← Retour

Le livre commode des adresses de Paris pour 1692, tome 2/2

16px
100%

LISTE GÉNÉRALE
DU
BUREAU D’ADRESSE ET D’AVIS

PAR PRIVILÈGE DU ROY.
Du 7 Aoust 1688[403].

[403] V. Introduction, p. xlj.

L’on continüera à l’avenir de faire imprimer notre Liste d’avis tous les quinze jours, afin que le public puisse avoir le temps de se reconnoistre.

On ne remet sur cette liste que quelques uns des articles qui estoient sur la précédente, et dont le droit a esté payé.

Les domestiques de l’un et l’autre sexe viennent continuellement au Bureau, où l’on les examine avec beaucoup d’exactitude, aussi bien que leurs repondans, pour les pouvoir produire en seureté à ceux qui en viennent demander.

A vendre.

1. Une tres belle maison scize rue de la Verrerie, proche S. Mery, louée à présent à une seule personne 1800 liv.

2. Une maison à porte cochère très bien bastie, scize à Soisy sous Etiole[404], six lieues de Paris, proche la rivière de Seine, grand Jardin clos de murs[405], vignes, et autres choses dont on fournira un estat au Bureau, du prix de 10,000 liv.

[404] C’est aujourd’hui une commune d’un millier d’habitants dans le canton de Corbeil.

[405] C’étoit un point très important alors, car ne faisoit pas qui vouloit enclore de murs parc ou jardin ; on en a la preuve par les registres du Parlement, où l’on trouve par exemple, à la date du 30 mai 1663, confirmation des lettres portant permission à Le Tellier de faire enclore six cents arpents de terre en son parc de Chaville.

3. Un cheval entier avec tous ses crains, poil bay, de bonne taille, âgé de six ans, fort vigoureux, propre pour la selle et pour le manege, du prix de quarante loüis d’or[406], avec douze jeunes chiens courants blanc et noir entre deux tailles, bons pour le chevreuil et lièvre, du prix de vingt quatre loüis d’or.

[406] Ces chevaux de selle et de manège, toujours bien supérieurs comme prix aux chevaux de labour, se vendoient quelquefois jusqu’à quinze cents livres. V., dans les Mémoires des Intendants, celui de la Généralité de Limoges, au chapitre des Haras.

4. Une chaise roulante à ressorts à deux places pour un cheval, garnie de drap gris, et d’une campanne soye[407], l’imperialle ronde[408], avec les harnois de deux chevaux, du prix de 120 liv.

[407] La campane étoit un ornement à franges, dont la forme étoit celle d’une cloche (campana).

[408] L’impériale, lorsqu’elle étoit ronde comme ici, faisoit sur le dessus des carrosses et chaises l’effet d’une couronne d’empereur. De là son nom, encore aujourd’hui en usage.

5. Pour 60,000 liv. de rente sur l’Hôtel de Ville, en plusieurs contracts créés au denier dix huit[409], et qu’on veut vendre au denier vingt ; l’argent sera employé en acquisition de fonds, dont on fournira un estat à la charge du decret.

[409] C’est-à-dire un denier d’intérêt pour dix-huit prêtés, ce qui équivaut à un peu moins de six pour cent, comme le denier vingt à cinq pour cent environ.

6. Une maison à porte cochère scize à Gentilly, très belle et bien bastie, où il y a toutes sortes de commoditez, avec un grand jardin clos de murs, garny d’arbres fruitiers, du prix d’environ 7,000 liv. Il y a seureté pour l’acquisition ; on s’accommodera du prix pourvu qu’il y en ait la moitié ou le tiers comptant : on aura au Bureau un estat plus au long de la dite maison.

7. Un lit de bois noyer de six pieds de large, garny d’un somier de paille, matelat, lit de plume et courte pointe serge de S. Lau[410], couleur d’ecarlatte, avec sa housse mesme serge et couleur, du prix de 120 liv. Quinze petites chaises pour la table couvertes de mocades[411] à fleurs de plusieurs couleurs à fond vert de 3 liv. pièce. Une grande aumoire[412] bois sapin à deux portes fermant à clef, servant de garde-meuble, du prix de 40 liv. et une chaise bourgeoise à porteur, garnie d’une étoffe de soye de 30 liv. Le tout bon et de hasard, et qu’on vendra ensemble ou séparément.

[410] Lisez Saint-Lô, dont la fabrication de la serge est encore une des industries.

[411] C’est une forme du mot « moquette », qui se rapprochoit davantage de camocas, nom de l’étoffe bien connue au moyen âge, dont la moquette ou mocade étoit une imitation plus moderne. V. plus haut, p. 315.

