore.

6, Moy.—Je délibère avec moi-même, je raisonne de mon plaisir; je ne glisse pas dessus, j’approfondis.

9, Sens.—Je ne permets pas à mes sens de s’en emparer exclusivement.

10, Engager.—Var. de 88: enyurer.

23, Propose.—Je me représente...

42, A mesme.—A mesure...

44, Trauailler.—Arrien, De exped. Alex., V, 26.

47, Dire.—Qu’elle puisse ne pas éprouver...

698,

4, Maintenoit.—Diogène Laerce, I, 114.—Epiménide, d’après la légende, recevait des Nymphes une nourriture particulière qu’il conservait dans un pied de bœuf; il ne la prenait que par parcelles et on ne le vit jamais manger. On a dit aussi qu’il avait dormi cinquante ans dans une caverne; ce prétendu sommeil aurait été une absence de quelque durée durant laquelle, errant de côté et d’autre, il était occupé à recueillir des simples.

24, Suyuans.—Je voudrais que les sectateurs d’une telle philosophie n’eussent non plus de droit...

30, Fantastique.—Il n’est pas visionnaire à ce point.

700,

6, Tousiours.—Cet ancien paraît être Simonide qui dit que «les dieux composent toujours avec la nécessité». De son côté, Pittacus a dit aussi: «Les dieux eux-mêmes ne vont pas à l’encontre de la nécessité.» Et Euripide: «Le mortel qui cède à la nécessité est sage et connaît bien les dieux.»

14, Diuina.—Cette proposition de S. Augustin, De Civ. Dei, XIV, 5, vise, pour les condamner, les hérésies des Manichéens (IIIe s.), qui attribuaient la création à deux principes, l’un essentiellement bon, l’autre essentiellement mauvais, et tenaient le corps et la chair comme procédant de ce dernier.

15, Par acquit.—Var. de 88: farcesque.

16, Condition.—Add. de 88: naturelle.

19, Peregrin.—Et comme elle a plus de poids en une langue étrangère, nous insisterons sur ce point, en usant du latin.

29, Capirotade.—On dit aujourd’hui capilotade; au propre, ragoût composé de viande rôtie coupée en morceaux et assaisonnée d’ingrédients divers.

30, Archimedes.—Archimède était au bain quand il découvrit ce principe de physique qui porte son nom: «Tout corps plongé dans un fluide, perd une partie de son poids égale au volume de ce fluide qu’il déplace»; dans sa joie, il en sortit précipitamment et se mit à courir tout nu dans les rues de Syracuse, criant: Εὕρεκα, εὕρεκα! j’ai trouvé, j’ai trouvé! observation qui le mit à même de déterminer la quantité d’alliage introduite en fraude dans une couronne qu’Hiéron avait commandée en or pur. Ses distractions, en une autre circonstance, lui furent plus fatales: les Romains qui assiégeaient Syracuse dont son génie inventif contribuait à prolonger la résistance qui durait déjà depuis trois ans, ayant enfin pénétré par surprise dans la ville, Archimède, tout occupé de la solution d’un problème, ne s’en aperçut pas, et tardant à répondre à un soldat qui lui enjoignait de le suivre, celui-ci le tua, bien que l’ordre eût été donné de l’épargner (212).

31, Marmaille.—Var. de 88: voirie.

32, Diuertissent.—Et de pensées qui nous détournent de notre salut.

702,

2, S’attendre.—Dédaignent de prêter leur attention... (du latin attendere); ou de s’appliquer, comme porte l’éd. de 1635 de Mlle de Gournay.

4, Priuilege.—Add. de l’éd. de 88: Nos estudes sont tous mondains; et entre les mondains, les plus naturels sont les plus iustes.

6, Sousterraines.—Corrompues, infernales.

6, Esope.—Planude, Vie d’Esope.

18, De nos.—Var. de 88: des humaines.

21, Immortalisation.—Ou plutôt sa déification, comme porte l’éd. de 88.

