Le livre commode des adresses de Paris pour 1692, tome 2/2
DENTELLES, POINTS, BOUTONS,
ET GALONS D’OR, D’ARGENT ET DE SOYE.
Messieurs Foissin et le Doux rue saint Denis[1], tiennent magasin de Dentelles et de Galons et de Boutons d’or, d’argent et de soye[2].
[1] Dans le curieux pasquil, la Révolte des passements, fait à propos de l’Edit somptuaire du 27 novembre 1660, et que nous avons publié, dans nos Variétés, t. I, p. 223, les Révoltés se rassemblent rue Saint-Denis, au Vase d’or.
[2] Ces boutons de soie et d’autres étoffes, qui se substituoient aux boutons d’argent ou d’or, amenèrent une grosse querelle entre les boutonniers et les rubaniers. A Lyon, cinq cents des premiers adressèrent des plaintes à l’intendant, le 26 avril 1695, contre les seconds « qui font, disoient-ils, des boutons avec des rubans d’étoffe d’or, d’argent et soie ». (Correspondance des Contrôleurs généraux, publiée par M. de Boislisle, t. I, no 1426.) On leur donna raison. V. la Correspondance administrative de Louis XIV, à la même date, t. III.
Les Marchands en boutique qui font commerce de Points, Dentelles et Galons d’or et d’argent, sont pour la plûpart rue saint Honoré, depuis la Croix du Tiroir jusqu’à la rue de la Feronnerie[3].
[3] L’édit. de 1691, p. 25, diffère un peu : « les dentelles et galanz d’or se vendent rue des Bourdonnois et rue Saint-Honoré, entre la place aux Chats et les piliers des Halles. » La place aux Chats fut remplacée par le cul-de-sac des Bourdonnois, qui existe encore.
Messieurs Boucher rue des Bourdonnois, et M. Payot devant l’Hotel de la Monnoye[4], en ont un grand assortiment.
[4] Il étoit alors dans la rue qui en a gardé le nom de rue de la Monnoie.
Les Dentelles, Guipures[5] et Galons de soye, se vendent principalement sur le petit Pont[6] et rue au Fevre, où l’on vend aussi des Galons de livrées.
[5] Ces guipures, qu’il ne faut pas confondre avec celles d’aujourd’hui qui ne sont que d’anciens passements de fil, étoient une sorte de dentelle de soie qui venoit de Flandre ou d’Angleterre, comme on le voit par le tarif du 18 avril 1667. Il en est parlé dans l’École des maris, acte II, sc. 7.
[6] La boutique des trois Croissants étoit la principale de celles des galons d’or et d’argent, « vendus à Petit-Pont », comme on disoit. Auprès étoient de gros marchands d’étoffes, à la Croix d’or, au Bras d’or, à la Tête d’Or, au Saint-Esprit, à l’Annonciation, à l’Enfant Jésus, aux deux Anges. Toutes ces maisons furent brûlées à l’incendie du Petit-Pont en 1718. V. le Mercure, avril 1718, p. 208-209.
Le Sieur Guidot rue des Filles Dieu qui travaille aux Galons d’or et d’argent, entreprend des fournitures et les passe à un mediocre gain[7].
[7] Il le pouvoit d’autant mieux que les ouvriers rubaniers et passementiers, presque tous logés dans le misérable quartier du faubourg Saint-Marceau, étoient de pauvres gens qu’on faisoit travailler pour presque rien. La Reynie lui-même avoit conscience de les mettre à la taxe : « Il n’a été, écrivoit-il à Colbert, le 2 août 1675, signifié aucune taxe à aucun artisan de Paris. J’ai même pris soin, suivant vos ordres, de faire entendre et il y a longtemps, à cette communauté de rubaniers, qui est très-nombreuse et très-pauvre, qu’elle n’avoit qu’à continuer de vivre, comme elle avoit accoutumé. » Cette lettre étoit motivée par un horrible événement : un de ces rubaniers avoit tué quatre de ses enfants, et l’on disoit qu’il y avoit été poussé par les poursuites des collecteurs d’impôts. V., à ce sujet, la Lettre de Mme de Sévigné, du 31 juillet 1675.
Entre les autres Ouvriers de Galons d’or et d’argent qui font beaucoup travailler, sont les Sieurs Mouzé rue de la Truanderie, Anduroy[8] rue Tictonne, Pelletier rue saint Denis près le grand Cerf[9], Merlier père et Merlier fils même rue près la fontaine du Ponceau, etc.
[8] Il faut lire Auduroy, nom qui fut longtemps en crédit dans le commerce de Paris et d’Orléans.
[9] C’étoit une grande hôtellerie dont il sera reparlé, sur l’emplacement de laquelle a été percé le passage du même nom.