[412] Le peuple, qui dit « ormoire » pour armoire, se rapproche par sa prononciation de la forme du mot, telle qu’elle est ici, et en même temps de la racine latine, aumarium, lieu secret, cachette, suivant le sens que ce mot a dans Pétrone (édit. Burmann, p. 868). Aumoire ne fut remplacé que fort tard par armoire. Il se trouve dans le Roman du Renard, vers 3 et 259, et, comme on le voit ici, il étoit encore usuel au XVIIe siècle. L’annotateur du Catalogue Soleinne, t. I, p. 227, le rencontrant dans une pièce du même temps, Le Murmure des femmes, croit par erreur qu’il vient d’aumusse. — Ajoutons qu’« armoire » toutefois s’employoit déjà. On le trouve dans le Journal de Fr. Colletet, 3 sept. 1676, avec des détails sur ce genre de meuble, tel qu’on le travailloit de son temps : « On sçait, dit-il, une belle paire d’armoires à vendre, toute neuve, et fort bien travaillée à deux grands guichets brisez, pour serrer des habits, du linge ou d’autres hardes : Elle est de ces beaux bois ondoyez, et faite par un bon ouvrier : et elle pourroit estre commode même pour serrer des livres curieux et particuliers dans une Bibliothèque. »

8. Une très belle maison à porte cochere bien bastie, située au Plessis-Chenet, paroisse du Coudray[413], sept lieues de Paris, proche la rivière de Seine, avec jardin, clos de vingt quatre arpens, où il y a pré, terre, vigne, bois taillis et d’haute fustaye, et plusieurs autres belles commoditez, du prix de 12,000 liv. On aura au Bureau un estat au long de la dite maison.

[413] Le Plessis-Chenet est aujourd’hui un écart de la petite commune du Coudray-Monceaux, dans le canton de Corbeil.

9. Une charge de somier de vaicelle[414] ordinaire de chanssonnerie[415] chez Madame la Dauphine à franc estrillé[416], qui jouit de tous les privilèges aux gages fixes de 300 liv. par an[417], payez par quartier, avec logement et bouche à cour[418] du prix de 4,000 livres.

[414] Le sommier de vaisselle avoit pour office le transport sur un cheval de somme ou sommier de la vaisselle dont avoit besoin la maison du roi, ou celles des princes et princesses quand elles se déplaçoient.

[415] Lisez « échançonnerie ».

[416] C’est-à-dire, affranchi de la nécessité de fournir le cheval, le sommier.

[417] C’était le double chez le roi. Le sommier de vaisselle touchoit 600 l. Il en avoit même eu longtemps 660, comme le sommier de bouteilles.

[418] C’est-à-dire, nourri à la Cour.

10. Deux grands chevaux de carrosse poil noir, du prix de 300 liv.

11. Une charge de peintre à la garde robbe du Roy[419], qui jouit de tous les privilèges, aux gages de 60 liv. par an, du prix de 1,000 liv.

[419] Nous n’avons pas trouvé mention de cette charge, dont l’exiguïté des appointements dit le peu d’importance, dans les États de France de cette époque.

12. Une maison à porte cochere scize à Argenteuil, proche la rivière, en deux corps de logis, avec cour, puis, et jardin d’un arpent clos de murs, du prix de 4,000 liv. On donnera au Bureau un estat au long de la dite maison.

13. Une maison à porte cochère en cette ville, au quartier S. André des Arcs, en trois corps de logis, grande basse cour, remise de carrosses, et autres commoditez, du prix d’environ 40,000 liv., louée à présent 1,800 liv.

14. Une tapisserie de verdure de Flandres, en sept pièces, de dix huit aulnes trois quarts de tour, doublée tant plain que vuide, sur deux aulnes deux tiers de haut, avec six soubassemens de fenestre mesme tapisserie ; un lit de six pieds de long, sa housse de tabis[420] vert, garni d’un somier de paille, matelat, lit de plume, couverture d’Angleterre, huit fauteuils, et quatre chaises avec leurs housses, moitié mesme tabit, moitié d’une tapisserie à l’éguille couleur de roze, une fontaine de cuivre, et une garniture de feu fort poly, le tout du prix d’environ 800 liv. A vendre séparément ou ensemble.

[420] C’étoit ce que nous appelons « moire » aujourd’hui. Nous l’avions emprunté aux Orientaux qui le nomment ôtabé et le mélangent de coton.

15. Une tapisserie de verdure de Flandre, neuve en six pièces, de dix-huit aulnes et demy de tour, sur deux aulnes, deux tiers de hault, du prix de 900 liv.

