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Dans l'ombre chaude de l'Islam

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SOUVENIRS D’ELOUED

Eloued : une ville toute arabe, bâtie sur le versant d’une haute dune de sable, avec des maisons toutes de plâtre maçonné par les Souafa (habitants du Souf). La ville en prend un aspect oriental d’une blancheur idéale.

Les constructions françaises s’y distinguent très nettement : le bureau arabe, la caserne, la poste, l’école, la douane.

Il y a deux caïdats à Eloued : celui des Achèche et celui des Messaaba.

Les constructions musulmanes importantes sont la mahakma du cadi, les mosquées Azèzla, Ouled-Khalifa, Messaaba-Gharby, Sidi Selem, Ouled-Ahmed et la mosquée de la zaouïya de Sidi Abd-el-Kader.

Les rues d’Eloued sont tortueuses et aucune d’entre elles n’est pavée. Le marché est une grande place avec deux bâtiments à voûtes et coupoles, l’un pour les grains, l’autre pour la viande.

Sur le marché d’Eloued on voit des Souafa de toutes les tribus, des Chaamba, et même des Touareg et des Soudanais.

Le vendredi, se tient le marché d’Eloued, et, dès le jeudi soir, les routes environnantes s’emplissent de chameaux, d’ânes et de piétons.

Les principales routes sont au nord, celle du Djerid tunisien par Behima et Debila ; au nord-ouest, celle de Biskra par Guémar ; à l’ouest, celle de Touggourth par Kouïnine et celle de Touggourth par Taïbeth-Guéblia, d’où part également la route d’Ouargla par le désert ; au sud, il y a la route de Berressof et de Ghadamès par Amiche, et, à l’est, celle de Tunisie par le village de Tréfaoui.

Eloued est environnée de nombreux villages, qui constituent le pays appelé Oued-Souf.


J’ai vécu des mois dans ce pays. J’y suis venue deux fois en plein été, j’y ai passé l’hiver et j’ai failli y mourir. Blessée d’un coup de sabre au village de Behima, j’y restai quelque temps, soignée à l’hôpital militaire… Je puis en parler.

Tout d’abord Eloued me fut une révélation de beauté visuelle et de mystère profond, la prise de possession de mon être errant et inquiet par un aspect de la terre que je n’avais pas soupçonné. Je n’y séjournai que peu de temps, mais j’y revins l’année suivante, à la même époque, invinciblement attirée par le souvenir.

Il est, je crois, des heures prédestinées, des instants très mystérieusement privilégiés, où certaines contrées, certains sites, nous révèlent leur âme en une intuition subite, où nous en concevons soudain la vision juste, unique, ineffaçable.

Ainsi, ma première vision d’Eloued me fut une révélation complète, définitive, de ce pays âpre et splendide qu’est le Souf, de sa beauté étrange et de son immense tristesse aussi. — C’était en août 1899, par une chaude soirée calme…

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