Keetje Trottin
J’étais là depuis quelques jours. Une petite cousine était venue jouer avec les fillettes. Je monte à l’entresol et ne trouve personne. Mais l’autre alcôve était ouverte. J’y regarde et je vois la petite Betsy et sa cousine, assises à terre, entourées de poupées. Comment ont-elles tant de poupées ? et je ne les avais pas encore vues… Il y en avait d’énormes, assises dans de petits fauteuils, vêtues comme des dames ; d’autres couchées tout habillées dans des voiturettes, et encore des petites, déshabillées, dans des boîtes sous verre, avec leurs vêtements pliés dans des casiers. A terre, il y en avait à tête de bois, de caoutchouc, de porcelaine, sur des corps de coton rose remplis de son ; d’autres en chemise, jetées dans des coins, avec une grande chevelure brune, les yeux à demi-fermés.
Le bébé se réveilla. Je le pris hors de sa berce, j’enjambai l’alcôve et, assise par terre, le bébé entre mes jambes, à qui je donnai une poupée de caoutchouc, je déshabillai plusieurs poupées, que je passais aux petites pour les rhabiller. Puis je commençai à attifer une grande poupée.
J’étais si absorbée que je n’entendis pas entrer Monsieur et Madame. Quand je les vis, je lâchai la poupée.
— Du moment que les enfants s’amusent, tu peux t’amuser aussi, Keetje, dit Madame… Quel dommage ! ajouta-t-elle.
— Oui, quel dommage ! fit Monsieur.
Depuis ce jour, ce fut mon grand truc, pour tenir les enfants tranquilles, de m’asseoir avec eux dans l’alcôve aux poupées, d’en dévêtir une demi-douzaine et de les leur donner à rhabiller. Alors je pouvais, à mon aise, parer de costumes différents une grande poupée qui était ma favorite…