16. La Terre et Seigneurie de la Vallée, située dans la province du Berry, à dix lieues de Bourges et sept de Gien, entre Cosne et Sanserre[421], à deux lieues de la rivière de Loire, le revenu de la dite terre consistant en droits seigneuriaux, terrage, rentes, tuillerie, estangs, garennes, six fermes, et plusieurs autres héritages dépendant de la dite Terre, du prix de 80,000 liv. Le revenu estant de 4,000 liv. à le faire valoir par ses mains, et de 3,000 liv. de bail à ferme. On fournira au Bureau un estat au long d’icelle.

[421] La Vallée est aujourd’hui une petite commune du canton de Lormes dans la Nièvre.

17. Une maison a porte cochere, scize à Cormeil, trois lieues de Paris, en deux corps de logis, cour, puits, et jardin derrière ; attenant lequel il y a une grange à foin ; le tout du prix de 4,000 liv. On donnera au Bureau un estat au long de la dite maison.

18. Cinq cens arpens de bois taillis, d’environ dix ans de coupe, scituez à une lieue du port de Nogent sur Seine, en deux coupes égales ; l’on affermera le tout, ou une seule coupe, à commencer au mois d’octobre prochain ; ou si on veut en achepter le produit tous les ans, on le vendra, et du tout on fera bonne composition.

19. Une charge d’ayde de Panneterie chez le Roy[422], qui jouit de tous les privilèges aux gages fixes de 225 liv.[423] et 150 liv. de profits, le tout payez reglement à la fin du quartier de Juillet pendant lequel on sert[424] et est nourry, pour 5,000 liv.

[422] Il y avoit chez le roi douze de ces aides dans la panneterie-commun.

[423] Ces gages avoient été longtemps de 300 livres.

[424] Il seroit plus clair de dire que celui qui veut ici vendre sa charge servoit pendant le quartier de juillet.

20. Une charge de garde du Roy en la prevosté de l’hostel[425], sous la charge de Monsieur le Marquis de Sourches, grand prevost de France[426], qui jouit de tous les privileges, aux gages de 272 liv. 10 sols[427], à servir pendant le quartier de Janvier, du prix de 3,050 liv.

[425] Ces gardes étoient au nombre de cent, y compris les douze qui portoient le titre d’exempts.

[426] V. sur lui, t. I, p. 74.

[427] « Ils ont, dit l’État de France, 1692, in-12, p. 444, qui leur attribue les mêmes gages, 60 livres d’extraordinaires et quelques gratifications lorsque S. M. touche les malades. » V. sur cette cérémonie t. I, p. 21.

21. La Terre et Seigneurie de Cléry, scize à douze lieues de Paris[428], consistant en chasteau pour le Seigneur, et appartement séparé pour le Fermier, clos fermé de murs, jardins, prez, terres, bois, et autres choses en dépendant, mesmes les droits honorifiques, du prix d’environ 25,000 liv.

[428] Il reste de cette seigneurie un hameau du canton de Marines dans l’arrondissement de Pontoise. Les seigneurs de Cléry, qui avoient leur importance dans cette contrée, possédoient aussi un hôtel à Paris, rue Montmartre. C’est sur son emplacement que fut ouverte, en 1633, la rue qui porte encore leur nom. En 1688, quand « la terre et seigneurie » furent mises en vente, comme nous le voyons ici, Claude de Poissy, chevalier, en étoit seigneur.

22. Une belle maison couverte d’ardoise, à porte cochere, scize sur le bord de la rivière entre Brie et Corbeil, tres bien bastie, et où il y a plusieurs beaux et magnifiques logements, avec une chapelle, grande basse cour, jardin, enclos de huit arpens fermé de murs, prez, terre, bois taillis et haute fustaye, canal, vivier, et generalement toutes les autres commoditez qu’on peut souhaiter, du prix d’environ 30,000 liv. On aura au Bureau un estat au long de la dite maison.

23. Une chaise bourgeoise de porteur[429] presque neuve, garnie de brocatelle[430], avec une crépine de soye, d’environ 70 liv.

[429] La chaise de porteur ou à porteur « bourgeoise » se distinguoit des autres parce qu’elle étoit sans armoiries.

[430] Étoffe de fil et de laine, qui se fabriquoit en Flandre et qu’on appeloit aussi soit mazeline, soit étoffe de l’apport-Paris, à cause du grand commerce qui s’en faisoit dans ce quartier-là.

Demandes à achepter.

