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Le livre commode des adresses de Paris pour 1692, tome 2/2

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MARCHANDISES DE PAPETIERS,
CARTIERS ET CARTONNIERS.

Entre les Marchands Papetiers qui font en gros le commerce de Papiers et qui ont de grands magasins, sont, Mrs du Puis rue saint Jacques, Godart et Cousin rue des deux Boules, Melun Cloitre saint Jacques de la Boucherie, Nourry rue des trois Mores[1], etc.

[1] Cette rue peu connue alloit de la rue Trousse-Vache à celle des Lombards. Elle devoit son nom à l’enseigne d’un cabaret où M. de Roquelaure mena un soir Henri IV. (Histor. de Tallemant, édit. P. Paris, t. IV, p. 14 et 16.)

M. Beaumont Cartier du Roy, demeure près la place des Victoires[2], et M. Mathas[3] Cartier de Monsieur, près S. Roch.

[2] « Les sieurs Beaumont, rue Neuve-des-Petits-Champs, et Langlade, rue Platrière, font encore de très-bonnes cartes à jouer. » Édit. de 1691, p. 60. — Sauval, t. I, p. 109, parle de cet Anglade ou Langlade, à propos de la rue du quartier Saint-Roch, à laquelle on croyoit qu’il avoit donné son nom : « Jean Anglade, dit-il, maître cartier à Paris, qui met pour devise sur l’enveloppe de ses cartes :

Jean Anglade je me nomme,
Et vous prie de jouer et n’offenser personne. »

Les fabriques de cartes étoient moins importantes à Paris qu’à Rouen, où toute l’Europe et l’Amérique s’en fournissoient. (Archives curieuses, 2e série, t. XII, p. 230.) A la suite de la révocation de l’Édit, les cartiers rouennais, la plupart protestants, ayant émigré, leur industrie baissa beaucoup. (Segraisiana, p. 40-41.) Il resta ceux de Paris, et ceux de Thiers en Auvergne, célèbres depuis plus d’un siècle. Montaigne, en 1588, visita la fabrique de Palmier, qui l’emportoit sur tous les autres. (V. son Voyage, édition in-12, t. II, p. 598.)

[3] Avant l’art. de Beaumont et Langlade, on trouve dans l’édit. précédente : « le sieur Ouynel, cartier du Roi, demeure près des Bâtons-Royaux. » Ensuite vient Mathan, et non Mathas, comme ici.

M. de la Bourde rue Bourlabé, vend les Cartons dorez pour les Reliquaires, et Mrs Culambourgt rue d’Escosse, Boissiere rue de Versailles[4], la Ruelle rue saint Victor, vendent celuy qui sert aux Relieurs, et d’autres pour differens usages.

[4] L’adresse de ces deux derniers est indiquée dans l’édit. de 1691 : « près le Puits-Certain », qui étoit, en effet, situé à peu de distance de la rue d’Écosse et de la rue de Versailles.

Le même la Ruelle fait grand commerce de Boetes de Carte[5], et d’Estuis de Manchons et de Chapeaux.

[5] C’est ce que nous appelons « cartons de bureau ». La préfecture de police, avant l’incendie de 1871, en possédoit de très-anciens, ceux entre autres qui contenoient les pièces du procès de Cartouche. Ils avoient été vendus par les papetiers des environs du Palais : Picard, à la Vertu ; Gorgeret, à la Grande Vertu. Quand Guyot prit l’enseigne : à la Petite Vertu, ce fut par concurrence à celles-ci, qui n’étoient, au reste, qu’un rébus, comme l’Y de tout-à-l’heure. La Vertu s’y figuroit pour un V voyelle, c’est-à-dire un U, peint en vert.

Les Ecritoires de corne sont fabriquées en gros par les Marchands rue Betizy et rue des deux Boules à l’Empereur, sur le quay neuf à la Renommée, et rue saint Denis au grand Charlemagne[6].

[6] Cet article est différent dans l’édit. de 1691, p. 22 : « les écritoires de corne sont fabriquez par les sieurs Langlois frères, rue Bourlabé. » Ces sortes d’encriers, en usage encore dans notre enfance, servoient surtout aux écoliers. J.-J. Rousseau n’en eut cependant jamais d’autres. L’abbé de Tersan possédoit celui dont il se servoit à la fin de sa vie. Les écritoires à la mode étoient toujours « façon d’ébène », comme du temps de Loret, t. I, p. 244.

Les Dames Futeau, Gamet, Morand, la Bussière et quelques autres[7] qui logent aux environs de saint Hilaire, achetent et vendent toutes sortes de vieux Papiers et Parchemins.

[7] Toutes ces femmes, d’après l’édit. précédente, p. 60, formoient, à ce qu’il paroît, une sorte de Société. Quelques lignes plus loin que leur article s’en trouve un, qui complète celui qui le précède ici. Les mêmes marchands de la rue Bétizy, de la rue des Deux-Boules, etc., y sont indiqués pour la vente en gros, aux marchands, de la cire d’Espagne. On l’appeloit aussi « cire des Indes », suivant l’histoire des Drogues par Pomet, liv. VII. Son nom de cire, soi-disant importée d’Espagne, où, par parenthèse, on ne s’en servoit pas, paroît lui être venu de ce que le premier livre qui en ait parlé étoit d’un Espagnol. C’est le Traité sur les aromates et les simples publié en 1563 par Garcias de Orta.

A la Reigle d’or, place aux Chats près saint Innocent, on trouve un grand assortiment de Papiers reiglez pour la Musique[8].

[8] Plusieurs manuscrits de musique à la Bibliothèque du Conservatoire portent l’adresse de « La Reigle d’or ».

A l’Image saint François, rue saint André du coté du pont saint Michel, il y a un Papetier renommé pour la bonne Encre[9], pour les Canifs fins et pour les Plumes taillées.

[9] On trouve la recette de « cette bonne encre », que le père de Mme Dacier avoit soigneusement transcrite, dans les Mélanges de la Société des Bibliophiles, 1850, in-18, p. 342. Nous ignorons le nom de son inventeur et l’époque de l’invention, mais peut-être étoit-ce la même que « l’encre nouvelle », dont la marchande qui en faisoit commerce « sur le pont », figure, en 1622, parmi les commères des Caquets de l’accouchée. V. notre édit., p. 60.

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