23, Hammon.—Quinte-Curce, VI, 9.—Jupiter Ammon avait au milieu des sables de la Libye, près de l’oasis de Syouah, à 500 kil. du Caire, un temple dont les oracles étaient réputés. Alexandre le Grand le visita en 332, après la conquête de l’Égypte; pour l’atteindre il marcha quatre jours en plein désert; à son arrivée, les prêtres le saluèrent fils de Jupiter et lui assurèrent qu’il serait invincible jusqu’au moment où il viendrait prendre sa place parmi les dieux; et, à une question de ceux qui l’accompagnaient, l’oracle répondit qu’il serait agréable à Jupiter qu’ils rendissent les honneurs divins à leur roi. Peut-être est-ce à cela, et aussi à ce qu’il avait pu remarquer du culte grandiose dont les Égyptiens, plus que pas un autre peuple, entouraient les restes de leurs rois, qu’Alexandre voulut reposer dans le temple d’Ammon. Ptolémée Philadelphe, en conséquence de ses dernières volontés, fit transporter son corps à Memphis, d’où Ptolémée Soter le transféra à Alexandrie où il fut placé dans un cercueil d’or. Ce cercueil ayant été volé, fut remplacé par un cercueil de verre; c’est là que le virent Jules César, puis Auguste qui lui mit une couronne d’or sur la tête et le couvrit de fleurs. L’empereur Septime Sevère défendit qu’on le montrât, et depuis on ne sait ce qu’il est devenu; S. Jean Chrysostome, à la fin du IVe siècle, en parle comme ignoré de tout le monde, autrement dit comme n’existant plus.

28, Ville.—Plutarque, Pompée, 7.—En 66, alors qu’il se rendait en Asie, pour y continuer la guerre contre Mithridate. Pompée, qui n’avait alors que vingt-neuf ans, avait déjà reçu le surnom de Grand que lui avait décerné Sylla; il avait guerroyé en Italie, dans les Gaules, en Sicile, en Espagne contre Sertorius, contre les pirates, toujours avec un égal succès, et entre temps avait obtenu le consulat.

704,

6, Extrauagance.—Cette phrase clôt et résume la morale de Montaigne; morale qui n’est pas sans doute assez parfaite pour des chrétiens, mais qu’il serait à souhaiter voir servir de guide à tous ceux qui n’ont pas le bonheur de l’être. Elle formera toujours un bon citoyen et un honnête homme. Elle n’est pas fondée sur l’abnégation, mais elle a pour premier principe la bienveillance envers les autres, sans distinction de pays, de mœurs, de croyances religieuses. Elle nous instruit à aimer le gouvernement sous lequel nous vivons, à respecter les lois auxquelles nous sommes soumis, sans mépriser le gouvernement et les lois des autres nations, nous avertissant de ne pas croire que nous ayons seuls le dépôt de la justice et de la vérité. Elle n’est pas héroïque, mais elle n’a rien de faible; souvent même elle agrandit, elle transporte notre âme par la peinture des fortes vertus de l’antiquité, par le mépris des choses mortelles et l’enthousiasme des grandes vérités; mais bientôt, elle nous ramène à la simplicité de la vie commune, nous y fixe par un nouvel attrait et semble ne nous avoir élevés si haut dans ses théories sublimes, que pour nous réduire avec plus d’avantage à la facile pratique des devoirs habituels et des vertus ordinaires.  Villemain.

7, Tendrement.—Plus doucement, plus délicatement, comme porte l’édition de 1588.

10, Latoe.—Apollon, fils de Latone.

11, Mente.—Juvénal résume de même ce que l’homme vraiment sage demande au ciel: La santé de l’âme unie à celle du corps. Orandum est ut sit mens sana in corpore sano.

12, Carentem.—Horace, Od., I, 31, 17.—Il est impossible de n’être pas frappé de l’espèce de contradiction que présentent la fin tant soit peu épicurienne (dans le bon sens du mot) des Essais et la mort si dévotieuse de leur auteur (V. supra, fasc. A, p. XI).—On peut dire que le souhait emprunté à Horace par lequel Montaigne termine son livre, est le dernier soupir du lettré; c’est le reflet mourant de l’enthousiasme de l’antiquité, c’est la fin de la vie écrite. Dans la vie vécue, au contraire, le Montaigne de l’apologie de Sebond reparaît, et, au point de vue religieux, il est peu de morts plus démonstratives que celle-là. Dr Payen.—Fidèle à ses principes, il finit comme Socrate «en se conformant aux façons et formes reçues autour de lui»; sa dernière pensée fut un dernier hommage à la religion de ses pères. Abbé Jay.—Et de fait, à tous points de vue, on peut dans l’ensemble lui faire application de ce vers de La Fontaine:

«Rien ne trouble sa fin, c’est le soir d’un beau jour.»