24. On demande à achetter une maison logeable en fief ou roture[431], avec clos, jardin, prez, terres labourables d’environ 20,000 liv., mais il ne faut pas qu’elle soit plus éloignée de 4, 5 ou 6 lieues de Paris.

[431] C’est-à-dire, sans aucun titre ni droit seigneurial.

25. Une tapisserie verdure, Flandre ou Auvergne[432], de dix huit jusqu’à vingt quatre aulnes de tour plus ou moins, sur deux aulnes et demy d’hauteur, bonne et de hazard.

[432] Les manufactures des tapisseries d’Auvergne étoient une création de Colbert qui faisoit une rude concurrence à celles de Felletin, comme on le voit par un arrêt du Conseil du 21 août 1691 sur les droits d’entrée. Jabach, qui les avoit visitées pour Colbert, en 1688, lui en avoit rendu le meilleur compte. (Corresp. de Colbert, t. V, p. 520.)

26. On demande à achepter une terre en fief à dix ou douze lieues de Paris, où il y ait maison logeable, clos ou jardin, terres labourables, prez et bois, du prix d’environ 5,000 liv.

27. Une tapisserie verdure de Flandre, ou Auvergne, qui ait depuis seize jusqu’à dix huict aulnes de tour, plus ou moins, de l’hauteur ordinaire, avec un bureau propre et en estat de servir à un marchand, le tout bon et de hazard.

28. Une charge chez le Roy de 15,000 à 16,000 liv., à condition que le vendeur se chargera de l’agréément et reception de l’achepteur, et qu’il luy remettra toutes les pièces nécessaires en main.

29. Une maison en fief ou roture qui soit logeable, et où il y a clos ou jardin, prez, terres, vignes et bois, proche la rivière de Seine en montant, ou sur le chemin de Paris à Orléans, distante de Paris depuis cinq jusqu’à huit lieues, et dans l’élection de Paris, d’environ 10,000 liv.

30. Deux garçons allemands de l’âge de vingt deux ans, qui ont fait toutes leurs estudes, et dont l’un sçait jouer du clavessin et du violon, demandent condition, soit valet de chambre[433], ou précepteur pour enseigner le latin et l’allemand[434].

[433] A cette époque, valets de chambre ou laquais jouoient presque tous du violon. De cette façon, lorsqu’ils avoient fini leur service, on savoit, aux dépens de ses oreilles il est vrai, ce qu’ils faisoient. L’Olive, le valet du Grondeur, joue du violon. V. acte I, sc. 1 ; et aussi Lemontey, Hist. de la Régence, t. II, p. 319.

[434] Nos guerres avec l’Allemagne avoient rendu cette étude assez ordinaire dans les grandes familles. La Bruyère, par exemple, savoit l’allemand et l’avoit enseigné à son élève, petit-fils de Condé.

31. Une tapisserie d’Auvergne depuis quatorze jusqu’à dix sept aulnes de tour, plus ou moins, sur deux aulnes et demie d’hauteur, avec un miroir glace de Venize de 25 à 30 pouces de haut, le tout bon et de hazard.

Advis généraux.

Un particulier donne advis au public qu’il possede un secret admirable et indubitable pour guérir toutes sortes de diarées, dissenteries, et flux epatique, qui ne demande a estre satisfait qu’après parfaite guérison des maladies.

Un autre particulier guérit la goute, paralisie, ydropisie, rumatismes, toutes sortes de fièvres, et les maux vénériens, sans qu’on soit obligé de garder la chambre.

Un particulier enseigne le toisé et l’arpentage, les fractions de fractions, le négoce, et change étranger, et l’arithmétique en toutes ses parties pour toutes sortes de professions étrangères, et autres, en un mois de temps, lorsqu’on saura les quatre règles. Plus les rédactions des poids et mesures étrangères, et autres, les évaluations, racine carrée et cube, règles de canonier, de navire et autres vaisseaux, la construction du carré magique[435] par progression géométrique en proportion double, la carte[436], et plusieurs autres sciences, et du tout donne des leçons par écrit.

[435] On appeloit ainsi un carré formé de plusieurs cases, dans lesquelles on plaçoit des nombres dont la somme prise en tous sens étoit la même.

[436] C’est le nom qu’on donnoit à la géographie. Pour dire qu’on l’avoit apprise, on disoit, selon Richelet, qu’on savoit « la carte ». Il est aisé de comprendre, d’après cela, la locution populaire : « perdre la carte ».

Ceux qui auront quelque chose à commercer, vendre, achepter, troquer, ou loüer, prendront la peine s’ils ne veulent pas venir eux mesmes au Bureau, d’envoyer un Laquais avec un Mémoire instructif, et on leur donnera satisfaction.

