Le livre commode des adresses de Paris pour 1692, tome 2/2
COMMERCE DE DIVERSES MATIERES
METALLIQUES, ET OUVRAGES DE COUTELLIERS,
TAILLANDIERS, ETC.
Messieurs Hébert cul de sac de la rue Quinquempoix, Presty et Alain rue Neuve saint Mederic, et Coquart rue Simon le Franc, font commerce d’Etain et de Plomb d’Angleterre[1].
[1] L’édit. de 1691, au lieu d’Hébert, nomme Duval. Son magasin y est indiqué « au cloître Saint-Thomas du Louvre ».
Le Fer blanc est négocié en gros par Messieurs le Doux rue Jean de l’Epine, Fontaine rue des Lombards, et Frezan rue de la Vannerie[2].
[2] « Au bout de la rue de la Vannerie. » Édit. précéd., p. 22. Le fer blanc ne se fabriquoit en France que depuis Colbert, qui en avoit établi la première fabrique à Beaumont-la-Ferrière dans le Nivernois. Il avoit dû pour cela faire appel aux ferblantiers allemands. (Correspond. administrat. de Louis XIV, t. III, p. 740.)
Il y a plusieurs magasins de Cuivre et de Leton, rue Quinquempoix.
Les Bateurs d’or qui vendent l’or en feuilles et en coquilles, sont établis en différens quartiers de Paris, par exemple, rue du Cimetiere saint Nicolas des Champs, rue saint Jacques, rue de Gesvres, rue saint Denis, etc.
Les Tireurs d’or qui vendent l’or et l’argent trait et filé, sont pour la plupart rue saint Denis[3] au dessus de saint Jacques de l’Hopital[4].
[3] « Aux environs de la rue Mauconseil. » Édit. de 1691, p. 23.
[4] « Cet or et cet argent tirés, ajoute Liger, p. 394, s’emploient pour les broderies, les galons et les boutons qui se débitent pour les habits. »
Pour l’Or et l’Argent en lingots et grenaille, voyez l’article fait exprès.
Pour le Plomb en balles et en graine, voyez l’article des Armes et Bagages de Guerre et de Chasse.
Le Sieur Guilloüet Taillandier et Ferblantier, à l’entrée de la rue de Gesvres, a un particulier talent pour les plus beaux Ouvrages de Fer blanc et de Leton planez[5].
[5] « Planer, c’est unir la besogne à force de petits coups de marteau ». (Richelet, Dictionn.) — A la suite de l’art. sur le sieur Guillouet, on lit dans l’édit. de 1691, p. 111 : « Le sieur Jo et quelques autres potiers d’étain, près la porte Saint-Marcel, vendent des grandes et petites seringues bien faites et à juste prix. » — La vaisselle d’étain se travailloit avec le plus grand soin. On y étoit parvenu à donner au métal la consistance et le brillant de l’argent. V. Loret, t. II, p. 427-428 ; et Faugère, Voyage de deux Hollandois, à Paris, p. 276.
Pour les Arcs et Ressorts qui sont ouvrages de Taillandier, voyez l’article des Chevaux et Equipages.
Entre les Couteliers renommez pour les Couteaux et les Cizeaux sont le Maitre de l’Eglise rue saint Martin, et le Maitre du Coutelas rue de la Coutelerie, qui a un talent particulier pour les Lames de couteaux de tables qui se montent sur des manches d’argent[6].
[6] Dans l’édition de 1691, p. 59, il n’est recommandé que pour les rasoirs. Le coutelier « du Trèfle », rue de la Coutellerie, qui ne se retrouve plus ici, est indiqué à la même page, comme étant « renommé pour les couteaux ». — Ce trèfle étoit à la fois l’enseigne et la marque de ce coutelier en renom. Nous l’avons vu souvent sur des couteaux des derniers siècles. Toute marque — et chaque coutelier-fabricant avoit la sienne — étoit une propriété qu’aucun autre ne devoit prendre ni contrefaire. (Lettres patentes sur le règlement des ouvrages de quincaillerie et de coutellerie de la ville de Thiers, 24 déc. 1743, art. 2.) Suivant Clicquot-Blervache, Considérat. sur les Compagnies, Sociétés et Maîtrises, p. 165, on offrit jusqu’à 22,000 livres de la marque que Palme, de Thiers, mettoit à ses couteaux : « C’étoit, dit-il, la plus accréditée. »
Entre les Couteliers en réputation pour bien faire et bien repasser les Lancettes, sont les Sieurs Surmont au tiers-point[7] rue saint Julien le Pauvre, et Touyaret au Verre couronné rue de la Coutellerie[8].
[7] Le tiers-point est un outil triangulaire, qui sert surtout aux bourreliers. Louvel, qui l’avoit été, assassina le duc de Berry avec un tiers-point.
[8] Dans l’édition de 1691, p. 59, il est mentionné avec son enseigne, pour la même spécialité des lancettes, mais n’est pas nommé.
L’acier crud est commercé par les Marchands de Fer, et les Instrumens de Moulins pour les Dents, par les Quincailliers, qui vendent d’ailleurs toutes les Marchandises foraines de Coutellerie.
Le Maitre de la Coupe rue Troussevache, est distingué pour les Instrumens de Chirurgie.
On peut par les Messagers de Moulins et de Langres tirer de bons Cizeaux[9] ; et par celuy de Caen, de Couteaux de poche d’une propreté et d’une bonté singulière.
[9] Les couteaux de Langres étoient au moins aussi renommés que ses ciseaux. Les voleurs leur avoient même fait une réputation sinistre : le couteau pour eux étoit un lingre ; et, pour assassiner, ils disoient lingrer. Diderot, on le sait, étoit fils d’un coutelier de Langres.
On fait de très bons Canifs à la Masse et au Pistolet, rue de la Coutellerie[10].
[10] Dans l’édition de 1691, p. 59, c’est « le coutelier de l’Antonnoir (sic), rue aux Ours », qui est recommandé pour les canifs.
Le Sieur le Quin Orfèvre, rue de la Fromagerie[11], fabrique les Instrumens d’argent servant aux Chirurgiens.
[11] C’est le grand-père du tragédien Le Kain, dont le vrai nom n’étoit ni celui qu’il prenoit, ni celui qu’on lui donne ici. Il s’appeloit Caïn. Son acte de naissance, reproduit par Jal, à ce nom, dans son Dictionnaire critique, nous le donne comme né le 3 avril 1729, de Henri Caïn, « marchand orfèvre, rue de la Fromagerie », lequel, ajouterons-nous, avoit succédé à son père dans la même boutique. Pour Caïn, on prononçoit Quin, et même Le Quin, comme on le voit ici. Le nom que prit Lekain, en se mettant au théâtre, fut un compromis entre les deux formes.
Le Sieur Landrieux Gaisnier près le Palais, fait très proprement les Etuis servant aux ouvrages de Coutellerie.