FASCICULE G

GLOSSAIRE
ET
NOTE SUR LA LANGUE DE MONTAIGNE


NOTE SUR LA LANGUE DE MONTAIGNE


Le XVIe siècle fut pour la langue française, comme pour toutes choses, une époque de transition, chacun écrivait un peu à sa fantaisie; Montaigne a fait de même.

Style.—Son style est bref, concis et mouvementé. Il écrit comme il parle, en quoi il fut un précurseur. Ce qui aussi lui est propre, c’est le choix des expressions, si souvent imaginées; ce sont les locutions et mots qu’il emploie, tirés de l’ancienne langue romane, des patois de l’époque ou forgés par lui, toujours si parfaitement adaptés à l’idée qu’il veut rendre; et aussi ses tournures de phrase, qui tiennent beaucoup du latin, langue dans laquelle il avait été élevé. Mais si, à l’instar des meilleurs écrivains de l’antiquité, l’idée principale est toujours chez lui exactement suivie et nettement exprimée, quand des additions ultérieures ne sont pas encore intervenues, il ne pratique pas les longues périodes comme les maîtres de cette époque et leurs imitateurs; ses arguments sont présentés avec simplicité, ses déductions sont aisées, la phrase est courte et n’est pas surchargée de propositions incidentes.

Montaigne observe généralement, dans le détail, les règles grammaticales assez flottantes de son temps, tout en s’en écartant fréquemment au caprice de sa plume. Les principales particularités qui à cet égard, et sans rien avoir d’absolu, se présentent tant du fait de leur auteur que des errements qui alors avaient cours, et indépendamment des fautes d’impression, sont les suivantes:

Syntaxe.—Les inversions sont fréquentes: Ainsi faisoient aucuns chirurgiens... les operations de leur art;—Bon est-il tousiours de les ouïr;—Mais ceci sçais-ie par experience.

Les pléonasmes également; surtout par le fait d’idées, de membres de phrase jointifs, ayant une signification identique, mais parfois aussi par la répétition de mots (noms ou adjectifs) ayant même sens; ces derniers sont notablement en moins grand nombre dans l’éd. de 95 que dans celles qui l’ont précédée: Ie cherche à conniller et à me desrober de ce passage;—S’il arriuoit que mes humeurs pleussent et accordassent à quelque honneste homme;—Estranges et inouys;—forcée et tendue;—esbaudi et resioui.

Des noms, aujourd’hui masculins, sont féminins, et réciproquement: Vn dot, vne poison.—D’autres sont des deux genres: vn art ou vne art.

Des infinitifs sont employés comme substantifs: le bien dire.

Des verbes sont mis au singulier, alors qu’ils ont plusieurs sujets, quand ces sujets sont au singulier: La touche d’vn bon mariage et sa vraie preuue regarde le temps.

Certains verbes intransitifs aujourd’hui sont employés transitivement et inversement: Ressembler son pere;—L’vn plainct la compagnie de sa femme.

D’autres, alors réfléchis, n’ont plus cette forme et réciproquement: Se trauailler;—Nous repentons.

Les compléments indirects sont souvent unis au verbe par des prépositions autres que celles que nous emploierions: Se fier de quelque chose;—Ne craindre point à mourir;—Si en l’aage que ie l’ai connu.

Association de compléments construits différemment: plongé en l’oisiueté et aux delices;—Labienus ne peut souffrir cette perte ny de suruiure à.

Adjectifs employés adverbialement: mieux sçauant.

L’article souvent supprimé: Autant que fortune leur dure;—Comme bestes furieuses.