Ceux qui ont de grandes maisons dans Paris, ou à la campagne, et qui faute de les rendre publiques demeurent à les louer, parce que la pluspart des gens de qualité, et autres, ne lisent pas les affiches qui sont au coing des rues, n’auront qu’à envoyer le mémoire au Bureau, pour estre mis sur la liste.

Les maistres des auberges, des académies, des écoles, des sciences, des messageries, et autres qui souhaitent de rendre leurs establissements publics, n’auront qu’à envoyer au Bureau leurs qualitez, leurs enseignes, lieu et demeure, et l’on les enregistrera, pour estre dans la suite indiquez aux estrangers, et à ceux qui viendront s’en informer au Bureau.

Les Huissiers qui doivent aller en campagne dans les Provinces, viendront le déclarer au Bureau, et l’on leur envoyera les gens qui ont à faire dans les dites provinces pour s’emboucher[437] avec eux[438].

[437] Pour « s’aboucher », mot qui n’avoit encore cours que chez les gens de distinction et dans les livres.

[438] Un passage du Journal de Colletet, à la date du 3 octobre 1676, nous donne l’explication de celui-ci sur les singuliers trafics des Huissiers, qui, lorsque les affaires chômoient à Paris, en achetoient en province pour s’entretenir la main : « Comme il y a, dit Colletet, des gens qui se plaisent dans la sollicitation des affaires, et qui en acheptent mesmes quand les leurs sont finies de peur de languir dans l’oysiveté, et pour y gagner leurs peines : nous leur donnons avis, notamment si ce sont des Huissiers, qui font des courses à la campagne, que nous leur ferons vendre à bon compte divers billets, cédulles et promesses, dont ils pourront faire leur profit, de particuliers encore vivants, deubs pour nourriture, logement et entretien, au payement de quoy plusieurs sont condamnez par sentence des Consuls. »

Ceux qu’ils veulent achepter ou vendre des rentes, emprunter de l’argent et en placer, vendre des maisons et héritages, soit à Paris ou à la campagne, s’adresseront au Bureau.

Ceux qui ont des Bénéfices à permuter et à donner à ferme, des charges à vendre ou à achepter, soit à Paris ou en Province, des bois à couper, des estangs à pescher, et qui font faire des inventaires forcés ou volontaires, prendront la peine de le venir déclarer au Bureau, ou envoyer un Mémoire instructif, et l’on en advertira le public par la liste.

Ceux qui arrivent à Paris, et ceux qui en veulent partir soit pour voyager ou autrement, et qui ont besoin de plusieurs personnes pour faire leur trein, peuvent s’adresser au Bureau, et on leur en envoyera sur le champ de toutes les tailles, qualité et condition qu’ils les demanderont[439].

[439] Sur ces valets de louage, v. plus haut, p. 50.

Ceux qui écriront des lettres au Bureau en acquitteront le port, faute de quoy on ne les recevra point, parce que l’on s’en voit trop chargé jusqu’à présent.

Les Etrangers qui doivent arriver à Paris avec équipage, pourront s’adresser au Bureau, mesme par lettre demander ce qu’ils ont à faire, soit pour logement, domestiques, ou autres choses.

Et généralement tous ceux qui veulent rendre quelque chose publique, chercher ou indiquer, et qui d’ordinaire font mettre des affiches aux coings des rues, qui ne sont veües que de très peu de gens, et d’ailleurs déchirées et recouvertes les unes par les autres en peu de temps, au lieu de faire la depense pour l’affiche, n’auront qu’à envoyer les mémoires au Bureau, et l’on les mettra sur la liste, que l’on imprimera régulièrement tous les quinze jours, et que l’on vendra et distribuera de mesme que les Gazettes[440].

[440] Beaucoup de gens répugnoient à se voir affichés et ne devoient, par suite, recourir qu’avec plus d’empressement aux avantages des feuilles d’adresses. Colletet annonce dans son Journal du 11 sept. 1676 une personne qui étoit dans ce cas. « Honneste homme, dit-il, qui sçait la langue latine et l’italienne de mesme, et qui ne peut se résoudre à voir son nom dans les affiches publiques, s’offre aux honnestes gens qui auront des livres italiens ou manuscrits à traduire fidèlement, d’y travailler quels que difficiles qu’ils soient ; de montrer cette Langue à quiconque désirera l’apprendre… »

On sçaura au Bureau le nom des personnes qui veulent tant vendre qu’achepter.

Le Bureau est dans l’enclos du Palais, Cour de la Moignon, du costé du Quay des Morfondus.

Chargement de la publicité...