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L'illusion libérale

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XXXVI

Il est trop évident que dans l’état présent du monde, le libéralisme catholique n’a aucune valeur ni comme doctrine, ni comme moyen de défense de la religion ; qu’il est aussi incapable d’assurer l’Église dans la paix que de lui procurer le moindre avancement et la moindre gloire. Il n’a été qu’une illusion, il n’est qu’une obstination et une attitude. On peut prédire son destin. Promptement abandonné des intelligences généreuses, auxquelles il doit un certain éclat de sentiment, il ira s’engouffrer dans l’hérésie générale. Puissent les adeptes qu’il y entraînera ne pas se transformer alors en ardents persécuteurs, suivant l’ordinaire inconséquence des faibles têtes qu’envahit le faux esprit de conciliation ! Certains esprits semblent faits pour l’erreur comme certains tempéraments pour la maladie. Tout ce qui passe d’insalubre s’accroche là : ils sont pris au premier vent et au premier sophisme ; ils sont le partage, le butin, la chose des puissances de l’air, et l’on peut les définir comme l’antiquité définit l’esclave, non tam viles quam nulli.

N’entreprenons pas tant de les convaincre, que de leur donner un exemple qui les puisse préserver.

D’accord avec la foi, la raison nous crie de nous réunir et de nous affermir dans l’obéissance. A qui irons-nous ? Libéraux et non libéraux, saisis du trouble affreux de ce temps, nous ne savons tous certainement qu’une chose : c’est que nul homme ne sait rien, excepté l’homme avec qui Dieu est pour toujours, l’homme qui porte la pensée de Dieu.

Il faut se serrer autour du Souverain-Pontife, suivre inébranlablement ses directions inspirées, affirmer avec lui les vérités qui seules sauveront et nos âmes et le monde. Il faut s’abstenir de toute entreprise pour réduire sa parole à notre sens : « Quand le Souverain-Pontife a proclamé une décision pastorale, nul n’a le droit d’y ajouter ou d’en retrancher la moindre voyelle, non addere, non minuere. Ce qu’il affirme, c’est le vrai pour toujours[23]. »

[23] Mgr Berteaud, évêque de Tulle.

Toute autre pratique n’aboutira qu’à nous diviser davantage et qu’à nous dissoudre. C’est là le malheur des malheurs. Les doctrines dites libérales nous ont désagrégés. Avant leur invasion, trop favorisée, hélas ! par un mouvement de mauvaise humeur politique, si peu que nous fussions, nous étions pourtant quelque chose ; nous formions un bloc. Réduisons ce bloc autant qu’on voudra : ce n’était si l’on veut qu’un caillou : ce caillou du moins avait sa consistance et son poids. Le libéralisme l’a délité et mis en poussière. S’il tient plus de place, j’en doute ; l’éparpillement n’est pas l’étendue. Dans tous les cas, cent et mille boisseaux de poussière ne fourniront jamais de quoi charger une fronde. N’aspirons aujourd’hui qu’à un résultat, ne travaillons qu’à l’obtenir : jetons-nous dans l’obéissance ; elle nous rendra la cohésion de la pierre, et sur cette pierre, hanc petram, la vérité posera son pied vainqueur.

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