De même la préposition de: Rien trop.

Faire employé pour éviter la répétition d’un verbe précédent: Ie n’en cognoissois pas seulement le nom, ny ne fais encore le corps.

Aller employé comme auxiliaire, auquel cas le verbe qui suit est au participe présent: Ceux qui nous vont instruisant.

Ils, vous, remplaçant le pronom indéfini on: Ils disent à ceux auec qui vous estes.

On s’écrivant fréquemment l’on, lon: l’on m’aprint;—à l’aduenture les estime lon.

Aucun, nul, ayant le sens affirmatif chaque fois qu’une négation ne les accompagne pas: Aucuns me conuient d’escrire;—Exemple aussi remarquable que nul des precedents.

Dans l’emploi de ne... pas, l’un de ces deux mots est souvent omis: Affin que ie ne parle de luy;—Est-ce pas faire vne muraille sans pierre.

Ainsin mis pour ainsi devant un mot commençant par une voyelle: ainsin il aduint;—en pareil cas on trouve également ains: ains instruire.

L’affixe privatif in ou im est employé avec nombre de mots qui ne le comportent plus aujourd’hui: ineloquent; impremeditement (sans préméditation).

Orthographe.—La différence d’orthographe entre l’édition de 1588 et celle de l’ex. de Bordeaux d’une part, et l’orthographe de l’édition de 1595 de l’autre, est très sensible, surtout dans les additions de cette dernière qui se rapproche beaucoup plus de l’orthographe actuelle; elle se ressent très manifestement de la surveillance exercée par Mlle de Gournay sur l’impression de cette édition. Néanmoins, dans celle-ci, comme dans les précédentes, les fautes indéniables d’impression sont fort nombreuses; dans cette catégorie, nous rangeons entre autres les mots qui dans une même page se rencontrent avec des orthographes différentes, tels que enfants et enfans (III, 664, 1 et 9), plustot et plustost (III, 670, 12 et 15), et ils sont légion.

Certains mots que nous écrivons en deux ou plusieurs mots, avec ou sans trait d’union, s’écrivent en un seul et réciproquement: Dequoy, trestout, par ce que, bon-heur, bon heur.—Très marque du superlatif faisant indifféremment corps ou non, et dans ce dernier cas presque toujours uni à lui par un trait d’union, avec l’adjectif ou adverbe auquel il se rapporte: Tres-desagreable, tresdesagreable ou tres desagreable; tres-aduantageusement, tresaduantageusement ou tres aduantageusement.

Le même mot, souvent à peu d’intervalle, s’écrit de diverses façons: Dit, dy, dict, deit, dist;—conte, comte, compte;—rang, reng, ranc.

Lettres u et v employées l’une pour l’autre: v si la lettre est majuscule ou initiale d’un mot, u si elle est à l’intérieur: AV LECTEVR;—vn lieure.

Substitution de lettres et de diphtongues les unes aux autres: a pour e, et réciproquement: accidant, harengue;—c pour ch, pour q, pour s, cercher, donq, defence;—e pour ai: fresche;—f pour ph, orthografe;—g pour j, magesté;—i pour j, et réciproquement; lorsque deux i se suivent, le dernier se transforme alors en j: ie, Dij;—i pour é: cerimonie;—o pour ou: formi;—t pour c: antien;—s pour x: pris;—u pour o, pour eu et ou, et réciproquement: vmbre, rigur, concurre, receu;—y pour i, surtout à la fin des mots: yure, moy, luy;—ai mis pour a: Montaigne, compaignie;—eu pour u: seureté;—ie pour e: legier;—oi et oy pour ai: François, i’estois, i’estoys;—ou pour eu: treuue;—ui pour i: vuide, etc.

S, x, z employés indifféremment comme marque du pluriel: nos, noz; lois, loix.

Addition de lettres parasites provenant d’étymologie vraie ou fausse: b: fiebure;—c: plainct;—d: aduenture;—f: vifue;—g: cognoistre;—h: autheur;—l: tiltre;—n: besongne;—p: nopces;—s: mesme;—u: guain, etc.

Suppression du T final au pluriel de certains noms: enfans, mas, precedens.

