Poésies de Daniel Lesueur
ÉCHOS D'AMOUR
Qu'importe au prisonnier la splendeur d'un beau jour?
Quel bien pourrait remplir mon âme inassouvie
Si je n'ai pas l'amour?
Si je n'ai votre cœur,—le vôtre, ô ma chère âme!—
Que m'importe la gloire, enivrante liqueur?
Son nectar à ma lèvre est comme une âpre flamme
Si je n'ai votre cœur.
Si je n'ai votre espoir, cher, et votre pensée,
Qu'importent mes travaux, sous la lampe, le soir?
Qu'importent mes efforts et ma lutte insensée
Si je n'ai votre espoir?
Si je n'ai vos bonheurs pour enchanter ma course,
Qu'importe l'aiguillon des désirs suborneurs?
Toute félicité m'est tarie en sa source
Si je n'ai vos bonheurs.
Si je n'ai vos tourments, peu m'importent les larmes
Que versent ici-bas les douloureux amants:
L'ineffable pitié même est pour moi sans charmes
Si je n'ai vos tourments.
Si je n'ai vos fiertés, qu'importe qu'on me blesse?
Qu'importent les dédains par avance acceptés?
Tous les souffles amers courberont ma faiblesse
Si je n'ai vos fiertés.
Si je n'ai vos aveux à répéter en rêve,
Qu'importe que la nuit vienne au gré de mes vœux,
Sous les astres, chanter son doux hymne sans trêve,
Si je n'ai vos aveux?
Si je n'ai votre amour, que m'importe la tombe?
Qu'importent tous mes ans moissonnés sans retour?
Que le sépulcre s'ouvre, ô cher, et que j'y tombe
Si je n'ai votre amour!