Suppression du t euphonique: sera-il, y a il, pour «sera-t-il», «y a-t-il»; son remplacement parfois par l’ ou l: fera-l’on ou fera lon, pour «fera-t-on.»

Suppression fréquente de lettres doubles: home, feme, hale, frape, batre, etc.

Etc., etc.

Il est à observer que ces modifications n’ont aucune influence sur la prononciation qui, pour la plupart des mots, est celle de nos jours.

Accents.—L’accent circonflexe n’existe pas: ame, pastre.

L’accent grave ne se trouve que sur l’à préposition, ou sur adverbe: à moy, où est-il.

L’accent aigu ne se met que sur l’é des syllabes finales où il n’est pas muet: aimé, aimée, capacité, dés (dès que), és; même dans ce cas (aux, dans les) on l’omet d’ordinaire lorsque la syllabe se termine par s, x ou z: authorité, authoritez.

Il est fait assez fréquemment usage du tréma sur l’é et sur l’u: poëte, deuë, loüange, roüage.

Ponctuation.—Les phrases sont courtes, trop parfois au préjudice du sens qui gagnerait à plus de liaison; le point et virgule est fréquent, mais presque toujours remplacé par deux points; les virgules sont prodiguées outre mesure, surtout dans l’édition de 1595; et ce sur la recommandation expresse de l’auteur qui, pour son propre compte, s’en abstient d’ordinaire quand c’est lui-même qui écrit.

Dans le principe, Montaigne s’en était remis complètement à ses imprimeurs de ces détails d’orthographe et de ponctuation, en lesquels lui-même se reconnaît «peu expert en l’vn et en l’autre» (III, 412). Vers la fin, uniquement occupé à parfaire son livre, il y prête davantage attention, d’où cette note écrite de sa main au verso du titre de l’exemplaire de Bordeaux en vue de la réimpression de l’ouvrage, note qui résume sa manière de voir en la matière, et donne un spécimen intéressant de sa propre orthographe:

Montre montrer remontrer etc. escriues les sans (s) a la differance de monstre monstrueus

cest home ceste fame escriues le sans (s) a la differance de c’est c’estoit

ainsi mettes le sans (n) quand une voyelle suit et aueq (n) si c’est vne consonante ainsi marcha ainsin alla (Montaigne dit le contraire de ce qu’il veut dire, mais les deux exemples qu’il donne l’indiquent sans erreur possible).

campaigne espaigne gascouigne etc. mettez vn (i) dauant le (g) come a montaigne non pas sans (i) campagne espagne

ne mettez en grande lettre que les noms propres ou au moins ne diuersifies pas come en cet examplere que vn mesme mot soit tantost en grande lettre tantost en petite

la prose latine grecque ou autre estrangiere il la faut mettre parmi la prose françoise en caractere differant les vers a part et les placer selon leur nature pentamettres saphiques les demi vers les comancemans au bout de la ligne la fin sur la fin en cet examplere il y a mille fautes en tout cela

Mettes regles regler non pas reigles reigler.

Suiues lorthografe antiene

outre les corrections qui sont en cet examplaire il y a infinies autres a faire de quoi limprimeur se pourra auiser, mais regarder de pres aus poincts qui sont en ce stile de grande importance

sil treuue vne mesme chose en mesme sens deus fois qu’il en oste l’vne ou il verra qu’elle sert le moins

c’est vn langage coupé qu’il n’y espargne les poincts et lettres maiuscules. Moi mesme ai failli souuant a les oster et a mettre des comma (deux points) ou il faloit vn poinct.

qu’il voie en plusieurs lieus ou il y a des parantheses s’il ne suffira de distinguer le sens aueq des poincts.

quil mette tout au long les dates et sans chiffre.


Nota.—Les mots du Glossaire en italique égyptienne sont ceux des Essais; ils sont écrits tels qu’on les y trouve, par suite: l’I est toujours substitué au J et l’U et le V le sont l’un à l’autre, U s’employant dans le corps des mots, et V au commencement. En outre les accents sur les e font défaut, sauf dans les syllabes finales dont l’e n’est pas muet.


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